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Dokument 32009D0704

    2009/704/CE: Décision de la Commission du 16 juillet 2008 relative à l’aide d’État C 29/04 (ex N 328/03) que l'Italie envisage de mettre à exécution en faveur de la raffinerie sucrière de Villasor, propriété de la société Sadam ISZ [notifiée sous le numéro C(2008) 3531]

    JO L 244 du 16.9.2009, p. 10–20 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

    Status legali tad-dokument Fis-seħħ

    ELI: http://data.europa.eu/eli/dec/2009/704/oj

    16.9.2009   

    FR

    Journal officiel de l'Union européenne

    L 244/10


    DÉCISION DE LA COMMISSION

    du 16 juillet 2008

    relative à l’aide d’État C 29/04 (ex N 328/03) que l'Italie envisage de mettre à exécution en faveur de la raffinerie sucrière de Villasor, propriété de la société Sadam ISZ

    [notifiée sous le numéro C(2008) 3531]

    (Le texte en langue italienne est le seul faisant foi.)

    (2009/704/CE)

    LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

    vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 88, paragraphe 2, premier alinéa,

    après avoir invité les intéressés à présenter leur observations conformément audit article et vu les observations transmises,

    considérant ce qui suit:

    I.   PROCÉDURE

    (1)

    Par lettre du 22 juillet 2003, l'Italie a notifié à la Commission l'aide en faveur de la raffinerie sucrière de Villasor, propriété de la société Sadam ISZ. Par lettres du 19 septembre 2003 et du 30 mars 2004, l'Italie a communiqué les informations complémentaires à la Commission.

    (2)

    Par lettre du 8 septembre 2004, la Commission a informé l’Italie de sa décision d’ouvrir la procédure visée à l’article 88, paragraphe 2, du traité à l’encontre de l’aide en cause.

    (3)

    Par lettres du 13 octobre 2004 et du 7 avril 2005, l'Italie a transmis à la Commission les observations des autorités italiennes concernant la décision d’ouverture de la procédure formelle d’examen.

    (4)

    La décision de la Commission d’ouvrir la procédure a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne  (1). La Commission a invité les intéressés à présenter leurs observations sur l’aide en cause.

    (5)

    La Commission a reçu des observations à ce sujet de la part des intéressés. Elle les a transmises à l’Italie en lui donnant la possibilité de les commenter et a reçu ses commentaires par lettre du 18 mai 2005.

    (6)

    Par lettres du 31 janvier 2008 et du 14 avril 2008, les autorités italiennes ont transmis à la Commission les informations demandées par lettre du 29 mars 2007.

    II.   DESCRIPTION

    (7)

    L'entreprise bénéficiaire, la raffinerie sucrière de Villasor, propriété de la société Sadam ISZ, est un établissement de transformation de la betterave à sucre, le seul existant sur le territoire de la Sardaigne (l'une des plus grandes îles de la Méditerranée).

    (8)

    Les autorités italiennes mettent à disposition de cette raffinerie 3,5 millions d'EUR pour l'indemniser partiellement des pertes subies suite à la baisse de production de sucre causée par la diminution de l’apport de betteraves en raison de la sécheresse en 2001-2002.

    (9)

    En ce qui concerne la production de betteraves, les autorités compétentes ont fourni des données qui montrent une réduction de la production régionale et par conséquent des apports à la sucrerie. Par rapport à la période de référence 1998-2000, la réduction est de 39 % en 2001 et de 68 % en 2002 (2).

    (10)

    Les autorités compétentes ont calculé le dommage subi par la raffinerie de Villasor sur la base des données extraites des bilans de la société pour les exercices 1998 à 2002 et l’ont estimé à 6 858 448 EUR (3). La méthode de calcul du dommage est la suivante: les autorités ont calculé la proportion des coûts fixes par rapport à une tonne de sucre lors d’une période de référence (1998-2000) et ont comparé ce chiffre au rapport des coûts fixes par tonne de sucre lors des années 2001 et 2002. Elles ont considéré comme coûts fixes: les effectifs permanents, les manutentions (services prestés par des tiers et prélèvements d’entrepôt), les frais généraux, les amortissements et les charges financières (4). Pendant la période de référence, l’incidence des coûts fixes sur le produit était de 166,61 EUR/t (5). Pour les années 2001-2002, le même procédé de calcul donne lieu aux résultats suivants: l’incidence des coûts fixes sur le produit en 2001 était de 287,95 EUR/t (6) et, en 2002, de 569,18 EUR/t (7). L’incidence majeure des coûts fixes par rapport à la période de référence a été obtenu en soustrayant l'incidence des coûts fixes de la période de référence de l'incidence des coûts fixes de 2001 et 2002. Le résultat en 2001 est de 121,34 EUR/t et, en 2002, de 402,58 EUR/t (8). Afin de calculer le dommage total subi, la production totale de sucre en 2001 et 2002 a été multipliée par l’indice défini ci-dessus. En 2001, le dommage a été quantifié à 2 427 278 EUR et, en 2002, à 4 431 170 EUR (9), soit un total de 6 858 448 EUR.

    (11)

    Le montant de 3,5 millions d'EUR octroyé par les autorités italiennes correspondrait donc à 51 % du dommage subi. Les autorités italiennes ont expliqué que le montant de l’aide était défini par les impératifs budgétaires.

    (12)

    La présente aide n’est pas cumulable avec d’autres aides.

    (13)

    Les autorités italiennes ont présenté un dossier reprenant les données météorologiques des dernières dix années rédigé par le Service agrométéorologique régional (SAR) pour la Sardaigne (10), afin de démontrer le caractère exceptionnel de la sécheresse qui a touché l'île en 2001-2002. Ces données indiquent e.a. la durée de la sécheresse, le niveau des réserves d'eau, ainsi que des données concernant la situation agroclimatologique de la Sardaigne en 2001-2002.

    (14)

    Les autorités italiennes ont indiqué par ailleurs que la culture des betteraves avait à plusieurs reprises bénéficié d’aides. Au cours de la période 1990-2002, des aides avaient été accordées en 1995, 2000, 2001 et 2002.

    (15)

    Les autorités italiennes estimaient l'aide compatible avec le marché commun aux termes du point 11.3.1 des lignes directrices de la Communauté concernant les aides d'État dans le secteur agricole pour la période 2000-2006 (ci-après les lignes directrices) (11) puisqu’elle est, selon elles, destinée à remédier au dommage souffert par la raffinerie sucrière suite à une réduction de la production de betteraves provoquée par un phénomène météorologique assimilé à une calamité naturelle.

    (16)

    Les autorités italiennes considéraient que cette interprétation était en ligne avec la pratique de la Commission en la matière (12) là où il existe un lien étroit d’interdépendance entre la production agricole de base et les processus de transformation agro-industrielle, et notamment dans le cas où l’entreprise agro-industrielle concernée ne dispose pas de sources d’approvisionnement alternatives.

