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Document 61995TJ0013

Rozsudek Soudu prvního stupně (pátého senátu) ze dne 18. dubna 1996.
Nicolaos Kyrpitsis proti Hospodářskému a sociálnímu výboru.
Úředníci - Oznámení o uvolnění - Přeložení - Zájem služby - Zamítnutí kandidatury - Odůvodnění.
Věc T-13/95.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:1996:50

61995A0013

Arrêt du Tribunal de première instance (cinquième chambre) du 18 avril 1996. - Nicolaos Kyrpitsis contre Comité économique et social des Communautés européennes. - Fonctionnaires - Avis de vacance - Mutation - Intérêt du service - Rejet de candidature - Motivation. - Affaire T-13/95.

Recueil de jurisprudence - fonction publique 1996 page IA-00167
page II-00503


Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Parties


++++

Dans l'affaire T-13/95,

Nicolaos Kyrpitsis, fonctionnaire du Comité économique et social des Communautés européennes, demeurant à Châtelineau (Belgique), représenté par Me Jean-Noël Louis, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 1, rue Glesener,

partie requérante,

contre

Comité économique et social des Communautés européennes, représenté par M. Bermejo Garde, conseiller juridique, en qualité d'agent, assisté de Me Denis Waelbroeck, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique de la Commission, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l'annulation des décisions de rejet de la candidature du requérant aux vacances d'emploi n_s 2/94, 3/94 et 4/94 d'agent qualifié (huissier) de grade D 3/D 2 à la direction du personnel, de l'administration et des finances du Comité économique et social,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

(cinquième chambre),

composé de MM. R. Schintgen, président, R. García-Valdecasas et J. Azizi, juges,

greffier: M. J. Palacio González, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 16 novembre 1995,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


Faits à l'origine du recours

1 Le requérant est entré au service du Comité économique et social des Communautés européennes (ci-après «CES») le 1er août 1989 en tant qu'agent temporaire non qualifié. Par décision du 28 février 1991, il a été nommé fonctionnaire stagiaire de grade D 4. Par décision du 27 août 1992, il a été titularisé dans son grade. Par décision du 13 décembre 1993, il a été promu au grade D 3 et nommé à l'emploi d'agent qualifié à la direction du personnel, de l'administration et des finances, service spécialisé des affaires intérieures, «restaurant, cafétéria, distribution de boissons».

2 Le 2 mars 1994, la direction du personnel, de l'administration et des finances du CES a publié les avis de vacance d'emploi n_s 2/94, 3/94 et 4/94 portant sur trois emplois d'agent qualifié (huissier) ou d'agent non qualifié (coursier) à la direction du personnel, de l'administration et des finances, service spécialisé des affaires intérieures, «réunions, huissiers séance, réception, étages». Ces emplois ont été publiés aux grades D 3/D 2 ou D 4.

3 Les avis de vacance d'emploi susmentionnés se lisent comme suit:

«...

2. Nature des fonctions:

Fonctionnaire chargé de travaux manuels ou de tâches de service, notamment

- orientation et introduction des visiteurs,

- distribution de la documentation et du courrier,

- collaboration à l'exécution de divers travaux, notamment à l'occasion des sessions plénières et réunions.

3. Qualifications requises:

- connaissance du niveau de l'enseignement primaire,

- qualités d'ordre et d'attention,

- connaissance approfondie d'une langue des Communautés et connaissance satisfaisante d'une autre langue communautaire.

...

6. Observation:

- l'autorité investie du pouvoir de nomination examinera en priorité les possibilités de pourvoir les postes vacants par mutation;

- ensuite seront examinées les candidatures des lauréats inscrits sur la liste de réserve établie à la suite du concours interne n_ D/32/93.»

4 Le 6 mars 1994, le requérant a introduit son acte de candidature aux avis de vacance susmentionnés pour une mutation à un poste d'agent qualifié. Deux autres fonctionnaires, agents qualifiés au restaurant, ont également introduit leurs candidatures dans le cadre de la procédure de mutation. En outre, sept des lauréats inscrits sur la liste de réserve établie à la suite du concours interne n_ D/32/93 d'agents non qualifiés ont introduit leurs candidatures pour les mêmes postes.

5 Le 21 mars 1994, le secrétaire général du CES a interrogé le directeur du personnel, de l'administration et des finances sur les possibilités de pourvoi des postes affichés. Dans cette communication, après avoir énuméré les personnes ayant introduit leurs candidatures, tant dans le cadre de la procédure de mutation que dans le cadre de la procédure du concours interne n_ D/32/93 d'agents non qualifiés, le secrétaire général du CES a précisé:

«Afin de pourvoir dans les meilleurs délais aux emplois vacants, je vous prie de bien vouloir me donner votre avis au sujet des possibilités précitées. En particulier, je vous prie de me faire savoir lesquelles de ces personnes pourraient être nommées sur les postes vacants. Dans cet avis, le choix des personnes dont vous proposez la nomination ainsi que le refus des autres candidats devraient être dûment motivés.»

6 Dans une note du 24 mars 1994, adressée au secrétaire général du CES, le directeur du personnel, de l'administration et des finances a indiqué:

«L'examen de la situation appelle les commentaires suivants:

1. Dans le seul intérêt du service, il convient dans un premier temps d'envisager la mutation de M. M. A. du service restaurant/cafétéria au service d'huissiers, conformément aux recommandations du médecin-conseil de l'institution...

