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Document 62015TO0147

Order of the General Court (Seventh Chamber) of 28 June 2018.
Czech Republic v European Commission.
Actions for annulment — European Union’s own resources — Financial responsibility of the Member States — Application to be exempted from making available own resources — Letter from the Commission — Act not open to challenge — Inadmissibility.
Case T-147/15.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2018:395

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (septième chambre)

28 juin 2018 (*)

« Recours en annulation – Ressources propres de l’Union européenne – Responsabilité financière des États membres – Demande de dispense de la mise à disposition des ressources propres – Lettre de la Commission – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑147/15,

République tchèque, représentée par MM. M. Smolek, T. Müller, J. Vláčil et Mme J. Očková, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. A. Caeiros et Mme Z. Malůšková, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la prétendue décision du directeur de la direction « Ressources propres et programmation financière » de la direction générale du budget de la Commission qui serait contenue dans la lettre portant la référence Ares (2015)217973, du 20 janvier 2015, par laquelle cette dernière aurait rejeté la demande de dispense de l’obligation de mise à disposition de ressources propres d’un montant de 53 976 340 CZK introduite en application de l’article 17, paragraphe 2, du règlement (CE, Euratom) no 1150/2000 du Conseil, du 22 mai 2000, portant application de la décision 2007/436/CE, Euratom relative au système des ressources propres des Communautés européennes (JO 2000, L 130, p. 1), et invité les autorités tchèques à prendre les mesures nécessaires pour créditer le compte de la Commission du montant 53 976 340 CZK, au plus tard le premier jour ouvrable qui suit le dix-neuvième jour du deuxième mois suivant le mois durant lequel la lettre concernée est envoyée, au risque d’avoir à payer des intérêts de retard en vertu de l’article 11 dudit règlement,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme V. Tomljenović, président, MM. E. Bieliūnas (rapporteur) et A. Kornezov, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        Le 30 mai 2008, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) a adopté un rapport final concernant une enquête qui portait sur des vérifications de l’importation de briquets de poche avec pierre en provenance du Laos.

2        Ce rapport indiquait que « les éléments de preuve de l’origine chinoise établis au cours de la mission d’inspection suffisent pour que les États membres ouvrent une procédure administrative de redressement fiscal ». Selon le rapport, il était nécessaire « que les États membres réalisent des audits de suivi et, le cas échéant, des enquêtes sur les importateurs concernés et qu’ils ouvrent, d’urgence, une procédure de recouvrement, si cela n’a pas été déjà fait ».

3        Les conclusions du rapport de l’OLAF portaient sur 28 cas d’importation de marchandises, en République tchèque, lesquels relevaient de la compétence de trois bureaux de douane différents.

4        Les différents bureaux de douane tchèques ont ensuite pris des mesures pour procéder au redressement et au recouvrement fiscal dans les 28 cas.

5        Cependant, il n’a pas été possible d’effectuer, dans l’entièreté des 28 cas, le redressement dans un délai de trois mois à partir de la date de la notification de la version tchèque du rapport de l’OLAF.

6        Les 22 novembre 2013, 17 décembre 2013, 9 janvier 2014, 14 mai 2014 et 5 novembre 2014, la République tchèque a, conformément à la réglementation applicable, consigné dans le système WOMIS les 28 cas d’impossibilité de recouvrement du montant des ressources propres de l’Union européenne.

7        Les 21 mai et 22 octobre 2014, la Commission européenne a demandé des informations complémentaires.

8        Les 22 et 25 juillet et le 17 décembre 2014, la République tchèque a fourni les informations demandées à la Commission.

9        Par lettre du 20 janvier 2015 portant la référence Ares (2015)217973, le directeur de la direction « Ressources propres et programmation financière » de la direction générale du budget de la Commission (ci-après le « directeur ») a informé les autorités tchèques que les conditions de dispense de l’obligation de mettre à disposition les ressources propres traditionnelles, prévues à l’article 17, paragraphe 2, du règlement (CE, Euratom) no 1150/2000 du Conseil, du 22 mai 2000, portant application de la décision 2007/436/CE, Euratom relative au système des ressources propres des Communautés européennes (JO 2000, L 130, p. 1), n’étaient remplies dans aucun des cas. Il a invité les autorités tchèques à prendre les mesures nécessaires pour créditer le compte de la Commission du montant de 53 976 340 CZK, au plus tard le premier jour ouvrable qui suit le dix-neuvième jour du deuxième mois suivant le mois durant lequel la lettre concernée est envoyée. Il a ajouté que tout retard donnerait lieu au paiement d’intérêts en application de l’article 11 du règlement no 1150/2000.

 Procédure

10      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 mars 2015, la République tchèque a introduit le présent recours.

11      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 11 juin 2015, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 130 du règlement de procédure du Tribunal, au motif que ladite lettre du 20 janvier 2015 ne constitue pas une décision au sens de l’article 263 TFUE.

