COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 30.11.2016
COM(2016) 950 final
COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS
Plan d’action européen de la défense
1. Introduction
Dans son discours sur l’état de l’Union 2016, le président Juncker a mis l’accent sur la nécessité d’avoir une Europe qui protège, donne les moyens d’agir et défende. Pour assumer une plus grande responsabilité dans leur sécurité, les Européens doivent investir dans le développement de capacités de défense clés afin d’être en mesure de dissuader les menaces extérieures, d’y réagir et de s’en protéger. L’Union européenne doit démontrer qu’elle peut agir en tant que garant de la sécurité militaire et non militaire, donnant suite à des appels à une solidarité accrue dans le domaine de la sécurité et de la défense. Cette priorité a aussi été soulignée récemment dans la feuille de route de Bratislava ainsi que par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne.
Une défense européenne plus forte exige que les États membres acquièrent, développent et maintiennent conjointement toute la panoplie des capacités terrestres, aériennes, spatiales et maritimes. La stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de l’Union européenne («stratégie globale») définit plusieurs domaines prioritaires concernant les capacités de défense, dans lesquels l’Europe doit investir et développer des approches collaboratives: renseignement-surveillance-reconnaissance, systèmes d’aéronefs télépilotés, communications par satellite et accès autonome à l’espace et observation permanente de la Terre; capacités militaires de pointe, y compris capacités de soutien stratégiques, ainsi que capacités permettant d’assurer la cybersécurité et la sûreté maritime.
Le marché européen de la défense souffre de fragmentation et pâtit de l’insuffisance de la collaboration industrielle. Le renforcement du marché unique de la défense, la réduction des doubles emplois et l’amélioration de la compétitivité de l’industrie de la défense de l’UE permettraient d’utiliser l’argent public de manière plus efficace et de consolider la base industrielle.
La nécessité d’investir dans des capacités stratégiques
Pour pouvoir concrétiser ces priorités en matière de capacités, l’Europe doit créer les conditions d’une coopération accrue dans le domaine de la défense afin de maximiser le rendement et l’efficacité des dépenses de défense. Cette stratégie devrait aller de pair avec une base industrielle de défense forte, compétitive et innovante, dans l’intérêt de l’économie tout entière: les investissements dans le secteur de la défense ont un effet multiplicateur économique important en termes de création d’entreprises par essaimage et de transfert de technologie vers d’autres secteurs ainsi que de création d’emplois.
Comme l’a demandé le Conseil, le présent plan d'action européen de la défense contribue à garantir que la base industrielle de défense européenne peut répondre aux besoins actuels et futurs de l’Europe en matière de sécurité; à cet égard, il renforce l’autonomie stratégique de l’Union et, par la même, sa capacité à agir avec des partenaires. Ce plan d’action est étroitement lié au plan de mise en œuvre de la stratégie globale dans le domaine de la sécurité et de la défense, qui relève le niveau d’ambition de l’Union et définit des actions pour y parvenir, ainsi qu’à la mise en œuvre de la déclaration commune UE-OTAN signée par le président du Conseil européen, le président de la Commission et le secrétaire général de l’OTAN. Les actions proposées dans ce plan d’action européen de la défense aboutiront à une Union européenne plus forte dans le domaine de la défense, ce qui, à terme, renforcera également l’OTAN.
Le Conseil s’est félicité du plan de mise en œuvre dans le domaine de la sécurité et de la défense et a pris acte des actuels domaines prioritaires dans lesquels l’Europe doit investir de manière adéquate et développer des approches collaboratives. Il a encouragé la Commission à soutenir les États membres dans la mise en œuvre des priorités identifiées en matière de capacités. Par les actions exposées dans le présent plan d’action, la Commission s’engage à soutenir l'intégralité du cycle de développement des capacités de défense, de la recherche et du développement jusqu’à la production de la capacité.
Les enjeux de la défense européenne
Collectivement, l’Europe est en deuxième position mondiale en matière de dépenses militaires. Or, elle accuse toujours un retard par rapport aux États-Unis et pâtit d’une certaine inefficacité dans les dépenses, qui est imputable à des doubles emplois, à un manque d’interopérabilité et à des lacunes technologiques. De surcroît, l’Europe a vu ses budgets de défense diminuer ces dernières années, alors que d’autres acteurs mondiaux (Chine, Russie et Arabie saoudite) ont réalisé une modernisation sans précédent de leur secteur de la défense. Sans investissements durables dans la défense, l’industrie européenne risque de ne pas avoir la capacité technologique de construire la prochaine génération de capacités critiques de défense. À terme, cette situation aura des répercussions sur l’autonomie stratégique de l’Union et sur son aptitude à agir en tant que garant de la sécurité.
Le secteur de l’industrie de la défense ne revêt pas seulement une importance stratégique pour la sécurité de l’Europe. Avec un chiffre d’affaires total de 100 milliards d’euros par an et une main-d'œuvre hautement qualifiée de 1,4 million de personnes qu’il emploie directement ou indirectement en Europe, il apporte également une contribution majeure à l’économie européenne.
L’industrie de la défense est tributaire du lancement de programmes de développement des capacités par les gouvernements et, plus généralement, du niveau des dépenses publiques et des investissements dans la défense. En tant que clients finaux pour les équipements de défense, les gouvernements précisent leurs exigences et jouent le rôle de pouvoirs adjudicateurs, de régulateurs et, souvent, de défenseurs des exportations. De plus, le développement de systèmes de défense s’inscrit dans une perspective à long terme et entraîne des risques élevés du fait que les besoins opérationnels peuvent changer au cours du développement des produits. Cela signifie que les entreprises du secteur de la défense n’investissent pas dans des technologies militaires sans engagement d’achat de la part des pouvoirs publics.
De nombreux États membres ont réduit leur budget de défense ces dix dernières années. Entre 2005 et 2015, les dépenses de défense de l’UE-27 ont baissé de près de 11 % pour atteindre un montant global de 200 milliards d’euros. En 2015, la part des dépenses de défense dans le PIB est également tombée à 1,4 %, le niveau le plus faible jamais enregistré. En termes réels, les budgets de défense dans l’UE ont diminué de 2 milliards d’euros par an au cours de la dernière décennie. À l’heure actuelle, seuls 4 États membres sur 28 atteignent l’objectif de dépenses de 2 % du PIB fixé par l’OTAN lors du sommet du Pays de Galles en 2014: l'Estonie, la Grèce, la Pologne et le Royaume-Uni.
