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Document 52014DC0176

RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS sur l'application de la directive 2008/104/CE relative au travail intérimaire

/* COM/2014/0176 final */

52014DC0176

RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS sur l'application de la directive 2008/104/CE relative au travail intérimaire /* COM/2014/0176 final */


RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

sur l’application de la directive 2008/104/CE relative au travail intérimaire

1.           Introduction

1.1.        La directive

La directive 2008/104/CE relative au travail intérimaire[1] (ci-après «la directive») a été adoptée par le Parlement européen et le Conseil en vertu de l’article 137, paragraphe 2, du traité CE (devenu l’article 153, paragraphe 2, du TFUE).

Elle a pour objet d’assurer la protection des travailleurs intérimaires et d’améliorer la qualité du travail intérimaire en assurant le respect du principe de l’égalité de traitement à l’égard des travailleurs intérimaires et en reconnaissant les entreprises de travail intérimaire comme des employeurs, tout en tenant compte de la nécessité d’établir un cadre approprié d’utilisation du travail intérimaire en vue de contribuer efficacement à la création d’emplois et au développement de formes souples de travail.

Plus particulièrement, la directive:

établit le principe de l’égalité de traitement dans les entreprises utilisatrices, tout en permettant certaines dérogations encadrées par de strictes conditions, prévoit un réexamen par les États membres, au cours du délai de transposition, des restrictions et interdictions applicables au travail intérimaire, améliore l’accès des travailleurs intérimaires à un emploi permanent, aux équipements collectifs des entreprises utilisatrices et à la formation, comprend des dispositions sur la représentation des travailleurs intérimaires.

Les services proposés par les entreprises de travail intérimaire sont exclus du champ d’application de la directive 2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur[2]. Celle-ci précise, à l’article 2, paragraphe 2, point e), qu’elle ne s’applique pas aux services des agences de travail intérimaire.

1.2.        Base juridique et objet du rapport

Dans le présent rapport, la Commission réexamine l’application de la directive par les États membres conformément à l’article 12 de la directive:

«Au plus tard le 5 décembre 2013, la Commission réexamine l’application de la présente directive, en consultation avec les États membres et les partenaires sociaux au niveau communautaire, en vue de proposer, en tant que de besoin, les modifications nécessaires.»

L’objectif du rapport est double. D’une part, la Commission y résume la façon dont les États membres ont transposé la directive et indique les principaux problèmes. Elle ne peut cependant présenter dans le détail toutes les mesures d’exécution nationales[3]. D’autre part, elle examine si le bilan de l’application de la directive, deux ans après l’expiration du délai de transposition, justifierait d’éventuelles modifications du texte en vigueur.

La Commission a élaboré le présent rapport en passant en revue les dispositions que les États membres ont adoptées pour transposer la directive. Elle a aussi exploité les réponses qu’elle a reçues à deux questionnaires, l’un sur les options retenues pour transposer la directive en droit national, l’autre sur le réexamen de la directive et sur les questions de coûts.

Les deux questionnaires avaient été envoyés aux États membres; le second avait été, de plus, envoyé aux partenaires sociaux au niveau européen. Pour ce rapport, la Commission a aussi fait appel au groupe d’experts représentant les gouvernements, groupe chargé d’étudier la transposition de la directive, qui a fait participer les partenaires sociaux européens à ses travaux. Le rapport s’appuie en outre sur des informations que la Commission a obtenues par d’autres voies, comme les rapports d’experts indépendants élaborés par le réseau du droit du travail européen (European Labour Law Network).

La partie 5 du rapport repose en grande partie sur les rapports établis par les États membres à l’issue du réexamen par ceux-ci des interdictions et restrictions applicables au travail intérimaire, d’une part, et sur les informations complémentaires fournies par un certain nombre de pays à la demande de la Commission, d’autre part. Cette dernière a aussi exploité d’autres sources, comme les plaintes qu’elle a reçues et les renseignements apportés par les partenaires sociaux européens.

2.           Le processus de transposition de la directive

En vertu de l’article 11, paragraphe 1, de la directive, les États membres étaient tenus de transposer la directive en droit national au plus tard le 5 décembre 2011, soit par l’adoption et la publication des dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive, soit en s’étant assurés que les partenaires sociaux avaient mis en place les dispositions nécessaires par voie d’accord.

Tous les États membres ont transposé la directive. La transposition a souvent été tardive et n’a eu lieu qu’après que la Commission eut lancé des procédures d’infraction. En début 2012, la Commission a envoyé des lettres de mise en demeure à quinze États membres pour non-communication des mesures de transposition. La même année, elle a ensuite envoyé des avis motivés à trois États membres. Dans le dernier État membre à transposer la directive, l’acte de transposition est entré en vigueur le 1er juillet 2013.

La transposition a pris des formes très différentes. Dans certains États membres en effet, le travail intérimaire était déjà réglementé, avant que la directive ne devienne applicable, par la loi ou, plutôt, par des conventions collectives ou par une combinaison des deux. D’autres États membres ne disposaient pas de cadre juridique se rapportant au travail intérimaire et en ont créé un à l’occasion de la transposition de la directive. Certains États membres ont modifié un seul texte de loi, d’autres en ont modifié plusieurs.

Trois États membres (France, Luxembourg et Pologne) ont estimé que leur droit national était déjà conforme à la directive et n’avait pas à être modifié avant l’entrée en vigueur de celle-ci.

3.           Champ d’application et définitions (articles 1er et 3)

3.1.        Application de la directive aux entreprises utilisatrices n’exerçant pas d’activité économique (article 1er, paragraphe 2)

Aux termes de l’article 1er, paragraphe 2, la directive est applicable aux entreprises publiques et privées qui sont des entreprises de travail intérimaire ou des entreprises utilisatrices exerçant une activité économique, qu’elles poursuivent ou non un but lucratif.

Normalement, les entreprises de travail intérimaire satisfont à la condition d’exercice d’une activité économique. Par contre, certaines activités des entreprises utilisatrices, relevant par exemple du secteur public, ne peuvent être considérées comme des activités économiques[4]. Les États membres sont autorisés à exclure du champ d’application de la directive les entreprises utilisatrices n’exerçant pas d’activité économique. Dix-neuf États membres appliquent tout de même la directive à ce type d’entreprises. La Bulgarie, Chypre, le Danemark, l’Irlande, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Roumanie et le Royaume-Uni ont décidé de les exclure du champ d’application de leurs textes de transposition.

Pour l’heure, l’application de cette disposition ne semble pas poser de problème particulier.

3.2.        Dérogation concernant les programmes de formation, d’insertion et de reconversion professionnelles publics spécifiques ou soutenus par les pouvoirs publics (article 1er, paragraphe 3)

L’article 1er, paragraphe 3, autorise les États membres à exclure du champ d’application de leurs textes de transposition, après consultation des partenaires sociaux, les contrats ou relations de travail conclus dans le cadre d’un programme de formation, d’insertion et de reconversion professionnelles public spécifique ou soutenu par les pouvoirs publics.

Une grande majorité des États membres n’ont fait aucunement usage de cette possibilité.

L’Autriche, Chypre, le Danemark, la Hongrie, l’Irlande, Malte et la Suède ont instauré de telles exceptions. À Chypre et en Irlande, le but est de favoriser l’insertion ou la réinsertion professionnelle de certaines catégories de personnes susceptibles de se heurter à des difficultés d’accès au marché du travail. La Suède déroge à la directive dans le cas des travailleurs bénéficiant d’une aide à l’emploi spécifique ou d’un emploi protégé, mais uniquement au regard du principe de l’égalité de traitement. Les dispositions concernant, par exemple, l’accès aux installations et aux équipements collectifs et les informations relatives aux postes vacants dans les entreprises utilisatrices restent applicables à cette catégorie de travailleurs.

Aucune difficulté particulière liée à l’utilisation de cette dérogation ou question de conformité des mesures nationales d’exécution avec la directive n’a été portée à la connaissance de la Commission.

