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Document 62011CJ0610

Arrêt de la Cour (quatrième chambre) du 26 septembre 2013.
Centrotherm Systemtechnik GmbH contre Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).
Pourvoi – Procédure de déchéance – Marque verbale communautaire CENTROTHERM – Usage sérieux – Moyens de preuve – Déclaration sur l’honneur – Charge de la preuve – Examen d’office des faits – Éléments de preuve complémentaires produits devant la chambre de recours – Règlement (CE) no 207/2009 – Articles 15, 51 et 76 – Règlement (CE) no 2868/95 – Règle 40, paragraphe 5.
Affaire C‑610/11 P.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2013:593

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

26 septembre 2013 ( *1 )

«Pourvoi — Procédure de déchéance — Marque verbale communautaire CENTROTHERM — Usage sérieux — Moyens de preuve — Déclaration sur l’honneur — Charge de la preuve — Examen d’office des faits — Éléments de preuve complémentaires produits devant la chambre de recours — Règlement (CE) no 207/2009 — Articles 15, 51 et 76 — Règlement (CE) no 2868/95 — Règle 40, paragraphe 5»

Dans l’affaire C‑610/11 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 25 novembre 2011,

Centrotherm Systemtechnik GmbH, établie à Brilon (Allemagne), représentée par Mes A. Schulz et C. Onken, Rechtsanwälte, ainsi que par M. F. Schmidt, Patentanwalt,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant:

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider, en qualité d’agent,

partie défenderesse en première instance,

centrotherm Clean Solutions GmbH & Co. KG, établie à Blaubeuren (Allemagne), représentée par Mes O. Löffel et P. Lange, Rechtsanwälte,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, président de chambre, MM. J. Malenovský, U. Lõhmus, M. Safjan et Mme A. Prechal (rapporteur), juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: M. K. Malacek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 7 février 2013,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 16 mai 2013,

rend le présent

Arrêt

1

Par son pourvoi, Centrotherm Systemtechnik GmbH (ci-après «Centrotherm Systemtechnik») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 15 septembre 2011, Centrotherm Systemtechnik/OHMI – centrotherm Clean Solutions (CENTROTHERM) (T-434/09, Rec. p. II-6227, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation partielle de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 25 août 2009 (affaire R 6/2008-4) (ci-après la «décision litigieuse»), relative à une procédure de déchéance introduite par centrotherm Clean Solutions GmbH & Co. KG (ci-après «centrotherm Clean Solutions») à l’encontre de la marque verbale communautaire CENTROTHERM dont est titulaire Centrotherm Systemtechnik.

2

Il convient de relever, par ailleurs, que, le 15 septembre 2011, le Tribunal a également rendu, dans une affaire parallèle opposant les mêmes parties et mettant aussi en cause la décision litigieuse, son arrêt centrotherm Clean Solutions/OHMI – Centrotherm Systemtechnik (CENTROTHERM) (T-427/09, Rec. p. II-6207), par lequel cette juridiction a accueilli le recours de centrotherm Clean Solutions tendant à l’annulation partielle de cette décision.

3

Ledit arrêt a fait l’objet d’un pourvoi introduit par Centrotherm Systemtechnik (affaire C‑609/11 P).

Le cadre juridique

Le règlement (CE) no 207/2009

4

Le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1), a opéré une codification du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), et a abrogé celui-ci.

5

Le considérant 10 du règlement no 207/2009 énonce:

«Il n’est justifié de protéger les marques communautaires et, contre celles-ci, toute marque enregistrée qui leur est antérieure, que dans la mesure où ces marques sont effectivement utilisées.»

6

L’article 15 du règlement no 207/2009 dispose, sous l’intitulé «Usage de la marque communautaire»:

«1.   Si, dans un délai de cinq ans à compter de l’enregistrement, la marque communautaire n’a pas fait l’objet par le titulaire d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, ou si un tel usage a été suspendu pendant un délai ininterrompu de cinq ans, la marque communautaire est soumise aux sanctions prévues au présent règlement, sauf juste motif pour le non-usage.

[…]»

7

Figurant dans la section 4, intitulée «Observations de tiers et opposition», du titre IV, intitulé «Procédure d’enregistrement», du règlement no 207/2009, l’article 42 de celui-ci prévoit, sous l’intitulé «Examen de l’opposition»:

«1.   Au cours de l’examen de l’opposition, l’[OHMI] invite les parties, aussi souvent que cela est nécessaire, à présenter, dans un délai qu’il leur impartit, des observations sur les communications émanant des autres parties ou de lui-même.

2.   Sur requête du demandeur, le titulaire d’une marque communautaire antérieure qui a formé opposition apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande de marque communautaire, la marque communautaire antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage, pour autant qu’à cette date la marque antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins. À défaut d’une telle preuve, l’opposition est rejetée. […]

[…]»

8

Figurant dans la section 2, intitulée «Causes de déchéance», du titre VI intitulé «Renonciation, déchéance et nullité», du règlement no 207/2009, l’article 51 de celui-ci, lui-même intitulé «Causes de déchéance», dispose:

«1.   Le titulaire de la marque communautaire est déclaré déchu de ses droits, sur demande présentée auprès de l’[OHMI] ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon:

a)

si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, et qu’il n’existe pas de justes motifs pour le non-usage; […]

[…]

2.   Si la cause de déchéance n’existe que pour une partie des produits ou des services pour lesquels la marque communautaire est enregistrée, le titulaire n’est déclaré déchu de ses droits que pour les produits ou les services concernés.»

9

Figurant dans la section 5, intitulée «Procédure de déchéance et de nullité devant l’[OHMI]», du titre VI du règlement no 207/2009, l’article 57 de celui-ci, intitulé «Examen de la demande», prévoit:

«1.   Au cours de l’examen de la demande en déchéance ou en nullité, l’[OHMI] invite les parties, aussi souvent qu’il est nécessaire, à présenter, dans un délai qu’il leur impartit, leurs observations sur les notifications qu’il leur a adressées ou sur les communications qui émanent des autres parties.

2.   Sur requête du titulaire de la marque communautaire, le titulaire d’une marque communautaire antérieure, partie à la procédure de nullité, apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la date de la demande en nullité, la marque communautaire antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans la Communauté pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels la demande en nullité est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage, pour autant qu’à cette date la marque communautaire antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins. […] À défaut d’une telle preuve, la demande en nullité est rejetée. […]

[…]»

10

Figurant dans la section 1, intitulée «Dispositions générales», du chapitre IX, intitulé «Dispositions de procédure», du règlement no 207/2009, l’article 76 de celui-ci énonce, sous l’intitulé «Examen d’office des faits»:

«1.   Au cours de la procédure, l’[OHMI] procède à l’examen d’office des faits; toutefois, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, l’examen est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties.

2.   L’[OHMI] peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile.»

11

Aux termes de l’article 78, paragraphe 1, du règlement no 207/2009:

«Dans toute procédure devant l’[OHMI], les mesures d’instruction suivantes peuvent notamment être prises:

[…]

f)

les déclarations écrites faites sous serment ou solennellement ou qui ont un effet équivalent d’après la législation de l’État dans lequel elles sont faites.»

Le règlement (CE) no 2868/95

12

La règle 22 du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement no 40/94 (JO L 303, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 1041/2005 de la Commission, du 29 juin 2005 (JO L 172, p. 4, ci-après le «règlement no 2868/95»), énonce à ses paragraphes 2 à 4:

«2.

Si l’opposant doit apporter la preuve de l’usage de la marque ou de l’existence de justes motifs pour son non-usage, l’[OHMI] l’invite à le faire dans un délai qu’il lui impartit. Si l’opposant ne fournit pas cette preuve dans le délai imparti, l’[OHMI] rejette l’opposition.

3.

Les indications et les preuves à produire afin de prouver l’usage de la marque comprennent des indications sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque antérieure pour les produits et services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ces indications devant être fournies, preuves à l’appui, conformément au paragraphe 4.

4.

