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Document 62024CO0122

    Ordonnance de la Cour (neuvième chambre) du 12 septembre 2024.
    LM contre Direktor na Oblastna direktsia na MVR – Veliko Tarnovo.
    Renvoi préjudiciel – Article 53, paragraphe 2, et article 94 du règlement de procédure de la Cour – Exigence de présentation du contexte factuel du litige au principal ainsi que des raisons justifiant la nécessité d’une réponse à la question préjudicielle – Absence de précisions suffisantes – Irrecevabilité manifeste.
    Affaire C-122/24.

    ECLI identifier: ECLI:EU:C:2024:782

    ORDONNANCE DE LA COUR (neuvième chambre)

    12 septembre 2024 (*)

    « Renvoi préjudiciel – Article 53, paragraphe 2, et article 94 du règlement de procédure de la Cour – Exigence de présentation du contexte factuel du litige au principal ainsi que des raisons justifiant la nécessité d’une réponse à la question préjudicielle – Absence de précisions suffisantes – Irrecevabilité manifeste »

    Dans l’affaire C‑122/24,

    ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Administrativen sad Varna (tribunal administratif de Varna, Bulgarie), par décision du 31 janvier 2024, parvenue à la Cour le 14 février 2024, dans la procédure

    LM

    contre

    Direktor na Oblastna direktsia na MVR – Veliko Tarnovo,

    LA COUR (neuvième chambre),

    composée de Mme O. Spineanu–Matei, présidente de chambre, M. J.–C. Bonichot (rapporteur) et M. S. Rodin, juges,

    avocat général : M. P. Pikamäe,

    greffier : M. A. Calot Escobar,

    vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour,

    rend la présente

    Ordonnance

    1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 47 et 48, de l’article 49, paragraphe 3, et de l’article 50 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).

    2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant LM au Direktor na Oblastna direktsia na MVR – Veliko Tarnovo (directeur de la direction régionale du ministère de l’Intérieur – Veliko Tarnovo, Bulgarie) au sujet d’un arrêté d’application d’une mesure administrative de retrait temporaire du permis de conduire pris par un inspecteur de police de cette direction.

     Le cadre juridique

     Le droit de l’Union

     La directive 2006/126/CE

    3        Le considérant 8 de la directive 2006/126/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, relative au permis de conduire (JO 2006, L 403, p. 18), est libellé comme suit :

    « Pour répondre à des impératifs de sécurité routière, il convient de fixer les conditions minimales auxquelles le permis de conduire peut être délivré. Il faut procéder à une harmonisation des normes relatives aux examens à subir par les conducteurs et à l’octroi du permis. [...] » 

    4        Le considérant 15 de cette directive énonce :

    « Il convient, pour des raisons en rapport avec la sécurité routière, que les États membres puissent appliquer leurs dispositions nationales en matière de retrait, de suspension, de renouvellement et d’annulation du permis de conduire à tout titulaire de permis ayant transféré sa résidence normale sur leur territoire. »

    5        L’article 2 de ladite directive, intitulé « Reconnaissance mutuelle », prévoit, à son paragraphe 1 :

    « Les permis de conduire délivrés par les États membres sont mutuellement reconnus. »

    6        L’article 11 de la même directive, intitulé « Dispositions diverses relatives à l’échange, au retrait, au remplacement et à la reconnaissance des permis de conduire », dispose, à son paragraphe 2 :

    « Sous réserve du respect du principe de territorialité des lois pénales et de police, l’État membre où est située la résidence normale peut appliquer au titulaire d’un permis de conduire délivré par un autre État membre ses dispositions nationales concernant la restriction, la suspension, le retrait ou l’annulation du droit de conduire et, si nécessaire, procéder à ces fins à l’échange de ce permis. » 

     Le règlement de procédure de la Cour

    7        L’article 94 du règlement de procédure de la Cour dispose :

    « Outre le texte des questions posées à la Cour à titre préjudiciel, la demande de décision préjudicielle contient :

    a)      un exposé sommaire de l’objet du litige ainsi que des faits pertinents, tels qu’ils ont été constatés par la juridiction de renvoi ou, à tout le moins, un exposé des données factuelles sur lesquelles les questions sont fondées ;

    [...]