3.3.        Définitions [article 3, paragraphe 1, points a) à e)]

L’article 3, paragraphe 1, points a) à e), définit quelques notions essentielles de la directive: «travailleur», «entreprise de travail intérimaire», «travailleur intérimaire», «entreprise utilisatrice» et «mission».

Plusieurs États membres (Chypre, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lituanie, Malte, Portugal, Royaume-Uni et Suède) ont défini ne serait-ce que certaines de ces notions dans leurs textes de transposition, usant en général d’une formulation très proche de celle de la directive et clarifiant ainsi opportunément la portée des mesures nationales d’exécution. D’autres États membres n’ont pas adopté de définitions correspondantes.

En Lettonie, la loi de transposition prévoit expressément que l’entreprise de travail intérimaire est considérée comme l’employeur du travailleur intérimaire. C’est une précision utile et conforme aux définitions de l’article 3, paragraphe 1, selon lequel un travailleur intérimaire a un contrat de travail ou une relation de travail avec une entreprise de travail intérimaire dans le but d’être mis à la disposition d’une entreprise utilisatrice en vue d’y travailler de manière temporaire sous le contrôle et la direction de ladite entreprise.

4.           Principe de l’égalité de traitement

4.1.        Égalité de traitement au regard des conditions essentielles de travail et d’emploi [article 3, paragraphe 1, point f); article 3, paragraphe 2, premier alinéa; article 5, paragraphe 1]

L’article 5, paragraphe 1, pose le principe de l’égalité de traitement dans les entreprises utilisatrices. Conformément à ce principe, dès le premier jour de leur mission, les travailleurs intérimaires doivent bénéficier des conditions essentielles de travail et d’emploi qui leur seraient applicables s’ils étaient recrutés directement par l’entreprise utilisatrice pour y occuper le même poste. Lesdites conditions englobent la rémunération, la durée du travail, les heures supplémentaires, les temps de pause, les périodes de repos, le travail de nuit, les congés et les jours fériés. Elles s’appliquent aux travailleurs intérimaires dans la mesure où elles constituent des dispositions générales et contraignantes en vigueur dans l’entreprise utilisatrice. Les conditions doivent aussi être conformes aux règles en vigueur dans l’entreprise utilisatrice concernant la protection des femmes enceintes et des mères en période d’allaitement et la protection des enfants et des jeunes, l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes et toutes mesures de lutte contre la discrimination[5].

Le principe de l’égalité de traitement peut admettre certaines dérogations, mais la directive les a assorties de strictes conditions, comme expliqué ci-dessous.

Plusieurs États membres appliquaient déjà le principe de l’égalité de traitement avant l’entrée en vigueur de la directive. À présent, tous y souscrivent. Toutefois, douze États membres autorisent des exceptions à ce principe sous certaines conditions. En outre, la plupart des États membres ont choisi un libellé s’écartant plus ou moins de celui de la directive, notamment pour transposer l’article 5, paragraphe 1, premier alinéa, qui définit le principe de l’égalité de traitement, et l’article 3, paragraphe 1, point f), qui délimite la notion de «conditions essentielles de travail et d’emploi».

Ainsi, en Estonie, l’application du principe de l’égalité de traitement repose sur la notion de «travailleur comparable» dans l’entreprise utilisatrice. S’il n’y a pas de travailleur comparable, c’est la convention collective applicable qui doit servir à la comparaison. S’il n’existe pas non plus de convention collective, le travailleur comparable est un travailleur exerçant le même travail ou un travail similaire dans la même région. En Pologne et au Royaume-Uni aussi, les conditions applicables aux travailleurs intérimaires sont déterminées par une comparaison avec des travailleurs comparables dans l’entreprise utilisatrice.

La Commission vérifiera si dans la pratique, la référence à un travailleur comparable assure la bonne application du principe de l’égalité de traitement ou si elle peut donner lieu à des pratiques discriminatoires envers les travailleurs intérimaires. Au besoin, elle prendra les mesures qui s’imposent pour garantir une entière conformité avec la directive.

La Commission veillera aussi à la bonne application de la notion de «conditions essentielles de travail et d’emploi» dans tous les États membres, notion qui couvre, outre la rémunération, la durée de travail, les heures supplémentaires, les temps de pause, les périodes de repos, le travail de nuit, les congés et les jours fériés. Cette liste ne souffre aucune dérogation.

4.2.        Possibilités de dérogations

4.2.1.     Dérogation prévue à l’article 5, paragraphe 2

Aux termes de l’article 5, paragraphe 2, les États membres peuvent, après consultation des partenaires sociaux, prévoir de déroger à l’égalité de rémunération lorsque les travailleurs intérimaires, liés à l’entreprise de travail intérimaire par un contrat à durée indéterminée (CDI), continuent d’être rémunérés dans la période qui sépare deux missions. Dans leur majorité, les États membres n’ont pas adopté cette dérogation.

La Hongrie, l’Irlande, Malte, le Royaume-Uni et la Suède permettent de déroger à l’égalité de rémunération durant les missions des travailleurs intérimaires en CDI qui sont rémunérés aussi entre les missions, c’est-à-dire quand ils chôment.

En Hongrie, selon le Code du travail, c’est à partir du 184e jour de travail dans une entreprise utilisatrice que les travailleurs intérimaires susmentionnés bénéficient de l’égalité de traitement pour leurs salaires et autres prestations.

En Irlande, la loi sur la protection des travailleurs intérimaires de 2012 ne reconnaît pas aux travailleurs intérimaires en CDI le droit à l’égalité de rémunération durant leurs missions s’ils perçoivent entre les missions une rémunération égale ou supérieure au salaire minimal en vigueur et à la moitié de la rémunération de leur dernière mission. L’entreprise de travail intérimaire doit informer par écrit le travailleur intérimaire qu’il ne bénéficiera pas de l’égalité de rémunération avant d’avoir signé le contrat d’emploi.

Des dispositions similaires existent au Royaume-Uni, où le règlement sur les travailleurs intérimaires de 2010 écarte les travailleurs intérimaires qui répondent aux critères de l’article 5, paragraphe 2, de ses dispositions sur l’égalité de traitement concernant la rémunération et les congés payés. Entre deux missions, les travailleurs intérimaires sont en droit de percevoir au moins 50 % du salaire de base qu’ils touchaient pendant les douze dernières semaines de la mission précédente et, en tout état de cause, le salaire minimal en vigueur. Le contrat de travail doit comporter une clause informant le travailleur intérimaire qu’il ne bénéficiera pas de l’égalité de rémunération.

À Malte, le règlement relatif aux travailleurs intérimaires de 2010 précise que la disposition introduisant l’égalité de rémunération ne s’applique pas à un travailleur intérimaire en CDI rémunéré entre deux missions.

En Suède, en application de la loi transposant la directive, l’égalité de rémunération n’est pas imposée pour les travailleurs en CDI dans une entreprise de travail intérimaire qui sont rémunérés entre deux missions.

Ainsi, les cinq États membres susmentionnés dérogent au principe de l’égalité de rémunération durant les périodes d’affectation des travailleurs intérimaires à des entreprises utilisatrices. À l’exception des salaires minimaux en vigueur, aucun d’entre eux n’a adopté de règles qui limiteraient l’ampleur de cette dérogation en instaurant, par exemple, une rémunération minimale à cet effet. En ce qui concerne les périodes entre les missions, la Hongrie, Malte et la Suède n’ont pas fixé de rémunération minimale à respecter. À Malte toutefois, les travailleurs intérimaires ont droit à la même rémunération pendant et entre les missions.

L’article 5, paragraphe 2, déroge au principe de l’égalité de traitement et doit donc être interprété de manière restrictive. Il ne concerne pas les travailleurs intérimaires sous contrat à durée déterminée et ne peut donc être appliqué qu’aux personnes en CDI.

Sur plusieurs points, l’interprétation de la dérogation, telle qu’elle transparaît dans les mesures nationales d’exécution de l’article 5, paragraphe 2, est sujette à caution, s’agissant notamment de la possibilité légale de fixer la rémunération des travailleurs intérimaires pendant et entre les missions au même niveau que le salaire minimal en vigueur, le cas échéant, alors que les salaires minimaux n’ont pas de limite inférieure. Les mesures destinées à éviter un recours abusif à la dérogation doivent aussi être examinées.

