ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

28 février 2013 ( *1 )

«Manquement d’État — Transport — Développement de chemins de fer communautaires — Directive 91/440/CEE — Article 6, paragraphe 3, et annexe II — Directive 2001/14/CE — Articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2 — Gestionnaire de l’infrastructure — Indépendance organisationnelle et décisionnelle — Structure de holding — Directive 2001/14 — Articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1 — Établissement des redevances sur la base des coûts directs — Tarification — Coûts directs — Coûts totaux — Directive 2001/14 — Article 6, paragraphe 2 — Absence de mesures d’incitation à réduire les coûts — Directive 91/440 — Article 10, paragraphe 7 — Directive 2001/14 — Article 30, paragraphe 4 — Organisme de contrôle — Compétences»

Dans l’affaire C‑556/10,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 26 novembre 2010,

Commission européenne, représentée par MM. G. Braun et H. Støvlbæk, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République fédérale d’Allemagne, représentée par MM. T. Henze, J. Möller et M. N. Graf Vitzthum, en qualité d’agents, assistés de Me R. Van der Hout, advocaat,

partie défenderesse,

soutenue par:

République tchèque, représentée par M. M. Smolek, Mme J. Očková et M. T. Müller, en qualité d’agents,

République italienne, représentée par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. S. Fiorentino, avvocato dello Stato, ayant élu domicile à Luxembourg,

parties intervenantes,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. A. Borg Barthet (rapporteur), E. Levits, J.-J. Kasel et Mme M. Berger, juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: Mme C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 mai 2012,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 6 septembre 2012,

rend le présent

Arrêt

1

Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que:

en ne prenant pas les mesures nécessaires pour assurer que l’entité à laquelle est confié l’exercice des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440/CEE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au développement de chemins de fer communautaires (JO L 237, p. 25), telle que modifiée par la directive 2001/12/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001 (JO L 75, p. 1, ci-après la «directive 91/440»), soit indépendante de l’entreprise qui fournit les services de transport ferroviaire;

en n’adoptant pas de mesures d’incitation à réduire les coûts;

en n’assurant pas une transposition correcte des dispositions relatives à la tarification de l’infrastructure ferroviaire figurant dans la directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001, concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire (JO L 75, p. 29), telle que modifiée par la directive 2007/58/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2007 (JO L 315, p. 44, ci-après la «directive 2001/14»), et

en ne dotant pas l’organisme de contrôle prévu à l’article 30 de la directive 2001/14 de certaines compétences en matière d’obtention de renseignements et de sanctions,

la République fédérale d’Allemagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6, paragraphe 3, et de l’annexe II de la directive 91/440, des articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14, des articles 6, paragraphe 2, 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de cette dernière directive, ainsi que de l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14, lu en combinaison avec l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 91/440

2

Le quatrième considérant de la directive 91/440 énonce:

«[...] le développement futur et une exploitation efficace du réseau ferroviaire peuvent être facilités par une séparation entre l’exploitation des services de transport et la gestion de l’infrastructure; [...] dans ces conditions, il est nécessaire que ces deux activités aient obligatoirement des comptes distincts et puissent être gérés séparément».

3

L’article 6, paragraphes 1 à 3, de cette directive prévoit:

«1.   Les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer la tenue et la publication de comptes de profits et pertes séparés et de bilans séparés, d’une part, pour les activités relatives à la fourniture de services de transport par des entreprises ferroviaires et, d’autre part, pour celles relatives à la gestion de l’infrastructure ferroviaire. Les aides publiques versées à l’une de ces deux activités ne peuvent pas être transférées à l’autre.

Les comptes relatifs aux deux activités sont tenus de façon à refléter cette interdiction.

2.   Les États membres peuvent, en outre, prévoir que cette séparation comporte des divisions organiques distinctes au sein d’une même entreprise ou que la gestion de l’infrastructure est assurée par une entité distincte.

3.   Les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer que les fonctions essentielles en vue de garantir un accès équitable et non discriminatoire à l’infrastructure, qui sont énumérées à l’annexe II, sont confiées à des instances ou entreprises qui ne sont pas elles-mêmes fournisseurs de services de transport ferroviaire. Quelles que soient les structures organisationnelles, cet objectif doit être atteint d’une manière probante.

Les États membres peuvent, toutefois, confier aux entreprises ferroviaires ou à toute autre entité la perception des redevances et la responsabilité de la gestion des infrastructures, par exemple, tels que, l’entretien et le financement.»

4

L’article 10, paragraphe 7, de ladite directive dispose:

«Sans préjudice des réglementations communautaire et nationale relatives à la politique de la concurrence et des institutions compétentes en la matière, l’organisme réglementaire créé conformément à l’article 30 de la directive 2001/14/CE, ou tout autre organisme disposant du même degré d’indépendance, contrôle la concurrence sur les marchés des services ferroviaires, y compris le marché du transport de fret ferroviaire.

Cet organisme est établi conformément aux règles prévues à l’article 30, paragraphe 1, de ladite directive. Tout demandeur ou toute partie intéressée peut adresser une plainte à cet organisme s’il estime avoir été traité injustement ou avoir fait l’objet d’une discrimination ou avoir été lésé de toute autre manière. L’organisme de contrôle statue dans les meilleurs délais, sur la base d’une plainte et, le cas échéant, d’office, sur les mesures propres à remédier aux développements négatifs sur ces marchés. Pour assurer la possibilité nécessaire d’un contrôle juridictionnel et la coopération requise entre les organismes de contrôle nationaux, l’article 30, paragraphe 6, et l’article 31 de ladite directive s’appliquent en l’occurrence.»

5

L’annexe II de la directive 91/440 mentionne la liste des fonctions essentielles visées à l’article 6, paragraphe 3, de cette directive dans les termes suivants:

«–

préparation et adoption des décisions concernant la délivrance de licences aux entreprises ferroviaires, y compris l’octroi de licences individuelles,

adoption des décisions concernant la répartition des sillons, y compris la définition et l’évaluation de la disponibilité, ainsi que l’attribution de sillons individuels,

adoption des décisions concernant la tarification de l’infrastructure,

contrôle du respect des obligations de service public requises pour la fourniture de certains services».

La directive 2001/14

6

Les considérants 12, 16, 20, 40 et 46 de la directive 2001/14 énoncent les objectifs de cette directive comme suit:

(12)

Dans le cadre défini par les États membres, il est opportun que les systèmes de tarification et de répartition des capacités incitent les gestionnaires d’infrastructure ferroviaire à optimiser l’utilisation de leur infrastructure.

[...]

(16)

Il y a lieu que les systèmes de tarification et de répartition des capacités permettent une concurrence équitable dans la fourniture de services ferroviaires.

[...]

(20)

Il est souhaitable de laisser une certaine marge de manœuvre aux gestionnaires d’infrastructure afin de permettre une utilisation plus efficace du réseau de l’infrastructure.

[...]

(40)

L’infrastructure ferroviaire est un monopole naturel. Il est dès lors nécessaire d’inciter, par des mesures d’encouragement, les gestionnaires de l’infrastructure à réduire les coûts et à gérer leur infrastructure de manière efficace.

[...]

(46)

La gestion efficace et l’utilisation équitable et non discriminatoire de l’infrastructure ferroviaire exigent la mise en place d’un organisme de réglementation, chargé de surveiller l’application de ces règles communautaires et d’agir comme organisme de recours, nonobstant la possibilité d’un contrôle juridictionnel.»

7

Aux termes de l’article 1er, premier alinéa, de ladite directive:

«La présente directive a pour objet les principes et les procédures à suivre pour la fixation et la perception de redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire et pour la répartition des capacités de cette infrastructure.»

8

L’article 4, paragraphes 1 et 2, de la même directive dispose:

«1.   Les États membres mettent en place un cadre pour la tarification, mais en respectant l’indépendance de gestion prévue à l’article 4 de la directive 91/440/CEE.

Sous réserve de ladite condition d’indépendance de gestion, les États membres établissent également des règles de tarification spécifiques ou délèguent ce pouvoir au gestionnaire de l’infrastructure. La détermination de la redevance pour l’utilisation de l’infrastructure et son recouvrement incombent au gestionnaire de l’infrastructure.

2.   Si le gestionnaire de l’infrastructure n’est pas indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel ou décisionnel, les fonctions décrites dans le présent chapitre, autres que celles de recouvrement des redevances, sont assumées par un organisme de tarification qui est indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel.»

