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Document 31979D0068

79/68/CEE: Décision de la Commission, du 12 décembre 1978, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CEE (IV/29.430 - Kawasaki) (Les textes en langues anglaise et allemande sont les seuls faisant foi)

OJ L 16, 23.1.1979, p. 9–16 (DA, DE, EN, FR, IT, NL)

Legal status of the document In force

ELI: http://data.europa.eu/eli/dec/1979/68/oj

31979D0068

79/68/CEE: Décision de la Commission, du 12 décembre 1978, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CEE (IV/29.430 - Kawasaki) (Les textes en langues anglaise et allemande sont les seuls faisant foi)

Journal officiel n° L 016 du 23/01/1979 p. 0009 - 0016


DÉCISION DE LA COMMISSION du 12 décembre 1978 relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CEE (IV/29.430 - Kawasaki) (Les textes en langues anglaise et allemande sont les seuls faisant foi.) (79/68/CEE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 85,

vu le règlement du Conseil nº 17 du 6 février 1962 (1), et notamment ses articles 3 et 15,

vu la demande présentée le 17 juin 1977, conformément à l'article 3 paragraphe 2 sous b) du règlement nº 17, par Mme M. Putz à Deurne, Belgique,

vu la décision de la Commission du 20 juin 1977 d'engager la procédure contre Kawasaki Motors (UK) Ltd et Kawasaki Motoren GmbH,

après audition de Kawasaki Motors (UK) Ltd et Kawasaki Motoren GmbH, conformément à l'article 19 paragraphe 1 du règlement nº 17 et aux dispositions du règlement nº 99/63/CEE (2),

vu l'avis du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, recueilli, conformément à l'article 10 du règlement nº 17, le 20 juin 1978, I. LES FAITS

considérant que les faits sont les suivants:

(1) Kawasaki Motors (UK) Ltd assure, par un réseau de revendeurs agréés, la distribution au Royaume-Uni de motos, de pièces de rechange et d'accessoires fabriqués au Japon et livrés par sa société mère Kawasaki Heavy Industries Ltd, à Akashi-city (Japon), et les filiales de celle-ci. La même fonction est exercée en république fédérale d'Allemagne et à Berlin-Ouest par une autre filiale à 100 % de Kawasaki Heavy Industries Ltd, la Kawasaki Motoren GmbH.

L'accord

(2) Chaque revendeur Kawasaki au Royaume-Uni est tenu de conclure avec Kawasaki Motors (UK) Ltd un accord connu sous le nom de «Kawasaki Motor Cycle Authorised Dealer Sales and Service Agreement» (ci-après dénommé «l'accord»). Ces revendeurs Kawasaki vendent au détail, Kawasaki Motors (UK) opérant elle-même comme grossiste.

(3) L'accord confère au revendeur le droit de vendre des motos, des pièces de rechange et des accessoires Kawasaki. Il existe actuellement quelque 80 de ces revendeurs au Royaume-Uni.

(4) La clause 3 (V) de l'accord prévoit que:

«Pendant la durée du présent accord, le revendeur s'abstiendra de livrer, sans autorisation écrite préalable du distributeur, des produits destinés à être exportés hors du Royaume-Uni». (1)JO nº 13 du 21.2.1962, p. 204/62. (2)JO nº 127 du 20.8.1963, p. 2268/63.

(5) Aux termes de la clause 8 (vii):

«Le revendeur s'interdit de livrer directement ou indirectement à des tiers (autres que des acheteurs au détail bona fide ou des revendeurs Kawasaki dûment agréés) des motos Kawasaki neuves destinées à être revendues par ces tiers sans autorisation écrite préalable du distributeur» (Kawasaki).

(6) Les accords en cours, conclus pour la plupart le 1er octobre 1976, expirent le 30 septembre 1978. Une série précédente d'accords libellés dans les mêmes termes avaient été conclus en 1975. Le premier de ceux-ci avait été conclu le 28 mai 1975 et comportait dans la clause 2 (v) la même interdiction d'exporter que celle contenue dans la clause 3 (v) de la série en cours par laquelle ont été reconduits les accords de 1975.