Par comparaison, les investissements des États-Unis ont représenté plus du double des dépenses totales des États membres de l’UE en matière de défense en 2015. La Chine a accru son budget de la défense de 150 % ces dix dernières années. En 2015, la Russie a investi 5,4 % de son PIB dans le secteur de la défense.
Malgré les signes annonciateurs d’un renversement de tendance ces deux dernières années, l’insuffisance persistante des investissements a eu une incidence sur l’industrie européenne de la défense, des maîtres d’œuvre aux fournisseurs. On a observé une absence générale de perspectives en termes de nouveaux projets majeurs dans l’industrie de la défense, y compris un manque de programmes de coopération européens.
La tendance à la réduction des budgets de défense a été aggravée par un manque d'efficacité dans l'utilisation de ces budgets. La fragmentation des marchés européens entraîne des doubles emplois inutiles au niveau des capacités, des organisations et des dépenses. Les dépenses consacrées à la défense passent majoritairement par des procédures nationales de marchés publics, tandis que la part des achats d'équipements s'inscrivant dans un cadre collaboratif n’a représenté que 22 % du total des acquisitions d’équipements en 2014.
La concurrence et la coopération accrue à l’échelle de l’UE, qui sont les deux moyens de renforcer l’efficacité et la capacité d'innovation de la base industrielle de défense européenne, sont encore trop limitées. La diminution des budgets de défense dans toute l’Europe n’a entraîné aucune hausse de la coopération, au contraire: les programmes de coopération sont moins nombreux aujourd’hui qu’il y a vingt ans.
La valeur ajoutée de l’Union européenne
La décision de maintenir les investissements dans la défense et de lancer des programmes de développement des capacités continue à relever pleinement de la compétence et de la responsabilité des États membres. La mobilisation d'instruments et de politiques de l’UE, dans les limites des traités, ne saurait suppléer les faibles niveaux d’investissement des États membres en matière de défense. Cependant, la Commission s’est engagée à compléter les efforts de collaboration déployés par les États membres pour développer des capacités de défense, à donner un effet de levier à ces efforts et à les consolider, afin de relever les défis de sécurité et de soutenir l’industrie européenne de la défense.
Plus particulièrement, les politiques et les instruments de l’UE peuvent apporter une valeur ajoutée: i) en améliorant la compétitivité et le fonctionnement de l’industrie de la défense dans le marché unique; ii) en encourageant davantage la coopération en matière de défense par des mesures d’incitation positives et en ciblant des projets que les États membres ne sont pas en mesure d’entreprendre; iii) en diminuant le nombre de doubles emplois inutiles et, partant, en favorisant une utilisation plus efficace de l’argent public dans une période de contraintes budgétaires.
La Commission a déjà développé des stratégies visant à soutenir la compétitivité de l’industrie européenne de la défense et la création d’un marché de la défense plus intégré en Europe. L’adoption, en 2009, de deux directives sur la défense a contribué à la mise en place progressive d'un marché de la défense européen. En 2013, une batterie de mesures d’ouverture des marchés et de soutien à l’industrie a été proposée: la Commission a dressé une liste d’actions en vue de renforcer davantage le marché unique de la défense et de promouvoir une industrie de la défense plus compétitive.
Pour la première fois, la Commission présente aujourd’hui un plan d'action européen de la défense qui se concentre sur les besoins en matière de capacités et soutient l’industrie européenne de la défense. Ce plan d’action repose sur trois grands piliers qui portent sur des besoins différents mais complémentaires tout au long du cycle de développement des capacités et sont axés sur des technologies et des produits:
le lancement d’un Fonds européen de la défense;
la promotion des investissements dans les chaînes d'approvisionnement de la défense; et
le renforcement du marché unique de la défense.
Par ailleurs, la Commission encouragera, le cas échéant, les synergies entre les sphères civile et militaire dans les politiques de l’UE.
Dans de nombreux domaines concernés, les initiatives annoncées dans ce plan d’action tireront profit des travaux de l’Agence européenne de défense (AED), notamment sur le plan de développement des capacités, les priorités en matière de R & T et les activités stratégiques clés.
2. Lancement d’un Fonds européen de la défense
Dans son discours sur l’état de l’Union du 14 septembre 2016, le président Juncker a demandé la création d’un Fonds européen de la défense. Ce Fonds serait composé de deux structures de financement distinctes («volets»), complémentaires et mises en œuvre de façon progressive:
i) un «volet recherche» pour financer des projets de recherche collaboratifs dans le domaine de la défense au niveau de l’UE. Sa mise en place passerait par le lancement d’une action préparatoire et il devrait en résulter un programme spécifique de l’UE dans le cadre financier pluriannuel de l’UE après 2020;
ii) un «volet capacités» pour financer le développement conjoint de capacités en matière de défense décidées d'un commun accord par les États membres. Il serait financé par la mise en commun des contributions nationales et, dans la mesure du possible, soutenu par le budget de l’UE.
Le «volet recherche» et le «volet capacités» seront complémentaires, mais distincts s’agissant de leur nature juridique et de leurs sources de financement.
Les «volets» seront complétés par un mécanisme de coordination qui prendra la forme d’un conseil de coordination réunissant la Commission, la haute représentante, les États membres, l’Agence européenne de défense, ainsi que l’industrie le cas échéant.
Ce conseil de coordination aura pour mission principale de veiller à la cohérence entre le «volet recherche» et le «volet capacités» afin de mieux appuyer le développement des capacités convenues par les États membres. Ces capacités sont définies selon des processus séparés, notamment ceux de l’Agence européenne de défense et de l’examen annuel coordonné en matière de défense piloté par les États membres qui sera proposé par la haute représentante conformément aux conclusions du Conseil.
Graphique 1. Vers un Fonds européen de la défense
Le «volet recherche»: financer la recherche dans les technologies et produits liés à la défense
La recherche dans des technologies, produits et services innovants est primordiale pour préserver la compétitivité à long terme du secteur de la défense et garantir, en définitive, l’autonomie stratégique de l’Europe. Or, les dépenses de recherche et de technologie (R & T) dans le domaine de la défense ont été considérablement réduites dans les budgets nationaux. Entre 2006 et 2013, les dépenses de R & T en matière de défense dans les 27 États membres participant à l’AED ont diminué de 27 %. En 2014, les dépenses de R & T en matière de défense de l’UE-27 se sont élevées à quelque 2 milliards d'euros. Cette évolution n’a pas été compensée par une hausse de la coopération: pendant la même période, la R & T de défense s’inscrivant dans un cadre de collaboration a baissé de plus de 30 %.