12      La République tchèque a déposé ses observations sur cette exception le 23 juillet 2015.

13      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 20 juillet 2015, la République slovaque a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la République tchèque. La République tchèque et la Commission ont déposé leurs observations sur cette demande d’intervention les 3 et 4 août 2015.

14      Le 24 novembre 2015, les parties principales ont été invitées à présenter leurs observations sur une suspension éventuelle de la procédure jusqu’à la décision de la Cour mettant fin à l’instance dans les affaires C‑593/15 P, Slovaquie/Commission, C‑594/15 P, Slovaquie/Commission, ou C‑599/15 P, Roumanie/Commission. Ces pourvois avaient été formés contre les décisions mettant fin à l’instance dans les affaires T‑678/14, Slovaquie/Commission, T‑779/14, Slovaquie/Commission et T‑784/14, Roumanie/Commission, lesquelles étaient connexes à la présente affaire (ordonnances du 14 septembre 2015, Slovaquie/Commission, T‑779/14, non publiée, EU:T:2015:655 ; du 14 septembre 2015, Roumanie/Commission, T‑784/14, non publiée, EU:T:2015:659, et du 14 septembre 2015, Slovaquie/Commission, T‑678/14, non publiée, EU:T:2015:661).

15      Par courriers du 27 novembre 2015 et du 2 décembre 2015, la Commission et la République tchèque ont informé le Tribunal qu’elles n’avaient pas d’objections à une telle suspension.

16      Par décision du 22 décembre 2015, la procédure dans la présente affaire a été suspendue jusqu’à la décision de la Cour mettant fin à l’instance dans les affaires C‑593/15 P, C‑594/15 P ou C‑599/15 P précitées.

17      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée en application de l’article 27, paragraphe 5, du règlement de procédure, le juge rapporteur a été affecté à la septième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

18      Par arrêts du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission (C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800), et du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission (C‑599/15 P, EU:C:2017:801), la Cour a rejeté les pourvois.

19      La procédure dans la présente affaire a été reprise à la suite du prononcé des arrêts du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission (C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800), et du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission (C‑599/15 P, EU:C:2017:801).

20      Par mesure d’organisation de la procédure du 27 octobre 2017, les parties principales ont été invitées à se prononcer sur les conséquences à tirer, dans la présente affaire, desdits arrêts de la Cour. Les parties ont répondu à cette demande dans le délai imparti.

 Conclusions des parties

21      Dans la requête, la République tchèque conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision de la Commission du 20 janvier 2015, portant la référence Ares (2015)217973 ;

–        condamner la Commission aux dépens.

22      Dans l’exception d’irrecevabilité, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ;

–        condamner la République tchèque aux dépens.

23      Dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la République tchèque conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter l’exception d’irrecevabilité.

 En droit

24      Aux termes de l’article 130, paragraphes 1 et 7, du règlement de procédure, si la partie défenderesse le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité ou l’incompétence sans engager le débat au fond. En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide de statuer sans poursuivre la procédure.

25      Dans l’exception d’irrecevabilité, la Commission soutient que ni le contenu de la lettre attaquée, ni « le contexte [de ses] pouvoirs […] en tant qu’institution émettrice » n’indiquent ni ne permettent de penser que ladite lettre a produit des effets juridiques contraignants pour la République tchèque.

26      Dans la requête et dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la République tchèque soutient que son recours est recevable. Selon elle, la décision attaquée constitue un acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE.

27      En premier lieu, la République tchèque invoque que, dans la mesure où la Commission rejette sa demande d’être dispensée de l’obligation de mettre à disposition le montant concerné et demande qu’il soit procédé au paiement dudit montant, la lettre attaquée produit des effets juridiques obligatoires. La République tchèque ajoute qu’imposer une obligation de remboursement dans un délai fixé, assortie d’une sanction sous forme d’intérêts en cas de non-remboursement, revient manifestement à imposer une nouvelle obligation.

28      En deuxième lieu, la République tchèque invoque qu’il ressort du document intitulé « Procédure interne de mise en non-valeur – dispositions de l’article 17, paragraphe 2 et 3, du règlement du Conseil (CE, Euratom) no 1150/2000 » que la Commission part elle-même du principe qu’elle décide d’approuver ou de rejeter les décisions des États membres prises en vertu de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000. La République tchèque reconnaît qu’il s’agit d’un document interne de la Commission, mais elle estime, par analogie avec une communication dans le domaine de la concurrence, que, sur le fondement dudit document, les États membres peuvent considérer que, dans le cadre de l’article 17 du règlement no 1150/2000, la Commission prend des décisions sous forme d’actes au sens de l’article 263 TFUE et que, partant, ils doivent être en mesure de se défendre contre ces décisions.