Les preuves sont produites conformément aux règles 79 et 79 bis et se limitent, en principe, à la production de pièces justificatives comme, par exemple, des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article [78], paragraphe 1, point f), du [règlement no 207/2009].»

13

Aux termes de la règle 40 du règlement no 2868/95:

«1.

Toute demande en déchéance ou en nullité qui est réputée avoir été déposée est notifiée au titulaire de la marque communautaire. Si l’[OHMI] juge la demande recevable, il invite le titulaire de la marque communautaire à déposer ses observations dans le délai qu’il lui impartit.

2.

Si le titulaire ne présente aucune observation, l’[OHMI] peut statuer sur la déchéance ou la nullité en fonction des preuves dont il dispose.

3.

L’[OHMI] communique au demandeur toute observation du titulaire de la marque communautaire et l’invite, s’il le juge nécessaire, à présenter ses observations en réponse dans un délai qu’il détermine.

4.

Sauf dispositions contraires de la règle 69, toutes les observations déposées par les parties sont communiquées à l’autre partie concernée.

5.

Dans le cas d’une demande en déchéance fondée sur l’article [51], paragraphe 1, point a), du [règlement no 207/2009], l’[OHMI] demande au titulaire de la marque communautaire la preuve de l’usage de la marque au cours d’une période qu’il précise. Si la preuve n’est pas apportée dans le délai imparti, la déchéance de la marque communautaire est prononcée. La règle 22, paragraphes 2, 3 et 4, s’applique mutatis mutandis.

6.

Si le demandeur doit apporter la preuve de l’usage ou de l’existence de justes motifs pour le non-usage au titre de l’article [57], paragraphes 2 ou 3, du règlement [no 207/2009], l’[OHMI] invite le demandeur à prouver l’usage de la marque au cours d’une période qu’il précise. Si la preuve n’est pas apportée dans le délai imparti, la demande en nullité est rejetée. La règle 22, paragraphes 2, 3 et 4, s’applique mutatis mutandis

Les antécédents du litige

14

Les antécédents du litige ont été exposés par le Tribunal aux points 1 à 13 de l’arrêt attaqué dans les termes suivants:

«1

Le 7 septembre 1999, [Centrotherm Systemtechnik] a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’[OHMI] en vertu du règlement [no 40/94].

2

La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal CENTROTHERM.

3

Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 11, 17, 19 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié […]

4

La marque CENTROTHERM a été enregistrée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus, le 19 janvier 2001, en tant que marque communautaire.

5

Le 7 février 2007, [centrotherm Clean Solutions] a déposé auprès de l’OHMI, en vertu de l’article 15 et de l’article 50, paragraphe 1, sous a), du règlement no 40/94 [devenus article 15 et article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009], une demande en déchéance de la marque CENTROTHERM pour tous les produits et les services enregistrés.

6

La demande en déchéance a été notifiée le 15 février 2007 à [Centrotherm Systemtechnik] qui a été invitée à présenter d’éventuelles observations et preuves de l’usage sérieux de la marque litigieuse dans un délai de trois mois.

7

Dans ses observations du 11 mai 2007, [Centrotherm Systemtechnik] a contesté la demande en déchéance et a, afin de démontrer l’usage sérieux de sa marque, produit les éléments suivants:

quatorze photographies numériques;

quatre factures;

une déclaration, intitulée ‘eidesstattliche Versicherung’ (déclaration sur l’honneur), établie par M. W., en sa qualité de gérant de [Centrotherm Systemtechnik].

8

[Centrotherm Systemtechnik] a déclaré être en possession de nombreuses autres copies de factures qu’elle renonçait à présenter, dans un premier temps, pour des raisons de confidentialité. Affirmant pouvoir produire d’autres documents, elle a prié la division d’annulation de l’OHMI de prendre une mesure procédurale en conséquence, au cas où elle souhaiterait que d’autres preuves et documents individuels soient versés au dossier.

9

Le 30 octobre 2007, la division d’annulation a prononcé la déchéance de la marque CENTROTHERM en constatant que les éléments de preuve fournis par [Centrotherm Systemtechnik] n’étaient pas suffisants pour démontrer l’usage sérieux de ladite marque.

10

Le 14 décembre 2007, [Centrotherm Systemtechnik] a formé un recours contre cette décision, auquel la quatrième chambre de recours de l’OHMI a partiellement fait droit par [la décision litigieuse]. [Centrotherm Systemtechnik] a notamment fait valoir que la division d’annulation aurait dû lui demander d’autres documents d’information. Elle a également reproché à la division d’annulation de ne pas avoir tenu compte des éléments figurant dans le dossier d’une autre affaire également pendante devant l’OHMI concernant la marque CENTROTHERM.

11

La chambre de recours a annulé la décision de la division d’annulation et rejeté la demande en déchéance pour les produits ‘conduites d’échappement pour le chauffage, carneaux de cheminées, tuyaux de chaudières de chauffage; appliques pour becs de gaz; pièces mécaniques d’installations de chauffage; pièces mécaniques d’installations à gaz; robinets pour tuyauteries; tiroirs de cheminées’, relevant de la classe 11, ‘raccords pour tuyaux, manchons pour tuyaux, armatures pour conduites, tuyaux, les articles précités non métalliques’, relevant de la classe 17, et ‘tuyaux, canalisations, en particulier pour la construction; tuyaux de dérivation; tuyaux de cheminées’, relevant de la classe 19. La chambre de recours a rejeté le recours pour le surplus.

12

En particulier, la chambre de recours a considéré que la preuve de l’usage sérieux de la marque CENTROTHERM, s’agissant de la période de cinq ans précédant la présentation de la demande en déchéance, à savoir le 7 février 2007 (ci-après la ‘période pertinente’), pour les produits mentionnés au point 11 ci-dessus avait été apportée, dès lors que les photographies fournies par [Centrotherm Systemtechnik] démontraient la nature de l’usage de la marque et que les factures produites attestaient que les produits mentionnés avaient été commercialisés sous la marque litigieuse.

13

Cependant, la chambre de recours a considéré que [Centrotherm Systemtechnik] avait uniquement apporté la déclaration de son gérant à titre de preuve concernant les autres produits et services pour lesquels la marque CENTROTHERM avait été enregistrée (voir point 3 ci-dessus), ce qui ne suffirait pas, d’après la chambre de recours, pour démontrer l’usage sérieux de la marque. À cet égard, la chambre de recours a fait observer que la division d’annulation n’était tenue ni de demander d’autres documents ni de prendre en considération le dossier d’une autre affaire également pendante devant l’OHMI.»

15

Il convient de compléter l’exposé des antécédents du litige ainsi effectué par le Tribunal par les précisions suivantes.

16

Il ressort du point 36 de la décision litigieuse que, s’agissant des éléments de preuve complémentaires produits par Centrotherm Systemtechnik devant la chambre de recours, cette dernière a considéré qu’une telle «preuve complémentaire a été produite tardivement et ne saurait être prise en considération», dès lors que «le délai visé à la règle 40, paragraphe 5, deuxième phrase, du [règlement no 2868/95] est un délai de forclusion dont le non-respect entraîne la déchéance de la marque, conformément à la règle 40, paragraphe 5, troisième phrase, [dudit règlement]». Au point 37 de cette décision, la chambre de recours a ajouté, à cet égard, que même en admettant que la chambre de recours, en vertu de l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, apprécie librement la pertinence d’une prise en compte des preuves produites tardivement, la raison pour laquelle elle devrait exercer ce pouvoir en faveur de la requérante n’apparaissait pas en l’espèce. Ladite chambre a précisé que celle-ci, à cet égard, n’avait avancé que des arguments généraux sur le rôle et la valeur du droit de marque et qu’elle n’avait pas invoqué l’impossibilité de produire la preuve de l’usage dès la première instance.

L’arrêt attaqué

17

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 26 octobre 2009, Centrotherm Systemtechnik a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse pour autant que celle-ci avait fait droit à la demande en déchéance de la marque CENTROTHERM.