Ces questions devraient être étudiées en profondeur par le groupe d’experts sur la transposition de la directive lors de futures réunions. En tout état de cause, la Commission prendra les mesures appropriées pour assurer que tous les États membres se conforment à la directive dans son intégralité.

4.2.2.     Dérogation prévue à l’article 5, paragraphe 3

En vertu de l’article 5, paragraphe 3, les États membres peuvent, après avoir consulté les partenaires sociaux, permettre à ceux-ci de maintenir ou de conclure des conventions collectives relatives aux conditions de travail et d’emploi des travailleurs intérimaires qui dérogent au principe de l’égalité de traitement si ces conventions garantissent la protection globale des travailleurs intérimaires. Il convient de lire l’article 5, paragraphe 3, à la lumière de l’article 2, paragraphe 2, de la directive 91/383/CEE[6] sur la sécurité et la santé au travail des travailleurs ayant une relation de travail à durée déterminée ou une relation de travail intérimaire. Selon cette disposition, on ne saurait justifier une différence de traitement à l’égard d’un travailleur qui a une relation de travail intérimaire avec une entreprise de travail intérimaire lorsque cette différence touche les conditions de travail et met en jeu la protection de la sécurité et de la santé au travail.

Dans leur majorité, les États membres ont décidé de ne pas appliquer la dérogation de l’article 5, paragraphe 3. Quoi qu’il en soit, ce paragraphe introduit une marge de manœuvre qui reflète la coutume de certains États membres de laisser principalement à des conventions collectives le soin de réglementer le travail intérimaire. Dix États membres (Allemagne, Autriche, Bulgarie, Danemark, Finlande, Hongrie, Irlande, Italie, Pays-Bas et Suède) ont adopté des dispositions permettant aux conventions de travail collectives de déroger au principe de l’égalité de traitement des travailleurs intérimaires. L’Autriche, l’Irlande et la Suède précisent que ces conventions collectives doivent être judicieusement modulées de façon à ne pas porter préjudice à la protection globale des travailleurs intérimaires.

Pour l’instant, la Commission n’a pas eu connaissance de problèmes particuliers quant à l’application de cette disposition. Elle surveillera le respect de la «protection globale des travailleurs intérimaires» dans tous les cas et, singulièrement, lorsque cette notion est absente des mesures nationales d’exécution.

4.2.3.     Dérogation prévue à l’article 5, paragraphe 4.

Selon l’article 5, paragraphe 4, les États membres dans lesquels il n’existe pas de système conférant aux conventions collectives un caractère universellement applicable ou dans lesquels il n’existe pas de système permettant d’étendre les dispositions de ces conventions à toutes les entreprises similaires d’une zone géographique ou d’un secteur donné, peuvent, sur la base d’un accord conclu avec les partenaires sociaux nationaux, déroger au principe de l’égalité de traitement en ce qui concerne les conditions essentielles de travail et d’emploi des travailleurs intérimaires, pour autant qu’un niveau de protection suffisant leur soit assuré. Ils peuvent notamment prévoir un délai d’accès au principe de l’égalité de traitement.

Seuls le Royaume-Uni et Malte ont fait usage de l’article 5, paragraphe 4. Au Royaume-Uni, les travailleurs intérimaires bénéficient pleinement de l’égalité de traitement dans une entreprise utilisatrice après y avoir occupé le même emploi pendant douze semaines. À Malte, le principe de l’égalité de traitement ne s’applique pas à la rémunération durant les quatre premières semaines des missions d’au moins quatorze semaines.

Il appartient aux États membres appliquant l’article 5, paragraphe 4, de préciser si les régimes professionnels de sécurité sociale, y compris les régimes de retraite, d’assurance maladie et de participation financière, font partie des conditions essentielles de travail et d’emploi. Le Royaume-Uni et Malte ont ainsi exclu ces régimes des conditions essentielles de travail et d’emploi auxquelles les travailleurs intérimaires ont droit.

De plus, l’article 5, paragraphe 5, impose aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour éviter le recours abusif à l’application de l’article 5 et, en particulier, l’attribution de missions successives dans le but de contourner les dispositions de la directive. Le risque de contournement du principe de l’égalité de traitement et de rémunération est particulièrement élevé si ce principe s’applique non dès le premier jour de la mission des travailleurs intérimaires, mais après un délai d’accès.

Le Royaume-Uni a adopté des mesures détaillées pour éviter toute application abusive de sa législation, en précisant, par exemple, qu’en cas d’interruption inférieure ou égale à six semaines dans le déroulement d’une mission, le délai d’accès ne repart pas à zéro. À Malte, si un travailleur intérimaire qui n’a pas bénéficié de l’égalité de rémunération pendant les quatre premières semaines de sa mission est remplacé, le travailleur intérimaire qui le remplace en bénéficie dès le premier jour de sa mission.

5.           Réexamen des interdictions et restrictions concernant le recours aux travailleurs intérimaires (article 4)

5.1.        Objet de l’article 4

Selon l’article 4, les interdictions ou restrictions concernant le recours aux travailleurs intérimaires sont uniquement justifiées par des raisons d’intérêt général tenant, notamment:

— à la protection des travailleurs intérimaires,

— aux exigences de santé et de sécurité au travail,

— à la nécessité d’assurer le bon fonctionnement du marché du travail,

— à la nécessité d’empêcher les abus.

Les États membres avaient l’obligation, après consultation des partenaires sociaux, de réexaminer les interdictions et restrictions pour vérifier si elles restaient justifiées par des raisons d’intérêt général et d’informer la Commission du résultat de ce réexamen avant l’expiration du délai de transposition (le 5 décembre 2011). Dans le cas des interdictions et restrictions prévues par des conventions collectives, le réexamen pouvait être effectué par les partenaires sociaux qui avaient négocié la convention.

Comme indiqué dans le rapport des services de la Commission de 2011 relatif aux travaux du groupe d’experts sur la transposition de la directive, le réexamen doit porter sur toutes les mesures, comme celles établies par les dispositions législatives, réglementaires et administratives, appliquées dans les États membres et visant à circonscrire le travail intérimaire ou ayant cet effet.

De plus, l’article 4, paragraphe 4, précise que les dispositions de l’article 4 sont «sans préjudice des exigences nationales en matière d’enregistrement, d’agrément, de certification, de garantie financière ou de contrôle des entreprises de travail intérimaire». Par conséquent, les restrictions relevant de l’une de ces catégories qui ont trait à l’accès des entreprises de travail intérimaire au marché et à l’exercice de leurs activités ne sont pas sujettes au réexamen obligatoire des restrictions et interdictions.

L’article 4 réduit donc l’éventail de justifications que les États membres peuvent avancer pour restreindre le recours au travail intérimaire. L’article 4, paragraphe 1, s’impose à tous les États membres. Ils peuvent décider à leur guise, selon le contexte national, de la méthode appropriée pour l’appliquer. Le respect de l’article 4, paragraphe 1, n’est assorti d’aucun délai. L’article 4 oblige les États membres à réexaminer les interdictions et restrictions concernant le recours aux travailleurs intérimaires, à informer la Commission du résultat du réexamen et à justifier les interdictions et restrictions par des raisons d’intérêt général.

5.2.        Résultats du réexamen par les États membres

Tous les États membres ont informé la Commission de leur position quant au réexamen des restrictions et interdictions concernant le recours au travail intérimaire.

Vingt-quatre États membres ont rapporté le résultat du réexamen qu’ils ont effectué. Quatre (Irlande, Luxembourg, Malte et Royaume-Uni) ont déclaré qu’aucune restriction ou interdiction n’existait chez eux. Ils n’ont donc pas procédé au réexamen.