    (17)

    A cette fin les autorités italiennes ont soutenu que, dans la filière sucrière fondée sur la betterave, les composants agricoles et industriels sont étroitement liés et interdépendants. L’existence d’un établissement de transformation de betteraves dépend de l’existence d’un bassin d’approvisionnement approprié et l'activité de la raffinerie de Villasor consiste exclusivement à transformer en sucre les betteraves produites dans le «bassin d’approvisionnement» situé sur l’île. Les autorités italiennes soutiennent qu'à cause de leurs caractéristiques physiologiques, les betteraves cultivées dans le bassin méditerranéen doivent être récoltées au cours d’un bref laps de temps où la teneur en sucre est la plus élevée et doivent être transportées rapidement (dans les 36 heures suivant la récolte) à l’établissement de transformation sous peine de perdre leur teneur en sucre et d’être attaquées par des champignons les rendant inutilisables. Pour cette raison, les bassins d’approvisionnement sont habituellement situés dans un rayon de 80/100 kilomètres des établissements de transformation et les campagnes de récolte et de transformation sont très brèves. La source d’approvisionnement la plus proche de la sucrerie de Villasor se situe en Italie continentale, à plus de 250 km de distance (dont 180 km par mer).

    (18)

    Les autorités italiennes ont rappelé que la production de sucre est régie au niveau communautaire par l’organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (règlement sur l’OCM du sucre) (13), laquelle prévoit en effet que les raffineries doivent souscrire des contrats avec les producteurs de betteraves de leur bassin d’approvisionnement pour les quotas de production de sucre «A + B» qui leur sont conférés par l’État pour pouvoir bénéficier des prix et des recettes garanties par l'OCM. Le sucre produit en excès par rapport aux quotas «A + B», ne peut pas bénéficier des mesures internes de soutien ni être commercialisé librement dans le marché commun. Il s’ensuit que la raffinerie et les exploitations agricoles qui l’approvisionnent habituellement programment dans leur contrat de culture des superficies à cultiver dont la production ne dépasse pas les quotas «A + B» attribuées par l’État à la raffinerie. Dans ce contexte, il est difficile qu’une raffinerie puisse s’approvisionner auprès d’un bassin de production de betteraves autre que le sien, en raison des disponibilités limitées du produit à transformer en dehors des contrats de culture, de la nécessité d’accords dans ce sens entre les sociétés de transformation du sucre et enfin, pour ce qui concerne le bassin méditerranéen, les bassins betteraviers alternatifs doivent être situés à une distance suffisamment proche pour garantir l'apport d'un produit utilisable.

    (19)

    Les autorités italiennes ont voulu aussi envisager l’éventualité où l’établissement de Villasor aurait trouvé ailleurs la matière première à transformer, mais l’éloignement des zones de production situées en Italie continentale est si important qu’il rend le transport de betteraves antiéconomique, sans compter que la matière première arriverait à destination dans un état inutilisable.

    (20)

    Les autorités italiennes ont fourni à la Commission une simulation des délais et des frais de transport des betteraves d’un bassin «alternatif» situé en Italie continentale. Le temps de transport des betteraves en Sardaigne serait de l’ordre de 2,5 jours à compter du chargement. Étant donné que la transformation des betteraves doit obligatoirement être réalisée dans les trente-six heures suivant la récolte (1,5 jour), celles-ci arriveraient à destination dans un état inutilisable. Le coût de cette opération tel que calculé par les autorités compétentes serait d’environ 10 188 000 EUR pour les deux périodes.

    (21)

    En ce qui concerne l'aspect spécifique de la sécheresse et de la politique de gestion de l'eau (liée à cette dernière) menée en Sardaigne, les autorités italiennes ont indiqué que l'état d'urgence hydrique avait été déclaré en 1995, et qu'un commissaire spécial (Commissario Governativo per l'Emergenza Idrica) avait été nommé, qui dispose de pouvoirs spéciaux en matière de gestion des ressources hydriques, ainsi qu'en matière de réalisation de travaux d'infrastructure de première importance.

    (22)

    Les autorités italiennes ont également indiqué que le plan de développement régional de la Sardaigne pour la période 2000-2006 prévoyait des mesures spécifiques pour la culture des betteraves. Parmi ces mesures, on peut citer l'aménagement hydragricole des terrains, l'acquisition d'équipements et d'installations d'irrigation dans les établissements agricoles, l'introduction de machines plus modernes, et l'introduction de machines pour la fertilisation et la protection des plantes.

    III.   DESCRIPTION DES MOTIFS QUI ONT INDUIT L’OUVERTURE DE LA PROCÉDURE

    (23)

    La Commission a ouvert la procédure de l'article 88, paragraphe 2, du traité CE parce qu'elle doutait de la compatibilité de la mesure avec l'article 87, paragraphe 2, point b), du traité qui considère compatibles avec le marché commun les aides destinées à remédier aux dommages causés par les calamités naturelles ou par d'autres événements extraordinaires. S'agissant d'exceptions au principe général de l'incompatibilité des aides d'État avec le marché commun, établi par l'article 87, paragraphe 1, du traité, la Commission fait une interprétation restrictive de la notion de «calamité naturelle» dont il est fait état à l'article 87, paragraphe 2, point b). Jusqu'à présent la Commission a accepté que les tremblements de terre, les avalanches, les glissements de terrains et les inondations puissent constituer des calamités naturelles.

    (24)

    La Commission a toujours considéré que des phénomènes météorologiques tels que le gel, la grêle, le verglas, la pluie ou la sécheresse ne pouvaient être considérés en tant que tels comme des calamités naturelles au sens de l'article 87, paragraphe 2, point b). Toutefois, étant donné les dégâts que ces phénomènes peuvent causer à la production agricole ou aux moyens de production agricole, la Commission a accepté que ces événements soient assimilés à des calamités naturelles lorsque le niveau de dommage atteint un certain seuil (qui a été fixé à 20 % de la production normale dans les régions défavorisées et à 30 % dans les autres régions). Les lignes directrices (14) prévoient au point 11.3 qu’une aide destinée à indemniser les pertes résultant des mauvaises conditions climatiques ne peut être versée qu’aux agriculteurs ou aux associations de producteurs auxquelles les agriculteurs sont affiliés. La Commission considère les aides qui relèvent du point 11.3 comme compatibles avec le marché commun au titre de l’article 87, paragraphe 3, point c), du traité, moyennant le respect de certaines conditions.

    (25)

    La Commission a toujours considéré que les dispositions du point 11.3 des lignes directrices ne sont pas applicables aux installations agro-industrielles de transformation qui disposent, à son avis, de la flexibilité nécessaire pour gérer leurs approvisionnements. Ceci peut évidemment comporter des coûts supplémentaires des matières premières et/ou une rentabilité plus basse, mais ne saurait justifier l’application directe des règles applicables à la production agricole.