18

À l’appui de son recours, Centrotherm Systemtechnik a invoqué trois moyens, tirés, premièrement, d’une appréciation erronée des preuves de l’usage produites devant la division d’annulation de l’OHMI, deuxièmement, de la violation de l’obligation d’examiner d’office les faits, conformément à l’article 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, et, troisièmement, de l’absence de prise en compte, en violation de l’article 76, paragraphe 2, de ce règlement, des preuves produites devant la chambre de recours. À titre subsidiaire, Centrotherm Systemtechnik a invoqué une exception d’illégalité à l’encontre de la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95.

19

Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté ledit recours.

20

Dans le cadre de l’examen du premier moyen, le Tribunal s’est, aux points 21 à 24 de l’arrêt attaqué, tout d’abord, référé à l’objectif de la sanction de déchéance ainsi qu’aux règles de procédure et aux principes relatifs à l’administration de la preuve y afférents, tels qu’ils ressortent, en particulier, de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009 et de la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95.

21

Aux points 25 à 30 de cet arrêt, le Tribunal a, ensuite, fait état de divers éléments de jurisprudence relatifs à la notion d’usage sérieux et aux conditions dans lesquelles un tel usage peut être considéré comme établi.

22

Après avoir indiqué, au point 31 de l’arrêt attaqué, que c’était à la lumière de l’ensemble des considérations ainsi rappelées aux points 21 à 30 de cet arrêt qu’il convenait d’apprécier si c’était à juste titre que la chambre de recours avait considéré, dans la décision litigieuse, que les éléments de preuve produits par Centrotherm Systemtechnik devant la division d’annulation ne démontraient pas un usage sérieux de la marque litigieuse en ce qui concerne les produits et les services autres que ceux cités au point 11 dudit arrêt, le Tribunal a précisé, aux points 32 à 34 du même arrêt, ce qui suit:

«32

Il y a lieu de rappeler que les éléments de preuve fournis par la requérante à la division d’annulation pour démontrer l’usage sérieux de sa marque sont la déclaration sur l’honneur de son gérant, quatre factures et quatorze photographies numériques.

33

À titre liminaire, il importe de relever qu’il est de jurisprudence constante que, pour apprécier la valeur probante de ‘déclarations écrites faites sous serment ou solennellement ou qui ont un effet équivalent d’après la législation de l’État dans lequel elles sont faites’ au sens de l’article 78, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009, il y a lieu de vérifier la vraisemblance et la véracité de l’information qui y est contenue en tenant compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration, de son destinataire et de se demander si, d’après son contenu, ledit document semble sensé et fiable […]

34

Il convient dès lors de considérer que, compte tenu des liens flagrants qui unissent l’auteur de la déclaration et la requérante, une valeur probante ne saurait être attribuée à ladite déclaration que si elle est corroborée par le contenu des quatorze photographies et des quatre factures présentées.»

23

Aux points 35 à 43 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a, dans la perspective ainsi annoncée au point 34 de cet arrêt, procédé à un examen des factures et des photographies produites par Centrotherm Systemtechnik devant la division d’annulation de l’OHMI. Dans ce cadre, le Tribunal a notamment relevé ce qui suit, aux points 36 et 37 dudit arrêt:

«36

Ces factures font état de ce que de multiples produits ayant trait à la plomberie (tuyaux, manchons, ensembles pour raccordement de chaudière, coudes de révision, caches pour systèmes d’échappement) ont été vendus par la requérante à quatre clients pour une somme qui correspond, en incluant la facture de 2007, à moins de 0,03 % du chiffre d’affaires que le gérant de la requérante a déclaré avoir réalisé en 2006 avec la vente de produits sous la marque CENTROTHERM.

37

Il s’ensuit que, devant l’OHMI, la requérante a apporté des preuves de vente relativement faibles par rapport à la somme indiquée dans la déclaration de son gérant. Partant, même dans l’hypothèse où la chambre de recours aurait pris en compte ladite déclaration, il conviendrait de constater qu’il n’y a pas suffisamment d’éléments dans le dossier étayant le contenu de celle-ci en ce qui concerne la valeur des ventes. De plus, s’agissant de l’aspect temporel de l’usage de la marque, lesdites factures portent sur une période très brève, voire ponctuelle, à savoir les 12, 18 et 21 juillet 2006 et le 9 janvier 2007.»

24

Au terme de son examen ayant porté sur les factures et les photographies produites, le Tribunal a conclu, aux points 44 et 45 de l’arrêt attaqué, ce qui suit:

«44

Il découle de ce qui précède que ni les photographies ni les factures ne permettent de corroborer la déclaration du gérant de la requérante, dans la mesure où celui-ci affirme que les produits suivants ont été commercialisés sous la marque CENTROTHERM pendant la période pertinente: pièces mécaniques d’installations de climatisation, de production de vapeur, de séchage et de ventilation; appareils de filtrage de l’air et leurs pièces; joints, matières à jointoyer; matières à calfeutrer, à étouper et à isoler; matières plastiques partiellement ouvrées; matériaux de construction, armatures pour la construction; pièces de recouvrement pour murs, panneaux de construction, panneaux; rallonges pour cheminées, capuchons de cheminées, mitres de cheminées et manteaux de cheminées.

45

Force est de conclure qu’une appréciation globale des éléments figurant dans le dossier ne permet pas de déduire, à moins de recourir à des probabilités ou à des présomptions, que la marque CENTROTHERM a fait l’objet d’un usage sérieux au cours de la période pertinente pour les produits et services autres que ceux mentionnés au point 11 ci-dessus.»

25

Le deuxième moyen a été rejeté par le Tribunal pour les motifs suivants, exposés aux points 53 à 55 de l’arrêt attaqué:

«53

[…] [A]ux termes de l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, le titulaire de la marque communautaire est déclaré déchu de ses droits s’il n’y a pas eu d’usage sérieux de la marque pendant cinq ans [article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009], si la marque est devenue, par le fait de l’activité ou de l’inactivité de son titulaire, la désignation usuelle dans le commerce d’un produit ou d’un service pour lequel elle est enregistrée [article 51, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009] ou si la marque, par suite de l’usage qui en est fait par son titulaire ou avec son consentement, est propre à induire le public en erreur [article 51, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009].

54

Si les deux dernières conditions ont trait à des motifs absolus de refus, tel qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d) et g), du règlement no 207/2009, la première a trait à une disposition relevant de l’examen des motifs relatifs de refus, à savoir l’article 42, paragraphe 2, du règlement no 207/2009. Par conséquent, il y a lieu de conclure que l’examen de l’OHMI portant sur la question de l’usage sérieux de la marque communautaire dans le cadre d’une procédure de déchéance est soumis à l’application de l’article 76, paragraphe 1, in fine, du règlement no 207/2009, qui prévoit que cet examen est limité aux faits invoqués par les parties.

55

Il s’ensuit que la prémisse de la requérante, selon laquelle c’est à tort que l’OHMI a limité son examen aux éléments de preuve qu’elle a fournis, est erronée.»

26

Le troisième moyen a été écarté par le Tribunal par les motifs suivants:

«61

En premier lieu, il convient de rappeler que l’examen de l’OHMI de la question de l’usage sérieux de la marque communautaire est, ainsi que constaté aux points 51 à 54 ci-dessus, soumis à l’application de l’article 76, paragraphe 1, in fine, du règlement no 207/2009. Ladite disposition prévoit que l’examen de l’OHMI est limité aux faits invoqués par les parties. Il s’ensuit que l’allégation de la requérante selon laquelle l’OHMI a l’obligation de compléter d’office son dossier doit être écartée.

62

En second lieu, la possibilité pour les parties à la procédure devant l’OHMI de présenter des faits et des preuves après l’expiration des délais impartis à cet effet n’existe pas de manière inconditionnelle, mais se trouve, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence, subordonnée à la condition qu’il n’existe pas de disposition contraire. Ce n’est que si cette condition est remplie que l’OHMI dispose d’un pouvoir d’appréciation quant à la prise en compte de faits et de preuves présentés tardivement […]

63

Or, en l’espèce, il existe une disposition s’opposant à une prise en compte des éléments présentés devant la chambre de recours, à savoir la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95.»