Ayant observé la situation de l’Irlande, de Malte et du Royaume-Uni, la Commission n’a pas relevé de restriction ou d’interdiction spécifique qui imposerait à ces États membres de dûment réexaminer les dispositions concernées. Au Luxembourg, la Commission a relevé dans la législation en vigueur des restrictions qui touchent, par exemple, à la durée des missions ou qui introduisent une liste des raisons permettant le recours au travail intérimaire. Par conséquent, le Luxembourg devrait réexaminer les interdictions et restrictions existantes après consultation des partenaires sociaux, conformément à l’article 4, paragraphe 2, de la directive.

Les rapports des vingt-quatre États membres sur le résultat du réexamen des interdictions et restrictions sont de formes et de longueurs très diverses. Dans la plupart des cas, ils ont été complétés par des informations spécifiques plus précises à la demande de la Commission.

Cette diversité est en partie imputable aux situations très différentes d’un État membre à un autre. Dans l’ensemble, le travail intérimaire ne concerne qu’une faible proportion des travailleurs salariés, mais il est beaucoup plus répandu dans certains pays que dans d’autres. Quelques États membres ont réglementé le travail intérimaire dès les années soixante (Pays-Bas) ou soixante-dix (France, Allemagne, Royaume-Uni). D’autres l’ont fait beaucoup plus récemment, parfois à l’occasion même de la transposition de la directive. En outre, bien que le nombre de travailleurs intérimaires soit relativement modeste, on ne peut nier l’importance de cette forme souple de travail dans le fonctionnement des marchés du travail nationaux. Tous les États membres suivent une politique de l’emploi qui leur est propre, en favorisant plus ou moins, par exemple, la souplesse du marché du travail. Ces choix se répercutent sur le rôle et la place du travail intérimaire dans leurs marchés du travail respectifs.

Cinq États membres (Danemark, Estonie, Lettonie, Lituanie et Slovaquie) ont signalé dans leur rapport sur le résultat du réexamen qu’ils n’appliquaient pas d’interdictions ou de restrictions concernant le recours au travail intérimaire.

En outre, plusieurs États membres ont communiqué à la Commission les dispositions nationales mentionnées à l’article 4, paragraphe 4, de la directive et se rapportant, par exemple, à l’enregistrement et aux garanties financières des entreprises de travail intérimaire. Or ces dispositions n’étaient soumises à aucune obligation de réexamen.

5.2.1.     Justification des interdictions et restrictions par des raisons d’intérêt général

Les États membres ne peuvent appliquer des interdictions et restrictions concernant le recours au travail intérimaire qu’en les justifiant par des raisons d’intérêt général, comme expliqué au point 5.1 supra. En mentionnant «la protection des travailleurs intérimaires, [les] exigences de santé et de sécurité au travail ou (…) la nécessité d’assurer le bon fonctionnement du marché du travail, et d’empêcher les abus», l’article 4, paragraphe 1, de la directive dresse une liste indicative et non exhaustive des raisons qui peuvent justifier des interdictions ou restrictions.

Les États membres étaient tenus de justifier auprès de la Commission, avant l’expiration du délai de transposition, les interdictions et restrictions qu’ils appliquaient. Ils ont énuméré un certain nombre d’interdictions et de restrictions et, dans la grande majorité des cas, les ont justifiées par une ou plusieurs des raisons d’intérêt général mentionnées à l’article 4, paragraphe 1. Quand ils estimaient qu’une même justification pouvait s’appliquer à plusieurs mesures restrictives, ils se contentaient de cette justification commune.

Dans l’ensemble et à quelques exceptions près, les États membres n’ont fourni que des justifications très générales des dispositions restrictives en vigueur, et ce même après que la Commission eut requis des explications complémentaires sur les raisons d’intérêt général justifiant, selon les autorités nationales, les interdictions et restrictions restées en vigueur.

Les États membres ont avant tout repris les justifications énumérées à l’article 4, paragraphe 1, de la directive.

Un certain nombre d’États membres – comme l’Allemagne, la Belgique, la Bulgarie, la Croatie, la France, la Grèce, la Hongrie, l’Italie, la Pologne, le Portugal, la République tchèque et la Slovénie – ont mis en exergue «la protection des travailleurs intérimaires» pour expliquer et justifier certaines interdictions ou restrictions en place.

C’est ainsi l’une des justifications qu’a données l’Allemagne pour les restrictions applicables au secteur du bâtiment. La Pologne a déclaré que la période limitée durant laquelle il était permis à un travailleur intérimaire de travailler dans une même entreprise utilisatrice était à mettre en relation avec le caractère temporaire des tâches que ces travailleurs étaient censés effectuer et contribuait à la protection de ces derniers.

Beaucoup d’États membres – comme la Belgique, la Bulgarie, l’Espagne, la France, la Grèce, la Hongrie, l’Italie, la Pologne, le Portugal, la République tchèque et la Slovénie – ont invoqué «les exigences de santé et de sécurité au travail» pour justifier des restrictions, voire une interdiction totale du recours aux travailleurs intérimaires quand les tâches à exécuter comportent des risques spécifiques pour la santé et la sécurité des travailleurs. Certains États membres ont avancé cette justification en liaison avec d’autres justifications énumérées à l’article 4, paragraphe 1, notamment la protection des travailleurs intérimaires (Croatie, Portugal, Slovénie).

La Slovénie a limité la possibilité qu’avaient les conventions collectives sectorielles d’interdire le recours au travail intérimaire aux seuls cas où cette interdiction vise à garantir une meilleure protection des travailleurs, de leur santé et de leur sécurité.

Il convient de lire l’article 4, paragraphe 1, à la lumière de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/383/CEE sur la sécurité et la santé au travail des travailleurs ayant une relation de travail à durée déterminée ou une relation de travail intérimaire. Aux termes de celui-ci, les États membres ont la faculté d’interdire qu’il soit fait appel à des travailleurs intérimaires «pour certains travaux particulièrement dangereux pour la sécurité ou la santé de ces travailleurs (…) et notamment pour certains travaux qui font l’objet d’une surveillance médicale spéciale (…)». En l’absence de toute définition, en droit européen, de la notion de travail particulièrement dangereux pour la sécurité ou la santé des travailleurs, c’est aux États membres qu’il revient de déterminer les activités concernées, sous le contrôle de la Cour de justice.

Plusieurs États membres – notamment la Belgique, la Bulgarie, la France, l’Italie, la Pologne, le Portugal, la République tchèque, la Roumanie et la Suède – ont invoqué «la nécessité d’assurer le bon fonctionnement du marché du travail» pour justifier des restrictions telles qu’une liste limitative des raisons permettant le recours à des travailleurs intérimaires (France, Italie, Pologne), des plafonds ou quotas limitant le nombre de travailleurs intérimaires par entreprise utilisatrice (Belgique, Italie), l’obligation pour l’employeur de négocier avec une organisation de travailleurs avant de faire appel à des travailleurs intérimaires (Suède). Plusieurs États membres (Allemagne, Belgique, Bulgarie, Grèce, Italie, Pologne, République tchèque, Suède) ont justifié des interdictions ou restrictions touchant au travail intérimaire par «la nécessité d’empêcher les abus». Cette justification a été associée à des mesures aussi diverses que des restrictions quant à la nature des tâches pouvant être attribuées aux travailleurs intérimaires (Italie, Pologne), la possibilité pour des conventions collectives nationales de fixer des limites quantitatives à la conclusion de contrats à durée déterminée pour le travail intérimaire (Italie) ou l’obligation faite aux entreprises utilisatrices, dans certains cas, d’obtenir le consentement de la représentation syndicale avant d’avoir recours au travail intérimaire (Belgique).

La «nécessité d’empêcher les abus» a parfois été combinée à d’autres justifications énumérées à l’article 4, paragraphe 1, de la directive, notamment la nécessité d’assurer le bon fonctionnement du marché du travail (Italie, Pologne, Suède).

Les États membres ont par ailleurs avancé les arguments ci-après pour justifier les interdictions et restrictions en vigueur.