    (26)

    Les autorités italiennes n’ayant pas proposé d’autres bases juridiques pour l’examen et l’autorisation éventuelle des aides, la Commission ne pouvait pas exclure, à ce stade de la procédure, que l’aide prévue constituait une aide au fonctionnement, autrement dit, une aide qui vise à libérer l’entreprise des coûts qu'elle-même aurait dû normalement supporter dans le cadre de sa gestion courante ou de ses activités normales.

    (27)

    De plus, les données transmises par les autorités italiennes et celles dont disposaient la Commission semblaient indiquer que la société Sadam ISZ et les sociétés auxquelles celle-ci appartenait directement ou indirectement — en particulier SAM (15) et Finbieticola Spa (16) — auraient été en mesure de supporter la diminution de la rentabilité de cet établissement.

    (28)

    Enfin, à titre subsidiaire, même si l’application à Sadam ISZ du principe de la compensation visée au point 11.3. des lignes directrices pouvait être jugée acceptable (quod non, à ce stade de la procédure), la période de référence choisie par les autorités italiennes pour le calcul de l’aide aurait été erronée.

    IV.   OBSERVATIONS DES INTÉRESSÉS

    (29)

    Au moment de l’ouverture de la procédure, la Commission a reçu des observations émanant de Sadam ISZ (17), du Président de la région Sardaigne (18) et de Brumar Srl (19).

    (30)

    Dans ses observations, la société Sadam ISZ reprend les motivations, énoncées aux points 12 à 36 de la lettre d’ouverture de la procédure formelle d’examen, ayant conduit les autorités italiennes à envisager l'octroi de l’aide: le caractère exceptionnel de la sécheresse, l'impossibilité de s’approvisionner auprès d’autres bassins en raison de la structure particulière de l’organisation de marché du sucre et l'impossibilité du transport liée à la situation insulaire de la raffinerie, l'importance de la filière agro-industrielle du sucre dans l’économie de l’île. Elle fournit également des informations sur l’évolution de la propriété de la société, qui est actuellement détenue exclusivement par le groupe Eridania Sadam. En effet, depuis le retrait de la société Sviluppo Italia SpA en décembre 2003, la part de Finbieticola est passée également au groupe Eridania Sadam en octobre 2004. Sadam ISZ a fourni une copie de l'accord conclu entre les différentes autorités privées et publiques dans le but de garantir la continuité de la production de betteraves sucrières en Sardaigne. Dans ce cadre, la région Sardaigne assume l'engagement de prendre toutes les initiatives nécessaires pour relancer les investissements dans le secteur de la betterave, en particulier concernant la gestion des ressources d'eau, et d'obtenir dans les plus brefs délais l'autorisation de la Commission concernant l'aide de 3,5 millions d'EUR notifiée sous objet pour compenser les pertes dues à la sécheresse.

    (31)

    La Sadam ISZ estime que sa production n’a aucune influence sur l’évolution du marché européen, non seulement parce qu’elle n’en représente que 0,2 % mais aussi parce que cette production est destinée à 98 % au marché sarde, couvrant près de 50 % de ses besoins, alors que le groupe Eridania Sadam produit 35 % du sucre italien égal à 1,7 % du sucre européen, et détient 23 % du marché national, égal à 2,15 % du marché européen.

    (32)

    Le Président de la région Sardaigne souligne le caractère tout à fait exceptionnel de la situation qui a caractérisé les années 2001-2002, ne pouvant en aucun cas «constituer un précédent applicable à l’avenir à d’autres situations». Le Président de la région met l’accent sur les répercussions négatives qu’aurait la fermeture de la seule raffinerie sarde sur l’économie de l’île au regard de l’importance de la filière betteravière en Sardaigne, du nombre d’exploitations agricoles concernées (1 300 qui occupent environ 5 000 salariés), du nombre d’employés fixes (83) et saisonniers de la raffinerie (près de 200), sans compter les emplois induits par cette activité (tiers chargés de la culture et de la récolte des betteraves, transporteurs, entreprises de manutention des installations) et au regard de la gestion rationnelle des productions agricoles dans leur ensemble, dans la mesure où la betterave constitue une culture importante de rotation. Le Président de la région rappelle l’importance accordée par l’administration régionale à la filière betteravière et son engagement en faveur de sa sauvegarde.

    (33)

    La société Brumar Srl affirme que la raffinerie Sadam n’a pas subi de dommages, puisqu’elle a eu la possibilité d’acheter du sucre en France, en Allemagne, en Slovénie et en Croatie; que toutes les raffineries italiennes ont augmenté le prix du sucre blanc de 50 EUR/t à partir du 1er octobre 2003, avec un profit net de 80 millions d'EUR en faveur des cinq raffineries sucrières présentes sur le territoire italien. Selon Brumar Srl, la société Sadam aurait été la principale bénéficiaire de ce profit, étant donné qu’elle détient la majorité de la production italienne. Dans sa conclusion, Brumar Srl considère qu’une aide devrait être accordée aux producteurs de betteraves pour les dommages subis du fait de l’absence de récolte imputable à la sécheresse ainsi qu’aux travailleurs qui n’ont pas été engagés par les établissements de transformation.

    V.   OBSERVATIONS DE L’ITALIE

    (34)

    Les autorités italiennes ont envoyé leurs observations lors de l’ouverture de la procédure, par lettres du 13 octobre 2004 et du 7 avril 2005, et ont présenté leurs observations en réponse à la lettre de la société Brumar Srl par lettre du 17 mai 2005.

    (35)

    En ce qui concerne les observations de la société Brumar Srl, les autorités italiennes les contestent dans leur totalité, les jugeant dénuées de pertinence dans le cas d’espèce, étant donné que la raffinerie de Villasor n’a jamais importé de sucre des pays indiqués par la société Brumar Srl, l’augmentation des prix du sucre blanc s’appliquant à l’ensemble de la production italienne et se rapportant à la campagne 2003, ultérieure à celles pour lesquelles l’aide devrait être octroyée et elles contestent enfin les calculs concernant les gains présumés réalisés en 2003 par les entreprises sucrières italiennes en général et par le groupe Eridania Sadam en particulier: le groupe Eridania Sadam, dont fait partie Sadam ISZ, a produit en 2003, 34 % du sucre italien.

    (36)

    Dans leur lettre du 13 octobre 2004, les autorités italiennes reconnaissent que la Commission a présenté de manière exhaustive tous les éléments du dossier et toutes les données fournies au cours de la phase précédant l’ouverture de la procédure formelle d’examen, notamment la base juridique, la nature compensatoire de la mesure proposée, les modalités de calcul de l’aide, la base juridique importante pour l’autorisation de la mesure, le lien d’interdépendance entre la composante agricole et industrielle de la filière betteravière, l’impossibilité de s’approvisionner auprès d’autres bassins de production pour l’activité de transformation située en Sardaigne et l’importance de ladite filière dans l’économie de l’île.