27

Enfin, s’agissant du moyen tiré, par voie d’exception, de l’illégalité de la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95, le Tribunal a notamment jugé ce qui suit, aux points 67 à 70 de l’arrêt attaqué:

«67

Le Tribunal constate que, s’il est vrai que les règles du règlement no 2868/95 ne peuvent pas être en contradiction avec les dispositions et l’économie du règlement no 207/2009, il n’en reste pas moins qu’aucune contradiction ne peut être constatée entre la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95 et les dispositions concernant la déchéance contenues dans le règlement no 207/2009.

68

En effet, tandis que le règlement no 207/2009 prévoit la règle matérielle, à savoir la sanction de déchéance pour les marques communautaires qui n’ont pas fait l’objet d’un usage sérieux, le règlement no 2868/95 précise les règles procédurales applicables, notamment l’attribution de la charge de la preuve et les conséquences d’un manquement aux délais impartis. En outre, et ainsi que constaté précédemment […], il ressort de l’économie du règlement no 207/2009 que, en ce qui concerne la demande de déchéance au titre de l’absence d’usage sérieux, l’étendue et l’intensité de l’examen de l’OHMI sont encadrées par les moyens et les faits invoqués par les parties.

[…]

70

S’agissant de la prétendue violation du principe de proportionnalité, il convient de rappeler que le non-respect des délais sans juste motif, qui sont fondamentaux pour le bon fonctionnement du système communautaire, peut être sanctionné par la réglementation communautaire par la perte d’un droit, sans que cela soit incompatible avec ledit principe de proportionnalité […]»

Les conclusions des parties devant la Cour

28

Par son pourvoi, Centrotherm Systemtechnik demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, de faire droit à son recours de première instance et de condamner l’OHMI ainsi que centrotherm Clean Solutions aux dépens.

29

L’OHMI conclut au rejet du pourvoi ou, à titre subsidiaire, au rejet du recours de première instance ainsi qu’à la condamnation de Centrotherm Systemtechnik aux dépens.

30

centrotherm Clean Solutions conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation de Centrotherm Systemtechnik aux dépens.

Sur le pourvoi

31

Centrotherm Systemtechnik invoque quatre moyens au soutien de son pourvoi.

Précision liminaire

32

En l’occurrence, il ressort de l’exposé des antécédents du litige rappelé au point 1 du présent arrêt que, bien que la procédure de déchéance en cause ait été initiée sous l’empire du règlement no 40/94, la décision litigieuse a été rendue par la chambre de recours de l’OHMI après que le règlement no 207/2009 est entré en vigueur.

33

Ce dernier règlement ayant toutefois opéré une codification du règlement no 40/94 et les dispositions pertinentes de celui-ci n’ayant subi aucune modification à l’occasion de ladite codification, il sera, dans la suite du présent arrêt, exclusivement fait référence aux dispositions du règlement no 207/2009.

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009

Argumentation des parties

34

Par son premier moyen, Centrotherm Systemtechnik soutient que, en affirmant, au point 34 de l’arrêt attaqué, qu’une déclaration sur l’honneur, telle que celle visée à l’article 78, paragraphe 1, sous f), du règlement no 207/2009, ne peut se voir reconnaître une valeur probante que si elle est corroborée par les autres preuves présentées, le Tribunal a interprété de manière erronée la valeur probante s’attachant à de telles déclarations, voire privé celles-ci de toute force probante autonome. En outre, en omettant de tenir compte du fait que, en l’occurrence, le contenu de la déclaration litigieuse n’a pas été contesté par les autres parties, le Tribunal aurait violé le principe selon lequel le caractère sérieux de l’usage doit faire l’objet d’une appréciation globale tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce.

35

Cette méconnaissance de la valeur probante s’attachant aux déclarations sur l’honneur aurait conduit le Tribunal à conclure, en violation de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, à l’absence d’usage sérieux de la marque litigieuse.

36

Selon l’OHMI et centrotherm Clean Solutions, il ressort du point 34 de l’arrêt attaqué que le Tribunal n’a pas écarté in abstracto toute valeur probante en ce qui concerne les déclarations sur l’honneur, mais qu’il a évalué celle-ci en constatant, au terme d’une appréciation ne pouvant être contrôlée dans le cadre d’un pourvoi, que, en l’espèce, des preuves supplémentaires seraient nécessaires, eu égard aux liens existants entre l’auteur de la déclaration concernée et Centrotherm Systemtechnik.

Appréciation de la Cour

37

Force est de constater que le point 34 de l’arrêt attaqué qui doit être lu, notamment, à la lumière des points qui le précèdent et de ceux qui le suivent, revêt une portée autre que celle que lui prête erronément Centrotherm Systemtechnik.

38

Il convient ainsi, tout d’abord, de relever que, au point 32 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a qualifié d’«éléments de preuve fournis par la requérante» tant la déclaration sur l’honneur du gérant de cette dernière que les factures et les photographies produites.

39

Ensuite, contrairement à ce que soutient Centrotherm Systemtechnik, le Tribunal n’a aucunement exclu qu’une déclaration sur l’honneur soit susceptible de revêtir une valeur probante, mais il a souligné, au contraire, au point 33 de cet arrêt, que, aux fins d’apprécier cette valeur probante, il y avait lieu de vérifier la vraisemblance et la véracité de l’information qui figurait dans une telle déclaration, en tenant compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration, de son destinataire, et de se demander si, d’après son contenu, ledit document semblait sensé et fiable.

40

Ce n’est qu’alors, et en entamant concrètement un tel examen de la déclaration en cause dans la présente affaire, que le Tribunal a considéré, au point 34 dudit arrêt, que, compte tenu des liens flagrants qui unissaient l’auteur de cette déclaration et Centrotherm Systemtechnik, une valeur probante ne pouvait en l’occurrence être attribuée à ladite déclaration que si elle était corroborée par le contenu des photographies et des factures présentées.

41

C’est ainsi, notamment, que, aux points 36 et 37 de l’arrêt attaqué, le Tribunal, sans aucunement prétendre par là que Centrotherm Systemtechnik aurait dû produire des factures étayant l’intégralité du chiffre d’affaires allégué dans la déclaration sur l’honneur en cause, a, en revanche, souligné la différence extrême existant entre les affirmations relatives aux chiffres d’affaires annuels prétendument réalisés par Centrotherm Systemtechnik entre les années 2002 et 2006 que comportait cette déclaration et les volumes de vente comparativement minimes et ayant trait à une période très brève, voire ponctuelle, dont attestaient les factures effectivement produites.

42

Au terme de l’examen circonstancié des factures et des photographies produites, auquel a procédé le Tribunal aux points 35 à 43 de l’arrêt attaqué, cette juridiction a constaté, au point 44 de cet arrêt, que, en l’occurrence, lesdites photographies et factures ne permettaient en aucune manière de corroborer la déclaration du gérant selon laquelle les types de produits énumérés dans ce dernier point auraient fait l’objet d’une commercialisation sous la marque litigieuse.

43

Aussi, c’est sans commettre d’erreur de droit à cet égard que le Tribunal a pu conclure, au point 45 dudit arrêt, qu’une appréciation globale des éléments figurant dans le dossier, y compris, par conséquent, la déclaration sur l’honneur en cause, ne permettait pas, dans ces circonstances, de déduire, à moins de recourir à des probabilités ou à des présomptions, que la marque litigieuse avait fait l’objet d’un usage sérieux en ce qui concerne les produits et les services auxquels a trait la présente affaire.

44

À cet égard, il convient de rappeler, par ailleurs, que l’appréciation des faits et des preuves et, notamment, de la force probante s’attachant à la déclaration sur l’honneur produite par Centrotherm Systemtechnik, à laquelle s’est livrée le Tribunal à ces fins, relève du champ factuel (voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2007, Il Ponte Finanziaria/OHMI, C-234/06 P, Rec. p. I-7333, point 75), et ne constitue donc pas, sous réserve du cas de la dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi.

