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Document 62013CJ0478

Judgment of the Court (Ninth Chamber) of 2 October 2014.
European Commission v Republic of Poland.
Failure of a Member State to fulfil obligations — Directive 2001/18/EC — Deliberate release into the environment of genetically modified organisms (GMOs) — Placing on the market — Article 31(3)(b) — Locations of GMO crops — Obligation to inform the competent authorities — Obligation to establish a public register — Cooperation in good faith.
Case C‑478/13.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2014:2253

ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

2 octobre 2014 (*)

«Manquement d’État – Directive 2001/18/CE – Dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés (OGM) dans l’environnement – Mise sur le marché – Article 31, paragraphe 3, sous b) – Localisation des OGM cultivés – Obligation d’information des autorités compétentes – Obligation d’établir un registre public – Coopération loyale»

Dans l’affaire C‑478/13,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 6 septembre 2013,

Commission européenne, représentée par M. D. Bianchi et Mme M. Owsiany-Hornung, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République de Pologne, représentée par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de M. M. Safjan, président de chambre, M. J. Malenovský et Mme K. Jürimäe (rapporteur), juges,

avocat général: M. P. Cruz Villalón,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en ne prévoyant pas une obligation d’informer les autorités polonaises compétentes de la localisation des organismes génétiquement modifiés (OGM) cultivés au titre de la partie C de la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 mars 2001, relative à la disséminationvolontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil (JO L 106, p. 1), en n’établissant pas un registre de cette localisation et en ne rendant pas publiques les informations relatives à celle-ci, la République de Pologne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 31, paragraphe 3, sous b), de cette directive.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

2        La directive 2001/18 est divisée en quatre parties, A, B, C et D, intitulées respectivement «Dispositions générales», «Dissémination volontaire d’OGM à toute autre fin que leur mise sur le marché», «Mise sur le marché d’OGM en tant que produits ou éléments de produits» et «Dispositions finales».

3        L’article 1er de ladite directive, qui est compris dans la partie A de celle-ci, dispose:

«Conformément au principe de précaution, la présente directive vise à rapprocher les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres et à protéger la santé humaine et l’environnement:

–        lorsque l’on procède à la dissémination volontaire d’[OGM] dans l’environnement à toute autre fin que la mise sur le marché à l’intérieur de la Communauté,

–        lorsque l’on place sur le marché à l’intérieur de la Communauté des [OGM] en tant que produits ou éléments de produits.»

4        L’article 19 de la même directive, figurant dans la partie C de cette dernière, prévoit:

«1.      Sans préjudice des exigences prévues par d’autres textes législatifs communautaires, c’est uniquement lorsqu’un OGM a fait l’objet d’une autorisation par écrit de mise sur le marché en tant que produit ou élément de produit qu’il peut être utilisé sans autre notification sur tout le territoire de la Communauté pour autant que les conditions spécifiques d’utilisation et les environnements et/ou les zones géographiques précisés dans ces conditions soient strictement respectés.

2.      Le notifiant ne peut effectuer la mise sur le marché que s’il a reçu l’autorisation écrite de l’autorité compétente conformément aux articles 15, 17 et 18, et conformément aux conditions requises dans cette autorisation.

3.      Dans tous les cas, l’autorisation écrite visée aux articles 15, 17 et 18 indique explicitement:

[…]

f)      les exigences en matière de surveillance spécifiées à l’annexe VII, notamment les obligations de faire rapport à la Commission et aux autorités compétentes, le calendrier du plan de surveillance et, le cas échéant, toute obligation qui pourrait incomber à la personne qui vend le produit ou à tout utilisateur, y compris, pour les OGM cultivés, concernant leur localisation, à un niveau d’information déterminé comme approprié.

4.      Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour que l’autorisation écrite et, le cas échéant, la décision visée à l’article 18 soient rendues accessibles au public et que les conditions spécifiées dans l’autorisation écrite et, le cas échéant, la décision soient respectées.»