2. Dans le cadre de la procédure de mutation, toutes les candidatures présentées émanent de fonctionnaires affectés au service restaurant/cafétéria. Chacune d'entre elles répond de façon très complète aux critères imposés par les avis de vacance d'emploi n_s 2/94, 3/94 et 4/94. Cependant, le service restaurant/cafétéria connaît actuellement de nombreux problèmes de fonctionnement: l'importante surcharge de travail subie depuis la récente entrée en fonction du Comité des régions se conjugue à l'arrivée d'agents nouveaux dans un service qui connaît par ailleurs des problèmes récurrents d'absentéisme liés à la dureté physique des tâches accomplies. Il semble donc peu opportun dans la période actuelle de priver ce service de ses fonctionnaires les plus expérimentés. Par conséquent, je vous conseille d'écarter les possibilités de mutation et de passer à la phase suivante de la procédure de pourvoi des vacances d'emploi.

3. Toutes les autres candidatures enregistrées émanent de lauréats du concours interne n_ D/32/93 d'agents non qualifiés.

... dans l'hypothèse où vous décideriez de suivre ma recommandation exposée au point 1 ci-dessus, et après examen des candidatures, je vous propose:

...

- Pour ce qui concerne les deux autres postes d'huissier, la nomination de MM. A. et W., placés respectivement 4_ et 5_ sur la liste d'aptitude du concours.»

7 La proposition du directeur a été suivie par le secrétaire général en tant qu'autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après «AIPN»). Par décisions n_s 67/94 A, 68/94 A et 69/94 A, du 30 mars 1994, il a été pourvu aux vacances d'emploi n_s 2/94, 3/94 et 4/94, et M. M., fonctionnaire affecté au service «restaurant, cafétéria», a été muté au service «réunions, huissiers séance, réception, étages», et MM. A. et W., lauréats du concours interne n_ CES/D/32/93, ont été nommés agents non qualifiés (coursiers).

8 Par note du 30 mars 1994 du secrétaire général du CES, le requérant a été informé du rejet de sa candidature dans les termes suivants: «Je suis au regret de vous informer que votre candidature n'a pas été retenue.»

9 Par note du 12 avril 1994, le requérant a demandé des explications concernant le rejet de sa candidature, en attirant particulièrement l'attention du secrétaire général du CES sur le point 6 des avis de vacance.

10 Par note du 30 mai 1994, le secrétaire général du CES lui a indiqué que, «en présence de candidats fonctionnaires du restaurant/cafétéria et de lauréats du concours interne D, l'AIPN a porté son choix aux agents ayant une expérience professionnelle comme huissier et occupant déjà un tel poste. Une seule exception a dû être consentie pour des raisons médicales».

11 Le requérant a alors introduit, le 30 juin 1994, une réclamation contre la décision de rejet de sa candidature.

12 Cette réclamation a fait l'objet d'une décision explicite de rejet portée à la connaissance du requérant par note du 25 octobre 1994 du secrétaire général du CES. Dans cette décision, il était indiqué:

«1. Dans un premier temps, l'AIPN a décidé la mutation de M. M. dans le seul intérêt du service et notamment en raison des recommandations du médecin-conseil de l'institution, au titre de l'article 7 du statut.

2. Dans un deuxième temps, l'AIPN a envisagé les possibilités de pourvoi des vacances d'emploi, en fonction des candidatures enregistrées.

En présence de candidats à la mutation, tous fonctionnaires affectés au restaurant/cafétéria, d'une part, et de candidats lauréats du concours interne D/32/93, d'autre part, l'AIPN, conformément à l'article 29, paragraphe a), du statut, a tout d'abord examiné les possibilités de mutation. Dans l'intérêt du service, l'AIPN a décidé de ne pourvoir aucun emploi par mutation de fonctionnaires affectés au service restaurant/cafétéria.

L'AIPN a ensuite décidé de passer au stade suivant de la procédure, soit l'examen des candidatures présentées par les lauréats du concours interne n_ CES/D/32/93.

Après examen comparatif de toutes les candidatures remplissant les conditions fixées par les avis de vacance des emplois restant à pourvoir, l'AIPN, prenant en compte les qualifications, les mérites, l'expérience et les aptitudes propres à chaque candidat, a exercé son pouvoir d'appréciation pour arrêter ses choix, conformément aux dispositions du statut, sur les candidatures de MM. A. et W.»

Procédure et conclusions des parties

13 C'est dans ces circonstances que, par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 janvier 1995, le requérant a introduit le présent recours.

14 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre) a décidé d'ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables.

15 Les représentants des parties ont été entendus en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l'audience publique du 16 novembre 1995.

16 Le requérant conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

- annuler les décisions de rejet de sa candidature aux emplois n_s 2/94, 3/94 et 4/94,

- condamner la défenderesse aux dépens de l'instance.

17 Le défendeur conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:

- rejeter le recours comme non fondé,

- condamner le requérant à ses propres dépens.

Sur le fond

18 Le requérant invoque, en substance, deux moyens. Le premier est pris de la violation de l'article 29 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après «statut») et des avis de vacance ainsi que d'une erreur manifeste d'appréciation. Le second est pris d'une absence de motivation.