L'application de l'interdiction d'exporter

(7) Les revendeurs Kawasaki ont été instamment priés de se conformer à l'interdiction d'exporter par une lettre circulaire du 27 avril 1976 émanant de Kawasaki Motors (UK), dans laquelle il était dit que:

«pour éviter tout conflit avec d'autres revendeurs officiels Kawasaki d'outre-mer, nous attirons respectueusement votre attention sur l'article 2 (v) de l'accord de 1976 relatif aux ventes et aux services» (c'est-à-dire sur l'interdiction d'exporter).

(8) Le même objectif était visé dans une réunion tenue le 27 octobre 1976 à laquelle les revendeurs avaient été conviés par Kawasaki Motors (UK) et à laquelle assistaient également des directeurs de Kawasaki Motoren GmbH. Une lettre circulaire du 4 novembre 1976, envoyée par Kawasaki Motors à tous ses revendeurs, précisait que:

(9) «Tous les revendeurs Kawasaki ont été priés à plusieurs reprises de ne pas procéder à la réexportation de machines hors du Royaume-Uni et cette question a fait l'objet d'une mention particulière lors de la réunion des revendeurs du 27 octobre 1976».

«... Nous avons conséquemment demandé à tous les revendeurs Kawasaki de ne pas réexporter ...».

(10) La lettre enjoignait ensuite aux revendeurs de ne pas livrer de produits Kawasaki en vue de l'exportation, affirmant que cette réexportation aurait pour effet de «saper la confiance et la prospérité des revendeurs agréés Kawasaki sur d'autres marchés». Le dernier paragraphe de cette lettre stipulait que «Tous les revendeurs Kawasaki doivent reconnaître que nous ne pouvons ni tolérer ni permettre ce défi flagrant à nos demandes de ne pas réexporter de machines Kawasaki».

(11) Une nouvelle lettre circulaire de Kawasaki Motors (UK), datée du 18 janvier 1977, donnait à nouveau ordre aux revendeurs Kawasaki de ne pas réexporter et leur demandait d'informer Kawasaki Motors (UK) de tout cas de réexportation présumée effectuée par toute autre personne. Le paragraphe pertinent de cette lettre précise:

(12) «Kawasaki Motors (UK) Ltd ne tolérera plus la minorité, nous voulons dire la paire de revendeurs toujours décidés à faire cavaliers seuls. Souvenez-vous que c'est de votre argent qu'il s'agit et que toute information que vous pourrez nous donner pour nous permettre d'agir contre ces gens sera appréciée par vos collègues revendeurs».

(13) Dans une lettre circulaire du 1er février 1977, Kawasaki Motors (UK) demandait aux revendeurs des informations sur des démarches qu'auraient faites un importateur indépendant en Allemagne en vue de l'achat de trois machines Kawasaki Z 1000.

(14) Ces actions furent entreprises par Kawasaki Motors (UK) à la suite de plaintes formulées par Kawasaki Motoren GmbH concernant des importations parallèles de machines Kawasaki en République fédérale d'Allemagne. C'est ce que démontrent les faits suivants:

(15) Un télex du 13 mai 1976, adressé par Kawasaki Motoren GmbH à Kawasaki Motors (UK) informait cette dernière de l'importation parallèle de quatre machines Z 900 et demandait son «aide dans cette affaire».

(16) Kawasaki Motors (UK) répondait par un télex du 24 août 1976 que : «nous avons déjà pris des mesures et sommes très préoccupés que ces réexportations continuent». Kawasaki Motors (UK) demandait à Kawasaki Motoren GmbH d'indiquer les numéros de cadre et de moteur des machines en question et l'identité du revendeur Kawasaki au Royaume-Uni qui les avait livrées.

(17) De nouvelles plaintes au sujet d'importations parallèles de machines Kawasaki furent adressées par Kawasaki Motoren GmbH à Kawasaki Motors (UK) les 1er novembre et 14 décembre 1976. Le télex du 14 décembre 1976 indiquait:

(18) «Dans la région de Sarrebruck et Kaiserslautern apparaissent à nouveau de nombreuses motos importées clandestinement. La firme Erkel à Kaiserslautern met régulièrement en vente 5 à 7 motos de type Z 1000 au prix de 7 500 marks allemands, taxes et frais de transport compris (prix KMG des Z 1000 : 9 000 marks allemands)».