    c)      l’exposé des raisons qui ont conduit la juridiction de renvoi à s’interroger sur l’interprétation ou la validité de certaines dispositions du droit de l’Union, ainsi que le lien qu’elle établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige au principal. »

     Le droit bulgare

    8        L’article 171 du Zakon za dvizhenieto po patishtata (loi relative à la circulation routière) (DV no 20, du 5 mars 1999, p. 2), dans sa version applicable au litige au principal, prévoit :

    « [...] Afin d’assurer la sécurité de la circulation routière et de mettre fin aux contraventions administratives, les mesures administratives coercitives suivantes sont appliquées :

    1.      retrait temporaire du permis de conduire d’un conducteur :

    [...]

    b)      [...] qui conduit un véhicule à moteur avec une concentration d’alcool dans le sang supérieure à 0,5 pour mille, constatée par un examen en laboratoire médical et chimique ou par un examen effectué au moyen d’un dispositif d’analyse probant ou par un autre moyen technique déterminant le taux d’alcool dans le sang en le mesurant dans l’air expiré, ou après avoir consommé des substances stupéfiantes ou des substances analogues, consommation constatée par un examen médical et chimio-toxicologique en laboratoire ou par un test, ou qui refuse d’être contrôlé par un moyen technique ou par un test, d’être examiné au moyen d’un dispositif d’analyse probant ou de fournir des échantillons biologiques pour un examen chimique et/ou pour un examen chimio–toxicologique en laboratoire – jusqu’à ce que soit tranchée la question de sa responsabilité, mais pas au-delà de 18 mois ; en présence d’un examen par prise de sang ou d’un examen effectué au moyen d’un dispositif d’analyse probant, conformément à l’article 174, paragraphe 4, les valeurs constatées étant déterminantes ;

    [...]

    2a.      [...] Suspension de l’immatriculation d’un véhicule routier d’un propriétaire qui conduit un véhicule à moteur :

    [...]

    b)      avec une concentration d’alcool dans le sang supérieure à 0,5 pour mille et/ou ayant consommé des substances stupéfiantes ou des substances analogues, ou qui refuse de se soumettre à un contrôle par un moyen technique et/ou par un test visant à déterminer la concentration d’alcool et/ou la consommation de substances stupéfiantes ou de substances analogues, ou n’ayant pas obtempéré à l’ordre de se soumettre à un examen effectué au moyen d’un dispositif d’analyse probant ou à un examen médical et au prélèvement d’échantillons biologiques en vue d’un examen chimique et/ou chimio-toxicologique en laboratoire visant à déterminer la concentration d’alcool dans son sang, et/ou la consommation de substances stupéfiantes ou de substances analogues – pour une période de 6 mois à un an ;

    [...] »

     Le litige au principal et la question préjudicielle

    9        Le 10 juin 2022, LM a été interpelé lors d’un contrôle routier à Veliko Tarnovo (Bulgarie). Il a été constaté, au moyen d’un test de dépistage, qu’il avait consommé des substances stupéfiantes ou des substances analogues. Le résultat du test a été accepté par l’intéressé, qui a confirmé avoir consommé certaines substances stupéfiantes la veille. Il a toutefois refusé de fournir un échantillon de sang et d’urine en vue d’une analyse chimique.

    10      Ce même 10 juin 2022, LM a fait l’objet, sur le fondement de l’article 171, point 1, sous b), de la loi relative à la circulation routière, dans sa version applicable au litige au principal, d’un « arrêté d’application » impliquant le retrait temporaire de son permis de conduire.

    11      Saisie d’un recours contre cet arrêté, l’Administrativen sad Varna (tribunal administratif de Varna, Bulgarie), qui est la juridiction de renvoi, relève, d’une part, que l’application de ce retrait temporaire conduit, avant que l’infraction ne soit établie, à une limitation des droits de la personne concernée par ledit retrait pour une période significative, jusqu’à ce que soit tranchée la question de sa responsabilité, et, d’autre part, que le droit bulgare permet l’infliction de deux mesures coercitives différentes pour une même infraction, à savoir le même retrait temporaire ainsi que la suspension de l’immatriculation du véhicule, mesures qui font d’ailleurs l’objet de recours juridictionnels distincts.

    12      Cette juridiction se demande si le droit bulgare est conforme au droit à un procès équitable, à la présomption d’innocence, aux principes de légalité et de proportionnalité des délits et des peines ainsi qu’au droit de ne pas être jugé ou puni deux fois pour une même infraction.