29      En troisième lieu, la République tchèque mentionne que, dans la mesure où, dans la pratique, l’appréciation des cas dans lesquels il s’avère impossible de procéder au recouvrement des droits de douane donne lieu à un acte pris par la Commission, la lettre attaquée ne constitue pas une simple mesure intermédiaire dans le cadre du processus décisionnel de la Commission.

30      En quatrième lieu, la République tchèque invoque que, en cas de doute, il convient de privilégier l’interprétation qui ne privera pas le destinataire de l’acte concerné du droit à une protection juridictionnelle effective. Elle explique que l’État membre est de facto contraint de payer la somme réclamée « par précaution » afin de prévenir la survenance éventuelle de dommages plus importants. La République tchèque ajoute que, par conséquent, l’État membre concerné devrait être en mesure d’attaquer cet acte en application de l’article 263 TFUE.

31      Il ressort d’une jurisprudence constante que sont considérées comme des actes attaquables au sens de l’article 263 TFUE, toutes dispositions adoptées par les institutions, quelle qu’en soit la forme, qui visent à produire des effets de droit obligatoires (voir arrêts du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission, C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800, point 46 et jurisprudence citée ; du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission, C‑599/15 P, EU:C:2017:801, point 47 et jurisprudence citée, et du 20 février 2018, Belgique/Commission, C‑16/16 P, EU:C:2018:79, point 31 et jurisprudence citée).

32      En revanche, échappe au contrôle juridictionnel prévu à l’article 263 TFUE tout acte ne produisant pas d’effets juridiques obligatoires, tels que les actes préparatoires, les actes confirmatifs et les actes de pure exécution, les simples recommandations et avis, ainsi que, en principe, les instructions internes [voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2006, Reynolds Tobacco e.a./Commission, C‑131/03 P, EU:C:2006:541, point 55 et jurisprudence citée, et ordonnance du 14 mai 2012, Sepracor Pharmaceuticals (Ireland)/Commission, C‑477/11 P, non publiée, EU:C:2012:292, point 52].

33      En outre, selon une jurisprudence constante, il ne suffit pas qu’une lettre ait été envoyée par une institution de l’Union à son destinataire, en réponse à une demande formulée par ce dernier, pour qu’elle puisse être qualifiée de décision susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation (voir arrêt du 14 décembre 2006, Allemagne/Commission, T‑314/04 et T‑414/04, non publié, EU:T:2006:399, point 37 et jurisprudence citée).

34      De même, une manifestation d’opinion écrite émanant d’une institution de l’Union ne saurait constituer une décision de nature à faire l’objet d’un recours en annulation, dès lors qu’elle n’est pas susceptible de produire des effets de droit et ne vise pas non plus à produire de tels effets (voir ordonnance du 9 janvier 2006, Finlande/Commission, T‑177/05, non publiée, EU:T:2006:1, point 30 et jurisprudence citée).

35      Pour déterminer si un acte produit des effets de droit obligatoires, il y a lieu de s’attacher à sa substance. Ces effets doivent être appréciés en fonction de critères objectifs, tels que le contenu de cet acte, en tenant compte, le cas échéant, du contexte de l’adoption de ce dernier, ainsi que des pouvoirs de l’institution qui en est l’auteur (voir arrêts du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission, C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800, point 47 et jurisprudence citée ; du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission, C‑599/15 P, EU:C:2017:801, point 48 et jurisprudence citée, et du 20 février 2018, Belgique/Commission, C‑16/16 P, EU:C:2018:79, point 32 et jurisprudence citée).

36      En premier lieu, en ce qui concerne le contexte de l’adoption de la lettre attaquée et les pouvoirs de l’institution qui en est l’auteur, il convient de relever que ladite lettre a été établie dans le domaine des ressources propres de l’Union. Comme le précise le considérant 2 de la décision 2007/436/CE, Euratom du Conseil, du 7 juin 2007, relative au système des ressources propres des Communautés européennes (JO 2007, L 163, p. 17), le système des ressources propres de l’Union doit assurer des ressources suffisantes pour le développement ordonné des politiques de l’Union, sous réserve de la nécessité d’une discipline budgétaire stricte.

37      Conformément aux dispositions applicables et à la jurisprudence de la Cour, les États membres ont l’obligation de constater les ressources propres de l’Union. Ainsi, l’article 8, paragraphe 1, de la décision 2007/436 prescrit que les ressources propres traditionnelles sont perçues par les États membres et ceux-ci ont l’obligation de les mettre à la disposition de la Commission (voir, par analogie, arrêts du 15 novembre 2005, Commission/Danemark, C‑392/02, EU:C:2005:683, point 55, et du 8 juillet 2010, Commission/Italie, C‑334/08, EU:C:2010:414, point 34).