9

L’article 6 de la directive 2001/14 prévoit:

«1.   Les États membres définissent les conditions appropriées, comprenant, le cas échéant, des paiements ex ante, pour que les comptes du gestionnaire de l’infrastructure, dans des conditions normales d’activité et par rapport à une période raisonnable, présentent au moins un équilibre entre, d’une part, les recettes tirées des redevances d’utilisation de l’infrastructure, les excédents dégagés d’autres activités commerciales et le financement par l’État et, d’autre part, les dépenses d’infrastructure.

Sans préjudice d’un objectif éventuel, à long terme, de couverture par l’utilisateur des coûts d’infrastructure pour tous les modes de transport sur la base d’une concurrence intermodale équitable et non discriminatoire, lorsque le transport ferroviaire est en mesure de concurrencer d’autres modes, un État membre peut exiger, à l’intérieur du cadre de tarification défini aux articles 7 et 8, du gestionnaire de l’infrastructure qu’il équilibre ses comptes sans apport financier de l’État.

2.   Le gestionnaire de l’infrastructure est, tout en respectant les exigences en matière de sécurité, et en maintenant et en améliorant la qualité de service de l’infrastructure, encouragé par des mesures d’incitation à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès.

3.   Les États membres veillent à ce que la disposition prévue au paragraphe 2 soit mise en œuvre soit dans le cadre d’un contrat conclu, pour une durée minimale de trois ans, entre l’autorité compétente et le gestionnaire de l’infrastructure et prévoyant le financement par l’État, soit par l’établissement de mesures réglementaires appropriées, prévoyant les pouvoirs nécessaires.

[...]

5.   Une méthode d’imputation des coûts est élaborée. Les États membres peuvent la soumettre à approbation préalable. Il convient de mettre à jour cette méthode de temps à autre en fonction des meilleures pratiques internationales.»

10

L’article 7, paragraphes 3 à 5, de cette directive dispose:

«3.   Sans préjudice des dispositions des paragraphes 4 ou 5 ou de l’article 8, les redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services, sont égales au coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire.

4.   La redevance d’utilisation de l’infrastructure peut inclure une redevance au titre de la rareté des capacités de la section identifiable de l’infrastructure pendant les périodes de saturation.

5.   La redevance d’utilisation de l’infrastructure peut être modifiée pour tenir compte du coût des effets sur l’environnement de l’exploitation des trains. Cette modification est différenciée en fonction de l’ampleur de l’effet engendré.»

11

L’article 8, paragraphes 1 et 2, de ladite directive se lit comme suit:

«1.   Un État membre peut, afin de procéder au recouvrement total des coûts encourus par le gestionnaire de l’infrastructure et, si le marché s’y prête, percevoir des majorations sur la base de principes efficaces, transparents et non discriminatoires, tout en garantissant une compétitivité optimale, en particulier pour le transport ferroviaire international de marchandises. Le système de tarification respecte les gains de productivité réalisés par les entreprises ferroviaires.

Le niveau des redevances ne doit cependant pas exclure l’utilisation des infrastructures par des segments de marché qui peuvent au moins acquitter le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, plus un taux de rentabilité si le marché s’y prête.

2.   Pour des projets d’investissement spécifiques qui seront réalisés à l’avenir ou dont la réalisation ne remonte pas à plus de quinze ans avant l’entrée en vigueur de la présente directive, le gestionnaire de l’infrastructure peut fixer ou maintenir des redevances plus élevées basées sur le coût à long terme de tels projets, pour autant qu’il s’agisse de projets améliorant le rendement et/ou la rentabilité qui, dans le cas contraire, ne pourraient pas ou n’auraient pas pu être mis en œuvre. De tels arrangements en matière de tarification peuvent également comporter des accords sur le partage des risques liés à de nouveaux investissements.»

12

L’article 9, paragraphe 1, de la même directive prévoit:

«Sans préjudice des articles 81, 82, 86 et 87 du traité et nonobstant l’article 7, paragraphe 3, de la présente directive, toute réduction consentie sur les redevances perçues auprès d’une entreprise ferroviaire par le gestionnaire de l’infrastructure, pour une prestation de service quelle qu’elle soit, remplit les critères énoncés au présent article.»

13

Aux termes de l’article 14, paragraphes 1 et 2, de la directive 2001/14:

«1.   Les États membres peuvent mettre en place un cadre pour la répartition des capacités de l’infrastructure, mais en respectant l’indépendance de gestion prévue à l’article 4 de la directive 91/440/CEE. Des règles spécifiques de répartition des capacités sont établies. Le gestionnaire de l’infrastructure accomplit les procédures de répartition de ces capacités. Il veille notamment à ce que les capacités d’infrastructure soient réparties sur une base équitable et non discriminatoire et dans le respect du droit communautaire.

2.   Si le gestionnaire de l’infrastructure n’est pas indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel ou décisionnel, les fonctions visées au paragraphe 1 et décrites au présent chapitre sont assumées par un organisme de répartition qui est indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel.»

14

L’article 30 de cette directive, intitulé «Organisme de contrôle», prévoit:

«1.   [...] les États membres instituent un organisme de contrôle. [...] Cet organisme fonctionne conformément aux principes énoncés au présent article, les fonctions de recours et de contrôle pouvant être attribuées à des organismes séparés.

2.   Un candidat peut saisir cet organisme dès lors qu’il estime être victime d’un traitement inéquitable, d’une discrimination ou de tout autre préjudice, notamment pour introduire un recours contre les décisions prises par le gestionnaire de l’infrastructure ou, le cas échéant, par l’entreprise ferroviaire en ce qui concerne:

[...]

3.   L’organisme de contrôle veille à ce que les redevances fixées par le gestionnaire de l’infrastructure soient conformes aux dispositions du chapitre II et non discriminatoires. [...]

4.   L’organisme de contrôle est habilité à demander les informations utiles au gestionnaire de l’infrastructure, aux candidats et à toute autre partie intéressée dans l’État membre concerné; ces informations sont fournies sans tarder.

5.   L’organisme de contrôle est obligé de se prononcer sur toute plainte et adopte les mesures nécessaires afin de remédier à la situation dans un délai maximum de deux mois suivant la réception de toutes les informations.

Nonobstant le paragraphe 6, les décisions prises par l’organisme de contrôle sont contraignantes pour toutes les parties concernées.

[...]»

Le droit allemand

15

L’article 5a, paragraphe 2, de la loi générale sur les chemins de fer (Allgemeines Eisenbahngesetz) du 27 décembre 1993 (BGBl. I, p. 2378, 2396), telle que modifiée par la loi du 29 juillet 2009 (BGBl. I, p. 2542, ci-après la «loi générale sur les chemins de fer»), prévoit:

«Dans l’exercice de leurs fonctions, les autorités de surveillance des chemins de fer peuvent prendre, à l’égard de ceux qui sont contraints par les dispositions citées à l’article 5, paragraphe 1, les mesures nécessaires pour remédier aux infractions constatées et prévenir des infractions futures aux dispositions visées à l’article 5, paragraphe 1.»

16

L’article 9a, paragraphe 1, de la loi générale sur les chemins de fer dispose:

«1)   Les gestionnaires publics des voies ferrées doivent être indépendants d’entreprises de transport ferroviaire sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel, pour autant que les décisions en cause concernent l’attribution de sillons et la tarification. Pour atteindre les objectifs visés à la première phrase, il y a lieu

1.

de séparer, au sein des sociétés de chemins de fer qui sont à la fois des entreprises de transport ferroviaire et des gestionnaires des voies ferrées, ces deux activités pour les confier chacune à une ou plusieurs sociétés distinctes;

2.

de donner aux contrats conclus entre le gestionnaire des voies ferrées et des tiers une forme garantissant au premier son autonomie organisationnelle;

3.

de n’autoriser que le personnel du gestionnaire des voies ferrées n’exerçant pas de fonctions dans des entreprises de transport ferroviaire, ni dans des entreprises liées à celles-ci, à prendre les décisions concernant l’horaire de service, l’attribution des sillons et la tarification;

4.

de considérer comme non autorisées les instructions données par des tiers au gestionnaire des voies ferrées ou à son personnel en ce qui concerne les décisions relatives à l’horaire de service, à l’attribution des sillons et à la tarification;

5.

d’élaborer, de maintenir et de publier, dans les entreprises au sens de l’article 9, paragraphe 1, première phrase, points 2 et 3, des règlements qui empêchent des tiers extérieurs au gestionnaire des voies ferrées d’exercer une influence sur les décisions concernant l’horaire de service, l’attribution des sillons et la tarification; ces règlements doivent en particulier énumérer les obligations spécifiques imposées aux employés pour empêcher l’exercice d’une telle influence; les gestionnaires des voies ferrées sont en outre tenus, si l’autorité de surveillance compétente le leur demande, de communiquer à cette dernière le nom d’un représentant veillant au respect de ces règlements; ce dernier est tenu de communiquer chaque année à l’autorité de surveillance compétente un rapport sur les problèmes survenus et les mesures prises pour les résoudre;

6.

de désigner des personnes différentes aux postes des conseils de surveillance des entreprises au sens de l’article 9, paragraphe 1, première phrase, points 2 et 3; ainsi, le conseil de surveillance du gestionnaire des voies ferrées ne peut comprendre ni des membres des conseils de surveillance d’entreprises au sens de l’article 9, paragraphe 1, première phrase, points 2 et 3, ni des membres du personnel de ces dernières; cette disposition s’applique aussi aux autres participations de la société mère.»

