Mesures contre les communications commerciales non sollicitées ("spam")

Les communications commerciales non sollicitées par courrier électronique, également appelées "spam", ont atteint des proportions inquiétantes. Ce phénomène constitue l'un des défis importants auquel l'Internet est confronté. Dans ce contexte, la présente communication répertorie une série de mesures destinées à compléter les règles existantes en matière de lutte contre le spam. L'objectif est de donner à l'interdiction frappant le spam une efficacité optimale.

ACTE

Communication de la Commission, du 22 janvier 2004, sur les communications commerciales non sollicitées ou "spam" [COM(2004) 28 final - Non publié au Journal officiel].

SYNTHÈSE

AMPLEUR DU PROBLÈME

Le spam est devenu en quelques années un phénomène particulièrement préoccupant. On estime désormais que plus de 50 % du courrier électronique échangé au niveau mondial est constitué de "spam". Le taux de croissance de ce phénomène est encore plus inquiétant puisque, en 2001, la proportion de "spam" se situait autour de 7 %.

Le spam est un problème pour de nombreuses raisons:

- atteinte à la vie privée;

- nature fréquemment mensongère et trompeuse du "spam";

- caractère choquant des spams au contenu pornographique;

- perte de temps (nettoyage des boîtes aux lettres électroniques) et coût financier pour l'utilisateur (acquisition de logiciels de filtrage);

- coûts considérables pour les entreprises: les services informatiques des entreprises consacrent de plus en plus de temps et d'argent à essayer de gérer le problème. Le temps passé à nettoyer les boîtes aux lettres représente également une perte en termes d'efficacité et de productivité au travail. Le phénomène occasionne par ailleurs des coûts indirects liés à la non délivrance de certains messages en raison des techniques de filtrage anti-spam actuelles. En 2002, il a été estimé que le spam a coûté près de 2,5 milliards d'euros aux entreprises européennes uniquement en pertes de productivité.

DISPOSITIF LÉGISLATIF EXISTANT

Sur le plan législatif, la directive de 2002 sur la vie privée et les communications électroniques interdit l'envoi de messages commerciaux non sollicités (par courrier électronique, SMS ou MMS), sauf si la personne physique abonnée à ces services a accordé son consentement préalable (système dit "opt-in"). La mise en œuvre de ce dispositif constitue une première étape nécessaire. Néanmoins, celui-ci doit être complété par une série d'actions complémentaires destinées à faire de "l'interdiction du spam" une réalité.

Pour ce faire, la présente communication propose différents types d'actions:

Mise en œuvre et application effectives par les États membres et les pouvoirs publics

L'application efficace du régime "opt-in"doit être une priorité dans tous les États membres. Cela implique la mise en place de dispositifs de surveillance et des mécanismes d'application appropriés, y compris transfrontaliers. La coopération avec les pays non-membres de l'Union européenne est également essentielle.

Voies de recours et sanctions efficaces

Comparé au recours juridictionnel, les sanctions administratives semblent être plus adaptées au problème des communications commerciales non sollicitées. Elles sont en effet peu coûteuses et rapides.

La Commission propose aux États membres d'adopter les actions suivantes:

- achever la transposition de la directive relative à la vie privée et aux communications électroniques, et notamment les dispositions relatives aux communications non sollicitées ;

- évaluer l'efficacité de leur système de recours et de sanctions appliquées en cas d'infraction et donner aux victimes des possibilités adéquates de réclamer des dommages et intérêts;

- pour les États membres et les autorités compétentes qui ne disposent pas de voie de recours administrative, envisager de se doter de ce type de recours contre le spam.

Mécanismes de plainte

Une application efficace des règles existantes implique des mécanismes de plainte appropriés. Dans cette optique, la mise en place de boîtes aux lettres électroniques spécifiques permettant de recevoir des plaintes relatives aux spams (« boîtes à spam ») constitue une pratique intéressante. Ce type d'initiative semble en effet encourager les consommateurs à dénoncer les infractions, contribuant en cela à rendre l'application de la législation plus efficace. Cela facilite également la surveillance et l'évaluation de l'ampleur et du champ d'application du spam.