De 2006 à 2011, les États-Unis ont dépensé en moyenne annuelle 9 milliards d’euros pour la R & T de défense et 54,6 milliards d’euros pour la R&D de défense. Ils poursuivront leurs efforts et les intensifieront à la suite de la troisième «Offset Strategy» (plan de développement des technologies militaires). Entre 2012 et 2015, la Russie a doublé ses dépenses de R & D en matière de défense et, d’après les données disponibles, la Chine augmente elle aussi ses investissements dans la R & D.
Il y a lieu d’augmenter les investissements dans la recherche en matière de défense au niveau national et à celui de l’UE pour renforcer la base scientifique et technologique de l’Union dans le domaine des technologies, des produits et des services liés à la défense. Par conséquent, la Commission est prête à mobiliser des fonds de l’UE pour soutenir la recherche en matière de défense à l’échelle de l’UE. Toutefois, ces fonds doivent permettre de compléter et de catalyser les efforts nationaux, et non faire double emploi ou se substituer à eux.
Comme l’a demandé le Conseil européen, la Commission a l’intention de lancer une action préparatoire sur la recherche en matière de défense en 2017, dotée d’un budget de 90 millions d’euros pour la période 2017-2019. Il s’agira d’une première étape, limitée dans le temps et dans les moyens budgétaires, qui servira à évaluer la valeur ajoutée de l’aide budgétaire de l’UE à la recherche en matière de défense. La Commission envisagera de conclure un accord de délégation avec l’AED concernant certaines tâches liées à la mise en œuvre de l’action préparatoire. Les thèmes de recherche seront déterminés dans le programme de travail selon les principes de comitologie.
Si les États membres approuvent le présent plan d’action, l’action préparatoire ouvrira la voie pour que le «volet recherche» prenne la forme d’un programme de recherche européen en matière de défense dans le prochain cadre financier pluriannuel après 2020. Ce programme devrait avoir une envergure crédible. Compte tenu de l’importance des investissements dans la recherche en matière de défense, du niveau des budgets nationaux existants pour la recherche en matière de défense et du coût élevé du développement de technologies de pointe, un tel «volet» peut nécessiter un budget annuel estimé à 500 millions d’euros pour avoir une incidence sensible, conformément aux conclusions du groupe de personnalités sur la recherche en matière de défense européenne ainsi qu’au récent rapport du Parlement européen sur cette question. Ce montant permettrait à l’UE de se hisser parmi les quatre premiers investisseurs dans la recherche et la technologie en matière de défense en Europe.
Le programme devrait être axé sur un nombre limité de projets de recherche clés liés aux priorités convenues par les États membres en matière de capacités de défense, ce qui permettra de garantir une allocation efficace des ressources, de décourager les doubles emplois inutiles et de bénéficier d'économies d’échelle. La recherche financée par l’UE devrait cibler la défense critique ainsi que les technologies axées sur l’innovation, sur la base de l’excellence.
La gouvernance du programme sera soumise aux règles budgétaires de l’UE et devrait tenir compte des spécificités du secteur de la défense. Plusieurs options seront envisagées pour structurer un dialogue entre la Commission, les États membres et l’industrie sur la mise en œuvre du futur «volet», par exemple au moyen de plateformes technologiques. Ce dialogue tirera parti des activités de l’AED dans les domaines de la R & T et des priorités en matière de capacités, ainsi que des activités stratégiques clés. Comme l’a indiqué le groupe de personnalités, le comité du programme devrait être composé de représentants des États membres, travailler selon la «procédure de comitologie» et évaluer la valeur ajoutée de l’UE dans les projets, étant donné notamment la qualité d’utilisateurs finaux des États membres dans le secteur de la défense.
Le financement proviendrait essentiellement de subventions, mais la possibilité de recourir à des achats publics avant commercialisation dans le cas particulier de la recherche en matière de défense sera également étudiée. De tels projets nécessiteront la participation d’instituts de recherche et d’entreprises de plusieurs États membres, et la participation des PME, y compris celles qui travaillent dans le domaine de l’innovation à double usage, sera encouragée. Des règles spécifiques en matière de droits de propriété intellectuelle (DPI) devraient être définies en tenant compte de l’expérience de l’action préparatoire.
Les technologies de défense développées dans le cadre de l’action préparatoire et le futur programme pourront également répondre à des besoins civils. Il conviendrait d’encourager des synergies afin de stimuler l’innovation pour l’ensemble de l’économie civile, comme les technologies concernant la cyberdéfense, tout en évitant les doubles emplois. À l’inverse, la recherche civile pourrait également être utilisée pour soutenir l’industrie de la défense. Horizon 2020 peut servir à stimuler la recherche fondamentale et l’innovation, en particulier en favorisant un effet de fertilisation croisée. À partir de 2017, la Commission rapprochera l’industrie de la défense et les entreprises innovantes civiles bénéficiant d’un financement au titre d’Horizon 2020 afin d’encourager les effets d’entraînement concernant de possibles technologies de rupture et de nouveaux processus dans l’industrie de la défense.
Le «volet capacités»: financer le développement conjoint de capacités de défense
S’il est important de développer la coopération européenne en matière de recherche dans le domaine de la défense, il faut aller plus loin encore et soutenir l'intégralité du cycle de développement des capacités de défense. Alors que travailler ensemble présente des avantages manifestes (économiques et autres), les États membres continuent d’être confrontés à d’importants obstacles qui nuisent au développement de programmes de coopération.
L’absence de coordination et de planification conjointe des capacités à l’échelle de l’UE réduit l’efficience des dépenses publiques et des investissements des États membres, et se traduit par des redondances inutiles. De plus, l’absence de synchronisation des différentes contributions budgétaires entraîne des retards considérables dans le lancement et l’exécution de programmes de coopération. Enfin, alors que le coût pour des capacités de défense complexes est de plus en plus élevé et peut s’avérer prohibitif pour des États membres investissant seuls, la mise en commun des ressources nationales consacrées aux capacités permettrait de faire des économies budgétaires et d’optimiser le rapport coût-efficacité des investissements en matière de défense.