38      En outre, l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000 doit être interprété en ce sens que les États membres ne peuvent pas se dispenser de constater les créances, même s’ils les contestent, sous peine d’admettre que l’équilibre financier de l’Union soit bouleversé, ne fût-ce qu’à titre temporaire, par le comportement d’un État membre (arrêt du 17 mars 2011, Commission/Portugal, C‑23/10, non publié, EU:C:2011:160, point, 58 ; voir également, par analogie, arrêt du 15 novembre 2005, Commission/Danemark, C‑392/02, EU:C:2005:683, point 60 et jurisprudence citée).

39      Par ailleurs, l’article 9, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000 prévoit, en substance, que chaque État membre inscrit les ressources propres au crédit du compte ouvert au nom de la Commission auprès de son trésor ou de l’organisme qu’il a désigné. L’article 11 du même règlement ajoute que tout retard dans l’inscription des ressources propres au crédit du compte de la Commission donne lieu au paiement d’intérêts de retard.

40      En outre, en vertu de l’article 17, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000, les États membres sont tenus de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les montants correspondant aux droits constatés conformément à l’article 2 du même règlement soient mis à la disposition de la Commission.

41      Il existe donc un lien indissociable entre l’obligation de constater les ressources propres de l’Union, celle de les inscrire au compte de la Commission dans les délais impartis et celle de verser des intérêts de retard, quelle que soit la raison du retard avec lequel ces ressources ont été portées au compte de la Commission (voir arrêt du 3 avril 2014, Commission/Royaume-Uni, C‑60/13, non publié, EU:C:2014:219, point 58 et jurisprudence citée).

42      De tout ce qui précède, il peut être conclu qu’il ressort directement des dispositions de la décision 2007/436 et du règlement no 1150/2000 qu’il revient aux États membres de constater les ressources propres de l’Union dès que leur fait générateur est survenu, puisque ces ressources appartiennent à l’Union.

43      La compétence des autorités nationales en ce qui concerne la mise à disposition de ressources propres traditionnelles est corroborée, d’une part, par le considérant 2 du règlement no 1150/2000 qui indique que l’Union doit disposer des ressources propres visées à l’article 2 de la décision 2007/436 dans les meilleures conditions possibles et, d’autre part, par l’exigence d’une mise à disposition rapide et efficace des ressources propres de l’Union (voir, en ce sens, ordonnance du 4 octobre 2007, Finlande/Commission, C‑457/06 P, non publiée, EU:C:2007:582, point 39 et jurisprudence citée).

44      Selon le libellé de l’article 17, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement n° 1150/2000, les États membres ne sont dispensés de leur devoir de constater des ressources propres que si le recouvrement n’a pu être effectué pour des raisons de force majeure ou lorsqu’il s’avère qu’il est définitivement impossible de procéder au recouvrement pour des raisons qui ne peuvent leur être imputées (voir arrêt du 8 juillet 2010, Commission/Italie, C‑334/08, EU:C:2010:414, point 35 et jurisprudence citée).

45      Dans cette hypothèse, l’article 17, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 1150/2000 prévoit que les montants des droits constatés sont déclarés irrécouvrables par décision de l’autorité administrative nationale compétente constatant l’impossibilité du recouvrement. En vertu du paragraphe 3 du même article, les États membres sont tenus, dans les trois mois suivant ladite décision administrative, de communiquer à la Commission les éléments portant sur l’impossibilité du recouvrement. Cette communication doit permettre à la Commission d’apprécier les raisons qui ont empêché l’État membre concerné de mettre à disposition le montant en cause, ainsi que les mesures prises pour assurer le recouvrement. En vertu du paragraphe 4 dudit article, la Commission dispose ensuite d’un délai de six mois pour transmettre ses observations.

46      Il ressort du libellé de l’article 17, paragraphe 3, du règlement no 1150/2000 que ces observations portent une appréciation sur les raisons qui ont empêché l’État membre concerné de mettre à disposition le montant en cause ainsi que les mesures prises par ce dernier pour assurer le recouvrement. Il ne s’agit cependant que d’observations qui n’ont aucune valeur contraignante.

47      En effet, il convient d’observer, ainsi que cela a été confirmé par la Cour dans ses arrêts du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission (C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800), et du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission (C‑599/15 P, EU:C:2017:801), que la décision 2007/436 et le règlement no 1150/2000 ne prévoient aucune procédure spécifique à l’issue de laquelle la Commission serait amenée à adopter une décision relative à l’obligation, incombant aux États membres, de mettre à disposition les ressources propres traditionnelles.