17

L’article 14, paragraphe 4, de cette loi prévoit:

«Les gestionnaires de voies ferrées doivent fixer leurs tarifs conformément à une ordonnance prise en vertu de l’article 26, paragraphe 1, points 6 et 7, de manière à compenser les coûts encourus par eux pour la fourniture de prestations réglementaires au sens du paragraphe 1, première phrase, plus un taux de rentabilité si le marché s’y prête. Ce faisant, ils peuvent percevoir des majorations sur le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, une différenciation pouvant être opérée aussi bien en fonction des services de transport de voyageurs à grande distance, de transport de voyageurs à courte distance ou de fret ferroviaire qu’en fonction des segments de marché à l’intérieur de ces services de transport, tout en garantissant la compétitivité, en particulier pour le transport ferroviaire international de marchandises. Le niveau des redevances ne peut toutefois pas excéder, en ce qui concerne la deuxième phrase, pour un segment de marché, le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, plus un taux de rentabilité si le marché s’y prête. Dans l’ordonnance prise en vertu de l’article 26, paragraphe 1, points 6 et 7,

1.

des dérogations à la détermination du montant de la redevance selon la première phrase peuvent être autorisées si les coûts sont couverts d’une autre manière, ou

2.

l’autorité de surveillance compétente peut être autorisée à dispenser, par une décision générale, en consultation avec l’agence fédérale de l’électricité, du gaz, des télécommunications, de la poste et des chemins de fer (organisme de contrôle), tous les gestionnaires des voies ferrées du respect des exigences fixées à la première phrase.»

18

L’article 14c de ladite loi dispose:

«(1)   Dans l’exercice de ses fonctions, l’organisme de contrôle peut prendre, à l’égard d’entreprises publiques d’infrastructure ferroviaire, les mesures nécessaires pour remédier aux infractions constatées et prévenir des infractions futures aux dispositions de la législation des chemins de fer relatives à l’accès à l’infrastructure ferroviaire.

(2)   Les entités autorisées à accéder à l’infrastructure, les entreprises publiques d’infrastructure ferroviaire et leur personnel doivent permettre à l’organisme de contrôle et à ses représentants, dans l’exercice de leurs tâches,

1.

de pénétrer dans les locaux commerciaux et les installations aux heures d’ouverture habituelles et

2.

de consulter les livres, documents commerciaux, fichiers et autres documents et de les stocker sur des supports d’information appropriés.

(3)   Les entités autorisées à accéder à l’infrastructure, les entreprises publiques d’infrastructure ferroviaire et leur personnel doivent fournir à l’organisme de contrôle et à ses représentants

1.

toutes les informations,

2.

tous les éléments de preuve,

3.

tous les moyens et tous les services auxiliaires nécessaires à l’accomplissement de leurs tâches.

Cette disposition s’applique également aux négociations, en cours ou clôturées, concernant le montant des redevances d’utilisation de l’infrastructure et autres. Les renseignements fournis doivent être exacts et établis de bonne foi. Toute personne tenue de fournir des renseignements peut refuser de répondre aux questions dont la réponse l’exposerait, elle ou l’un des membres désignés à l’article 383, paragraphe 1, points 1 à 3, du code de procédure civile, à des risques de poursuites pénales ou à une procédure pour infraction administrative.

(4)   En vertu de la présente loi, l’organisme de contrôle peut faire appliquer ses injonctions conformément aux dispositions régissant l’exécution des mesures administratives. Le montant de l’astreinte peut atteindre 500000 euros.»

19

L’article 1er du contrat de prise de contrôle et de transfert de bénéfices conclu le 1er juin 1999 entre Deutsche Bahn AG (ci-après «DB AG») et Deutsche Bahn Netz AG (ci après «DB Netz»), intitulé «Gestion de [DB Netz]», dispose, dans sa version résultant de l’accord modificatif du 2 mai 2005:

«Il n’est pas dérogé au principe d’indépendance juridique et organisationnelle de [DB Netz] en ce qui concerne les décisions relatives à l’horaire de service, à l’attribution des sillons et à la tarification. [DB AG] ne donnera aucune instruction remettant en cause ce principe.»

20

Aux termes de l’article 4 du règlement intérieur du directoire de DB Netz, modifié avec effet au 9 mai 2005, intitulé «Prise de décisions»:

«[...]

3.   Les membres du directoire exerçant des fonctions dans des entreprises de transport ferroviaire liées à [DB Netz] ou dans des entreprises liées à ces dernières ne prennent pas part au vote lors de l’adoption de décisions concernant l’horaire de service, l’attribution des sillons et la tarification. Ils ne peuvent davantage participer à la préparation de ces décisions.»

La procédure précontentieuse et la procédure devant la Cour

21

Au mois de mai 2007, la Commission a adressé un questionnaire aux autorités allemandes en vue de vérifier la transposition par la République fédérale d’Allemagne des directives 2001/12, 2001/13/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001, modifiant la directive 95/18/CE du Conseil concernant les licences des entreprises ferroviaires (JO L 75, p. 26), et 2001/14. Ledit État membre y a répondu par lettre du 25 septembre 2007 ainsi que, à titre complémentaire, par lettre du 14 décembre suivant.

22

Par lettre du 26 juin 2008, la Commission a relevé des disparités entre la législation ferroviaire allemande et les directives 91/440, 95/18/CE du Conseil, du 19 juin 1995, concernant les licences des entreprises ferroviaires (JO L 143, p. 70), ainsi que 2001/14, et a mis en demeure la République fédérale d’Allemagne de se conformer à celles-ci.

23

Par lettre du 22 octobre 2008, cet État membre a répondu à cette mise en demeure.

24

Par lettre du 24 février 2009, la Commission a adressé à la République fédérale d’Allemagne une lettre de mise en demeure complémentaire dans laquelle elle lui reprochait de nouvelles infractions, fondées sur une lecture combinée des directives 2001/14 et 91/440 en ce qui concerne la tarification de l’infrastructure et les compétences de l’organisme de contrôle allemand.

25

Par lettre du 17 avril 2009, la République fédérale d’Allemagne a répondu à cette mise en demeure complémentaire.

26

Par lettre du 9 octobre 2009, la Commission a adressé à cet État membre un avis motivé dans lequel elle invitait celui-ci à prendre les mesures nécessaires pour se conformer audit avis motivé dans le délai de deux mois à compter de sa réception.

27

Par lettre du 3 décembre 2009, la République fédérale d’Allemagne a répondu à cet avis motivé en contestant le manquement reproché par la Commission.

28

N’étant pas satisfaite de la réponse de cet État membre, la Commission a décidé d’introduire le présent recours.

29

Par ordonnance du président de la Cour du 19 mai 2011, la République tchèque et la République italienne ont été admises à intervenir au soutien des conclusions de la République fédérale d’Allemagne.

Sur le recours

Sur le grief relatif à l’indépendance de l’entité à laquelle est confié l’exercice des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440

Argumentation des parties

30

La Commission soutient que l’entité à laquelle a été confié l’exercice des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440 doit être indépendante économiquement, et non pas seulement juridiquement, de l’entreprise qui fournit les services de transport ferroviaire.

31

À cet égard, elle fait valoir que, bien que l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440 n’exige pas explicitement que l’entité à laquelle est confié l’exercice de ces fonctions essentielles soit «indépendante» des sociétés qui fournissent les services de transport ferroviaire, le terme «entreprise» utilisé à cette disposition doit néanmoins être interprété, conformément à la jurisprudence de la Cour, comme couvrant toutes les entités qui, même si elles sont juridiquement séparées, agissent comme une «unité économique».