    13      En effet, en se référant à la directive 2006/126 et au considérant 15 de celle-ci, elle estime que les circonstances du litige dont elle est saisie entrent dans le champ d’application du droit de l’Union. Elle considère également que les mesures coercitives dont elle fait état pourraient donner lieu, à l’égard des personnes auxquelles elles sont appliquées, à une atteinte aux droits en matière d’emploi et au droit à la libre circulation des personnes, énoncés à l’article 26, paragraphe 2, et aux articles 45 et 46 TFUE.

    14      Dans ces conditions, l’Administrativen sad Varna (tribunal administratif de Varna) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

    « L’article 47, l’article 48, l’article 49, paragraphe 3, et l’article 50 de la Charte [...] admettent-ils une réglementation nationale qui prévoit que, pour une même infraction à la loi relative à la circulation routière, [dans sa version applicable au litige au principal,] à l’issue de procédures distinctes et autonomes, le conducteur d’un véhicule à moteur peut se voir infliger, avant l’obtention des résultats de l’expertise médicale établissant la consommation de substances stupéfiantes, simultanément, au moyen de deux arrêtés (zapovedi) distincts, susceptibles de recours dans des procédures juridictionnelles distinctes, deux mesures administratives coercitives distinctes qui consistent en : 1) la suspension de l’immatriculation d’un véhicule routier d’un propriétaire qui conduit un véhicule à moteur, pour une durée de 6 mois à un an, susceptible d’exécution provisoire, si l’autorité administrative l’ordonne ; et 2) le retrait temporaire du permis de conduire, – jusqu’à ce que soit tranchée la question de la responsabilité du conducteur, mais pas au-delà de 18 mois, susceptible d’exécution provisoire, ex lege [...], sachant que la mesure n’a pas été imposée par une juridiction mais par une autorité administrative et que la preuve du comportement, au stade de l’émission des arrêtés (zapovedi), est apportée par un test sur place, effectué par des fonctionnaires relevant de la structure de l’administration de l’autorité administrative infligeant la mesure, et que la contestation des résultats des tests effectués sur place incombe, en termes de frais, en vertu de la réglementation, à la personne visée par la mesure, et ces frais s’élèvent à environ 360 [leva bulgares (BGN) (environ 184 euros)], les résultats des examens effectués aux fins de la contestation des deux mesures étant établis dans un délai dépassant les 6 mois ? »

     Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle

    15      En vertu de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsqu’une demande de décision préjudicielle est manifestement irrecevable, la Cour, l’avocat général entendu, peut à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

    16      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans la présente affaire.

    17      Selon une jurisprudence constante de la Cour, la procédure instituée à l’article 267 TFUE est un instrument de coopération entre la Cour et les juridictions nationales, grâce auquel la première fournit aux secondes les éléments d’interprétation du droit de l’Union qui leur sont nécessaires pour la solution du litige qu’elles sont appelées à trancher (arrêt du 26 mars 2020, Miasto Łowicz et Prokurator Generalny, C‑558/18 et C‑563/18, EU:C:2020:234, point 44 ainsi que jurisprudence citée).

    18      Dès lors que la décision de renvoi sert de fondement à cette procédure, la juridiction nationale est tenue d’expliciter, dans cette décision, le cadre factuel et réglementaire du litige au principal et de fournir les explications nécessaires sur les raisons du choix des dispositions du droit de l’Union dont elle demande l’interprétation ainsi que sur le lien qu’elle établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige qui lui est soumis [voir en ce sens, notamment, arrêt du 4 juin 2020, C.F. (Contrôle fiscal), C‑430/19, EU:C:2020:429, point 23 et jurisprudence citée].

    19      À cet égard, il importe également de souligner que les informations contenues dans les décisions de renvoi doivent permettre, d’une part, à la Cour d’apporter des réponses utiles aux questions posées par la juridiction nationale et, d’autre part, aux gouvernements des États membres ainsi qu’aux autres intéressés d’exercer le droit qui leur est conféré par l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne de présenter des observations. Il incombe à la Cour de veiller à ce que ce droit soit sauvegardé, compte tenu du fait que, en vertu de cette disposition, seules les décisions de renvoi sont notifiées aux intéressés (voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2021, Irish Ferries, C‑570/19, EU:C:2021:664, point 134 et jurisprudence citée).

