ISSN 1725-2431

doi:10.3000/17252431.C_2010.115.fra

Journal officiel

de l'Union européenne

C 115

European flag  

Édition de langue française

Communications et informations

53e année
4 mai 2010


Numéro d'information

Sommaire

page

 

IV   Informations

 

INFORMATIONS PROVENANT DES INSTITUTIONS, ORGANES ET ORGANISMES DE L'UNION EUROPÉENNE

 

Conseil européen

2010/C 115/01

Le programme de Stockholm — une europe ouverte et sûre qui sert et protège les citoyens

1

FR

 


IV Informations

INFORMATIONS PROVENANT DES INSTITUTIONS, ORGANES ET ORGANISMES DE L'UNION EUROPÉENNE

Conseil européen

4.5.2010   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 115/1


LE PROGRAMME DE STOCKHOLM — UNE EUROPE OUVERTE ET SÛRE QUI SERT ET PROTÈGE LES CITOYENS

2010/C 115/01

TABLE DES MATIÈRES

1.

VERS UNE EUROPE DES CITOYENS DANS L'ESPACE DE LIBERTÉ, DE SÉCURITÉ ET DE JUSTICE

1.1.

Priorités politiques

1.2.

Les instruments

1.2.1.

La confiance mutuelle

1.2.2.

La mise en œuvre

1.2.3.

La législation

1.2.4.

Une plus grande cohérence

1.2.5.

Évaluation

1.2.6.

Formation

1.2.7.

Communication

1.2.8.

Dialogue avec la société civile

1.2.9.

Financement

1.2.10.

Plan d'action

1.2.11.

Évaluation du programme de Stockholm

2.

PROMOUVOIR LES DROITS DES CITOYENS: UNE EUROPE DES DROITS

2.1.

Une Europe reposant sur des droits fondamentaux

2.2.

Plein exercice du droit à la libre circulation

2.3.

Vivre ensemble dans un espace qui respecte la diversité et protège les plus vulnérables

2.3.1.

Racisme et xénophobie

2.3.2.

Droits de l'enfant

2.3.3.

Groupes vulnérables

2.3.4.

Victimes de la criminalité, y compris le terrorisme

2.4.

Les droits des personnes dans le cadre des procédures pénales

2.5.

Protection des droits du citoyen dans la société de l'information

2.6.

Participer à la vie démocratique de l'Union

2.7.

Bénéficier d'une protection dans les États tiers

3.

FACILITER LA VIE DES CITOYENS: UNE EUROPE DU DROIT ET DE LA JUSTICE

3.1.

POURSUIVRE LA MISE EN ŒUVRE DE LA RECONNAISSANCE MUTUELLE

3.1.1.

Droit pénal

3.1.2.

Droit civil

3.2.

Renforcer la confiance mutuelle

3.2.1.

Formation

3.2.2.

Développement de réseaux

3.2.3.

Évaluation

3.2.4.

Améliorer les outils

3.2.5.

Détention

3.2.6.

Détention

3.3.

Se doter d'un socle de règles minimales communes

3.3.1.

Droit pénal

3.3.2.

Droit civil

3.4.

Les bénéfices pour les citoyens d'un espace judiciaire européen

3.4.1.

Faciliter l'accès à la justice

3.4.2.

Soutenir l'activité économique

3.5.

Renforcer la présence internationale de l'Union en matière judiciaire

3.5.1.

Droit civil

3.5.2.

Droit pénal

4.

UNE EUROPE QUI PROTÈGE

4.1.

Stratégie de sécurité intérieure

4.2.

Disposer de meilleurs outils

4.2.1.

Créer une culture commune

4.2.2.

Maîtriser l'information

4.2.3.

Mobiliser les outils technologiques nécessaires

4.3.

Des politiques efficaces

4.3.1.

Renforcer l'efficacité de la coopération européenne en matière répressive

4.3.2.

Renforcer l'efficacité de la prévention de la criminalité

4.3.3.

Statistiques

4.4.

Protection contre la grande criminalité et la criminalité organisée

4.4.1.

Lutter contre la grande criminalité et la criminalité organisée

4.4.2.

Traite des êtres humains

4.4.3.

Exploitation sexuelle des enfants et pédopornographie

4.4.4.

Cybercriminalité

4.4.5.

Criminalité économique et corruption

4.4.6.

Drogues

4.5.

Terrorisme

4.6.

Gestion globale et efficace des catastrophes par l'Union: renforcer les capacités de l'Union pour prévenir tout type de catastrophe, s'y préparer et y réagir

5.

ACCÈS À L'EUROPE À L'HEURE DE LA MONDIALISATION

5.1.

Gestion intégrée des frontières extérieures

5.2.

Politique des visas

6.

UNE EUROPE FAISANT PREUVE DE RESPONSABILITÉ ET DE SOLIDARITÉ ET TRAVAILLANT EN PARTENARIAT EN MATIÈRE D'IMMIGRATION ET D'ASILE

6.1.

Une politique migratoire dynamique et globale

6.1.1.

Consolider, développer et mettre en œuvre l'approche globale sur la question des migrations

6.1.2.

Migration et développement

6.1.3.

Une politique concertée, en phase avec les besoins du marché du travail national

6.1.4.

Des mesures proactives en faveur des migrants et de leurs droits

6.1.5.

Intégration 3

6.1.6.

Des politiques performantes pour lutter contre l'immigration illégale

6.1.7.

Mineurs non accompagnés 3

6.2.

Asile: un espace commun de protection et de solidarité

6.2.1.

Un espace commun de protection

6.2.2.

Partage des responsabilités et solidarité entre les États membres

6.2.3.

Dimension extérieure de l'asile

7.

L'EUROPE À L'HEURE DE LA MONDIALISATION – LA DIMENSION EXTÉRIEURE DE LA LIBERTÉ, DE LA SÉCURITÉ ET DE LA JUSTICE

7.1.

Une dimension extérieure renforcée

7.2.

Droits de l'homme

7.3.

De nouveaux instruments pour des priorités thématiques inchangées

7.4.

Accords avec des pays tiers

7.5.

Priorités géographiques et organisations internationales

7.6.

Organisations internationales et promotion des normes européennes et internationales

LISTE DES ABRÉVIATIONS

1.   VERS UNE EUROPE DES CITOYENS DANS L'ESPACE DE LIBERTÉ, DE SÉCURITÉ ET DE JUSTICE

Le Conseil européen rappelle qu'il considère comme une priorité la mise en place d'un espace de liberté, de sécurité et de justice pour répondre à une préoccupation majeure des peuples des États réunis au sein de l'Union.

Sur la lancée des résultats obtenus dans le cadre des programmes de Tampere et de La Haye, d'importants progrès ont été accomplis à ce jour dans ce domaine. Les contrôles aux frontières intérieures ont été supprimés dans l'espace Schengen, et les frontières extérieures de l'Union font à présent l'objet d'une gestion plus cohérente. Dans le cadre de l'approche globale sur la question des migrations, la dimension extérieure de la politique migratoire de l'Union met l'accent sur le dialogue et le partenariat avec les pays tiers, sur la base d'intérêts communs. D'importantes mesures ont été prises en vue de créer un régime d'asile européen. Des agences européennes telles qu'Europol, Eurojust, l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne et Frontex ont atteint leur maturité opérationnelle dans leurs champs d'activité respectifs. La coopération en matière civile facilite la vie quotidienne des citoyens et la coopération en matière répressive permet d'améliorer la sécurité.

Malgré les avancées importantes, notamment celles que nous venons de citer, réalisées dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice, l'Europe reste confrontée à certains défis qui doivent être relevés selon une approche globale. De nouveaux efforts sont donc nécessaires afin d'améliorer la cohérence entre les différents domaines d'action. Il convient, en outre, d'intensifier la coopération avec les pays partenaires.

Le moment est donc venu de doter l'Union et ses États membres d'un nouveau programme leur permettant de faire fond sur les résultats obtenus et de relever les défis qui se poseront à eux. À cette fin, le Conseil européen a adopté le présent nouveau programme pluriannuel qui sera appelé «programme de Stockholm», pour la période 2010-2014.

Le Conseil européen note avec satisfaction que le Parlement européen et les parlements nationaux joueront un rôle accru à la suite de l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne (1). Les citoyens et les associations représentatives auront davantage la possibilité de faire connaître et d'échanger publiquement leurs opinions dans tous les domaines d'action de l'Union, conformément à l'article 11 du traité UE, ce qui renforcera le caractère ouvert et démocratique de l'Union, dans l'intérêt de ses peuples.

Le traité facilite la réalisation des objectifs décrits dans le présent programme, tant pour les institutions de l'Union que pour les États membres. Le rôle de la Commission dans l'élaboration des initiatives est confirmé ainsi que le droit pour un groupe d'au moins sept États membres de présenter des propositions législatives. Le processus législatif est amélioré par le recours, dans la plupart des secteurs, à la procédure de codécision, permettant ainsi d'associer pleinement le Parlement européen. Les parlements nationaux joueront un rôle accru dans le processus législatif. En renforçant également le rôle de la Cour de justice, le traité permettra d'améliorer la capacité de l'Europe à mettre pleinement en œuvre la politique adoptée dans ce domaine et à garantir la cohérence de l'interprétation.

Les institutions de l'Union devraient recourir à toutes les possibilités qu'offre le traité de Lisbonne de renforcer l'espace européen de liberté, de sécurité et de justice pour le bien des citoyens de l'Union.

Le présent programme définit les orientations stratégiques de la programmation législative et opérationnelle dans l'espace de liberté, de sécurité et de justice, conformément à l'article 68 du TFUE.

1.1.   Priorités politiques

Le Conseil européen considère que la priorité pour les années à venir sera la prise en compte des intérêts et des besoins des citoyens. Le défi sera de garantir le respect des droits et libertés fondamentales et l'intégrité de la personne, tout en assurant la sécurité en Europe. Il est primordial que les mesures répressives, d'une part, et les mesures permettant de préserver les droits de la personne, l'État de droit et les règles relatives à la protection internationale, d'autre part, aillent de pair et se renforcent mutuellement.

Toutes les actions futures devraient être centrées sur le citoyen de l'Union et les autres personnes à l'égard desquelles l'Union a une responsabilité. Dans les années à venir, l'Union devrait prendre en compte les principales priorités suivantes:

Promouvoir la citoyenneté et les droits fondamentaux: la citoyenneté européenne doit devenir une réalité tangible. L'espace de liberté, de sécurité et de justice doit être avant tout un espace unique de protection des droits et libertés fondamentales. L'élargissement de l'espace Schengen doit se poursuivre. Le respect de la personne et de la dignité humaine ainsi que des autres droits énoncés dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales constitue une valeur essentielle. Il s'agit, par exemple, de préserver l'exercice de ces droits et libertés, en particulier la vie privée des citoyens, au-delà des frontières nationales, notamment via la protection de leurs données à caractère personnel. Il s'agit également de prendre en compte les besoins particuliers des personnes vulnérables et de veiller à ce que les citoyens de l'Union et les autres personnes puissent exercer pleinement leurs droits spécifiques, tant au sein de l'Union qu'à l'extérieur de celle-ci, le cas échéant.

Une Europe du droit et de la justice: la réalisation d'un espace européen de la justice doit être approfondie afin de dépasser la fragmentation actuelle. La priorité devrait être donnée à la mise en place de mécanismes destinés à faciliter l'accès à la justice afin que les citoyens puissent faire valoir leurs droits partout dans l'Union. Il faudrait aussi renforcer la coopération entre les professionnels de la justice, améliorer leur formation et mobiliser des moyens pour supprimer les entraves à la reconnaissance des décisions de justice dans d'autres États membres.

Une Europe qui protège: une stratégie de sécurité intérieure devrait être développée afin d'améliorer encore la sécurité au sein de l'Union et, ainsi, protéger la vie des citoyens de l'Union et assurer leur sécurité, et en vue de lutter contre la criminalité organisée, le terrorisme et d'autres menaces. Cette stratégie devrait viser à renforcer la coopération en matière de répression, de gestion des frontières, de protection civile et de gestion des catastrophes ainsi qu'à intensifier la coopération judiciaire en matière pénale afin de rendre l'Europe plus sûre. En outre, l'Union doit fonder ses travaux sur la solidarité entre les États membres et mettre pleinement en œuvre l'article 222 du TFUE.

L'accès à l'Europe à l'heure de la mondialisation: l'accès à l'Europe pour les hommes d'affaires, les touristes, les étudiants, les chercheurs, les travailleurs, les personnes ayant besoin d'une protection internationale et celles ayant un intérêt légitime à accéder au territoire de l'Union doit être rendu plus efficace et efficient. Parallèlement, l'Union et ses États membres doivent garantir la sécurité de leurs citoyens. La gestion intégrée des frontières et les politiques en matière de visas devraient être conçues de manière à servir ces objectifs.

Une Europe faisant preuve de responsabilité et de solidarité et travaillant en partenariat en matière d'immigration et d'asile: la mise en place d'une politique globale de l'Union en matière de migrations qui s'inscrive dans une perspective d'avenir et soit fondée sur la solidarité et la responsabilité reste un objectif primordial pour l'Union. Il convient d'entreprendre la mise en œuvre effective de tous les instruments juridiques concernés et de recourir pleinement aux agences et offices intervenant dans ce domaine. Des migrations bien maîtrisées peuvent être profitables à tous. Le pacte européen sur l'immigration et l'asile constitue une base claire pour poursuivre les travaux dans ce domaine. L'Europe aura besoin d'une politique souple, qui réponde aux priorités et aux besoins des États membres et permette aux migrants de tirer pleinement parti de leur potentiel. L'objectif demeure la mise en place d'un régime d'asile commun en 2012, et il faut garantir aux personnes qui ont besoin d'une protection internationale la possibilité de recourir à des procédures d'asile juridiquement sûres et efficaces. En outre, afin de maintenir dans l'Union des régimes d'immigration et d'asile qui soient crédibles et qui s'inscrivent dans la durée, il est nécessaire de prévenir, maîtriser et combattre l'immigration illégale, alors que les flux migratoires clandestins exercent une pression croissante sur l'Union, et en particulier sur les États membres situés à ses frontières extérieures, y compris les frontières méridionales, conformément aux conclusions du Conseil européen d'octobre 2009.

Le rôle de l'Europe à l'heure de la mondialisation – la dimension extérieure: l'importance de la dimension extérieure de la politique de l'Union dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice met en évidence la nécessité d'intégrer davantage ces actions dans les politiques générales de l'Union. Cette dimension extérieure est essentielle pour relever les principaux défis auxquels nous sommes confrontés et offrir aux citoyens de l'Union davantage de possibilités de travailler et d'avoir des relations d'affaires avec des pays du monde entier. Cette dimension extérieure est primordiale pour atteindre les objectifs du présent programme et devrait en particulier être prise en compte dans tous les autres aspects de la politique étrangère de l'Union avec lesquels elle devrait être pleinement cohérente.

1.2.   Les instruments

La mise en œuvre du prochain programme pluriannuel suppose, pour être couronnée de succès, le recours aux instruments essentiels suivants.

1.2.1.   La confiance mutuelle

La confiance mutuelle entre autorités et services des différents États membres ainsi qu'entre décideurs est le fondement d'une coopération efficace dans ce domaine. L'un des principaux défis à relever à l'avenir consistera donc à instaurer cette confiance et à trouver de nouveaux moyens de faire en sorte que les États membres s'appuient davantage sur les systèmes juridiques de leurs homologues et améliorent leur compréhension mutuelle à cet égard.

1.2.2.   La mise en œuvre

Il conviendra, dans les années à venir, d'être plus attentif à la mise en œuvre intégrale et efficace et à l'évaluation des instruments existants. Il convient d'assurer leur transposition juridique en utilisant le plus possible, aussi souvent que nécessaire, les instruments institutionnels existants.

Il conviendra également, à l'avenir, de raccourcir le délai nécessaire pour répondre aux besoins des citoyens et des entreprises. L'Union devrait s'employer à définir les besoins des citoyens et des praticiens ainsi que les réponses qu'il convient d'y apporter. L'élaboration de l'action au niveau de l'Union devrait faire intervenir les compétences des États membres et prendre en considération une série de mesures, y compris les solutions non législatives telles que les manuels établis d'un commun accord, la diffusion des meilleures pratiques (entre autres en faisant le meilleur usage des réseaux judiciaires européens) et les projets régionaux qui tiennent compte de ces besoins, en particulier lorsqu'ils permettent d'y faire face rapidement.

1.2.3.   La législation

D'une manière générale, de nouvelles initiatives législatives émanant de la Commission ou des États membres lorsque le traité le prévoit (2) devraient être présentées seulement après que le respect des principes de proportionnalité et de subsidiarité a été vérifié et après une préparation minutieuse, y compris les analyses d'impact préalables, ce qui suppose également de déterminer les besoins et les conséquences financières et de faire appel aux compétences des États membres. Il est essentiel d'évaluer les incidences des nouvelles initiatives législatives sur les quatre libertés en vertu du traité et de veiller à ce que ces initiatives soient pleinement compatibles avec les principes du marché intérieur.

Le Conseil européen estime que l'essor de la législation dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice est impressionnant, mais qu'il présente des faiblesses en termes de chevauchement d'activités et un certain manque de cohérence. Parallèlement, la qualité de la législation, y compris la formulation de certains actes, pourrait être améliorée.

Il faudrait envisager de procéder à un examen horizontal des instruments adoptés, lorsque cela est nécessaire, afin d'améliorer la cohérence et la consolidation de la législation. Il importe en particulier d'assurer la cohérence juridique et la facilité d'accès. Les principes en matière d'amélioration de la législation et de la réglementation devraient être mieux respectés à tous les stades de la procédure décisionnelle. L'accord interinstitutionnel «Mieux légiférer» conclu entre le Parlement européen, le Conseil et la Commission (3) devrait être pleinement appliqué. Toutes les institutions de l'Union, à tous les stades de la procédure interinstitutionnelle, devraient s'efforcer de rédiger la législation de l'Union dans des termes clairs et compréhensibles.

1.2.4.   Une plus grande cohérence

Le Conseil européen invite le Conseil et la Commission à renforcer la coordination interne afin d'assurer une plus grande cohérence entre les éléments externes et internes des travaux en matière de liberté, de sécurité et de justice. Les mêmes exigences en matière de cohérence et d'amélioration de la coordination s'appliquent aux agences de l'Union [Europol, Eurojust, Frontex, le Collège européen de police (CEPOL), Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT), futur bureau européen d'appui en matière d'asile (BEAA) et l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne]. Le Conseil devrait exercer une surveillance plus politique sur ces agences, par exemple en formulant des conclusions sur les rapports annuels. Certaines agences sont soumises à des règles particulières prévoyant une surveillance par le Parlement européen.

1.2.5.   Évaluation

Le traité de Lisbonne prévoit la possibilité de prendre des mesures pour que les États membres, en collaboration avec la Commission, procèdent à une évaluation objective et impartiale de la mise en œuvre des politiques dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice, en particulier afin de favoriser la pleine application du principe de reconnaissance mutuelle. Le Parlement européen et les parlements nationaux seront informés de la teneur et des résultats de ces évaluations. Le Conseil européen estime que ces mécanismes d'évaluation devraient permettre d'éviter les doubles emplois et, à terme, englober toutes les politiques relevant de ce domaine. Il conviendrait de prévoir également un système de suivi efficace pour ces évaluations.

L'efficacité des instruments juridiques adoptés au niveau de l'Union doit faire l'objet d'une évaluation. Une évaluation est également nécessaire pour établir quels sont les obstacles éventuels au bon fonctionnement de l'espace judiciaire européen. Elle devrait être axée sur des problèmes particuliers et faciliter par conséquent la pleine application du principe de reconnaissance mutuelle. Il convient de poursuivre la coopération judiciaire en matière pénale, qui constitue le premier domaine d'action à faire l'objet d'une évaluation, mais d'autres domaines d'actions devront ensuite être pris en compte, tels que le respect des procédures d'asile dans la législation concernée. Les procédures d'évaluation devraient être adaptées au domaine d'action en question si nécessaire.

Le Conseil européen invite la Commission:

à présenter une ou plusieurs propositions conformément à l'article 70 du TFUE en ce qui concerne l'évaluation des politiques de l'Union visées au titre V du TFUE. Cette ou ces propositions devraient comporter, le cas échéant, un mécanisme d'évaluation reposant sur le système déjà bien établi de l'évaluation par les pairs. L'évaluation devrait être périodique, inclure un système de suivi efficace et contribuer à une meilleure compréhension des systèmes nationaux afin de permettre de définir les meilleures pratiques et les obstacles à la coopération. Les professionnels devraient être à même de contribuer aux évaluations. Le Conseil devrait jouer a priori un rôle moteur dans le processus d'évaluation, en particulier en ce qui concerne son suivi.

Si les doubles emplois avec d'autres mécanismes d'évaluation devraient être évités, il convient néanmoins de viser à mettre en œuvre des synergies et une coopération, notamment eu égard aux travaux menés par le Conseil de l'Europe. L'Union devrait participer activement et contribuer aux travaux des organes de suivi du Conseil de l'Europe.

1.2.6.   Formation

Pour favoriser l'émergence d'une véritable culture européenne en matière judiciaire et de maintien de l'ordre, il est essentiel de renforcer la formation sur les questions relatives à l'Union et de la rendre accessible systématiquement à toutes les professions participant à la mise en œuvre de l'espace de liberté, de sécurité et de justice, notamment les juges, les procureurs, le personnel judiciaire, les policiers, les douaniers et les garde-frontières.

Il convient de poursuivre l'objectif consistant à proposer des programmes de formation européenne systématiques à toutes les personnes concernées. L'Union et ses États membres devraient avoir pour ambition de faire en sorte que, d'ici à 2015, un nombre important de professionnels ait participé à un tel programme ou à un programme d'échange avec un autre État membre, qui pourront s'inscrire dans le cadre de programmes de formation déjà en place. À cette fin, il convient en particulier de recourir aux instituts de formation existants.

C'est aux États membres qu'incombe au premier chef cette responsabilité, mais l'Union doit les soutenir dans leurs efforts, y compris financièrement, et également pouvoir se doter de ses propres mécanismes pour appuyer les efforts déployés au niveau national. Le Conseil européen estime que la problématique de la coopération au niveau international et de l'UE devrait être abordée dans les programmes de cours nationaux. Pour la formation des juges, des procureurs et du personnel judiciaire, il importe de préserver l'indépendance judiciaire tout en mettant l'accent sur la dimension européenne pour les professionnels qui recourent fréquemment aux instruments européens. Le CEPOL et Frontex devraient jouer un rôle clé dans la formation des forces de l'ordre et des garde-frontières, afin que cette formation comporte une dimension européenne. La formation des garde-frontières et des douaniers est déterminante pour favoriser une approche commune à l'égard d'une gestion intégrée des frontières. Des solutions au niveau européen pourraient être recherchées en vue de renforcer les programmes de formation européenne. Par ailleurs, des programmes d'enseignement à distance («e-learning») et des supports de formation communs devront être développés pour former les professionnels aux mécanismes européens.

