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Document 62013CJ0506

Arrêt de la Cour (première chambre) du 9 septembre 2015.
Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro AE contre Commission européenne.
Pourvoi – Contrat accordant un concours financier communautaire en faveur d’un projet dans le domaine de la collaboration médicale – Décision de la Commission de procéder au recouvrement d’une partie des avances versées – Recours en annulation – Irrecevabilité.
Affaire C-506/13 P.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2015:562

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

9 septembre 2015 ( *1 )

«Pourvoi — Contrat accordant un concours financier communautaire en faveur d’un projet dans le domaine de la collaboration médicale — Décision de la Commission de procéder au recouvrement d’une partie des avances versées — Recours en annulation — Irrecevabilité»

Dans l’affaire C‑506/13 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 11 septembre 2013,

Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro AE, établie à Athènes (Grèce), représentée par Me E. Tzannini, dikigoros,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant:

Commission européenne, représentée par Mme S. Lejeune, en qualité d’agent, assistée de Me E. Petritsi, dikigoros, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. S. Rodin, A. Borg Barthet, Mme M. Berger et M. F. Biltgen (rapporteur), juges,

avocat général: M. P. Cruz Villalón,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 24 février 2015,

rend le présent

Arrêt

1

Par son pourvoi, Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro AE (ci‑après «Lito») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission (T‑552/11, EU:T:2013:349, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a, d’une part, rejeté sa demande d’annulation d’une note de débit émise par la Commission européenne, le 9 septembre 2011, en vue de la récupération de la somme de 83001,09 euros versée dans le cadre d’un concours financier communautaire au soutien d’un projet dans le domaine de la collaboration médicale (ci-après la «note de débit») et, d’autre part, accueilli la demande reconventionnelle introduite par cette institution visant à la condamnation de Lito à payer ladite somme, majorée d’intérêts moratoires.

Les antécédents du litige

2

Les antécédents du litige ont été exposés aux points 1 à 8 de l’arrêt attaqué comme suit:

«1.

La requérante[, Lito,] est une maternité spécialisée dans les domaines de l’obstétrique, de la gynécologie et de la chirurgie. Elle est membre d’un consortium qui, le 12 mai 2004, a conclu avec la Commission [...] le contrat C510743 concernant un projet, dénommé Ward In Hand (WIH) [ci-après le ‘projet WIH’], dans lequel la Commission s’engageait à apporter sa contribution financière par le versement de plusieurs tranches (ci‑après le ‘contrat’). Le projet [WIH] a débuté le 1er mai 2004 et s’est achevé le 31 janvier 2006. Dans le cadre [de ce] projet [...], la Commission a payé à la requérante, au titre du concours financier de l’Union européenne, au total, la somme de 99349,50 euros.

2

Selon l’article 5, paragraphe 1, du contrat, celui-ci est régi par le droit belge. Par ailleurs, en vertu de son article 5, paragraphe 2, le Tribunal et, en cas de pourvoi, la Cour sont seuls compétents pour trancher tout litige entre l’Union, d’une part, et les membres du consortium, d’autre part, relatif à la validité, à l’application ou à l’interprétation du contrat.

3

Par lettre du 29 avril 2009, la Commission a informé la requérante qu’elle ferait l’objet d’un contrôle, sous la forme d’un audit financier, en raison de sa participation au projet WIH. Il ressort de cette lettre que la requérante allait notamment devoir présenter, lors de ce contrôle, les fiches de présence du personnel employé dans le cadre [de ce] projet. Lors de l’audit, qui a été effectué du 4 au 6 août 2009, la requérante n’a pas présenté les fiches de présence consignant les heures de travail de son personnel dont elle demandait le remboursement.

4

Par lettre du 20 octobre 2009, la Commission a communiqué à la requérante le projet de rapport d’audit faisant état de l’absence des fiches de présence et l’a invitée à présenter ses observations. Par courriels des 13 et 16 novembre 2009, la requérante a transmis ses observations sur les résultats de l’audit ainsi que des fiches de présence se rapportant aux travaux consacrés au projet [WIH]. Par lettre du 23 décembre 2009, à laquelle était joint le rapport d’audit final, la Commission a maintenu les conclusions qui avaient été formulées dans le projet de rapport d’audit.

5

Le 25 octobre 2010, la Commission a adressé à la requérante une lettre d’information préalable à une procédure de recouvrement, faisant état d’un montant à rembourser de 93778,90 euros. Par lettre du 15 novembre 2010, la requérante a demandé à la Commission que ses observations précédemment transmises soient à nouveau examinées et approuvées.

6

Par lettre du 24 mai 2011, après examen des éléments de preuve soumis par la requérante, la Commission a reconnu la participation d’un membre du personnel, M. V., au projet [WIH] et a accepté la comptabilisation des heures de travail qu’elle avait consacrées [à ce] projet [...], tout en soulignant que les exigences contractuelles à cet égard n’avaient pas été remplies. Par ailleurs, la Commission a accepté la comptabilisation de coûts indirects à concurrence de 20 % des coûts directs reconnus. Le montant à rembourser a, par conséquent, été réduit à 83001,09 euros. Par lettre du 17 juin 2011, la requérante a formulé des observations.

7

Considérant toutefois que la réponse de la requérante n’avait apporté aucun élément nouveau de nature à prouver les heures de travail effectuées par les autres membres du personnel dans le cadre du projet [WIH], la Commission lui a adressé, par lettre du 17 août 2011, ses observations finales. Enfin, le 16 septembre 2011, la Commission a transmis à la requérante [la note de débit], dans laquelle elle l’a invitée à régler la somme de 83001,09 euros pour le 24 octobre 2011 [...]