(19) Un télex adressé le 28 janvier 1977 par Kawasaki Motoren GmbH à Kawasaki Motors (UK) demandait : «Voudriez-vous avoir l'amabilité de vérifier les numéros de cadre suivants : Z 1000 (quatre numéros cités). Si ces motos ont été livrées en Angleterre, voudriez-vous essayer de trouver le nom du revendeur».

(20) Une demande similaire était faite par télex du 16 février 1977:

«Voudriez-vous vérifier par qui en Grande-Bretagne les motos Z 1000 suivantes ont été livrées»:

(21) Suivait une liste de dix numéros de cadre. Sur la copie du télex communiqué par Kawasaki Motors UK à la Commission sont écrits les mots : «A. Willis informera». A. Willis était à l'époque directeur des ventes de Kawasaki Motors (UK). En regard de huit des numéros de cadre repris sur la liste figuraient les noms de revendeurs Kawasaki établis au Royaume-Uni.

(22) Le 22 avril 1977, les avocats de Kawasaki Motors (UK) écrivaient à quatre revendeurs Kawasaki en les accusant d'avoir enfreint la clause 3 (v) en exportant des machines hors du Royaume-Uni et en leur enjoignant de s'engager à ne pas commettre de nouvelles infractions.

(23) Trois de ces revendeurs avaient été identifiés à partir des numéros de cadre relevés dans le télex de Kawasaki Motoren du 16 février 1977.

(24) Cette lettre du 22 avril 1977 était rédigée dans les termes suivants:

«Nous vous écrivons au nom de nos clients, Kawasaki Motors (UK) Ltd, à propos de certaines infractions à la clause 3 (v) de votre accord de revendeur qui ont été portées à la connaissance de nos clients. Comme il ne peut être remédié à cette infraction, nos clients sont en droit de mettre fin à l'accord par un préavis de quatre-vingt-dix jours comme prévu par la clause 11 (i) et (iii) de l'accord. Nos clients ont notifié cet accord à la Commission des Communautés européennes et ont envoyé à celle-ci copie de la présente lettre ainsi que leur exposé des faits et arguments.

(25) Dans ces circonstances, nos clients ont décidé de ne pas insister sur ces infractions, mais exigent votre promesse écrite de ne pas commettre de nouvelles infractions à la clause 3 (v) de l'accord aussi longtemps que la Commission ne se sera pas prononcée sur la question».

La demande

(26) Une plainte a été adressée pour la première fois par la demanderesse à la Commission en mars 1977 et ensuite par écrit les 17 juin et 11 août 1977. La plainte portait en substance sur le fait qu'un revendeur Kawasaki (Kawasaki Paddock Wood Ltd) refusait de fournir une moto Kawasaki à la demanderesse au motif que Kawasaki Motors (UK) interdisait à ses revendeurs de vendre à l'exportation. La demanderesse, ressortissante britannique résidant en Belgique, avait cherché à obtenir la machine pour l'exporter mais s'était heurtée au refus du revendeur Kawasaki qui se référait aux termes formels de l'accord.

(27) La demande se référait également à la différence considérable de prix pour les mêmes machines au Royaume-Uni et en Belgique, cette différence étant, selon elle, de l'ordre de 30 %. Les chiffres indiqués dans le tableau ci-après montrent des différences de prix de 11 % à 30 %.

Différences de prix pour les machines Kawasaki dans la Communauté économique européenne

(28) Il existait des différences de prix considérables pour les machines Kawasaki dans les États membres de la Communauté économique européenne pendant la période où s'appliquait l'interdiction d'exporter. Les prix auxquels Kawasaki Motoren GMbH vendait les machines à ses revendeurs en république fédérale d'Allemagne étaient en moyenne d'environ 55 % supérieurs à ceux auxquels Kawasaki Motors (UK) les cédait à ses revendeurs au Royaume-Uni, et environ 25 % supérieurs aux prix de revente au détail recommandés par Kawasaki Motors (UK) au Royaume-Uni.

Le tableau ci-après, dont l'exactitude n'a été contestée ni par Kawasaki Motors (UK) ni par Kawasaki Motoren GmbH lors de l'audition, établit une comparaison entre les prix de détail recommandés par Kawasaki pour les machines vendues au Royaume-Uni, en république fédérale d'Allemagne, en France, en Italie, aux Pays-Bas et en Belgique.