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 29 du statut et des avis de vacance ainsi que d'une erreur manifeste d'appréciation

19 Ce moyen comporte deux branches. Dans la première branche, le requérant fait valoir que la priorité établie par l'article 29 du statut et par les avis de vacance en cause n'a pas été respectée par l'AIPN. Dans la seconde branche, il soutient que, en se basant sur la notion d'intérêt du service pour justifier le rejet de sa candidature, l'AIPN a violé l'article 29 du statut et lesdits avis de vacance.

Première branche: non-respect de la priorité de la voie de la mutation

- Arguments des parties

20 Le requérant rappelle que, aux termes de l'article 29, paragraphe 1, du statut, les possibilités de promotion ou de mutation au sein de l'institution où une vacance d'emploi s'est produite doivent être examinées en priorité. De même, le requérant fait valoir que le point 6 des avis de vacance en cause précisait que l'AIPN «examinera en priorité les possibilités de pourvoir les postes vacants par mutation». Il en conclut que, ayant posé sa candidature aux trois emplois au titre de la mutation, l'AIPN était tenue d'examiner sa candidature en priorité.

21 Le requérant relève que l'AIPN a procédé à la mutation de l'un de ses collègues à l'un des emplois vacants sans avoir effectué un examen comparatif des mérites des fonctionnaires candidats à ces emplois au titre de la mutation. Or, les principes énoncés aux articles 7, 29 et 45 du statut, tels que relevés dans les conclusions de l'avocat général M. Lenz sous l'arrêt de la Cour du 9 décembre 1993, Parlement/Volger (C-115/92 P, Rec. p. I-6549, I-6563, point 36), obligeraient l'AIPN, aux fins de pourvoir à un emploi par voie de mutation, à effectuer un examen comparatif des mérites des candidats par rapport à un tel emploi.

22 Le requérant soutient que l'AIPN ne pouvait procéder à un examen comparatif des mérites des candidats qu'en prenant connaissance de tous les éléments de son dossier individuel. Or, la partie défenderesse n'aurait pas rapporté la preuve que l'AIPN aurait consulté son dossier individuel après le 6 mars 1994, date à laquelle il a posé sa candidature aux trois emplois litigieux, ni que l'AIPN aurait effectivement procédé à l'examen comparatif des mérites des candidats aux emplois vacants.

23 Le requérant soutient que l'AIPN a commis une erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où elle a estimé soit que le requérant ne remplissait pas les conditions requises par les avis de vacance, soit que les mérites des autres candidats étaient «supérieurs aux siens».

24 Le requérant fait enfin valoir que l'AIPN a procédé à une sélection des candidats par rapport à des critères ne figurant pas dans les avis de vacance. Il relève, à cet égard, qu'il ressort de la note du 30 mai 1994 que l'AIPN a retenu comme critères déterminants une expérience professionnelle d'huissier ainsi que le fait d'occuper déjà un tel poste. Or, de telles qualifications n'auraient pas été exigées dans les avis de vacance.

25 Le défendeur rappelle que l'article 29 du statut prévoit l'ordre de préférence suivant lequel l'AIPN doit pourvoir aux vacances d'emploi. Étant donné qu'en application de l'article 45 du statut la promotion se fait «au choix» et que la même règle s'applique pour les mutations, l'AIPN serait libre de déterminer quel candidat lui paraît le mieux apte à remplir les fonctions en cause, sous réserve d'un contrôle concernant une erreur manifeste d'appréciation ou un détournement de pouvoir.

26 Le défendeur souligne que l'exigence de l'examen prioritaire des possibilités de mutation a été respectée. En effet, au travers de la disposition du point 6 des avis de vacance litigieux, l'AIPN aurait respecté l'ordre de priorité fixé par l'article 29 du statut en mentionnant son intention d'examiner d'abord les possibilités de mutation et, ensuite, les candidatures résultant d'un concours interne. Cet ordre aurait également été respecté en pratique lors des décisions prises par la suite.

27 Le défendeur, tout en rappelant que la charge de la preuve incombe en l'occurrence au requérant, allègue que l'AIPN a effectivement consulté le dossier personnel du requérant avant de pourvoir aux emplois litigieux. En effet, à plusieurs reprises, l'AIPN aurait confirmé avoir procédé à la comparaison des mérites des candidats souhaitant être affectés par mutation aux postes en cause, ainsi que le font ressortir les notes des 24 mars 1994 et 25 octobre 1994. C'est ainsi que la note du 24 mars 1994 aurait précisé qu'un examen avait été effectué à l'issue duquel il avait été conclu que, dans le cadre de la procédure de mutation, chacune des candidatures répondait «de façon très complète aux critères imposés par les avis de vacance».

28 En effet, ce n'est, selon le défendeur, qu'après avoir examiné les candidatures à la mutation et après avoir constaté que, à l'exception d'une de ces dernières, une mutation ne servirait pas l'intérêt du service que l'AIPN a examiné les candidatures des lauréats du concours interne.

29 Le défendeur explique que, face à un choix entre des candidats ayant une expérience d'huissier et d'autres candidats, comme le requérant, n'en ayant pas, la préférence a été donnée aux candidats ayant une telle expérience.