5        L’article 20 de la directive 2001/18, qui figure également dans ladite partie C, est libellé comme suit:

«1.      Après la mise sur le marché d’un ou de plusieurs OGM en tant que produits ou éléments de produit, le notifiant veille à ce que la surveillance et l’établissement des rapports y afférents soient effectués conformément aux conditions spécifiées dans l’autorisation. Les rapports relatifs à cette surveillance sont adressés à la Commission et aux autorités compétentes des États membres. Sur la base de ces rapports, conformément à l’autorisation et dans le cadre du plan de surveillance spécifié dans l’autorisation, l’autorité compétente qui a reçu la notification initiale peut adapter le plan de surveillance après la première période de surveillance.

[…]

4.      De façon à en garantir la transparence, les résultats de la surveillance au titre de la partie C doivent être rendus publics.»

6        L’article 31 de la même directive, qui est compris dans la partie D de celle-ci, prévoit à son paragraphe 3:

«Sans préjudice du paragraphe 2 et du point A 7 de l’annexe IV,

[…]

b)      les États membres établissent également des registres visant à enregistrer la localisation des OGM cultivés au titre de la partie C, notamment afin de permettre le suivi des effets éventuels de ces OGM sur l’environnement conformément aux dispositions de l’article 19, paragraphe 3, point f), et de l’article 20, paragraphe 1. Sans préjudice de ces dispositions des articles 19 et 20, lesdites localisations

–        sont notifiées aux autorités compétentes et

–        sont rendues publiques

de la manière jugée appropriée par les autorités compétentes et selon les dispositions nationales.»

7        Conformément à l’article 34, paragraphe 1, premier alinéa, de ladite directive, les États membres devaient mettre en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à celle-ci au plus tard le 17 octobre 2002 et en informer immédiatement la Commission.

8        En vertu de l’article 54 de l’acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque, et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne (JO 2003, L 236, p. 33), la République de Pologne était tenue de transposer la directive pour le 1er mai 2004, date de son adhésion à l’Union européenne.

 Le droit polonais

9        La loi du 22 juin 2001 sur les organismes génétiquement modifiés (Dz. U. de 2001, n° 76, position 811, ci-après la «loi sur les OGM») régit notamment la dissémination volontaire d’OGM dans l’environnement à des fins autres que leur mise sur le marché et la mise sur le marché de produits OGM.

10      L’article 3, point 5, de la loi sur les OGM définit la notion de «mise sur le marché» comme étant «une dissémination volontaire dans l’environnement qui consiste à fournir ou à mettre à disposition de tiers, moyennant paiement ou à titre gratuit, d’un produit OGM, y compris la mise sur le marché dans le cadre de la production ou de l’autorisation de circulation sur le territoire de la République de Pologne aux fins de la commercialisation; la mise sur le marché ne concerne pas la mise à disposition de tiers d’un produit OGM destiné à être utilisé dans le cadre d’une utilisation confinée».

11      L’article 34, paragraphe 1, de cette loi dispose:

«Le ministre établit un registre de l’utilisation confinée des OGM.»

12      L’article 40, paragraphe 1, de ladite loi prévoit:

«Le ministre établit un registre relatif à la dissémination volontaire d’OGM dans l’environnement.»

13      Aux termes de l’article 43, paragraphe 1, de la même loi, les demandes d’autorisation de mise sur le marché d’un produit OGM contiennent en particulier:

«1)      des informations sur l’utilisateur d’OGM, sa dénomination et son siège ou son prénom, son nom et son adresse;

2)      des informations sur le produit OGM:

a)      la description du produit,

b)      des instructions ou des recommandations relatives à sa conservation et à son utilisation,

c)      des informations sur l’OGM contenu dans le produit avec ses caractéristiques ainsi que les caractéristiques des récepteurs ou des organismes parentaux à partir desquels on a obtenu l’OGM;

3)      des informations sur les mesures de précaution recommandées en vue d’une utilisation sécurisée du produit OGM ainsi que sur les risques éventuels pour la santé humaine ou l’environnement susceptibles de se manifester en cas d’utilisation non conforme à sa destination du produit OGM;

4)      des informations sur l’emballage et l’étiquetage du produit OGM;

5)      des informations sur les autorisations obtenues par tel produit OGM en vue de sa mise sur le marché dans d’autres pays ainsi que sur les éventuels refus de ces autorisations».