Le «volet capacités» du Fonds aurait pour objectif de lever ces obstacles. Il garantirait le financement conjoint de l’élaboration de priorités stratégiques en matière de capacités, ainsi que des marchés publics s’y rapportant. Ces priorités seraient définies conjointement par les États membres et pourraient inclure des priorités à double usage pertinentes pour la mise en œuvre des politiques de l’UE. Ce volet ciblerait les phases post-R & T, notamment celles concernant les prototypes ainsi que la mise au point et l’acquisition de produits et technologies.
Pour commencer, un montant de référence estimé à 5 milliards d’EUR par an pourrait servir d’objectif. Ce montant équivaudrait à 2,5 % du total des dépenses nationales de défense au sein de l’UE et à 14 % des dépenses nationales consacrées aux capacités de défense. Il permettrait également de combler l’écart par rapport à l’objectif que se sont fixé les États membres de l’AED, à savoir affecter 35 % de leurs dépenses d’équipements à des projets collaboratifs. Ce montant de référence devrait être affiné sur la base d’un examen exploratoire réalisé en collaboration avec les États membres.
Les spécificités de ce «volet capacités» devront être précisées dans le cadre d’une étroite coopération entre les États membres, la haute représentante agissant également en sa qualité de chef de l’Agence européenne de défense, et les autres parties prenantes concernées. Cela se fera conformément aux traités et aux mandats existants, et de manière à maximiser les synergies et à éviter les doubles emplois. Il conviendra en particulier de respecter les travaux de la haute représentante visant à étudier le potentiel de la coopération structurée permanente, conformément au mandat donné par le Conseil. La définition des priorités et la propriété des capacités reviendraient clairement aux États membres, qui seraient également chargés d’exploiter ces capacités. La coopération devrait se renforcer au fil du temps.
Le «volet capacités» pourrait avoir une structure à deux niveaux:
Le premier niveau, accessible à tous les États membres, consisterait en une «structure faîtière». Celle-ci fixerait le cadre commun pour soutenir les États membres et assurerait également une administration à caractère opérationnel pour l’élaboration de projets spécifiques au moyen de règles communes ainsi que d’instruments juridiques et financiers applicables pour l’exploitation des projets. Elle pourrait également contribuer à atténuer les exigences budgétaires des États membres et à surmonter l’absence de synchronisation des cycles budgétaires nationaux.
Le second niveau consisterait en des projets spécifiques visant à développer des capacités communes, auxquels les États membres participeraient sur une base volontaire. Le pouvoir décisionnel en matière de financement et d’exécution de ces projets spécifiques, ainsi que ses modalités de financement, seraient entre les mains des États membres participants, qui devraient respecter les règles fixées au niveau de la structure faîtière. Différents groupes d’États membres pourraient participer à différents projets.
Le développement de capacités communes serait financé par la mise en commun des contributions des États membres décidant de participer. Ce dispositif permettra de garantir un cofinancement continu sur la durée. Chaque contribution serait réservée à des projets spécifiques, préalablement définis par les États membres participants. Les projets seraient donc financièrement indépendants et limités en taille et dans le temps, ce qui permettrait d’exclure toute forme de responsabilité financière partagée entre les projets.
Si nécessaire et si cette modalité a été convenue, la «structure faîtière» et/ou les projets spécifiques peuvent être utilisés pour émettre des titres de créance liés aux projets. Ces titres de créance pourraient être financés par des lignes de paiement des États membres spécifiquement destinées au projet en cause, ou par des garanties additionnelles ou du capital libéré additionnel, soit au niveau du projet spécifique, soit au niveau de la structure faîtière. Dans ce dernier cas, celle-ci pourrait être dotée d’un capital propre.
Les apports nationaux de capitaux au «volet capacités» seront considérés comme ponctuels en vertu du pacte de stabilité et de croissance, ce qui signifie qu’ils seront déduits de l’effort budgétaire structurel attendu des États membres. Le même traitement sera appliqué aux garanties dans la mesure où elles ont une incidence sur le déficit et/ou la dette.
La Commission est disposée à examiner toutes les possibilités de financement du «volet capacités» sur le budget de l’UE, dans le respect des traités. Une contribution de ce type pourrait en particulier être fournie pour le développement technologique et la démonstration de projets, notamment de prototypes. La Commission examinera aussi la possibilité de financer des études de faisabilité et des installations d’essai. Le budget de l’UE pourrait également financer des produits et des technologies à double usage. Enfin, les dépenses administratives afférentes à ce volet pourraient être mises à la charge du budget de l’Union.
La Commission est prête à apporter son expertise financière et technique au soutien de ce volet. Il convient également de tenir compte de l’expérience des États membres et des travaux actuellement menés dans le cadre de l’AED en vue de la création d’un mécanisme de financement collaboratif.
À la suite du discours sur l’état de l’Union du président Juncker et au vu des discussions approfondies menées avec les institutions de l’UE, il convient de créer un Fonds européen de la défense. La Commission propose de procéder comme indiqué ci-dessous.
Pour le «volet recherche»:
Lorsque le budget de l’UE pour 2017 aura été approuvé par le Parlement européen et le Conseil, la Commission lancera une action préparatoire en 2017, qu’elle propose de doter d’un budget de 25 millions d’EUR pour la première année et d’un budget global prévisionnel de 90 millions d’EUR sur trois ans.
Dans le contexte du cadre financier pluriannuel post-2020, si les États membres approuvent le présent plan d’action, la Commission proposera un programme spécifique de recherche en matière de défense doté d’un montant estimatif de 500 millions d’EUR par an.
Pour le «volet capacités»:
La Commission travaillera en étroite collaboration avec les États membres, conjointement avec la haute représentante agissant également en sa qualité de chef de l’AED, pour affiner les modalités et la gouvernance du «volet capacités» afin de soutenir l’élaboration commune, par les États membres, de projets spécifiques en matière de capacités.
Ce volet devrait être capable de mobiliser environ 5 milliards d’EUR par an (pour indiquer un ordre de grandeur). Les premières mesures devraient être prises en 2017. La Commission lancera, sans délai, en 2017 une étude exploratoire pour affiner cette estimation. Sur la base des discussions approfondies menées avec les autres institutions, la Commission est disposée à mettre en place le «volet capacités» et à faciliter son développement ultérieur.