8

Par lettre du 3 novembre 2011, reçue par la requérante le 15 novembre 2011, la Commission lui a rappelé sa créance, en soulignant que celle-ci portait intérêt à concurrence de 5 % par an, correspondant à 11,37 euros par jour de retard, et que, à la date du 18 novembre 2011, les intérêts échus se montaient à 284,25 euros.»

Le recours devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

3

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 octobre 2011, Lito a introduit un recours tendant à l’annulation de la note de débit.

4

Dans le cadre de son mémoire en défense déposé au greffe du Tribunal le 13 janvier 2012, la Commission a formé une demande reconventionnelle visant à condamner Lito au remboursement partiel de la contribution financière versée dans le cadre du projet WIH ainsi qu’au paiement d’intérêts moratoires.

5

Le Tribunal a jugé, aux points 17 à 31 de l’arrêt attaqué, que les éléments contenus dans le dossier ne permettent pas de conclure que la note de débit vise à produire des effets juridiques contraignants qui vont au-delà de ceux découlant du contrat et qui impliquent l’exercice des prérogatives de puissance publique conférées à cette institution en sa qualité d’autorité administrative. Partant, cette note de débit ne figure pas parmi les actes dont l’annulation peut être demandée au titre de l’article 263 TFUE, de telle sorte que le Tribunal a rejeté comme étant irrecevable le recours en annulation introduit par Lito.

6

Aux points 32 à 81 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné la demande reconventionnelle introduite par la Commission et fondée sur la prétendue violation par Lito de ses obligations contractuelles, en particulier celle énoncée à l’article 14, paragraphe 1, sous a), des conditions générales du contrat en ce qui concerne la tenue des fiches de présence et l’enregistrement des heures de travail accomplies par le personnel dans le cadre du projet WIH. Au terme de son analyse, le Tribunal a jugé fondée ladite demande.

7

Partant, il a condamné Lito à payer à la Commission le montant de 83001,09 euros au titre du principal, majoré des intérêts moratoires au taux de 5 % échus à compter du 25 octobre 2011 jusqu’à l’apurement de la dette au principal.

Les conclusions des parties devant la Cour

8

Lito demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, de juger l’affaire quant au fond et de condamner la Commission aux dépens.

9

La Commission demande à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner Lito aux dépens.

Sur le pourvoi

Sur le premier moyen

Argumentation des parties

10

Par le premier moyen, tiré d’une application erronée de l’article 263 TFUE, Lito reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en ce qu’il a jugé que le contenu de la note de débit se limitait à faire valoir des droits que la Commission tirait des stipulations contractuelles, alors qu’il aurait dû constater que ladite note résultait de l’usage par cette dernière de ses prérogatives de puissance publique. Adoptée en vue de produire des effets exécutoires conformément aux dispositions de l’article 299 TFUE, la note de débit constituerait un acte dont la légalité serait à examiner par le juge de l’Union dans le cadre d’un recours en annulation sur le fondement de l’article 263 TUE.

11

À cet égard, Lito rappelle, d’une part, que la Commission s’est réservé, aux termes de l’article 19, paragraphe 5, des conditions générales du contrat, le droit d’adopter une décision exécutoire au sens de l’article 299 TFUE. Étant donné la nature ambiguë du document en cause, reconnu comme tel par le Tribunal au point 29 de l’arrêt attaqué, il aurait fallu, en tout état de cause, faire droit au recours introduit par Lito afin de préserver le droit à la protection juridictionnelle garanti à l’article 47, premier alinéa, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la «Charte»).

12

D’autre part, la circonstance que, dans le corps même de la note de débit, figurait également une référence à la faculté de faire usage de la procédure prévue à l’article 299 TFUE aurait dû conduire le Tribunal, en application du principe de protection de la confiance légitime, à admettre la recevabilité du recours en annulation introduit par Lito.

13

Lito ajoute que, en retenant la date d’échéance fixée unilatéralement par la Commission dans la note de débit comme date de départ des intérêts, le Tribunal a indirectement admis, aux points 73 et 77 de l’arrêt attaqué, que la note de débit revêt un caractère exécutoire et ne constitue donc pas un document purement informatif.

14

La Commission est d’avis que le premier moyen, qui ne repose sur aucun fondement juridique, doit être rejeté comme étant irrecevable. À titre subsidiaire, dès lors que le Tribunal s’est référé au raisonnement suivi dans son ordonnance Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro/Commission (T‑353/10, EU:T:2011:589) et que cette décision a acquis force de chose jugée, il ne pourrait plus être contesté que la note de débit constitue un acte préparatoire à caractère informatif sans force exécutoire.

Appréciation de la Cour

15

Par son premier moyen, Lito allègue, en substance, que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que la note de débit ne présente pas les caractéristiques d’un acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE.

16

Il ressort d’une jurisprudence constante que le recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE est ouvert à l’encontre de tous les actes pris par les institutions, quelles qu’en soient la nature ou la forme, qui visent à produire des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée sa situation juridique (voir, en ce sens, arrêts IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 9, et Internationaler Hilfsfonds/Commission, C‑362/08 P, EU:C:2010:40, point 51).

17

Le recours en annulation tend à assurer le respect du droit dans l’interprétation et l’application du traité FUE et il serait, dès lors, contraire à cet objectif d’interpréter restrictivement les conditions de recevabilité du recours en limitant sa portée aux seules catégories d’actes visés à l’article 288 TFUE (voir, en ce sens, arrêt IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 8).

18

Il n’en demeure pas moins que cette compétence d’interprétation et d’application des dispositions du traité par le juge de l’Union ne trouve pas à s’appliquer lorsque la situation juridique du requérant s’inscrit dans le cadre de relations contractuelles dont le régime juridique est régi par la loi nationale désignée par les parties contractantes.