Le Conseil européen invite la Commission:

à proposer un plan d'action visant à améliorer considérablement et de manière systématique le niveau des programmes de formation européenne et des programmes d'échange dans l'Union. Ce plan devrait proposer des moyens de garantir qu'un tiers de tous les policiers participant à la coopération policière européenne et la moitié des juges, des procureurs et du personnel judiciaire participant à la coopération judiciaire européenne ainsi que la moitié des autres professionnels jouant un rôle en matière de coopération européenne puissent se voir offrir des programmes de formation européenne,

à examiner ce qui pourrait être défini comme un programme de formation européenne et proposer dans le plan d'action comment exploiter cette idée en vue de lui conférer une dimension européenne,

à mettre en place des programmes d'échange spécifiques, du type «Erasmus», auxquels pourraient être associés des pays qui ne sont pas membres de l'UE, et en particulier les pays candidats et les pays avec lesquels l'Union a conclu des accords de partenariat et de coopération,

à veiller à ce que la participation aux cours, exercices et programmes d'échange organisés en commun soit décidée en fonction des tâches des agents et pas de critères propres au secteur concerné.

1.2.7.   Communication

Les avancées réalisées dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice revêtent, d'une manière générale, une grande importance pour les citoyens, les entreprises et les professionnels. C'est pourquoi le Conseil européen invite toutes les institutions de l'Union, en particulier la Commission, ainsi que les États membres, à étudier les moyens de mieux communiquer aux citoyens et aux praticiens les résultats concrets de la politique menée dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice. Il invite la Commission à concevoir une stratégie sur les meilleurs moyens d'expliquer aux citoyens comment ils peuvent tirer parti des nouveaux instruments et cadres juridiques, par exemple en ayant recours à la justice en ligne et en utilisant le portail de la justice.

1.2.8.   Dialogue avec la société civile

Le Conseil européen encourage les institutions de l'Union à tenir, dans le cadre de leurs compétences, un dialogue ouvert, transparent et régulier avec les associations représentatives et la société civile. La Commission devrait mettre en place des mécanismes spécifiques, tels que le Forum européen pour la justice, permettant d'intensifier le dialogue dans les domaines où ces mécanismes sont appropriés.

1.2.9.   Financement

Le Conseil européen souligne que le programme de Stockholm devrait être financé à l'intérieur des rubriques et dans la limite des plafonds du cadre financier actuel. Nombre des mesures et actions énoncées dans le présent programme peuvent être mises en œuvre grâce à une utilisation plus efficace des instruments et des fonds existants.

Le Conseil européen note que les perspectives financières actuelles expireront à la fin de l'année 2013. Il souligne qu'il a l'intention de tenir compte des objectifs du programme de Stockholm. Le présent programme ne préjuge toutefois pas les négociations sur les prochaines perspectives financières.

Le Conseil européen estime par ailleurs que les procédures de candidature aux programmes de financement devraient, tout en tenant compte de l'expérience des États membres, être transparentes, souples et cohérentes; elles devraient également être rationalisées et rendues plus faciles d'accès pour les administrations, les partenaires établis et les praticiens, par la diffusion active de lignes directrices claires, la mise en place d'un mécanisme permettant d'identifier les partenaires et une programmation précise. Le Conseil européen demande à la Commission d'examiner les moyens appropriés d'atteindre cet objectif.

Dans le cadre des prochaines perspectives financières, il conviendrait d'examiner comment concevoir au mieux les instruments financiers afin d'assurer un soutien approprié à des projets opérationnels élaborés en dehors de l'Union qui renforcent sa sécurité, notamment dans le domaine de la lutte contre la criminalité organisée et le terrorisme. Il y a lieu de se pencher attentivement sur les moyens d'accélérer la réaction de l'Union, en termes d'aide financière, aux événements urgents survenant dans ce domaine, ainsi que sur la manière d'apporter une aide technique à la mise en œuvre, à l'échelle mondiale, des conventions internationales, notamment celles ayant trait au terrorisme.

1.2.10.   Plan d'action

À la lumière du programme de Stockholm, le Conseil européen invite la Commission à présenter rapidement un plan d'action, au premier semestre 2010, en vue de son adoption par le Conseil. Ce plan d'action traduira les objectifs et priorités du programme de Stockholm en actions concrètes assorties d'un calendrier précis d'adoption et de mise en œuvre. Il devrait comporter une proposition de calendrier en vue de la transformation des instruments qui auront une nouvelle base juridique.

1.2.11.   Évaluation du programme de Stockholm

Le Conseil européen invite la Commission à présenter, avant juin 2012, une évaluation à mi-parcours de la mise en œuvre du programme de Stockholm. Les programmes élaborés par les trois présidences successives ainsi que les programmes législatifs de la Commission devraient être publiés dans les meilleurs délais afin que les parlements nationaux puissent rapidement prendre connaissance des propositions.

2.   PROMOUVOIR LES DROITS DES CITOYENS: UNE EUROPE DES DROITS

2.1.   Une Europe reposant sur des droits fondamentaux

L'Union est fondée sur des valeurs communes et sur le respect des droits fondamentaux. Après l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, il est primordial que l'Union adhère rapidement à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cela renforcera l'obligation qui incombe à l'Union et, partant, à ses institutions de veiller à promouvoir activement les droits fondamentaux et les libertés fondamentales dans l'ensemble de leurs domaines d'action. La jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne pourra ainsi continuer à se développer en phase avec celle de la Cour européenne des droits de l'homme, ce qui favorisera la mise en place d'un système européen uniforme de droits fondamentaux et de droits de l'homme, sur la base de la convention précitée et des droits énoncés dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

Le Conseil européen invite:

la Commission à présenter de toute urgence une proposition sur l'adhésion de l'UE à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

les institutions de l'Union et les États membres à veiller à ce que les initiatives juridiques soient et restent conformes aux droits fondamentaux et aux libertés fondamentales tout au long du processus législatif, en renforçant l'application des méthodes employées pour vérifier de manière systématique et rigoureuse que la convention européenne et les droits énoncés dans la Charte des droits fondamentaux sont bien respectés.

Le Conseil européen invite les institutions de l'Union:

à tirer pleinement parti des compétences de l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne et, le cas échéant, à consulter cette agence, conformément à son mandat, en ce qui concerne l'élaboration des politiques et des actes législatifs ayant des incidences sur les droits fondamentaux et à avoir recours à ses services pour informer les citoyens sur les questions relatives aux droits de l'homme qui ont des incidences sur leur vie de tous les jours,

à poursuivre l'action menée par l'Union en vue de l'abolition de la peine de mort, de la torture et des autres traitements inhumains et dégradants,

à continuer de soutenir et de promouvoir l'action de l'Union et des États membres contre l'impunité et à continuer de lutter contre les crimes de génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre; à cet égard, à encourager la coopération entre les États membres, les pays tiers et les juridictions internationales dans ce domaine, en particulier la Cour pénale internationale (CPI), et à développer les échanges d'informations judiciaires et de bonnes pratiques concernant les poursuites pénales relatives à ces crimes, par l'intermédiaire du réseau européen de points de contact en ce qui concerne les personnes responsables de crimes de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre.

L'Union est un espace de valeurs communes, lesquelles sont incompatibles avec les crimes de génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre, y compris les crimes commis par les régimes totalitaires. Chaque État membre a sa propre approche de la question, mais, dans une perspective de réconciliation, la mémoire de ces crimes doit faire partie de la mémoire collective partagée et promue, lorsque cela est possible, par tous les Européens. L'Union doit à cet égard jouer un rôle de facilitateur.

Le Conseil européen invite la Commission:

à examiner si d'autres propositions sont nécessaires pour couvrir l'apologie publique, la négation ou la banalisation grossière des crimes de génocide, des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre visant un groupe de personnes défini par des critères autres que la race, la couleur, la religion, l'ascendance ou l'origine nationale ou ethnique, tels que le statut social ou les convictions politiques, et à faire rapport sur la question au Conseil en 2010.

2.2.   Plein exercice du droit à la libre circulation

Le droit des citoyens et des membres de leur famille à la libre circulation à l'intérieur de l'Union est l'un des principes fondamentaux sur lesquels repose l'Union et de la citoyenneté européenne. Les citoyens de l'Union ont le droit de circuler et de résider librement sur le territoire des États membres, le droit de vote et d'éligibilité aux élections au Parlement européen ainsi qu'aux élections municipales dans l'État membre où ils résident, le droit de bénéficier de la protection des autorités diplomatiques et consulaires des autres États membres, etc. Dans l'exercice de ces droits, les citoyens jouissent d'une égalité de traitement par rapport aux nationaux, dans les conditions définies par le droit de l'Union. L'application effective des actes législatifs pertinents de l'Union est donc une priorité.

Ainsi que le Parlement européen l'a relevé, la coopération selon les dispositions de Schengen, qui a éliminé les contrôles aux frontières intérieures dans une bonne partie de l'Union, constitue une réalisation majeure dans l'espace de liberté, de sécurité et de justice. Le Conseil européen rappelle qu'il est attaché à l'élargissement de l'espace Schengen. Pour autant que toutes les conditions requises pour appliquer l'acquis de Schengen soient remplies, le Conseil européen invite le Conseil, le Parlement européen et la Commission à prendre sans délai toutes les mesures nécessaires pour que les contrôles aux frontières intérieures des États membres ayant déclaré qu'ils étaient prêts à rejoindre l'espace Schengen puissent être supprimés.

Les citoyens de l'Union doivent être aidés dans les procédures administratives et juridiques auxquelles ils sont confrontés dans l'exercice de leur droit à la libre circulation. Il convient, dans le cadre du traité, de supprimer les obstacles qui limitent ce droit dans la vie de tous les jours.

Le Conseil européen invite la Commission:

à assurer le suivi de la mise en œuvre et de l'application de ces règles afin de garantir le droit à la libre circulation.

L'obtention du droit de résidence conformément à la législation de l'Union pour les citoyens de l'Union et les membres de leur famille est un avantage inhérent à l'exercice du droit à la libre circulation. Ce droit ne doit toutefois pas servir à contourner les règles en matière d'immigration. Si la liberté de circuler comporte des droits, elle impose aussi des obligations à ceux qui en bénéficient, et il convient de prévenir les abus et les fraudes. Les États membres devraient davantage garantir et protéger le droit à la libre circulation en travaillant ensemble, ainsi qu'avec la Commission, à lutter contre les agissements qui revêtent une dimension pénale, avec des mesures fortes et proportionnées, dans le respect du droit applicable.

Par conséquent, le Conseil européen invite aussi la Commission:

à assurer le suivi de la mise en œuvre et de l'application de ces règles afin de prévenir les abus et les fraudes,

à étudier la meilleure façon d'échanger des informations, notamment sur les permis et documents de séjour, ainsi que la manière d'aider les autorités des États membres à lutter efficacement contre les abus commis à l'encontre de ce droit fondamental.

En gardant cet objectif présent à l'esprit, les États membres devraient également suivre de près la mise en œuvre correcte et complète de l'acquis existant et lutter contre les éventuels abus et fraudes commis à l'encontre du droit à la libre circulation des personnes et échanger des informations et des statistiques sur ce type d'abus et de fraudes. Si les États membres constatent une tendance systématique aux abus et aux fraudes, il convient qu'ils en fassent part à la Commission, qui suggérera au Conseil comment y mettre fin par les moyens les plus appropriés.

2.3.   Vivre ensemble dans un espace qui respecte la diversité et protège les plus vulnérables

Puisque la diversité fait la richesse de l'Union, l'Union et ses États membres doivent offrir un environnement sûr où les différences sont respectées et les plus vulnérables protégés. La lutte contre les discriminations, le racisme, l'antisémitisme, la xénophobie et l'homophobie doit être poursuivie avec détermination.

2.3.1.   Racisme et xénophobie

Le Conseil européen invite la Commission:

à faire rapport, pendant la période couverte par le programme de Stockholm et au plus tard le 28 novembre 2013, sur la transposition de la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal et, le cas échéant, à présenter des propositions en vue de sa modification,

à utiliser pleinement les instruments existants, en particulier les programmes de financement, pour lutter contre le racisme et la xénophobie.

Les États membres devraient mettre en œuvre ladite décision-cadre dès que possible, et au plus tard le 28 novembre 2010.

2.3.2.   Droits de l'enfant

Les droits de l'enfant – à savoir que le principe de son intérêt supérieur consiste en son droit de vivre, de survivre et de se développer, en la non-discrimination et le respect de son droit d'exprimer librement son opinion et d'être véritablement entendu sur toute question le concernant, eu égard à son âge et à son niveau de développement – tels qu'affirmés dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et dans la convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant, concernent toutes les politiques de l'Union. Ils doivent être systématiquement pris en compte dans les stratégies européennes en vue d'assurer une approche intégrée. La communication de 2006 de la Commission intitulée «Vers une stratégie européenne sur les droits de l'enfant» aborde des considérations importantes à cet égard. Il convient de définir une stratégie ambitieuse de l'Union relative aux droits de l'enfant.

Le Conseil européen invite la Commission:

à identifier les actions pour lesquelles l'Union peut apporter une valeur ajoutée, afin de protéger et de promouvoir les droits de l'enfant. Une attention spécifique devrait être accordée aux enfants en situation de particulière vulnérabilité, notamment les enfants victimes de l'exploitation et d'abus à caractère sexuel ainsi que les enfants victimes de la traite et les mineurs non accompagnés dans le contexte de la politique d'immigration de l'Union.

En ce qui concerne l'enlèvement d'enfants par leurs parents, outre la mise en œuvre efficace des instruments juridiques existant dans ce domaine, il conviendrait d'étudier la possibilité de recourir à la médiation familiale au niveau international, tout en tenant compte des bonnes pratiques en vigueur dans les États membres. L'Union devrait continuer à développer les mécanismes d'alerte concernant les enlèvements d'enfants, en promouvant la coopération entre les autorités nationales et l'interopérabilité des systèmes.

2.3.3.   Groupes vulnérables

La discrimination, sous toutes ses formes, reste inacceptable. L'Union et les États membres doivent unir leurs efforts pour assurer la pleine insertion des groupes vulnérables, en particulier des Roms, dans la société en promouvant leur intégration dans le système éducatif et le marché du travail et en luttant contre la violence dont ils peuvent faire l'objet. À cette fin, les États membres devraient garantir la bonne application des textes existants pour lutter contre les discriminations éventuelles. L'Union apportera un concours concret et encouragera les meilleures pratiques afin d'aider les États membres dans cette tâche. La société civile aura un rôle particulier à jouer.

Les groupes vulnérables particulièrement exposés, notamment les femmes qui sont victimes de violences ou de mutilations génitales ou les personnes qui subissent un préjudice dans un État membre dont elles ne sont pas des ressortissants ni des résidents, ont besoin d'une plus grande protection, y compris sur le plan juridique. Un soutien financier approprié sera apporté à travers les programmes de financement existants.

Il convient d'évaluer la nécessité de présenter d'autres propositions concernant les adultes vulnérables à la lumière de l'expérience tirée de l'application de la convention de La Haye de 2000 sur la protection internationale des adultes par les États membres qui sont parties à cette convention ou qui le deviendront. Les États membres sont encouragés à adhérer à ladite convention dans les meilleurs délais.

2.3.4.   Victimes de la criminalité, y compris le terrorisme

Les personnes les plus vulnérables ou qui sont particulièrement exposées, telles que les personnes qui subissent des violences répétées commises par des proches, les personnes qui sont victimes de violences fondées sur le sexe ou d'autres formes de criminalité dans un État membre dont elles ne sont pas des ressortissants ni des résidents, ont besoin d'une aide et d'une protection juridique spécifiques. Les victimes du terrorisme doivent également faire l'objet d'une attention spécifique et bénéficier d'un soutien et d'une reconnaissance sociale particuliers. Une approche coordonnée et intégrée à l'égard des victimes est nécessaire, conformément aux conclusions du Conseil relatives à une stratégie visant à faire respecter les droits des personnes victimes de la criminalité et à améliorer le soutien qui leur est apporté.

Le Conseil européen invite la Commission et les États membres:

à étudier les moyens d'améliorer la législation et les mesures de soutien concrètes concernant la protection des victimes et à améliorer la mise en œuvre des instruments existants,

à offrir un meilleur soutien aux victimes par d'autres moyens, éventuellement grâce aux réseaux européens existants apportant une aide concrète, et à présenter des propositions à cette fin,

à étudier la possibilité d'élaborer un instrument juridique global sur la protection des victimes, en fusionnant la directive 2004/80/CE du Conseil du 29 avril 2004 relative à l'indemnisation des victimes de la criminalité et la décision-cadre 2001/220/JAI du Conseil du 15 mars 2001 relative au statut des victimes dans le cadre de procédures pénales, après avoir procédé à une évaluation de ces deux instruments.

Un recours accru aux programmes de financement devrait avoir lieu conformément à leurs cadres juridiques respectifs.

2.4.   Les droits des personnes dans le cadre des procédures pénales

La protection des droits des suspects ou des personnes poursuivies dans le cadre des procédures pénales est une valeur fondamentale de l'Union, essentielle pour maintenir la confiance mutuelle entre États membres et la confiance de la population dans l'Union. Le Conseil européen se félicite par conséquent de l'adoption par le Conseil de la feuille de route visant à renforcer les droits procéduraux des suspects ou des personnes poursuivies dans le cadre des procédures pénales, qui, lorsqu'elle sera pleinement mise en œuvre, renforcera ces droits. Cette feuille de route fera dès lors partie du programme de Stockholm.

Le Conseil européen invite la Commission:

à présenter les propositions prévues dans la feuille de route en vue de sa mise en œuvre rapide, selon les conditions qui y sont énoncées,

à examiner s'il y aurait lieu de compléter les droits procéduraux minimaux des suspects et des personnes poursuivies et à déterminer si d'autres questions, par exemple la présomption d'innocence, doivent être abordées, afin de promouvoir une meilleure coopération dans ce domaine.

2.5.   Protection des droits du citoyen dans la société de l'information

Lorsqu'il s'agit d'apprécier la question du respect de la vie privée des personnes dans l'espace de liberté, de sécurité et de justice, le droit à la liberté est primordial. Le droit à la vie privée et le droit à la protection des données à caractère personnel sont énoncés dans la Charte des droits fondamentaux. L'Union est donc confrontée à une tâche ardue: concilier l'échange accru de données à caractère personnel et la nécessité de garantir la protection de la vie privée. Elle doit se doter d'une stratégie globale de protection des données au sein de l'Union et dans le cadre de ses relations avec des pays tiers. À cet égard, elle devrait promouvoir l'application des principes énoncés dans les instruments pertinents de l'Union relatifs à la protection des données et dans la convention du Conseil de l'Europe de 1981 pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé de données à caractère personnel, ainsi que l'adhésion à ladite convention. Elle doit en outre prévoir les circonstances dans lesquelles l'ingérence des pouvoirs publics dans l'exercice de ces droits est justifiée et énoncer des règles en la matière, et également appliquer les principes de la protection des données dans la sphère privée.

L'Union doit tenir compte du nécessaire accroissement des échanges de données à caractère personnel, tout en garantissant le respect maximal du principe de protection de la vie privée. Le Conseil européen est convaincu que les développements technologiques ne sont pas seulement synonymes de nouveaux défis compromettant la protection des données à caractère personnel, mais qu'ils offrent également de nouvelles possibilités de mieux protéger ces données.

Il y a lieu de garantir le respect de certains principes fondamentaux tels que la limitation de la finalité, la proportionnalité, la légitimité du traitement, la durée limitée de conservation, la sécurité et la confidentialité, ainsi que le respect des droits de la personne concernée, le contrôle exercé par des autorités nationales indépendantes et l'accès des voies de recours effectives, et d'établir un régime complet de protection. Ces questions sont également examinées dans le cadre de la stratégie de gestion de l'information pour la sécurité intérieure de l'Union visée au point 4.

Le Conseil européen invite la Commission:

à évaluer le fonctionnement des différents instruments relatifs à la protection des données et à présenter, si besoin est, de nouvelles initiatives législatives et non législatives visant à assurer l'application effective des principes précités,

à proposer une recommandation pour la négociation, avec les États-Unis d'Amérique, d'accords sur la protection et, s'il y a lieu, le partage des données à des fins répressives, en se fondant sur les travaux du groupe de contact à haut niveau UE – États-Unis sur le partage et la confidentialité des informations et la protection des données à caractère personnel,

à envisager les éléments essentiels que doivent comporter les accords relatifs à la protection des données conclus à des fins répressives avec des pays tiers, qui peuvent englober, si besoin est, des données détenues à titre privé, sur la base d'un niveau élevé de protection des données,

à améliorer le respect des principes de protection des données par le développement de nouvelles technologies appropriées, en renforçant la coopération entre les secteurs public et privé, en particulier dans le domaine de la recherche,

à examiner la mise en place d'un système de certification européenne pour les technologies, les produits et les services «respectueux de la vie privée»,

à mener des campagnes d'information, en particulier des campagnes de sensibilisation auprès des citoyens.

D'un point de vue plus global, l'Union doit contribuer activement à l'élaboration et à la promotion de normes internationales en matière de protection des données à caractère personnel, sur la base de ses instruments pertinents dans ce domaine et de la convention du Conseil de l'Europe de 1981 pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé de données à caractère personnel, ainsi qu'à la conclusion d'instruments bilatéraux ou multilatéraux appropriés.

2.6.   Participer à la vie démocratique de l'Union

Le Conseil européen rappelle que la transparence du processus décisionnel, l'accès aux documents et la bonne administration contribuent à la participation des citoyens à la vie démocratique de l'Union. En outre, la faculté d'initiative des citoyens de l'Union instituée par l'article 11 du TUE instaurera un nouveau mécanisme de participation civique. Ce mécanisme devrait être concrétisé rapidement.

Le Conseil européen invite la Commission:

inter aliaà examiner la meilleure façon de garantir la transparence du processus décisionnel, l'accès aux documents et la bonne administration de la justice, compte tenu des nouvelles possibilités offertes par le traité de Lisbonne et à présenter des propositions appropriées à cette fin.