    (37)

    Les autorités italiennes considèrent que la mesure d’aide n’a pas d’incidence sur les échanges intracommunautaires, car elle épuiserait ses effets au niveau régional: la production de la raffinerie de Villasor est absorbée à hauteur de 98 % par le marché local et n’entre donc pas en concurrence avec les autres entreprises communautaires, que ce soit sur le marché de l’Italie continentale ou sur le marché communautaire ou international. Les autorités italiennes estiment que la Commission, conformément à son «Projet de communication. Nouvelles lignes directrices pour l’évaluation des aides d’État qui ont des effets limités sur les échanges intracommunautaires», devrait accorder une importance accrue aux effets économiques de l’intervention en objet, compte tenu notamment de sa faible incidence sur les échanges. Selon les autorités italiennes, l’affirmation de la Commission (20) selon laquelle «l’Italie occupe une position importante dans la production du sucre» devrait être mis en relation au moins avec la mention que l’Italie n’était que le quatrième producteur européen de sucre et que dans ce contexte, le groupe Eridania Sadam détenait une part de marché légèrement supérieure à 1,5 % du marché européen, tandis que Sadam ISZ avait une production égale à 0,06 % (données de la campagne 2002).

    (38)

    En ce qui concerne la base juridique autorisant la mesure, les autorités italiennes citent une série de décisions antérieures de la Commission où celle-ci autorisait des aides dans le secteur agricole et agro-industriel sur la base de l’article 87, paragraphe 2, point b), du traité et à la lumière des critères d’application spécifiés au point 11.3 des lignes directrices (et notamment les dossiers d'aides d’État N 83/2000, N 185/2000, N 657/02 et N 729/02), en soutenant que, en l’espèce, les conditions d’application desdits critères sont réunies.

    (39)

    Les autorités italiennes attirent aussi l’attention de la Commission sur le point 3.4 des lignes directrices qui prévoit que le fait qu’une mesure d’aide ne soit pas en tous points assimilable à une des hypothèses prévues par les lignes directrices elles-mêmes n’exonère pas la Commission d'effectuer un examen au cas par cas, en tenant compte des principes exposés dans les articles 87, 88 et 89 du traité, de la politique agricole commune et de la politique de développement rural des Communautés. En conséquence, les autorités italiennes considèrent que si la Commission jugeait que l’article 87, paragraphe 2, point b) n’était pas applicable à la mesure proposée, celle-ci devrait être autorisée sur la base de l'article 87, paragraphe 3, point c).

    (40)

    Selon les autorités italiennes, l’intervention proposée permettrait à la raffinerie de compenser partiellement les pertes importantes subies du fait de l’absence de production de sucre, due au manque de matière première à transformer à la suite de la forte sécheresse de la période 2001-2002. En Sardaigne, une récolte normale de betteraves permettrait à l’établissement de transformation d’atteindre l’équilibre économique. Le soutien offert, qualifié encore une fois de contingent et d’exceptionnel par les autorités italiennes, permettrait aussi à l’ensemble du projet de restructuration lancé en 1999 avec d’importants investissements au niveau industriel (21) et agricole (voir la mesure 4.9 N du POR Sardaigne approuvé par la Commission), d’être mené à terme avec des bénéfices pour le développement économique de l’ensemble de la région.

    (41)

    Les autorités italiennes jugent la référence aux rapports internes du groupe Sadam Eridania dénuée de pertinence pour l’évaluation du cas d’espèce. Le groupe Sadam Eridania et Finbieticola Spa, eu égard au passif important de 2003, a procédé, en décembre 2003, à une recapitalisation de l’entreprise avec un versement de 5 039 393 EUR, honorant ainsi ses obligations vis-à-vis de la société contrôlée face aux risques normaux d’entreprise supportés par Sadam ISZ en 2003 (année de gestion/production normale). Suite à cette recapitalisation, Sviluppo Italia, l'actionnaire public, s'est retiré car il n'avait pas participé à la recapitalisation. Les autorités italiennes n’estiment pas que la société contrôlante puisse avoir pour obligation de suppléer, par des flux financiers internes au groupe, aux pertes causées par un événement à caractère exceptionnel et imprévisible dans le cadre d’une planification diligente des activités entrepreneuriales du groupe. Les autorités italiennes soutiennent que la responsabilité des actionnaires de contrôle doit être circonscrite aux exigences découlant des activités normales de l’entreprise.

    (42)

    Enfin, en ce qui concerne la période de référence établie pour le calcul de l’indemnisation, les autorités italiennes considèrent qu’elles ont respecté les principes fixés au point 11.3.2 des lignes directrices. En outre, le montant de la différence entre la valeur du dommage effectivement supporté par l’entreprise (6 858 448 EUR) et le montant de l’aide proposé (3,5 millions d'EUR) exclut la compensation excessive. Les autorités italiennes font noter que la Commission a déjà accepté des modes de calcul du dommage différents de ceux indiqués dans les lignes directrices, pourvu que la méthode adoptée ne risque pas de compenser en excès les dommages subis (22).

    (43)

    Dans leurs derniers courriers de 2008, les autorités italiennes ont, à la demande de la Commission, apporté des précisions supplémentaires. En particulier, les autorités italiennes ont fourni des données (exprimées en tonnes) au sujet de la production de sucre, qui sont reportées dans le tableau ci-dessous:

    Campagne

    Prod. Villasor

    Prod. Groupe Sadam

    Quota «A + B» groupe Sadam

    Déficit/excès

    1999/2000

    34 310,13

    334 851,41

    308 119,70

    26 731,71

    2000/2001

    26 608,50

    290 403,52

    298 910,30

    –8 506,78

    2001/2002

    20 004,60

    242 879,84

    305 996,50

    –63 116,66

    2002/2003

    11 007,06

    283 729,55

    290 072,50

    –6 342,95

    2003/2004

    9 143,18

    284 895,25

    533 961,70

    – 249 066,45

    2004/2005

    9 520,30

    341 327,21

    540 996,50

    – 199 669,29

    2005/2006

    8 193,55

    623 281,50

    484 356,20

    138 925,30

    (44)

    Les autorités italiennes ont également indiqué que la sucrerie de Villasor avait définitivement cessé ses activités dans le cadre d'un processus de reconversion du secteur, en raison de la réforme de l'OCM sucre. Dans cette perspective, Eridania Sadam a présenté le 30 avril 2007 un projet de reconversion de la sucrerie de Villasor au Ministère des politiques agricoles, alimentaires et forestières.

    (45)

    L'aide qui a été notifiée pourra, d'après les autorités italiennes, s'insérer dans le processus de restructuration de la filière et de l'entreprise qui reste vitale en termes de sauvegarde de l'emploi et de débouchés pour la filière agroénergétique sarde.