30 Selon le défendeur, il a été reconnu que le requérant remplissait toutes les qualifications requises par les avis de vacance et le fait que d'autres candidats lui aient été préférés ne constitue pas en soi la preuve d'une erreur manifeste d'appréciation.

- Appréciation du Tribunal

31 Il convient de rappeler, à titre liminaire, que l'article 29 du statut fixe les modalités selon lesquelles il y a lieu de pourvoir à une vacance d'emploi. C'est ainsi que l'institution doit examiner successivement, d'abord, les possibilités de promotion et de mutation, ensuite, les possibilités d'organisation d'un concours interne et, finalement, les demandes de transfert de fonctionnaires d'autres institutions. Ce n'est que si ces possibilités se révèlent inappropriées que l'institution procède à l'organisation d'un concours (voir arrêt de la Cour du 5 décembre 1974, Van Belle/Conseil, 176/73, Rec. p. 1361, points 5 et 6). Il appartient à l'institution d'apprécier si la première voie, à savoir la promotion ou la mutation, conformément au paragraphe 1, sous a), de l'article susvisé, permet de pourvoir à la vacance d'emploi ou s'il est opportun de passer à la deuxième option, à savoir l'organisation d'un concours interne (voir arrêt de la Cour du 24 mars 1983, Colussi/Parlement, 298/81, Rec. p. 1131, point 17).

32 Il y a lieu de souligner ensuite que, lorsque l'institution pourvoit à un poste vacant, elle ne saurait prendre cette décision qu'après avoir examiné toutes les candidatures introduites à cet effet, puisque l'application combinée des articles 7, 29 et 45 du statut exige que l'AIPN effectue un examen comparatif des mérites des candidats (voir arrêts du Tribunal du 12 février 1992, Volger/Parlement, T-52/90, Rec. p. II-121, point 24, du 3 mars 1993, Vela Palacios/CES, T-25/92, Rec. p. II-201, point 49, et du 9 février 1994, Latham/Commission, T-82/91, RecFP p. II-61, point 62).

33 En effet, ce n'est qu'à la suite d'une telle comparaison que l'AIPN est en mesure de juger quelles sont les meilleures candidatures pour le poste à pourvoir. Comme le Tribunal a jugé dans son arrêt du 21 février 1995, Moat/Commission (T-506/93, RecFP p. II-147, point 37), l'obligation pour l'AIPN de procéder à un examen comparatif des mérites des candidats à un emploi vacant est l'expression à la fois du principe de l'égalité de traitement des fonctionnaires et du principe de leur vocation à la carrière.

34 Il convient, également, de rappeler qu'il résulte d'une jurisprudence constante que l'AIPN est tenue de respecter l'avis de vacance qu'elle a arrêté, puisqu'un tel avis de vacance, approuvé dans le cadre de l'article 29 du statut, détermine les conditions relatives à l'accès à l'emploi dont il s'agit. Ainsi, la fonction de l'avis de vacance est, d'une part, d'informer les intéressés d'une façon aussi exacte que possible sur la nature des conditions requises pour occuper le poste à pourvoir afin de les mettre en mesure d'apprécier s'il y a lieu pour eux de faire acte de candidature (voir arrêt de la Cour du 30 octobre 1974, Grassi/Conseil, 188/73, Rec. p. 1099, point 40) et, d'autre part, de fixer le cadre de légalité au regard duquel l'institution entend procéder à l'examen comparatif des mérites des candidats (voir arrêt de la Cour du 7 février 1990, Culin/Commission, C-343/87, Rec. I-225, point 19, et arrêts du Tribunal du 11 décembre 1991, Frederiksen/Parlement, T-169/89, Rec. p. II-1403, point 69, et du 18 février 1993, Mc Avoy/Parlement, T-45/91, Rec. p. II-83, point 48).

35 Il y a lieu de relever que l'AIPN ne respecte pas ce cadre de légalité si elle ne s'avise des conditions particulières requises pour remplir le poste à pourvoir qu'après la publication de l'avis de vacance, au vu des candidats qui se sont présentés, et si elle prend en considération, lors de l'examen des candidatures, d'autres conditions que celles qui figurent dans l'avis de vacance. Une telle démarche priverait en effet l'avis de vacance du rôle essentiel qu'il doit jouer dans la procédure de recrutement, à savoir d'informer les intéressés d'une façon aussi exacte que possible de la nature des conditions requises pour remplir le poste en question (voir notamment arrêt du Tribunal du 3 mars 1993, Booss et Fischer/Commission, T-58/91, Rec. p. II-147, point 67).

36 C'est à la lumière des exigences qui viennent d'être exposées qu'il convient d'examiner la question de savoir si l'AIPN a pourvu les emplois en cause en conformité avec les conditions requises par l'article 29 du statut et par les avis de vacance.

37 Le Tribunal estime qu'il résulte tant de l'article 29 du statut que des avis de vacance, que l'AIPN était tenue de vérifier au préalable si les candidatures introduites au titre de la mutation remplissaient les exigences posées par les avis de vacance et, par la suite, d'effectuer un examen comparatif des mérites des candidats remplissant ces exigences, avant d'examiner les candidatures introduites par les lauréats du concours inscrits sur la liste de réserve établie à la suite du concours interne n_ D/32/93.