48      Ainsi, il ressort du règlement no 1150/2000, en particulier de ses considérants 10 et 20 et de ses articles 18 et 19, que la Commission est compétente pour suivre et contrôler l’action des États membres, au besoin en procédant à des vérifications sur place. En revanche, aucune des dispositions de la décision 2007/436 et du règlement no 1150/2000, ne confère à la Commission une compétence pour prendre des décisions sur leur interprétation, celle-ci n’ayant que la possibilité d’exprimer son opinion, qui ne lie en aucun cas les autorités nationales (voir, par analogie, ordonnances du 17 mai 1989, Italie/Commission, 151/88, EU:C:1989:201, point 22, et du 13 juin 1991, Sunzest/Commission, C‑50/90, EU:C:1991:253, point 13 et jurisprudence citée).

49      Or, une opinion exprimée par la Commission vis-à-vis d’un État membre dans une situation où elle n’a pas compétence pour prendre une décision n’est qu’un avis dépourvu d’effets juridiques (ordonnance du 5 septembre 2006, Comunidad autónoma de Madrid et Mintra/Commission, T‑148/05, non publiée, EU:T:2006:234, point 43).

50      En d’autres termes, les observations présentées par la Commission au titre de l’article 17, paragraphe 4, du règlement no 1150/2000 ne peuvent aucunement produire des effets de droit obligatoires.

51      Il convient, en outre, d’observer qu’un État membre qui s’abstient de constater le droit de l’Union sur les ressources propres et de mettre le montant correspondant à la disposition de la Commission, sans qu’une des conditions prévues à l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000 soit remplie, manque à ses obligations en vertu du droit de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 3 avril 2014, Commission/Royaume-Uni, C‑60/13, EU:C:2014:219, point 50 et jurisprudence citée).

52      Il résulte d’une jurisprudence constante que, selon le système établi par les articles 258 à 260 TFUE, la détermination des droits et des obligations des États membres, ainsi que le jugement de leur comportement, ne peuvent résulter que d’un arrêt de la Cour (arrêt du 15 janvier 2014, Commission/Portugal, C‑292/11 P, EU:C:2014:3, point 49 ; voir également, en ce sens, arrêt du 29 septembre 1998, Commission/Allemagne, C‑191/95, EU:C:1998:441, point 45).

53      Ainsi, dans le cadre de sa mission de surveillance de la mise en œuvre, par les États membres, de l’obligation de mise à disposition qui découle de la décision 2007/436 et du règlement no 1150/2000, la Commission ne saurait porter atteinte à la compétence exclusive de la Cour pour statuer sur la conformité d’un comportement avec ledit règlement (voir, par analogie, arrêt du 15 janvier 2014, Commission/Portugal, C‑292/11 P, EU:C:2014:3, point 48). La Commission n’a donc pas le pouvoir de déterminer de manière définitive si le comportement d’un État membre est conforme à son obligation, prévue par le règlement no 1150/2000, de mettre des ressources propres traditionnelles à la disposition du budget de l’Union (voir, en ce sens, ordonnance du 14 septembre 2015, Roumanie/Commission, T‑784/14, non publiée, EU:T:2015:659, point 35).

54      Il s’ensuit que, lorsqu’il existe un différend entre la Commission et un État membre quant au point de savoir si un comportement, dont la conformité avec le droit de l’Union n’a pas été examinée auparavant par la Cour, est conforme à l’obligation de mise à disposition de ressources propres traditionnelles prévue par la décision 2007/436 et le règlement no 1150/2000, la Commission ne saurait, en adoptant une décision, trancher elle-même, et définitivement, un tel différend (ordonnance du 14 septembre 2015, Roumanie/Commission, T‑784/14, non publiée, EU:T:2015:659, point 36).

55      Ce différend ne pourra donc être résolu, de manière définitive, que par la Cour, laquelle se prononcera, le cas échéant, sur les raisons invoquées par l’État membre concerné, au titre de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000, qui l’auraient empêché de mettre à disposition de la Commission le montant en cause, ainsi que les mesures prises par lui pour assurer le recouvrement.

56      Il convient dès lors de conclure, au terme d’un examen du contexte de l’adoption de la lettre attaquée ainsi que des pouvoirs de l’institution qui en est l’auteur que, à défaut de disposition habilitant la Commission à adopter un acte enjoignant à un État membre de mettre à disposition des ressources propres, même dans le cadre de l’article 17, du règlement no 1150/2000, la lettre attaquée doit être considérée comme ayant une valeur informative et comme une simple invitation.

57      En second lieu, s’agissant du contenu de la lettre, il convient de relever que, après un rappel des faits en cause, le directeur y décrit brièvement les mesures qu’avait prises la République tchèque à la suite de la réception du rapport de l’OLAF, lequel avait imposé à certains États membres d’ouvrir des procédures de recouvrement en relation avec l’importation de briquets de poche avec pierre en provenance du Laos.