Parmi les États membres interdisant le remplacement des travailleurs exerçant leur droit de grève par des travailleurs intérimaires (Autriche, Belgique, Bulgarie, Croatie, Espagne, France, Grèce, Hongrie, Italie, Pologne, Slovénie), quatre (Belgique, Grèce, Hongrie et Italie) ont explicitement invoqué la protection du droit de grève. Plusieurs ont fait référence au considérant 20 de la directive, selon lequel les dispositions portant sur les restrictions ou interdictions concernant le recours au travail intérimaire «sont sans préjudice des législations ou pratiques nationales interdisant de remplacer des travailleurs en grève par des travailleurs intérimaires». Certains (Belgique, France, Grèce, Pologne) ont légitimé diverses mesures restrictives par la nécessité de protéger l’emploi permanent et d’éviter qu’on puisse affecter à un poste permanent des travailleurs embauchés avec un statut temporaire. Ils ont ainsi eu recours à cette justification pour limiter la durée des missions et expliquer l’existence d’une liste de raisons permettant le recours au travail intérimaire, comme le remplacement d’un travailleur absent, l’augmentation temporaire du volume de travail ou l’exécution de tâches exceptionnelles ou saisonnières. L’Autriche a justifié l’application de quotas limitant à 10 % ou à 15 % la proportion, dans une entreprise utilisatrice, de travailleurs intérimaires exerçant certaines professions de santé par la protection de la vie et de la santé humaines.

À l’occasion du réexamen des interdictions ou restrictions touchant au travail intérimaire, les États membres auraient pu envisager de renoncer à certaines interdictions et restrictions justifiées à l’origine par le souci de protéger les travailleurs intérimaires. La Roumanie, par exemple, où une liste limitative des raisons permettant le recours au travail intérimaire était en vigueur, a maintenant rendu possible le recours à cette forme de travail «pour l’exécution de tâches temporaires spécifiques». La Suède a supprimé depuis le 1er janvier 2013 l’interdiction de mettre un travailleur intérimaire à la disposition de son ancien employeur pendant six mois après la fin du contrat de travail. En Belgique, le recours aux travailleurs intérimaires est maintenant autorisé sous certaines conditions à des fins d’intégration, c’est-à-dire dans la perspective d’un éventuel recrutement direct du travailleur par l’entreprise utilisatrice.

Même si certaines interdictions ou restrictions touchant au travail intérimaire ont été supprimées, le réexamen n’a pas, jusqu’à présent, modifié de manière significative la portée des mesures restrictives appliquées par les États membres. Mais dans un certain nombre d’entre eux, ces interdictions et restrictions et leurs justifications font toujours l’objet de discussions, notamment avec les partenaires sociaux, l’objectif étant d’y apporter d’éventuels ajustements. Aussi le réexamen des interdictions et restrictions est-il toujours en cours dans plusieurs États membres tels que la Belgique, la Grèce ou les Pays-Bas.

Quoi qu’il en soit, en indiquant que les interdictions ou restrictions sont uniquement justifiées par des raisons d’intérêt général, l’article 4, paragraphe 1, autorise les États membres à maintenir des interdictions ou restrictions fondées sur de tels motifs. De l’avis de la Commission, si ces mesures restrictives sont le fruit de choix stratégiques reposant sur des raisons légitimes et sont proportionnées à leur objectif, elles semblent justifiées par des raisons d’intérêt général, sous réserve d’un examen plus approfondi au cas par cas.

La protection des travailleurs intérimaires, les exigences de santé et de sécurité au travail, la nécessité d’assurer le bon fonctionnement du marché du travail et d’empêcher les abus peuvent justifier certaines interdictions ou restrictions touchant au travail intérimaire. D’autres raisons d’intérêt général peuvent aussi justifier des mesures restrictives si elles sont légitimes et proportionnées à leur objectif. Les États membres peuvent légiférer sur les différentes formes de travail, y compris sur le travail intérimaire, et assurer le bon fonctionnement du marché du travail en privilégiant leurs choix stratégiques à condition de respecter la directive relative au travail intérimaire et les autres textes et principes du droit européen, comme la libre prestation de services, la liberté d’établissement et les mesures de lutte contre la discrimination.

Les interdictions ou restrictions qui impliquent une discrimination à l’égard des travailleurs intérimaires ne sauraient être considérées comme justifiées par des raisons d’intérêt général. Ainsi, l’interdiction d’employer des personnes handicapées en tant que travailleurs intérimaires n’est justifiable ni par la nécessité d’assurer le bon fonctionnement du marché du travail, ni par la protection de ces personnes ni par les exigences de santé et de sécurité au travail.

5.2.2.     Consultation des partenaires sociaux

Comme indiqué au point 5.1., les États membres étaient dans l’obligation de consulter les partenaires sociaux avant de réexaminer les interdictions et restrictions. En outre, lorsque les interdictions et restrictions étaient prévues par des conventions collectives, les partenaires sociaux qui avaient négocié ces conventions pouvaient réaliser le réexamen.

Les États membres qui ont réexaminé les interdictions et des restrictions en vigueur ont associé les partenaires sociaux de différentes manières, reflétant ainsi la diversité de leurs marchés du travail et des relations socioprofessionnelles dans l’Union européenne.

On peut les classer en trois groupes:

les États membres où les partenaires sociaux ont été consultés dans le cadre du réexamen des interdictions et restrictions (Allemagne, Belgique, Croatie, France, Grèce, Hongrie, Italie, Pologne et Portugal). Certains ont, à des degrés variables, transmis à la Commission les avis des partenaires sociaux (Belgique, Grèce, Pologne et Portugal), les États membres où le réexamen a surtout été l’œuvre des partenaires sociaux eux-mêmes, parce que la plupart des interdictions et restrictions étaient le fait de conventions collectives (Danemark, Finlande, Pays-Bas et Suède). La Finlande et la Suède ont communiqué à la Commission les avis des partenaires sociaux, les États membres où les partenaires sociaux ont été consultés dans le cadre de l’adoption des mesures nationales d’exécution (Autriche, Bulgarie, Chypre, Espagne, Estonie, Lettonie, Lituanie, République tchèque, Roumanie et Slovénie).

En général, les différentes manières dont les partenaires sociaux ont été associés au réexamen semblent reproduire leurs statuts et leurs rôles inégaux selon les pays. La Commission retire de la lecture des avis des partenaires sociaux qui lui ont été envoyés la nette impression qu’on aurait pu leur accorder plus de poids. Cependant, à l’exception du Luxembourg, la consultation des partenaires sociaux semble avoir eu lieu conformément à l’article 4, paragraphe 2.

6.         Accès à l’emploi, aux équipements collectifs et à la formation professionnelle — représentation des travailleurs intérimaires — information des représentants des travailleurs (articles 6, 7 et 8)

6.1.        Accès à l’emploi, aux équipements collectifs et à la formation professionnelle (article 6)

L’article 6 améliore l’accès des travailleurs intérimaires à l’emploi permanent, aux équipements collectifs et à la formation professionnelle. Il prévoit notamment, au paragraphe 1, que les travailleurs intérimaires sont informés des postes vacants dans l’entreprise utilisatrice. Au paragraphe 4, il dispose, que les travailleurs intérimaires ont le droit d’accéder, dans l’entreprise utilisatrice, aux installations et aux équipements collectifs, notamment aux services de restauration, aux infrastructures d’accueil des enfants et aux services de transport dans les mêmes conditions que les autres, à moins qu’une différence de traitement ne soit justifiée par des raisons objectives. Au paragraphe 5, il incite les États membres, ou les partenaires sociaux, à améliorer l’accès des travailleurs intérimaires à la formation dans les entreprises de travail intérimaire et les entreprises utilisatrices.

L’article 6, paragraphe 1, a été transposé presque tel quel dans un certain nombre d’États membres. Il ne semble pas présenter de problèmes particuliers pour le moment.