En vue des élections européennes de 2014, il convient de mener une réflexion approfondie sur les moyens d'inciter les citoyens à voter. La participation aux élections a diminué de 20 % depuis 1979 alors que, parallèlement, les pouvoirs du Parlement européen en tant que colégislateur se sont considérablement accrus. Il faudrait étudier des mesures telles que la simplification de la procédure d'inscription sur les listes électorales.

En outre, le Conseil européen invite la Commission, avant le mois de décembre 2012:

à lui présenter un rapport sur les pratiques et traditions nationales concernant les élections au Parlement européen et à proposer, sur la base de ce rapport, comment définir un jour de scrutin commun pour ces élections. À la lumière de ce rapport, le Conseil européen examinera les moyens de faire progresser cette question.

2.7.   Bénéficier d'une protection dans les États tiers

Tout citoyen de l'Union voyageant ou résidant dans un pays tiers où son propre État membre n'est pas représenté a droit à une protection de la part des autorités diplomatiques et consulaires de tout autre État membre, dans les mêmes conditions que les ressortissants dudit État membre. On parle pourtant peu de ce droit, qui est consacré par les traités, et il convient de redoubler d'efforts pour qu'il soit pleinement appliqué. Des campagnes de communication ciblées pourraient être menées pour faire respecter ce droit.

Le Conseil européen invite la Commission:

à se pencher sur les mesures appropriées en vue de mettre en place la coordination et la coopération nécessaires pour faciliter la protection consulaire conformément à l'article 23 du TFUE.

3.   FACILITER LA VIE DES CITOYENS: UNE EUROPE DU DROIT ET DE LA JUSTICE

Le Conseil européen a déclaré, en 1999, lors de sa réunion de Tampere, que le renforcement de la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires et des jugements et le rapprochement nécessaire des législations faciliteraient la coopération entre autorités et la protection judiciaire des droits de la personne et que le principe de reconnaissance mutuelle devait être la pierre angulaire de la coopération judiciaire en matière tant civile que pénale. Ce principe est désormais énoncé dans le traité.

Dans le programme de La Haye, adopté en 2004, le Conseil européen a fait observer que, pour que le principe de reconnaissance mutuelle produise ses effets, il convenait de renforcer la confiance mutuelle en faisant émerger progressivement une culture judiciaire européenne fondée sur la diversité des systèmes juridiques et sur l'unité par le droit européen. Les systèmes judiciaires des États membres devraient pouvoir fonctionner ensemble, de manière cohérente et efficace, dans le respect des traditions juridiques nationales.

L'Union devrait continuer à renforcer la confiance mutuelle dans les systèmes juridiques des États membres en instituant les droits minimaux nécessaires au développement du principe de reconnaissance mutuelle et en établissant des règles minimales concernant la définition des infractions et des sanctions pénales conformément au traité. L'espace judiciaire européen doit aussi permettre aux citoyens de faire valoir leurs droits partout dans l'Union en améliorant sensiblement la connaissance globale de ces droits et en facilitant l'accès des citoyens à la justice.

À cet égard, le Conseil européen souligne l'importance horizontale de la justice en ligne («e-Justice»), qui n'est pas confinée à des domaines spécifiques du droit. La justice en ligne devrait être intégrée dans tous les domaines du droit civil, pénal et administratif afin d'améliorer l'accès à la justice et de renforcer la coopération entre les autorités administratives et judiciaires.

3.1.   Poursuivre la mise en œuvre de la reconnaissance mutuelle

Le Conseil européen note avec satisfaction que des progrès considérables ont été accomplis en ce qui concerne la mise en œuvre des deux programmes sur la reconnaissance mutuelle adoptés par le Conseil en 2000, et souligne que les États membres devraient prendre toutes les mesures nécessaires pour transposer au niveau national les règles arrêtées au niveau européen. À cet égard, le Conseil européen insiste sur la nécessité d'évaluer la mise en œuvre de ces mesures et de poursuivre les travaux sur la reconnaissance mutuelle.

3.1.1.   Droit pénal

Face à la criminalité transfrontière, il convient de déployer davantage d'efforts pour rendre la coopération judiciaire plus efficace. Les instruments adoptés doivent être plus «conviviaux» et cibler les problèmes qui surviennent constamment dans le cadre de la coopération transfrontière, comme les problèmes de délais et les problèmes linguistiques ou le principe de proportionnalité. Afin d'améliorer la coopération reposant sur la reconnaissance mutuelle, il convient également de régler certaines questions de principe. À titre d'exemple, il peut être nécessaire d'adopter une approche horizontale pour aborder certains problèmes récurrents posés par les négociations sur les instruments. Le rapprochement, si besoin est, du droit matériel et du droit procédural devrait faciliter la reconnaissance mutuelle.

La reconnaissance mutuelle pourrait s'appliquer à tous les types de jugements et de décisions de nature judiciaire, que ce soit en matière pénale ou administrative, en fonction du système juridique concerné.

Les victimes de la criminalité ou les témoins qui sont en danger peuvent bénéficier de mesures de protection particulière qui devraient être effectives dans toute l'Union.

Le Conseil européen estime qu'il convient de poursuivre les travaux devant permettre la mise en place d'un système global d'obtention de preuves dans les affaires revêtant une dimension transfrontière, sur le fondement du principe de reconnaissance mutuelle. Les instruments qui existent actuellement dans ce domaine constituent un régime fragmentaire. Une nouvelle approche s'impose, qui doit être fondée sur le principe de reconnaissance mutuelle tout en tenant compte de la souplesse du système d'entraide judiciaire classique. Ce nouveau modèle pourrait avoir un champ d'application plus large et devrait couvrir autant de types d'éléments de preuve que possible, eu égard aux mesures concernées.

Le Conseil européen invite la Commission:

à proposer, après avoir procédé à une analyse d'impact, un système global destiné à remplacer tous les instruments qui existent actuellement dans ce domaine, y compris la décision-cadre 2008/978/JAI du Conseil du 18 décembre 2008 relative au mandat européen d'obtention de preuves visant à recueillir des objets, des documents et des données en vue de leur utilisation dans le cadre de procédures pénales, qui couvrirait, dans toute la mesure du possible, tous les types d'éléments de preuve, prévoirait des délais de mise en œuvre et limiterait autant que possible les motifs de refus,

à examiner s'il existe d'autres moyens de faciliter la recevabilité de la preuve dans ce domaine,

à examiner si certaines mesures d'enquête pourraient être exécutées par les autorités répressives ou judiciaires de l'État membre requérant ou d'émission en liaison et en accord avec les autorités de l'État d'exécution, conformément à l'article 89 du TFUE et, le cas échéant, à présenter les propositions nécessaires,

à examiner si et comment les autorités d'un État membre pourraient obtenir rapidement des informations d'entités publiques ou privées d'un autre État membre sans recourir à des mesures coercitives ou en faisant appel aux autorités judiciaires de l'autre État membre,

à examiner les résultats de l'évaluation du mandat d'arrêt européen et, s'il y a lieu, présenter des propositions visant à accroître l'efficacité de cet instrument et la protection juridique des personnes dans le cadre de la procédure de remise, en adoptant une approche graduelle à l'égard d'autres instruments concernant la reconnaissance mutuelle,

à élaborer une étude globale sur les obstacles juridiques et administratifs qui se posent actuellement à l'application transfrontière des sanctions et des décisions administratives en matière d'infractions routières et à présenter, si besoin est, de nouvelles initiatives législatives et non législatives en vue d'améliorer la sécurité routière dans l'Union.

L'Union devrait viser l'échange systématique d'informations et, à long terme, la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires infligeant certains types de déchéances de droits.

Le Conseil européen invite la Commission:

à étudier le recours à la déchéance de droits dans les États membres et à proposer au Conseil un programme de mesures, y compris l'échange d'informations sur certains types de déchéances de droits, en adoptant une approche graduelle à long terme, qui accorde la priorité aux cas dans lesquels la déchéance de droits risque le plus d'avoir des répercussions sur la sécurité des personnes ou la vie professionnelle.

Dans le domaine de la coopération judiciaire, le Conseil européen souligne qu'il faut que les États membres et Eurojust mettent soigneusement en œuvre la décision 2009/426/JAI du Conseil du 16 décembre 2008 sur le renforcement d'Eurojust qui, avec le traité de Lisbonne, offre la possibilité de poursuivre le développement d'Eurojust au cours des prochaines années, notamment en ce qui concerne le déclenchement d'enquêtes et la résolution des conflits de compétence. Sur la base d'une évaluation de la mise en œuvre de cet instrument, de nouvelles possibilités pourraient être envisagées conformément aux dispositions pertinentes du traité, notamment l'octroi de nouvelles compétences aux membres nationaux d'Eurojust, le renforcement des compétences du collège d'Eurojust ou la création d'un procureur européen.

3.1.2.   Droit civil

En matière civile, le Conseil européen estime que le processus de suppression de toutes les mesures intermédiaires (l'exequatur) devrait se poursuivre pendant la période couverte par le programme de Stockholm. Parallèlement, la suppression de l'exequatur s'accompagnera également d'une série de garanties: il peut s'agir de mesures relatives tant au droit procédural qu'aux règles de conflit de lois.

Par ailleurs, la reconnaissance mutuelle devrait être étendue à des domaines encore non couverts mais essentiels pour la vie quotidienne, tels que les successions et les testaments, les régimes matrimoniaux et les conséquences patrimoniales de la séparation des couples, tout en tenant compte des systèmes juridiques des États membres, y compris en matière d'ordre public, et des traditions nationales dans ce domaine.

Le Conseil européen estime que le processus d'harmonisation des règles de conflit de lois au niveau de l'Union devrait également se poursuivre dans les domaines où cette harmonisation est nécessaire, tels que la séparation et le divorce. Il pourrait également englober le domaine du droit des sociétés, des contrats d'assurance et des sûretés.

Le Conseil européen souligne par ailleurs qu'il est important d'engager des travaux sur la consolidation des instruments adoptés à ce jour dans le domaine de la coopération judiciaire en matière civile. Il convient avant tout d'accroître la cohérence de la législation de l'Union en rationalisant les instruments existants. L'objectif devrait être de garantir la cohérence et la convivialité des instruments, ce qui assurerait une application plus efficace et uniforme desdits instruments.

Le Conseil européen invite la Commission:

à déterminer quelles garanties sont nécessaires pour accompagner la suppression de l'exequatur et comment celles-ci pourraient être rationalisées,

à évaluer s'il existe des motifs justifiant la consolidation et la simplification afin d'améliorer la cohérence de la législation de l'Union en vigueur,

à assurer le suivi de l'étude menée récemment sur les problèmes éventuels rencontrés concernant les actes d'état civil et l'accès aux registres de ces actes.

À la lumière des conclusions qu'elle tirera, la Commission pourrait présenter des propositions appropriées tenant compte des différents systèmes et traditions juridiques des États membres. À court terme, un système permettant aux citoyens d'obtenir facilement les actes d'état civil les concernant pourrait être envisagé. À long terme, il pourrait être étudié si la reconnaissance mutuelle des effets attachés aux actes d'état civil pourrait être opportune, au moins dans certains domaines. Il conviendrait de prendre en compte les travaux menés par la Commission internationale de l'état civil dans ce domaine particulier.

3.2.   Renforcer la confiance mutuelle

La reconnaissance mutuelle a notamment pour conséquence que les décisions rendues au niveau national ont des effets dans les autres États membres, en particulier sur leurs systèmes judiciaires. Il est donc nécessaire de prendre des mesures visant à renforcer la confiance mutuelle afin de pouvoir bénéficier pleinement de ces avancées.

L'Union devrait appuyer les efforts déployés par les États membres en vue d'accroître l'efficacité de leurs systèmes judiciaires en encourageant les échanges de bonnes pratiques et le développement de projets novateurs en matière de modernisation de la justice.

3.2.1.   Formation

La formation des juges (y compris ceux des juridictions administratives), des procureurs et des autres membres du personnel judiciaire est essentielle afin de renforcer la confiance mutuelle (voir également point 1.2.6). L'Union devrait continuer de soutenir et de renforcer les mesures visant à développer la formation, conformément aux articles 81 et 82 du TFUE.

3.2.2.   Développement de réseaux

Le Conseil européen estime que les contacts entre hauts fonctionnaires des États membres dans les domaines couverts par la justice et les affaires intérieures sont précieux et que l'Union devrait les promouvoir autant que possible. Cela pourrait concerner, en fonction des structures nationales, les chefs des services de police ou les procureurs, les dirigeants d'instituts de formation, les responsables des administrations pénitentiaires et les directeurs généraux des administrations douanières. Le cas échéant, ces réseaux devraient également être informés des travaux du comité permanent de sécurité intérieure (COSI) ou avoir la possibilité de participer aux travaux relatifs à l'évaluation de la menace que représente la criminalité organisée et à l'élaboration d'autres outils stratégiques de l'Union. Ces réseaux devraient principalement se réunir en utilisant les structures existantes telles qu'Europol, Eurojust ou Frontex, ou à l'invitation de la présidence en tant que pays d'accueil. Les autres réseaux de professionnels déjà constitués dans ce domaine devraient également continuer de recevoir le soutien de l'Union, notamment le réseau européen des conseils de la justice et le réseau des présidents des cours suprêmes judiciaires de l'Union européenne.

3.2.3.   Évaluation

Comme dans d'autres domaines, le développement de la reconnaissance mutuelle en matière judiciaire doit aller de pair avec une meilleure évaluation, à la fois ex ante et ex post (voir également point 1.2.5).

3.2.4.   Améliorer les outils

Le Conseil européen préconise le renforcement des moyens opérationnels et des outils mis à la disposition des juges, des procureurs et de tous les autres intervenants dans le domaine de la justice. À cet effet, il recommande une participation plus active d'Eurojust et des réseaux judiciaires européens en matières civile et pénale, afin d'améliorer la coopération et la mise en œuvre effective du droit de l'Union par tous les praticiens. Les travaux d'amélioration des outils électroniques développés à ce jour devraient se poursuivre, et les ressources nécessaires devraient être affectées à cette tâche.

3.2.5.   Mise en œuvre

La mise en œuvre des décisions déjà prises devrait être une priorité de l'Union. Il convient à cet effet de recourir aux méthodes suivantes: accompagner plus étroitement la mise en œuvre de la législation de l'Union; faire un meilleur usage des instruments de financement; améliorer la formation des juges et des autres professionnels et renforcer les mécanismes d'évaluation et les mesures concrètes.

Sans préjudice du rôle de la Commission et de la Cour de justice de l'Union européenne, la mise en œuvre incombe au premier chef aux États membres mais, dans la mesure où les instruments de reconnaissance mutuelle sont des outils communs, l'Union devrait mieux accompagner leur mise en œuvre en facilitant l'échange d'expériences et de bonnes pratiques.

Le Conseil européen invite la Commission:

à assurer le partage d'informations grâce à l'élaboration, avec l'aide d'experts en droit civil et pénal et en collaboration avec les États membres, de manuels ou de fiches techniques nationales sur l'utilisation des instruments de reconnaissance mutuelle, en s'inspirant de ce qui a été fait pour le mandat d'arrêt européen. L'objectif devrait être de disposer, au terme de la période de cinq ans, d'un manuel ou d'une fiche technique nationale pour chaque instrument adopté jusqu'à présent.

Le Conseil européen estime, en outre, que tous les moyens de communication électronique modernes devraient être utilisés au maximum et que les autorités judiciaires devraient être dotées, dans les meilleurs délais, de moyens de communication électronique sécurisés permettant une correspondance en toute sécurité. L'Union devrait également mettre l'accent sur la vidéoconférence et sur l'aide à la mise au point d'outils de traduction pour rendre ces derniers aussi précis que possible. Ces évolutions devraient s'accompagner de la mise en œuvre du plan d'action relatif à l'e-Justice et en faire partie. En outre, il convient, tout en tenant pleinement compte des règles en matière de protection des données, de prendre des mesures en vue de renforcer la coopération entre les autorités compétentes, de manière à connaître l'adresse où les personnes ont leur résidence habituelle, pour ce qui a trait à la signification ou à la notification des actes.

3.2.6.   Détention

Le Conseil européen considère qu'il conviendrait d'entreprendre des efforts en vue de renforcer la confiance mutuelle et de rendre plus efficace le principe de la reconnaissance mutuelle dans le domaine de la détention. Il convient de poursuivre les efforts visant à promouvoir l'échange de bonnes pratiques et de soutenir la mise en œuvre des règles pénitentiaires européennes approuvées par le Conseil de l'Europe. On pourrait également se pencher sur des questions telles que les mesures de substitution à l'emprisonnement, les projets pilotes en matière de détention et les bonnes pratiques en matière de gestion des prisons. La Commission est invitée à approfondir la réflexion sur cette question dans le cadre des possibilités offertes par le traité de Lisbonne.

3.3.   Se doter d'un socle de règles minimales communes

Dans la mesure où cela est nécessaire pour faciliter la reconnaissance mutuelle des jugements et des décisions judiciaires, ainsi que la coopération policière et judiciaire en matière pénale, l'Union peut adopter des règles minimales communes. Le Conseil européen considère qu'un certain degré de rapprochement des dispositions législatives est nécessaire pour favoriser l'émergence, chez les juges et les procureurs, d'une communauté de vues sur ces questions, et permettre ainsi la bonne application du principe de reconnaissance mutuelle, dans le respect des différents systèmes et traditions juridiques des États membres.

3.3.1.   Droit pénal

Les actes criminels, dans des domaines de criminalité particulièrement grave revêtant une dimension transfrontière résultant du caractère ou des incidences de ces infractions ou d'un besoin particulier de les combattre sur des bases communes, devraient faire l'objet de définitions communes et de niveaux minimaux communs de sanctions maximales. Il s'agit des infractions pénales graves visées à l'article 83, paragraphe 1, du TFUE. Il convient à cet égard de donner la priorité au terrorisme, à la traite des êtres humains, au trafic illicite de drogues, à l'exploitation sexuelle des femmes et des enfants et à la pédopornographie, ainsi qu'à la cybercriminalité.

Le Conseil européen invite la Commission:

à examiner si le niveau de rapprochement est suffisant pour ce qui concerne les décisions-cadres adoptées et à faire rapport sur la nécessité d'établir des définitions et des sanctions communes, ainsi qu'à envisager de présenter de nouvelles propositions législatives dans les cas où un rapprochement plus poussé est nécessaire.

Il convient d'examiner plus avant le lien entre le rapprochement des dispositions relatives aux infractions pénales ou leur définition et la règle de la double incrimination dans le cadre de la reconnaissance mutuelle. La Commission est invitée à présenter un rapport au Conseil sur cette question. Une des questions qui pourrait se poser pourrait être celle du caractère nécessaire et réalisable du rapprochement des dispositions relatives aux infractions pénales auxquelles la double incrimination ne s'applique pas et de la définition desdites infractions.

Il convient d'instituer des dispositions de droit pénal lorsqu'elles sont jugées indispensables à la protection des intérêts en jeu et, d'une manière générale, de n'y recourir qu'en dernier ressort.

Des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions peuvent également être établies lorsque le rapprochement des dispositions législatives et réglementaires en matière pénale des États membres s'avère indispensable pour assurer la mise en œuvre efficace d'une politique de l'Union qui a fait l'objet de mesures d'harmonisation.

Le Conseil européen souligne l'importance de la cohérence des dispositions de droit pénal des différents instruments de l'Union et invite le Conseil:

à mettre en œuvre les travaux sur des dispositions de droit pénal types et le Conseil et la Commission à poursuivre la réflexion, avec le Parlement européen, sur la façon d'améliorer la cohérence des dispositions de droit pénal dans les différents instruments de l'Union;

et la Commission:

à examiner les possibilités de recourir à des programmes existants pour financer des projets pilotes dans les États membres qui testent des mesures de substitution à l'emprisonnement.

3.3.2.   Droit civil

La suppression de l'exequatur s'accompagnera d'une série de garanties, notamment en ce qui concerne les jugements par défaut: il peut s'agir de mesures relatives tant au droit procédural qu'aux règles de conflit de lois (par exemple, le droit d'être entendu, la signification et la notification des actes, le délai imparti pour présenter des avis, etc.). Le principal objectif de l'action menée dans le domaine des dispositions de droit procédural en matière civile consiste à faire en sorte que les frontières entre les États membres ne constituent pas un obstacle au règlement des affaires civiles ni à l'engagement de procédures judiciaires ou à l'exécution des décisions en matière civile. Avec les conclusions du Conseil européen de Tampere et le programme de La Haye: renforcer la liberté, la sécurité et la justice dans l'Union européenne, des étapes essentielles ont été franchies sur la voie de la réalisation de cet objectif. Le Conseil européen note toutefois que l'efficacité des instruments de l'Union dans ce domaine doit encore être améliorée.

Le Conseil européen invite la Commission:

dans un premier temps, à soumettre un rapport sur le fonctionnement, par-delà les frontières, du régime actuel de l'Union en ce qui concerne les dispositions de droit procédural en matière civile et, sur la base de ce rapport, à présenter une proposition visant à améliorer la cohérence de la législation de l'Union en vigueur,

à évaluer, également dans le cadre des prochains réexamens des règlements en vigueur, la nécessité d'établir des normes minimales communes ou des règles types de procédure civile pour l'exécution transfrontière des jugements et décisions sur des questions telles que la signification et la notification des actes, l'obtention de preuves, les procédures de réexamen et l'exécution, la mise en place de normes minimales concernant la reconnaissance des décisions en matière de responsabilité parentale et, le cas échéant, à présenter des propositions sur ces questions,

à poursuivre les travaux sur les règles communes en matière de conflit de lois, en tant que de besoin.

3.4.   Les bénéfices pour les citoyens d'un espace judiciaire européen

3.4.1.   Faciliter l'accès à la justice

Dans l'espace judiciaire européen, l'accès à la justice doit être facilité, en particulier dans les procédures transfrontières. En parallèle, il faudra continuer à améliorer les modes alternatifs de règlement des litiges, en particulier en droit de la consommation. Il faut aider les citoyens à surmonter les barrières linguistiques qui peuvent entraver leur accès à la justice.

Le Conseil européen voit dans la justice en ligne une excellente occasion de faciliter l'accès à la justice. Le plan d'action pluriannuel relatif à l'e-Justice européenne, adopté fin novembre 2008 par le Conseil, fixe le cadre dans lequel les activités européennes de justice en ligne seront développées jusqu'à la fin de 2013. Le portail de l'e-Justice européenne sera un moyen de mieux informer les personnes sur leurs droits et de leur donner accès à une série d'informations et de services sur les différents systèmes judiciaires. Le recours à la vidéoconférence devrait être amélioré, par exemple pour épargner aux victimes des déplacements inutiles et le stress engendré par la participation à une procédure judiciaire. Dans le respect des règles sur la protection des données, certains registres nationaux seront interconnectés progressivement (par exemple, les registres concernant l'insolvabilité, les interprètes, les traducteurs et les testaments). Certaines bases de données existantes pourraient aussi être intégrées partiellement dans le portail [par exemple, le registre européen du commerce (EBR) et le service européen d'information foncière (EULIS)]. Certaines procédures européennes et certaines procédures nationales transfrontières (par exemple, l'injonction de payer européenne, la procédure européenne de règlement des petits litiges et la médiation) pourraient à moyen terme s'effectuer en ligne. En outre, le recours à la signature électronique devrait être encouragé dans le cadre du projet «justice en ligne».