    VI.   ÉVALUATION DE L’AIDE

    (46)

    La mesure considérée est une aide à octroyer en faveur d'une raffinerie sucrière. Conformément à l'article 36 du règlement (CE) no 318/2006 du Conseil du 28 février 2006 portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (23) et avant lui l'article 45 du règlement (CE) no 1260/2001, les articles 87, 88 et 89 du traité CE s'appliquent aux produits relevant de ce règlement. Par conséquent, le secteur concerné par la mesure d'aide relève des dispositions communautaires relatives aux aides d'État.

    (47)

    Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.

    (48)

    La mesure en objet correspond à la définition de l’aide visée à l’article 87, paragraphe 1, du traité, étant donné qu’elle confère un avantage économique (sous forme d’aide financière à fonds perdu) à une entreprise déterminée (Sadam ISZ de Villasor), qu’il s’agit d’un financement provenant de ressources publiques (régionales) et que ladite aide est susceptible d’affecter les échanges. Au surplus, il ressort des données fournies par Sadam suite à l'ouverture de la procédure qu'elle est active non seulement sur le marché italien mais également sur le marché intracommunautaire (voir point 31 ci-dessus). En tout état de cause, même si la production de sucre fabriquée dans la raffinerie de Villasor est presque exclusivement destinée au marché sarde, il n'en demeure pas moins que l'aide considérée est susceptible de désavantager un éventuel concurrent d'un autre Etat membre sur ce marché.

    (49)

    D'après la jurisprudence de la Cour de justice européenne, le renforcement de la position concurrentielle d'une entreprise sur la base d'une aide d'État démontre généralement une distorsion de concurrence par rapport à des entreprises concurrentes, qui ne bénéficient pas d'un tel soutien (24). La jurisprudence a indiqué que l'importance relativement faible d'une aide ou la taille relativement modeste de l'entreprise bénéficiaire n'excluent pas a priori l'éventualité que les échanges entre États membres soient affectés (25).

    (50)

    Une mesure affecte les échanges entre États membres dès lors qu'elle entrave les importations en provenance d'autres États membres ou qu'elle facilite les exportations vers d'autres États membres. Ce qui est déterminant, c'est le fait que les échanges intracommunautaires évoluent ou menacent d'évoluer de façon différente en raison de la mesure en question.

    (51)

    Le produit bénéficiant du régime d'aide fait l'objet d'échanges entre États membres (26) et est donc exposé à la concurrence.

    (52)

    L'existence d'une organisation commune de marché dans le secteur du sucre comme indiqué au considérant 46 témoigne d'ailleurs de l'importance des échanges intracommunautaires du sucre ainsi que de la volonté d'assurer des conditions de concurrence non faussées sur le marché commun.

    (53)

    Le projet de communication de la Commission portant sur les nouvelles lignes directrices pour l’évaluation des aides d’État qui ont des effets limités sur les échanges intracommunautaires auquel les autorités italiennes ont fait référence (voir considérant 37) n'a pas été adopté par la Commission et ne saurait infléchir le raisonnement qui précède.

    (54)

    Les critères concernant l'affectation des échanges et la distorsion de la concurrence sont donc pleinement remplis.

    (55)

    La présente mesure constitue donc bien une aide d'État au sens de l'article 87, paragraphe 1, du traité CE.

    (56)

    L’interdiction visée à l’article 87, paragraphe 1, du traité CE n’est pas inconditionnelle. Pour être considérée comme compatible avec le marché commun, la mesure proposée doit pouvoir bénéficier de l’une des dérogations prévues par l’article 87, paragraphes 2 et 3, du traité.

    (57)

    Les dispositions de l'article 87, paragraphe 2, point b), du traité CE, invoquées par les autorités italiennes, qui déclarent compatibles avec le marché commun les aides destinées à remédier aux dommages causés par les calamités naturelles ou par d'autres événements extraordinaires, ne sont pas applicables.

    (58)

    Aucune définition des termes «événement extraordinaire» et «calamités naturelles» n'étant donnée par le traité, il y a lieu de vérifier si la sécheresse qui a touché la Sardaigne peut être considérée une calamité naturelle au sens de l'article 87, paragraphe 2, point b), du traité. En effet, la Commission a pour pratique constante de donner une interprétation restrictive des notions de «calamités naturelles» et «d’événements extraordinaires» visés à l’article 87, paragraphe 2, point b).

    (59)

    La nécessité d'une telle interprétation restrictive a été confirmée avec constance par la Cour de justice (27).

    (60)

    Jusqu’à présent, la Commission a considéré comme des calamités naturelles, les tremblements de terre, les avalanches, les glissements de terrains et les inondations. Parmi les événements extraordinaires, ont été acceptés les guerres, les troubles internes et les grèves et, sous certaines réserves et en fonction de leur ampleur, les accidents nucléaires ou industriels graves et les incendies qui se soldent par des lourdes pertes.

    (61)

    Etant donné les difficultés inhérentes aux prévisions en la matière, la Commission continuera à évaluer les propositions d'octroi d'aides en les examinant cas par cas, conformément à l'article 87, paragraphe 2, point b), et à la pratique établie dans ce domaine. Cette analyse est particulièrement nécessaire dans le cadre d’une aide intervenant dans un secteur sensible, tel que celui du sucre, où toute mesure d’intervention pourrait se heurter aux mesures prévues par l’organisation commune des marchés.

    (62)

    La pratique constante de la Commission est de considérer que les mauvaises conditions atmosphériques, comme le gel, la grêle, le verglas, la pluie ou la sécheresse, ne peuvent être considérées en tant que telles comme des calamités naturelles au sens de l’article 87, paragraphe 2, point b) (voir point 11.3.1 des lignes directrices 2000-2006).

    (63)

    Jusqu'à présent la sécheresse, même importante, n'a jamais été reconnue comme calamité naturelle au sens de l'article 87, paragraphe 2, point b), du traité.

    (64)

    De façon générale, un évènement extraordinaire doit au moins présenter les caractéristiques d'un événement qui, par sa nature et son incidence sur les opérateurs concernés, se distingue nettement des conditions habituelles et sort du cadre des conditions normales de fonctionnement d'un marché.

    (65)

    Au demeurant, les données présentées par l'Italie ne permettent pas de conclure au caractère exceptionnel de la sécheresse, mais plutôt à un caractère chronique: depuis l'automne 1999 (à l'exception de novembre 2001), il y a eu une longue période de sécheresse. L'année 2001-2002 est caractérisée par des précipitations inférieures à la moyenne, mais non exceptionnelles. Au cours de la période 1990-2000, il y a en effet eu trois années où la sécheresse a été plus importante (1994-1995, 1998-1999, 1999-2000). Depuis 1970, il y aurait une tendance générale à une diminution des précipitations (28).