En ce qui concerne l’article 6, paragraphe 4, quatorze pays (Allemagne, Autriche, Belgique, Chypre, Danemark, Finlande, Grèce, Irlande, Lettonie, Lituanie, Malte, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suède), c’est-à-dire la moitié des États membres, ont déclaré avoir transposé la possibilité de déroger à l’égalité d’accès aux installations et équipements collectifs de l’entreprise utilisatrice quand la différence de traitement est justifiée par des raisons objectives. Dans la plupart des cas, le libellé des dispositions nationales est presque identique à celui de la directive. La Commission rappelle que les différences de traitement revenant à accorder aux travailleurs intérimaires des conditions moins favorables qu’aux salariés de l’entreprise utilisatrice devraient faire figure d’exception. Que de nombreux États membres aient transposé cette possibilité ne signifie pas forcément qu’elle soit appliquée dans la pratique.

L’article 6, paragraphe 5, incite les partenaires sociaux à jouer un rôle majeur dans l’amélioration de l’accès des travailleurs intérimaires à la formation et aux infrastructures d’accueil des enfants des entreprises de travail intérimaire et aux formations destinées aux salariés des entreprises utilisatrices. L’application de cette disposition ne semble pas poser problème. À Malte, les travailleurs intérimaires jouissent du même accès à la formation professionnelle que les salariés de l’entreprise utilisatrice, sauf si une différence de traitement est justifiée par des raisons objectives.

6.2.        Représentation des travailleurs intérimaires (article 7)

L’article 7 dispose que pour le calcul du seuil au-dessus duquel les instances représentatives des travailleurs doivent être constituées, il faut compter les travailleurs intérimaires dans l’entreprise de travail intérimaire, dans l’entreprise utilisatrice ou dans les deux.

Dans la plupart des États membres, les travailleurs intérimaires sont pris en compte dans l’entreprise de travail intérimaire qui les emploie (Bulgarie, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, Hongrie, Irlande, Italie, Lituanie, Malte, Pologne, République tchèque, Royaume-Uni, Slovénie et Suède) ou à la fois dans cette entreprise et dans l’entreprise utilisatrice de leur affectation (Allemagne, Autriche, Chypre, France, Grèce, Luxembourg, Pays-Bas, Portugal et Slovaquie). Dans trois États membres seulement (Belgique, Lettonie et Roumanie), ils ne sont pris en compte que dans l’entreprise utilisatrice.

Certains États membres ont établi des modalités spécifiques quant à la prise en compte des travailleurs intérimaires. Ainsi, la Bulgarie part du nombre moyen de travailleurs intérimaires employés par l’entreprise de travail intérimaire au cours des douze mois précédents. En Belgique, le calcul repose sur le nombre moyen de travailleurs intérimaires mis à la disposition d’une entreprise utilisatrice au cours du trimestre précédent, mais il ne tient pas compte des travailleurs intérimaires qui remplacent de fait des membres du personnel permanent.

Aucune difficulté particulière issue de la transposition de l’article 7 n’a été portée à la connaissance de la Commission.

6.3.        Information des représentants des travailleurs (article 8)

Aux termes de l’article 8, l’entreprise utilisatrice doit fournir des informations appropriées sur le recours aux travailleurs intérimaires en son sein lors de la transmission d’informations sur la situation de l’emploi dans l’entreprise aux instances représentatives des travailleurs.

Dans certains États membres, des obligations précises incombent aux entreprises utilisatrices. Ainsi, en Grèce, l’entreprise utilisatrice est tenue de fournir des informations sur le nombre de travailleurs intérimaires auxquels elle a recours, mais aussi sur ses projets en la matière et sur les perspectives d’une embauche directe de ces personnes. En France et au Luxembourg, les représentants du personnel peuvent avoir accès aux contrats conclus entre l’entreprise utilisatrice et l’entreprise de travail intérimaire pour la mise à disposition de travailleurs.

Aucun problème particulier touchant à l’application de cette disposition n’a pour l’instant été porté à la connaissance de la Commission.

7.           Sanctions (article 10)

Un premier examen des textes de transposition adoptés par les États membres montre que les sanctions indiquées renvoient, en général, à des dispositions nationales qui ne font pas partie de ces textes (par exemple, gestion d’une entreprise de travail intérimaire sans autorisation valable, manquement à l’obligation de notifier aux pouvoirs publics les contrats de travail conclus par l’entreprise, etc.). Cette analyse devra être approfondie dans les mois à venir, pour vérifier notamment l’utilisation de ces sanctions dans le champ d’application de la directive. Comme très peu d’États membres ont transmis des tables de concordance, il n’a pas encore été possible d’obtenir une idée de la situation au niveau national.

8.           Coûts liés à la réglementation

La directive a été classée parmi les textes de la législation européenne les plus contraignants par les PME et les organisations de PME qui ont répondu à une consultation publique en ligne réalisée par la Commission d’octobre à décembre 2012[7]. Les résultats ont été publiés dans le document de travail de la Commission du 7 mars 2013 accompagnant la communication sur la réglementation intelligente[8].

La communication de la Commission du 18 juin 2013[9] sur la suite donnée à la consultation «Top 10» des PME sur la réglementation de l’Union a montré que les reproches portaient essentiellement sur les obstacles actuels à l’activité des entreprises de travail intérimaire et sur l’obligation pour ces entreprises de s’enregistrer chaque fois qu’elles souhaitent exercer dans un autre État membre. La Commission précisait qu’elle tiendrait compte dans le présent rapport des préoccupations des PME et des aspects liés à la charge réglementaire.

Dès lors, la Commission a envoyé un questionnaire aux États membres et aux partenaires sociaux au niveau européen pour recueillir leur point de vue sur la question des coûts liés à la directive.

La Commission a demandé en premier lieu si la directive faisait peser une charge administrative significative sur les autorités publiques nationales et si les États membres avaient évalué ces coûts.

Sur les vingt-sept États membres qui ont répondu, tous sauf deux ont indiqué que la directive elle-même n’avait pas créé de charge administrative significative pour les autorités nationales ou qu’ils n’avaient pas évalué cet aspect concret. La Belgique a évoqué le coût administratif significatif du réexamen des interdictions et restrictions. Le Royaume-Uni avait publié avant la transposition de la directive une analyse selon laquelle la répercussion de la hausse des rémunérations coûterait au total entre 157 et 259 millions de livres sterling par an aux utilisateurs du secteur public, mais ce chiffre n’a pas été mis à jour. Aucun État membre n’a évalué la charge administrative créée par la directive.

La Commission a également demandé si les dispositions de fond de la directive engendraient des coûts significatifs ou des obstacles majeurs pour les entreprises de travail intérimaire ou les entreprises utilisatrices et si ces coûts avaient été évalués.

Quelques États membres ont constaté que la directive créait des coûts mineurs pour les entreprises de travail intérimaire (Allemagne, Autriche) ou pour les entreprises utilisatrices (Allemagne, Finlande, Pologne), alors que le Royaume-Uni a mis en avant la hausse des coûts salariaux pour les entreprises utilisatrices et les coûts des obligations d’information incombant aux deux types d’entreprises. Les autres États membres ne relèvent pas de coûts significatifs, pas plus que d’obstacles pour les agences ou les utilisateurs. Aucun État membre n’a d’informations récentes sur le montant des coûts concernés.

Chypre a indiqué que, pour l’instant, aucune entreprise de travail intérimaire n’était en activité sur son territoire.

Quant aux partenaires sociaux européens, BusinessEurope a évoqué des coûts importants de mise en conformité des entreprises de travail intérimaire dans certains États membres et des coûts sociaux considérables résultant d’une application réduite ou nulle de l’article 4. Eurociett a mentionné une augmentation des coûts pour les agences dans des pays tels que le Royaume-Uni et l’Irlande et a déclaré accepter et valider cette augmentation dans la mesure où elle avait soutenu l’adoption de la directive. Elle a aussi évoqué les coûts liés à la transposition insuffisante de certaines dispositions de la directive, tandis que, d’après le CEEP[10], la directive a sensiblement accru les coûts pour les employeurs, surtout lorsque l’égalité de traitement n’était pas appliquée avant la transposition de la directive. Toutefois, aucun de ces organismes représentant les employeurs n’a quantifié les coûts évoqués. L’UEAPME[11] n’a pas eu connaissance de règles particulièrement coûteuses pour les entreprises utilisatrices.