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Les observations présentées par Kawasaki Motors (UK) et Kawasaki Motoren GmbH

(29) Dans leurs réponses écrites à la communication des griefs et lors de l'audition, Kawasaki Motors (UK) et Kawasaki Motoren GmbH ont reconnu avoir agi en violation de l'article 85 paragraphe 1 en imposant l'interdiction d'exporter et en contribuant à sa mise en application.

(30) Toutefois, les deux entreprises ont fait valoir que l'interdiction d'exporter empêchait uniquement la fourniture de machines Kawasaki à des revendeurs qui ne faisaient pas partie du système de distribution Kawasaki dans le marché commun et que cette clause, si elle avait été notifiée, aurait été exemptée en vertu de l'article 85 paragraphe 3 référence étant faite à la décision de la Commission dans l'affaire BMW (1). Kawasaki Motors (UK) affirmait également que l'interdiction d'exporter avait été imposée sur la foi d'un avis juridique indépendant donné en mai 1975, selon lequel l'article 85 paragraphe 1 ne serait pas applicable. Pour ces raisons, il ne fallait infliger aucune amende ou seulement une amende symbolique.

(31) Pour réfuter ces arguments, il suffit de noter que l'interdiction d'exporter était libellée en termes généraux et qu'elle ne visait pas spécifiquement les ventes faites à des revendeurs non agréés. Les lettres circulaires adressées par Kawasaki Motors (UK) à ses revendeurs n'indiquaient pas que l'interdiction d'exporter était limitée aux ventes faites à des revendeurs non agréés. Plus particulièrement, les lettres circulaires ne faisaient pas référence à la clause 8 (vii).

(32) Cette clause interdisait clairement les ventes à des revendeurs non agréés tout en autorisant les ventes à des acheteurs au détail et à des revendeurs Kawasaki. L'introduction d'une interdiction d'exporter, s'ajoutant aux restrictions contenues dans la clause 8 (vii), indique qu'elle imposait des restrictions nouvelles et générales aux revendeurs Kawasaki. Néanmoins, Kawasaki Motors (UK), dans ses lettres circulaires, se fondait non pas sur la clause 8 (vii) mais sur l'interdiction d'exporter qui s'étendait implicitement aux ventes à des acheteurs au détail et à des revendeurs Kawasaki dans d'autres États membres de la Communauté économique européenne.

(33) Le fait que les ventes à des acheteurs au détail dans d'autres États membres aient été empêchées est attesté par la plainte. Parmi les documents présentés lors de l'audition par Kawasaki Motors (UK) figuraient des lettres, datées des 28 avril 1977 et 16 mai 1977, que des acheteurs établis aux Pays-Bas et en Allemagne avaient adressées à un revendeur Kawasaki (Bob Gollner Ltd) pour lui demander de fournir une machine Kawasaki. Le revendeur Kawasaki a transmis ces lettres à Kawasaki Motors (UK) en indiquant que l'acheteur éventuel lui semblait être un «véritable acheteur au détail» mais, ajoutait-il «étant donné votre demande de ne pas exporter de machines, nous ne lui avons pas répondu». Kawasaki Motors (UK) n'a pas donné au revendeur l'autorisation d'exporter mais a répondu directement aux acheteurs potentiels en leur suggérant de prendre contact avec leur revendeur Kawasaki local. Cet échange de lettres prouve l'étendue de l'interdiction d'exporter imposée, dont les termes sont restés les mêmes avant et après la notification.

(34) En ce qui concerne les ventes effectuées par des revendeurs Kawasaki au Royaume-Uni à des revendeurs Kawasaki en république fédérale d'Allemagne, Kawasaki Motors (UK) a déclaré lors de l'audition qu'aucun revendeur Kawasaki en Allemagne n'avait commandé de machines auprès d'un revendeur Kawasaki au Royaume-Uni.

(35) Le fait que des transactions de ce genre n'aient pas eu lieu malgré le stimulant considérable que constituaient les grandes différences existant entre les prix de gros pratiqués au Royaume-Uni et en république fédérale d'Allemagne montre que l'interdiction d'exporter avait un caractère général et que les revendeurs Kawasaki comprenaient que des ventes à l'exportation de cette espèce ne devaient pas être effectuées.