32

Selon la Commission, il convient d’interpréter l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440 en ce sens que les fonctions essentielles exercées par le gestionnaire de l’infrastructure doivent être assurées par une entité distincte des entreprises ferroviaires non seulement au regard du droit, mais également indépendantes de celles-ci sur les plans organisationnel et décisionnel.

33

La Commission fait ensuite valoir que, lorsque lesdites fonctions essentielles sont exercées par une société dépendant d’une holding ferroviaire, comme c’est le cas de DB Netz, il convient d’évaluer dans quelle mesure et dans quelles conditions cette société, qui est, par ailleurs, le gestionnaire d’infrastructure ferroviaire chargé d’exercer ces mêmes fonctions essentielles, peut être considérée comme «indépendante» de l’entreprise qui fournit les services de transport ferroviaire, à savoir la holding et les sociétés dépendant de cette dernière qui assurent les services de transport des personnes et des marchandises, malgré leur appartenance à un même groupe.

34

Or, la République fédérale d’Allemagne n’aurait pas prévu de mécanismes efficaces pour garantir l’indépendance organisationnelle et décisionnelle du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire DB Netz et l’exercice indépendant par ce dernier des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440. La Commission en déduit que cet État membre a ainsi manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6, paragraphe 3, et de l’annexe II de cette directive, ainsi que des articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14.

35

Afin d’examiner si les États membres sont en mesure de prouver que leurs sociétés holdings ferroviaires nationales ou leurs autres organismes de contrôle garantissent l’indépendance nécessaire desdites fonctions essentielles et que les conflits d’intérêts sont évités, la Commission aurait fait connaître dès 2006 les critères sur la base desquels elle examine l’indépendance requise par la directive 2001/14 et les mesures prévues pour garantir cette indépendance. Il s’agirait des critères mentionnés à l’annexe 5 du document de travail des services de la Commission accompagnant le rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 3 mai 2006 sur la mise en œuvre du premier paquet ferroviaire [COM(2006) 189] (ci-après l’«annexe 5»).

36

À cet égard, la Commission fait valoir, en premier lieu, que le respect des obligations d’indépendance doit faire l’objet d’un contrôle de la part d’une autorité indépendante, telle que l’autorité de régulation ferroviaire, ou d’un tiers. Les concurrents devraient avoir la possibilité de se plaindre en cas de non-respect de l’exigence d’indépendance. La Commission estime qu’aucune de ces deux dispositions n’est respectée par la République fédérale d’Allemagne.

37

En effet, il ressort, selon la Commission, de l’article 5a de la loi générale sur les chemins de fer que l’Eisenbahn-Bundesamt (Office fédéral des chemins de fer) est seulement autorisé à mettre en œuvre des dispositions relatives à l’indépendance qui sont déjà inscrites dans le droit allemand, à l’instar de celles figurant à l’article 9a de cette loi. L’Eisenbahn-Bundesamt ne disposerait d’aucune compétence en ce qui concerne l’adoption de mesures structurelles, telles que la modification de la structure organisationnelle de la holding, ou de décisions relatives à la structure organisationnelle du gestionnaire d’infrastructure par rapport à la holding ou concernant le remplacement de dirigeants qui ne remplissent pas le critère d’indépendance ou encore le changement de procédés organisationnels de gestion des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440.

38

En deuxième lieu, la Commission estime que doivent exister des dispositions légales ou à tout le moins contractuelles en matière d’indépendance dans la relation entre la holding et l’entité chargée de ces fonctions essentielles, entre cette dernière entité et d’autres entreprises du groupe fournissant des services ferroviaires, ou les autres instances qui sont contrôlées par la holding, notamment l’assemblée des actionnaires de l’entité chargée desdites fonctions essentielles.

39

La Commission soutient que l’article 9a de la loi générale sur les chemins de fer, qui contient des dispositions relatives à l’indépendance, ainsi que les dispositions du règlement interne de la société holding ferroviaire, telles que l’article 1er, paragraphe 3, du contrat de prise de contrôle et de transfert de bénéfices qui interdisent à DB AG de donner des instructions remettant en cause l’indépendance juridique et organisationnelle de DB Netz AG, en ce qui concerne les décisions concernant l’horaire de service, l’attribution de sillons et la tarification, sont des mesures de sauvegarde qui ne suffisent toutefois pas à elles seules à garantir l’indépendance des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440, à éviter les conflits d’intérêts et à affranchir l’instance chargée de ces fonctions essentielles du contrôle de la holding.

40

En troisième lieu, la Commission estime que les membres du directoire de la holding et d’autres entreprises de la holding ne doivent pas faire partie du directoire de l’entité chargée de fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440.

41

En effet, selon elle, il serait difficile de faire valoir que le directoire de l’entité chargée desdites fonctions essentielles est indépendant sur le plan décisionnel du directoire de la holding, dès lors que ces deux directoires seraient composés des mêmes personnes. La Commission fait remarquer qu’aucune disposition légale ne s’oppose à ce qu’une telle situation se présente.

42

En quatrième lieu, aucune disposition n’interdirait aux administrateurs de l’entité chargée de fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440 et aux cadres supérieurs traitant de ces fonctions essentielles d’être empêchés, pendant un nombre raisonnable d’années après avoir quitté l’entité concernée, d’accepter tout emploi de cadre supérieur au sein de la holding ou d’autres instances placées sous son contrôle.

43

En effet, de telles dispositions n’existent pas dans le droit allemand et, dans la pratique, de nombreux dirigeants de DB Netz seraient passés de cette entité à la holding ou à d’autres filiales.

44

En cinquième lieu, la Commission soutient que le conseil d’administration de l’entité chargée de fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440 doit être nommé selon des conditions clairement définies et avec des engagements juridiques garantissant l’indépendance totale de sa prise de décisions. Il devrait être nommé et révoqué sous le contrôle d’une autorité indépendante.

45

En sixième lieu, la Commission fait valoir que l’entité chargée de ces fonctions essentielles doit posséder son propre personnel et être située dans des locaux séparés ou dotés d’un accès protégé. Le règlement intérieur de cette entité ou les contrats de travail conclus par celle-ci devraient indiquer clairement que les contacts avec la holding et les autres sociétés placées sous son contrôle se limitent aux communications officielles liées à l’exercice desdites fonctions essentielles. L’accès aux systèmes d’information devrait être protégé de manière à assurer l’indépendance des mêmes fonctions essentielles.

46

La République fédérale d’Allemagne fait valoir que les articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14 exigent non pas une indépendance économique complète, mais simplement une indépendance du gestionnaire de l’infrastructure sur le plan juridique, organisationnel ou décisionnel, et ce dans le cadre de l’adoption de certaines décisions clairement définies, telles que la répartition des sillons et la tarification de l’infrastructure, conformément à l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440, lu en combinaison avec l’annexe II de cette directive.

47

Ledit État membre soutient que, en ce qui concerne les critères d’examen relatifs à la preuve de l’indépendance, prévus à l’annexe 5, ceux-ci ne coïncident pas avec les dispositions contraignantes pertinentes en l’espèce, fixées à l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440, à l’annexe II de cette dernière, ainsi qu’aux articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14. En outre, le document comportant cette annexe 5 n’aurait pas été publié au Journal officiel de l’Union européenne et ne constituerait pas un acte juridique contraignant. Ainsi, ladite annexe 5 ne saurait être invoquée dans le cadre de la présente procédure.

48

La République italienne intervient à la procédure uniquement au soutien des arguments présentés par la République fédérale d’Allemagne dans le cadre de sa réponse au présent grief de la Commission.

49

La République italienne rappelle que l’obligation de séparation prévue par le législateur de l’Union, en ce qui concerne les fonctions de transport ferroviaire et de gestion de l’infrastructure, est de nature comptable.

50

Cet État membre souligne que la Commission, en ce qui concerne le modèle de holding, défend une approche contradictoire en ce qu’elle arriverait à une présomption d’incompatibilité, ce modèle étant reconnu légalement, mais ne pouvant être compatible avec les directives 91/440 et 2001/14 que dans l’hypothèse où la holding ne détiendrait où n’exercerait aucune des prérogatives propres à une telle holding.

51

La législation de l’Union n’aurait nullement entendu introduire une obligation de séparation des structures de propriété ou des régimes organisationnels ayant des effets équivalents sur le plan de l’autonomie de gestion, mais aurait entendu respecter et garantir le pouvoir discrétionnaire des États membres et des entreprises intéressées d’adopter des modèles d’organisation de différents types.