    20      Ces exigences cumulatives concernant le contenu d’une décision de renvoi figurent de manière explicite à l’article 94 du règlement de procédure, dont la juridiction de renvoi est censée, dans le cadre de la coopération instaurée à l’article 267 TFUE, avoir connaissance et qu’elle est tenue de respecter scrupuleusement (ordonnance du 3 juillet 2014, Talasca, C‑19/14, EU:C:2014:2049, point 21, et arrêt du 9 septembre 2021, Toplofikatsia Sofia e.a., C‑208/20 et C‑256/20, EU:C:2021:719, point 20 ainsi que jurisprudence citée). Elles sont, en outre, rappelées aux points 13, 15 et 16 des recommandations de la Cour de justice de l’Union européenne à l’attention des juridictions nationales, relatives à l’introduction de procédures préjudicielles (JO 2019, C 380, p. 1).

    21      En l’occurrence, la décision de renvoi ne répond manifestement pas aux exigences posées à l’article 94, sous a) et c), du règlement de procédure.

    22      En effet, il convient de constater que cette décision ne contient pas l’exposé de l’ensemble des données factuelles sur lesquelles la question est fondée.

    23      S’il est indiqué dans la décision de renvoi qu’une mesure de retrait temporaire du permis de conduire a été adoptée à l’égard de LM, il ne ressort pas explicitement de cette décision que ce dernier s’est également vu infliger l’autre mesure administrative coercitive évoquée dans la question préjudicielle, à savoir la suspension de l’immatriculation de son véhicule, ni à quel moment une telle mesure aurait été ou pourrait être imposée par rapport à la date à laquelle le test de dépistage a été effectué et les tests sanguins et d’urine ont été refusés.

    24      En tout état de cause, en ce qui concerne les dispositions du droit de l’Union dont l’interprétation est sollicitée par la juridiction de renvoi, il convient de relever que la question posée dans la présente affaire porte sur l’interprétation des articles 47 et 48, de l’article 49, paragraphe 3, ainsi que de l’article 50 de la Charte.

    25      Or, il importe de rappeler que l’article 51, paragraphe 1, de la Charte prévoit que les dispositions de celle-ci s’adressent aux États membres uniquement lorsqu’ils mettent en œuvre le droit de l’Union.

    26      Ainsi, lorsqu’une situation juridique ne relève pas du champ d’application du droit de l’Union, la Cour n’est pas compétente pour en connaître et les dispositions éventuellement invoquées de la Charte ne sauraient, à elles seules, fonder cette compétence (arrêt du 24 février 2022, Viva Telecom Bulgaria, C‑257/20, EU:C:2022:125, point 128 et jurisprudence citée, ainsi que ordonnance du 26 avril 2022, VD, C‑654/20, EU:C:2022:300, point 29). En l’occurrence, l’insuffisance d’informations concernant la pertinence et l’applicabilité, dans l’affaire au principal, des autres dispositions du droit de l’Union invoquées par la juridiction de renvoi, à savoir des articles du traité UE, du traité FUE et de la directive 2006/126, ne permet pas à la Cour de déterminer si la réglementation nationale en cause au principal relève du champ d’application de ces autres dispositions du droit de l’Union et doit donc être examinée au regard des dispositions de la Charte.

    27      En effet, la juridiction de renvoi n’indique pas clairement, dans sa décision de renvoi, en quoi lesdites autres dispositions du droit de l’Union seraient applicables au litige au principal.

    28      En premier lieu, s’agissant d’une éventuelle atteinte à l’article 26, paragraphe 2, et aux articles 45 et 46 TFUE, qu’elle mentionne au début de cette décision, force est de constater que la juridiction de renvoi ne fournit aucune indication qui permettrait de conclure à l’existence d’une entrave à la liberté de circulation de LM au sein de l’Union européenne. En effet, aucun des éléments figurant dans ladite décision ne permet d’établir un lien avec un État membre autre que la République de Bulgarie. À cet égard, il suffit de rappeler qu’il appartient à la juridiction de renvoi d’indiquer à la Cour, conformément à l’article 94 du règlement de procédure, en quoi, en dépit de son caractère apparemment purement interne, le litige pendant devant elle présente avec les dispositions du droit de l’Union relatives aux libertés fondamentales, un élément de rattachement qui rend l’interprétation préjudicielle sollicitée nécessaire à la solution de ce litige (voir, en ce sens, ordonnance du 6 mai 2021, Ministero dell’Istruzione, dell’Università e della Ricerca e.a., C‑571/20, EU:C:2021:364, point 24 ainsi que jurisprudence citée).