(36) L'avis juridique sur lequel se fonde Kawasaki Motors (UK) était que l'interdiction d'exporter affectait potentiellement le commerce entre le Royaume-Uni et d'autres États membres mais que l'article 85 paragraphe 1 n'était pas applicable parce que l'accord entrait dans les limites du chiffre d'affaires indiquées dans la communication de la Commission concernant les accords d'importance mineure (2). Ainsi que Kawasaki Motors (UK) l'a reconnu par la suite, la dernière partie de l'avis était erronée puisqu'elle ne tenait pas compte de la nécessité de consolider le chiffre d'affaires des sociétés mères et filiales pour évaluer l'importance d'un accord.

(37) L'argumentation susvisée ne réduit pas la gravité de l'infraction puisque Kawasaki Motors (UK) et Kawasaki Motoren GmbH savaient toutes deux qu'elles restreignaient la concurrence. L'avis juridique invoqué ne contestait pas que la concurrence était restreinte mais faisait une supposition erronée quant à l'importance de la restriction. De plus, l'erreur faite dans l'avis juridique était évidente et aurait pu raisonnablement être décelée en lisant la communication de la Commission. La dernière partie de cette communication, que l'avis passe sous silence, indique clairement qu'il faut tenir compte du chiffre d'affaires des sociétés mères et filiales pour déterminer si l'accord est visé par la communication.

(38) En outre, les ventes de Kawasaki Motors (UK) en 1975, lorsque l'avis a été donné, approchaient, quant à la part de marché qu'elles représentaient, le seuil de 5 % fixé par la communication. Pour les machines de grande capacité de 750 centimètres cube (1)JO nº L 29 du 3.2.1975, p. 1. (2)JO nº C 64 du 2.6.1970, p. 1.

et plus que Kawasaki elle-même considère comme constituant une catégorie de motos séparée, sa part de marché n'atteignait pas moins de 29 %. En 1976 les machines Kawasaki représentaient 5,9 % de l'ensemble des immatriculations de motos au Royaume-Uni. Kawasaki Motors (UK) ne pouvait ignorer ces faits.

La procédure au titre des articles 3 paragraphe 1 et 15 paragraphe 2 du règlement nº 17

(39) Kawasaki Motors (UK) et Kawasaki Motoren GmbH ont enfreint l'article 85 du traité CEE d'une manière qui justifie l'infliction d'une amende en application de l'article 15 paragraphe 2 sous a) du règlement nº 17 pour la période commençant par la première imposition de l'interdiction d'exporter le 28 mai 1975 et se terminant le 28 avril 1977, date de la notification.

(40) La présente procédure est limitée à l'examen de l'interdiction d'exporter figurant dans le «Kawasaki Motor Cycle Authorised Dealer Sales and Service Agreement», de la demande introduite au sujet de cette interdiction d'exporter et du comportement à la fois de Kawasaki Motors (UK) et Kawasaki Motoren GmbH. La procédure ne préjuge donc pas l'appréciation que la Commission pourrait porter par la suite sur les autres clauses de l'accord.

II. APPRÉCIATION EN DROIT

Applicabilité de l'article 85 paragraphe 1

(41) Considérant qu'aux termes de l'article 85 paragraphe 1 du traité CEE, sont incompatibles avec le marché commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'association d'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun;

(42) considérant que ces dispositions sont applicables en l'espèce pour les raisons suivantes:

Kawasaki Motors (UK) et Kawasaki Motoren GmbH font partie de la même unité économique que Kawasaki Heavy Industries Ltd, qui est une entreprise au sens de l'article 85. Les revendeurs agréés de Kawasaki Motors (UK) Ltd sont des entreprises au sens de l'article 85 et le «Kawasaki Motor Cycle Authorised Dealer Sales and Service Agreement» est un accord au sens de cet article.

(43) L'interdiction d'exporter figurant dans la clause 3 (v) est interdite par l'article 85 paragraphe 1 parce qu'elle restreint la concurrence et oppose une barrière artificielle aux échanges des produits concernés entre les pays de la Communauté. Les parties en cause dans la présente procédure ont admis que les prix des produits Kawasaki au Royaume-Uni étaient très inférieurs aux prix des mêmes produits Kawasaki en république fédérale d'Allemagne. L'interdiction d'exporter visait à empêcher le mouvement de produits à bas prix vers des zones où des prix plus élevés pouvaient encore être obtenus et avait donc pour objet de restreindre la concurrence.