45

S’agissant, enfin, de la circonstance selon laquelle le contenu de ladite déclaration n’a pas fait l’objet d’une contestation expresse par l’auteur de la demande en déchéance devant l’OHMI, il suffit de constater qu’elle n’était aucunement de nature à empêcher le Tribunal d’effectuer l’appréciation des faits et des preuves qui lui incombait aux fins de vérifier si un usage sérieux de la marque antérieure avait été établi devant l’OHMI et de statuer, en conséquence, sur le litige dont il était saisi.

46

Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le premier moyen doit être écarté.

Sur le deuxième moyen et sur la première branche du troisième moyen, tirés de la violation des articles 51, paragraphe 1, sous a), et 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009

Argumentation des parties

47

Par son deuxième moyen, Centrotherm Systemtechnik soutient que, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal aux points 54 et 55 de l’arrêt attaqué, la règle selon laquelle l’OHMI procède à l’examen d’office des faits, que pose l’article 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, s’applique dans le cadre d’une procédure de déchéance. En effet, dès lors qu’elle peut être introduite par toute personne qui le souhaite, une telle procédure ne serait pas couverte par l’exception que prévoit cette disposition en ce qui concerne les procédures portant sur des motifs relatifs de refus d’enregistrement.

48

Par la première branche de son troisième moyen, Centrotherm Systemtechnik fait valoir, par ailleurs, que, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal dans l’arrêt attaqué, dans le cadre d’une procédure de déchéance, la charge de la preuve de l’usage sérieux de la marque n’incombe pas au titulaire de celle-ci.

49

En effet, alors que les articles 42, paragraphe 2, et 57, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 prévoiraient que le titulaire de la marque antérieure doit apporter la preuve de l’usage sérieux de celle-ci, à défaut de quoi son opposition ou sa demande de nullité seraient rejetées, l’article 51 dudit règlement ne comporterait pas de précisions similaires en ce qui concerne les procédures de déchéance. Dans ces conditions, la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95 imposant au titulaire de la marque la charge de la preuve de l’usage sérieux méconnaîtrait le règlement no 207/2009. Il s’ensuivrait que la chambre de recours serait tenue de prendre en compte les éléments de preuve produits devant elle au titre de son obligation d’examiner les faits d’office en vertu de l’article 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009.

50

Selon l’OHMI, eu égard au caractère inter partes et sui generis de la procédure de déchéance, qui ne constitue pas une procédure portant sur des motifs absolus ou des motifs relatifs de refus d’enregistrement, le principe de l’examen d’office des faits n’est pas applicable et c’est au titulaire de la marque, qui dispose des éléments appropriés à cette fin, qu’il incombe de prouver qu’il a fait un usage sérieux de celle-ci.

51

centrotherm Clean Solutions fait également valoir que l’article 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 ne s’applique pas aux procédures de déchéance. En revanche, la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95 déterminerait les modalités procédurales d’application afférentes à la déchéance, en prévoyant expressément que le titulaire de la marque doit apporter la preuve de l’usage sérieux de celle-ci.

Appréciation de la Cour

52

Par son deuxième moyen et par la première branche de son troisième moyen, qu’il y a lieu de traiter conjointement, Centrotherm Systemtechnik soutient, en substance, que, en jugeant que, dans le cadre d’une procédure de déchéance, l’OHMI n’est pas appelé à examiner d’office les preuves de l’existence d’un usage sérieux de la marque antérieure, mais que la charge de la preuve d’une telle existence incombe au seul titulaire de cette marque, et en ayant omis, de ce fait, de sanctionner la chambre de recours pour n’avoir pas pris en compte l’ensemble des éléments de preuve en sa possession, le Tribunal a méconnu les articles 51, paragraphe 1, sous a), et 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009.

53

À cet égard, il convient de rappeler, en premier lieu, que, ainsi qu’il ressort de l’article 15 du règlement no 207/2009, lorsque le titulaire d’une marque communautaire n’a pas fait de celle-ci un usage sérieux dans l’Union européenne dans un délai de cinq ans à compter de son enregistrement, celui-ci s’expose, sauf juste motif pour le non-usage, aux sanctions prévues par ce règlement, à savoir, notamment, la déchéance du droit de marque.

54

Il résulte du considérant 10 dudit règlement que le législateur de l’Union a entendu soumettre le maintien des droits liés à la marque communautaire à la condition qu’elle soit effectivement utilisée. Une marque communautaire qui n’est pas utilisée pourrait faire obstacle à la concurrence en limitant l’éventail des signes qui peuvent être enregistrés par d’autres en tant que marque et en privant les concurrents de la possibilité d’utiliser cette marque ou une marque similaire lors de la mise sur le marché intérieur de produits ou de services identiques ou similaires à ceux qui sont protégés par la marque en cause (voir arrêt du 19 décembre 2012, Leno Merken, C‑149/11, point 32).

55

En deuxième lieu, les articles 42, paragraphe 2, et 57, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 précisent expressément que la preuve de l’usage sérieux ou des justes motifs de non-usage incombe au titulaire de la marque concernée, sous peine de rejet de l’opposition ou de la demande d’annulation.

56

À cet égard, la circonstance que, à la différence des articles 42, paragraphe 2, et 57, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, l’article 51, paragraphe 1, de ce règlement ne spécifie pas que la preuve de l’usage sérieux ou de l’existence de justes motifs de non-usage incombe audit titulaire ne saurait, contrairement à ce que suggère Centrotherm Systemtechnik, être interprétée en ce sens que le législateur de l’Union aurait entendu exclure ce principe afférent à la charge de la preuve dans le cadre de la procédure de déchéance.

57

L’absence, à l’article 51, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, de précisions en ce qui concerne la charge de la preuve s’explique, au demeurant, sans difficultés eu égard à la circonstance que l’objet du paragraphe 1 de cet article 51, intitulé «Causes de déchéance», consiste à énoncer les motifs de déchéance de la marque, ce qui n’appelle pas l’apport de précisions relatives à la question de la charge de la preuve.

58

En revanche, les articles 42 et 57 de ce règlement constituent des dispositions de nature essentiellement procédurale. Or, il convient de relever que le paragraphe 2 de chacun de ces articles a pour objet spécifique d’encadrer ce qui s’apparente à un incident de procédure soulevé par la partie défenderesse qui entend mettre en doute le titre du demandeur à poursuivre la procédure qu’il a initiée.

59

C’est en raison d’un tel contexte procédural, qui est spécifique aux procédures d’opposition et d’annulation, que le législateur de l’Union a prévu, aux fins de permettre le règlement de tels incidents de procédure, dont la solution revêt un caractère préalable à la poursuite de la procédure principale sur laquelle ils se greffent, que la preuve de ce que la marque antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux doit être rapportée par le titulaire de celle-ci et que, à défaut d’une telle preuve, l’opposition ou la demande en nullité sont rejetées.

60

En revanche, le fait que tout incident procédural de cette nature soit par hypothèse exclu dans le cadre d’une procédure de déchéance justifie aisément que, bien que l’article 57 du règlement no 207/2009 concerne tant les procédures de déchéance que les procédures d’annulation, une disposition telle que le paragraphe 2 de cet article soit limitée à ces dernières procédures.

61

En troisième lieu, force est de constater que le principe, dont font ainsi incidemment état les articles 42, paragraphe 2, et 57, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, selon lequel il incombe au titulaire de la marque antérieure d’apporter la preuve de l’usage sérieux de celle-ci, se borne en réalité à traduire ce que postulent le bon sens et un impératif élémentaire d’efficacité de la procédure.

62

En effet, il est constant que ledit titulaire est le mieux, voire dans certains cas, le seul, à même d’apporter la preuve d’actes concrets permettant d’étayer l’affirmation selon laquelle il a fait un usage sérieux de sa marque ou d’exposer les justes motifs du non-usage de celle-ci. Il en va notamment ainsi des pièces justificatives propres à établir un tel usage, dont la règle 22, paragraphe 4, du règlement no 2868/95 comporte une énumération exemplative, telles que les emballages, les étiquettes, les barèmes de prix, les catalogues, les factures, les photographies ou les annonces dans les journaux.