    (66)

    Un autre élément permettant de considérer la sécheresse comme un fait chronique est le fait que la situation d'urgence hydrique a été déclarée en Sardaigne en 1995 (29), et s'est terminée au 31 décembre 2004 (30).

    (67)

    Le fait que des aides aient été accordées à quatre reprises aux producteurs de betteraves pour indemniser les pertes dues à la sécheresse au cours de la période 1990-2002 indique également que la sécheresse n’était pas exceptionnelle.

    (68)

    Au surplus, la prise en compte de la production postérieure à la période 2001-2002 considérée (voir tableau au considérant 43) démontre quant à elle une baisse importante de la production de la raffinerie de Villasor, alors même que la sécheresse n'était pas avérée au cours de cette période.

    (69)

    Par conséquent l'aide proposée par les autorités italiennes ne peut pas être autorisée sous cette base juridique.

    (70)

    Il convient d'examiner si la mesure proposée peut être considérée comme compatible avec le marché commun au sens de l’article 87, paragraphe 3, du traité. Sont plus précisément pertinentes les dispositions du point c), selon lesquelles peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun, les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun.

    (71)

    Dans l’interprétation de la dérogation précitée relativement au secteur agricole, la Commission vérifie, en premier lieu, l’applicabilité du règlement (CE) no 1/2004 de la Commission du 23 décembre 2003 relatif à l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides d’État en faveur des petites et moyennes entreprises actives dans le secteur de la production, de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles (31). En cas d’inapplicabilité dudit règlement, la Commission se fonde sur les lignes directrices.

    (72)

    En l’espèce, le règlement (CE) no 1/2004 n’est pas applicable, l’aide étant destinée à une entreprise de transformation pour des pertes dues à des conditions atmosphériques adverses, cas non prévu par le règlement cité. Par conséquent, la Commission devrait évaluer la mesure sur la base des lignes directrices.

    (73)

    Les lignes directrices réglementent au point 11.2 les aides d’État destinées à réparer les dommages résultant de calamités naturelles ou d'événements exceptionnels. Ce point ne sera pas abordé ci-dessous car il relève de l'application de l'article 87, paragraphe 2, point b), du traité, déjà examinée ci-avant.

    (74)

    Elles réglementent au point 11.3 les aides d’État destinées à indemniser les agriculteurs pour les pertes résultant de mauvaises conditions climatiques telles que le gel, la pluie, le verglas ou la sécheresse, événements qui ne peuvent être considérés en tant que tels comme des calamités naturelles au sens de l'article 87, paragraphe 2, point b), du traité.

    (75)

    Lorsque de tels événements causent des dommages à la production agricole ou aux moyens de production agricoles supérieurs à 20 % de la production normale dans les zones défavorisées et à 30 % dans les autres zones, la Commission les assimile à des calamités naturelles et autorise l’octroi d’aides aux agriculteurs, destinées à compenser ces pertes-là au titre de l’article 87, paragraphe 3, point c), du traité.

    (76)

    De façon générale, la sécheresse peut effectivement être assimilée à une calamité naturelle, comme cela a été fait dans la décision N 331/02 (32) en raison du seuil de dommage dont ont souffert les agriculteurs ou les organisations de producteurs. Cependant, la Commission, comme indiqué dans la lettre d’ouverture de la procédure, a toujours considéré que les dispositions du point 11.3 des lignes directrices n’étaient pas applicables à des installations agro-industrielles de transformation qui disposent, à son avis, de flexibilité pour gérer leurs approvisionnements. Ceci peut évidemment comporter des coûts supplémentaires en matières premières et/ou une baisse de la rentabilité, mais ne semble pas justifier l’application directe des règles applicables à la production agricole. Cette approche, reprise au point 11.3.8 des lignes directrices, a d'ailleurs été confirmée dans un arrêt récent du Tribunal de première instance (33).

    (77)

    Il en résulte que le point 11.3 des lignes directrices agricoles exclut la compatibilité avec le marché commun d'une aide destinée à indemniser les installations agro-industrielles de transformation de pertes résultant de mauvaises conditions climatiques.

    (78)

    Les autorités italiennes avaient fondé une partie de leur argumentation sur le fait que la sucrerie sous objet ne disposait pas de flexibilité pour gérer ses approvisionnements, et que par conséquent, vu le lien étroit existant entre la production de betteraves et la sucrerie, l'aide devait être étendue à la sucrerie. Les autorités italiennes avaient, dans ce contexte, mentionné plusieurs décisions de la Commission comme précédents: la première série de décisions citée ne peut être considérée comme comparable car elles font référence à des événements qualifiés en tant que tels de calamités naturelles [l'aide N 729/02 (34) porte sur des compensations suite aux inondations dans le sud-est français] ou des événements exceptionnels [l'aide N 83/2000 (35) porte sur la contamination de la dioxine en Belgique, le cas N 185/2000 (36) compense les dommages suite à la prolifération des algues dans la mer Adriatique en Italie et le cas N 657/02 (37) concerne le secteur forestier belge endommagé par une prolifération exceptionnelle de scolytes et de champignons]. Comme indiqué précédemment, la sécheresse ne peut être qualifiée en tant que telle de calamité naturelle ou d'événement exceptionnel, de sorte que les décisions citées ne peuvent être considérées comme des précédents similaires au cas sous objet.

    (79)

    Les autorités italiennes avaient également mentionné les décisions N 745/2000 — C 4/01 (38) et N 331/02 (39). Dans ces deux cas, la Commission a conclu que la sécheresse pouvait être assimilée à une calamité naturelle en raison du seuil de dommage provoqué. Dans les deux cas, l'aide est accordée à des producteurs primaires et à des «consorzi di bonifica». La Commission a conclu à l'égard de ces «consorzi di bonifica» que les lignes directrices agricoles ne s'appliquaient pas, en raison du fait que l'eau n'est pas un produit relevant de l'annexe I du traité.

    (80)

    Cependant, ces «consorzi di bonifica» ne peuvent être assimilées à des entreprises normales comme c'est le cas de la sucrerie sous objet. Les «consorzi di bonifica» sont des entreprises publiques autonomes, qui gèrent les zones d'assèchement. En échange ils reçoivent des paiements de la part des agriculteurs pour l'eau d'irrigation fournie. Cette différence entre les «consorzi di bonifica» et des entreprises de transformation ou de commercialisation de produits agricoles a d'ailleurs été confirmée par le fait que, dans le cas N 745/2000 — C 4/01 précité, la Commission a décidé d'ouvrir la procédure à l'égard de la partie de l'aide qui concernait les entreprises et les coopératives actives dans la transformation et la commercialisation de produits agricoles, en indiquant qu'une aide à ces entreprises de transformation ne pouvait être approuvée, en application des lignes directrices agricoles. La notification ayant par la suite été retirée, aucune décision finale n'a été prise quant à ce cas.