Le Conseil européen invite le Conseil, la Commission et les États membres:

à créer les conditions permettant réellement aux parties de communiquer avec les juridictions par des moyens électroniques dans le cadre d'une procédure judiciaire. À cet effet, des formulaires interactifs devraient être mis à disposition sur le portail de la justice en ligne pour certaines procédures européennes telles que l'injonction de payer européenne et la procédure européenne de règlement des petits litiges. Pendant cette phase, il conviendrait d'améliorer sensiblement la communication électronique entre autorités judiciaires pour ce qui concerne la mise en œuvre de la justice en ligne.

Le Conseil européen encourage en outre les institutions de l'Union et les États membres:

à s'employer à mettre pleinement en œuvre le plan d'action relatif à l'e-Justice européenne. À cet égard, la Commission est invitée à présenter des propositions dans le cadre des perspectives financières, en vue d'un financement approprié des projets de justice en ligne, et en particulier de projets informatiques horizontaux de grande envergure.

Certaines formalités de légalisation des actes et documents constituent également un obstacle ou une charge excessive. Compte tenu des possibilités liées à l'utilisation des nouvelles technologies, y compris les signatures numériques, l'Union devrait envisager la suppression de toute formalité de légalisation des actes entre les États membres. Le cas échéant, il faudrait envisager la création, à long terme, d'actes authentiques européens.

Le Conseil européen invite la Commission:

à examiner la possibilité de supprimer les formalités de légalisation des actes entre les États membres et à présenter une proposition allant dans ce sens.

3.4.2.   Soutenir l'activité économique

L'espace judiciaire européen doit contribuer à soutenir l'activité économique dans le cadre du marché unique.

Le Conseil européen invite la Commission:

à évaluer s'il est nécessaire et concrètement envisageable de prévoir, au niveau de l'UE, certaines mesures provisoires, y compris des mesures de protection, afin d'empêcher par exemple la disparition d'actifs avant l'exécution d'une créance,

à présenter des propositions appropriées afin d'améliorer l'efficacité de l'exécution des décisions de justice au sein de l'Union en ce qui concerne les avoirs bancaires et le patrimoine des débiteurs, sur la base des livres verts de 2006 et 2008.

Il faudrait tenir compte, pour l'élaboration de mesures de ce type, de l'impact qu'elles auront sur le droit au respect de la vie privée et le droit à la protection des données à caractère personnel.

Le Conseil européen réaffirme que le cadre commun de référence pour le droit européen des contrats devrait être un ensemble non contraignant de principes fondamentaux, de définitions et de règles types qui pourrait être utilisé par les législateurs au niveau de l'Union afin de garantir, lors du processus législatif, une plus grande cohérence et une meilleure qualité. La Commission est invitée à présenter une proposition relative à un cadre commun de référence.

La crise financière actuelle a mis en lumière la nécessité de réguler les marchés financiers et d'empêcher les abus. Il faut aussi étudier d'autres mesures concernant le droit des affaires et créer un environnement réglementaire lisible qui permette aux petites et moyennes entreprises, en particulier, de tirer pleinement parti du marché intérieur, c'est-à-dire de se développer et d'exercer leurs activités sur plusieurs pays comme elles le font sur leur marché national. Il y a lieu d'explorer si des règles communes pour la détermination du droit applicable en matière de droit des sociétés, ainsi que des règles concernant l'insolvabilité des banques et le transfert des créances devraient être élaborées. La question du droit des contrats doit également être examinée plus avant.

Le Conseil européen invite la Commission:

à réfléchir à la nécessité de prendre des mesures dans ces domaines et, le cas échéant, à présenter des propositions à cet égard.

3.5.   Renforcer la présence internationale de l'Union en matière judiciaire

3.5.1.   Droit civil

Le Conseil européen estime qu'il est très important de définir clairement les intérêts et priorités extérieurs de l'Union dans le domaine de la coopération judiciaire en matière civile, en vue de dialoguer avec les pays tiers dans un environnement juridique sûr.

La convention de Lugano de 1988 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matières civile et commerciale est ouverte à l'adhésion des États tiers, et l'Union devrait déterminer, en collaboration avec les autres parties contractantes, quels États tiers pourraient être encouragés à y adhérer.

L'Union européenne devrait profiter de son statut de membre de la conférence de La Haye de droit international privé pour œuvrer activement en faveur de l'adhésion la plus large possible aux conventions les plus importantes et pour offrir le plus d'assistance possible aux États tiers, l'objectif étant la bonne mise en œuvre des instruments. Le Conseil européen invite le Conseil, la Commission et les États membres à encourager tous les pays partenaires à adhérer aux conventions qui présentent un intérêt particulier pour l'Union.

Dans les cas où aucun cadre juridique ne régit les relations entre l'Union et les pays partenaires et où le développement d'une nouvelle coopération multilatérale n'est pas possible, du point de vue de l'Union, la possibilité de conclure des accords bilatéraux devrait être étudiée, cas par cas.

Le Conseil européen invite le Conseil et la Commission:

à définir une stratégie en matière civile pour les années à venir, qui soit cohérente avec l'action extérieure de l'Union en général.

3.5.2.   Droit pénal

En matière de droit pénal, il faudra déterminer des priorités pour la négociation d'accords d'entraide judiciaire et d'extradition. L'Union devrait promouvoir activement l'adhésion du plus grand nombre de pays partenaires aux conventions les plus pertinentes et les mieux appliquées, et offrir toute l'assistance possible à d'autres États en vue d'une bonne mise en œuvre de ces instruments. Les institutions de l'Union devraient assurer, dans toute la mesure du possible, la cohérence entre le droit de l'Union et l'ordre juridique international. Il conviendrait d'aller dans le sens d'une synergie avec les travaux du Conseil de l'Europe, chaque fois que cela est possible.

Le Conseil européen invite la Commission, le Conseil et le Parlement européen, selon le cas:

à concevoir une politique visant à l'établissement d'accords de coopération judiciaire internationale avec des pays tiers présentant un intérêt à cet égard ou au sein d'organisations internationales. Pour décider quels sont les pays prioritaires, il convient en particulier de tenir compte des critères suivants: la relation stratégique, l'existence préalable ou non d'accords bilatéraux, l'adhésion ou non du pays en question aux principes des droits de l'homme, la coopération ou non du pays en question avec l'Union en général et ses États membres et les priorités en matière de répression et de coopération judiciaire,

à parrainer les échanges de bonnes pratiques et d'expériences avec les États tiers et, notamment en ce qui concerne les pays dits «de l'élargissement», à tirer pleinement parti des instruments dont l'Union dispose pour promouvoir la réforme judiciaire et renforcer l'État de droit, tels que les jumelages et les évaluations par des pairs, en coopération également avec le Conseil de l'Europe,

à offrir un soutien constant aux systèmes de justice des pays partenaires, afin de promouvoir l'État de droit dans le monde entier,

à continuer de promouvoir les principes de complémentarité avec les obligations relevant du statut de Rome de la CCI, et de respect de ces obligations.

Le Conseil européen invite en outre la Commission:

à présenter au Conseil, en 2010, la liste des pays ayant demandé à conclure avec l'Union des accords d'entraide judiciaire et d'extradition, ainsi qu'un diagnostic, établi sur la base des principes susmentionnés, sur la question de savoir s'il est opportun et urgent de conclure des accords de ce type avec ces pays ou d'autres États.

4.   UNE EUROPE QUI PROTÈGE

4.1.   Stratégie de sécurité intérieure

Le Conseil européen est convaincu qu'il est essentiel, pour se protéger contre les menaces transnationales, de renforcer les mesures prises au niveau européen et de mieux les coordonner avec celles qui sont déployées aux niveaux régional et national. Le terrorisme et la criminalité organisée, le trafic de drogue, la corruption, la traite des êtres humains, le trafic de migrants et le trafic d'armes, entre autres, continuent à menacer la sécurité intérieure de l'Union. La criminalité transfrontalière de grande ampleur est désormais un problème pressant, auquel il faut répondre de manière claire et globale. L'action de l'Union viendra appuyer le travail réalisé par les autorités compétentes des États membres et améliorera les résultats de leurs efforts.

Le Conseil européen demande au Conseil et à la Commission:

de définir une stratégie globale de sécurité intérieure de l'Union fondée, en particulier, sur les principes suivants:

une répartition claire des tâches entre l'Union et les États membres, fondée sur une conception commune de ce que sont les enjeux actuels,

le respect des droits fondamentaux, de la protection internationale et de l'État de droit,

la solidarité entre les États membres,

la mise en œuvre d'une stratégie proactive et fondée sur le renseignement,

la nécessité d'une approche horizontale et transversale afin de pouvoir gérer des crises complexes ou faire face à des catastrophes naturelles ou d'origine humaine,

une coopération rigoureuse entre les agences de l'Union, notamment en améliorant encore l'échange d'information entre elles,

une priorité pour la mise en œuvre et à la rationalisation, ainsi que pour l'amélioration des actions préventives,

le recours aux initiatives et à la coopération régionales,

la sensibilisation des citoyens à l'importance de ce qui est accompli par l'UE aux fins de leur protection.

L'élaboration, le suivi et la mise en œuvre de la stratégie de sécurité intérieure devrait devenir une des missions prioritaires du COSI institué en vertu de l'article 71 du TFUE. Pour que cette stratégie soit mise en œuvre avec efficacité, elle devra aussi couvrir le volet sécurité d'une gestion intégrée des frontières et, le cas échéant, la coopération judiciaire en matière pénale dans la mesure où celle-ci concerne la coopération opérationnelle dans le domaine de la sécurité intérieure.

La stratégie de sécurité intérieure devrait aussi tenir compte de la stratégie de sécurité extérieure élaborée par l'Union, ainsi que par d'autres politiques de l'Union, en particulier celles qui ont trait au marché intérieur. Il faudrait prendre en compte également l'incidence qu'elle pourrait avoir sur les relations avec les pays voisins de l'Union et en particulier les pays candidats et candidats potentiels, étant donné que la sécurité intérieure est tributaire de la dimension extérieure des menaces. Dans le contexte de la mondialisation, la criminalité ignore les frontières. À mesure que les politiques suivies dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice atteignent un certain degré de maturité, elles devraient se consolider mutuellement et gagner en cohérence. Dans les années à venir, elles devraient prendre leur place sans heurts aux côtés des autres politiques de l'Union.

Le Conseil européen demande à la Commission:

d'examiner s'il est possible de créer un fonds pour la sécurité intérieure permettant de promouvoir la mise en œuvre de la stratégie de sécurité intérieure afin que celle-ci prenne corps au niveau opérationnel.

4.2.   Disposer de meilleurs outils

La sécurité dans l'Union passera par une approche intégrée: les professionnels de la sécurité doivent partager une culture commune, mettre en commun des informations d'une manière aussi efficace que possible et pouvoir compter sur l'infrastructure technologique qui convient.

4.2.1.   Créer une culture commune

Le Conseil européen souligne qu'il faut renforcer la confiance mutuelle entre tous les professionnels concernés au niveau national et de l'Union. Il faudrait développer une véritable culture européenne en matière de maintien de l'ordre par l'échange d'expériences et de bonnes pratiques et par l'organisation de programmes de formation et d'exercices communs, selon les dispositions du point 1.2.6.

Le Conseil européen encourage les États membres à concevoir des mécanismes d'incitations pour encourager les professionnels concernés à endosser des fonctions liées à la coopération transfrontière, et à favoriser de la sorte une mobilisation à tous les niveaux à l'échelle de l'Union.

4.2.2.   Maîtriser l'information

Le Conseil européen note avec satisfaction que les innovations intervenues ces dernières années dans l'Union ont permis de disposer d'un choix très large d'outils pour collecter et traiter les informations et les échanger entre autorités nationales et avec d'autres acteurs européens dans l'espace de liberté, de sécurité et de justice. Le principe de disponibilité continuera d'imprimer un élan important à ces travaux.

Le Conseil européen relève que le développement de la gestion et des échanges d'informations doit se faire de manière cohérente et structurée, et il invite le Conseil et la Commission:

à mettre en œuvre une stratégie de gestion de l'information pour la sécurité intérieure de l'Union (4), qui prévoie un dispositif renforcé de protection des données. L'évolution doit être compatible avec les priorités fixées pour l'espace de liberté, de sécurité et de justice et la stratégie de sécurité intérieure, et correspondre à la conception qu'ont les utilisateurs de la coopération en matière répressive et judiciaire, de la gestion des frontières et de la protection des citoyens.

Par conséquent, le Conseil européen invite la Commission:

à évaluer la nécessité de mettre au point un modèle européen en matière d'échange d'informations, à partir d'une évaluation des instruments existants, y compris la décision 2008/615/JAI du Conseil du 23 juin 2008 relative à l'approfondissement de la coopération transfrontalière, notamment en vue de lutter contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière et la décision 2008/616/JAI du Conseil du 23 juin 2008 concernant la mise en œuvre de la décision 2008/615/JAI (décision-cadre «Prüm») et la décision-cadre 2006/960/JAI du Conseil du 18 décembre 2006 relative à la simplification de l'échange d'informations et de renseignements entre les services répressifs des États membres de l'Union européenne (dite «décision-cadre suédoise»). Cette évaluation permettra de déterminer si ces instruments fonctionnent comme il était initialement prévu et s'ils répondent aux objectifs de la stratégie en matière de gestion de l'information.

La stratégie de gestion de l'information pour la sécurité intérieure de l'Union repose sur les éléments suivants:

un développement obéissant à des considérations pragmatiques (le développement de l'échange d'informations et de ses outils répond aux besoins en matière répressive),

un solide système de protection des données, compatible avec la stratégie pour la protection des données à caractère personnel visée au point 2,

un mode de collecte bien ciblé, tant pour protéger les droits fondamentaux des citoyens que pour éviter que les autorités compétentes ne soient submergées d'informations,

des principes directeurs pour une politique d'échange d'informations avec les pays tiers à des fins de maintien de l'ordre,

l'interopérabilité des systèmes d'information, en assurant le plein respect des principes en matière de protection et de sécurité des données lors du développement de ces systèmes,

une rationalisation des différents outils, y compris l'adoption d'un plan de développement pour les systèmes d'information à grande échelle,

une coordination, une convergence et une cohérence générales.

Les structures nécessaires doivent être en place aux niveaux national et de l'Union pour assurer la mise en œuvre et la gestion des différents outils de gestion de l'information. Le Conseil européen demande également que soit créée, comme le propose la Commission, une administration dotée des compétences et de la capacité nécessaires pour développer techniquement et gérer des systèmes d'information à grande échelle dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice comme cela est mentionné dans les déclarations communes du Parlement européen, du Conseil et de la Commission de décembre 2006 et octobre 2007. D'autres missions éventuelles devraient être envisagées par le Conseil, compte tenu de la stratégie de gestion de l'information.

À la lumière des discussions qui ont eu lieu au Conseil et au Parlement européen, en vue de la création d'un système de dossiers passagers de l'Union (données PNR), le Conseil européen demande à la Commission:

de proposer, sur la base d'une analyse d'impact, un instrument de l'Union concernant les dossiers passagers, qui garantisse un niveau élevé de protection des données, aux fins de la prévention, de la détection, des enquêtes et des poursuites relatives aux infractions terroristes et aux crimes graves.

4.2.3.   Mobiliser les outils technologiques nécessaires

Le Conseil européen souligne que de nouvelles technologies sont nécessaires, tout en assurant la cohérence avec la stratégie pour la protection des données à caractère personnel visée au point 2, pour pouvoir suivre et promouvoir les tendances actuelles, qui vont dans le sens d'une mobilité accrue tout en assurant la sécurité et la liberté des personnes.

Le Conseil européen invite le Conseil, la Commission, le Parlement européen le cas échéant, et les États membres:

à élaborer et à mettre en œuvre des mesures permettant d'assurer un niveau élevé de sécurité des réseaux et de l'information dans toute l'Union et à améliorer les mesures devant assurer la protection, ainsi que l'état de préparation et la résilience des infrastructures critiques en termes de sécurité, y compris celles qui servent aux technologies de l'information et de la communication (TIC) et aux services,

à favoriser une législation qui permette d'assurer un niveau très élevé de sécurité des réseaux et de réagir plus rapidement en cas de cyber-attaque.

Le Conseil européen invite également le Conseil et la Commission:

à veiller à ce que les priorités de la stratégie de sécurité intérieure soient adaptées aux besoins réels des utilisateurs et portent notamment sur l'amélioration de l'interopérabilité. La recherche et développement dans le domaine de la sécurité devrait pouvoir s'appuyer sur des partenariats public-privé.

Le Conseil européen invite:

les États membres à mettre en œuvre dans les meilleurs délais le système européen d'information sur les casiers judiciaires (ECRIS),

la Commission à étudier si l'interconnexion des casiers judiciaires permet de prévenir des infractions pénales (par exemple, par des contrôles pour l'accès à certains emplois, particulièrement ceux qui supposent des contacts avec des enfants) et s'il est possible d'étendre l'échange d'informations sur les mesures de contrôle;

la Commission à proposer, parallèlement à ECRIS, un registre des ressortissants de pays tiers ayant fait l'objet de condamnations dans les États membres.

Le Conseil européen rappelle qu'il est nécessaire d'assurer la cohérence avec la stratégie de protection des données à caractère personnel et le plan de développement pour les systèmes d'information à grande échelle visés au point 2, et demande à la Commission:

de réaliser une étude de faisabilité sur la nécessité et la valeur ajoutée de la mise en place d'un système européen d'information sur les registres de la police (EPRIS) et de faire rapport au Conseil dans le courant de 2012 sur la question,

de réfléchir à la manière de développer davantage l'utilisation des bases de données existantes à des fins répressives, dans le respect intégral des règles en matière de protection des données, de manière à utiliser pleinement les nouvelles technologies en vue de protéger les citoyens,

d'examiner la meilleure manière de faire en sorte que les autorités compétentes des États membres puissent échanger des informations sur les déplacements des délinquants violents, y compris ceux qui assistent à des manifestations sportives ou participent à de grands rassemblements publics.

4.3.   Des politiques efficaces

4.3.1.   Renforcer l'efficacité de la coopération européenne en matière répressive

L'objectif premier de la coopération en matière répressive au niveau de l'Union est de lutter contre les formes de criminalité qui ont généralement une dimension transfrontalière. Il conviendrait de mettre l'accent non seulement sur la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée, mais aussi sur la lutte contre la criminalité transfrontalière de grande ampleur, qui ont une incidence importante sur la vie quotidienne des citoyens de l'Union. Europol devrait devenir le centre névralgique de l'échange d'informations entre les services répressifs des États membres et jouer le rôle de prestataire de services et de plate-forme pour les services répressifs.

Le Conseil européen encourage les autorités compétentes des États membres à utiliser autant que possible, dans les cas appropriés, l'outil d'investigation que constituent les équipes communes d'enquête (ECE). Europol et Eurojust devraient être systématiquement associés aux opérations transfrontalières d'envergure et être informés lorsque des ECE sont constituées. Le modèle d'accord pour la création d'une équipe commune d'enquête devrait être actualisé. Europol et Eurojust devraient renforcer davantage leur coopération. Eurojust devrait faire en sorte que son action ait un prolongement judiciaire. Europol et Eurojust devraient développer leur travail avec les pays tiers, notamment en forgeant des liens plus étroits avec les régions et pays voisins de l'Union; Europol devrait coopérer plus étroitement avec les missions de police menées dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC) et contribuer à promouvoir des normes et des bonnes pratiques pour la coopération européenne en matière répressive en dehors de l'Union. La coopération avec Interpol devrait être renforcée en vue de créer des synergies et d'éviter les doubles emplois.

Le Conseil européen invite la Commission et, le cas échéant, le Conseil et le haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité:

à examiner comment il pourrait être fait en sorte qu'Europol reçoive des informations des services répressifs des États membres de manière à ce que les États membres puissent pleinement profiter des capacités d'Europol,

à examiner comment la coopération policière pourrait être renforcée au niveau opérationnel, par exemple en favorisant la compatibilité des systèmes de communication ou d'autres équipements et le recours à des agents infiltrés, et, le cas échéant, à tirer des conclusions d'ordre opérationnel à cet effet,

à diffuser dans les meilleurs délais un document de réflexion sur la meilleure manière de faire en sorte que les activités d'Europol puissent être examinées et évaluées par le Parlement européen, avec les parlements nationaux, conformément aux articles 85 et 88 du TFUE,

à envisager d'élaborer un code de coopération policière qui ferait la synthèse des instruments existants et, si nécessaire, les modifierait et les simplifierait,

à faire une proposition au Conseil et au Parlement européen pour l'adoption d'une décision sur les modalités de coopération, y compris sur l'échange d'informations entre les agences de l'Union, en particulier Europol, Eurojust et Frontex, qui assure la protection des données et la sécurité,

à proposer des mesures sur la manière dont les agences concernées de l'Union pourraient conclure des arrangements opérationnels entre elles et sur la manière dont elles devraient développer leur participation aux initiatives régionales menées par les États membres et dans les instances régionales qui favorisent la coopération en matière répressive,

à arrêter des normes de qualité communes en matière de police scientifique, notamment afin d'établir les meilleures pratiques qui soient pour les investigations à mener sur les scènes de crimes,

à examiner s'il y a des obstacles à la coopération entre les missions de police menées dans le cadre de la PSDC et Europol et à formuler des propositions appropriées pour éliminer ces obstacles.

L'Union devrait promouvoir, notamment par des programmes de financement, des projets pilotes de coopération régionale transfrontalière consacrés à des activités opérationnelles communes et/ou à des évaluations transfrontalières des risques, tels que des centres communs de police et de douane.

Il faudrait développer une coopération ad hoc pour assurer le maintien de l'ordre lors de manifestations sportives ou de grands rassemblements publics (par exemple, les jeux Olympiques de 2012 ou l'Euro 2012).