63

Ainsi, il peut être déduit d’une lecture combinée des articles 15, 42, paragraphe 2, 51, paragraphe 1, et 57, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 que, dans le cadre d’une procédure de déchéance d’une marque, c’est au titulaire de cette dernière, et non à l’OHMI agissant d’office, qu’il incombe, en principe, d’établir l’usage sérieux de ladite marque.

64

De même, il y a lieu de conclure, à cet égard, que, en ce que la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95 énonce que la preuve de l’usage sérieux doit être apportée par le titulaire de la marque, cette règle se borne à expliciter un principe afférent à la charge de la preuve qui, sans méconnaître le règlement no 207/2009, procède, au contraire, des dispositions et de l’économie de ce dernier.

65

Dans ces conditions, la règle relative à l’examen d’office des faits par l’OHMI qu’édicte l’article 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 n’a pas vocation à s’appliquer à la question de la preuve de l’usage sérieux de la marque dans le cadre d’une procédure de déchéance portée devant l’OHMI.

66

Il découle notamment de ce qui précède que, bien que le raisonnement et les motifs figurant aux points 53 et 54 de l’arrêt attaqué soient erronés, la conclusion à laquelle est parvenue le Tribunal au point 55 de cet arrêt, à savoir que l’article 76, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 ne fait pas obligation à l’OHMI d’examiner d’office les faits propres à établir l’usage sérieux de la marque dont la déchéance est poursuivie devant lui, est fondée en droit.

67

Dès lors qu’il est ainsi justifié pour d’autres motifs de droit que ceux retenus par le Tribunal, le rejet du moyen tiré de la violation de l’article 76, paragraphe 1, du règlement 207/2009 auquel a procédé ladite juridiction au point 56 de l’arrêt attaqué ne saurait conduire à l’annulation de ce dernier.

68

Par ailleurs, et ainsi qu’il ressort également de ce qui précède, le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en considérant, dans l’arrêt attaqué, que la charge de la preuve de l’usage sérieux de la marque dans le cadre d’une procédure de déchéance incombe au titulaire de celle-ci.

69

Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen et la première branche du troisième moyen.

Sur la seconde branche du troisième moyen, tirée de la violation des articles 51, paragraphe 1, sous a), et 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009

Argumentation des parties

70

Par la seconde branche de son troisième moyen, Centrotherm Systemtechnik soutient que, en jugeant, aux points 62 et 63 de l’arrêt attaqué, que la chambre de recours ne disposait pas en l’occurrence d’un pouvoir d’appréciation aux fins de la prise en compte éventuelle des moyens de preuve de l’usage de la marque litigieuse tardivement produits devant elle, le Tribunal a méconnu l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009.

71

Tout en rappelant qu’il ressort, certes, du point 42 de l’arrêt du 13 mars 2007, OHMI/Kaul (C-29/05 P, Rec. p. I-2213), que le pouvoir d’appréciation dont ladite disposition investit l’OHMI aux fins de la prise en compte de preuves tardivement produites n’existe que «sauf disposition contraire», Centrotherm Systemtechnik fait valoir que le Tribunal a considéré à tort que la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95 constitue une telle disposition contraire.

72

L’OHMI soutient que, eu égard à la présomption de légalité dont bénéficie la réglementation de l’Union, la chambre de recours n’avait pas d’autre choix, à la date à laquelle a été rendue la décision litigieuse, que de prendre acte de ce que ladite règle 40, paragraphe 5, l’empêchait, ainsi que l’aurait du reste jugé précédemment le Tribunal, de prendre en compte des preuves produites après l’expiration du délai de forclusion imparti en vertu de ladite disposition.

73

À cet égard, l’OHMI précise toutefois que, depuis le prononcé de l’arrêt attaqué, la jurisprudence du Tribunal a connu une évolution. En effet, ce dernier aurait jugé, notamment, au point 31 de son arrêt du 29 septembre 2011, New Yorker SHK Jeans/OHMI – Vallis K.-Vallis A. (FISHBONE) (T‑415/09), que, nonobstant la règle 22, paragraphe 2, du règlement no 2868/95, la prise en compte, par la chambre de recours, d’éléments de preuve de l’usage sérieux de la marque produits après l’expiration du délai imparti par l’OHMI en vertu de cette disposition, doit demeurer possible, conformément à l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, à tout le moins lorsque de tels éléments se bornent à compléter des éléments de preuve produits dans ledit délai et qu’aucune tactique dilatoire ou négligence manifeste ne peut être reprochée à l’intéressé.

74

Approuvant cette interprétation, l’OHMI considère que la même approche doit prévaloir en ce qui concerne la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95.

75

Selon centrotherm Clean Solutions, c’est à bon droit que le Tribunal a jugé que cette dernière disposition, qui institue une dérogation à l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, a pour effet d’interdire à la chambre de recours de prendre en compte les preuves de l’usage de la marque tardivement produites devant elle.

Appréciation de la Cour

76

Il convient de rappeler que l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 dispose que l’OHMI peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile.

77

Ainsi que l’a jugé la Cour, il découle du libellé de cette disposition que, en règle générale et sauf disposition contraire, la présentation de faits et de preuves par les parties demeure possible après l’expiration des délais auxquels se trouve subordonnée une telle présentation en application des dispositions du règlement no 207/2009 et qu’il n’est nullement interdit à l’OHMI de tenir compte de faits et de preuves ainsi tardivement invoqués ou produits (arrêt OHMI/Kaul, précité, point 42).

78

En précisant que ce dernier «peut» décider de ne pas tenir compte de telles preuves, ladite disposition investit en effet l’OHMI d’un large pouvoir d’appréciation à l’effet de décider, tout en motivant sa décision sur ce point, s’il y a lieu ou non de prendre ceux-ci en compte (arrêt OHMI/Kaul, précité, point 43).

79

S’agissant plus précisément de la production de preuves de l’usage sérieux de la marque dans le cadre de procédures de déchéance introduites sur le fondement de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009, il convient de relever, tout d’abord, que ce règlement ne comporte pas de disposition à l’effet de préciser le délai dans lequel de telles preuves doivent être apportées.

80

En revanche, la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95 prévoit, à cet égard, que l’OHMI demande au titulaire de la marque communautaire la preuve de l’usage de la marque au cours d’une période qu’il précise.

81

En l’occurrence, la division d’annulation de l’OHMI a fait application de cette dernière disposition et a imparti à Centrotherm Systemtechnik un délai aux fins de la production d’une telle preuve. Il est par ailleurs constant que Centrotherm Systemtechnik a produit divers éléments de preuve de l’usage de la marque litigieuse dans ledit délai.

82

Ensuite, il convient de rappeler que ladite règle 40, paragraphe 5, précise également, à sa deuxième phrase, que si la preuve de l’usage de la marque n’est pas apportée dans le délai ainsi imparti par l’OHMI, la déchéance de celle-ci est prononcée.

83

Ainsi qu’il ressort des points 62 et 63 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a interprété cette deuxième phrase en ce sens que le délai ainsi imparti par l’OHMI constitue, en toutes circonstances, un délai de forclusion à l’expiration duquel toute production de preuves de l’usage est interdite. Le Tribunal a ainsi considéré que, dans l’hypothèse où des preuves afférentes à l’usage de la marque ont bien été produites dans le délai imparti, toute production d’éléments de preuve supplémentaires, après l’expiration dudit délai, est exclue, de sorte que l’OHMI est tenu de prononcer la déchéance de la marque si les preuves ainsi initialement produites s’avèrent insuffisantes pour établir le caractère sérieux dudit usage.

84

L’interprétation ainsi retenue par le Tribunal a conduit celui-ci à considérer que la règle 40, paragraphe 5, deuxième phrase, du règlement no 2868/95 constitue, au sens de la jurisprudence rappelée au point 7 du présent arrêt, une disposition contraire à l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, avec pour conséquence qu’il n’était pas loisible à la chambre de recours de prendre en compte les preuves supplémentaires de l’usage de la marque produites par Centrotherm Systemtechnik à l’appui de son recours devant elle.