19

En effet, si le juge de l’Union se reconnaissait compétent pour statuer en annulation sur des actes s’inscrivant dans un cadre purement contractuel, il risquerait non seulement de vider de son sens l’article 272 TFUE, lequel permet d’attribuer la compétence juridictionnelle de l’Union en vertu d’une clause compromissoire, mais encore, dans les cas où le contrat ne contiendrait pas pareille clause, d’étendre sa compétence juridictionnelle au-delà des limites tracées par l’article 274 TFUE, lequel confie aux juridictions nationales la compétence de droit commun pour connaître des litiges auxquels l’Union est partie (voir, en ce sens, arrêt Maag/Commission, 43/84, EU:C:1985:328, point 26).

20

Il en découle que, en présence d’un contrat liant le requérant à l’une des institutions, les juridictions de l’Union ne peuvent être saisies d’un recours sur le fondement de l’article 263 TFUE que si l’acte attaqué vise à produire des effets juridiques contraignants qui se situent en dehors de la relation contractuelle liant les parties et qui impliquent l’exercice de prérogatives de puissance publique conférées à l’institution contractante en sa qualité d’autorité administrative.

21

À cet égard, il importe de souligner que, dans l’hypothèse où une institution, et plus particulièrement la Commission, choisit, pour allouer des contributions financières, la voie contractuelle dans le cadre de l’article 272 TFUE, elle est tenue de rester à l’intérieur de ce cadre. Ainsi, il lui incombe, notamment, d’éviter l’utilisation, dans le cadre des relations avec ses cocontractants, de formulations ambiguës susceptibles d’être perçues par les contractants comme relevant de pouvoirs de décision unilatéraux dépassant les stipulations contractuelles.

22

En l’occurrence, comme le Tribunal l’a relevé, au point 28 de l’arrêt attaqué, aucun élément du dossier ne permet de conclure que la Commission a agi en faisant usage de ses prérogatives de puissance publique.

23

S’agissant notamment de la note de débit, il ressort des points 25 et 26 de l’arrêt attaqué que celle-ci s’inscrit dans le contexte du contrat, en ce qu’elle a pour objet le recouvrement d’une créance qui trouve son fondement dans les stipulations dudit contrat. En effet, la note de débit doit être comprise comme une mise en demeure comportant l’indication de la date d’échéance ainsi que les conditions de paiement qui ne saurait être assimilée à un titre exécutoire, bien qu’elle mentionne la voie exécutoire de l’article 299 TFUE comme étant une option possible parmi d’autres s’offrant à la Commission dans l’hypothèse où le débiteur ne s’exécuterait pas à la date d’échéance fixée.

24

C’est donc à bon droit que le Tribunal a conclu, au point 28 de l’arrêt attaqué, que la note de débit ne produit pas d’effets juridiques qui trouveraient leur origine dans l’exercice de prérogatives de puissance publique, mais qu’elle doit, au contraire, être regardée comme étant indissociable des rapports contractuels existant entre la Commission et Lito.

25

Il résulte de ce qui précède que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant, au point 30 de l’arrêt attaqué, qu’il ne peut être valablement saisi d’un recours sur le fondement de l’article 263 TFUE.

26

Il importe, en outre, de souligner que, indépendamment du fait que le Tribunal a admis, au point 29 de l’arrêt attaqué, le caractère ambigu de la note de débit, le droit à une protection juridictionnelle effective tel que garanti à l’article 47, premier alinéa, de la Charte ne s’en trouve nullement affecté. En effet, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour, cet article n’a pas pour objet de modifier le système de contrôle juridictionnel prévu par les traités, et notamment les règles relatives à la recevabilité des recours formés directement devant la juridiction de l’Union, ainsi qu’il découle également des explications afférentes à cet article, lesquelles doivent, conformément à l’article 6, paragraphe 1, troisième alinéa, TUE et à l’article 52, paragraphe 7, de la Charte, être prises en considération pour l’interprétation de celle-ci (arrêt Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C‑583/11 P, EU:C:2013:625, point 97, ainsi que ordonnance von Storch e.a./BCE, C‑64/14 P, EU:C:2015:300, point 55).

27

S’agissant de l’argument de Lito tiré d’une prétendue violation, par le Tribunal, du principe de protection de la confiance légitime, il y a lieu de rappeler que si, conformément à une jurisprudence constante, la possibilité de se prévaloir de ce principe de protection la confiance légitime est ouverte à tout opérateur économique dans le chef duquel une institution a fait naître des espérances fondées quant au maintien d’une situation existante (voir, en ce sens, arrêt Di Lenardo et Dilexport, C‑37/02 et C‑38/02, EU:C:2004:443, point 70 et jurisprudence citée), Lito reste toutefois en défaut de démontrer de quelle manière la Commission aurait fait naître, dans son chef, de telles espérances en ce qui concerne la prétendue recevabilité du recours en annulation qu’elle a introduit.

28

Pour ce qui est de l’argument relatif à la date de départ de la capitalisation des intérêts moratoires, dirigé contre les points 73 à 77 de l’arrêt attaqué, il convient de l’examiner dans le cadre du troisième moyen.

29

Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

Sur le deuxième moyen

Argumentation des parties

30

Par son deuxième moyen, tiré d’une erreur de droit dans l’application de la notion de somme indûment versée, Lito reproche au Tribunal d’avoir dénaturé, aux points 47 à 69 de l’arrêt attaqué, la notion de répétition de l’indu telle qu’elle résulte de l’article 1376 du code civil belge et de l’avoir appliquée de manière erronée aux faits de l’affaire en cause.