14      L’article 50 de la loi sur les OGM est libellé comme suit:

«1.      Le ministre établit un registre des produits OGM.

2.      Le registre visé au paragraphe 1, contient:

1)      les demandes d’autorisation de mise sur le marché d’un produit OGM, avec documentation;

2)      les autorisations motivées de mise sur le marché d’un produit OGM et les informations sur le retrait ou les modifications de ces autorisations;

3)      les décisions motivées d’interdiction ou de limitation des échanges commerciaux de produits OGM;

4)      les avis de la Commission;

5)      les informations relatives aux risques pour la santé humaine ou l’environnement ainsi que les actions d’intervention adoptées conformément à l’article 45.

[…]

3.      Le registre est public […]

4.      La consultation du registre est gratuite.»

15      L’article 56, paragraphe 1, de ladite loi énonce:

«Le ministre établit un registre de l’exportation et du transit, sur le territoire de la République de Pologne, de produits OGM.»

16      L’annexe 3 du règlement du ministre de l’Environnement du 6 juin 2002 relatif à l’établissement de modèles types pour les demandes d’accords et d’autorisations concernant les opérations portant sur des organismes génétiquement modifiés (Dz. U. de 2002, n° 87, position 797, ci-après le «règlement du ministre de l’Environnement»), définit un modèle de demande d’autorisation de mise sur le marché de produits OGM. La partie 2 de cette annexe est intitulée «Informations sur le produit contenant des OGM ou constitué de tels organismes ou d’une partie d’entre eux». Les points I et 2.6 de cette partie 2 sont intitulés respectivement «Description du produit» et «Zone administrative de mise sur le marché du produit».

 La procédure précontentieuse

17      Au cours du mois de novembre de l’année 2010, la Commission a reçu une plainte portant sur la non-transposition par la République de Pologne des dispositions de l’article 31, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/18.

18      Par une lettre portant mise en demeure, la Commission a, le 22 juin 2012, informé la République de Pologne qu’elle considérait que les registres d’OGM prévus par la législation de cet État membre ne couvraient pas les cultures d’OGM ayant des fins autres qu’expérimentales et que, partant, ce dernier ne satisfaisait pas aux obligations lui incombant en vertu de l’article 31, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/18.

19      Par lettre du 16 octobre 2012, la République de Pologne a fait savoir à la Commission qu’une loi visant à transposer intégralement ladite disposition dans le droit polonais était en préparation et que son entrée en vigueur mettrait un terme au manquement qui lui est reproché.

20      Le 22 novembre 2012, la Commission a émis un avis motivé, que la République de Pologne a reçu le même jour, dans lequel elle invitait cet État membre à prendre les mesures nécessaires pour assurer la transposition complète de la directive 2001/18 dans un délai de deux mois à compter de la réception de cet avis. La République de Pologne a répondu à ce dernier par lettre du 17 janvier 2013, dans laquelle elle a admis le manquement reproché et s’est engagée à adopter les dispositions adéquates pour mettre fin à celui-ci au cours du premier semestre de l’année 2013.

21      N’étant pas satisfaite de la réponse de la République de Pologne, la Commission a décidé d’introduire le présent recours.

 Sur le recours

 Argumentation des parties

22      La Commission soutient, en premier lieu, qu’aucun des registres prévus par la loi sur les OGM, à savoir les registres visés aux articles 34, 40, 50 et 56 de cette loi, ne satisfait aux conditions énoncées à l’article 31, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/18. En particulier, le registre prévu audit article 50, relatif aux produits OGM mis sur le marché au titre de la partie C de cette directive, ne serait pas un registre afférent à la localisation des cultures OGM.