85

Or, ce faisant, le Tribunal a retenu une interprétation erronée de la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95.

86

À cet égard, s’il découle, certes, du libellé de cette disposition que, lorsque aucune preuve de l’usage de la marque concernée n’est produite dans le délai imparti par l’OHMI, la sanction de déchéance doit en principe être prononcée d’office par ce dernier, une telle conclusion ne s’impose en revanche pas lorsque des éléments de preuve de cet usage ont été produits dans ledit délai.

87

En pareil cas, en effet, et à moins qu’il n’apparaisse que lesdits éléments sont dépourvus de toute pertinence aux fins d’établir l’usage sérieux de la marque, la procédure est appelée à suivre son cours. Ainsi, l’OHMI est notamment appelé, comme le prévoit l’article 57, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, à inviter les parties, aussi souvent qu’il est nécessaire, à présenter leurs observations sur les notifications qu’il leur a adressées ou sur les communications qui émanent des autres parties. Dans un tel contexte, si une déchéance de la marque vient à être ultérieurement prononcée, celle-ci procède non pas d’une application de la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95, disposition de nature essentiellement procédurale, mais exclusivement de l’application des dispositions de fond figurant aux articles 51, paragraphe 1, et 57 du règlement no 207/2009.

88

Il découle notamment de ce qui précède que, ainsi qu’il a été rappelé au point 7 du présent arrêt, la présentation de preuves de l’usage de la marque venant s’ajouter à des preuves elles-mêmes produites dans le délai imparti par l’OHMI, en vertu de la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95, demeure possible après l’expiration dudit délai et qu’il n’est nullement interdit à l’OHMI de tenir compte des preuves supplémentaires produites ainsi tardivement.

89

Or, ainsi qu’il a été rappelé au point 8 du présent arrêt, il est constant que, en l’occurrence, Centrotherm Systemtechnik avait, dans le délai imparti par l’OHMI, produit divers éléments de preuve destinés à établir l’usage de la marque en cause. Il est de même constant que les éléments ainsi initialement produits n’étaient pas dépourvus de toute pertinence à cette fin, puisqu’ils ont notamment conduit la chambre de recours à rejeter partiellement la demande en déchéance, au motif que ledit usage avait été établi pour un certain nombre de produits.

90

Dans ces conditions, il y a lieu de constater que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant, aux points 62 et 63 de l’arrêt attaqué, que la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95 était de nature à faire obstacle à l’exercice, par la chambre de recours, du pouvoir d’appréciation dont l’investit en principe l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, aux fins de la prise en compte éventuelle des preuves supplémentaires qui avaient été produites devant elle.

91

Il s’ensuit que la seconde branche du troisième moyen doit être accueillie et que l’arrêt attaqué doit, en conséquence, être annulé.

Sur le quatrième moyen, tiré de l’inapplicabilité de la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95

Argumentation des parties

92

Par son quatrième moyen, Centrotherm Systemtechnik soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en ne déclarant pas la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95 inapplicable en l’espèce.

93

D’une part, et pour les mêmes raisons que celles déjà invoquées à l’appui de la première branche du troisième moyen, cette règle méconnaîtrait le règlement no 207/2009 en imposant au titulaire de la marque la charge de la preuve de l’usage sérieux de celle-ci.

94

D’autre part, l’application stricte de ladite règle, en l’espèce, enfreindrait le principe de proportionnalité. En effet, la finalité de celle-ci, à savoir assurer l’efficacité de la procédure, devrait être mise en balance avec les conséquences juridiques lourdes et définitives qui s’attacheraient à la déchéance d’une marque.

95

centrotherm Clean Solutions fait valoir que ni l’OHMI ni le Tribunal ne sont en droit de renoncer à l’application de la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95, le principe de légalité impliquant l’obligation de reconnaître la pleine efficacité des règlements tant que leur non-validité n’a pas été établie par une juridiction compétente dans le cadre d’une procédure prévue à cette fin.

Appréciation de la Cour

96

S’agissant de la première branche de ce moyen, tirée d’une violation du règlement no 207/2009, l’argumentation de la requérante doit être rejetée pour les mêmes motifs que ceux ayant déjà conduit la Cour à écarter la première branche du troisième moyen.

97

Quant à la seconde branche dudit moyen tirée du caractère disproportionné que revêtirait la sanction de déchéance lorsqu’elle est, comme en l’espèce, prononcée en application de la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95, il suffit, en l’occurrence, de relever que l’argumentation développée à cet égard par Centrotherm Systemtechnik est fondée sur une prémisse erronée, en ce qui concerne la portée de cette règle.

98

En effet, ainsi qu’il ressort des points 8 à 87 du présent arrêt et contrairement à ce qu’a considéré la chambre de recours dans la décision litigieuse et à ce que le Tribunal a jugé dans l’arrêt attaqué, cette sanction de déchéance n’est susceptible d’être prononcée sur le fondement de ladite disposition que lorsque aucune preuve de l’usage de la marque litigieuse n’a été produite dans le délai imparti par l’OHMI ou qu’il apparaît que les éléments produits sont dépourvus de toute pertinence aux fins d’établir l’usage sérieux de cette marque.

99

Toutefois, tel n’est pas le cas en l’espèce, dès lors que, ainsi qu’il ressort de l’examen de la seconde branche du troisième moyen, le dépôt de preuves de l’usage de la marque par Centrotherm Systemtechnik dans le délai imparti par l’OHMI excluait toute déchéance d’office en vertu de la règle 40, paragraphe 5, deuxième phrase, du règlement no 2868/95 et s’opposait à ce que la chambre de recours considère, ainsi qu’elle l’a fait à tort dans la décision litigieuse, qu’elle était dépourvue de tout pouvoir d’appréciation aux fins de la prise en compte éventuelle des preuves complémentaires ultérieurement produites.

100

Il découle des considérations qui précèdent que le quatrième moyen doit être rejeté.

Sur le recours de première instance

101

Conformément à l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, celle-ci, en cas d’annulation de la décision du Tribunal, peut soit statuer elle-même définitivement sur le litige, lorsque celui-ci est en état d’être jugé, soit renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue.

102

En l’occurrence, la Cour considère que le litige est en état d’être jugé et qu’il convient, dès lors, qu’elle statue définitivement sur celui-ci.

103

Quant à l’objet du recours de première instance, il y a lieu de rappeler que, par celui-ci, Centrotherm Systemtechnik poursuit l’annulation partielle de la décision litigieuse, à savoir dans la seule mesure où celle-ci a fait droit à la demande de déchéance de la marque litigieuse. Ce recours est ainsi dirigé contre le point 2 du dispositif de cette décision, par lequel la chambre de recours a partiellement rejeté le recours de Centrotherm Systemtechnik tendant à l’annulation de la décision de la division d’annulation du 30 octobre 2007.

Argumentation des parties

104

Au soutien de son recours introduit devant le Tribunal, Centrotherm Systemtechnik fait valoir que, contrairement à ce que la chambre de recours a erronément considéré au point 36 de la décision litigieuse, cette instance disposait, conformément à l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, d’un pouvoir d’appréciation aux fins de la prise en compte des éléments de preuve supplémentaires produits par Centrotherm Systemtechnik à l’appui de son recours devant elle.

105

Or, dès lors que ces éléments visaient à compléter des preuves déposées en temps utile, ils auraient, en l’occurrence, dû être pris en compte par la chambre de recours, conformément aux enseignements découlant de l’arrêt OHMI/Kaul, précité. Selon Centrotherm Systemtechnik, devaient, en particulier, conduire à une telle prise en compte, l’évidente pertinence desdits éléments de preuve supplémentaires pour l’issue de la procédure, la continuité fonctionnelle existant entre la chambre de recours et la division d’annulation, l’absence d’inconvénients procéduraux majeurs s’opposant à cette prise en compte et, enfin, le souci de garantir un équilibre entre les impératifs de bon déroulement de la procédure et la nécessité d’une solution juste quant au fond, s’agissant d’une procédure susceptible d’aboutir à un résultat aussi lourd de conséquences qu’une déchéance de marque.