52

La République italienne, à la lumière tant du texte que de la finalité de ladite législation, ne pourrait faire sien l’argument de la Commission selon lequel les fonctions essentielles visées à l’annexe II de la directive 91/440 devraient être attribuées à des entités extérieures au groupe auquel appartient une entreprise ferroviaire.

Appréciation de la Cour

53

Par son grief, la Commission reproche à la République fédérale d’Allemagne de ne pas avoir adopté de mesures spécifiques permettant de garantir l’indépendance du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, DB Netz, auquel ont été confiées certaines fonctions essentielles visées à l’annexe II de la directive 91/440, alors même que DB Netz appartient à une holding, DB AG, comprenant des entreprises de transport ferroviaire.

54

En effet, la Commission considère que, pour que soit garantie l’indépendance de cette entité sur les plans juridique, organisationnel et décisionnel au sens des articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14, il est nécessaire que l’État membre concerné adopte des règles spécifiques et détaillées, telles qu’elles résultent de l’annexe 5.

55

À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’article 6, paragraphes 1 et 2, de la directive 91/440 ne requiert qu’une séparation comptable entre les activités de transport fournies par les entreprises ferroviaires et les activités de gestion de l’infrastructure ferroviaire, la séparation entre les activités relatives à la fourniture de services de transport par des entreprises ferroviaires et celles relatives à la gestion de l’infrastructure ferroviaire pouvant se faire au moyen de divisions organiques distinctes au sein d’une même entreprise, comme c’est le cas dans le cadre d’une holding.

56

Toutefois, l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440 prévoit que, en vue de garantir un accès équitable et non discriminatoire à l’infrastructure ferroviaire, les États membres doivent prendre les mesures nécessaires pour assurer que les fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de cette directive sont confiées à des instances ou à des entreprises qui ne sont pas elles-mêmes fournisseurs de services de transport ferroviaire, et ce de manière probante, quelles que soient les structures organisationnelles prévues.

57

En tout état de cause, les articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14 prévoient que les entités chargées des fonctions de tarification et de répartition sont indépendantes sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel.

58

En l’occurrence, DB Netz est intégrée, en tant que gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, dans l’entreprise DB AG qui, en tant que holding, supervise également des entreprises ferroviaires. Partant, pour pouvoir assumer les fonctions de tarification et de répartition, DB Netz doit être indépendante de DB AG sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel.

59

À cet égard, il n’est pas contesté que DB Netz dispose, d’une part, d’une personnalité juridique distincte de celle de DB AG et, d’autre part, d’organes et de ressources propres différents de ceux de DB AG.

60

Pour le reste, la Commission fait valoir, dans sa requête, que, pour apprécier l’indépendance décisionnelle du gestionnaire de l’infrastructure qui, comme DB Netz, se trouve intégré dans une entreprise dont certaines unités sont des entreprises ferroviaires, il convient d’appliquer l’annexe 5.

61

Ladite annexe prévoit, ainsi, que le respect des obligations d’indépendance devrait faire l’objet d’un contrôle de la part d’une autorité indépendante ou d’un tiers, qu’il devrait exister des dispositions légales ou à tout le moins contractuelles en matière d’indépendance, qu’il devrait être prévu une interdiction des doubles fonctions entre les organes de direction des différentes sociétés de la holding, qu’un délai de carence devrait être mis en place en cas de transferts de membres dirigeants entre l’entité chargée de fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440 et toute autre entité de la holding, que la révocation et la nomination des administrateurs du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire devraient se faire sous le contrôle d’une autorité indépendante et que l’entité chargée de ces fonctions essentielles devrait posséder son propre personnel et être située dans des locaux séparés.

62

En premier lieu, il convient de relever que l’annexe 5 n’a pas de valeur juridique contraignante. En effet, elle n’a jamais fait l’objet d’une publication au Journal officiel de l’Union européenne et a été rendue publique cinq ans après l’entrée en vigueur de la directive 2001/14, soit trois ans après l’expiration du délai de transposition de celle-ci. Ainsi, au moment de la mise en œuvre des directives 91/440 et 2001/14, les critères énumérés dans cette annexe n’existaient pas. De plus, et indépendamment de ce décalage chronologique, ladite annexe et les critères y figurant n’ont été repris ni dans le texte de la directive 91/440 ni dans celui de la directive 2001/14, non plus que dans aucun autre acte législatif. Partant, il ne saurait être reproché à un État membre de ne pas avoir traduit ces critères dans des dispositions légales ou réglementaires de transposition des directives 91/440 et 2001/14.

63

En deuxième lieu, la comparaison faite par la Commission avec les dispositions concernant le marché intérieur de l’électricité et le marché intérieur du gaz naturel ne saurait être retenue. En effet, la directive 2009/72/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE (JO L 211, p. 55), et la directive 2009/73/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE (JO L 211, p. 94), confèrent à l’autorité de régulation de larges prérogatives en matière de surveillance en ce qui concerne l’indépendance du gestionnaire de réseau de transport. Conformément à l’article 19, paragraphe 2, de chacune de ces directives, l’autorité de régulation peut émettre des objections au sujet de la nomination et de la révocation de membres de la direction générale et des organes administratifs du gestionnaire de réseau de transport. Le paragraphe 3 de cet article 19 prévoit qu’aucune activité ou responsabilité professionnelle ne peut être exercée, aucun intérêt ne peut être détenu ni aucune relation commerciale entretenue, directement ou indirectement, avec l’entreprise verticalement intégrée, ou une partie de celle-ci ou ses actionnaires majoritaires autres que le gestionnaire de réseau de transport, pendant une période de trois ans avant la nomination des responsables de la direction et/ou des membres des organes administratifs du gestionnaire de réseau de transport. Conformément au paragraphe 4 dudit article 19, les employés du gestionnaire de réseau de transport ne peuvent exercer d’autre activité avec une autre partie de la société holding du secteur de l’énergie. Le paragraphe 7 du même article 19 prévoit une période d’incompatibilité entre l’exercice de fonctions au sein du gestionnaire de réseau de transport et l’exercice d’une activité en relation avec une autre partie de l’entreprise verticalement intégrée.

64

Ainsi, ces deux directives prévoient expressément des dispositions relatives aux conditions d’exercice d’activités au sein de la société gestionnaire de réseau et à des périodes d’incompatibilité, ce qui n’est pas le cas de la directive 2001/14, qui ne précise pas les critères relatifs à l’indépendance devant être assurée entre le gestionnaire de l’infrastructure chargé de fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440 et les entreprises ferroviaires, ces critères ne pouvant donc être déduits des directives 91/440 et 2001/14 et leur respect ne pouvant être imposé à la République fédérale d’Allemagne.

65

Dans ces circonstances, force est de constater que la non-transposition en droit allemand des critères résultant de l’annexe 5 ne peut conduire, à elle seule, à conclure à l’absence d’indépendance décisionnelle de DB Netz, en tant que gestionnaire de l’infrastructure, par rapport à DB AG.

66

Or, il est de jurisprudence constante que, dans le cadre d’une procédure en manquement au titre de l’article 258 TFUE, il incombe à la Commission d’établir l’existence du manquement allégué. C’est donc elle qui doit apporter à la Cour les éléments nécessaires à la vérification par celle-ci de l’existence de ce manquement, sans pouvoir se fonder sur des présomptions quelconques (voir, notamment, arrêts du 26 avril 2005, Commission/Irlande, C-494/01, Rec. p. I-3331, point 41; du 6 octobre 2009, Commission/Finlande, C-335/07, Rec. p. I-9459, point 46, et du 10 décembre 2009, Commission/Royaume-Uni, C‑390/07, point 43).

67

Toutefois, la Commission n’a fourni aucune preuve concrète démontrant que DB Netz n’est pas indépendante de DB AG en ce qui concerne les modalités de prise de décisions.

68

À cet égard, il résulte, notamment, de l’article 1er du contrat de prise de contrôle et de transfert de bénéfices conclu le 1er juin 1999 entre DB AG et DB Netz ainsi que de l’article 4 du règlement intérieur du directoire de DB Netz que certaines dispositions de ces actes de droit privé visent précisément à garantir, en pratique, une indépendance décisionnelle de DB Netz à l’égard de DB AG.

69

Dès lors, il appartenait à la Commission, eu égard non seulement aux objectifs des directives 91/440 et 2001/14, mais également à l’ensemble des éléments, y compris de nature privée, qui encadrent les relations existant entre DB Netz et DB AG, de prouver que, en pratique, DB Netz ne dispose pas d’une indépendance décisionnelle à l’égard de DB AG.