23      En effet, d’une part, la Commission relève que la République de Pologne a reconnu, pendant la procédure précontentieuse, que la loi sur les OGM, dans son ensemble, ne régissait pas les cultures commerciales d’OGM. Dès lors, il serait évident que l’article 50 de cette loi ne régirait pas non plus ces cultures. Ce serait d’ailleurs pour cette raison que cet État membre aurait prévu d’ajouter un nouvel article à la loi sur les OGM prévoyant la création d’un registre des cultures de plantes génétiquement modifiées.

24      D’autre part, la Commission fait valoir qu’il ressort de l’article 43 de la loi sur les OGM que les demandes d’autorisation de mise sur le marché des produits OGM, qui figurent dans le registre prévu à l’article 50 de cette loi, ne comprennent pas d’informations sur la localisation des OGM cultivés au titre de la partie C de la directive 2001/18. Contrairement à ce que soutient la République de Pologne, il ne découlerait pas de l’annexe 3 du règlement du ministre de l’Environnement que les autorités compétentes sont informées du lieu où sont effectuées des cultures d’OGM, conformément à cette partie C. En vertu de la même annexe, lesdites autorités seraient uniquement informées du lieu de la mise sur le marché des produits OGM, conformément à la partie C susmentionnée. Si les demandes d’autorisation de mise sur le marché des produits OGM devaient effectivement contenir des informations sur la localisation des cultures d’OGM, ledit règlement aurait comporté, à son annexe 3, une rubrique intitulée «Localisation des cultures d’OGM» ou un titre similaire, ce qui ne serait pas le cas.

25      En deuxième lieu, la Commission relève que les autorités polonaises ont affirmé publiquement, dans une lettre adressée par le ministre de l’Environnement au président du Sénat, le 30 novembre 2009, que la loi sur les OGM ne régit pas les questions liées aux cultures de plantes transgéniques. Compte tenu de cette circonstance et du fait que l’annexe 3 du règlement du ministre de l’Environnement ne contient pas de rubrique se référant explicitement à la localisation des cultures concernées, les dispositions de la directive 2001/18 n’auraient pas été mises en œuvre avec la précision et la clarté requises, afin que soit satisfaite l’exigence de sécurité juridique.

26      En troisième lieu, la Commission fait valoir que la République de Pologne a manqué à son obligation de coopération loyale, telle que visée à l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, TUE. En effet, la position de cet État membre, dans le cadre de la présente procédure, serait totalement différente de celle défendue au stade de la procédure précontentieuse, en affirmant que ladite directive aurait été intégralement transposée dans l’ordre juridique polonais. En outre, il se référerait pour la première fois, dans le cadre de la présente procédure, au règlement du ministre de l’Environnement.

27      La République de Pologne rétorque, en premier lieu, que l’article 50 de la loi sur les OGM transpose correctement l’article 31, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/18.

28      D’une part, elle souligne que le registre des produits OGM, tenu par le ministre de l’Environnement au titre de l’article 50 de la loi sur les OGM, contient notamment les demandes d’autorisation de mise sur le marché de produits OGM ainsi que la documentation correspondante. Or, il ressortirait de l’annexe 3 du règlement du ministre de l’Environnement, notamment des points I et 2.6 de sa partie 2, intitulés respectivement «Description du produit» et «Zone administrative de mise du produit sur le marché», que le demandeur de l’autorisation de mise sur le marché d’un produit OGM a l’obligation d’indiquer la zone administrative de mise sur le marché de ce produit. Par conséquent, les autorités administratives compétentes seraient informées du lieu de mise sur le marché du produit OGM, conformément aux exigences de la partie C de la directive 2001/18. Cela vaudrait également pour l’indication du lieu où la culture d’OGM serait effectuée, conformément à cette même partie C. Le registre visé audit article 50 contiendrait donc des informations sur la zone d’introduction du produit OGM ainsi que sur les zones où sont cultivés les OGM.