La CES[12] a déclaré que l’article 12 de la directive, qui est la base juridique du présent rapport, ne faisait pas mention d’une évaluation des coûts et qu’il n’existait aucune étude montrant une augmentation des coûts des entreprises de travail intérimaire à la suite de la transposition de la directive. Selon UNI-Europa, les coûts ne gênent l’activité ni des entreprises de travail intérimaire ni des entreprises utilisatrices.

À la question de savoir s’il existe des informations sur les coûts supportés par les PME et les micro-entreprises, aucun État membre n’a répondu par l’affirmative. L’Allemagne a déclaré que la directive entraînait des coûts pour les entreprises de travail intérimaire comme pour les entreprises utilisatrices. De l’avis de l’Autriche et de la Belgique, la directive ne peut être considérée comme particulièrement contraignante pour les PME.

Les partenaires sociaux européens n’ont pas fourni d’informations à ce sujet. La CES a jugé inopportun de fonder de futurs travaux sur les résultats de la consultation «Top 10».

De plus, plusieurs États membres consultés ont fait remarquer que toute évaluation globale des coûts résultant de la directive devrait mettre en regard de ces coûts les avantages qu’elle apporte.

9.           Relation entre la directive relative au travail intérimaire et d’autres actes législatifs de l’Union

Aux termes de l’article 3, paragraphe 2, second alinéa, les États membres n’excluent pas du champ d’application de la directive les travailleurs ou les relations de travail uniquement du fait qu’il s’agit de travailleurs à temps partiel, de travailleurs à durée déterminée ou de personnes ayant une relation de travail avec une entreprise de travail intérimaire. Cette disposition indique clairement que les travailleurs intérimaires ayant un temps partiel ou un contrat à durée déterminée (CDD) ne peuvent pas être exclus du champ d’application de la directive 2008/104/CE sur la base de leur profil «atypique».

La Cour de justice a confirmé que la directive 1999/70/CE sur le travail à durée déterminée ne s’applique pas à une relation de travail à durée déterminée entre un travailleur intérimaire et une entreprise de travail intérimaire[13]. Par conséquent, même si les travailleurs intérimaires sont en CDD, leur relation de travail triangulaire ne relève pas de la directive sur le travail à durée déterminée, qui s’applique seulement aux relations de travail directes entre un employeur et un travailleur.

En ce qui concerne la relation entre la directive 2008/104/CE relative au travail intérimaire et la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs[14], le considérant 22 de la directive 2008/104/CE précise qu’elle devrait s’appliquer dans le respect des dispositions du traité sur la libre prestation de services et la liberté d’établissement et sans préjudice de la directive 96/71/CE. La directive relative au travail intérimaire couvre en principe les situations nationales, tandis que la directive concernant le détachement de travailleurs traite spécifiquement des situations transfrontières. La directive relative au travail intérimaire s’applique dans son intégralité aux travailleurs mobiles, qui travaillent dans un État membre autre que le leur comme s’ils en étaient ressortissants, tandis que la directive concernant le détachement de travailleurs s’applique uniquement aux travailleurs détachés, c’est-à-dire ceux qui exercent leur travail pour une période limitée dans un autre État membre que celui dans lequel ils travaillent habituellement.

Aux termes de son article 1er, paragraphe 3, point c), la directive concernant le détachement de travailleurs s’applique notamment à l’entreprise de travail intérimaire ou à l’entreprise qui met un travailleur à disposition, quand elle détache un travailleur à une entreprise utilisatrice établie ou exerçant son activité sur le territoire d’un État membre, pour autant qu’il existe une relation de travail entre l’entreprise de travail intérimaire ou l’entreprise qui met un travailleur à disposition et le travailleur pendant la période de détachement.

Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, de ladite directive, en ce qui concerne les travailleurs détachés, certaines conditions de travail et d’emploi – dont «les taux de salaire minimal, y compris ceux majorés pour les heures supplémentaires» et «les conditions de mise à disposition des travailleurs, notamment par des entreprises de travail intérimaire» – doivent être assurées dans la mesure où elles sont établies par la loi ou par des conventions collectives d’application générale. Comme indiqué au considérant 22 de la directive 2008/104/CE, les dispositions précitées de la directive concernant le détachement des travailleurs prévalent sur les dispositions de la directive relative au travail intérimaire. Toutefois, les États membres peuvent établir que les travailleurs intérimaires détachés sur leur territoire doivent bénéficier d’un traitement égal au regard des conditions qui sont applicables aux travailleurs intérimaires dans l’État membre sur le territoire duquel le travail est exécuté, conformément à l’article 3, paragraphe 9, de la directive concernant le détachement des travailleurs.

10.         Modifications envisageables

Dans le questionnaire visé au point 8, il était aussi demandé si, au vu de l’expérience acquise depuis l’entrée en vigueur de l’intégralité de la directive en décembre 2011, les objectifs de politique sociale énoncés à son article 2 avaient été atteints.

Conformément à l’article 12, le présent rapport doit signaler toute modification de la directive qui semblerait pertinente. La Commission a également demandé dans le questionnaire s’il y avait lieu de clarifier des dispositions de la directive, et, dans l’affirmative, lesquelles, et quels étaient les problèmes rencontrés.

En réponse à la première question, la plupart des États membres ont jugé que la directive avait atteint ses objectifs de politique sociale ou qu’elle représentait une étape importante dans l’édification d’une Europe sociale. Une minorité a souligné des difficultés pratiques rencontrées pour des raisons n’étant pas liées à la directive même (Slovaquie, Slovénie), mais aucun État membre n’a répondu que les objectifs de la directive n’avaient pas été atteints. La Bulgarie a estimé qu’il était difficile de répondre à la question parce que l’implantation d’entreprises de travail intérimaire sur son territoire était trop récente, tandis que le Royaume-Uni n’avait pas de données lui permettant de répondre à la question. En l’absence d’entreprises de travail intérimaire sur son territoire, Chypre ne pouvait répondre non plus.

Pour BusinessEurope et Eurociett, en revanche, les objectifs de cette directive n’ont pas été pleinement atteints. Ces organisations ont répondu qu’il restait beaucoup de restrictions injustifiées du travail intérimaire dans certains États membres et que certaines avaient même été introduites récemment. Elles donnaient l’exemple d’interdictions sectorielles, de limitations abusives de la durée des missions, de raisons trop restreintes imposées pour le recours au travail intérimaire et de quotas portant sur le nombre maximal de travailleurs intérimaires. Selon elles, de telles restrictions devraient être levées. Pour leur part, l’UEAPME et, dans une moindre mesure, le CEEP, ont estimé que la directive avait rempli ses objectifs de politique sociale.

La CES a indiqué que le délai fixé pour la transposition de la directive n’était arrivé à échéance que depuis relativement peu de temps, que de nombreux États membres avaient procédé à une transposition tardive et qu’il était donc trop tôt pour évaluer convenablement la situation au niveau national. Selon UNI-Europa, les objectifs énoncés à l’article 2 de la directive avaient déjà été en grande partie atteints par la réglementation nationale de la plupart des États membres avant l’entrée en vigueur de la directive.

En réponse à la seconde question, la grande majorité des États membres ont estimé qu’à ce stade les dispositions de la directive ne nécessitaient ni clarification ni révision. Pour la Bulgarie et la Pologne, il est prématuré d’aborder ces questions. Chypre et la Bulgarie ont rappelé leur manque d’expérience pratique du travail intérimaire. Le Portugal a souligné qu’il fallait surtout garantir la bonne transposition de la directive dans tous les États membres.

La Finlande a répondu que l’article 4 de la directive n’était pas clair, notamment sur le point de savoir s’il obligeait les États membres à adopter des dispositions nationales conformément à l’article 4, paragraphe 1, avec mention des raisons qui pouvaient justifier des interdictions ou restrictions en matière de recours au travail intérimaire.