4.3.2.   Renforcer l'efficacité de la prévention de la criminalité

Le meilleur moyen de réduire le taux de criminalité est de prendre des mesures efficaces pour que les infractions ne se produisent pas, notamment en favorisant l'insertion sociale, en ayant recours à une approche pluridisciplinaire qui comprenne également la prise de mesures administratives et la promotion de la coopération entre les autorités administratives. Les citoyens de l'Union ont de la criminalité des expériences similaires et subissent dans leur vie quotidienne les mêmes effets de la criminalité et de l'insécurité qui y est liée.

On prend de plus en plus conscience des liens entre la criminalité locale, d'une part, et la criminalité organisée et ses complexes aspects transfrontaliers, d'autre part. Les États membres ont élaboré des méthodes différentes pour prévenir la criminalité; il faudrait les inciter à échanger leurs expériences et leurs bonnes pratiques et à accroître de la sorte les connaissances de tous et l'efficacité du travail de chacun, évitant ainsi les doubles emplois.

En outre, la dimension transfrontalière montre combien il est important de disposer, au niveau européen, d'un éclairage plus large et plus précis sur les liens qui existent entre les deux dimensions de la criminalité dans les États membres, afin d'aider ces derniers lorsqu'ils sont amenés à agir à titre individuel ou collectif et de faire intervenir les institutions de l'Union lorsque cela est jugé nécessaire. Dans le traité de Lisbonne, la coopération en matière de prévention de la criminalité sera davantage reconnue, une nouvelle base juridique lui étant conférée.

Le Conseil européen invite les États membres et la Commission à encourager et appuyer activement des mesures de prévention de la criminalité axées sur la prévention de la criminalité de masse et de la criminalité transfrontalière affectant la vie quotidienne de nos citoyens, conformément à l'article 84 du TFUE.

Le Conseil européen invite la Commission à présenter une proposition fondée sur l'évaluation des travaux accomplis par le réseau européen de prévention de la criminalité (REPC) en vue de créer un observatoire pour la prévention de la criminalité (OPC), qui sera chargé de collecter, d'analyser et de diffuser les connaissances sur la criminalité, notamment la criminalité organisée (y compris les statistiques) et les moyens de la prévenir, de soutenir et d'encourager les États membres et les institutions de l'Union lorsqu'ils prennent des mesures préventives, et d'échanger les meilleures pratiques. Cet observatoire devrait poursuivre les travaux réalisés par le REPC et leur évaluation. Il devrait inclure ou remplacer le REPC, son secrétariat étant assuré par une agence existante de l'Union et fonctionnant comme une unité distincte. Le Conseil européen invite la Commission;

à présenter, pour 2013 au plus tard, une proposition sur la création de l'OPC.

4.3.3.   Statistiques

Il est absolument indispensable de disposer de statistiques utiles, fiables et comparables (tant dans le temps qu'entre les États membres et les régions), entre autres pour pouvoir statuer en connaissance de cause sur la nécessité d'agir, la mise en œuvre des décisions et l'efficacité des mesures prises.

Le Conseil européen invite la Commission:

à poursuivre la mise au point d'outils statistiques permettant de mesurer la criminalité et les activités criminelles et à réfléchir à la manière de poursuivre, après 2010, les actions qui sont décrites et auront été en partie mises en œuvre dans le cadre du plan d'action de l'Union pour 2006-2010 sur l'élaboration d’une stratégie globale et cohérente de l’Union en vue de l’établissement de statistiques sur la criminalité et la justice pénale, ces statistiques étant de plus en plus nécessaires dans un certain nombre de domaines liés à la liberté, à la sécurité et à la justice.

4.4.   Protection contre la grande criminalité et la criminalité organisée

4.4.1.   Lutter contre la grande criminalité et la criminalité organisée

Tandis que la criminalité organisée continue de se mondialiser, il est de plus en plus important que les forces de l'ordre puissent travailler avec efficacité par-delà les frontières et les ressorts judiciaires. L'Union peut apporter une réelle valeur ajoutée à la lutte contre certains types de menace qui nécessitent un haut niveau d'action coordonnée. La lutte contre ces phénomènes criminels nécessitera un échange systématique d'informations, un recours important aux agences et aux outils d'investigation de l'Union et, le cas échéant, le développement de techniques communes d'investigation et de prévention et une coopération renforcée avec les pays tiers.

Le Conseil européen demande donc au Conseil et à la Commission:

d'adopter une stratégie de lutte contre la criminalité organisée dans le cadre de la stratégie de sécurité intérieure,

de fixer ses priorités en matière de politique pénale en précisant les types de criminalité contre lesquels il déploiera les outils qu'il aura développés, tout en continuant à utiliser le rapport intitulé «Évaluation de la menace que représente la criminalité organisée» (EMCO) et ses versions régionales.

Il convient de sélectionner les phénomènes criminels qu'il faut combattre en priorité au niveau européen. Le Conseil européen considère qu'il y a lieu de traiter en priorité dans les années à venir les types de criminalité ci-après.

4.4.2.   Traite des êtres humains

La traite des êtres humains et les filières d'immigration clandestine sont une forme extrêmement grave de criminalité, qui entraîne des violations des droits de l'homme et de la dignité humaine que l'Union ne saurait admettre. Le Conseil européen juge nécessaire de renforcer et d'améliorer la prévention de la traite des êtres humains et des filières d'immigration clandestine et la lutte contre ces phénomènes. Cela suppose une action coordonnée et cohérente qui aille au-delà du domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice et qui, tout en tenant compte des nouvelles formes d'exploitation, englobe les relations extérieures, la coopération au développement, les affaires sociales et l'emploi, l'éducation et la santé, l'égalité des sexes et la non-discrimination. Cette démarche devrait également passer par un large dialogue entre toutes les parties concernées, au premier rang desquelles la société civile, et se fonder sur une connaissance et une étude plus justes de la traite des êtres humains et des filières d'immigration clandestine au niveau de l'Union et au niveau international.

Dans ce contexte, la coopération et la coordination avec les pays tiers revêtent une importance cruciale. Il conviendrait d'exploiter pleinement le document d'orientation générale sur la lutte contre la traite des êtres humains, adopté par le Conseil le 30 novembre 2009.

Il est nécessaire que l'Union développe une politique d'ensemble contre la traite des êtres humains, visant à renforcer encore la mobilisation et les efforts de l'Union et des États membres pour prévenir la traite et lutter contre ce phénomène. Il faudra pour ce faire étoffer et renforcer les partenariats avec les pays tiers, améliorer la coordination et la coopération au sein de l'Union et avec les mécanismes de la dimension extérieure de l'Union, qui devraient faire partie intégrante de cette politique. Les progrès devraient également être évalués et le COSI être régulièrement informé de la coordination et de la coopération de la lutte contre la traite. La lutte contre la traite des êtres humains doit mobiliser tous les moyens d'action, conjuguant prévention, répression et protection des victimes, et être conçue pour combattre la traite vers, dans et depuis l'Union.

Le Conseil européen invite dès lors le Conseil à envisager la désignation d'un coordinateur de l'Union pour la lutte contre la traite des êtres humains (ATC) et, s'il en décide ainsi, à déterminer les modalités à cet effet de manière à ce que toutes les compétences de l'Union puissent être exploitées de manière optimale afin de parvenir à une politique d'ensemble de l'Union bien coordonnée en matière de lutte contre la traite des êtres humains.

Le Conseil européen demande:

l'adoption d'une nouvelle législation en matière de lutte contre la traite et de protection des victimes,

à la Commission d'étudier si la conclusion d'accords de coopération ad hoc avec certains pays tiers, sélectionnés par le Conseil, pourrait être un moyen d'améliorer la lutte contre la traite, et de faire des propositions en ce sens. Pour conclure de tels accords, l'Union pourrait en particulier mobiliser tous les leviers dont elle dispose, y compris les programmes de financement, la coopération en matière d'échange d'informations, la coopération judiciaire et les outils dans le domaine des migrations,

à Europol, avec l'aide des États membres, d'intensifier l'aide apportée à la collecte d'informations et à l'analyse stratégique, qui devrait s'effectuer en coopération avec les pays d'origine et de transit,

à Eurojust d'intensifier ses efforts pour coordonner les enquêtes menées par les autorités des États membres sur la traite des êtres humains,

à la Commission:

de proposer un nouvel arsenal de mesures pour protéger et aider les victimes, parmi lesquelles l'élaboration de mécanismes d'indemnisation, le retour en toute sécurité et l'aide à la réinsertion dans la société de leur pays d'origine en cas de retour volontaire ainsi que les mesures relatives à leur séjour; l'Union devrait établir des partenariats avec les principaux pays d'origine,

de proposer une action concertée pour mobiliser les services consulaires dans les pays d'origine en vue d'éviter la délivrance frauduleuse de visas. Des campagnes d'information destinées aux victimes potentielles, spécialement les femmes et les enfants, pourraient être menées dans les pays d'origine en coopération avec les autorités locales,

de proposer des mesures pour rendre plus efficaces les contrôles aux frontières afin de prévenir la traite des êtres humains, notamment des enfants.

4.4.3.   Exploitation sexuelle des enfants et pédopornographie

Protéger les enfants contre le risque d'abus sexuels est un élément important de la stratégie des droits de l'enfant.

Le Conseil européen invite:

le Conseil et le Parlement européen à adopter une nouvelle législation sur la lutte contre les abus sexuels, l'exploitation sexuelle des enfants et la pédopornographie,

la Commission à assortir cette législation, lorsqu'elle aura été adoptée, de mesures financées au titre du programme visant à promouvoir une utilisation plus sûre de l'internet (2009-2013),

la Commission à examiner comment les autorités compétentes des États membres pourraient échanger des informations sur les meilleures pratiques,

la Commission à étudier comment l'Union pourrait encourager des partenariats avec le secteur privé à cet égard et étendre au secteur financier les partenariats entre secteur public et secteur privé afin d'interrompre les transferts financiers liés aux sites internet proposant des contenus faisant intervenir des violences sur les enfants,

la Commission à développer le dispositif «Alerte enlèvement d'enfant» et à envisager la création d'un réseau d'alerte au niveau de l'Union en cas d'enlèvement d'enfant, afin de promouvoir la coopération entre les autorités compétentes des États membres, en vue d'assurer l'interopérabilité,

la Commission à étudier, afin de prévenir les violences sur les enfants, les moyens de renforcer la coopération entre les autorités compétentes des États membres pour réagir aux déplacements de pédophiles connus pour représenter une menace.

4.4.4.   Cybercriminalité

L'internet a considérablement facilité la communication et favorisé le développement et les interactions au niveau mondial. Dans le même temps, de nouveaux défis modernes sont apparus sous la forme de la cybercriminalité, des groupes criminels ayant effectivement tiré profit des nouvelles technologies. Cela a à son tour compliqué les enquêtes des services répressifs. L'Union devrait par conséquent favoriser les politiques et les actes législatifs permettant d'assurer un niveau très élevé de sécurité des réseaux et de réagir plus rapidement en cas de perturbation ou d'attaque informatique.

Les États membres devraient ratifier dès que possible la convention du Conseil de l'Europe de 2001 sur la cybercriminalité. Cette convention devrait devenir le cadre juridique de référence de la lutte contre la cybercriminalité au niveau mondial. Europol pourrait jouer un rôle à cet égard en tant que centre de ressources européen par la création d'une plate-forme européenne de signalement des infractions qui devrait aussi aider les plates-formes nationales de signalement des États membres à échanger les meilleures pratiques.

Le Conseil européen demande par ailleurs aux États membres:

d'apporter leur plein concours aux plates-formes nationales de signalement chargées de la lutte contre la cybercriminalité, et il souligne la nécessité de coopérer avec des pays n'appartenant pas à l'Union.

Le Conseil européen invite:

la Commission à prendre des mesures pour renforcer/améliorer les partenariats entre secteur public et secteur privé,

Europol à renforcer l'analyse stratégique relative à la cybercriminalité.

L'Union devrait aussi clarifier les règles de compétence et le cadre juridique applicables au cyberespace au sein de l'Union, y compris la manière d'obtenir des éléments de preuve afin de favoriser les enquêtes transfrontalières.

Le Conseil européen:

invite les États membres à améliorer la coopération judiciaire dans les affaires de cybercriminalité,

demande à la Commission de faire des propositions pour clarifier, si nécessaire, le cadre juridique en matière d'enquêtes dans le cyberespace au sein de l'Union.

La coopération devrait aussi gagner en efficacité pour ce qui est de la vente sur l'internet de produits pharmaceutiques de contrefaçon.

4.4.5.   Criminalité économique et corruption

L'Union doit réduire le nombre d'opportunités qu'offre à la criminalité organisée une économie mondialisée, en particulier dans un contexte de crise exacerbant la vulnérabilité du système financier, et se doter des moyens appropriés pour répondre à ces défis de manière efficace.

Le Conseil européen demande aux États membres et, le cas échéant, à la Commission:

d'accroître les moyens d'investigation financière et de combiner tous les instruments qu'offre le droit fiscal, civil ou pénal. L'analyse financière criminelle doit être développée en mutualisant les ressources, notamment en matière de formation. Il faudrait rendre la confiscation des avoirs des criminels plus efficace et renforcer la coopération entre les bureaux de recouvrement des avoirs,

d'identifier les avoirs des criminels de manière plus efficace et de les saisir et, si possible, d'envisager de la mettre à nouveau en circulation lorsqu'ils ont été trouvés dans l'espace commun de l'Union,

de continuer à développer l'échange d'informations entre les cellules de renseignement financier (CRF) dans la lutte contre le blanchiment d'argent. Dans le cadre du système européen de gestion de l'information, leurs analyses pourraient alimenter une base de données sur les transactions suspectes, par exemple au sein d'Europol,

de mobiliser et de coordonner les sources d'information en vue de repérer les transactions suspectes en espèces et de confisquer les produits du crime conformément à la convention du Conseil de l'Europe de 1990 relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, par exemple en adoptant une législation déterminant si les fonds sont légitimes ou non,

d'améliorer la répression de la fraude fiscale et de la corruption dans le secteur privé, ainsi que la détection précoce des comportements frauduleux d'abus de marché (tels que les délits d'initiés et la manipulation des marchés), de même que des détournements de fonds,

de faciliter l'échange de bonnes pratiques en matière de prévention et de répression, en particulier dans le cadre du réseau des bureaux de recouvrement des avoirs et du réseau de lutte contre la corruption.

Le Conseil européen invite la Commission:

à mettre au point des indicateurs, sur la base des systèmes existants et de critères communs, pour mesurer l'effet des mesures de lutte contre la corruption, en particulier dans les domaines relevant de l'acquis (marchés publics, contrôle financier, etc.), et à élaborer une politique globale de lutte contre la corruption, en étroite coopération avec le groupe d'États contre la corruption du Conseil de l'Europe (GRECO). La Commission devrait présenter, en 2010, un rapport au Conseil sur les modalités d'adhésion de l'UE au GRECO,

à envisager, en vue de prévenir la criminalité financière, des mesures visant à faciliter l'identification des ayants droit économiques détenteurs des avoirs et à augmenter la transparence des personnes morales et des arrangements légaux,

à renforcer la coordination entre les États membres dans le cadre des travaux de la convention des Nations unies contre la corruption (UNCAC), du GRECO et de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) dans le domaine de la lutte contre la corruption,

à réfléchir à la manière d'améliorer la prévention de la criminalité financière.

La contrefaçon représente un grave danger pour les consommateurs et les économies. L'Union doit effectuer d'autres études sur ce phénomène et veiller à ce qu'il soit davantage tenu compte des aspects relatifs à la répression dans les travaux du futur observatoire européen de la contrefaçon et du piratage. Le Conseil européen demande au Conseil et au Parlement européen d'examiner, dès que possible, la législation relative aux mesures pénales visant à assurer le respect des droits de propriété intellectuelle.

4.4.6.   Drogues

La stratégie antidrogue de l'Union (2005-2012) prône une approche globale et équilibrée, fondée sur la réduction simultanée de l'offre et de la demande. Cette stratégie arrivera à son terme au cours du programme de Stockholm. Elle devra être renouvelée sur la base d'une évaluation approfondie du plan d'action drogue de l'Union pour 2009-2012, menée par la Commission avec le soutien de l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies et d'Europol.

Cette stratégie renouvelée devrait être fondée sur trois principes:

l'amélioration de la coordination et de la coopération en utilisant tous les moyens disponibles en vertu du traité de Lisbonne, et en particulier avec les Balkans occidentaux, l'Amérique latine, les pays du partenariat oriental, l'Afrique de l'Ouest, la Russie, l'Asie centrale (y compris l'Afghanistan) et les États-Unis,

la mobilisation de la société civile, en particulier par le renforcement d'initiatives telles que l'action européenne en matière de drogue,

la contribution au travail de recherche et à la comparabilité des informations afin d'avoir accès à des données fiables.

Le Conseil européen invite le Conseil et la Commission à veiller à ce que la nouvelle stratégie antidrogue concourre à la stratégie de sécurité intérieure de l'Union et s'articule correctement avec d'autres instruments stratégiques, tels que l'EMCO, la future stratégie de lutte contre la criminalité organisée et les conclusions du Conseil sur la lutte contre les formes graves et organisées de criminalité.

4.5.   Terrorisme

Le Conseil européen juge que la menace terroriste reste importante et évolue constamment, du fait à la fois des efforts de la communauté internationale pour la combattre et des nouvelles perspectives qui se présentent. Nous ne devons pas baisser la garde contre ces odieux criminels.

Le respect de l'État de droit, des libertés et droits fondamentaux est un des principes sous lesquels se fonde la mobilisation générale de l'Union contre le terrorisme. Les mesures de lutte contre le terrorisme doivent être prises dans le plein respect des droits fondamentaux et des libertés fondamentales afin qu'elles ne puissent pas être remises en cause. Par ailleurs, toutes les parties concernées devraient éviter de stigmatiser un groupe déterminé de personnes et développer le dialogue interculturel afin de favoriser la connaissance et la compréhension réciproques.

L'Union doit veiller à ce que tous les instruments soient mobilisés dans la lutte contre le terrorisme, dans le plein respect des droits fondamentaux et des libertés fondamentales. Le Conseil européen réaffirme sa stratégie visant à lutter contre le terrorisme, fondée sur quatre axes de travail – prévenir, poursuivre, protéger et réagir – et préconise un renforcement de l'axe «prévention».

Le Conseil européen confirme l'importance du rôle joué par le coordinateur de l'UE pour la lutte contre le terrorisme, qui veille à la mise en œuvre et à l'évaluation de la stratégie de lutte contre le terrorisme, coordonne les travaux au sein de l'Union en matière de lutte contre le terrorisme et favorise une meilleure communication entre l'Union et les pays tiers.

Le Conseil européen demande:

aux États membres d'élaborer des mécanismes de prévention, en particulier pour permettre la détection précoce des signes de radicalisation ou des menaces, y compris celles qui émanent de mouvements extrémistes violents et militants,

à la Commission, au Conseil et aux États membres d'améliorer les initiatives visant à empêcher la radicalisation de toutes les populations vulnérables, sur la base d'une évaluation de l'efficacité des politiques nationales. Les États membres devraient recenser les bonnes pratiques et les instruments opérationnels spécifiques qu'ils pourraient partager avec d'autres États membres. Parmi les nouveaux domaines d'action pourraient figurer l'intégration et la lutte contre la discrimination,

aux États membres, aux institutions publiques et à la Commission, ainsi qu'à la société civile, d'accroître leurs efforts et de coopérer encore plus étroitement, en particulier au niveau local, afin d'appréhender tous les facteurs à l'origine de ce phénomène et de promouvoir des stratégies incitant à renoncer au terrorisme. À cet effet, il faudrait mettre en place un réseau de spécialistes locaux, et des réseaux devraient être créés pour échanger les pratiques en matière de prévention.

Le Conseil européen souligne combien il est important de mieux comprendre les méthodes utilisées pour la diffusion de la propagande terroriste, y compris sur l'internet. Pour ce faire, il sera nécessaire de disposer de meilleures ressources techniques et d'un savoir-faire amélioré. Il faut intensifier les travaux dans le domaine de la sécurité des transports aériens et maritimes, parallèlement à l'analyse de la menace et en étroite coopération avec les transporteurs afin d'atténuer l'impact sur les voyageurs. Il faudrait accorder une plus grande attention aux cibles potentielles que sont, par exemple, les réseaux urbains de transports publics et les liaisons ferroviaires à grande vitesse, ainsi que les infrastructures énergétiques et d'approvisionnement en eau.

Le Conseil européen estime que les instruments destinés à lutter contre le financement du terrorisme doivent être adaptés aux nouvelles failles potentielles du système financier, de même qu'à la contrebande d'argent liquide et aux abus en matière de services financiers, et aux nouveaux modes de paiement utilisés par les terroristes.

Le Conseil européen demande à la Commission:

de promouvoir une transparence et une responsabilité accrues pour les organismes caritatifs afin de respecter la recommandation spéciale VIII du groupe d'action financière (GAFI),

de tenir compte des nouveaux modes de paiement lors de l'élaboration/de la mise à jour des mesures de lutte contre le financement du terrorisme,

d'examiner les moyens permettant de tracer le financement du terrorisme au sein de l'Union,

de présenter des mesures pour améliorer le retour d'information vers les institutions financières concernant les résultats de leur coopération dans la lutte contre le financement du terrorisme.

L'Union doit veiller à ce que ses politiques soient parfaitement conformes au droit international, en particulier dans le domaine des droits de l'homme. Elle jouera un rôle actif dans la lutte contre le terrorisme dans différentes enceintes multilatérales, et en particulier aux Nations Unies (ONU), où elle continuera à œuvrer avec ses partenaires en faveur d'une convention générale sur le terrorisme international et s'emploiera à améliorer la nature, la mise en œuvre et l'efficacité des sanctions arrêtées par le Conseil de sécurité de l'ONU en vue de respecter les droits fondamentaux et les libertés fondamentales et de garantir des procédures équitables et sans ambiguïté. Il faut renforcer la coopération avec les pays tiers en général et au sein des organisations internationales en particulier.

Pour pouvoir analyser les menaces au niveau européen, il faudrait établir une méthodologie fondée sur des paramètres communs. Il faudrait exploiter pleinement les possibilités qu'offrent Europol, le SITCEN et Eurojust dans la lutte contre le terrorisme.

Il convient de mettre en œuvre le plan d'action de l'Union sur le renforcement de la sécurité des explosifs et d'assurer une meilleure information sur la sécurité des explosifs. Il faudrait élaborer un cadre législatif pour couvrir les dangers liés aux précurseurs.

4.6.   Gestion globale et efficace des catastrophes par l'Union: renforcer les capacités de l'Union pour prévenir tout type de catastrophe, s'y préparer et y réagir

Les catastrophes naturelles ou d'origine humaine, telles que les incendies de forêt, les tremblements de terre, les inondations et les tempêtes, ainsi que les attentats terroristes, ont une incidence croissante sur la sécurité et la sûreté des citoyens et imposent un renforcement de l'action de l'Union dans leur gestion.