31

Lito fait valoir que, d’une part, les conditions d’application de l’article 1376 du code civil belge exigent un élément intentionnel ou une erreur, élément subjectif qui ferait défaut en l’espèce. D’autre part, la date pertinente pour considérer qu’un versement est indu serait celle de la perception de ce versement, correspondant à la livraison du projet WIH. Lito estime que le fait de ne pas produire les fiches de présence ne saurait être assimilé à une absence de livraison de ce projet.

32

Lito considère que c’est à tort que le Tribunal a rejeté, au point 56 de l’arrêt attaqué, les fiches de présence présentées ex post, portant le logo de la société et confirmant ainsi leur caractère authentique. Lito rappelle que, en raison d’une fusion intervenue avec les entreprises du groupe concerné, il lui avait été impossible, à la date de l’audit, de récupérer les fichiers établis électroniquement.

33

De surcroît, Lito affirme avoir eu, de bonne foi, la conviction que la Commission avait renoncé à ses droits, dès lors que celle-ci ne s’est pas manifestée pendant presque cinq ans après la livraison du projet WIH.

34

Selon la Commission, il conviendrait d’analyser conjointement les deuxième, quatrième à sixième et huitième moyens en vue de les rejeter tous comme étant irrecevables, dans la mesure où ils visent à obtenir une nouvelle appréciation des éléments de fait et de preuve, ne comportent ni une indication des éléments critiqués, ni même une critique à l’égard de l’arrêt attaqué et constituent une reproduction fidèle des moyens déjà présentés devant le Tribunal.

35

À titre subsidiaire, la Commission fait valoir qu’il ressort des points 56 à 59 de l’arrêt attaqué que le Tribunal n’a aucunement altéré ou dénaturé le contenu des moyens de preuve produits en rejetant, comme ne répondant pas aux exigences contractuellement fixées, les fiches de présence présentées ex post par Lito ainsi que les rapports d’avancement périodiques envoyés à la Commission au cours du projet WIH.

Appréciation de la Cour

36

En ce qui concerne l’application de la notion de somme indûment versée, le Tribunal a rappelé, aux points 48 à 50 de l’arrêt attaqué, les dispositions contractuelles, et plus particulièrement les articles 13, paragraphe 1, premier alinéa, et 14, paragraphe 1, sous a), troisième alinéa, des conditions générales du contrat, en vertu desquelles Lito était tenue d’enregistrer les heures de travail imputées au projet WIH et de les faire certifier au moins mensuellement par une personne désignée ou autorisée à cet effet.

37

Après avoir souligné, au point 51 de l’arrêt attaqué, l’importance des engagements relatifs aux conditions financières, le Tribunal a constaté, aux points 52 et 53 de l’arrêt attaqué, qu’il ressort du rapport d’audit final que Lito n’avait pas enregistré les heures de travail conformément aux stipulations contractuelles.

38

Le Tribunal a écarté, aux points 55 et 56 de l’arrêt attaqué, les arguments de Lito tenant à l’impossibilité de fournir les fiches de présence en raison de l’existence de la fusion intervenue. À cet égard, le Tribunal a jugé que les fiches de présence présentées ex post par Lito ne sont pas datées ni certifiées par une personne désignée à cet effet, contrairement à ce qui est expressément prévu à l’article 14, paragraphe 1, sous a), des conditions générales du contrat, et ne peuvent donc être retenues comme moyen de preuve attestant des heures de travail accomplies au titre du projet WIH.

39

Dans la mesure où Lito avance, dans le cadre du présent moyen, le même argument que celui déjà présenté en première instance, sans démontrer en quoi aurait consisté l’erreur prétendument commise par le Tribunal aux points 55 et 56 de l’arrêt attaqué, il convient de le rejeter comme étant irrecevable, conformément à la jurisprudence constante de la Cour (voir, notamment, arrêt Interporc/Commission, C‑41/00 P, EU:C:2003:125, point 16).

40

S’agissant du reproche tenant à la dénaturation de la notion de répétition de l’indu, il doit être écarté comme étant non fondé.

41

En effet, le Tribunal ne saurait se voir reprocher une quelconque dénaturation des dispositions du droit belge, en raison du fait qu’il a jugé, au point 64 de l’arrêt attaqué, que la production des fiches de présence représente une obligation contractuelle à part entière, dont le non-respect constitue une violation contractuelle susceptible d’entraîner le remboursement des avances faites.

42

Il en découle que le remboursement des sommes versées peut être exigé indépendamment de la date de livraison du projet WIH ou du caractère subjectif auquel serait prétendument soumise la répétition de l’indu en droit belge.

43

En outre, et conformément à la jurisprudence citée au point 27 du présent arrêt, Lito ne saurait invoquer une violation du principe de la protection de la confiance légitime en l’absence d’assurances précises de la part de la Commission pour ce qui est du sort à réserver à l’action en répétition de l’indu.

44

Il résulte de ce qui précède que le deuxième moyen doit être rejeté comme étant, partiellement, irrecevable et, partiellement, non fondé.

Sur le troisième moyen

Argumentation des parties

45

Par le troisième moyen, Lito reproche au Tribunal d’avoir violé les principes fondamentaux du droit de l’Union, et plus particulièrement le droit d’être entendu et le droit à un procès équitable, en la condamnant, aux points 73 à 77 de l’arrêt attaqué, au paiement d’intérêts moratoires sans avoir tenu compte de ses arguments selon lesquels la note de débit, présentant un caractère purement informatif, ne saurait être considérée comme fixant une échéance de paiement dont le dépassement ferait courir des intérêts de retard.

46

Lito fait valoir que le point de départ de la capitalisation desdits intérêts est illégal dans la mesure où il a été fixé unilatéralement par la Commission dans la note de débit, document qui a été qualifié par le Tribunal d’«informatif». Lito ajoute que le Tribunal n’a pas suffisamment motivé son appréciation en ce qui concerne le taux de ces intérêts et le point de départ de la capitalisation de ces derniers.