106

L’OHMI et centrotherm Clean Solutions concluent au rejet de ce moyen d’annulation. Selon eux, la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95 excluait, en l’occurrence, toute prise en compte des preuves supplémentaires litigieuses par la chambre de recours. Par ailleurs, à supposer même que cette chambre ait, en vertu de l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, disposé d’un pouvoir d’appréciation aux fins de la prise en compte éventuelle de ces preuves supplémentaires, cette instance aurait bien exercé ce pouvoir en indiquant, au point 37 de la décision litigieuse, quelle aurait été l’issue, en l’occurrence négative, d’un tel exercice, dans l’hypothèse où elle aurait effectivement joui dudit pouvoir.

Appréciation de la Cour

107

Il ressort du point 36 de la décision litigieuse que la chambre de recours a considéré que les preuves supplémentaires produites devant elle par Centrotherm Systemtechnik ne pouvaient être prises en considération par elle, au titre du pouvoir d’appréciation dont l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 investit en règle générale l’OHMI, eu égard à la circonstance que ces preuves ont été produites après l’expiration du délai visé à la règle 40, paragraphe 5, deuxième phrase, du règlement no 2868/95, qui constitue un délai de forclusion dont le non-respect entraîne automatiquement la déchéance de la marque.

108

Or, ainsi qu’il découle des points 8 à 90 du présent arrêt, une telle appréciation procède d’une interprétation erronée de cette règle 40, paragraphe 5, et méconnaît l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009.

109

Par ailleurs, et contrairement à ce que soutiennent l’OHMI et centrotherm Clean Solutions, il ne saurait être considéré qu’il a été remédié au vice dont se trouve ainsi entachée la décision litigieuse, du simple fait que la chambre de recours a, par la suite, indiqué, au point 37 de cette décision, que, à supposer même qu’elle puisse apprécier librement la pertinence d’une prise en compte de preuves produites tardivement, la raison pour laquelle elle aurait dû exercer ce pouvoir d’appréciation en faveur de la requérante n’apparaissait pas, celle-ci n’ayant avancé à cet égard que des arguments généraux relatifs au rôle et à la valeur du droit de marque, sans invoquer l’impossibilité de produire la preuve de l’usage dès la première instance.

110

En effet, de telles assertions générales et catégoriques ne permettent en aucune façon de considérer que la chambre de recours a exercé de manière effective le pouvoir d’appréciation dont l’investit l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, aux fins de décider, de manière motivée et en tenant dûment compte de l’ensemble des circonstances pertinentes, s’il y avait lieu ou non de prendre en compte les preuves supplémentaires produites devant elle aux fins de rendre la décision qu’elle était appelée à prendre (voir, en ce sens, arrêt OHMI/Kaul, précité, points 43 et 68).

111

À cet égard, il convient de souligner, d’emblée, que l’éventuelle prise en compte par l’OHMI desdits éléments de preuve supplémentaires ne constitue ainsi en aucune manière une «faveur» accordée à l’une ou à l’autre partie, mais doit incarner le résultat d’un exercice objectif et motivé du pouvoir d’appréciation, dont ledit article 76, paragraphe 2, investit cet organisme.

112

Il y a lieu, d’ailleurs, de relever que la motivation ainsi requise s’avère d’autant plus nécessaire lorsque l’OHMI décide d’écarter des preuves ainsi tardivement produites.

113

À cet égard, il convient de rappeler que la Cour a notamment jugé que la prise en compte par l’OHMI de faits ou de preuves tardivement produits est, lorsqu’il est appelé à statuer dans le cadre d’une procédure d’opposition, en particulier susceptible de se justifier lorsque celui-ci considère que, d’une part, les éléments tardivement produits sont de prime abord susceptibles de revêtir une réelle pertinence en ce qui concerne le sort de l’opposition formée devant lui et, d’autre part, le stade de la procédure auquel intervient cette production tardive et les circonstances qui l’entourent ne s’opposent pas à cette prise en compte (arrêt OHMI/Kaul, précité, point 44).

114

De telles considérations s’avèrent, de même et mutatis mutandis, en particulier susceptibles de justifier la prise en compte par l’OHMI, lorsqu’il est appelé à statuer sur une demande de déchéance, d’éléments de preuve de l’usage de la marque qui, bien que n’ayant pas été produits dans le délai imparti par celui-ci en vertu de la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95, le sont à un stade ultérieur de la procédure, en complément d’éléments de preuve ayant été produits dans ledit délai.

115

En l’occurrence, il apparaît que, à cet égard, est notamment susceptible de figurer au rang des circonstances pertinentes à considérer le fait que la décision de déchéance adoptée par la division d’annulation l’ait été après la présentation, dans le délai imparti par cette division, de preuves initiales effectives afférentes à l’usage de la marque litigieuse, s’accompagnant d’observations exprimant des réserves ayant trait à la confidentialité et contenant une offre de preuves supplémentaires.

116

Or, il n’apparaît pas que la chambre de recours ait dûment examiné ces aspects ni, du reste, tous autres éléments pouvant revêtir une pertinence, pas plus qu’elle ne semble avoir examiné la pertinence éventuelle des éléments de preuve supplémentaires produits par Centrotherm Systemtechnik.

117

Par ailleurs, il importe de souligner que, contrairement à ce que suggère le point 37 de la décision litigieuse, une éventuelle prise en compte d’éléments de preuve supplémentaires de l’usage de la marque, produits après l’expiration du délai visé à la règle 40, paragraphe 5, du règlement no 2868/95, ne requiert pas nécessairement que l’intéressé se soit trouvé dans l’impossibilité de produire ces éléments dans ledit délai.

118

Il résulte des considérations qui précèdent que la décision litigieuse doit être annulée en tant que, par celle-ci la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours de Centrotherm Systemtechnik dirigé contre la décision de la division d’annulation.

119

Il revient à ladite chambre de recours d’apprécier, notamment dans le respect des enseignements découlant du présent arrêt, et en tenant dûment compte de l’ensemble des circonstances pertinentes ainsi qu’en motivant sa décision à cet égard, s’il y a lieu de prendre en considération les éléments de preuve supplémentaires produits devant elle par Centrotherm Systemtechnik, aux fins de la décision qu’elle est appelée à rendre sur le recours dont elle demeure saisie.

Sur les dépens

120

Aux termes de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens.

121

L’article 138, paragraphe 3, du même règlement, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, prévoit que si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, chaque partie supporte ses propres dépens.

122

En l’occurrence, il y a lieu de relever, d’une part, que si l’un des moyens du pourvoi invoqués par Centrotherm Systemtechnik a été accueilli et que l’arrêt attaqué a été annulé de ce chef, tel n’est pas le cas des autres moyens qui ont, quant à eux, été rejetés par la Cour.

123

D’autre part, s’agissant du recours de première instance, il convient de relever que, en annulant partiellement la décision litigieuse, la Cour a également fait droit à l’un des moyens invoqués par Centrotherm Systemtechnik. En revanche, il ressort de l’arrêt attaqué, qui n’a pas été infirmé par la Cour sur ces points, que Centrotherm Systemtechnik a succombé sur les autres moyens qu’elle avait invoqués en première instance.

124

Dans ces conditions, et dès lors que les parties ont chacune partiellement succombé en leurs moyens, tant en première instance que dans le cadre du présent pourvoi, il y a lieu de décider que chacune d’entre elles supportera ses propres dépens.

 

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) déclare et arrête:

 

1)

L’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 15 septembre 2011, Centrotherm Systemtechnik/OHMI – centrotherm Clean Solutions (CENTROTHERM) (T‑434/09), est annulé.

 

2)

Le point 2 du dispositif de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 25 août 2009 (affaire R 6/2008‑4) est annulé.

 

3)

Centrotherm Systemtechnik GmbH, l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) et centrotherm Clean Solutions GmbH & Co. KG supportent leurs propres dépens afférents tant à la procédure de première instance qu’à la procédure de pourvoi.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: l’allemand.

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