58      Ensuite, le directeur a exprimé le point de vue des services de la Commission selon lequel, d’une part, ces mesures n’étaient pas suffisantes pour considérer que la République tchèque avait pris toutes les mesures nécessaires au sens de l’article 17, paragraphe 1, du règlement no 1150/2000 et, d’autre part, par conséquent, la République tchèque n’avait pas, conformément à l’article 17, paragraphe 2, du même règlement no 1150/2000, démontré que le recouvrement n’avait pas pu avoir lieu pour des raisons qui ne lui étaient pas imputables. La demande de la République tchèque d’être dispensée de l’obligation de mettre à disposition les ressources propres concernées a dès lors été rejetée et, par conséquent, la République tchèque a été invitée à mettre à la disposition de la Commission le montant correspondant aux montants déclarés irrécouvrables. Il a été précisé que l’absence de mise à disposition dans le délai fixé donnerait lieu au paiement d’intérêts de retard en application de l’article 11 du règlement no 1150/2000.

59      Il ressort du contenu de la lettre attaquée que la Commission a, pour l’essentiel, conformément à l’article 17, paragraphe 4, du règlement no 1150/2000, exposé à la République tchèque ses observations quant à la demande de cette dernière d’être dispensée de l’obligation de mettre à disposition les ressources propres concernées. Au regard de ces observations, elle a invité cet État membre à mettre à disposition le montant en cause.

60      Or, ainsi qu’il a été indiqué au point 33 ci-dessus, selon une jurisprudence constante, il ne suffit pas qu’une lettre comporte la réponse d’une institution de l’Union à une demande formulée par son destinataire, pour qu’elle puisse être qualifiée d’acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE (voir, en ce sens, arrêt du 14 décembre 2006, Allemagne/Commission, T‑314/04 et T‑414/04, non publié, EU:T:2006:399, point 37 et jurisprudence citée).

61      En outre, ni l’exposé d’un simple avis juridique ni une simple invitation de mettre à disposition le montant en cause ne sauraient être de nature à produire des effets de droit (arrêts du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission, C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800, point 60, et du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission, C‑599/15 P, EU:C:2017:801, point 62).

62      De plus, le seul fait que la lettre attaquée fait mention d’un délai pour la mise à disposition dudit montant tout en indiquant qu’un retard est susceptible de donner lieu à des intérêts de retard ne permet pas, eu égard au contenu global de cette lettre, de considérer que la Commission aurait entendu, au lieu d’exprimer son avis, adopter un acte produisant des effets de droit obligatoires ni, partant, de conférer à ladite lettre la nature d’un acte attaquable (arrêts du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission, C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800, point 61, et du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission, C‑599/15 P, EU:C:2017:801, point 63).

63      En effet, force est de constater que, en indiquant le délai dans lequel les montants en cause devaient être mis à disposition de la Commission ainsi que la sanction éventuelle du paiement d’intérêts de retard, la lettre attaquée ne fait que reprendre le libellé des articles 10 et 11 du règlement no 1150/2000.

64      Compte tenu de ce qui précède, la lettre attaquée constitue une simple manifestation d’opinion écrite à visée informative complétée d’une invitation à mettre à disposition des ressources propres traditionnelles. Cette lettre ne saurait donc constituer une décision de nature à faire l’objet d’un recours en annulation, dès lors qu’elle n’est pas susceptible de produire des effets de droit.

65      La conclusion formulée dans le point qui précède ne saurait être remise en cause par les autres arguments avancés par la République tchèque.

66      À cet égard, il convient de rejeter l’argument de la République tchèque selon lequel, en refusant expressément sa demande de dispense et en l’invitant à rembourser la somme litigieuse dans un délai concret, tout en précisant qu’un retard dans le remboursement entraînerait le paiement d’intérêts, la Commission a défini sa situation juridique et imposé une nouvelle obligation.

67      En effet, comme il a été expliqué au point 35 ci-dessus, pour déterminer si un acte ou une décision produit des effets juridiques obligatoires, il y a lieu de s’attacher à sa substance (ordonnance du 13 juin 1991, Sunzest/Commission, C‑50/90, EU:C:1991:253, point 12). Par conséquent, le fait que la Commission a employé, dans la lettre attaquée, le terme « rejette » ne constitue qu’une indication, parmi d’autres, susceptible d’être prise en considération par le juge de l’Union pour définir la substance de l’acte en cause, mais ne saurait, à lui seul, permettre audit juge de qualifier ce dernier de décision au sens de l’article 263 TFUE (voir, par analogie, arrêt du 4 février 2016, Italian International Film/EACEA, T‑676/13, EU:T:2016:62, point 31).

68      En outre, ainsi qu’il a été indiqué au point 63 ci-dessus, la Commission s’est bornée à rappeler des obligations qui lui incombent en vertu du droit de l’Union sans avoir imposé de nouvelles obligations à la République tchèque.