29      D’autre part, selon la République de Pologne, la procédure législative en cours ne démontre pas l’existence d’un manquement, mais elle est justifiée par le fait que les dispositions législatives actuelles sont datées et que l’importance croissante des questions liées à la culture des OGM exige que soit redéfinie la manière dont l’enregistrement de la localisation des cultures OGM est organisé et effectué.

30      En deuxième lieu, s’agissant de l’exigence de sécurité juridique, elle fait valoir que la Commission n’a invoqué aucun élément de preuve à l’appui de l’affirmation selon laquelle les modalités de transposition de l’article 31, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/18 pourraient constituer une source d’insécurité juridique.

31      En troisième lieu, s’agissant de la violation alléguée de l’obligation de coopération loyale, la République de Pologne soutient que, si, dans le cadre des procédures en manquement, les États membres sont tenus de faciliter à la Commission l’accomplissement de sa mission, cela ne les empêche toutefois pas, à un stade ultérieur de la procédure, de présenter de nouveaux arguments pour défendre leur position. En effet, un État membre ne serait pas tenu de présenter, lors de la procédure précontentieuse, tous les arguments sur lesquels sa défense est fondée. Adopter une position inverse contreviendrait au principe du respect des droits de la défense et priverait la procédure devant la Cour de tout sens. En outre, cet État membre rappelle que le règlement du ministre de l’Environnement a été notifié en 2004 dans la base de notification des mesures nationales de transposition.

 Appréciation de la Cour

32      Il convient de relever d’emblée que la République de Pologne ne conteste pas que les registres visés aux articles 34, 40 et 56 de la loi sur les OGM ne transposent pas l’article 31, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/18 dans le droit polonais. En revanche, elle fait valoir, en substance, que cette disposition a été transposée par l’article 50 de cette loi, lu en combinaison avec le règlement du ministre de l’Environnement, en particulier son annexe 3.

33      À titre liminaire, il y a lieu d’observer que, bien que le règlement du ministre de l’Environnement n’ait pas été mentionné au cours de la procédure précontentieuse, le présent recours a pour objet un manquement non pas à l’obligation d’information de la Commission, mais à l’obligation de transposer l’article 31, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/18 dans le droit interne polonais. Il s’ensuit que le seul fait que la République de Pologne a omis d’informer la Commission, au cours de la procédure précontentieuse, de ce que, selon elle, cette disposition avait déjà fait l’objet d’une transposition dans le droit interne en vigueur ne saurait suffire à établir le manquement allégué (voir, en ce sens, arrêts Commission/Italie, C‑456/03, EU:C:2005:388, point 47, et Commission/Espagne, C‑151/12, EU:C:2013:690, point 49).

34      En effet, pour autant que les dispositions de droit interne invoquées par la République de Pologne étaient en vigueur à l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé, elles doivent être prises en compte par la Cour pour apprécier la réalité de ce manquement (arrêts Commission/Italie, EU:C:2005:388, point 48, et Commission/Espagne, EU:C:2013:690, point 50).

35      Dans ces circonstances, dans la mesure où tant la loi sur les OGM que le règlement du ministre de l’Environnement étaient en vigueur à l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé, il y a lieu de vérifier si l’article 50 de cette loi, lu en combinaison avec l’annexe 3 de ce règlement, constitue une transposition adéquate de l’article 31, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/18, comme le soutient la République de Pologne.

36      À cet égard, il convient de rappeler que l’article 31, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/18 impose aux États membres d’établir un registre visant à enregistrer la localisation des OGM cultivés au titre de la partie C de cette directive, à savoir des OGM destinés à une mise sur le marché de l’Union en tant que produits ou éléments de produits.