47

La Commission rappelle que le Tribunal a posé aux parties des questions précises sur le taux d’intérêt et a tenu compte, lors de son analyse, des arguments présentés par les parties.

Appréciation de la Cour

48

D’emblée, il importe de rappeler que le droit d’être entendu dans le cadre d’une procédure juridictionnelle n’implique pas que le juge doive incorporer intégralement dans sa décision toutes les allégations de chacune des parties. Ce droit implique, en revanche, que le juge, après avoir écouté lesdites allégations et apprécié les éléments de preuve, se prononce sur les conclusions du recours et motive sa décision (voir, notamment, arrêts Schröder e.a./Commission, C‑221/97 P, EU:C:1998:597, point 24, ainsi que Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, C‑404/04 P, EU:C:2007:6, point 125).

49

Dans ces conditions, il convient de vérifier si le Tribunal, en statuant sur les intérêts de retard aux points 73 à 77 de l’arrêt attaqué, s’est conformé à de telles exigences.

50

À cet égard, il y a lieu de relever que le Tribunal a fait application, aux points 74 à 77 de l’arrêt attaqué, de l’article 19, paragraphe 2, des conditions générales du contrat. Ainsi qu’il ressort notamment du point 44 dudit arrêt, cette disposition prévoit que les intérêts de retard couvrent la période débutant le jour suivant la date fixée, par la Commission, pour le paiement de la somme due et se terminant le soir de la date à laquelle le paiement de la totalité du montant dû est intervenu. Ladite disposition prévoit également que, à défaut de paiement à la date fixée par la Commission, le montant dû par le cocontractant porte intérêt au taux indiqué à l’article 3, paragraphe 6, desdites conditions, fixant le taux d’intérêt à celui appliqué par la Banque centrale européenne (BCE) aux opérations principales de refinancement, majoré de 3,5 %.

51

Or, il est constant que Lito n’a contesté, à aucun moment de la procédure, la validité de ces stipulations contractuelles.

52

En outre, après avoir relevé, au point 75 de l’arrêt attaqué, que le taux d’intérêt applicable était de 1,5 %, le Tribunal a retenu, compte tenu de la majoration à appliquer, un taux de 5 %, les intérêts de retard courant à partir du 25 octobre 2011, jour suivant la date de paiement indiquée dans la note de débit.

53

Il découle de ce qui précède que le Tribunal a fait une juste application des dispositions contractuelles, en motivant à suffisance de droit sa décision.

54

Par conséquent, le troisième moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

Sur le quatrième moyen

Argumentation des parties

55

Par le quatrième moyen, tiré d’une application de critères juridiques incorrects dans le cadre de l’appréciation des preuves, Lito reproche au Tribunal d’avoir estimé, aux points 52 à 56 de l’arrêt attaqué, qu’elle n’avait pas établi un fichier des heures de travail et que les fiches de présence présentées ne correspondaient pas aux exigences fixées par le contrat, alors que les fiches de présence transmises ex post se trouveraient sur le papier officiel de l’entreprise, l’existence du logo confirmant leur caractère original. En procédant à une telle appréciation, le Tribunal aurait effectué des constatations inexactes, en dénaturant le contenu des éléments de preuve produits par Lito, ainsi qu’une qualification juridique erronée desdites preuves.

56

Ce serait encore à tort que le Tribunal a estimé, aux points 60 à 64 de l’arrêt attaqué, que la production de la correspondance entre les personnes ayant travaillé sur le projet WIH n’était pas de nature à prouver la durée pendant laquelle celles‑ci ont effectivement travaillé dans le cadre de ce projet, dès lors que la force probatoire de cette correspondance résulterait notamment du fait que la Commission s’est fondée sur celle-ci pour réduire, a posteriori, le montant dont elle demandait le remboursement.

57

Lito estime que le Tribunal a également commis une erreur, au point 61 de l’arrêt attaqué, en jugeant qu’il ne lui appartient pas de rechercher dans les annexes communiquées par Lito les éléments qui pourraient fonder les arguments de celle-ci, alors que, au point 63 de ce même arrêt, il tire argument du fait que le contenu de ces annexes se rapporte à des éléments de nature administrative ou purement organisationnelle.

58

La Commission fait valoir que l’analyse des frais éligibles par le Tribunal relève de l’appréciation des éléments de fait qui ne saurait faire l’objet d’un réexamen par la Cour. En tout état de cause, le Tribunal aurait correctement jugé, au point 61 de l’arrêt attaqué, qu’il ne lui appartient pas de rechercher les éléments de preuve, qui pourraient fonder les arguments de Lito, dans une annexe volumineuse qui, au surplus, ne concernait que des éléments livrables du projet WIH, susceptibles de prouver la bonne exécution de celui-ci.

Appréciation de la Cour

59

D’emblée, il y a lieu d’écarter les arguments dirigés à l’encontre des points 52 à 56 de l’arrêt attaqué, ces arguments se confondant, sous le couvert d’une prétendue dénaturation des éléments de preuve, avec ceux déjà soulevés dans le cadre du deuxième moyen et qui ont été écartés, au point 40 du présent arrêt, comme étant irrecevables.

60

S’agissant de l’argument tenant à l’appréciation des annexes communiquées par Lito, il importe de constater que cette dernière reproduit, pour l’essentiel, l’argumentation qu’elle avait déjà présentée en première instance, ainsi qu’il ressort notamment des points 61 à 63 de l’arrêt attaqué.