69      Une telle conclusion ne saurait être remise en cause sur la base de l’arrêt du 16 juin 1993, France/Commission (C‑325/91, EU:C:1993:245), invoqué à cet égard par la République tchèque. En effet, dans ledit arrêt, la Cour a considéré, en substance, qu’une communication de la Commission visant à préciser les modalités d’application d’une disposition d’une directive, et ce sans base juridique, par laquelle elle imposait aux États membres l’obligation de lui communiquer annuellement, de façon générale et systématique, certaines données, ajoutait de nouvelles obligations pour ceux-ci et était donc un acte destiné à produire des effets juridiques propres et distincts de ceux de la disposition qu’elle tendait à expliciter.

70      Or, en l’espèce, il convient de constater que, à la différence de ladite affaire, la lettre attaquée a été adoptée sur le fondement de l’article 17, paragraphe 4, du règlement no 1150/2000, lequel, ainsi qu’il ressort du point 45 ci-dessus, constitue une base légale pour la Commission pour présenter des observations sur les raisons qui ont empêché l’État membre concerné de mettre à disposition le montant en cause. Il s’ensuit que la Commission était habilitée, à faire part de ses observations.

71      Il convient donc de rejeter l’argument de la République tchèque selon lequel la lettre attaquée serait comparable à la communication de la Commission faisant l’objet de l’arrêt du 16 juin 1993, France/Commission (C‑325/91, EU:C:1993:245) (voir, par analogie, ordonnance du 19 octobre 2016, E-Control/ACER, T‑671/15, non publiée, EU:T:2016:626, points 57 à 61).

72      En outre, la conclusion énoncée au point 68 n’est pas non plus remise en cause par l’argument de la République tchèque, tiré de la comparaison entre sa position avant l’adoption de la décision et celle après la notification de la lettre attaquée, en ce sens que, avant l’adoption de la décision, elle pensait de bonne foi que les conditions de dispense de l’obligation de mise à disposition de ressources propres étaient remplies et, après la notification de ladite lettre, la Commission a exigé le remboursement de la somme litigieuse dans un délai fixé de manière précise.

73      Certes, il pourrait être allégué, comme le fait la République tchèque aux points 37 et 38 de sa requête, que la lettre attaquée comporte une appréciation juridique définitive de la part de la Commission relative à la demande de dispense de l’obligation de mise à disposition des ressources propres. Le fait que ces observations expriment une appréciation juridique définitive de la Commission n’entraîne cependant aucune conclusion quant à l’existence d’effets juridiques contraignants de celles-ci (voir, en ce sens, ordonnance du 19 octobre 2016, E-Control/ACER, T‑671/15, non publiée, EU:T:2016:626, point 64). Or, ainsi qu’il a été démontré précédemment, la Commission n’ayant pas compétence pour se prononcer, par voie de décision, sur l’obligation de mise à disposition de ressources propres, ses observations ne produisent pas d’effets juridiques obligatoires.

74      C’est pour les mêmes motifs qu’il convient de rejeter l’argument de la République tchèque selon lequel la Commission part elle-même du principe qu’elle décide d’approuver ou de rejeter les décisions des États membres en application de l’article 17, paragraphe 2, du règlement no 1150/2000, ce qui ressortirait du document interne de la Commission intitulé « Procédure interne de mise en non-valeur – dispositions de l’article 17, paragraphes 2 et 3, du règlement du Conseil (CE, Euratom) n° 1150/2000 »(ci-après le « compendium »).

75      En effet, quand bien même le compendium fait mention, à plusieurs endroits, des termes « statuer » et « décision », il précise également, dans la note finale, qu’il ne s’agit que d’un document interne de travail et que le texte de la législation applicable, tel que publié dans le Journal officiel de l’Union européenne et interprété par les juridictions de l’Union, est le seul qui fait foi. Or, comme expliqué précédemment, il ressort directement de la législation applicable que la Commission n’a aucune compétence pour adopter une décision relative à l’obligation des États membres de mettre à disposition les ressources propres.

76      En outre, le compendium en question a été établi dans la perspective d’aider les États membres à évaluer leur éventuelle responsabilité financière par rapport aux montants irrécouvrables de ressources propres traditionnelles. Il n’a pas été publié au Journal officiel de l’Union européenne, mais a été communiqué aux États membres au cours d’une réunion du Comité consultatif des ressources propres. Comme il l’indique lui-même, il s’agit d’un document de travail.

77      Or, un document de travail ne saurait conférer plus de pouvoirs décisionnels que ceux prévus dans les dispositions légales en question.

78      Enfin, cette conclusion n’est pas remise en question par l’analogie faite par la République tchèque entre le compendium et la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2006, C 298, p. 17), s’appuyant à cet égard sur conclusions de l’avocat général Mazák dans l’affaire Pfleiderer (C‑360/09, EU:C:2010:782).