37      L’article 50 de la loi sur les OGM prévoit l’établissement d’un registre public des produits OGM. Selon le paragraphe 2 de cet article, ce registre contient les demandes d’autorisation de mise sur le marché des produits OGM, les autorisations de mise sur le marché de ceux-ci et les informations sur le retrait ou les modifications de ces autorisations, les décisions d’interdiction ou de limitation des échanges commerciaux de produits OGM, les avis de la Commission et les informations relatives aux risques pour la santé humaine ou l’environnement que représentent les OGM ainsi que les actions d’intervention adoptées pour prévenir un tel risque. Ainsi que le relève la Commission, aucune mention n’est faite de la localisation des cultures OGM dans cette disposition.

38      Toutefois, il importe également de vérifier si les demandes d’autorisation de mise sur le marché des produits OGM, comprises dans le registre prévu à l’article 50 de la loi sur les OGM, contiennent des données concernant la localisation des cultures OGM. Le contenu de ces demandes est défini à l’article 43, paragraphe 1, de cette loi ainsi que par le règlement du ministre de l’Environnement.

39      D’une part, il ressort des termes de l’article 43, paragraphe 1, de la loi sur les OGM que les demandes d’autorisation de mise sur le marché des produits OGM comportent les informations concernant l’utilisateur des produits OGM ainsi que les produits OGM, à savoir la description des produits, les instructions ou recommandations relatives à leur conservation et à leur utilisation et les informations sur l’OGM contenu dans lesdits produits. Ces demandes doivent également contenir des indications quant aux mesures de précaution recommandées en vue d’une utilisation sécurisée des produits OGM, aux risques éventuels pour la santé humaine ou l’environnement susceptibles de se manifester dans le cas d’une utilisation des produits OGM non conforme à leur destination, à l’emballage et à l’étiquetage des produits OGM, aux autorisations obtenues en vue de la mise sur le marché dans d’autres États membres et aux éventuels refus d’autorisations. En revanche, ainsi que l’a relevé à juste titre la Commission, il ne résulte pas des termes de cet article 43, paragraphe 1, que les demandes d’autorisation répertoriées dans le registre prévu à l’article 50 de ladite loi contiennent des éléments relatifs à la localisation des cultures OGM.

40      D’autre part, s’agissant du règlement du ministre de l’Environnement, il convient de rappeler qu’il est relatif à l’établissement de modèles types pour les demandes d’accords et d’autorisations concernant les opérations portant sur des OGM. L’annexe 3 de ce règlement définit un modèle de demande d’autorisation de mise sur le marché de produits OGM. La partie 2 de cette annexe est intitulée «Informations sur le produit contenant des OGM ou constitué de tels organismes ou d’une partie d’entre eux» et comprend un point 2.6, lui-même intitulé «Zone administrative de mise sur le marché du produit».

41      Il ressort des dispositions de ladite annexe que les demandeurs d’autorisation de mise sur le marché d’OGM en tant que produits ou éléments de produits sont tenus, dans le cadre de leur demande, d’informer les autorités compétentes de la zone de mise sur le marché de ces OGM. L’indication de cette zone figure donc dans le registre visé à l’article 50 de la loi sur les OGM. En revanche, il ne découle pas des termes de cette annexe que les autorités compétentes doivent être informées du lieu où sont pratiquées des cultures d’OGM destinés à être mis sur le marché.

42      Certes, dans le cas d’une semence OGM, il ne saurait être exclu que la zone de mise sur le marché, telle que définie à l’article 3, point 5, de la loi sur les OGM, puisse parfois fournir indirectement une indication quant au lieu de culture de cette semence. Dans une telle hypothèse, eu égard à l’annexe 3 du règlement du ministre de l’Environnement, les autorités compétentes seraient effectivement informées de la localisation des OGM cultivés afin d’être mis sur le marché en tant que produits ou éléments de produits et cette localisation figure dans le registre public visé à l’article 50 de la loi sur les OGM. Toutefois, il ne saurait être considéré que la zone de mise sur le marché d’une semence génétiquement modifiée est toujours identique au lieu de culture de celle-ci.