La gestion des catastrophes par l'Union devrait se fonder sur une approche intégrée, couvrant toutes les phases d'une catastrophe et englobant la prévention, la préparation, la réaction et la réhabilitation, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'Union.

La gestion des catastrophes par l'Union est fondée sur deux principes essentiels: d'une part, la responsabilité des États membres pour ce qui est de fournir à leurs citoyens la protection nécessaire au vu des risques et menaces existants et, d'autre part, la solidarité entre les États membres pour ce qui est de se porter mutuellement assistance aussi bien avant, que pendant et après les catastrophes, si l'ampleur de celles-ci dépasse les capacités nationales ou si elles touchent plusieurs États membres. Le Conseil européen estime que l'action future de l'Union devrait viser à réduire la vulnérabilité face aux catastrophes en élaborant une approche stratégique à l'égard de leur prévention et en améliorant encore les dispositifs de préparation et de réaction, dans le respect des compétences nationales. Il faudrait élaborer des lignes directrices sur les méthodes de cartographie des dangers/risques et les évaluations et analyses en la matière et dresser un inventaire des risques naturels ou d'origine humaine auxquels l'Union pourrait se trouver confrontée à l'avenir. Il faut poursuivre les efforts déployés pour renforcer le mécanisme de protection civile de l'Union et améliorer les instruments de la protection civile, notamment en termes de disponibilité et d'interopérabilité, ainsi que de recours et de soutien à la coordination des interventions, également en-dehors du territoire de l'Union dans les situations d'urgence graves touchant des citoyens de l'Union qui se trouvent à l'étranger. Le centre de suivi et d'information (CSI) devrait être renforcé afin d'améliorer la coordination des interventions des États membres, de leur fournir un soutien en matière de cartographie et d'analyse pour la poursuite du recensement et de l'enregistrement des modules de protection civile nationaux et multinationaux, et de mettre au point des formations et des exercices qui permettront à l'Union de réagir efficacement aux catastrophes.

Réduire la vulnérabilité aux attentats est un des principaux objectifs que poursuit l'Union dans le cadre de son action destinée à protéger ses infrastructures critiques. Une fois qu'elle aura été mise en œuvre, la directive 2008/114/CE du Conseil du 8 décembre 2008 concernant le recensement et la désignation des infrastructures critiques européennes ainsi que l'évaluation de la nécessité d'améliorer leur protection sur les infrastructures critiques devrait être analysée et évaluée en temps utile afin d'envisager l'opportunité d'y inclure de nouveaux secteurs.

La menace nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique (NRBC), et en particulier le risque que des groupes terroristes utilisent des matériaux NRBC, a incité les États membres et l'Union à agir. L'objectif général de la politique en matière de sécurité NRBC est de présenter une stratégie européenne qui soit hiérarchisée, pertinente et efficace pour améliorer la protection des citoyens de l'Union contre des incidents faisant intervenir des matériaux NRBC. Pour y parvenir, il est fondamental de mettre en œuvre le plan d'action NRBC de l'UE, fondé sur une approche «tous risques» et comprenant des mesures pour prévenir et détecter les incidents de grande ampleur impliquant des matériaux NRBC à haut risque, s'y préparer et y réagir.

Les travaux de recherche seront de plus en plus importants pour étayer tous les aspects de la gestion des catastrophes. Il conviendra d'analyser les possibilités de mener des travaux de recherche au titre du septième programme-cadre de recherche et de développement technologique pour la période 2007-2013 et des programmes ultérieurs et de formuler des propositions appropriées pour concourir à la réalisation de cet objectif.

Pour les interventions dans les pays tiers, tant sur le terrain qu'en termes de préparation (formation, exercices communs), il faudrait continuer à travailler, en priorité, en étroite coopération avec les organisations internationales, en particulier avec l'ONU, qui ont un rôle global de coordination de l'action humanitaire internationale. Conformément au consensus européen sur l'aide humanitaire de 2007, une coordination plus poussée et une grande détermination de la part de l'Union renforceraient le niveau général des interventions humanitaires internationales, y compris les initiatives concertées visant à améliorer le système humanitaire, ce qui favoriserait par ailleurs l'aspiration de l'Union à coopérer étroitement avec les autres acteurs humanitaires. La sécurité de l'Union nécessite une coopération et un dialogue permanents avec les pays tiers, et en particulier avec les pays voisins et les pays susceptibles de devenir des États membres. Les initiatives de plus en plus nombreuses que prend l'Union pour renforcer la coopération régionale, par exemple à l'égard de la Méditerranée, de la zone de la mer Baltique et de la région de la mer Noire, ainsi que le partenariat oriental visent à y contribuer.

5.   ACCÈS À L'EUROPE À L'HEURE DE LA MONDIALISATION

5.1.   Gestion intégrée des frontières extérieures

L'Union doit continuer à faciliter l'accès légal au territoire de ses États membres et, dans le même temps, prendre des mesures pour contrer l'immigration illégale et la criminalité transfrontière et préserver un niveau élevé de sécurité. Le renforcement des contrôles aux frontières ne devrait pas empêcher que les personnes ayant besoin de bénéficier de systèmes de protection puissent y accéder, et notamment les personnes et les groupes se trouvant en situation vulnérable. Les besoins en matière de protection internationale ainsi que l'accueil des mineurs non accompagnés devront constituer à cet égard des priorités. Il est essentiel que les activités de l'agence Frontex et du BEAA soient coordonnées lorsqu'il s'agit de l'accueil des migrants aux frontières extérieures de l'Union. Le Conseil européen préconise de développer encore la gestion intégrée des frontières, notamment de renforcer le rôle de l'agence Frontex afin d'améliorer sa capacité de répondre plus efficacement aux variations des flux migratoires.

Par conséquent, le Conseil européen:

demande à la Commission de présenter, au plus tard début 2010, des propositions visant à préciser le mandat de l'agence Frontex et à renforcer son rôle, qui tiennent compte des résultats de l'évaluation dont l'agence a fait l'objet et du rôle et des responsabilités des États membres en matière de surveillance des frontières. Les éléments de ces propositions pourraient porter sur l'élaboration de procédures opérationnelles communes claires qui énoncent des règles claires d'engagement concernant la participation à des opérations conjointes en mer, tenant dûment compte de la nécessité d'assurer la protection des personnes en ayant besoin qui se déplacent au sein de flux mixtes, conformément au droit international ainsi qu'une coopération opérationnelle accrue entre l'agence Frontex et les pays d'origine et de transit et l'examen de la possibilité d'affréter régulièrement des vols de retour communs financés par l'agence Frontex. Afin de favoriser la bonne application du cadre réglementaire applicable aux opérations de l'agence Frontex, la Commission devrait envisager de prévoir un mécanisme de signalement et d'enregistrement des incidents dont le suivi puisse être assuré de manière satisfaisante par les autorités compétentes,

invite l'agence Frontex à envisager, dans le cadre de son mandat, d'ouvrir des bureaux régionaux et/ou spécialisés afin de prendre en compte la diversité des situations, en particulier pour les frontières terrestres de l'est et les frontières maritimes du sud. La création de ces bureaux ne devrait pas, en tout État de cause, porter atteinte à l'unicité de l'agence Frontex. Il conviendrait que l'agence informe le Conseil de son intention avant d'ouvrir ces bureaux,

invite la Commission à lancer un débat sur le développement à long terme de l'agence Frontex. Ce débat devrait porter, comme cela a été envisagé dans le programme de La Haye, sur la faisabilité de créer un système européen de garde-frontières,

invite le bureau européen d'appui en matière d'asile à élaborer des méthodes permettant de mieux identifier, dans des flux mixtes, les personnes qui ont besoin d'une protection internationale, et à coopérer autant que possible avec l'agence Frontex,

estime que l'évaluation portant sur l'espace Schengen continuera à jouer un rôle essentiel et qu'elle devrait donc être améliorée en renforçant le rôle de l'agence Frontex dans ce domaine,

invite le Conseil et la Commission à soutenir le renforcement des capacités dans les pays tiers, de manière qu'ils puissent contrôler efficacement leurs frontières extérieures.

Le Conseil européen escompte que le développement progressif du système européen de surveillance des frontières (Eurosur) aux frontières méridionales et orientales se poursuivra, dans le but de mettre en place un système faisant appel aux technologies modernes et appuyant les États membres, favorisant l'interopérabilité et des normes uniformes de surveillance des frontières, et en vue de garantir que la coopération nécessaire soit établie entre les États membres et avec l'agence Frontex pour pouvoir échanger sans délai les données nécessaires à la surveillance. Ce développement devrait tenir compte des travaux effectués dans d'autres volets pertinents de la politique maritime intégrée pour l'Union européenne et permettre, à moyen terme, une coopération avec des pays tiers. Le Conseil européen invite la Commission à présenter les propositions nécessaires à la réalisation de ces objectifs.

Le Conseil européen prend note des études menées actuellement par les États membres et l'agence Frontex dans le domaine du contrôle automatisé des frontières et les encourage à poursuivre leurs travaux pour définir les meilleures pratiques permettant d'améliorer le contrôle des frontières extérieures.

Le Conseil européen invite également les États membres et la Commission à étudier comment les différents types de contrôles effectués à la frontière extérieure peuvent être mieux coordonnés, intégrés et rationalisés en vue d'atteindre le double objectif qui consiste à faciliter l'accès tout en améliorant la sécurité. Il faudrait par ailleurs examiner les possibilités d'améliorer les échanges d'informations et de resserrer la coopération entre les gardes-frontières et les autres services répressifs opérant à l'intérieur du territoire, afin d'accroître l'efficacité pour toutes les parties concernées et de lutter plus efficacement contre la criminalité transfrontière.

Le Conseil européen estime que la technologie peut jouer un rôle déterminant pour ce qui est d'améliorer et de renforcer le système des contrôles aux frontières extérieures. La mise en service du système d'information de Schengen de deuxième génération (SIS II) et le déploiement du système d'information sur les visas (VIS) demeurent dès lors un objectif prioritaire, et le Conseil européen demande à la Commission et aux États membres de veiller à ce qu'ils deviennent pleinement opérationnels conformément aux calendriers qui seront fixés à cet effet. Avant de créer de nouveaux systèmes, il conviendrait d'évaluer lesdits systèmes ainsi que les autres systèmes existants et de tirer les leçons des difficultés rencontrées lors de leur mise en place. La mise en place d'une administration pour les systèmes d'information à grande échelle pourrait jouer un rôle essentiel dans l'éventuel développement de tels systèmes à l'avenir.

Le Conseil européen est d'avis qu'un système d'enregistrement électronique des entrées dans les États membres et des sorties pourrait compléter les systèmes existants, le but étant de permettre aux États membres de partager des données de manière efficace tout en garantissant le respect des règles de protection des données. L'introduction du système aux frontières terrestres mérite une attention particulière et il conviendrait d'analyser ses conséquences en termes d'infrastructures et de files d'attente aux frontières avant sa mise en œuvre.

Les possibilités qu'offrent les nouvelles technologies interopérables ouvrent de grandes perspectives pour ce qui est de rendre la gestion des frontières plus efficace et plus sûre, mais elles ne devraient pas entraîner de discrimination ou d'inégalité de traitement des passagers. On citera notamment l'utilisation de barrières permettant le contrôle automatisé des frontières.

Le Conseil européen invite la Commission:

à présenter des propositions concernant un système d'entrée/de sortie, couplé à un programme d'enregistrement des voyageurs avec procédure rapide, l'objectif étant qu'un système de ce type soit opérationnel le plus rapidement possible,

à préparer une étude pour déterminer s'il est possible et utile de développer un système européen d'autorisation de voyage et, le cas échéant, faire les propositions nécessaires,

à poursuivre l'examen de la question du contrôle automatisé des frontières et d'autres questions liées à une efficacité accrue de la gestion des frontières.

5.2.   Politique des visas

Le Conseil européen estime que l'entrée en vigueur du code des visas et le déploiement progressif du VIS offriront de nouvelles possibilités non négligeables de poursuivre le développement de la politique commune en matière de visas. Cette politique doit également s'inscrire dans une vision plus large qui tienne compte des préoccupations pertinentes de politique intérieure et extérieure. Le Conseil européen encourage donc la Commission et les États membres à tirer parti de ces évolutions pour intensifier la coopération consulaire régionale par des programmes dans ce domaine, qui pourraient notamment prévoir la mise en place de centres communs de demande de visas, le cas échéant sur une base volontaire.

Le Conseil européen invite également:

la Commission et le Conseil à continuer d'étudier les possibilités créées par la conclusion, dans les cas appropriés, d'accords de facilitation en matière de visas avec des pays tiers,

la Commission à réexaminer périodiquement la liste des pays tiers dont les ressortissants sont ou ne sont pas soumis à une obligation de visa, en appliquant des critères appropriés liés, par exemple, à l'immigration illégale, l'ordre public et la sécurité, et qui tiennent compte des objectifs de politique intérieure et étrangère de l'Union,

la Commission à redoubler d'efforts pour garantir le principe de réciprocité en matière de visas et à prévenir l'introduction (ou la réintroduction) d'une obligation de visa par des pays tiers à l'égard d'un État membre et à déterminer les mesures susceptibles d'être prises avant d'imposer le mécanisme de réciprocité en matière de visas à l'égard de ces pays tiers.

En vue de créer les conditions qui permettront de passer à une nouvelle étape du développement de la politique commune en matière de visas tout en tenant compte des compétences des États membres dans ce domaine, le Conseil européen invite la Commission à présenter une étude sur la possibilité de créer un mécanisme européen commun de délivrance de visas de courte durée. Dans cette étude, il pourrait également être examiné dans quelle mesure une appréciation du risque individuel pourrait compléter la présomption de risque liée à la nationalité du demandeur.

6.   UNE EUROPE FAISANT PREUVE DE RESPONSABILITÉ ET DE SOLIDARITÉ ET TRAVAILLANT EN PARTENARIAT EN MATIÈRE D'IMMIGRATION ET D'ASILE

Le Conseil européen est conscient des opportunités, mais aussi des défis, qu'entraîne la mobilité croissante des personnes, et souligne qu'une migration bien gérée peut être bénéfiques pour toutes les parties concernées. Il fait également le constat que, vu les défis démographiques considérables auxquels l'Union sera confrontée à l'avenir, avec notamment une demande croissante de main-d'œuvre, des politiques d'immigration empreintes de souplesse seront d'un grand apport pour le développement et les performances économiques à long terme de l'Union. Le Conseil européen est d'avis que les conséquences à long terme des migrations, par exemple sur les marchés du travail et la situation sociale des migrants, doivent être prises en compte et que le lien entre migration et intégration demeure essentiel, notamment au regard des valeurs fondamentales de l'Union. Par ailleurs, il rappelle que la mise en place, d'ici à 2012, d'un régime d'asile européen commun (RAEC) reste un objectif prioritaire de l'Union.

Le Conseil européen demande que soit élaboré un cadre pour la politique d'asile et de migration de l'Union qui couvre l'ensemble des problématiques et qui s'inscrive dans la durée; ce cadre devrait permettre, dans un esprit de solidarité, de gérer de manière adéquate les fluctuations des flux migratoires et de les anticiper, et de faire face à des situations telles que celle qui se présente actuellement aux frontières extérieures du sud de l'Union. Il faut s'efforcer sérieusement d'établir et de renforcer le dialogue et le partenariat entre l'Union et les pays, régions et organisations tiers afin de pouvoir faire face avec plus d'efficacité et en connaissance de cause aux situations de ce type, étant entendu que l'immigration illégale dans l'Union passe aussi par d'autres frontières ou par une utilisation frauduleuse des visas. Un objectif important est d'éviter de nouvelles tragédies en mer. Pour les cas où, malheureusement, des situations tragiques surviennent, il conviendrait de chercher les moyens de mieux enregistrer et, si possible, identifier les migrants qui tentent de rejoindre l'Union.

Le Conseil européen est conscient qu'il faut trouver des solutions pratiques qui augmentent la cohérence entre les politiques migratoires et celles qui sont menées dans d'autres domaines, telles que la politique étrangère et de développement et les politiques relatives au commerce, à l'emploi, à la santé et à l'éducation au niveau européen. En particulier, le Conseil européen invite la Commission à étudier des mécanismes qui permettraient, dans une plus large mesure, d'établir des liens entre le développement de la politique migratoire et celui de la stratégie pour l'après-Lisbonne. Le Conseil européen constate qu'il faut que les ressources financières au sein de l'Union puissent être utilisées d'une manière de plus en plus souple et cohérente, tant en termes de portée que d'applicabilité, pour permettre à la politique en matière d'asile et de migration d'évoluer.

Le Conseil européen réaffirme les principes énoncés dans l'approche globale sur la question des migrations ainsi que dans le pacte européen sur l'immigration et l'asile. Il rappelle par ailleurs les conclusions adoptées à ce sujet, en juin et octobre 2009. Il souligne la nécessité de mettre en œuvre globalement l'ensemble des mesures et de les évaluer, ainsi qu'il a été convenu. Le Conseil européen rappelle les cinq engagements fondamentaux figurant dans le pacte, à savoir:

organiser l'immigration légale en tenant compte des priorités, des besoins et des capacités d'accueil déterminés par chaque État membre et favoriser l'intégration,

lutter contre l'immigration irrégulière, notamment en assurant le retour dans leur pays d'origine ou vers un pays de transit, des étrangers en situation irrégulière,

renforcer l'efficacité des contrôles aux frontières,

bâtir une Europe de l'asile,

créer un partenariat global avec les pays d'origine et de transit favorisant les synergies entre les migrations et le développement.

6.1.   Une politique migratoire dynamique et globale

6.1.1.   Consolider, développer et mettre en œuvre l'approche globale sur la question des migrations

Le Conseil européen a toujours souligné que la politique migratoire de l'Union devait faire partie intégrante de sa politique étrangère et relève que l'approche globale de l'Union sur la question des migrations a fait la preuve de son utilité en tant que cadre stratégique à cet effet. Sur la base des principes initiaux de solidarité, d'équilibre et de partenariat véritable avec les pays d'origine et de transit extérieurs à l'Union et dans le droit fil de ce qui a déjà été réalisé, le Conseil européen demande que cette approche intégrée soit encore développée et consolidée. Il faut accélérer la mise en œuvre de l'approche globale sur la question des migrations par une utilisation stratégique de tous ses instruments existants et l'améliorer par une coordination accrue. Il faut maintenir un équilibre entre ses trois dimensions (promouvoir la mobilité et la migration légale, optimiser le lien entre migration et développement, et prévenir et combattre l'immigration illégale). La coopération avec les principaux pays concernés d'Afrique et d'Europe de l'Est et du Sud-Est devrait demeurer prioritaire. Il faudrait développer davantage le dialogue et la coopération également avec d'autres pays et régions, par exemple en Asie et en Amérique latine, en partant des intérêts et défis communs recensés par les parties.

Dans cette optique, le Conseil européen insiste sur les priorités suivantes:

faire un usage stratégique et systématique, en s'appuyant sur des éléments d'information fiables, de tous les instruments disponibles de l'approche globale sur la question des migrations – profils migratoires, missions sur la question des migrations, plates-formes de coopération sur les migrations et le développement et partenariats pour la mobilité – pour mener une coopération à long terme sur toutes les dimensions de la politique migratoire, en partenariat étroit avec certains pays tiers ciblés situés le long des routes migratoires prioritaires,

poursuivre et étendre l'utilisation de l'instrument que constitue le partenariat pour la mobilité, qui est le principal cadre de coopération stratégique, global et à long terme pour gérer les migrations avec les pays tiers et qui apporte une valeur ajoutée par rapport aux cadres bilatéraux existants. Pour que ces partenariats puissent être mis en œuvre avec succès, il faut que la coordination soit améliorée et que les pays d'origine, de transit et de destination consentent des efforts importants pour se doter des capacités nécessaires. Le Conseil européen demande que l'instrument que constitue le partenariat pour la mobilité soit davantage développé, dans le respect de son caractère volontaire. Les partenariats devraient être souples et pouvoir répondre aux besoins de l'Union comme des pays partenaires et devraient prévoir une coopération dans tous les domaines couverts par l'approche globale sur la question des migrations,

utiliser plus efficacement les instruments de coopération dont l'Union dispose déjà pour accroître les moyens d'action des pays partenaires, afin que ces pays disposent d'infrastructures performantes et de capacités administratives suffisantes pour traiter tous les aspects de la migration, en améliorant notamment leur capacité d'offrir une protection adéquate et en multipliant les avantages et opportunités qu'offre la mobilité.

La bonne mise en œuvre de l'approche globale sur la question des migrations devrait s'appuyer sur des évaluations régulières, une mobilisation et des moyens accrus, ainsi que sur une utilisation plus souple des instruments financiers qui sont à la disposition tant de l'Union que des États membres dans ce domaine.

6.1.2.   Migration et développement

Le Conseil européen souligne qu'il faut prendre de nouvelles mesures pour maximiser les retombées positives des migrations sur le développement et en minimiser les effets négatifs, conformément à l'approche globale sur la question des migrations. Des dispositifs bien conçus peuvent fournir le cadre nécessaire pour que les pays de destination et les pays d'origine, ainsi que les migrants eux-mêmes, puissent travailler en partenariat pour amplifier les effets des migrations internationales sur le développement.

Les initiatives visant à promouvoir une mobilité et des migrations concertées avec les pays d'origine devraient être étroitement liées à celles qui visent à multiplier les possibilités d'exercer, dans les pays tiers, un travail décent et productif et d'avoir des moyens de subsistance plus satisfaisants, l'objectif étant de limiter la fuite des cerveaux.

À cette fin, le Conseil européen invite la Commission à présenter, avant 2012, des propositions sur les sujets suivants:

comment faire en sorte que les transferts de fonds des travailleurs immigrés puissent se faire dans des conditions efficaces, sûres et peu coûteuses, et que ces transferts contribuent davantage au développement, et évaluer s'il est possible de créer un portail commun de l'Union sur les transferts de fonds pour informer les migrants des coûts y afférents et encourager la concurrence entre les organismes qui assurent ces transferts,

comment les diasporas peuvent être davantage associées aux initiatives de l'Union en matière de développement, et comment les États membres peuvent aider les diasporas dans leurs efforts pour soutenir le développement dans leurs pays d'origine,

comment poursuivre l'examen du concept de migration circulaire et étudier les moyens de faciliter la circulation organisée des migrants, qu'elle s'inscrive ou non dans le cadre de projets ou programmes spécifiques, y compris par une étude approfondie de la manière dont les mesures prises dans les domaines d'action concernés peuvent favoriser l'augmentation de la mobilité temporaire ou circulaire ou jouer sur les conditions nécessaires à cet effet.