(44) Elle empêchait l'ensemble des acheteurs dans le marché commun, autres que ceux du Royaume-Uni, d'acheter les produits Kawasaki à la source la plus économique. Dès lors que des différences de prix sensibles existent dans divers États membres pour les mêmes produits, une interdiction d'exporter ces produits affecte toujours la concurrence en isolant les zones où des prix élevés sont obtenus.

(45) La déclaration faite par Kawasaki Motors (UK) elle-même selon laquelle les réexportations sapaient la prospérité des revendeurs Kawasaki sur d'autres marchés (circulaire du 4 novembre 1976) et, pour cette raison, devaient être interdites, montre que le cloisonnement des marchés nationaux permettant l'application de prix différents était une caractéristique du système de distribution des produits Kawasaki dans le marché commun.

(46) Bien qu'elle ne fut pas partie à l'accord conclu avec les revendeurs Kawasaki au Royaume-Uni, Kawasaki Motoren GmbH a néanmoins pris part à la mise en oeuvre de cet accord pour empêcher l'exportation de machines Kawasaki hors du Royaume-Uni et elle a été, avec ses revendeurs, la principale bénéficiaire de la restriction causée à la concurrence. Kawasaki Motoren GmbH a demandé l'assistance de Kawasaki Motors (UK) pour empêcher ces exportations et, en communiquant les numéros de cadre des machines exportées vers la république fédérale d'Allemagne, a permis à Kawasaki Motors (UK) d'identifier les revendeurs effectuant de telles exportations et de leur demander de s'engager à y mettre un terme.

(47) C'est pourquoi les revendeurs Kawasaki au Royaume-Uni et en république fédérale d'Allemagne ne sont pas parties à la présente procédure.

(48) Les revendeurs Kawasaki au Royaume-Uni n'avaient aucun intérêt à faire appliquer l'interdiction d'exporter qui limitait leur liberté commerciale. La coopération de quelques revendeurs n'a été obtenue qu'à la suite de pressions exercées par Kawasaki Motors (UK). Les revendeurs Kawasaki en république fédérale d'Allemagne n'étaient pas parties à l'accord et il n'a pu être prouvé de manière satisfaisante qu'ils aient pris une part active dans la mise en oeuvre de l'interdiction d'exporter.

(49) Les ventes de motos Kawasaki, qui en 1976 se sont élevées à quelque 2 871 machines en Allemagne 11 121 au Royaume-Uni, 8 590 en Italie, 6 020 en France, 1 093 aux Pays-Bas et 930 en Belgique et représentaient une valeur totale supérieure à 30 millions d'unités de compte, sont suffisamment importantes pour que l'interdiction d'exporter ait un effet substantiel sur la concurrence et les échanges entre États membres. Les différences de prix pour les mêmes machines dans les divers États membres atteignaient dans certains cas jusqu'à 50 %. Cette différence de prix était telle qu'il était profitable pour les revendeurs Kawasaki et pour d'autres personnes en république fédérale d'Allemagne d'acheter les motos Kawasaki à des revendeurs Kawasaki au Royaume-Uni pour les importer et les vendre en république fédérale d'Allemagne.

Inapplicabilité de l'article 85 paragraphe 3

(50) Considérant que, pour la période sur laquelle porte la présente procédure, Kawasaki Motors (UK) et Kawasaki GmbH ne peuvent se prévaloir du bénéfice d'une exemption étant donné que la Commission n'avait pas reçu de notification et, partant, n'avait pas eu la possibilité d'examiner si les conditions de l'article 85 paragraphe 3 auraient été réunies;

Applicabilité de l'article 15 paragraphe 2 sous a) du règlement nº 17

(51) Considérant que, en vertu de l'article 15 paragraphe 2 sous a) du règlement nº 17, la Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises et associations d'entreprises des amendes de mille unités de compte au moins et d'un million d'unités de compte au plus, ce dernier montant pouvant être porté à 10 % du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice social précédant par chacune des entreprises ayant participé à l'infraction lorsque, de propos délibéré ou par négligence, elles commettent une infraction aux dispositions de l'article 85 paragraphe 1 ou de l'article 86 du traité CEE. Pour déterminer le montant de l'amende, il y a lieu de prendre en considération, outre la gravité de l'infraction la durée de celle-ci.