    29      De même, en ce qui concerne l’article 3, paragraphe 2, l’article 4, paragraphe 3, l’article 6 et l’article 19, paragraphes 1 et 3, sous b), TUE ainsi que les articles 90 et 91 TFUE, également mentionnés sans autre précision par la juridiction de renvoi, la décision de renvoi ne contient aucun élément permettant de conclure à leur applicabilité au litige au principal.

    30      En second lieu, il ressort de la décision de renvoi que cette juridiction considère que la réglementation nationale en cause au principal relève du champ d’application de la directive 2006/126, du fait de la transposition de cette dernière dans le droit national. Ladite juridiction, tout en indiquant que cette directive ne régit pas les motifs de suspension d’un permis de conduire, estime que le considérant 15 de ladite directive habilite les États membres à appliquer leurs dispositions nationales en matière de retrait, de suspension, de renouvellement et d’annulation du permis de conduire à tout titulaire ayant transféré sa résidence normale sur leur territoire.

    31      À cet égard, il convient d’observer que la directive 2006/126 procède, ainsi qu’il ressort de son considérant 8, à une harmonisation minimale des conditions auxquelles le permis de conduire est délivré. En outre, l’article 2, paragraphe 1, de cette directive prévoit la reconnaissance mutuelle, sans aucune formalité, des permis de conduire délivrés par les États membres (ordonnance du 19 décembre 2023, Redu, C‑223/23, EU:C:2023:1033, point 48).

    32      Par ailleurs, l’article 11 de ladite directive prévoit certaines règles relatives à l’échange, au retrait, au remplacement et à la reconnaissance des permis de conduire. En particulier, le paragraphe 2 de cet article dispose que, sous réserve du respect du principe de territorialité des lois pénales et de police, l’État membre où est située la résidence normale peut appliquer au titulaire d’un permis de conduire délivré par un autre État membre ses dispositions nationales concernant la restriction, la suspension, le retrait ou l’annulation du droit de conduire et, si nécessaire, procéder à ces fins à l’échange de ce permis.

    33      Ainsi, il ressort du libellé même de cette disposition qu’elle vise la situation dans laquelle un État membre entend appliquer ses dispositions nationales relatives notamment à la suspension du droit de conduire au titulaire d’un permis de conduire délivré par un autre État membre (ordonnance du 26 avril 2022, VD, C‑654/20, EU:C:2022:300, point 34).

    34      Or, la juridiction de renvoi n’expose pas les raisons pour lesquelles elle estime que la directive 2006/126 serait applicable au litige au principal. En particulier, elle ne précise pas en quoi la réglementation nationale en cause au principal, qui prévoit la possibilité d’infliger simultanément deux mesures administratives coercitives pour une même infraction routière, relèverait du champ d’application de cette directive, ni si le permis de conduire de LM a été délivré par un État membre autre que la République de Bulgarie. En effet, la décision de renvoi ne contient aucune information spécifique concernant ce permis de conduire.

    35      En l’absence de ces informations, les éléments présents dans cette décision ne permettent pas d’envisager l’applicabilité de la directive 2006/126 au litige au principal.

    36      Par conséquent, la juridiction de renvoi n’ayant pas indiqué en quoi la situation en cause au principal relèverait du champ d’application du droit de l’Union, la motivation du renvoi préjudiciel ne permet pas à la Cour de déterminer si la réglementation nationale en cause au principal doit être examinée au regard des dispositions de la Charte.

    37      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, la présente demande de décision préjudicielle est, en application de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure, manifestement irrecevable.  

     Sur les dépens

    38      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

    Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) ordonne :

    La demande de décision préjudicielle introduite par l’Administrativen sad Varna (tribunal administratif de Varna, Bulgarie), par décision du 31 janvier 2024, est manifestement irrecevable.

    Signatures


    *      Langue de procédure : le bulgare.

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