Le Conseil européen est conscient qu'il est nécessaire que l'action menée au niveau européen gagne en cohérence afin de renforcer les retombées positives des migrations pour le développement dans le cadre des activités de l'Union relevant de la dimension extérieure et d'établir un lien plus étroit entre migrations internationales et réalisation des objectifs du millénaire pour le développement. Le Conseil européen demande au Conseil de veiller à ce que son action dans ce domaine soit coordonnée et cohérente.

Il convient d'étudier plus avant les liens qui existent entre le changement climatique, les migrations et le développement; le Conseil européen invite donc la Commission à présenter une analyse des effets du changement climatique sur les migrations internationales, y compris les effets qu'il pourrait avoir sur l'immigration dans l'Union.

6.1.3.   Une politique concertée, en phase avec les besoins du marché du travail national

Le Conseil européen est conscient que l'immigration de main-d'œuvre peut contribuer à accroître la compétitivité et la vitalité de l'économie. Dans cette optique, il estime que l'Union devrait encourager la création de régimes d'admission flexibles, qui répondent aux priorités, besoins, nombres et volumes définis par chaque État membre et qui permettent aux migrants de valoriser pleinement leurs aptitudes et compétences. Afin de favoriser une meilleure adéquation entre l'offre et la demande de main-d'œuvre, il convient de mettre en place des politiques d'immigration cohérentes et d'effectuer des évaluations plus efficaces en termes d'intégration pour déterminer les aptitudes recherchées sur les marchés du travail européens. Les régimes en question doivent être établis dans le respect des compétences des États membres, notamment pour ce qui est de la gestion du marché du travail, et du principe de la préférence de l'Union européenne.

Le Conseil européen invite:

la Commission et le Conseil à continuer de mettre en œuvre le programme d'action relatif à l'immigration légale,

la Commission à étudier comment les sources et les réseaux d'information existants peuvent être utilisés plus efficacement pour que l'on dispose de données comparables sur les questions de migration, afin de mieux éclairer les choix de politique, en tenant compte également des évolutions récentes,

la Commission et le Conseil à évaluer les politiques existantes, devant notamment permettre d'améliorer la reconnaissance des compétences et l'adéquation entre l'offre et la demande de main-d'œuvre entre l'Union et les pays tiers ainsi que la capacité d'analyse des besoins du marché du travail, la transparence de l'information européenne mise en ligne en matière d'emploi et de recrutement, la formation, la diffusion de l'information et l'adéquation des compétences dans les pays d'origine,

la Commission à évaluer l'impact et l'efficacité des mesures adoptées en la matière afin de déterminer s'il est nécessaire de renforcer la législation existante, notamment en ce qui concerne les catégories de travailleurs qui, actuellement, ne relèvent pas de la législation de l'Union.

6.1.4.   Des mesures proactives en faveur des migrants et de leurs droits

L'Union doit garantir un traitement équitable des ressortissants de pays tiers en séjour régulier sur le territoire de ses États membres. Une politique d'intégration plus énergique devrait viser à accorder à ces personnes des droits et obligations comparables à ceux des citoyens de l'Union. Cet aspect devrait continuer à compter parmi les objectifs d'une politique d'immigration commune et devrait être réalisé dès que possible, et au plus tard en 2014.

Le Conseil européen invite donc la Commission à présenter des propositions concernant:

une synthèse de toute la législation dans le domaine de l'immigration, en commençant par la migration légale, qui serait fondée sur une évaluation de l'acquis existant et y apporterait les modifications nécessaires pour simplifier et/ou, au besoin, compléter les dispositions existantes et en améliorer la mise en œuvre et la cohérence,

une évaluation et, au besoin, une révision de la directive 2003/86/CE du Conseil du 22 septembre 2003 relative au droit au regroupement familial, en tenant compte de l'importance des mesures d'intégration.

6.1.5.   Intégration

Une intégration réussie des ressortissants de pays tiers en séjour régulier demeure indispensable pour tirer le meilleur parti possible de l'immigration. La coopération européenne peut contribuer à améliorer l'efficacité des politiques d'intégration des États membres, en stimulant et en appuyant l'action des États membres. L'objectif consistant à donner à tous des responsabilités, des chances et des droits comparables est au cœur de la coopération européenne en matière d'intégration, en tenant compte de la nécessité de trouver un juste équilibre entre les droits et les devoirs des migrants.

L'intégration est un processus dynamique et à double sens d'interaction réciproque, qui exige non seulement une mobilisation des autorités nationales, régionales et locales, mais aussi un plus grand investissement de la société d'accueil et des immigrants.

Les politiques d'intégration des États membres devraient être étayées par une poursuite du développement des structures et outils servant à l'échange de connaissances et à la coordination avec d'autres domaines d'action pertinents, tels que l'emploi, l'éducation et l'insertion sociale. L'accès à l'emploi est un élément fondamental d'une intégration réussie.

Le Conseil européen invite également la Commission à soutenir l'action des États membres:

par l'élaboration d'un mécanisme de coordination associant la Commission et les États membres et utilisant un cadre de référence commun, qui devrait améliorer les structures et les outils servant à l'échange de connaissances au niveau européen,

en incorporant d'une manière globale les questions liées à l'intégration dans les domaines d'action pertinents,

en vue de définir des pratiques communes et des modules européens pour faciliter le processus d'intégration, y compris des éléments essentiels comme des cours d'introduction et des cours de langues, un engagement fort de la société d'accueil et la participation active des immigrants à tous les aspects de la vie de la collectivité,

en vue d'élaborer une série de grands indicateurs dans un nombre limité de domaines d'action pertinents (par exemple, l'emploi, l'éducation et l'insertion sociale) pour observer les résultats des politiques d'intégration, afin d'accroître la comparabilité des expériences nationales et de renforcer le processus d'apprentissage européen,

en visant à améliorer la consultation et l'association de la société civile, en tenant compte des besoins en termes d'intégration dans les différents domaines d'action et en recourant au forum européen sur l'intégration et au site web de la Commission sur l'intégration,

en visant à renforcer les valeurs démocratiques et la cohésion sociale dans le cadre de l'immigration et de l'intégration des immigrants et à promouvoir le dialogue interculturel et les contacts à tous les niveaux.

6.1.6.   Des politiques performantes pour lutter contre l'immigration illégale

Le Conseil européen est convaincu que, dans le cadre de l'élaboration d'une politique d'immigration commune, lutter efficacement contre l'immigration illégale demeure fondamental. La lutte contre la traite des êtres humains et les filières d'immigration clandestine, la gestion intégrée des frontières et la coopération avec les pays d'origine et de transit, combinées à la coopération policière et judiciaire, doivent en particulier rester des priorités de premier plan à cet égard. Notre but doit être de prévenir les tragédies humaines qui découlent des activités des passeurs.

Une politique en matière de retour qui soit efficace et qui s'inscrive dans la durée est un élément essentiel d'un régime de migration bien géré au sein de l'Union. L'Union et les États membres devraient intensifier les efforts pour assurer le retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier. Les moyens financiers nécessaires devraient être affectés à ces opérations. Cette politique doit être mise en œuvre dans le plein respect du principe de «non-refoulement» ainsi que des droits et des libertés fondamentaux et de la dignité des personnes éloignées. Il convient de privilégier le retour volontaire, sachant qu'il faut inévitablement disposer de moyens efficaces pour contraindre les personnes au retour, si nécessaire.

Afin d'élaborer une approche globale en matière de retour et de réadmission, il faut améliorer la coopération avec les pays d'origine et de transit dans le cadre de l'approche globale de la question des migrations et conformément au pacte européen sur l'immigration et l'asile, tout en reconnaissant que tous les États sont tenus de réadmettre leurs propres ressortissants qui sont en séjour irrégulier sur le territoire d'un autre État.

Il est important d'assurer un suivi étroit de la mise en œuvre des instruments adoptés récemment dans le domaine du retour et des sanctions contre les employeurs, ainsi que des accords de réadmission en vigueur, afin d'en garantir la bonne application.

Le Conseil européen estime qu'il faut mettre l'accent sur les éléments suivants:

il faut encourager le retour volontaire, y compris en mettant en place des systèmes d'incitation et en proposant une formation, une réinsertion et une aide financière, ainsi qu'en utilisant les possibilités offertes par les instruments financiers existants,

il convient que les États membres:

appliquent pleinement les dispositions de l'Union en vertu desquelles une décision de retour prise par un État membre est applicable dans toute l'Union, ainsi que le principe de la reconnaissance mutuelle des décisions de retour, en enregistrant dans le SIS les interdictions d'entrée, en facilitant l'échange d'informations,

améliorent l'échange d'informations sur les initiatives prises au niveau national dans le domaine des régularisations, dans un souci de cohérence avec les principes du pacte européen sur l'immigration et l'asile,

il convient que, sur une base volontaire, la Commission, Frontex et les États membres prêtent assistance aux États membres qui subissent des pressions spécifiques et disproportionnées, afin de veiller à l'efficacité de leur politique en matière de retour vis-à-vis de certains pays tiers,

il faut agir avec plus d'efficacité contre l'immigration illégale, la traite des êtres humains et les filières d'immigration illégale en collectant des informations sur les routes migratoires ainsi que des informations globalisées et complètes qui nous permettent de mieux comprendre les flux migratoires et de mieux y réagir, en encourageant la coopération en matière de surveillance et de contrôles aux frontières et en facilitant la réadmission par un soutien aux mesures d'aide au retour et à la réinsertion, en renforçant les capacités dans les pays tiers,

il convient de conclure des accords de réadmission effectifs et opérationnels, cas par cas, au niveau bilatéral ou de l'Union,

il faut veiller à ce que les efforts consentis par l'Union en matière de réadmission apportent une valeur ajoutée aux politiques de retour et en renforcent l'efficacité, notamment pour ce qui est des accords et des pratiques qui existent au niveau bilatéral,

il convient que la Commission présente, en 2010, une évaluation des accords de réadmission de la Communauté/l'Union, y compris des négociations qui sont en cours, et propose un mécanisme pour surveiller leur mise en œuvre. Sur cette base, le Conseil devrait définir une stratégie renouvelée et cohérente en matière de réadmission, tenant compte de l'ensemble des relations avec le pays concerné, y compris une approche commune à l'égard des pays tiers qui ne coopèrent pas pour ce qui est de réadmettre leurs ressortissants,

il faut accroître la coopération concrète entre les États membres, par exemple en ce qui concerne l'affrètement régulier d'avions en vue de vols communs de rapatriement, financé par Frontex, la vérification de la nationalité des ressortissants de pays tiers susceptibles d'être rapatriés et l'obtention de documents de voyage auprès des pays tiers,

l'aide à la formation et à l'acquisition d'équipements devrait être ciblée et accrue,

il convient que les États membres adoptent une approche coordonnée en étoffant le réseau d'officiers de liaison dans les pays d'origine et de transit.

6.1.7.   Mineurs non accompagnés

Les mineurs non accompagnés qui arrivent dans les États membres en provenance de pays tiers représentent un groupe particulièrement vulnérable, qui nécessite une attention spéciale et des solutions adaptées, notamment en ce qui concerne les mineurs en danger. Leur situation constitue un défi pour les États membres et pose des problèmes qui les concernent tous. Parmi les domaines qui mériteraient un traitement particulier figurent l'échange d'informations et de bonnes pratiques, les filières d'immigration clandestine de mineurs, la coopération avec les pays d'origine, les questions que posent la détermination de l'âge, l'identification et la recherche de la famille, et la nécessité d'accorder une attention particulière aux mineurs non accompagnés dans le cadre de la lutte contre la traite des êtres humains. Les mesures prises au niveau de l'Union pour traiter l'ensemble de cette problématique devraient viser à la fois la prévention, la protection et l'assistance au retour, tout en tenant compte de l'intérêt supérieur des enfants.

Le Conseil européen accueille donc avec intérêt l'initiative de la Commission visant:

à élaborer un plan d'action, qui sera adopté par le Conseil, sur les mineurs non accompagnés; ce plan étayera et complétera les instruments législatifs et financiers pertinents et combinera des mesures de prévention, de protection et d'assistance au retour. Il devrait mettre en exergue la nécessité de coopérer avec les pays d'origine, y compris pour faciliter le retour des mineurs ainsi que pour prévenir de nouveaux départs. Le plan d'action devrait aussi envisager des mesures pratiques visant à faciliter le retour du grand nombre de mineurs non accompagnés qui n'ont pas besoin d'une protection internationale, sachant que l'intérêt supérieur de bon nombre d'entre eux pourrait être de retrouver leur famille et de s'épanouir dans leur propre environnement culturel et social.

6.2.   Asile: un espace commun de protection et de solidarité

Le Conseil européen reste attaché à l'objectif consistant à établir un espace commun de protection et de solidarité fondé sur une procédure d'asile commune et un statut uniforme pour les personnes bénéficiant d'une protection internationale. S'il est vrai que le RAEC devrait être fondé sur des normes élevées en matière de protection, il convient également d'accorder toute l'attention voulue à des procédures équitables et efficaces permettant de prévenir les abus. Quel que soit l'État membre où les personnes introduisent leur demande d'asile, il est capital qu'elles bénéficient d'un traitement de niveau équivalent quant aux conditions d'accueil, et de niveau égal quant aux modalités procédurales et à la détermination de leur statut. L'objectif devrait être que les cas analogues soient traités de la même manière et que ce traitement aboutisse au même résultat.

6.2.1.   Un espace commun de protection

Il subsiste des différences importantes entre les dispositions nationales, ainsi qu'au niveau de leur application. Afin de parvenir à davantage d'harmonisation, la création du RAEC devrait rester un objectif prioritaire pour l'Union. L'existence de règles communes, dont l'application serait en outre améliorée et plus cohérente, devrait permettre d'empêcher les mouvements secondaires au sein de l'Union, ou d'en réduire le nombre, et de renforcer la confiance mutuelle entre les États membres.

L'élaboration d'une politique commune en matière d'asile devrait être fondée sur l'application intégrale et globale de la convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés ainsi que des autres traités internationaux pertinents. Cette politique est indispensable pour préserver la viabilité à long terme du régime d'asile et promouvoir la solidarité au sein de l'Union. L'Union devrait viser l'adhésion à la convention de Genève et à son protocole de 1967, sous réserve d'un rapport de la Commission sur les conséquences juridiques et pratiques de ladite adhésion.

Le BEAA sera un instrument important dans l'élaboration et la mise en œuvre du RAEC et devrait contribuer au renforcement de toutes les formes de coopération concrète entre les États membres. Les États membres devraient donc prendre une part active aux travaux du BEAA. Celui-ci devrait poursuivre l'élaboration d'une plate-forme commune de formation pour les agents nationaux chargés des question d'asile, en s'appuyant en particulier sur le curriculum européen en matière d'asile (CEA). Une autre tâche importante consistera à accroître la convergence et la continuité de la qualité, afin de réduire les disparités entre les décisions en matière d'asile.

Le système de Dublin demeure une pièce maîtresse dans l'élaboration du RAEC, puisqu'il détermine clairement qui est responsable de l'examen des demandes d'asile.

Le Conseil européen invite par conséquent:

le Conseil et le Parlement européen à intensifier leurs efforts pour établir, au plus tard en 2012, une procédure commune d'asile et un statut uniforme, conformément à l'article 78 du TFUE, pour les personnes bénéficiant de l'asile ou d'une protection subsidiaire,

la Commission à étudier, une fois que la deuxième phase du RAEC aura été complètement mise en œuvre et sur la base d'une évaluation des effets de cette législation et du bureau européen d'appui en matière d'asile, les possibilités de créer un cadre pour le transfert de la protection des bénéficiaires d'une protection internationale lorsqu'ils exercent leurs droits de séjour acquis en vertu de la législation de l'Union,

la Commission à entreprendre une étude de faisabilité sur le système Eurodac, en tant qu'instrument devant faciliter le fonctionnement de l'ensemble du RAEC, dans le plein respect des règles relatives à la protection des données,

la Commission à envisager, si cela est nécessaire à la création du RAEC, de proposer de nouveaux instruments législatifs sur la base d'une évaluation,

la Commission à mettre un point final à son étude sur la faisabilité de la mise en place d'un traitement commun des demandes d'asile et sur ses conséquences juridiques et pratiques.

6.2.2.   Partage des responsabilités et solidarité entre les États membres

Il convient d'encourager une véritable solidarité avec les États membres soumis à des pressions particulières.

Il faudrait pour ce faire mettre en œuvre une approche large et équilibrée. Des mécanismes permettant un partage volontaire et coordonné des responsabilités entre les États membres devraient donc être analysés plus en détail et mis au point. L'une des conditions pour que le RAEC soit crédible et s'inscrive dans la durée est que les États membres fassent en sorte que leurs régimes d'asile nationaux disposent de capacités suffisantes; c'est pourquoi le Conseil européen engage instamment les États membres à se soutenir mutuellement pour doter leurs régimes d'asile nationaux des capacités suffisantes. Le BEAA devrait jouer un rôle central dans la coordination des mesures prises à cet effet.

Le Conseil européen invite par conséquent la Commission à examiner la possibilité:

de mettre en place le mécanisme susmentionné, qui permettrait de partager les responsabilités entre les États membres tout en veillant à ce que les régimes d'asile ne fassent pas l'objet d'abus et à ce que les principes du RAEC ne soient pas compromis,

de créer des instruments et des mécanismes de coordination qui permettront aux États membres de se soutenir mutuellement pour se doter des capacités nécessaires, en s'appuyant sur les efforts déployés par les États membres eux-mêmes pour accroître leurs capacités en ce qui concerne leurs régimes d'asile nationaux,

d'utiliser, d'une manière plus efficace, les systèmes financiers existants de l'Union visant à renforcer la solidarité interne,

que le bureau européen d'appui en matière d'asile étudie et élabore des procédures qui faciliteront le détachement d'agents afin d'assister les États membres soumis à des pressions particulières du fait des demandeurs d'asile.

6.2.3.   Dimension extérieure de l'asile

L'Union devrait agir en partenariat et coopérer avec les pays tiers qui hébergent d'importantes populations de réfugiés. Une approche commune de l'Union peut se révéler plus stratégique et ainsi contribuer plus efficacement à résoudre les situations où l'état de réfugié se prolonge. Toute initiative dans ce domaine devra être menée en étroite coopération avec le haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et, s'il y a lieu, avec d'autres acteurs compétents. Le BEAA devrait être pleinement associé à la dimension extérieure du RAEC. Il incombe à l'UE, dans ses relations avec les pays tiers, d'insister sur l'importance de l'adhésion à la convention de Genève de 1951 et à son protocole, ainsi que de leur mise en œuvre.

Pour forger une politique commune en matière d'asile qui soit crédible et inscrite dans la durée, il est fondamental de promouvoir la solidarité au sein de l'Union, mais ce n'est pas suffisant. Il est dès lors important de continuer à développer les instruments permettant de se montrer solidaires avec les pays tiers, afin de les inciter et de les aider à se doter des capacités nécessaires pour gérer les flux migratoires et les situations où l'état de réfugié se prolonge dans ces pays.

Le Conseil européen invite:

le Conseil et la Commission à concourir au renforcement des capacités dans les pays tiers, en particulier des moyens d'assurer une protection efficace, et à approfondir et à étendre le concept de programmes de protection régionale, sur la base des évaluations qui seront effectuées. Ces efforts devraient s'inscrire dans le cadre de l'approche globale sur la question des migrations et devraient être reflétés dans les stratégies nationales de réduction de la pauvreté et ne devraient pas seulement cibler les réfugiés et les personnes déplacées à l'intérieur de leur pays, mais aussi les populations locales,

le Conseil, le Parlement européen et la Commission à encourager les États membres à participer volontairement au dispositif commun de réinstallation de l'Union et à augmenter le nombre total de réfugiés réinstallés, en prenant en compte la situation propre à chaque État membre,

la Commission à faire rapport, chaque année, au Conseil et au Parlement européen, sur les efforts déployés au sein de l'Union en matière de réinstallation, à effectuer, en 2012, une évaluation à mi-parcours des progrès accomplis et à évaluer, en 2014, le dispositif commun de réinstallation de l'Union, en vue d'identifier les améliorations à y apporter,

le Conseil et la Commission à trouver des moyens de renforcer le soutien de l'Union au HCR,

la Commission à étudier, dans ce contexte et en tant que de besoin, en ce qui concerne l'accès aux procédures d'asile, de nouvelles approches visant les principaux pays de transit, telles que des programmes de protection destinés à des groupes particuliers ou certaines procédures d'examen des demandes d'asile, auxquelles les États membres pourraient participer sur une base volontaire.

7.   L'EUROPE À L'HEURE DE LA MONDIALISATION – LA DIMENSION EXTÉRIEURE DE LA LIBERTÉ, DE LA SÉCURITÉ ET DE LA JUSTICE

Le Conseil européen insiste sur l'importance de la dimension extérieure de l'action menée par l'Union dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice et souligne qu'il faut davantage intégrer ces politiques dans les politiques générales de l'Union. La dimension extérieure, qui est essentielle pour réaliser les objectifs du présent programme, devrait notamment être parfaitement cohérente avec tous les autres aspects de la politique étrangère de l'Union.

L'Union doit continuer à faire en sorte que son action soit mise en œuvre de manière efficace et à mener des évaluations dans ce domaine également. Toutes les initiatives devraient obéir à des exigences de transparence et pouvoir être justifiées, en particulier en ce qui concerne les instruments financiers.

Comme l'a rappelé le rapport de 2008 sur la mise en œuvre de la stratégie européenne de sécurité, les dimensions intérieure et extérieure de la sécurité sont indissociables. Pour protéger l'Europe et ses citoyens, il est essentiel de faire face aux menaces, même lorsqu'elles se manifestent loin de notre continent.

Le Conseil européen invite le Conseil et la Commission à veiller à ce que soient garanties la cohérence et la complémentarité entre le niveau politique et le niveau opérationnel des activités menées dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice. C'est en se fondant sur les priorités de l'action extérieure que l'on devrait établir un ordre de priorité parmi les travaux des agences compétentes de l'Union (Europol, Eurojust, Frontex, le CEPOL, l'OEDT et le BEAA).

Il faudrait encourager les officiers de liaison des États membres à encore renforcer leur coopération, ainsi que l'échange d'informations et de bonnes pratiques.

Le Conseil européen insiste sur la nécessité d'une complémentarité entre l'action de l'Union et celle des États membres. Il faut que l'Union et les États membres se mobilisent davantage à cette fin.