(52) Kawasaki Motors (UK) a imposé intentionnellement l'interdiction d'exporter à ses revendeurs. Les éléments recueillis dans le cadre de la présente procédure montrent que la politique de distribution de Kawasaki Motors (UK) et Kawasaki Motoren GmbH était de séparer et de cloisonner les marchés nationaux et de maintenir des niveaux de prix différents dans le marché commun. Kawasaki Motoren GmbH a pris une part active à la mise en oeuvre de cette politique en demandant à Kawasaki Motors (UK) d'arrêter les exportations et en l'assistant dans la mise en application de l'interdiction d'exporter. Ces mesures permettaient à Kawasaki Motoren GmbH de protéger le niveau élevé des prix de vente au détail en Allemagne et elles étaient délibérées.

(53) Les lettres circulaires adressées à tous les revendeurs en date des 4 novembre 1976, 18 janvier 1977 et 1er février 1977 montrent que Kawasaki Motors (UK) a cherché à faire porter la pression collective exercée par elle-même et par ses revendeurs sur toute personne désireuse d'exporter des produits Kawasaki.

(54) Trois des quatre revendeurs auxquels était envoyée la lettre du 22 avril 1977 ont été identifiés avec l'aide de Kawasaki Motoren GmbH. Cette lettre, adressée aux quatre revendeurs qui étaient accusés d'avoir contrevenu à l'interdiction d'exporter, les invitant à s'engager par écrit à se conformer à la clause 3 (v), montrait l'intention de Kawasaki Motors (UK) de poursuivre cette politique.

(55) Kawasaki Motors (UK) et Kawasaki Motoren GmbH ont, de propos délibéré, enfreint l'article 85 paragraphe 1 en ce qu'elles ont su et voulu interdire aux acheteurs potentiels dans d'autres pays de la Communauté l'accès au marché du Royaume-Uni et refuser aux revendeurs de Kawasaki Motors (UK) la possibilité de concurrencer les revendeurs Kawasaki en république fédérale d'Allemagne, en Belgique et dans d'autres pays de la Communauté.

(56) Quant à la gravité de l'infraction, Kawasaki Motors (UK) et Kawasaki Motoren GmbH savaient ou auraient dû savoir que le fait d'imposer une interdiction d'exporter constitue une infraction grave à l'article 85, comme il a été établi par une série d'arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes (1) et de décisions de la Commission. En l'espèce, aucune exemption n'aurait pu leur être accordée au titre de l'article 85 paragraphe 3, même si l'occasion en avait été donnée à la Commission, l'interdiction d'exporter en question ne pouvant ni contribuer au progrès technique ou économique, ni améliorer la production ou la distribution. L'interdiction d'exporter, dont le but était de cloisonner les marchés nationaux, empêchait, en fait, plutôt qu'elle n'améliorait, la fourniture de produits à partir de la source la plus économique.

(57) Kawasaki Motors (UK) a ainsi délibérément cherché à faire obstacle, en ce qui concerne la distribution des produits Kawasaki, à l'un des principaux objectifs du traité CEE, à savoir la création d'un marché unique entre États membres. En participant à la mise en application de cette interdiction, Kawasaki Motoren GmbH a sciemment visé le même résultat.

(58) L'interdiction d'exporter a notamment permis à Kawasaki Motoren GmbH de pratiquer pour les machines Kawasaki des prix plus élevés que ceux qu'elle aurait pu obtenir en l'absence de cette interdiction. Si les revendeurs allemands de Kawasaki avaient été en mesure d'acheter des machines au Royaume-Uni, la différence de 55 % dans le prix de gros n'aurait pu être maintenue. Un bénéfice considérable a été réalisé uniquement en raison de l'existence d'une interdiction d'exporter qui constituait une infraction aux dispositions de l'article 85 paragraphe 1. Les utilisateurs dans la Communauté n'auraient pas payé des prix élevés dans leur pays si les revendeurs Kawasaki au Royaume-Uni avaient été libres de vendre à ces utilisateurs. (1)Par exemple arrêt Grundig/Consten, affaires jointes nºs 56 et 58/64, Recueil de la jurisprudence de la Cour 1966, p. 430.