38 Il convient de constater, en premier lieu, que, dans sa note du 30 mai 1994, rédigée en réponse à la demande d'explications formulée par le requérant le 12 avril 1994 au sujet du rejet de sa candidature, le secrétaire général du CES a précisé que l'AIPN avait porté son choix sur les agents ayant une expérience professionnelle comme huissier et occupant déjà un tel poste.

39 A cet égard, il y a lieu de souligner que ce critère de sélection ne figure pas dans les avis de vacance en question. Or, la prise en compte d'une expérience professionnelle déterminée est un critère qui revêt une importance fondamentale de sorte que, si ce critère ne figure pas parmi les exigences posées par un avis de vacance, l'AIPN n'est pas habilitée à se baser sur un tel critère afin d'effectuer son choix entre les candidats.

40 Le Tribunal estime, dès lors, que, en prenant l'expérience professionnelle comme critère afin d'écarter la candidature du requérant au titre de la mutation, l'AIPN a violé les avis de vacance.

41 En second lieu, le Tribunal relève qu'il ressort de la note du 24 mars 1994, adressée au secrétaire général du CES par le directeur du personnel, de l'administration et des finances ainsi que des explications fournies par le défendeur au cours de l'audience devant le Tribunal que, en plus de la circonstance de l'absence d'expérience professionnelle du requérant comme huissier évoquée dans la note du 30 mai 1994, il y avait d'autres raisons pour lesquelles la candidature du requérant avait été écartée.

42 En effet, dans la note susvisée du 24 mars 1994, il est reconnu que chacune des candidatures, au titre de la procédure de mutation, «répond de façon très complète aux critères imposés par les avis de vacance d'emploi». Cependant, le directeur du personnel, de l'administration et des finances, après examen des problèmes de fonctionnement qui, selon ses dires, auraient surgi au service «restaurant, cafétéria» si trois de ses fonctionnaires auraient été mutés dans un autre service, a proposé au secrétaire général du CES «d'écarter les possibilités de mutation et de passer à la phase suivante de la procédure de pourvoi des vacances d'emplois».

43 Le Tribunal ne saurait retenir l'argument du défendeur selon lequel les dispositions de l'article 29 du statut et des avis de vacance en cause auraient été respectées du fait que l'AIPN avait examiné les mérites des candidats au titre de la procédure de mutation. En effet, le Tribunal estime que, s'il est vrai que la note du 24 mars 1994 énonce que toutes les candidatures à la mutation répondent, de façon très complète, aux critères imposés par les avis de vacance, il reste néanmoins que l'AIPN n'a pas tiré de cette constatation la conclusion qui s'imposait. Le Tribunal estime, en effet, que, en l'espèce, la constatation susmentionnée aurait dû amener l'AIPN, conformément aux dispositions de l'article 29 du statut et des avis de vacance, à procéder à la mutation des candidats dans les conditions prévues, une telle conclusion s'imposant d'autant plus que, conformément au point 6 des avis de vacance, «l'AIPN examinera en priorité les possibilités de pourvoir les postes vacants par mutation».

44 Il résulte de tout ce qui précède que c'est en violation de l'article 29, premier alinéa, du statut, ainsi que des avis de vacance que l'AIPN a écarté la candidature du requérant des postes en cause.

45 La première branche du moyen est, dès lors, fondée.

Seconde branche: prise en compte de l'intérêt du service

- Arguments des parties

46 Le requérant observe que, dans sa décision de rejet de la réclamation en date du 25 octobre 1994, l'AIPN s'est limitée à faire allusion, sans aucune précision, à un intérêt du service pour justifier le rejet de la candidature du requérant au titre de la mutation. Il estime que ces explications ne permettaient pas de déroger à l'ordre de priorité tel qu'établi par l'article 29 du statut ainsi que par les avis de vacance. Le requérant en conclut que la décision de passer à la seconde phase de la procédure de pourvoi des emplois litigieux a été adoptée irrégulièrement.

47 Le défendeur fait valoir que les décisions litigieuses ont été prises dans le seul intérêt du service, ainsi qu'il est indiqué dans la décision du 25 octobre 1994 de rejet de la réclamation, et que cela justifierait le fait de ne pas avoir retenu la candidature du requérant.

48 Le défendeur estime que l'intérêt du service implique non seulement un examen des différentes candidatures, mais aussi la prise en compte d'un ensemble d'autres considérations relatives au bon fonctionnement d'une institution, telles que la nécessité de renforcer certains services, la bonne gestion administrative et l'obligation d'assistance aux fonctionnaires.

49 Le défendeur soutient que la décision prise s'inscrit dans le large pouvoir d'appréciation en ce qui concerne l'organisation de ses services dont dispose l'AIPN. En effet, conformément à une jurisprudence constante, les problèmes éventuels que le départ d'un fonctionnaire peut causer à son service antérieur et le profit que son nouveau service peut tirer d'une réaffectation seraient des considérations qui relèvent du pouvoir d'appréciation de l'AIPN (voir arrêt de la Cour du 14 juillet 1983, Nebe/Commission, 176/82, Rec. p. 2475, point 18, et arrêt du Tribunal du 16 décembre 1993, Turner/Commission, T-80/92, Rec. p. II-1465, point 53).