La Commission examinera toutes les possibilités de financement du «volet capacités» sur le budget de l’UE, dans le respect des traités. Elle est également prête à apporter son expertise financière et technique au soutien de ce volet.
3. Favoriser les investissements dans les chaînes d’approvisionnement de la défense
La création du Fonds européen de la défense constituera une étape décisive pour soutenir la compétitivité de l’industrie européenne de la défense. Des mesures supplémentaires sont toutefois nécessaires pour permettre à la base industrielle de défense de rester innovante et compétitive et, en définitive, pour qu’elle puisse répondre aux besoins en capacités de l’Europe. Une attention toute particulière doit également être portée sur la promotion de l’accès au financement des PME et des fournisseurs non traditionnels et sur l’encouragement des investissements dans les chaînes d’approvisionnement de la défense.
Accès au financement des PME et investissements dans le secteur de la défense
Les PME et les entreprises intermédiaires constituent, dans de nombreux États membres, l’épine dorsale de leur secteur de la défense et sont essentielles à la base industrielle de défense européenne et à la chaîne de valeur. Les PME ou filiales européennes des principaux producteurs dans le domaine de la défense (maîtres d’œuvre et sous-traitants) offrent souvent des biens ou services à double usage dans un large éventail de secteurs.
Dans le même temps, elles représentent la partie la plus vulnérable de la chaîne d’approvisionnement de la défense pour ce qui est de l’accès à du capital frais nécessaire à de nouveaux investissements. L’innovation et les évolutions technologiques les plus révolutionnaires sont réalisées en dehors des grands groupes, au sein d’un écosystème de start-up et de PME. Ces entreprises ne bénéficient pas du financement nécessaire à la poursuite de leur expansion, ce qui les empêche en fin de compte de s’intégrer avec succès dans les chaînes d’approvisionnement de la défense. Les établissements financiers choisissent souvent de ne pas soutenir des entreprises du secteur de la défense en raison des risques encourus.
Dans les limites fixées par les traités et en accord avec les organes de décision de la Banque européenne d’investissement (BEI), le groupe BEI peut fournir des prêts, des garanties et des produits en capitaux propres aux fins du développement des activités actuelles à double usage, ce qui ouvrirait de nouveaux débouchés pour certaines parties de la chaîne d’approvisionnement de la défense, notamment pour les PME et les entreprises de taille intermédiaire. Cela pourrait également avoir des retombées positives sur les intermédiaires financiers nationaux et les banques de développement nationales. Un certain nombre d’instruments financiers de l’UE qui reposent sur l’octroi de prêts de la BEI, par exemple le Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI) ou le Programme pour la compétitivité des entreprises et des petites et moyennes entreprises (COSME), pourraient contribuer à soutenir les activités à double usage dans le domaine de la défense. L’EFSI pourrait garantir des opérations de financement et d’investissement de la BEI ou du FEI à l’appui des objectifs définis dans le règlement EFSI, y compris en ce qui concerne des projets liés au secteur de la défense.
Une adaptation supplémentaire des critères d’octroi des prêts du groupe BEI applicables au domaine de la défense pourrait être favorable aux États membres, dont les industries de la défense sont principalement constituées de PME, dans les limites fixées par les traités et sous réserve des décisions nécessaires prises par les organes compétents de la BEI.
La Commission soutiendra, en accord avec les organes de décision de la BEI, l’adaptation des critères d’octroi des prêts applicables au domaine de la défense, dans les limites fixées par les traités. La Commission invite les États membres à soutenir cette démarche.
Renforcer le soutien financier de l’UE pour les investissements dans le secteur de la défense
Les Fonds structurels et d’investissement européens (Fonds ESI) peuvent être utilisés par les États membres dans le secteur de la défense pour autant qu’ils contribuent à la réalisation des objectifs du fonds en question, à savoir
i) cofinancer des projets d’investissements productifs et ii) soutenir la modernisation des chaînes d’approvisionnement de la défense. Les industries de la défense peuvent concourir à la réalisation des objectifs fixés dans le cadre des Fonds ESI, tels que la promotion du développement de l’économie régionale, avec un fort effet multiplicateur sur les investissements en matière de développement des compétences, des emplois, de la technologie et de l’économie.
Les investissements dans le domaine de la défense qui favorisent le développement régional au sens de l’article 174 TFUE peuvent bénéficier d’une aide à finalité régionale. Le Fonds européen de développement régional (FEDER) peut financer des activités dans le domaine de la défense ainsi que des activités à double usage dans les domaines de la recherche et de l’innovation, dans le cadre d’une stratégie de spécialisation intelligente nationale ou régionale. La Commission invite les autorités de gestion régionales et locales, qui sont chargées de définir les demandes en matière d’investissement et les procédures de sélection pour les projets d’investissement, à soutenir les PME et les entreprises intermédiaires également actives dans les chaînes d’approvisionnement de la défense.
La Commission encouragera les cofinancements par l’intermédiaire des Fonds structurels et d’investissement européens (Fonds ESI) de projets d’investissements productifs ainsi que la modernisation des chaînes d’approvisionnement de la défense dans le domaine de la défense, sous réserve que les investissements renforcent la cohésion économique, sociale et territoriale. La Commission, en coopération avec les États membres, continuera à promouvoir ce type de possibilités de financement.
Encourager le développement de pôles régionaux d’excellence
Les pôles régionaux qui se spécialisent dans des niches industrielles (également connus sous le nom de «pôles d’excellence») permettent aux grandes entreprises, aux PME et aux centres de recherche d’exercer leurs activités en étant très proches les uns des autres sur le plan géographique, ce qui favorise la collaboration en matière de recherche et de développement et la spécialisation dans un domaine technologique particulier (par exemple les moteurs d’avion). Alors que la décision de donner un degré de priorité élevé aux pôles régionaux incombe aux acteurs des collectivités locales et régionales, le financement de l’UE (y compris par l’intermédiaire de la BEI) pourrait conduire à des projets de démonstration fructueux dans le domaine de la technologie et au développement de partenariats industriels et scientifiques entre les entreprises et les centres de recherche.
En outre, la Commission a lancé le réseau européen des régions ayant un lien avec la défense pour soutenir les régions de l’UE possédant d’importantes ressources pertinentes dans les domaines de l’industrie et de la recherche et pour partager les bonnes pratiques en ce qui concerne l’intégration des priorités liées à la défense dans leurs stratégies de spécialisation intelligente. La Commission encouragera les États membres à promouvoir les pôles régionaux d’excellence, dans l’intérêt du secteur de la défense.