(59) Le montant du bénéfice directement attribuable à l'interdiction d'exporter ne peut être déterminé avec précision. Cependant, des importateurs parallèles ont sous-coté les prix de détail recommandés par Kawasaki en Allemagne avec des marges allant jusqu'à 20 %. Si aucune entrave n'avait été mise aux importations parallèles, il est probable que les prix de détail recommandés par Kawasaki en république fédérale d'Allemagne et dans d'autres pays de la Communauté auraient dû être substantiellement diminués pour faire face à cette concurrence. Une diminution de ces prix de 10 % aurait représenté, pour les utilisateurs en république fédérale d'Allemagne, pendant la période concernée par la présente procédure, une somme d'environ 400 000 unités de compte et de 2 millions d'unités de compte dans l'ensemble de la Communauté. De même qu'une diminution desdits prix en république fédérale d'Allemagne de 2,50 % seulement, minimum raisonnablement prévisible à moyen terme, aurait représenté une somme de 100 000 unités de compte ; un écart de prix de cette ampleur représenterait, dans l'ensemble de la Communauté, 500 000 unités de compte.

(60) Il est aussi évident que Kawasaki Motors (UK) et Kawasaki Motoren GmbH ont cherché avec vigueur et détermination à empêcher les revendeurs d'exporter. À cet effet, ils ont notamment accusé certains de leurs revendeurs de rupture de contrat, demandé à des revendeurs de communiquer les cas de réexportation présumée de machines et ordonné à des revendeurs de ne pas donner suite à des offres d'achat émanant de personnes indépendantes établies dans d'autres États membres.

(61) Comme circonstances atténuantes, il y a lieu de tenir compte du fait qu'une notification de l'interdiction d'exporter a finalement été faite le 28 avril 1977 et que cette interdiction a été supprimée en juillet 1977 à la réception de la communication des griefs de la Commission au titre de l'article 15 paragraphe 6 du règlement nº 17.

(62) L'infraction a eu lieu pour la première fois par l'utilisation de l'accord type signé pour la première fois le 28 mai 1975. L'action intensive entreprise, pour faire appliquer l'interdiction d'exporter s'est étendue d'avril 1976 à avril 1977.

(63) Kawasaki Motors (UK) a commis l'infraction à l'article 85 paragraphe 1 en imposant l'interdiction d'exporter et est, par conséquent, passible d'une amende conformément à l'article 15 paragraphe 2. L'amende est infligée à Kawasaki Motors (UK) en raison du fait qu'elle est le membre du groupe Kawasaki signataire des accords en question encore que ce soit Kawasaki Motoren GmbH, elle aussi membre à part entière du groupe Kawasaki, qui est le principal bénéficiaire de l'interdiction d'exporter et des effets économiques qui en découlent,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Le fait, pour Kawasaki Motors (UK) Ltd, d'avoir imposé une interdiction d'exporter aux revendeurs Kawasaki établis au Royaume-Uni a constitué une infraction aux dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité instituant la Communauté économique européenne.

Article 2

Une amende de 100 000 (cent mille) unités de compte européennes soit 67 081,40 livres sterling est infligée à Kawasaki Motors (UK) Ltd.

Cette amende est à verser à Lloyd's Bank Ltd, Overseas Department, PO Box 19, 6 Eastcheap, Londres EC3 P3AB, au compte nº 10-86 341 de la Commission des Communautés européennes dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision aux entreprises destinataires.

Article 3

La présente décision forme titre exécutoire conformément aux dispositions de l'article 192 du traité instituant la Communauté économique européenne.

Article 4

La présente décision est destinée aux entreprises suivantes: 1. Kawasaki Motors (UK) Ltd., 748/749 Deal Avenue, Trading Estate, Slough, Berkshire, Royaume-Uni.

2. Kawasaki Motoren GmbH, Berner Strasse 40-44, D 6000 Frankfurt/Main 56, (Nieder-Eschbach), république fédérale d'Allemagne.

Fait à Bruxelles, le 12 décembre 1978.

Par la Commission

Raymond VOUEL

Membre de la Commission

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