50 A cet égard, le défendeur fait valoir que le «restaurant, cafétéria» connaissait, au moment où la mutation d'un des candidats a eu lieu, de nombreux problèmes de fonctionnement. Pour cette raison, on ne saurait faire grief à l'AIPN d'avoir considéré qu'il était dans l'intérêt du bon fonctionnement de cette unité de ne pas la priver de ses fonctionnaires les plus expérimentés. Ce serait donc à juste titre que l'AIPN a considéré comme peu opportun une mutation des autres candidats du service «restaurant, cafétéria» aux postes litigieux.

- Appréciation du Tribunal

51 Il y a lieu de rappeler que, aux termes de l'article 7 du statut, l'AIPN «affecte par voie de nomination ou de mutation, dans le seul intérêt du service et sans considération de nationalité, chaque fonctionnaire à un emploi de sa catégorie ou de son cadre correspondant à son grade» et que «le fonctionnaire peut demander à être muté à l'intérieur de son institution». Il convient de rappeler, ensuite, que la notion de l'intérêt du service, telle qu'elle a été développée par la jurisprudence, se rapporte au bon fonctionnement de l'institution en général et, en particulier, aux exigences spécifiques du poste à pourvoir.

52 Il y a lieu de rappeler également que, si les institutions, selon une jurisprudence constante de la Cour et du Tribunal, disposent, en fonction des missions qui leur sont confiées, d'un large pouvoir d'appréciation dans l'organisation de leurs services et dans l'affectation du personnel qui se trouve à leur disposition, l'équilibre des droits et obligations que le statut a créé dans les relations entre l'autorité publique et les agents du service public implique néanmoins que l'AIPN, lorsqu'elle statue à propos de la situation d'un fonctionnaire, prenne en considération l'ensemble des éléments susceptibles de déterminer sa décision et que, s'agissant d'une décision d'affectation, elle tienne compte non seulement de l'intérêt du service et du principe de l'équivalence des emplois, mais également des droits et intérêts légitimes du fonctionnaire concerné (voir arrêts de la Cour du 23 mars 1988, Hecq/Commission, 19/87, Rec. p. 1681, point 6, du 31 mai 1988, Rousseau/Cour des comptes, 167/86, Rec. p. 2705, point 13, et du 29 juin 1994, Klinke/Cour de justice, C-298/93 P, Rec. p. I-3009, point 38, et arrêts du Tribunal du 12 juillet 1990, Scheuer/Commission, T-108/89, Rec. p. II-411, point 37, et du 13 juillet 1995, Saby/Commission, T-44/93, RecFP p. II-541, point 47).

53 Parmi ces intérêts se trouve l'intérêt du fonctionnaire à être promu ou muté selon ses souhaits et capacités. La prise en considération de cet intérêt découle implicitement des termes de l'article 29 du statut qui impose à l'AIPN d'examiner, en premier lieu, les possibilités de mutation et de promotion lorsqu'elle envisage de pourvoir un emploi. En outre, l'intérêt du fonctionnaire à bénéficier d'une mutation a également été pris en considération par le législateur à l'article 7, paragraphe 1, deuxième alinéa, du statut.

54 Le Tribunal estime que la thèse du défendeur selon laquelle l'intérêt du service exigeait de ne pas priver le service «restaurant, cafétéria» du concours de l'un de ses fonctionnaires les plus expérimentés, en raison des problèmes de fonctionnement que ce service connaissait, est dénuée de fondement.

55 Le Tribunal considère, en premier lieu, que le défendeur ne saurait se prévaloir des arrêts Nebe/Commission et Turner/Commission, précités, dès lors que les circonstances de fait qui étaient à la base de ces deux affaires étaient différentes de celles de la présente espèce. Il s'agissait, en effet, non pas de litiges ayant pour objet des demandes visant à une mutation ou à une promotion sur la base de l'article 29 du statut et d'un avis de vacance, comme dans la présente affaire, mais de situations dans lesquelles les requérants s'opposaient à leur réaffectation d'office à un nouveau poste.

56 A cet égard, il y a lieu de rappeler que, devant les arguments des requérants Nebe et Turner qui prétendaient que l'intérêt du service invoqué par l'AIPN pour les réaffecter serait contredit par le fait que leur départ poserait des problèmes à leurs services d'origine, la Cour et le Tribunal ont conclu que l'AIPN, dans l'exercice de son large pouvoir d'appréciation, peut affecter d'office les fonctionnaires concernés à un service différent de celui auquel ils se trouvent affectés et que ces fonctionnaires ne peuvent s'y opposer au motif, notamment, que leur réaffectation causerait des problèmes à leur service antérieur, de telles considérations relevant du pouvoir d'appréciation de l'AIPN (voir arrêts Nebe/Commission, précité, points 16 à 19, et Turner/Commission, précité, points 53 à 59).

57 Le Tribunal relève, en second lieu, que l'effet utile des règles régissant les procédures de mutation et de promotion instaurées par le statut se trouverait mis en échec, si l'AIPN pouvait faire prévaloir l'intérêt du service dont relève le poste d'origine du fonctionnaire qui se porte candidat à la mutation ou à la promotion. En effet, la finalité du système de pourvoi de postes vacants par les voies de la mutation et de la promotion tel qu'il découle des articles 4, 7, 29, 43 à 46 du statut serait mise en cause, si l'AIPN était autorisée à rejeter la candidature à la mutation ou à la promotion au seul motif que le changement d'affectation du fonctionnaire risquerait, en raison de ses qualités et de son expérience professionnelle, d'engendrer des problèmes de fonctionnement à l'intérieur du service d'origine auquel il se trouve affecté.