61

Or, le Tribunal y a jugé ne pas devoir analyser en détail les annexes volumineuses communiquées par Lito, notamment en raison du fait que ces pièces n’étaient, de toute façon, pas de nature à démontrer le temps de travail effectivement consacré au projet WIH. Il a ajouté que la force probatoire de la correspondance produite ne saurait non plus résulter du fait que la Commission a accepté de considérer comme étant éligibles les heures de travail comptabilisées pour l’un des employés, dès lors qu’une telle circonstance n’est pas susceptible d’influencer la justification des heures de travail des autres employés conformément au système d’enregistrement des heures de travail tel que prévu par les dispositions contractuelles.

62

Il découle de ce qui précède que, par ses arguments, Lito ne fait que critiquer la solution à laquelle le Tribunal a abouti aux points 62 et 63 de l’arrêt attaqué, et vise, en réalité, à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, ce qui échappe à la compétence de la Cour (voir, notamment, arrêt Reynolds Tobacco e.a./Commission, C‑131/03 P, EU:C:2006:541, point 50).

63

Par conséquent, cet argument doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable.

64

S’agissant du reproche fait au Tribunal relatif au point 63 de l’arrêt attaqué, aucune contradiction ne saurait être retenue dans le raisonnement du Tribunal, en ce que ce n’est pas ce dernier qui a procédé à une analyse du contenu des annexes communiquées, mais que celle-ci résulte des indications faites par la Commission et non contestées par Lito.

65

Par conséquent, le quatrième moyen doit être rejeté comme étant, partiellement, irrecevable et, partiellement, non fondé.

Sur le cinquième moyen

Argumentation des parties

66

Le cinquième moyen est tiré d’une erreur de droit commise par le Tribunal lors de l’appréciation de la nature juridique des fiches de présence.

67

Lito fait valoir que, si l’obligation de tenir des rapports périodiques permettant de décrire pour chaque employé et chaque unité le temps de travail fourni pour le projet WIH incombe, certes, à toute entreprise, elle ne saurait toutefois aboutir à faire disparaître le travail fourni, sous peine de représenter une obligation disproportionnée, voire abusive. Comme la notion de rapport périodique n’est définie ni dans la législation européenne ni par la jurisprudence de l’Union, il conviendrait de déterminer, au cas par cas, le degré de précision requis par chaque rapport en fonction des besoins spécifiques.

68

La Commission rappelle que, dans les contrats portant sur des programmes bénéficiant d’un concours financier, le bénéficiaire est juridiquement tenu d’enregistrer et de déclarer d’une manière précise ses coûts et d’en justifier l’admissibilité. Dans ce contexte, elle précise encore que la livraison d’un projet est totalement indépendante de l’obligation faite au bénéficiaire de justifier l’admissibilité de ses coûts.

Appréciation de la Cour

69

D’emblée, il y a lieu de constater que Lito se limite, de nouveau, à reproduire les arguments qu’elle avait déjà présentés en première instance, ainsi qu’il ressort notamment de la lecture du point 43 de l’arrêt attaqué.

70

En outre, si Lito critique le raisonnement du Tribunal en se fondant sur le principe de proportionnalité, elle n’indique cependant aucun point des motifs de l’arrêt attaqué susceptible d’encourir un tel reproche.

71

Dans de telles circonstances, la Cour n’est pas en mesure d’exercer la mission qui lui incombe dans le cadre du pourvoi et d’effectuer son contrôle de légalité (voir ordonnance Greinwald/Wessang, C‑608/12 P, EU:C:2014:394, point 28).

72

Par conséquent, le cinquième moyen doit être rejeté comme étant irrecevable.

Sur le sixième moyen

Argumentation des parties

73

Par le sixième moyen, tiré d’une violation du droit à un procès équitable et des règles de procédure garantissant le respect des droits de la défense et de l’égalité des armes entre les cocontractants, Lito reproche au Tribunal d’avoir jugé, de manière totalement arbitraire, au point 56 de l’arrêt attaqué, que les fiches de présence versées par Lito dans les annexes ne correspondaient pas aux exigences fixées dans les dispositions contractuelles et, au point 63 du même arrêt, que ces fiches ne permettaient pas de démontrer le temps de travail effectivement consacré au projet WIH.

74

En raison du fait que la Commission a considéré unilatéralement que les fiches de présence produites n’étaient pas propres à établir les heures de travail fournies dans le cadre dudit projet et que le Tribunal a suivi ce raisonnement en se fondant sur les dispositions contractuelles, Lito se trouverait désavantagée par rapport à cette institution, qui serait, dans le présent litige, à la fois juge et partie. Il en résulterait que les dispositions contractuelles présentent un caractère abusif et qu’elles sont contraires au principe de proportionnalité.

75

La Commission estime que le Tribunal a dûment apprécié, sur le fondement des stipulations contractuelles liant les parties, l’ensemble des preuves soumises, en respectant les droits de la défense ainsi que le principe de l’égalité des armes entre les parties.

76

S’agissant du prétendu caractère abusif des conditions du contrat et de leur non-conformité au principe de proportionnalité, la Commission fait valoir que ces allégations sont formulées pour la première fois au stade du pourvoi et doivent, dès lors, être écartées comme étant irrecevables.

Appréciation de la Cour

77

S’agissant du sixième moyen, qui est, de nouveau, dirigé contre les points 56 et 63 de l’arrêt attaqué, lesquels ont déjà fait l’objet d’une analyse dans le cadre des deuxième et quatrième moyens, il suffit de rappeler que le Tribunal a tenu compte de la correspondance versée par Lito à titre de preuve, mais qu’il l’a jugée insuffisante au motif qu’elle n’était pas de nature à démontrer, conformément aux stipulations contractuelles, le temps de travail effectivement consacré par les employés de Lito au projet WIH.

78

Dans ces conditions, il ne saurait être reproché au Tribunal d’avoir adopté une décision arbitraire en violation des exigences du droit au procès équitable.