70

Il résulte des considérations qui précèdent qu’il convient de rejeter le grief de la Commission relatif à l’indépendance de l’entité à laquelle est confié l’exercice des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440.

Sur le grief relatif à la tarification

Argumentation des parties

71

La Commission soutient que la République fédérale d’Allemagne n’a pas rempli les obligations qui lui incombent en vertu des articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14.

72

Elle fait valoir que l’article 14, paragraphe 4, de la loi générale sur les chemins de fer, par lequel la République fédérale d’Allemagne a transposé ces dispositions, présente des lacunes. En effet, cette disposition ne permettrait toujours pas de déterminer avec certitude, d’une part, si c’est le principe des coûts directs, prévu à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, ou celui des coûts totaux, énoncé à l’article 8, paragraphe 1, de cette directive, qui est appliqué et, d’autre part, les conditions dans lesquelles il convient d’appliquer l’un ou l’autre de ces principes.

73

En outre, cet État membre aurait apparemment opté pour le principe des coûts totaux. Or, il n’aurait pas respecté intégralement les conditions nécessaires à l’application de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 et, notamment, celle consistant à préciser les circonstances dans lesquelles un test de capacité du marché à supporter ces coûts doit être effectué, lequel serait nécessaire afin de vérifier si tous les segments de marché peuvent supporter lesdits coûts.

74

La République fédérale d’Allemagne estime que, s’agissant de la prise en compte de la compétitivité, les dispositions de la réglementation allemande satisfont pleinement aux exigences fixées à l’article 8, paragraphe 1, première phrase, de la directive 2001/14. En effet, la directive 2001/14 n’exigerait pas, en ce qui concerne le test de capacité à supporter les coûts, que l’appréciation de la compétitivité se fasse pour chaque segment de marché. L’article 14, paragraphe 4, de la loi générale sur les chemins de fer, par lequel ledit article de cette directive a été transposé obligerait, et cela en conformité avec le libellé et l’objectif de ladite directive, uniquement les destinataires à garantir la compétitivité, en particulier pour le transport ferroviaire international de marchandises. Ainsi, le droit national respecterait les exigences et les objectifs visés par la directive 2001/14.

75

Les coûts pourraient être intégralement imputés lors de la détermination du montant de la redevance. DB Netz aurait, dès lors, le pouvoir de fixer sa tarification de manière à compenser les coûts de l’infrastructure qui ne sont pas couverts par des subventions étatiques.

76

La République fédérale d’Allemagne réfute l’argumentation de la Commission selon laquelle la réglementation allemande ne prévoit pas de définition des segments de marché visés à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14. Cet État membre soutient qu’il garantit pleinement l’effet utile de cet objectif réglementaire au moyen de l’article 14, paragraphe 4, troisième phrase, de la loi générale sur les chemins de fer. En outre, il résulterait des dispositions relatives à l’indépendance dans le cadre de la fixation des prix que la législation de l’Union laisse aux entreprises actives sur le marché le soin d’évaluer la capacité contributive de la demande. L’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 ne prévoirait expressément aucune exigence plus large en ce qui concerne, notamment, l’information des entreprises de transport en matière de procédure et de contrôle.

77

La République tchèque partage les arguments de la République fédérale d’Allemagne selon lesquels les dispositions citées par la Commission ont été correctement mise en œuvre par ce dernier État membre, en ce qui concerne tant les griefs tirés d’une transposition prétendument incorrecte des dispositions du droit de l’Union en cause que celui tiré d’une prétendue violation des dispositions combinées des articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14.

78

Plus particulièrement en ce qui concerne la violation de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, la République tchèque considère qu’il convient de clarifier la notion de «coûts directement imputables à l’exploitation du service ferroviaire» afin de vérifier si les dispositions susmentionnées ont ou non été enfreintes.

Appréciation de la Cour

79

Par le présent grief, la Commission reproche, en substance, à la République fédérale d’Allemagne de ne pas avoir adopté une législation indiquant avec certitude, d’une part, s’il convient d’appliquer le principe des coûts directs prévu à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14 ou celui des coûts totaux prévu à l’article 8, paragraphe 1, de cette dernière et, d’autre part, les conditions dans lesquelles il y a lieu d’appliquer l’un ou l’autre de ces principes.

80

Conformément à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, les redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services doivent être égales au coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, sans préjudice des dispositions des paragraphes 4 ou 5 de cet article ou de l’article 8 de cette directive.

81

L’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 prévoit que, lorsque le marché s’y prête, des majorations peuvent être perçues par l’État membre afin de procéder au recouvrement total des coûts encourus par le gestionnaire de l’infrastructure.

82

Il convient de rappeler que l’un des objectifs poursuivis par le système de tarification mis en place par la directive 2001/14 consiste à assurer l’indépendance de gestion du gestionnaire de l’infrastructure. En d’autres termes, ce dernier doit, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 80 de ses conclusions, faire usage du système de tarification comme d’un instrument de gestion. Il ressort ainsi du considérant 12 de cette directive que les systèmes de tarification et de répartition des capacités doivent inciter les gestionnaires d’infrastructure ferroviaire à optimiser l’utilisation de leur infrastructure dans le cadre défini par les États membres. Or, afin de rendre possible une telle optimisation, lesdits gestionnaires doivent disposer d’une certaine marge de manœuvre, ainsi que le mentionne le considérant 20 de ladite directive.

83

De même, d’autres dispositions de la directive 2001/14 nécessitent, dans leur application, de laisser une certaine marge de manœuvre aux gestionnaires d’infrastructure, afin de les inciter à optimiser l’utilisation de leur infrastructure. En effet, l’article 8, paragraphe 2, de cette directive dispose que le gestionnaire de l’infrastructure peut fixer ou maintenir des redevances plus élevées, fondées sur le coût à long terme de certains projets d’investissement. L’article 9 de ladite directive permet audit gestionnaire d’instaurer des systèmes de réduction des redevances perçues par les opérateurs.

84

Il convient également de relever que l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/14 établit une répartition des compétences entre les États membres et le gestionnaire de l’infrastructure en ce qui concerne les systèmes de tarification. En effet, il revient aux États membres d’établir un cadre pour la tarification tandis que la détermination de la redevance et son recouvrement incombent au gestionnaire de l’infrastructure. Toutefois, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 78 de ses conclusions, l’État peut procéder au recouvrement total des coûts de l’infrastructure par des majorations si le marché s’y prête et si cela n’exclut pas l’utilisation des infrastructures par des segments de marché qui peuvent à tout le moins acquitter le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, majoré d’un taux de rentabilité.

85

Force est de constater que, afin de respecter les objectifs poursuivis par la directive 2001/14, la redevance d’utilisation de l’infrastructure constitue, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 77 de ses conclusions, un minimum, qui correspond au coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire prévu à l’article 7, paragraphe 3, de cette directive, et un maximum, qui résulte des coûts totaux encourus par le gestionnaire de l’infrastructure, ainsi que le prévoit l’article 8, paragraphe 1, de ladite directive.

86

Entre ces deux extrêmes, la directive 2001/14 prévoit que la redevance peut varier par la prise en compte de la rareté des capacités, ainsi que le prévoit l’article 7, paragraphe 4, de cette directive, ou du coût des effets sur l’environnement mentionné au paragraphe 5 de cet article 7, ou encore des projets d’investissement spécifiques visés à l’article 8, paragraphe 2, de ladite directive, ainsi que des réductions prévues à l’article 9 de cette dernière.

87

Ainsi, en ce qui concerne l’argument de la Commission selon lequel l’article 14, paragraphe 4, de la loi générale sur les chemins de fer ne permet pas de déterminer si c’est le principe des coûts directs, prévu à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, ou celui des coûts totaux prévu à l’article 8, paragraphe 1, de ladite directive qui s’applique, il convient de relever, ainsi qu’il a été relevé aux points 84 et 85 du présent arrêt, que ces deux principes ne sont pas substituables l’un à l’autre. En effet, le système prévu à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 ne peut être utilisé que si le marché s’y prête, une étude de marché étant nécessaire aux fins de vérifier si tel est le cas.

88

En l’occurrence, ladite disposition nationale permet le recouvrement total des coûts encourus et laisse au gestionnaire de l’infrastructure la possibilité d’effectuer une différenciation en fonction des services de transport de voyageurs à grande distance, de transport de voyageurs à courte distance ou de fret ferroviaire ainsi qu’en fonction des segments de marché à l’intérieur de ces services de transport. Toutefois, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 85 de ses conclusions, la directive 2001/14 n’impose pas aux États membres de prévoir des règles de tarification plus détaillées.