58 De plus, le Tribunal estime que la thèse du défendeur aboutirait à entraver sérieusement la mobilité des fonctionnaires à l'intérieur de la fonction publique communautaire au détriment du bon fonctionnement des institutions communautaires. En effet, il convient d'assurer aux institutions les ressources en personnel qualifié nécessaires au bon fonctionnement de leurs services en encourageant, à travers la mutation et la promotion, les ambitions professionnelles et les souhaits de mobilité des fonctionnaires les plus qualifiés et les plus expérimentés.

59 Tout en admettant qu'il incombait au défendeur de veiller au bon fonctionnement du service «restaurant, cafétéria», le Tribunal considère néanmoins que les mesures qu'il a adoptées à ces fins ne pouvaient être prises en violation de l'article 29 du statut et des avis de vacance en cause. En effet, l'AIPN était tenue, en l'espèce, de préserver, au moyen d'une solution appropriée, le cas échéant, transitoire, le droit du fonctionnaire au déroulement normal de sa carrière au sein de l'institution. Or, ainsi que le défendeur l'a admis à l'audience, l'AIPN n'a entrepris aucun effort pour rechercher une telle solution.

60 Dès lors, le Tribunal estime que c'est en méconnaissance de l'article 29 du statut et des avis de vacance que le défendeur a retenu le critère de l'intérêt du service pour écarter la candidature du requérant aux postes pour lesquels il avait introduit sa candidature aux fins de mutation.

61 La seconde branche du moyen est également fondée.

62 Ce moyen doit, partant, être retenu dans son intégralité.

Sur le moyen tiré d'une absence de motivation

Arguments des parties

63 Le requérant soutient que la décision de rejet de sa candidature au cours de la phase précontentieuse n'a pas été suffisamment motivée. Il relève à cet égard que la note lui adressée le 30 mai 1994, en réponse à sa demande d'explications concernant le rejet de sa candidature, mentionne que l'AIPN avait porté son choix sur des candidats ayant une expérience professionnelle d'huissier, alors que, en revanche, dans sa réponse du 25 octobre 1994 à la réclamation, l'AIPN explique que c'est «dans l'intérêt du service (qu'elle) a décidé de ne pourvoir aucun emploi par mutation des fonctionnaires affectés au service restaurant/cafétéria». Or, l'AIPN n'aurait pas précisé l'intérêt du service qui a motivé sa décision et n'aurait donné aucune précision permettant au requérant et au juge communautaire de vérifier si la décision portant rejet de sa candidature était bien fondée.

64 Au stade de la réplique, le requérant fait observer que ce n'est que dans la note du 24 mars 1994, adressée par le directeur au secrétaire général, qui a été produite pour la première fois au stade du mémoire en défense, que le défendeur a expliqué en quoi a consisté l'intérêt du service.

65 Le requérant soutient, d'une part, qu'il s'agit d'une motivation tardive qui viole les droits de la défense du requérant dans la mesure où il n'a pas obtenu, en temps utile, les indications nécessaires pour se défendre et, d'autre part, que l'intérêt du service allégué est une notion tellement imprécise qu'elle ne permet, ni au requérant d'apprécier le bien-fondé de la décision litigieuse, ni au juge communautaire d'exercer son contrôle juridictionnel à cet égard.

66 Le défendeur constate que le requérant se borne à invoquer la tardiveté de la motivation, sans pour autant en contester le bien-fondé. Il observe en effet que, dans sa réplique, le requérant ne développe aucun argument tiré d'une prétendue erreur manifeste d'appréciation. Or, conformément à une jurisprudence constante, «des explications données en cours de procédure peuvent, dans des cas exceptionnels, rendre sans objet un moyen tiré de l'insuffisance de motivation, de sorte qu'ils ne justifient plus l'annulation de la décision en cause» (voir arrêt du Tribunal du 13 décembre 1990, Kalavros/Cour de justice, T-160/89 et T-161/89, Rec. p. II-871, point 72).

Appréciation du Tribunal

67 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l'obligation de motivation d'une décision faisant grief a pour but, d'une part, de fournir à l'intéressé les indications nécessaires pour savoir si la décision est ou non fondée et, d'autre part, d'en rendre possible le contrôle juridictionnel (voir arrêts de la Cour du 26 novembre 1981, Michel/Parlement, 195/80, Rec. p. 2861, point 22, et du 21 juin 1984, Lux/Cour des comptes, 69/83, Rec. p. 2447, point 36, et arrêt du Tribunal du 20 mars 1991, Pérez-Mínguez Casariego/Commission, T-1/90, Rec. p. II-143, point 73).

68 Il y a lieu de rappeler également que, en cas de décision rejetant une candidature pour un poste déclaré vacant, l'AIPN est tenue à une obligation de motivation, à tout le moins au stade du rejet de la réclamation contre une telle décision (voir arrêts du Tribunal Volger/Parlement, précité, point 36, Vela Palacios/CES, précité, point 22, et Benecos/Commission, T-16/94, RecFP p. II-335, point 31).