Soutenir les compétences dans le secteur de la défense
L’industrie européenne de la défense doit conserver les compétences essentielles et en acquérir de nouvelles afin d’être en mesure de fournir des produits et des services de haute technologie dans le domaine de la défense pour répondre aux besoins en matière de sécurité et rester compétitive, à long terme, sur le marché mondial. Toutefois, les entreprises sont confrontées à une pénurie croissante de compétences.
La défense constituera l’un des secteurs prioritaires dans le cadre du plan de la nouvelle stratégie en matière de compétences pour l’Europe. En outre, la Commission soutiendra également la mise en place d’une alliance européenne de compétences dans le domaine de la défense gérée par l’industrie afin d’élaborer une stratégie en matière de compétences sectorielles. L’alliance contribuera au développement et à la mise en œuvre de solutions évolutives et durables pour répondre aux nouveaux besoins en matière d’emplois et de compétences. Pour atteindre ces objectifs, il sera fait appel aux instruments COSME et Erasmus+ afin de mettre en œuvre des projets pilotes. La Commission envisagera des mesures supplémentaires en vue d’améliorer le socle de connaissances et d’innovations en matière de double usage.
Dans le cadre du «plan de coopération sectorielle en matière de compétences», la Commission soutiendra, à partir de 2017, la coopération stratégique entre les parties intéressées principales dans le secteur de la défense.
4. Renforcer le marché unique de la défense
L’ouverture d’un soutien financier aux investissements dans le secteur de la défense ne saurait générer des résultats durables sans une industrie de la défense efficace opérant au sein d’un véritable marché unique favorisant l’innovation. L’augmentation des possibilités de financement n’aboutira pas à des résultats tangibles si celles-ci sont utilisées de manière inefficace.
Une concurrence accrue et une plus grande ouverture du marché de la défense en Europe devraient permettre aux fournisseurs de réaliser des économies d’échelle, d’optimiser leurs capacités de production et de diminuer leurs coûts de production unitaires, rendant ainsi les produits européens plus compétitifs sur le marché mondial. La concurrence devrait jouer tant au niveau des maîtres d’œuvre que des fournisseurs.
Vers un marché européen des équipements de défense concurrentiel et ouvert
Les deux directives sur la passation des marchés publics et les transferts au sein de l’UE ont été adoptées en vue d’améliorer le fonctionnement du marché de la défense et d’augmenter la concurrence, tout en tenant compte des spécificités du secteur de la défense. À condition d’être pleinement appliquées, elles peuvent apporter une contribution importante à la réalisation de l’objectif de mise en place d’un marché européen intégré des équipements de défense concurrentiel et ouvert. Cependant, des efforts plus importants devront être consentis dans cette direction.
Les évaluations des deux directives montrent qu’elles sont globalement adaptées aux objectifs visés et qu’aucune modification législative n’est nécessaire à ce stade. Toutefois, un certain nombre de lacunes ont également été recensées auxquelles il est nécessaire de remédier.
En particulier, l’évaluation de la directive sur la passation des marchés publics dans le domaine de la défense indique que, bien que la valeur des marchés publiés dans l’UE ait plus que doublé, une part très importante des marchés dans le domaine de la défense continue à être réalisée en dehors des règles de l’UE en matière de marchés publics. Cela signifie que ladite directive présente encore un potentiel considérable inexploité qui permettrait de réaliser des économies supplémentaires d’argent public et de créer de nouvelles possibilités d’emploi et de croissance. En outre, les autorités publiques continuent à avoir recours, dans une certaine mesure, aux exigences de compensations/retour industriel, ce qui peut entraîner des incertitudes pour l’industrie. Enfin, les dispositions de la directive relatives à la sous-traitance, qui autorisent les pouvoirs adjudicateurs à exiger du soumissionnaire retenu qu’il sous-traite une partie du marché à des tiers au moyen d’une mise en concurrence, sont rarement utilisées.
La Commission mettra l’accent sur la mise en œuvre efficace de la directive, notamment par voie d’exécution forcée. Elle apportera des éclaircissements en ce qui concerne l’interprétation des exclusions prévues par la directive afin d’aider les pouvoirs adjudicateurs dans l’application des règles: l’adoption de la communication sur la passation de marchés de gouvernement à gouvernement constitue une première étape dans cette direction. La Commission révisera également les orientations relatives aux dispositions en matière de sous-traitance afin que les pouvoirs adjudicateurs disposent d’une plus grande flexibilité. Enfin, la Commission fournira des orientations, encourageant les États membres à faire pleinement usage de la souplesse de la directive pour une passation de marchés basée sur la coopération.
La directive sur les transferts au sein de l’UE instaure un système simplifié de licence pour les transferts intra-UE de produits liés à la défense, y compris au moyen de licences générales de transfert. L’évaluation de ladite directive montre que, malgré sa contribution positive à une plus grande transparence et à des économies de coûts accrues pour les entreprises, il existe encore en Europe différents systèmes de licences qui divergent fortement pour ce qui est du contenu des licences générales de transfert, des exigences nationales en matière de certification des entreprises et de l’utilisation des exceptions. De plus, la plupart des États membres n’ont pas appliqué les dérogations relatives aux agréments préalables et aux transferts dans le cadre de programmes de coopération. La Commission concentrera ses efforts sur la mise en œuvre efficace de la directive, notamment par voie d’exécution forcée. Parallèlement à ce plan d’action, deux recommandations sont adoptées qui visent à promouvoir un fonctionnement harmonisé des licences générales de transfert pour les forces armées et les entreprises certifiées. En outre, la Commission continuera à rechercher les moyens d’harmoniser les deux autres licences générales de transfert, simplifiera la certification dans la mesure du possible et encouragera son adoption dans l’ensemble des États membres.
La Commission donnera la priorité à une mise en œuvre efficace des deux directives «défense», notamment par la voie de l’exécution forcée. Une fois le plan d’action adopté, elle apportera des éclaircissements en ce qui concerne l’interprétation des dispositions spécifiques de la directive sur la passation des marchés publics dans le domaine de la défense au moyen de documents d’orientations en 2017-2018 et adoptera des recommandations en vue d’un fonctionnement harmonisé des licences générales de transfert au cours du premier trimestre 2018.