Selon BusinessEurope, la directive n’a pas besoin d’une révision, mais d’une application correcte de son article 4 dans les États membres où subsistent des obstacles injustifiés au recours au travail intérimaire. BusinessEurope a invité la Commission à adopter une communication portant sur l’interprétation de l’article 4 et à préconiser la levée des restrictions injustifiées dans les recommandations par pays ou, au besoin, à lancer des procédures d’infraction. Eurociett ne juge pas non plus nécessaire de réviser la directive. Cela dit, elle pourrait envisager une révision limitée et conditionnelle de l’article 4 si l’application de celui-ci ne pouvait être sensiblement améliorée. L’UEAPME ne juge pas nécessaire de réviser la directive à ce stade, tandis que le CEEP considère qu’il faut clarifier certaines mesures nationales d’exécution plutôt que la directive elle-même.

Selon la CES, il est trop tôt pour dire si la directive doit être révisée, compte tenu de la tardiveté de sa transposition dans un certain nombre d’États membres. Toutefois, elle estime que les dérogations au principe de l’égalité de traitement posent vraiment un problème, s’agissant surtout de l’application de l’article 5, paragraphe 2, dans certains États membres.

Selon UNI-Europa, la directive devrait être révisée. Elle estime que les dérogations prévues à l’article 5, paragraphes 3) et 4), doivent être supprimées parce qu’elles sont tout à fait contraires au principe de l’égalité de traitement. Par ailleurs, en l’absence de toute limitation des missions successives, il conviendrait de clarifier la notion de «recours abusif à l’application de l’article 5».

11.         Conclusions

L’objectif de la directive est d’atteindre un juste équilibre entre, d’une part, l’amélioration de la protection des travailleurs intérimaires, notamment en établissant le principe de l’égalité de traitement, et, d’autre part, le soutien du rôle positif que le travail intérimaire peut jouer en apportant plus de souplesse au marché du travail.

La Commission est consciente de l’ampleur du travail accompli pour transposer la directive, surtout dans les États membres qui ne possédaient pas de réglementation spécifique au travail intérimaire ou qui inscrivaient pour la première fois le principe de l’égalité de traitement dans leur droit.

La présente analyse montre qu’en général les dispositions de la directive semblent avoir été correctement transposées et appliquées, mais aussi que le double objectif de la directive n’a pas encore été totalement atteint. Ainsi, l’ampleur du recours à certaines dérogations au principe de l’égalité de traitement peut, dans des cas spécifiques, aboutir à une situation où l’application de la directive n’améliore pas vraiment la protection des travailleurs intérimaires. Par ailleurs, le réexamen des interdictions et restrictions touchant au travail intérimaire a servi, dans la majorité des cas, à légitimer le statu quo plutôt qu’à permettre de repenser le rôle du travail intérimaire dans un marché du travail moderne et souple.

La Commission continuera à suivre de près l’application de la directive en tenant compte de l’évolution du droit du travail et du travail intérimaire pour garantir que son but est bien atteint et que ses dispositions sont correctement et intégralement transposées dans tous les États membres. Pour ce faire, elle travaillera en relation avec les États membres et les partenaires sociaux dans le cadre du groupe de travail chargé du suivi de l’application de la directive, ainsi que dans d’autres enceintes.

De plus, la Commission a l’intention de traiter de la façon qui conviendra les problèmes d’application de la directive en usant, si nécessaire, de procédures d’infraction. En outre, les plaintes qu’elle reçoit à l’encontre d’États membres, les pétitions et les questions préjudicielles envoyées à la Cour de justice peuvent constituer une source d’information importante sur les mesures ou pratiques nationales qui ne seraient pas conformes à la directive.

Si, dans le cadre du semestre européen, la Commission constate, dans son évaluation des entraves nationales à l’activité des entreprises de travail intérimaire, que certains aspects liés à la charge réglementaire constituent des obstacles à la croissance et à la compétitivité, elle envisagera d’inclure des recommandations aux États membres dans les mesures propres à chaque pays qu’elle proposera.

Il faut davantage de temps avant de pouvoir dresser un bilan d’application de la directive, déterminer si celle-ci a pleinement atteint ses objectifs et juger de l’opportunité d’y apporter des modifications. Son délai de transposition a expiré en décembre 2011 et un certain nombre de mesures nationales d’exécution n’ont été adoptées qu’au printemps 2013. La jurisprudence de la Cour de justice ne contient encore aucune référence à son application.

Dans ce contexte, au vu de sa propre évaluation de l’application de la directive et des avis exprimés par les États membres et par les partenaires sociaux européens pendant le processus de consultation du présent rapport, la Commission est d’avis qu’aucune modification n’est encore nécessaire.

Document de travail des services de la Commission joint:

— Vue d’ensemble des options retenues par les États membres pour la transposition de la directive en droit national

— Vue d’ensemble des rapports des États membres sur le résultat du réexamen des interdictions et restrictions concernant le recours au travail intérimaire

[1] Directive 2008/104/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative au travail intérimaire, JO L 327 du 5.12.2008, p. 9.

[2] Directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, JO L 376 du 27.12.2006, p. 36.

[3] Aucun élément de ce rapport ne doit être compris comme préjugeant de la position que la Commission pourrait adopter à l’avenir dans une procédure judiciaire, quelle qu’elle soit.

[4] Conformément aux règles du TFUE sur le marché intérieur, toute prestation de service rémunérée doit être regardée comme une activité économique. Selon la jurisprudence de la Cour de justice, le service ne doit pas nécessairement être payé par ceux qui en bénéficient, mais la prestation de ce service implique l’existence d’une contrepartie économique. Les activités qui sont accomplies sans contrepartie, par exemple par l’État ou pour le compte de l’État dans le cadre de ses missions dans le domaine social (comme les cours dispensés dans le cadre du système d’éducation nationale ou dans un institut d’enseignement supérieur dont le financement est assuré, pour l’essentiel, par des fonds publics) ne constituent pas des activités économiques [voir le document de travail des services de la Commission intitulé «Guide relatif à l’application aux services d’intérêt économique général, et en particulier aux services sociaux d’intérêt général, des règles de l’Union européenne en matière d’aides d’État, de “marchés publics” et de “marché intérieur”», SEC(2010)1545 final du 7.12.2010, notamment les points 6.1 à 6.3].

[5] Aux fins du présent rapport, la conformité aux directives ci-après n’a pas été examinée: directive 92/85/CEE du Conseil du 19 octobre 1992 concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail, JO L 348 du 28.11.1992, p. 1; directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail, JO L 204 du 26.7.2006, p. 23; directive 2000/43/CE du Conseil du 29 juin 2000 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique, JO L 180 du 19.7.2000, p. 22; directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, JO L 303 du 2.12.2000, p. 16.

[6] Directive 91/383/CEE du Conseil du 25 juin 1991 complétant les mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé au travail des travailleurs ayant une relation de travail à durée déterminée ou une relation de travail intérimaire, JO L 206 du 29.7.1991, p. 19.

[7] Sur un total de 995 répondants, dont 768 PME établies sur le territoire de l’Union ou organismes représentant les intérêts des PME dans l’Union, 59 ont désigné la directive 2008/104/CE comme étant l’un des actes les plus contraignants de la législation européenne.

[8] Document de travail des services de la Commission, «Monitoring and Consultation on Smart Regulation for SMEs», SWD(2013) 60 final, accompagnant la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, «Réglementation intelligente — Répondre aux besoins des petites et moyennes entreprises», COM(2013) 122 final.

[9] Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, «Suite donnée par la Commission à la consultation “Top 10” des PME sur la réglementation de l’UE», COM(2013) 446 final du 18 juin 2013.

[10] Centre européen de l’entreprise publique.

[11] Union européenne de l’artisanat et des petites et moyennes entreprises.

[12] Confédération européenne des syndicats.

[13] Arrêt du 11 avril 2013 dans l’affaire C-290/12, Oreste Della Rocca/Poste Italiane SpA.

[14] Directive 96/71/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services, JO L 18 du 21.1.1997, p. 1.

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