79      En effet, contrairement à ce qui est le cas dans le domaine des ressources propres, il existe des dispositions législatives dans le domaine de la concurrence, à savoir le règlement (CE) n o 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité (JO 2003, L 1, p. 1), qui habilitent explicitement la Commission à faire appliquer les règles de la concurrence et à infliger des amendes aux entreprises ayant commis une infraction. Toute analogie entre une lettre dans le domaine des ressources propres et un acte relevant de domaines dans lesquels la Commission s’est vue conférer la compétence pour adopter des actes juridiquement contraignants est, dès lors, exclue.

80      Enfin, il y a lieu de rejeter l’argument de la République tchèque selon lequel il convient de privilégier l’interprétation qui ne privera pas le destinataire de l’acte concerné du droit à une protection juridictionnelle effective.

81      En effet, d’une part, bien que la condition relative aux effets de droit obligatoires doive être interprétée à la lumière du droit à une protection juridictionnelle effective tel que garanti à l’article 47, premier alinéa, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, il suffit de rappeler que ce droit n’a pas pour objet de modifier le système de contrôle juridictionnel prévu par les traités, et notamment les règles relatives à la recevabilité des recours formés directement devant la juridiction de l’Union, ainsi qu’il découle également des explications afférentes à cet article 47, lesquelles doivent, conformément à l’article 6, paragraphe 1, troisième alinéa, TUE et à l’article 52, paragraphe 7, de cette charte, être prises en considération pour l’interprétation de celle-ci. Partant, l’interprétation de la notion d’« acte attaquable » à la lumière dudit article 47 ne saurait aboutir à écarter cette condition sans excéder les compétences attribuées par le traité aux juridictions de l’Union (arrêts du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission, C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800, point 66, et du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission, C‑599/15 P, EU:C:2017:801, point 68).

82      En outre, il était, à la réception de la lettre attaquée, loisible à la République tchèque de ne pas donner suite à la lettre attaquée, dans l’attente de l’introduction éventuelle, par la Commission, d’un recours en manquement.

83      Certes, il résulte de l’économie de l’article 258 TFUE que la Commission n’est pas tenue de former un tel recours, le pouvoir d’appréciation dont elle dispose quant à l’opportunité de saisir la Cour d’un recours en manquement excluant le droit pour quiconque d’exiger d’elle qu’elle prenne position dans un sens déterminé (voir ordonnance du 14 septembre 2015, Roumanie/Commission, T‑784/14, non publiée, EU:T:2015:659, point 55 et jurisprudence citée).

84      Il aurait cependant également été loisible à la République tchèque de procéder à une mise à disposition conditionnelle des montants en cause, tout en formulant des réserves quant au bien-fondé de la thèse défendue par cette institution, la Cour ayant mentionné à plusieurs reprises cette possibilité (voir, en ce sens, arrêts du 16 mai 1991, Commission/Pays-Bas, C‑96/89, EU:C:1991:213, point 17 ; du 12 septembre 2000, Commission/Royaume-Uni, C‑359/97, EU:C:2000:426, point 31, et ordonnance du 4 octobre 2007, Finlande/Commission, C‑457/06 P, non publiée, EU:C:2007:582, point 39).

85      Enfin, la phase précontentieuse de la procédure en manquement prévue par l’article 258 TFUE ayant pour unique but de permettre à l’État membre de se conformer volontairement aux exigences du traité ou, le cas échéant, de lui donner l’occasion de justifier sa position, aucun des actes adoptés par la Commission dans ce cadre n’a force obligatoire (voir ordonnance du 19 septembre 2005, Aseprofar et Edifa/Commission, T‑247/04, EU:T:2005:327, point 47 et jurisprudence citée).

86      Il en va a fortiori de même lorsque, comme en l’espèce, la Commission invite, de manière informelle, un État membre, à mettre des ressources propres à la disposition du budget de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission, C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800, point 63, et du 25 octobre 2017, Roumanie/Commission, C‑599/15 P, EU:C:2017:801, point 65).

87      Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, la lettre attaquée ne constitue pas un acte susceptible de faire l’objet d’un recours en annulation. Il y a donc lieu de rejeter le recours comme irrecevable sans qu’il y ait lieu de statuer sur la demande en intervention de la République slovaque.

 Sur les dépens

88      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

89      En l’espèce, la République tchèque ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

90      Par ailleurs, en application de l’article 144, paragraphe 10, du règlement de procédure, la République tchèque, la Commission et la République slovaque supporteront chacune leurs propres dépens afférents à la demande en intervention de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Il n’y a pas lieu de statuer sur la demande en intervention de la République slovaque.

3)      La République tchèque est condamnée à supporter ses propres dépens et ceux exposés par la Commission européenne.

4)      La République tchèque, la Commission et la République slovaque supporteront chacune leurs propres dépens afférents à la demande en intervention de cette dernière.

Fait à Luxembourg, le 28 juin 2018.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

V. Tomljenović


*      Langue de procédure : le tchèque.

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