Renforcer la sécurité de l’approvisionnement
La sécurité de l’approvisionnement est également essentielle à la mise en place d’un véritable marché unique dans le domaine de la défense et est indispensable en vue de futurs programmes de coopération. Les États membres doivent avoir l’assurance que les livraisons transfrontières ne seront pas interrompues. Le renforcement de la sécurité de l’approvisionnement à l’échelle de l’UE passe par une amélioration de la confiance mutuelle entre les États membres.
Certaines mesures, telles que les conditions d’exécution du marché, peuvent contribuer à renforcer la confiance mutuelle entre les États membres en ce qui concerne les transferts de produits liés à la défense. La Commission publiera par conséquent des orientations sur les mesures que les États membres peuvent prendre en vertu du droit de l’UE en matière de marchés publics afin de consolider la sécurité de l’approvisionnement.
La Commission soutient l’initiative des États membres, dans le cadre de l’AED, par laquelle ils expriment leur volonté politique de faciliter les transferts de produits liés à la défense et de s’entraider en temps de crise. La Commission prend note de la réticence des États membres à aller au-delà d’une telle volonté politique à ce stade et à s’entendre sur un régime de sécurité de l’approvisionnement à l’échelle de l’UE.
Dans le cadre de la stratégie de l’Union sur les matières premières, la Commission mettra en évidence les points de blocage et les risques de rupture d’approvisionnement liés aux matières qui sont nécessaires au développement des capacités essentielles en s’appuyant sur les résultats d’une récente étude. Les futurs programmes de recherche de l’UE pourraient également être utilisés pour réduire les risques de rupture d’approvisionnement, y compris par la substitution des matières premières critiques, en tenant compte des travaux dans le domaine des technologies clés génériques (TCG).
Enfin, les principes de la Commission en matière d’économie circulaire, qui reposent sur de nouvelles solutions technologiques et de nouveaux modèles d’entreprise basés sur une production, une consommation et une gestion des déchets plus durables, devraient également s’appliquer au secteur de la défense, dans lequel l’utilisation efficace des ressources et la sécurité des approvisionnements revêtent une importance croissante. En outre, des économies importantes pourraient être réalisées grâce à une meilleure utilisation des mesures d’efficacité énergétique et des énergies renouvelables par les forces armées de l’UE, ces dernières étant de grandes consommatrices d’énergie.
Améliorer l’accès aux marchés transfrontaliers des PME dans le secteur de la défense
Favoriser l’accès aux marchés transfrontaliers ainsi que l’ouverture des chaînes d’approvisionnement est primordial pour un marché européen des équipements de défense efficient et efficace, tout en garantissant le respect de la liberté commerciale du contractant. En particulier, en ce qui concerne les sous-traitants, qui sont souvent des PME, il est nécessaire de leur offrir les mêmes chances d’accéder aux chaînes d’approvisionnement de la défense, quel que soit leur lieu d’implantation sur le marché unique.
Il n’existe pas de «solution miracle» à cette question complexe, mais des progrès réguliers sont nécessaires. Sur la base du rapport du groupe d’experts ad hoc rassemblant les États membres et l’industrie, la Commission élaborera des recommandations pour encourager les pouvoirs adjudicateurs à faciliter la participation transfrontière et des PME aux procédures de passation de marchés dans le domaine de la défense et inciter les maîtres d’œuvre à donner la possibilité aux sous-traitants ainsi qu’aux PME de tous les États membres d’accéder à leurs chaînes d’approvisionnement. Les recommandations de la Commission devraient être complétées par des instruments volontaires, signés par les parties intéressées, y compris les maîtres d’œuvre et les associations d’entreprises.
La Commission adoptera des recommandations, d’ici la fin de l’année 2017, visant à encourager les pouvoirs adjudicateurs à faciliter la participation transfrontière et des PME aux procédures de passation de marchés dans le domaine de la défense et à favoriser leur accès aux chaînes d’approvisionnement de la défense.
Normalisation et évaluation de la conformité
La normalisation et la certification sont des mécanismes décisifs favorisant la coopération, car elles renforcent l’interopérabilité et conduisent à des économies de coûts. L’AED soutient déjà les États membres dans l’élaboration d’une stratégie commune concernant la certification de navigabilité au moyen de l’initiative sur les exigences européennes en matière de navigabilité militaire.
La Commission a développé le concept de «normes hybrides» pour les produits à double usage afin de soutenir la recherche dans le domaine de la sécurité. Dans le cadre de l’application de la communication sur la cybersécurité, la Commission, en coopération avec les États membres et l’industrie, élabore actuellement un cadre de certification européen et étudie les possibilités d’un cadre d’étiquetage volontaire pour la sécurité des produits TIC. Eu égard aux synergies entre les sphères civile et militaire, le secteur de la défense pourrait tirer avantage de ces développements.
Un nouveau mécanisme destiné au suivi et au lancement de l’élaboration de normes de défense et hybrides a fait l’objet d’un accord entre la Commission, l’AED et les États membres. Une option actuellement à l’étude consisterait à élaborer des normes européennes au moyen des procédures établies par les organismes européens de normalisation.
La Commission, dans le cadre de ses compétences, envisagera de soutenir l’élaboration des normes que les États membres ont jugées nécessaires pour des projets de coopération dans des domaines prioritaires.
5. Optimiser les synergies entre les sphères civile et militaire dans l’ensemble des politiques de l’UE
Il est également nécessaire de renforcer la cohérence et les synergies entre les questions de défense et les autres politiques et domaines pertinents de l’UE, de façon à exploiter pleinement la valeur ajoutée de l’UE.
Conformément à la stratégie spatiale européenne, l’investissement dans les capacités spatiales favorisera l’accès de l’Europe au secteur spatial et une utilisation sûre, garantissant sa liberté d’action et son autonomie. La Commission s’est engagée à contribuer à la protection et à la résilience des infrastructures spatiales critiques civiles et militaires européennes, en renforçant le cadre existant de l’UE pour le soutien à la surveillance de l’espace et au suivi des objets en orbite (SST).
Comme cela a été souligné dans la stratégie spatiale, les services spatiaux peuvent également renforcer la capacité de l’UE et des États membres à faire face aux défis grandissants en matière de sécurité. La Commission cherchera à optimiser les synergies et la complémentarité avec les activités pertinentes du Centre satellitaire de l’UE dans le domaine de la sécurité et de la défense spatiales.