89

En ce qui concerne l’argument de la Commission selon lequel un test de capacité du marché à supporter les coûts devrait être effectué afin de vérifier si tous les segments de marché peuvent supporter ces coûts, il convient de considérer que ce test ne doit être réalisé par le gestionnaire de l’infrastructure que lorsque ce dernier veut percevoir une majoration des coûts spécifiquement en fonction des segments de marché. Ainsi qu’il a été exposé au point 84 du présent arrêt, l’État membre est seulement tenu d’établir un cadre pour la tarification tandis que la tarification elle-même incombe au gestionnaire de l’infrastructure. Il en résulte que, en vertu de la directive 2001/14, la République fédérale d’Allemagne n’est pas tenue d’imposer, dans sa réglementation nationale, les modalités selon lesquelles le gestionnaire de l’infrastructure doit déterminer la capacité des segments de marché à supporter les éventuelles majorations de coûts et les circonstances dans lesquelles il doit le faire.

90

Au vu des considérations qui précèdent, il convient d’écarter le grief de la Commission relatif à la tarification.

Sur le grief relatif aux mesures d’incitation à réduire les coûts

Argumentation des parties

91

La Commission soutient que l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14 n’a pas été transposé dans la réglementation allemande. Selon cette institution, aucun des mécanismes cités par la République fédérale d’Allemagne n’incite le gestionnaire de l’infrastructure à limiter les coûts liés au service d’infrastructure ou le niveau des redevances d’accès. De surcroît, les conventions de prestation et de financement conclues entre l’État allemand, les entreprises d’infrastructure de DB AG et cette société elle-même ne contiendraient aucune disposition prévoyant une réduction des coûts d’infrastructure et des tarifs.

92

La République fédérale d’Allemagne fait valoir que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14 part du principe selon lequel il convient d’atteindre un équilibre entre, d’une part, les recettes tirées des redevances d’utilisation de l’infrastructure et le financement par l’État et, d’autre part, les dépenses d’infrastructure. Elle estime que l’importance des coûts liés au service de l’infrastructure, le montant des redevances d’accès et celui du financement étatique s’insèrent dans une relation économique qui exclut des exigences juridiques unilatérales. Ainsi, les dispositions de cette directive ne permettraient pas de conclure à une obligation unilatérale de réduction des coûts ou des tarifs. L’objectif de diminution des coûts et des redevances d’accès prévu à l’article 6, paragraphe 2, de ladite directive serait soumis au respect des exigences en matière de sécurité et d’amélioration de la qualité du service de l’infrastructure.

93

Ledit État membre soutient également que la directive 2001/14 n’exige pas une diminution effective des coûts ou des redevances d’accès. Cette obligation devrait, au contraire, se concilier avec les autres exigences en matière de structure de la tarification. Il conviendrait, globalement, d’assurer la réalisation de l’objectif à long terme visant à atteindre un équilibre entre les recettes et les dépenses relatives à l’infrastructure.

94

La République fédérale d’Allemagne estime également que, conformément au libellé de l’article 6, paragraphe 3, de la directive 2001/14, le législateur national peut décider de l’instrument d’action qu’il utilisera lors de la transposition, à savoir soit un contrat conclu entre l’autorité compétente et le gestionnaire de l’infrastructure, soit des mesures réglementaires appropriées.

95

Ledit État membre soutient qu’il a pleinement transposé le mécanisme incitatif prévu à l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14. La convention de prestation et de financement («Leistungs- und Finanzierungsvereinbarung», ci-après la «LuFV») remplirait les conditions exigées d’un contrat, au sens de l’article 6, paragraphe 3, de cette directive, et constituerait de ce fait un système efficace d’incitation à la diminution des coûts et des redevances d’accès, conformément à l’article 6, paragraphe 2, de ladite directive.

96

En effet, la LuFV imposerait notamment aux gestionnaires d’infrastructure de nombreuses obligations en matière de garantie de la qualité et d’information. Les exigences qualitatives imposées seraient structurées de manière à assurer une amélioration progressive de la qualité de l’infrastructure ferroviaire. Cette convention limiterait les subventions versées par l’État fédéral pour des investissements de remplacement à un montant annuel de 2,5 milliards d’euros et obligerait les gestionnaires d’infrastructure à prévoir des moyens financiers propres en vue d’assurer la maintenance des voies ferrées.

97

En outre, il existerait, dans le secteur des chemins de fer, de nombreux éléments systémiques incitant à la diminution des coûts, les sociétés gestionnaires d’infrastructure devant être gérées comme des entreprises commerciales soumises au respect des principes de l’économie privée par, notamment, une gestion d’entreprise orientée vers la concurrence, aux fins de maximiser les gains, ce qui inciterait fortement DB Netz à diminuer ses coûts.

Appréciation de la Cour

98

Par le présent grief, la Commission reproche, en substance, à la République fédérale d’Allemagne de ne pas avoir prévu de mécanismes incitant le gestionnaire de l’infrastructure à limiter les coûts liés au service d’infrastructure ou à réduire le niveau des redevances d’accès.

99

La Commission et la République fédérale d’Allemagne s’opposent sur le point de savoir si le gestionnaire de l’infrastructure doit faire l’objet tant de mesures incitatives en vue de la diminution des coûts de fourniture de l’infrastructure que, et cela indépendamment de ces dernières, de mesures incitatives en vue de la réduction des redevances d’accès.

100

Il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14, les États membres doivent définir les conditions appropriées pour que les comptes dudit gestionnaire, dans des conditions normales d’activité et par rapport à une période raisonnable, présentent au moins un équilibre entre, d’une part, les recettes tirées des redevances, les excédents dégagés d’autres activités commerciales et le financement par l’État et, d’autre part, les dépenses d’infrastructure. Conformément à l’article 6, paragraphe 2, de cette directive, le gestionnaire de l’infrastructure est encouragé par des mesures d’incitation à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès.

101

À cet égard, l’article 6, paragraphe 3, de la directive 2001/14 prévoit que l’obligation découlant du paragraphe 2 de cet article 6 doit être mise en œuvre soit dans le cadre d’un contrat pluriannuel prévoyant le financement par l’État, conclu entre le gestionnaire de l’infrastructure et l’autorité compétente, soit par l’établissement de mesures réglementaires appropriées, prévoyant les pouvoirs nécessaires. Il est donc loisible aux États membres de mettre en œuvre les mesures d’incitation dans le cadre d’un contrat pluriannuel ou au moyen de dispositions réglementaires.

102

En l’espèce, la LuFV a été conclue entre l’État allemand, DB AG et les entreprises d’infrastructure ferroviaire de cette société et elle constitue un mécanisme incitatif au sens du contrat pluriannuel prévu à l’article 6, paragraphe 3, de la directive 2001/14.

103

En effet, les conditions auxquelles est soumis le financement étatique, telles que prévues par la LuFV, sont de nature à inciter le gestionnaire de l’infrastructure à réduire les coûts dans la mesure où elles limitent les subventions de l’État fédéral pour des investissements de remplacement à un montant annuel de 2,5 milliards d’euros, cela en dépit de l’inflation, ce qui oblige ledit gestionnaire, qui est tenu de respecter un standard de qualité constant, à diminuer les coûts. Il en va d’autant plus ainsi que le gestionnaire de l’infrastructure est tenu de fournir une contribution, prélevée sur ses propres ressources, pour la réalisation d’investissements de remplacement.

104

De même, la LuFV impose des obligations en matière de garantie de la qualité et d’information, auxquelles le gestionnaire de l’infrastructure doit se soumettre sous peine de sanctions.

105

Ainsi, ces mesures incitent le gestionnaire de l’infrastructure à réduire les coûts et, indirectement, à diminuer le niveau des redevances.

106

En ce qui concerne l’argument de la Commission selon lequel l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14 impose aux États membres de prévoir des mesures d’incitation à la réduction des redevances d’accès distinctes de celles prises en vue d’inciter à une diminution des coûts, force est de constater que le considérant 40 de ladite directive énonce que l’infrastructure ferroviaire est un monopole naturel et qu’il est dès lors nécessaire d’inciter, par des mesures d’encouragement, les gestionnaires de l’infrastructure à réduire les coûts et à gérer leur infrastructure de manière efficace. Or, ce considérant fait état non pas des redevances, mais uniquement des coûts.

107

Certes, l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14 prévoit que des mesures d’incitation doivent être prises de manière à réduire les coûts et les redevances d’accès. Toutefois, cette disposition ne prévoit nullement que ces mesures doivent être prises de façon distincte.