79

En ce qui concerne le reproche selon lequel les dispositions contractuelles seraient disproportionnées, voir abusives, il convient de constater que Lito n’a, à aucun moment de la procédure, remis en cause la validité des dispositions contractuelles applicables entre les parties.

80

En soutenant, dans le cadre du présent pourvoi, que ces dispositions contractuelles seraient abusives et contraires au principe de proportionnalité, Lito invoque pour la première fois devant la Cour un moyen qui n’a pas été soulevé devant le Tribunal.

81

Or, dans le cadre d’un pourvoi, la compétence de la Cour est, en principe, limitée à l’appréciation de la solution légale qui a été donnée aux moyens débattus devant les juges du fond (voir, notamment, arrêt Sison/Conseil, C‑266/05 P, EU:C:2007:75, point 95 et jurisprudence citée).

82

Il résulte de ce qui précède que le sixième moyen doit être écarté comme étant, partiellement, irrecevable et, partiellement, non fondé.

Sur le septième moyen

Argumentation des parties

83

Par le septième moyen, tiré d’une erreur de droit lors de l’appréciation de la nature juridique des méthodes d’évaluation des coûts, Lito fait valoir, après avoir rappelé les différents modèles permettant de déterminer les coûts éligibles, que la note de débit doit encourir l’annulation en raison du fait que la méthode des coûts totaux desquels sont déduits les frais généraux forfaitaires n’y est pas prise en compte.

84

La Commission estime que les développements de Lito ne sont pas en mesure de remettre en cause le raisonnement suivi par le Tribunal dans l’arrêt attaqué.

Appréciation de la Cour

85

Il convient de relever, ainsi qu’il ressort du point 42 de l’arrêt attaqué, que la demande reconventionnelle de la Commission était fondée, en premier lieu, sur le non-respect par Lito de son obligation de tenir des fiches de présence conformément à l’article 14, paragraphe 1, sous a), des conditions générales du contrat et, en second lieu, sur le fait que Lito s’est fondée, à tort, sur la méthode des coûts totaux pour le calcul des coûts indirects imputés au projet WIH.

86

Dès lors que le Tribunal a retenu, aux points 47 à 64 de l’arrêt attaqué, le bien‑fondé de la demande reconventionnelle sur le fondement du premier motif, il n’y avait pas lieu de procéder à l’analyse de l’argument fondé sur la méthode des coûts totaux.

87

Ainsi, le reproche formulé par Lito en relation avec l’appréciation de la nature juridique des méthodes d’évaluation des coûts doit être écarté en ce qu’il n’est pas susceptible d’aboutir à l’annulation de l’arrêt attaqué.

88

Par conséquent, le septième moyen doit être écarté comme étant inopérant.

Sur le huitième moyen

Argumentation des parties

89

Par le huitième moyen, Lito reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en ne jugeant pas comme étant abusive l’attitude de la Commission, laquelle a demandé le remboursement des sommes versées, alors que, dans son courrier du 24 mai 2011, elle a admis que le projet WIH avait bénéficié d’un travail permanent et efficace. Selon Lito, le fait de ne pas avoir pu remettre les fiches de présence lors de la réalisation de l’audit ne saurait être assimilé à une absence de réalisation de l’obligation essentielle découlant du contrat et consistant en la livraison du projet WIH.

90

La Commission estime que les dispositions contractuelles, auxquelles Lito s’est volontairement engagée lors de la conclusion du contrat, ne sont aucunement abusives ou contraires au principe de proportionnalité.

Appréciation de la Cour

91

D’emblée, il importe de constater que, dans le cadre de son huitième moyen, Lito se borne à reproduire des arguments qui ont déjà été présentés devant le Tribunal, sans, du reste, indiquer les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ni les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande. Ainsi, Lito vise en réalité à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, ce qui échappe à la compétence de la Cour (voir, notamment, arrêt Eurocoton e.a./Conseil, C‑76/01 P, EU:C:2003:511, points 46 et 47).

92

Partant, il y a lieu de rejeter le huitième moyen comme étant irrecevable.

93

En tout état de cause, l’argument doit également être rejeté comme étant non fondé.

94

En effet, il convient de relever que, conformément à une jurisprudence constante, il y a détournement de pouvoir lorsqu’une institution exerce ses compétences dans le but exclusif ou, tout au moins, déterminant d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce (arrêts Royaume-Uni/Conseil, C‑84/94, EU:C:1996:431, point 69; Windpark Groothusen/Commission, C‑48/96 P, EU:C:1998:223, point 52, et Swedish Match, C‑210/03, EU:C:2004:802, point 75).

95

Ainsi, le détournement de pouvoir constitue l’un des éléments en vertu desquels le juge de l’Union apprécie la légalité de l’acte attaqué dans le cadre d’un recours en annulation sur le fondement des dispositions de l’article 263 TFUE (voir, en ce sens, arrêt Internationale Handelsgesellschaft, 11/70, EU:C:1970:114, point 3).

96

En revanche, dans le cadre d’un recours introduit sur le fondement de l’article 272 TFUE, le requérant ne peut reprocher à l’institution cocontractante que des violations des stipulations contractuelles ou des violations du droit applicable au contrat (voir, en ce sens, arrêt Commission/Zoubek, 426/85, EU:C:1986:501, point 11).

97

Il en découle que le moyen d’annulation tiré d’un prétendu détournement de pouvoir de la Commission et tendant à obtenir que le Tribunal se prononce sur la légalité de l’acte attaqué au regard des règles du traité doit être rejeté comme étant irrecevable.

98

Toutefois, dans l’hypothèse où le huitième moyen devrait être compris comme étant tiré d’un comportement abusif de la Commission dans le cadre des relations contractuelles la liant à Lito, il y aurait lieu de constater que Lito n’a contesté, à aucun moment de la procédure, ni l’interprétation des dispositions contractuelles par le Tribunal aux points 48 à 53 de l’arrêt attaqué, ni les indications de la Commission quant au montant dont le remboursement est demandé, ainsi qu’il ressort du point 65 de l’arrêt attaqué.