    (81)

    En ce qui concerne la difficulté pour la sucrerie de s’approvisionner ailleurs, les autorités italiennes ont avancé des arguments tendant à démontrer les difficultés inhérentes à chaque raffinerie pour s’approvisionner dans un bassin de production de betteraves différent du sien en raison d’un système de contrat liant les producteurs de betteraves et les raffineries, de la situation insulaire de la raffinerie sous objet, et de la courte durée de conservation des betteraves. Cette impossibilité de s'approvisionner ailleurs découle toutefois du règlement (CE) no 1260/2001 qui instaure un système de contrat entre les producteurs de betteraves et les raffineries. Les autorités italiennes ont elles-mêmes indiqué que, dans des conditions normales, il n'est pas possible de s'approvisionner dans d'autres bassins de production de betteraves, destinés à d'autres entreprises, sans faire chuter la production finale de sucre de ces autres entreprises et donc les empêcher d'atteindre leurs quotas. Elles ont donc indiqué qu'en général, la possibilité, pour une raffinerie, de s'approvisionner dans des bassins de production autres que les bassins de production habituels, n'était pas fréquente.

    (82)

    L'argument du manque de flexibilité des entreprises invoqué par l'Italie est par conséquent inhérent à toute sucrerie en raison du règlement (CE) no 1260/2001 précité, quelle que soit la localisation de l'entreprise. Un tel argument s'appliquerait ainsi à l'ensemble des entreprises de transformation dont le lien avec les producteurs est inhérent à l'organisation du marché sur lequel elles sont actives. L'acceptation de cet argument irait à l'encontre d'une interprétation stricte des lignes directrices agricoles, interprétation stricte qu'il y a pourtant lieu de retenir, s'agissant d'une exception à la règle générale d'incompatibilité des aides.

    (83)

    Par conséquent l'aide proposée par les autorités italiennes ne peut pas être autorisée sous cette base juridique.

    (84)

    Les autorités italiennes avaient également indiqué le point 3.4 des lignes directrices agricoles précitées comme base juridique pour l'aide. En application de ce point, la Commission examine, au cas par cas, toutes les mesures d'aides qui ne sont pas couvertes par les lignes directrices agricoles, en tenant compte des principes exposés dans les articles 87, 88 et 89 du traité, de la politique agricole commune et de la politique communautaire en matière de développement rural. Comme indiqué dans les paragraphes précédents, les mesures d'aides en cause (aides aux entreprises de transformation visant à la compensation des dommages subis par des mauvaises conditions climatiques) sont spécifiquement couvertes par le point 11.3 des lignes directrices, qui les exclut du bénéfice de l'aide, de sorte que le point 3.4 ne s'applique pas.

    (85)

    Dans un souci d'exhaustivité, la Commission examine si les lignes directrices au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté ne sont pas applicables au cas d'espèce. La première condition pour pouvoir bénéficier d'une aide au sauvetage ou à la restructuration est que l'entreprise en cause soit considérée comme étant en difficulté au sens des lignes directrices pour les aides au sauvetage et à la restructuration d'entreprises en difficulté (40). Il ne ressort pas des informations en possession de la Commission que l'entreprise ait été en difficulté au sens des lignes directrices susmentionnées au moment où l'aide a été notifiée. Le seul indice de difficulté connu est le fait qu'une recapitalisation ait été nécessaire en raison d'un passif important en 2003. Les actionnaires privés sont intervenus pour recapitaliser l'entreprise en décembre 2003, rendant dès lors tout soutien public à la restructuration superflue. De plus, l'entreprise a déjà reçu une aide à la restructuration, approuvée par la Commission en 1999 (41). Moins de dix ans s'étant écoulé depuis la fin de la période de restructuration, aucune nouvelle aide à la restructuration ne peut être accordée en vertu du principe de l'aide unique mentionné au point 3.2.3 des lignes directrices au sauvetage et à la restructuration. En tout état de cause, la Commission tient à souligner qu'il incombe à l’État membre concerné, pour s’acquitter de son devoir de coopération envers la Commission, de fournir tous les éléments de nature à permettre à cette institution de vérifier que les conditions de la dérogation dont il demande à bénéficier sont réunies (42). Dans le cas d'espèce, les autorités italiennes n'ont jamais invoqué l'application des lignes directrices au sauvetage et à la restructuration, ni fourni aucun document permettant à la Commission d'examiner les données à la lumière de ces lignes directrices, et ceci, malgré les indications données par la Commission au considérant 44 de la décision d'ouverture.

    (86)

    Les informations dont disposait la Commission au moment de l’ouverture de la procédure semblaient indiquer que la société Sadam ISZ et les sociétés — en particulier SAM et Finbieticola Spa — auxquelles celle-ci appartenait directement ou indirectement, auraient été en mesure de supporter la diminution de la rentabilité de cet établissement.

    (87)

    La société Sadam ISZ étant passée entièrement sous le contrôle d’Eridania Sadam au cours de la procédure, la Commission note que la société chef de file a été en mesure d'honorer ses obligations à l’égard de la société contrôlée, en lui permettant de poursuivre son activité, compte tenu également des investissements considérables consentis dans le cadre du plan de restructuration lancé en 19992000, et de la recapitalisation qui a eu lieu en 2003-2004. Par conséquent, comme indiqué au considérant 75, l'entreprise ne semble pas en difficulté, ce qui écarte l'application des lignes directrices au sauvetage et à la restructuration.

    (88)

    La décision d’ouverture de la procédure mentionnait également à titre subsidiaire, que, même si l’application à Sadam ISZ du principe de la compensation visée au point 11.3 des lignes directrices pouvait être jugée acceptable (quod non, à ce stade de la procédure), la période de référence choisie par les autorités italiennes pour le calcul de l’aide aurait été erronée. L’application du point 11.3 des lignes directrices n’ayant pas été jugé applicable pour les raisons exposées ci-dessus, il n’y a pas lieu d’examiner ce dernier doute soulevé lors de la décision d’ouverture de la procédure.

    VII.   CONCLUSION

    (89)

    La Commission, eu égard aux considérations qui précèdent, considère que l’aide d’État que l’Italie envisage de mettre à exécution en faveur de la raffinerie sucrière de Villasor, propriété de Sadam ISZ, à hauteur de 3 500 000 EUR, n'est pas compatible avec le marché commun,

    A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

    Article premier

    L’aide d’État que l’Italie envisage de mettre à exécution en faveur de la raffinerie sucrière de Villasor, propriété de Sadam ISZ, à hauteur de 3 500 000 EUR, n'est pas compatible avec le marché commun.

    La mise à exécution de ladite aide n'est, par conséquent, pas autorisée.

    Article 2

    La République italienne est destinataire de la présente décision.

    Fait à Bruxelles, le 16 juillet 2008.

    Par la Commission

    Mariann FISCHER BOEL

    Membre de la Commission


    (1)  JO C 51 du 1.3.2005, p. 9.