69 En l'espèce, le Tribunal constate, en premier lieu, comme le requérant l'a fait valoir à juste titre, que l'explication qui a été fournie dans la décision de rejet de la réclamation du 25 octobre 1994 s'est limitée à invoquer l'intérêt du service, sans aucune autre précision, pour justifier le rejet de la candidature du requérant et que cette explication diffère totalement de celle avancée dans la note du 30 mai 1994, adressée au requérant, selon laquelle le choix de l'AIPN aurait été fait en faveur des candidats ayant une expérience professionnelle comme huissier et occupant déjà un tel poste.

70 Il y a lieu de constater ensuite que ce n'est qu'au stade du mémoire en défense que le défendeur a vraiment motivé la décision litigieuse en produisant en annexe la note du 24 mars 1994 (voir ci-dessus point 6) selon laquelle le directeur général, après avoir constaté que toutes les candidatures présentées dans le cadre de la procédure de mutation répondaient de façon très complète aux critères imposés par les avis de vacance, proposait au secrétaire général d'écarter les possibilités de mutation des candidats affectés au service «restaurant, cafétéria» en raison des problèmes de fonctionnement que leur départ causerait à ce service et d'examiner les candidatures provenant du concours interne et que, par la suite, il a fait compléter la motivation ainsi donnée par les explications fournies à l'audience par son conseil.

71 A cet égard, il convient de relever qu'il ressort de la jurisprudence que, pour juger du caractère suffisant d'une motivation, il y a lieu de la replacer dans le contexte dans lequel s'est inscrite l'adoption de l'acte attaqué (voir notamment arrêt de la Cour du 14 février 1990, Delacre e.a./Commission, C-350/88, Rec. p. I-395, point 16, et arrêts du Tribunal du 5 juin 1992, Finsider/Commission, T-26/90, Rec. p. II-1789, point 72, et Benecos/Commission, précité, point 33).

72 Le Tribunal estime que, dans la mesure où dans sa décision du 25 octobre 1994 de rejet de la réclamation, l'AIPN donne au requérant une explication des raisons pour lesquelles sa candidature avait été écartée qui différait totalement de l'explication donnée au requérant dans la note du 30 mai 1994, l'AIPN ne pouvait se limiter, dans la décision de rejet de la réclamation, à un renvoi sommaire à l'intérêt du service, mais devait fournir au requérant une motivation détaillée, claire et cohérente du rejet de sa candidature de manière à lui permettre d'apprécier pleinement les raisons de ce rejet.

73 Le Tribunal considère que, compte tenu de tout ce qui précède, le renvoi sommaire à l'intérêt du service fait dans la décision de rejet de la réclamation du 25 octobre 1994 ne constituait pas une simple insuffisance de motivation susceptible d'être couverte par des précisions complémentaires fournies par l'administration en cours d'instance (voir arrêts du Tribunal Vela Palacios/CES, précité, point 26, et Benecos/Commission, précité, point 36), mais doit être qualifié, contrairement à ce qui a été affirmé par le défendeur, d'absence de motivation.

74 Or, ainsi qu'il résulte d'une jurisprudence constante, une telle absence de motivation du rejet de la réclamation ne peut être couverte par des explications fournies par l'administration après l'introduction d'un recours juridictionnel, car, à ce stade, de telles explications ne remplissent plus leur fonction. En effet, l'obligation de motivation qui résulte des dispositions combinées des articles 25, deuxième alinéa, et 90, paragraphe 2, du statut a pour but, d'une part, de fournir à l'intéressé une indication suffisante pour apprécier le bien-fondé du rejet de sa candidature et l'opportunité d'introduire un recours devant le Tribunal et, d'autre part, de permettre à celui-ci d'exercer son contrôle (voir arrêts du Tribunal Volger/Parlement, précité, point 40, du 23 février 1994, Coussios/Commission, T-18/92 et T-68/92, RecFP p. II-171, point 74, et du 22 mars 1995, Kotzonis/CES, T-586/93, RecFP p. II-203, point 105).

75 Il en résulte que la production de la note du 24 mars 1994 au stade du mémoire en défense ainsi que les différentes explications données par le défendeur, lors de l'audience, concernant l'intérêt du service et les raisons qui avaient amené l'AIPN à rejeter la candidature du requérant ne sauraient remédier à l'absence de motivation relevée ci-dessus.

76 Il convient, dès lors, de conclure que la décision litigieuse a été prise en violation de l'obligation de motivation incombant à l'AIPN.

77 Ce moyen doit donc être retenu.

78 Il découle de tout de qui précède que le recours doit être déclaré fondé.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

79 Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s'il est conclu en ce sens. Le CES ayant succombé en ses conclusions et le requérant ayant conclu à sa condamnation, il y a lieu de le condamner aux dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL

(cinquième chambre)

déclare et arrête:

1) Les décisions du secrétaire général du Comité économique et social du 30 mars 1994 et du 25 octobre 1994, rejetant la candidature du requérant aux vacances d'emploi n_s 2/94, 3/94 et 4/94, d'agent qualifié (huissier) de grade D 3/D 2 à la direction du personnel, de l'administration et des finances du Comité économique et social, sont annulées.

2) Le Comité économique et social est condamné à l'ensemble des dépens.

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