99

En outre, l’affirmation de Lito selon laquelle la livraison du projet WIH représente, en réalité, l’obligation essentielle du contrat n’est pas non plus de nature à faire conclure à un comportement abusif de la Commission, dès lors que le Tribunal a retenu, au point 64 de l’arrêt attaqué, un manquement de Lito à son obligation de tenir des fiches de présence et d’enregistrer les heures de travail accomplies par le personnel conformément à l’article 14, paragraphe 1, sous a), des conditions générales du contrat.

100

Il s’ensuit que le huitième moyen doit être rejeté comme étant irrecevable et, en tout état de cause, comme étant non fondé.

Sur le neuvième moyen

Argumentation des parties

101

Par son neuvième moyen, tiré d’un défaut de motivation, Lito reproche au Tribunal de ne pas avoir jugé que la note de débit est dépourvue de tout fondement, le renvoi aux courriels des 24 mai 2011 et 17 août 2011 étant insuffisant à cet égard.

102

La Commission considère que les arguments de Lito doivent être écartés comme étant non fondés.

Appréciation de la Cour

103

Par ce neuvième moyen, Lito reproche, en substance, au Tribunal d’avoir omis de statuer sur le deuxième moyen soulevé dans le cadre du recours en annulation en première instance et relatif au défaut de motivation de la note de débit.

104

Or, d’une part, il importe de relever que l’argument tiré d’un défaut de motivation sur le fondement de l’article 296 TFUE ne saurait être retenu dans le cadre d’un recours introduit conformément à l’article 272 TFUE.

105

D’autre part, il convient de constater que, dans le cadre de l’analyse du bien-fondé de la demande reconventionnelle, le Tribunal a procédé, aux points 65 à 69 de l’arrêt attaqué, à la vérification du calcul de la somme réclamée par la Commission, sur la base des indications fournies par cette dernière et non contestées par Lito.

106

En outre, le Tribunal a jugé, aux points 70 à 72 de l’arrêt attaqué, que la Commission avait dûment spécifié les conditions de remboursement et la date de paiement des sommes réclamées, dans la mesure où celles-ci résultaient tant de la lettre du 24 mai 2011 que des indications contenues dans la note de débit elle‑même, sous l’intitulé «Conditions de paiements».

107

Il en découle qu’aucune erreur de droit en relation avec l’obligation de motivation ne saurait être reprochée au Tribunal et le neuvième moyen doit, partant, être rejeté comme étant non fondé.

Sur le dixième moyen

Argumentation des parties

108

Par le dixième et dernier moyen, tiré d’une violation du principe de protection de la confiance légitime, Lito reproche au Tribunal de ne pas avoir jugé que la Commission a sanctionné de simples écarts de forme par rapport à la procédure à respecter, en réclamant, cinq ans après la clôture du programme à l’origine du projet WIH, le remboursement des sommes versées, nonobstant le fait que le travail de recherche a été effectué de bonne foi et le concours financier perçu conformément aux obligations contractuelles.

109

La Commission rappelle que l’objet du litige est non pas le projet WIH conduit par Lito, mais le respect par cette dernière des obligations qui lui incombaient relatives à la détermination des dépenses éligibles. Par ailleurs, la Commission conteste avoir fait naître auprès de Lito un quelconque espoir légitime.

Appréciation de la Cour

110

S’agissant du principe de protection de la confiance légitime, tel qu’il résulte de la jurisprudence rappelée au point 27 du présent arrêt, il suffit de constater que Lito reste en défaut de démontrer de quelle manière la Commission a fait naître, dans son chef, des espérances quant à l’application de méthodes de détermination des dépenses éligibles divergentes de celles convenues dans le contrat.

111

L’argument de Lito à ce sujet doit donc être rejeté comme étant non fondé.

112

S’agissant du délai dans lequel la Commission peut réclamer le remboursement des sommes versées, il convient de souligner, ainsi qu’il ressort du point 79 de l’arrêt attaqué, que, si la Commission peut, conformément à l’article 17, paragraphe 1, des conditions générales du contrat, engager un audit à l’égard de l’un des participants dans un délai de cinq ans à partir de la clôture du programme en cause, elle peut, a fortiori, valablement réclamer le remboursement des sommes versées dans ce délai.

113

En outre, en se fondant sur l’exécution de bonne foi des travaux de recherche dans le cadre du projet WIH, Lito tente, de nouveau, d’occulter le fait que le présent litige concerne uniquement la violation alléguée de l’obligation de tenir des fiches de présence et d’enregistrer les heures de travail accomplies par le personnel, telle que prévue à l’article 14, paragraphe 1, sous a), des conditions générales du contrat.

114

Les arguments de Lito doivent donc être rejetés comme étant non fondés.

115

Par conséquent, le dixième et dernier moyen soulevé par Lito doit être écarté comme étant non fondé.

116

Il résulte de tout ce qui précède qu’aucun des moyens soulevés par Lito à l’appui de son pourvoi n’est susceptible de prospérer.

117

Il y a lieu, partant, de rejeter le pourvoi dans son intégralité.

Sur les dépens

118

En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’un pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui‑ci, toute personne qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Lito ayant succombé en ses moyens et la Commission ayant conclu à la condamnation de Lito aux dépens, il y a lieu de condamner cette dernière aux dépens.

 

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit:

 

1)

Le pourvoi est rejeté.

 

2)

Lito Maieftiko Gynaikologiko kai Cheirourgiko Kentro AE est condamnée aux dépens.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: le grec.

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