    (2)  La Commission a autorisé l’octroi d’aides aux producteurs agricoles sardes au titre du point 11.3 des lignes directrices de la Communauté concernant les aides d’État dans le secteur agricole (JO C 28 du 1.2.2000, p. 2), pour les dommages qu’ils ont souffert suite à cette sécheresse, aides N 745/2000 et N 331/02.

    (3)  Les autorités compétentes ont transmis à la Commission le bilan et leur estimation du coût des dommages par lettre du 27 novembre 2003.

    (4)  Les autorités compétentes ont déduit un taux de 27,2 % des amortissements des années 2000-2002, égal au taux de l’aide que Sadam Spa a reçu comme aide d’État pour les investissements réalisés au titre de la restructuration de l’établissement de transformation de Villasor. Aide d’État N 157/99, décision (2000) D/103781 du 19 mai 2000 (JO C 175 du 24.6.2000, p. 20).

    (5)  Pour la période de référence complète, le total des coûts fixes est de 15 762 413,37 EUR et le total de la production de sucre est de 94 609 tonnes (15 762 413,37/94 609 = 166,61 EUR/t).

    (6)  En 2001, les coûts fixes s’élevaient à 5 760 061,14 EUR et la production de sucre à 20 004 tonnes (5 760 061,14/20 004 = 287,95 EUR/t).

    (7)  En 2002, les coûts fixes s’élevaient à 6 265 000,70 EUR et la production de sucre à 11 007 tonnes (6 265 000,70/11 007 = 569,18 EUR/t).

    (8)  En 2001 (287,95 – 166,61) = 121,34 EUR/t en 2002 (569,18 – 166,61) = 402,58 EUR/t.

    (9)  En 2001 (121,34 × 20 004) = 2 427 278 EUR, en 2002 (402,58 EUR × 11 007 t) = 4 434 170 EUR.

    (10)  Le SAR est le service public d’agrométéorologie de la Sardaigne.

    (11)  JO C 28 du 1.2.2000, p. 1.

    (12)  À ce propos elles citent la décision de la Commission du 5 décembre 2000 arrêtée dans le cadre du dossier d’aide d’État N 185/2000 (JO C 19 du 20.1.2001, p. 6). Dans ce cas, la Commission avait retenu conformes à l’article 87, paragraphe 2, point b), du traité, les indemnisations des entreprises d’épuration de coquillages suite à la pollution par les mucilages en 1997.

    (13)  Au moment de la notification, le marché était régie par le règlement (CE) no 1260/2001 du Conseil du 19 juin 2001 relatif à l’organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (JO L 178 du 30.6.2001, p. 1).

    (14)  Voir note 11 de bas de page.

    (15)  SAM srl est une société contrôlée par Sadam Spa. Le groupe Sadam détient 35 % de la production nationale de sucre.

    (16)  Finbieticola Spa a notamment pour mission, la participation aux industries sucrières italiennes dont elle possède des participations dans le capital.

    (17)  Lettre du 31.3.2005.

    (18)  Lettre du 10.12.2004.

    (19)  Télécopie du 7.3.2005.

    (20)  Voir point 38 de la lettre d'ouverture.

    (21)  Voir note 4 de bas de page.

    (22)  Voir aide d’État N 661/01, décision C(2003) 130 du 13 février 2003 (JO C 68 du 21.3.2003, p. 17).

    (23)  JO L 58 du 28.2.2006, p. 1.

    (24)  Arrêt de la Cour de justice du 17 septembre 1980, affaire C-730/79, Recueil 1980, p. 2671, points 11 et 12.

    (25)  Arrêt de la Cour de justice du 21 mars 1990, affaire C-142/87, Recueil 1990, p. I-959, point 43, et arrêt du 14 septembre 1994, affaires jointes C-278/92 et C-280/92, Recueil 1994, p. I-4103, points 40 à 42.

    (26)  Dans le secteur du sucre les échanges intracommunautaires sont importants. L’Italie, en 2002, a importé du sucre des autres États membres (UE-15) à hauteur de 366 539 tonnes, tandis que les exportations ont atteint 37 564 tonnes.

    (27)  CJCE, 11 novembre 2004, Espagne/Commission, affaire C-73/03, point 37; CJCE, 23 février 2006, affaires C-346/03 et C-529/03, Giuseppe Atzeni e.a., point 79.

    (28)  Sources des données: SAR: Le precipitazioni sulla Sardegna da Settembre 2001 ad Agosto 2002.

    (29)  Décret du Président du Conseil des Ministres du 20 juin 1995, Dichiarazione dello stato di emergenza, en vertu de la loi 225/92.

    (30)  http://www.regione.sardegna.it/j/v/138?s=1&v=9&va=3&c=1219

    (31)  JO L 1 du 3.1.2004, p. 1.

    (32)  Lettre de la Commission C(2002) 3211 du 2 septembre 2002,

    http://ec.europa.eu/community_law/state_aids/agriculture-2002/n331-02.pdf

    (33)  Arrêt du Tribunal de première instance du 14 décembre 2005, affaire T-200/04, par. 46: «Il résulte du libellé et de l'économie générale de ces dispositions que le point 11 des lignes directrices opère une distinction de principe entre agriculteurs et activité de production agricole, d'une part, et entreprises de transformation et activité de transformation, d'autre part. Seules les aides destinées à compenser des dommages subis par des agriculteurs, et ce dans l'exercice d'une activité de production agricole, sont susceptibles d'être approuvées en vertu de ce point».

    (34)  Lettre de la Commission C(2003) 910 final du 2 avril 2003,

    http://ec.europa.eu/community_law/state_aids/agriculture-2002/n729-02.pdf

    (35)  Lettre de la Commission SG(2000) D/103852 du 25 mai 2000,

    http://ec.europa.eu/community_law/state_aids/agriculture-2000/n083-00.pdf

    (36)  Lettre de la Commission SG(2000) D/108955 du 5 décembre 2000,

    http://ec.europa.eu/community_law/state_aids/peche-2000/n185-00.pdf

    (37)  Lettre de la Commission du 6 décembre 2002,

    http://ec.europa.eu/community_law/state_aids/agriculture-2002/n657-02_fr.pdf

    (38)  Décision de la Commission du 2 février 2001 (JO C 263 du 19.9.2001, p. 16).

    (39)  Lettre de la Commission C(2002) 3211 du 2 septembre 2002,

    http://ec.europa.eu/community_law/state_aids/agriculture-2002/n331-02.pdf

    (40)  JO C 288 du 9.10.1999, p. 2.

    (41)  Lettre de la Commission SG(2000) D/103781 du 19 mai 2000.

    http://ec.europa.eu/community_law/state_aids/agriculture-1999/n157-99.pdf

    (42)  Arrêt du Tribunal du 15 juin 2005, Regione autonoma della Sardegna/Commission, affaire T171/02, Recueil 2005, p. II2123, point 129.


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