7.1.   Une dimension extérieure renforcée

Le Conseil européen a décidé que les principes ci-après continueraient à l'avenir de guider l'action extérieure de l'Union dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice:

l'Union a une politique unique en matière de relations extérieures,

l'Union et les États membres doivent travailler en partenariat avec les pays tiers,

l'Union et les États membres s'emploieront activement à développer et promouvoir les normes européennes et internationales,

l'Union et les États membres coopéreront étroitement avec leurs voisins,

les États membres intensifieront encore les échanges d'informations entre eux et au sein de l'Union sur leurs activités multilatérales et bilatérales,

l'Union et les États membres doivent agir dans un esprit de solidarité, de cohérence et de complémentarité,

l'Union utilisera pleinement tous les types d'instruments à sa disposition,

les États membres devraient se concerter avec l'Union de manière à tirer le meilleur parti d'une utilisation efficace des ressources,

l'Union mènera des activités d'information, de suivi et d'évaluation, notamment avec la participation du Parlement européen,

l'Union inscrira son action extérieure dans une démarche proactive.

Le Conseil européen estime que les politiques en matière de liberté, de sécurité et de justice devraient être bien intégrées dans les politiques générales de l'Union. L'adoption du traité de Lisbonne offre à l'Union de nouvelles possibilités de mener une action extérieure plus efficace. Le haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, qui est également vice-président de la Commission, le service européen pour l'action extérieure et la Commission permettront d'améliorer la cohérence entre les instruments de politique extérieure classiques et les instruments à portée intérieure ayant une dimension extérieure importante, tels que ceux liés à la liberté, à la sécurité et à la justice. Il faudrait étudier la valeur ajoutée que pourrait apporter l'octroi d'une compétence spécifique dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice aux délégations de l'Union dans des pays partenaires ayant une importance stratégique. Par ailleurs, le fait que l'Union soit dotée de la personnalité juridique devrait lui permettre d'agir avec davantage de force dans les organisations internationales.

Le Conseil est conscient que la PSDC et nombre d'actions extérieures menées dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice ont des objectifs communs ou complémentaires. Les missions relevant de la PSDC apportent également une contribution importante à la sécurité intérieure de l'Union en ce qu'elles visent à renforcer la lutte contre la grande criminalité transnationale dans les États hôtes et à instaurer le respect de l'État de droit. Le Conseil européen appelle de ses vœux un renforcement de la coopération et de la cohérence entre les politiques menées dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice et la PSDC afin de contribuer à la réalisation de ces objectifs communs.

La nouvelle base qu'offre le traité pour conclure des accords internationaux permettra à l'UE de négocier plus efficacement avec les partenaires importants. Le Conseil européen entend exploiter au maximum tous ces nouveaux instruments.

Le Conseil européen insiste sur la nécessité d'une complémentarité entre l'action de l'Union et celle des États membres. Il faudra pour cela que l'Union et les États membres déploient de nouveaux efforts en ce sens. Le Conseil européen demande donc à la Commission de lui faire rapport, au plus tard en décembre 2011, sur les moyens d'assurer cette complémentarité.

7.2.   Droits de l'homme

Le traité de Lisbonne dote l'Union de nouveaux instruments en ce qui concerne la protection des droits fondamentaux et des libertés fondamentales, au plan tant intérieur qu'extérieur. Il convient de promouvoir les valeurs de l'Union et de veiller au strict respect et au développement du droit international. Le Conseil européen préconise l'établissement d'un plan d'action pour les droits de l'homme, afin de promouvoir les valeurs de l'Union dans le cadre de la dimension extérieure des politiques dans le domaine de la justice, de la liberté et de la sécurité. Ce plan devrait être examiné par le Conseil européen et tenir compte de l'interconnexion entre les dimensions intérieure et extérieure des droits de l'homme, pour ce qui concerne, par exemple, le principe de non-refoulement ou l'application de la peine de mort par des partenaires avec lesquels l'Union coopère. Ce plan devrait prévoir des mesures spécifiques à court, moyen et long termes, et préciser qui sera chargé de les mettre en œuvre.

7.3.   De nouveaux instruments pour des priorités thématiques inchangées

Le Conseil européen considère que les principales priorités thématiques de la stratégie précédente restent d'actualité, à savoir la lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée, la corruption, la drogue, l'échange de données à caractère personnel en toute sécurité et la gestion des flux migratoires. Il faut intensifier la lutte contre la traite des êtres humains et contre les filières d'immigration clandestine.

Faisant fond sur la stratégie relative à la dimension extérieure de la JAI: liberté, sécurité et justice au niveau mondial adoptée en 2005 et sur d'autres éléments pertinents de l'acquis dans ce domaine, tels que l'approche globale sur la question des migrations, la coopération extérieure de l'Union devrait se concentrer sur les domaines où l'action de l'Union apporte une valeur ajoutée, en particulier:

les migrations et l'asile, en vue d'accroître le dialogue et la coopération de l'Union avec les pays d'origine et de transit, afin qu'ils soient davantage en mesure d'effectuer des contrôles aux frontières, de lutter contre l'immigration clandestine, de mieux gérer les flux migratoires et d'assurer une protection, ainsi que de tirer profit des retombées positives des migrations pour le développement; le retour et la réadmission constituent une priorité dans les relations extérieures de l'Union,

la sécurité, en coopérant avec les pays tiers pour lutter contre la grande criminalité et la criminalité organisée, le terrorisme, la drogue, la traite des êtres humains et les filières d'immigration clandestine, entre autres en axant prioritairement les actions antiterroristes de l'Union sur la prévention et en protégeant les infrastructures critiques. La sécurité intérieure et la sécurité extérieure sont indissociables. Il est essentiel de faire face aux menaces, y compris loin de notre continent, pour protéger l'Europe et ses citoyens,

l'échange d'informations entre l'Union et les pays tiers, dans des conditions sécurisées, de manière efficace et avec des normes adéquates de protection des données,

la justice, pour promouvoir l'État de droit et les droits de l'homme, la bonne gouvernance, la lutte contre la corruption, la dimension du droit civil, la sécurité et la stabilité et créer un environnement sûr et solide pour les entreprises, les échanges et les investissements,

la protection civile et la gestion des catastrophes, notamment pour développer les capacités de prévention et les réponses aux grandes catastrophes technologiques et naturelles, ainsi que pour faire face aux menaces terroristes.

Le Conseil européen invite la Commission:

à étudier si la conclusion d'accords de coopération ad hoc avec certains pays tiers, identifiés par le Conseil, pourrait être un moyen d'améliorer la lutte contre la traite des êtres humains et contre les filières d'immigration clandestine, et à faire des propositions en ce sens. Pour conclure de tels accords, l'Union pourrait en particulier mobiliser tous les leviers dont elle dispose, y compris les programmes de financement existants, la coopération en matière d'échange d'informations, la coopération judiciaire et les outils dans le domaine des migrations.

Le terrorisme et la criminalité organisée restent de graves menaces. Il est donc nécessaire de coopérer avec des partenaires ayant une importance stratégique, afin d'échanger des informations, tout en continuant à travailler à la réalisation d'objectifs à long terme, tels que des mesures pour prévenir la radicalisation et le recrutement, ainsi que la protection des infrastructures critiques. Il faudrait renforcer les accords opérationnels conclus par Eurojust et Europol, ainsi que les modalités de collaboration avec Frontex.

7.4.   Accords avec des pays tiers

Le traité de Lisbonne prévoit de nouvelles procédures, plus efficaces, pour la conclusion d'accords avec des pays tiers. Le Conseil européen recommande d'envisager de recourir plus fréquemment à ce type d'accords, en particulier en ce qui concerne la coopération judiciaire, ainsi que dans le domaine du droit civil, tout en tenant compte des mécanismes multilatéraux. Il relève cependant que les États membres garderont la faculté de conclure des accords bilatéraux conformes au droit de l'Union, et qu'un cadre juridique a été créé pour certains accords bilatéraux en matière civile également.

La protection des données à caractère personnel est une activité essentielle de l'Union. Il faut doter l'Union d'un cadre législatif cohérent pour les transferts de données à caractère personnel vers les pays tiers à des fins répressives. Un modèle d'accord-cadre reprenant les éléments essentiels d'application générale de la protection des données pourrait être élaboré.

7.5.   Priorités géographiques et organisations internationales

L'action de l'Union dans ses relations extérieures devrait s'adresser plus particulièrement à des partenaires privilégiés, en particulier:

les pays candidats et les pays ayant une perspective d'adhésion à l'UE, l'objectif principal étant de les aider à transposer l'acquis,

les pays visés par la politique européenne de voisinage et d'autres partenaires privilégiés, avec lesquels l'Union devrait coopérer sur toutes les questions relevant du domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice,

les États de l'EEE/Schengen, qui entretiennent des liens étroits avec l'Union, ce qui justifie une coopération plus étroite, fondée sur la confiance mutuelle et la solidarité, pour amplifier les effets positifs du marché intérieur, ainsi que pour concourir à la sécurité intérieure de l'Union,

les États-Unis d'Amérique, la Fédération de Russie et d'autres partenaires stratégiques, avec lesquels l'Union devrait coopérer sur toutes les questions relevant du domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice,

d'autres pays ou régions prioritaires en raison de leur contribution aux priorités stratégiques ou géographiques de l'Union,

des organisations internationales telles que les Nations unies et le Conseil de l'Europe, avec lesquels l'Union doit continuer à travailler et au sein desquelles elle devrait coordonner sa position.

Dans les Balkans occidentaux, des accords de stabilisation et d'association entrent progressivement en vigueur, et des progrès sensibles ont été accomplis dans le domaine de la politique des visas: des accords de facilitation en matière de visas et des accords de réadmission ont été conclus, et un dialogue global sur la libéralisation du régime des visas a déjà abouti pour certains pays ou est en cours pour d'autres pays. Il faut poursuivre les efforts, notamment en recourant aux instruments financiers, pour lutter contre la criminalité organisée et la corruption, garantir les droits fondamentaux et les libertés fondamentales et créer les capacités administratives nécessaires dans le domaine de la gestion des frontières, de la répression et de la justice, afin de faire de la perspective européenne une réalité.

L'Union et la Turquie sont convenues d'intensifier leur coopération pour relever le défi commun de la gestion des flux migratoires et lutter contre l'immigration clandestine en particulier. Cette coopération devrait être axée plus spécialement sur la responsabilité commune, la solidarité, la coopération avec tous les États membres et la communauté de vues, en prenant en compte le fait que la Turquie est voisine des frontières extérieures de l'Union, son processus de négociation et l'aide financière existante de l'Union dans les domaines pertinents, y compris le contrôle aux frontières. La conclusion des négociations concernant un accord de réadmission avec la Turquie constitue une priorité. D'ici là, les accords bilatéraux existants devraient être mis en œuvre de manière adéquate.

Le Conseil européen souligne que la politique européenne de voisinage (PEV) offre à l'Union des perspectives pour agir d'une manière coordonnée et efficace et contribuer à l'avenir au renforcement des capacités et des institutions à l'appui d'un appareil judiciaire indépendant et impartial, des autorités répressives et de la lutte contre la corruption, ainsi que pour accroître et faciliter la mobilité des citoyens des pays partenaires. En ce qui concerne les pays du partenariat oriental, l'Union nourrit l'ambition de conclure des accords d'association (dotés d'importants volets dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice) avec ces pays et d'œuvrer à la mobilité des citoyens et, dans une perspective à long terme, à la libéralisation du régime des visas dans des conditions garantissant la sécurité.

Le Conseil européen demande que soit élaboré, avant fin 2010, un plan indiquant comment faire progresser la coopération avec les pays du partenariat oriental et englobant les volets de ce partenariat liés à la liberté, à la sécurité et à la justice et les chapitres consacrés à ces mêmes sujets dans les plans d'action PEV (ou les documents ultérieurs) pour les pays concernés. Ce plan devrait aussi indiquer les étapes progressives qui conduiront à la libéralisation totale du régime des visas en tant qu'objectif à long terme à réaliser cas par cas pour les différents pays partenaires et décrire les conditions d'une mobilité bien gérée et en toute sécurité, auxquelles il est fait référence dans la déclaration commune adoptée lors du sommet du partenariat oriental qui s'est tenu à Prague. Le Conseil européen réexaminera le plan d'ici fin 2012, en évaluant plus particulièrement ses effets sur le terrain.

L'Union devrait intensifier ses efforts pour soutenir la stabilité et la sécurité dans l'ensemble de la région de la mer Noire et renforcer encore l'initiative de coopération régionale «La synergie de la mer Noire». Les activités devraient se concentrer en particulier sur la gestion des frontières, la gestion des migrations, la coopération douanière et l'État de droit, ainsi que la lutte contre la criminalité transfrontière.

Pour ce qui est de l'Union pour la Méditerranée, il sera nécessaire d'intensifier les travaux entamés dans le cadre du processus de Barcelone et du partenariat euro-méditerranéen, en particulier sur les migrations (par voie maritime), la surveillance des frontières, la prévention du trafic de drogue et la lutte contre ce phénomène, la protection civile, le maintien de l'ordre et la coopération judiciaire. Le Conseil européen invite la Commission, en coopération avec le haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, à présenter un plan en ce sens en 2010 et demande au Coreper d'élaborer dès que possible les décisions que devra prendre le Conseil. Le Conseil européen réexaminera le plan d'ici fin 2012, en évaluant plus particulièrement ses effets sur le terrain.

En ce qui concerne la situation dans la région méditerranéenne, le Conseil européen considère qu'il est nécessaire d'établir avec les pays tiers de transit et d'origine un partenariat renforcé, fondé sur des exigences réciproques et un soutien opérationnel, notamment pour le contrôle aux frontières, la lutte contre la criminalité organisée, le retour et la réadmission. Une action rapide pour relever les défis dans la région est une priorité.

La coopération avec les États-Unis s'est intensifiée ces dix dernières années, notamment sur toutes les questions liées à l'espace de liberté, de sécurité et de justice. Des réunions régulières de la troïka ministérielle et des hauts fonctionnaires sont organisées pendant chaque présidence. Dans le droit fil de ce qui a été énoncé dans la «déclaration de Washington» adoptée lors de la réunion de la troïka ministérielle d'octobre 2009, le dialogue devrait être poursuivi et approfondi.

Il faut maintenir une coopération permanente dans les domaines de la lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale, de la sécurité des frontières, de la politique en matière de visas, des migrations et de la coopération judiciaire. Un accord sur la protection des données à caractère personnel échangées à des fins répressives doit être négocié et conclu rapidement. L'Union et les États-Unis travailleront ensemble à parachever le plus rapidement possible le régime d'exemption de visa pour les voyages entre les États-Unis et l'Union et à renforcer la sécurité des voyageurs. Des procédures conjointes devraient être organisées pour la mise en œuvre des accords de coopération judiciaire, et des consultations régulières doivent avoir lieu.

L'espace commun de liberté, de sécurité et de justice avec la Fédération de Russie et le nouvel accord en cours de négociation offriront à l'avenir le cadre d'une coopération approfondie et améliorée avec ce pays. En s'appuyant également sur les résultats des réunions bisannuelles du conseil permanent de partenariat consacrées à la liberté, la sécurité et la justice, l'Union et la Fédération de Russie devraient continuer à coopérer dans le cadre du dialogue sur les visas et sur l'immigration légale, tout en luttant contre l'immigration clandestine, à renforcer la lutte commune contre la criminalité organisée, et en particulier la coopération opérationnelle, et à améliorer et intensifier la coopération judiciaire. Un accord répondant à des normes élevées en matière de protection des données devrait être conclu le plus rapidement possible avec Eurojust. Un accord-cadre sur l'échange d'informations devrait être conclu à cet égard. Le dialogue sur les visas doit se poursuivre. Les accords en matière d'assouplissement du régime des visas et de réadmission devraient être intégralement mis en œuvre.

Le Conseil européen note que la stratégie commune UE-Afrique de 2007 et son plan d'action définissent la portée de la coopération dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, la criminalité transnationale et le trafic de drogue. Tant dans le cadre du partenariat UE-Afrique «Migration, mobilité et emploi» (MME) que dans celui de l'approche globale sur la question des migrations et celui du processus de suivi des conférences de Rabat, Paris et Tripoli, il faudrait approfondir et intensifier le dialogue sur la question des migrations avec les partenaires africains, en accordant la priorité aux pays situés le long des routes d'immigration clandestine vers l'Europe afin de les aider à élaborer des politiques migratoires et de lutter contre l'immigration clandestine en mer et aux frontières. Il faudrait s'efforcer d'améliorer la coopération, notamment en concluant rapidement des accords de réadmission avec l'Algérie, le Maroc et l'Égypte et, conformément aux conclusions du Conseil européen d'octobre 2009, avec la Libye.

L' Afrique de l'Ouest est récemment devenue une importante plaque tournante pour le trafic de drogue en provenance d'Amérique du Sud vers l'Europe; il faudra lui accorder davantage d'attention et d'aide si l'on veut endiguer ce trafic ainsi que d'autres formes de criminalité transnationale et de terrorisme (au Sahel).

Le dialogue avec la Chine et l' Inde sur la lutte contre le terrorisme devrait être élargi et couvrir d'autres domaines prioritaires, tels que les droits de propriété intellectuelle, les migrations, y compris la lutte contre l'immigration clandestine, et la coopération judiciaire. Lors de la conclusion d'accords de coopération judiciaire, l'Union continuera d'exiger que la question de la peine de mort ne puisse faire l'objet d'aucun compromis. Le dialogue avec l'Inde sur les migrations devrait être intensifié et couvrir tous les aspects liés à cette problématique. Pour ce qui concerne la Chine, il faut poursuivre le dialogue sur les droits de l'homme. Le dialogue avec le Brésil devra être approfondi et élargi dans les années à venir. Le partenariat stratégique et le plan d'action conjoint devraient être mis en œuvre avec plus d'efficacité et davantage de mesures spécifiques devraient être envisagées.

Avec les autres pays et régions, l'Union mènera une coopération régionale ou bilatérale selon le cas. Il faudrait poursuivre le dialogue avec les pays d'Amérique latine et des Caraïbes sur les migrations, le trafic de drogue, le blanchiment d'argent et d'autres domaines d'intérêt mutuel dans le cadre régional (UE-ALC) et dans celui du GAFI. Il conviendra de poursuivre les travaux avec les pays d'Asie centrale le long des itinéraires vers l'Europe empruntés par les trafiquants.

Des efforts devraient également être réalisés pour renforcer la coopération avec l' Afghanistan dans le domaine des drogues, notamment par la mise en œuvre du document d'orientation générale sur le trafic de drogue, ainsi qu'avec l'Afghanistan et le Pakistan en ce qui concerne le terrorisme et les questions liées aux migrations.

En ce qui concerne l' Afghanistan et l' Iraq, il conviendrait de continuer à mettre l'accent sur un règlement efficace de la situation des réfugiés dans le cadre d'une approche globale. Des efforts devraient être entrepris pour s'attaquer aux flux migratoires clandestins et conclure des accords de réadmission avec ces pays, ainsi qu'avec le Bangladesh.

7.6.   Organisations internationales et promotion des normes européennes et internationales

Le Conseil européen réaffirme son attachement à un multilatéralisme efficace qui complète les partenariats bilatéraux et régionaux avec des régions et des pays tiers.

L'ONU reste l'organisation internationale la plus importante pour l'Union. Le traité de Lisbonne crée la base d'une participation plus cohérente et plus efficace de l'Union aux travaux de l'ONU et d'autres organisations internationales.

L'Union devrait continuer à promouvoir les normes européennes et internationales et la ratification des conventions internationales, en particulier celles qui sont élaborées sous l'égide de l'ONU et du Conseil de l'Europe.

Les travaux du Conseil de l'Europe revêtent une importance particulière. C'est le creuset des valeurs européennes que sont la démocratie, les droits de l'homme et l'État de droit. L'Union doit continuer à coopérer avec le Conseil de l'Europe sur la base du mémorandum d'accord signé en 2007 entre le Conseil de l'Europe et l'Union européenne et à soutenir ses importantes conventions, comme la convention sur la lutte contre la traite des êtres humains et la convention sur la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle et les abus sexuels.

En ce qui concerne la coopération en matière répressive, Interpol est un partenaire important pour l'Union. La coopération en matière de droit civil est menée notamment dans le cadre de la conférence de La Haye de droit international privé. L'Union devrait continuer à soutenir la conférence et encourager ses partenaires à ratifier les conventions dont l'Union est ou deviendra partie ou dont tous les États membres sont parties.


(1)  Dénomination sous laquelle il est plus connu. L'Union repose en fait sur deux traités: le traité sur l'Union européenne (TUE) et le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Pour des raisons de facilité de lecture, les expressions «le traité de Lisbonne» ou «le traité» seront parfois utilisées dans le programme.

(2)  Pour des raisons de facilité de lecture, le programme attribue seulement à la Commission le droit d'initiative, ce qui est sans préjudice de la possibilité pour les États membres de prendre des initiatives conformément à l'article 76 du TFUE.

(3)  JO C 321 du 31.12.2003, p. 1.

(4)  Voir document du Conseil 16637/09 JAI 873.


LISTE DES ABRÉVIATIONS

ATC

Coordinateur de l'Union pour la lutte contre la traite des êtres humains

BEAA

Bureau européen d'appui en matière d'asile

CEA

Curriculum européen en matière d'asile

CEPOL

Collège européen de police

COSI

Comité permanent de sécurité intérieure

CPI

Cour pénale internationale

CRF

Cellules de renseignement financier

CSI

Centre de suivi et d'information

ECE

Équipes communes d'enquête

ECRIS

Système européen d'information sur les casiers judiciaires

EMCO

Évaluation de la menace que représente la criminalité organisée

EPRIS

Système européen d'information sur les registres de la police

Eurosur

Système européen de surveillance des frontières

GAFI

Groupe d'action financière

GRECO

Groupe d'États contre la corruption du Conseil de l'Europe

HCR

Haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés

NRBC

Nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique

OCDE

Organisation de coopération et de développement économiques

OEDT

Observatoire européen des drogues et des toxicomanies

OPC

Observatoire pour la prévention de la criminalité

PEV

Politique européenne de voisinage

PNR

Dossiers passagers

PSDC

Politique de sécurité et de défense commune

RAEC

Régime d'asile européen commun

REPC

Réseau européen de prévention de la criminalité

SIS II

Système d'information de Schengen de deuxième génération

TFUE

Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne

TIC

Technologies de l'information et de la communication

TUE

Traité sur l'Union européenne

UE

Union européenne

UNCAC

Convention des Nations unies contre la corruption

VIS

Système d'information sur les visas