Les États membres sont encouragés à:

- évaluer l'efficacité de leur système juridique pour traiter les plaintes des utilisateurs et, le cas échéant, envisager des adaptations;

- établir des mécanismes de dépôt de plainte appropriés, y compris des boîtes aux lettres électroniques qui permettent aux utilisateurs d'envoyer leurs plaintes relatives aux spams.

Plaintes transfrontalières et coopération en matière d'application à l'intérieur de l'UE

Le traitement efficace des plaintes transfrontalières est indispensable si l'on souhaite pouvoir assurer une protection maximale des consommateurs dans ce secteur. Aussi est-il essentiel de pouvoir relier les mécanismes de plaintes nationaux afin que les plaintes formulées par des utilisateurs dans un État membre concernant des messages en provenance d'un autre État membre soient, elles aussi, traitées de manière efficace. Or, à l'heure actuelle, tous les États membres ne disposent pas d'une procédure formelle pour traiter les plaintes transfrontalières.

Les États membres sont invités à:

- évaluer l'efficacité de leurs procédures en matière de traitement de plaintes transfrontalières;

- étudier les obstacles existants à l'échange d'informations et à la coopération ;

- utiliser un mécanisme de liaison existant - ou en créer un - pour permettre aux autorités nationales de coopérer afin de faire appliquer les règles à une échelle transfrontalière sur le territoire de l'UE.

Coopération avec les pays tiers

La mise en œuvre effective des règles concernant les messages provenant des pays tiers revêt une importance primordiale étant donné qu'une large partie du spam provient de l'extérieur de l'UE. Le premier objectif de la coopération internationale est de promouvoir l'adoption d'une législation appropriée dans les pays tiers. Le second objectif est d'assurer une mise en œuvre efficace des règles applicables.

La Commission encourage les États membres à:

- participer de manière active à des forums tels que l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) où des travaux sur le spam sont en cours;

- établir ou renforcer la coopération bilatérale avec les pays tiers, ainsi qu'avec le secteur privé (notamment les ISP et ESP) afin de remonter jusqu'aux expéditeurs de spam.

ACTIONS TECHNIQUES ET ACTIONS D'AUTOREGULATION POUR L'INDUSTRIE

Les actions en matière d'autorégulation concernent essentiellement les acteurs du marché. Ces mesures touchent des domaines tels que les dispositions contractuelles, les codes de conduite, les pratiques de marketing acceptables, les labels, les formules substitutives de règlement des différends, ainsi que certaines solutions comme le filtrage et la sécurité des serveurs.

Application efficace du régime"opt-in"

L'industrie devrait faire du régime d'opt-in une pratique commerciale quotidienne. Pour ce faire, il convient de promouvoir l'autorégulation, voire la corégulation, dans les domaines où la législation peut se révéler insuffisante. En particulier, les contrats peuvent contribuer à lutter contre le spam lorsqu'il sont assortis de clauses de sauvegarde qui protègent les droits individuels. Un nombre substantiel de fournisseurs de services internet (ISP) et de fournisseurs de services de courrier électronique (ESP) font d'ores et déjà figurer dans les contrats avec leurs clients des obligations visant à interdire l'utilisation de leurs services pour l'envoi de spam.

Les actions suivantes sont proposées:

- l'industrie est appelée à évaluer et, au besoin, adapter, la conformité des contrats existants aux nouvelles dispositions;

- les sociétés de marketing direct sont encouragées à adapter leurs pratiques au régime "opt-in", notamment en se mettant d'accord sur des méthodes spécifiques et licites de collecte des données personnelles;

- élaborer et diffuser des codes de bonnes pratiques efficaces conformes aux régime "opt-in";

- envisager l'utilisation de labels ("trustmarks", "webseals") pour les messages électroniques et les bases de données qui respectent le régime "opt-in".