43      En outre, quand bien même il ressortirait de l’article 31, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/18 que les localisations des OGM cultivés au titre de la partie C de celle-ci doivent être notifiées et rendues publiques de la manière jugée appropriée par les autorités compétentes, il n’en demeure pas moins que la marge d’appréciation laissée à cet égard aux États membres n’est pas absolue. En effet, les dispositions d’une directive doivent être mises en œuvre avec une force contraignante incontestable et avec la spécificité, la précision et la clarté requises, afin que soit satisfaite l’exigence de sécurité juridique (voir, notamment, arrêts Commission/Pologne, C‑281/11, EU:C:2013:855, point 101; Commission/Irlande, C‑50/09, EU:C:2011:109, point 46, et Commission/Pologne, C‑362/10, EU:C:2011:703, point 46).

44      Or, l’interprétation proposée par la République de Pologne de l’article 50 de la loi sur les OGM, lu en combinaison avec l’annexe 3 du règlement du ministre de l’Environnement, ne saurait, à elle seule, satisfaire à l’exigence de sécurité juridique dans la mesure où le libellé de ces dispositions ne présente pas la clarté et la précision requises (voir, en ce sens, arrêt Commission/Pologne, EU:C:2013:855, point 105).

45      Ladite exigence de sécurité juridique est d’autant moins satisfaite que, ainsi que cela ressort des éléments du dossier, le ministre de l’Environnement polonais a expliqué, dans une lettre du 30 novembre 2009, adressée au président du Sénat et rendue publique par ce dernier, que, en l’état actuel du droit polonais, il n’existe aucune obligation d’informer les autorités nationales de l’existence de cultures de plantes génétiquement modifiées et qu’il n’est donc pas possible de déterminer les personnes cultivant de telles plantes en Pologne ni de localiser les cultures concernées.

46      En outre, il importe de rappeler que, ainsi qu’il ressort de son article 1er, la directive 2001/18 a notamment pour objectif de protéger la santé humaine et l’environnement à la suite d’une dissémination volontaire d’OGM dans l’environnement. Dans ce contexte, s’agissant des OGM destinés à être mis sur le marché, relevant de la partie C de cette directive, celle-ci comprend, conformément à ses articles 19 et 20, des exigences en matière de surveillance. L’article 31, paragraphe 3, sous b), de ladite directive met précisément en œuvre ces exigences en matière de surveillance. Selon l’article 20, paragraphe 4, de cette même directive, les résultats de la surveillance au titre de la partie C doivent être rendus publics de façon à en garantir la transparence. Compte tenu de cet objectif de transparence, les exigences de clarté et de précision mentionnées par la jurisprudence citée aux points 43 et 44 du présent arrêt sont d’autant plus impératives.

47      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de considérer que l’article 50 de la loi sur les OGM, lu en combinaison avec l’annexe 3 du règlement du ministre de l’Environnement, ne constitue pas une transposition adéquate de l’article 31, paragraphe 3, sous b), de la directive 2001/18. Il s’ensuit que le grief de la Commission tiré de l’absence de transposition correcte dans l’ordre juridique polonais de cette disposition est fondé.

48      Dans ces conditions, il y a lieu de constater que, en ne prévoyant pas une obligation d’informer les autorités polonaises compétentes de la localisation des OGM cultivés au titre de la partie C de la directive 2001/18, en n’établissant pas un registre de cette localisation et en ne rendant pas publiques les informations relatives à celle-ci, la République de Pologne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 31, paragraphe 3, sous b), de cette directive.

 Sur les dépens

49      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République de Pologne et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) déclare et arrête:

1)      En ne prévoyant pas une obligation d’informer les autorités polonaises compétentes de la localisation des organismes génétiquement modifiés cultivés au titre de la partie C de la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 mars 2001, relative à la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil, en n’établissant pas un registre de cette localisation et en ne rendant pas publiques les informations relatives à celle-ci, la République de Pologne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 31, paragraphe 3, sous b), de cette directive.

2)      La République de Pologne est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: le polonais.

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