Dans le contexte actuel de menace en perpétuelle évolution, l’inadéquation entre les besoins des utilisateurs en matière de télécommunications gouvernementales par satellite (SATCOM) et l’adoption de solutions appropriées en temps utile engendre de plus en plus de risques pour les opérations et infrastructures liées à des missions essentielles dans le domaine de la sécurité de l’Union et de ses États membres.
La Commission, en coopération avec la haute représentante, l’AED et l’Agence spatiale européenne, élabore actuellement, pour la fin de l’année 2017, une initiative en vue de garantir des services de communications par satellite fiables, sûrs et rentables pour l’UE et les autorités nationales chargées de la gestion des missions et des infrastructures critiques dans le domaine de la sécurité.
Afin d’améliorer la capacité de l’UE à répondre aux défis de sécurité en constante évolution liés aux contrôles aux frontières et à la surveillance maritime, la Commission étendra les capacités du programme Copernicus en prenant en considération les nouvelles avancées technologiques dans le domaine, la nécessité de garantir un niveau approprié de sécurité des infrastructures et des services, la disponibilité de différentes sources de données et la capacité à long terme du secteur privé à proposer des solutions appropriées.
La Commission examinera la manière dont le programme Copernicus pourrait répondre aux besoins supplémentaires en matière de sécurité, y compris dans le domaine de la défense. Elle renforcera les exigences relatives à la sécurité ainsi que les synergies avec les capacités d’observation non spatiale en 2018.
Compte tenu de l’importance grandissante du domaine du cyberespace et de son caractère à double usage, il convient de rechercher des synergies entre les efforts déployés en matière de cyberdéfense et les politiques plus générales de l’UE relatives à la cybersécurité. La Communication conjointe sur une stratégie de cybersécurité énonce des mesures visant à améliorer la cyber-résilience des systèmes informatiques, à réduire la cybercriminalité et à renforcer la politique internationale de l’UE dans les domaines de la cybersécurité et de la cyberdéfense. Il est nécessaire de perfectionner la formation en matière de cybersécurité en tenant compte des travaux du groupe européen de formation et d’enseignement sur la cybercriminalité et d’autres activités similaires.
La Commission travaillera en étroite coopération avec les États membres, la haute représentante et d’autres organismes compétents de l’UE pour établir, d’ici 2018, une plateforme de formation et d’enseignement en matière de cyberespace afin de remédier à l’actuel déficit de compétences dans les domaines de la cybersécurité et de la cyberdéfense.
Dans le domaine de l’aviation, bien que l’initiative «ciel unique européen» (SES) et le programme de recherche sur la gestion du trafic aérien dans le ciel unique européen (SESAR) mettent l’accent sur les objectifs de l’aviation civile, les besoins de l’aviation militaire devraient être pris en considération pour éviter des effets négatifs dans le secteur de la défense. L’utilisation de systèmes d’aéronefs télépilotés (drones) à des fins de sécurité nécessite leur intégration efficace dans le système aéronautique sur la base, entre autres, d’efforts civilo-militaires coordonnés, y compris en ce qui concerne les programmes de recherche et de développement. À cet égard, le mécanisme de coordination civilo-militaire entre l’AED, l’Agence européenne de la sécurité aérienne et l’entreprise commune SESAR devrait permettre de mieux exploiter les résultats des activités de recherche militaire dans le contexte du programme SESAR 2020 et des règles et normes de sécurité connexes.
Conformément aux objectifs de la stratégie de sûreté maritime de l’UE, les solutions de capacités à double usage peuvent contribuer à garantir que les autorités militaires aussi bien que civiles pourront bénéficier des technologies, produits et services pertinents. De telles solutions développées par l’industrie de la défense pourraient être efficaces pour apporter des réponses dans les domaines liés à la sécurité, tels que la surveillance maritime, la gestion des risques et la protection des infrastructures critiques.
D’ici 2018, la Commission, en coopération avec la haute représentante, l’AED et les États membres, élaborera des mesures spécifiques visant à soutenir un programme civil et militaire coordonné pour la recherche en matière de sûreté maritime et des capacités de surveillance maritime interopérables.
6. Conclusions
Le président Juncker a appelé l’Europe à renforcer sa politique de défense. L’Europe doit prendre la responsabilité de protéger ses intérêts, ses valeurs ainsi que le mode de vie européen. Elle est confrontée à des défis de sécurité complexes et aucun État membre n’est capable d’y faire face par ses propres moyens.
Dans ce contexte, l’Union européenne peut compléter les efforts déployés à l’échelle nationale et devenir un important pourvoyeur de sécurité à part entière. Le plan de mise en œuvre portant sur la sécurité et la défense de la haute représentante et les conclusions correspondantes adoptées par le Conseil, tout comme le présent plan d’action, contribuent à soutenir le développement de capacités essentielles nécessaires à la sécurité de l’Union et de ses citoyens. La mise en œuvre de la déclaration commune UE-OTAN aidera également à garantir la complémentarité avec l’OTAN.
La Commission, en étroite coopération avec les États membres et la haute représentante, y compris en sa qualité de chef de l’AED, mettra en place un groupe de pilotage de mise en œuvre, qui se réunira régulièrement afin de surveiller et de faire avancer les actions prévues. Une première réunion aura lieu au cours du premier trimestre 2017. Elle mettra également sur pied un forum de consultation avec l’industrie européenne de la défense afin de mieux faire correspondre l’offre et la demande.
La Commission est prête à assumer un niveau d’engagement sans précédent dans le domaine de la défense afin de soutenir les États membres. Elle mettra à profit les instruments de l’UE, y compris le financement de l’UE, et exploitera pleinement les traités en vue de la mise en place d’une union de la défense.
L’adoption de la présente communication par la Commission n’est cependant qu’une première étape.
Afin de tirer parti au maximum du plan d’action européen de la défense, un soutien ferme des États membres et des institutions de l’UE sera nécessaire. La Commission amorcera la mise en œuvre de cet ambitieux train de mesures défini dans le présent document. Sur la base de discussions supplémentaires avec les autres institutions de l’UE, la Commission se tient également prête à faciliter la mise en œuvre du Fonds européen de la défense.
Reposant sur un engagement ferme et partagé des États membres et des institutions, le plan d’action européen de la défense peut changer la donne en renforçant la coopération européenne en matière de défense et en augmentant la solidarité entre les États membres.