Systèmes alternatifs de règlement des conflits (ADR)

Pour les litiges concernant les transactions et communications en ligne, la mise en place d'un mécanisme extrajudiciaire de règlement des conflits peut s'avérer particulièrement pertinente. C'est pourquoi la Commission recommande d'utiliser ou, le cas échéant, de créer des mécanismes de plainte fondés sur l'autorégulation qui puissent se baser sur des initiatives existantes (telles que le réseau extrajudiciaire européen EEJ-NET).

Questions techniques

Sur le plan technique, des dispositifs de filtrage sont utilisés pour lutter contre le spam. Toutes les pratiques de filtrage n'offrent cependant pas le même degré de contrôle à l'utilisateur, ni les mêmes garanties en termes de protection des données et de la vie privée. En outre, ces techniques peuvent poser des problèmes d'efficacité, notamment lorsque ces dispositifs bloquent le courrier électronique légitime (on parle dans ce cas de "faux positif") ou laissent passer du spam ("faux négatif").

Les fournisseurs de logiciels de filtrage sont encouragés à:

- veiller à ce que leurs systèmes de filtrage soient compatibles avec le régime "opt-in";

- tenir compte pour les utilisateurs des cas de "faux positifs", de "faux négatifs", de certaines formes de filtrage fondé sur le contenu, et des problèmes de responsabilité qui peuvent y être associés;

- coopérer avec les parties concernées pour développer des techniques de reconnaissance des courriers électroniques commerciaux légitimes en utilisant, par exemple, des labels;

- offrir en option des équipements ou des services de filtrage aux clients qui en font la demande, et les informer sur ceux proposés par des tiers.

Actions de sensibilisation

Toutes les parties concernées (États membres et autorités compétentes, associations de consommateurs et d'utilisateurs, entreprises, etc.) devraient jouer un rôle actif dans le domaine de la prévention, de la sensibilisation des consommateurs et des plaintes.

Lors de leurs actions de sensibilisation, les parties concernées devront s'attacher à fournir des explications de base sur les nouvelles règles et les droits dont bénéficient les entreprises et les consommateurs, des informations sur les pratiques de prospection commerciales acceptables dans le cadre du régime "opt-in", sur les produits et services disponibles pour éviter le spam et sur les mesures pratiques à prendre en cas de réception de spam (mécanismes de plaintes et systèmes ADR). Elles devraient également faire référence aux codes de conduite du secteur reconnus comme efficaces.

Actions menées par la Commission

La Commission surveillera les actions présentées dans cette communication et évaluera - au plus tard fin 2004 - la nécessité de proposer des actions supplémentaires. Les services de la Commission ont par ailleurs mis sur pied un groupe informel qui vise à faciliter le travail sur l'application effective de la directive de 2002 sur la vie privée et les communications électroniques, ainsi que sur les actions répertoriées ici. La Commission soutient également le lancement, à l'échelle paneuropéenne, de codes de conduite en ligne pour la prospection directe.

La Commission soutient des projets de lutte contre le spam dans le cadre du programme "Safer Internet".

ACTES LIÉS

Directive 2002/58/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 juillet 2002, concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques (directive " vie privée et communications électroniques") [Journal officiel L 201 du 31 juillet 2002].

La directive vise à préserver le droit à la vie privée en ce qui concerne le traitement des données à caractère personnel dans le secteur des communications électroniques.

Décision 276/99/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 janvier 1999, adoptant un plan d'action communautaire pluriannuel visant à promouvoir une utilisation sûre d'Internet par la lutte contre les messages à contenu illicite et préjudiciable diffusés sur les réseaux mondiaux.

L'objectif général du plan d'action est d'encourager un environnement favorable au développement de l'industrie liée à Internet. Dans cette optique, le plan d'action vise à encourager une utilisation sûre d'Internet et à lutter contre le contenu illégal et préjudiciable.

See also

Plus d'information sur la politique européenne pour lutter contre le spam [EN]

Dernière modification le: 07.12.2004