108

En effet, admettre la position de la Commission reviendrait à reconnaître l’obligation, pour un État membre, d’inciter le gestionnaire de l’infrastructure à répercuter sur les utilisateurs du réseau, par une diminution des redevances, une partie des excédents obtenus par une augmentation de son efficacité, alors même qu’il pourrait ne pas être en mesure de recouvrer tous les coûts de fourniture de l’infrastructure. Cette interprétation obligerait l’État membre, en contrepartie de cette répercussion, à financer l’infrastructure. Force est de constater qu’une telle interprétation serait en contradiction avec l’article 6, paragraphe 1, second alinéa, de la directive 2001/14, qui prévoit qu’un État membre peut, à l’intérieur du cadre de tarification défini aux articles 7 et 8 de cette directive, exiger du gestionnaire de l’infrastructure qu’il équilibre ses comptes sans apport financier de l’État.

109

Il y a lieu, dès lors, de considérer que l’obligation d’encourager le gestionnaire de l’infrastructure, par des mesures d’incitation, à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès est, en l’espèce, satisfaite par les mesures visant à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure, ces mesures ayant également un impact sur la réduction des redevances, ainsi qu’il a été mentionné aux points 102 à 105 du présent arrêt.

110

En outre, il convient également de constater que les mesures incitatives visant à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure ne pourront qu’entraîner une baisse du niveau des redevances d’accès, que celles-ci soient fixées sur la base de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14 ou sur celle de l’article 8, paragraphe 1, de cette directive.

111

Il résulte des considérations qui précèdent que le grief de la Commission relatif aux mesures d’incitation à réduire les coûts doit être écarté.

Sur le grief relatif aux compétences de l’organisme de contrôle

Argumentation des parties

112

La Commission soutient, tout d’abord, que la République fédérale d’Allemagne a manqué à ses obligations découlant de l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14, lu en combinaison avec l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440.

113

Selon la Commission, l’organisme de contrôle ne peut remplir l’obligation, qui lui est faite à l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440, de surveiller régulièrement la concurrence sur le marché des services ferroviaires et de corriger les développements négatifs sur ces marchés que si, indépendamment de plaintes ou d’une suspicion concrète d’infraction aux directives concernées, il est autorisé à interroger les entreprises ferroviaires et les gestionnaires d’infrastructure et s’il est en droit de les contraindre à répondre à ses demandes de renseignements par la menace de sanctions appropriées. Dans l’hypothèse où il ne disposerait pas d’informations obtenues au moyen de telles demandes de renseignements, l’organisme de contrôle, qui serait toujours tenu de s’appuyer sur des informations communiquées par les plaignants, ne serait pas en mesure d’engager une procédure de sa propre initiative.

114

Ensuite, la Commission estime que la transposition de l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14 est incomplète dès lors que cet article ne ferait pas de distinction entre les gestionnaires d’infrastructure et les entreprises de transport.

115

Enfin, si l’organisme de contrôle n’a pas la possibilité de faire exécuter une demande de renseignements, il ne pourrait compter que sur les informations que les entreprises ferroviaires veulent bien lui communiquer, ce qui ne correspondrait pas aux objectifs poursuivis par la directive 2001/14.

116

La République fédérale d’Allemagne fait valoir que l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14 n’exige pas que l’organisme de contrôle soit habilité à obtenir des renseignements en l’absence de raison particulière ou de toute suspicion d’infraction. Cette disposition devrait, au contraire, être interprétée dans le contexte du champ d’application et de l’objectif réglementaire de cette directive, à savoir la répartition des capacités de l’infrastructure ferroviaire et la tarification de cette dernière. Dans ce contexte, l’organisme de contrôle remplirait plutôt la fonction d’un organisme de recours, qui surveille et garantit l’accès non discriminatoire à l’infrastructure ferroviaire dans le cadre de la répartition des capacités et de la tarification. Ladite disposition prévoirait seulement un droit matériel d’obtenir des renseignements et une obligation correspondante d’en fournir, sans que la question de la sanction de tels droits soit évoquée dans ladite directive.

117

De même, l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440 n’habiliterait pas l’organisme de contrôle à obtenir des renseignements ou à infliger des sanctions dans le domaine de la concurrence.

Appréciation de la Cour

118

Par le présent grief, la Commission reproche, en substance, à la République fédérale d’Allemagne d’avoir manqué à ses obligations découlant de l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440 et de l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14, en ne prévoyant pas que l’organisme de contrôle prévu à cet article 30 soit autorisé, indépendamment de plaintes ou d’une suspicion concrète d’infraction aux directives concernées, à interroger les entreprises ferroviaires et les gestionnaires de l’infrastructure et à infliger des sanctions à ces derniers.

119

Conformément à l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14, l’organisme de contrôle est habilité à demander les informations utiles au gestionnaire de l’infrastructure, aux candidats et à toute autre partie intéressée dans l’État membre concerné, et ces informations sont fournies sans tarder.

120

Force est de constater que l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14 n’exige pas de l’organisme de contrôle qu’il ait des compétences en matière d’obtention de renseignements en l’absence de raison particulière ou de toute suspicion d’infraction.

121

À cet égard, il convient de relever que l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14 doit être interprété en tenant compte de son champ d’application et de l’objectif poursuivi par cette directive.

122

Ainsi qu’il ressort du considérant 16 de la directive 2001/14, les systèmes de tarification et de répartition des capacités permettent une concurrence équitable dans la fourniture de services ferroviaires. En outre, selon le considérant 46 de cette directive, la gestion efficace et l’utilisation équitable et non discriminatoire de l’infrastructure ferroviaire exigent la mise en place d’un organisme de réglementation, chargé de surveiller l’application de ces règles de l’Union et d’agir comme organisme de recours, nonobstant la possibilité d’un contrôle juridictionnel.

123

Cette interprétation est également corroborée par l’objet de la directive 2001/14, figurant à l’article 1er de cette directive. En effet, selon cette disposition, ladite directive a pour objet les principes et les procédures à suivre pour la fixation et la perception de redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire et pour la répartition des capacités de cette infrastructure.

124

Il découle de ces éléments ainsi que du contexte réglementaire dans lequel s’inscrit l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14 que l’organisme de contrôle prévu à cette disposition a pour rôle de surveiller et de garantir un accès non discriminatoire à l’infrastructure ferroviaire, dans le cadre de la répartition des capacités et de la tarification. De ce fait, la possibilité, pour cet organisme, d’obtenir des renseignements découle de l’article 30, paragraphe 2, de la directive 2001/14 qui prévoit qu’un candidat peut saisir ledit organisme dès lors qu’il estime être victime d’un traitement inéquitable, d’une discrimination ou de tout autre préjudice.

125

En ce qui concerne la question de savoir si l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440, lu en combinaison avec l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14, permet à l’organisme de contrôle d’effectuer d’office des enquêtes, sans qu’une plainte ait été déposée et en l’absence de raison particulière ou de toute suspicion d’infraction, il convient de rappeler que l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440 prévoit que l’organisme réglementaire créé conformément à l’article 30 de la directive 2001/14, ou tout autre organisme disposant du même degré d’indépendance, contrôle la concurrence sur les marchés des services ferroviaires, y compris le marché du transport de fret ferroviaire.

126

Force est de constater que l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440 ne fait pas mention de la possibilité ou même de l’obligation pour un État membre d’exiger de l’organisme de contrôle, dans le cadre de sa mission de contrôle de la concurrence, qu’il obtienne des renseignements en l’absence de raison particulière ou de toute suspicion d’infraction ou qu’il inflige des sanctions.

127

Certes, il est vrai que l’article 10, paragraphe 7, second alinéa, troisième phrase, de la directive 91/440 prévoit que l’organisme de contrôle statue dans les meilleurs délais, sur la base d’une plainte et, le cas échéant, d’office, sur les mesures propres à remédier aux développements négatifs sur ces marchés. Toutefois, il ressort de l’économie de cette disposition, qui renvoie à l’article 30 de la directive 2001/14, dont la portée a été analysée aux points 121 à 125 du présent arrêt, que la place de cette phrase au sein même de l’article 10, paragraphe 7, second alinéa, de la directive 91/440 ainsi que la compétence de l’organisme de contrôle pour statuer d’office sur les mesures propres à remédier au développement négatif sur les marchés des services ferroviaires doivent être interprétées en ce sens que cet organisme peut agir, en dehors de toute plainte, sur la base d’informations dont il viendrait à avoir connaissance, notamment dans le cadre d’une suspicion concrète d’infraction, et non en ce sens qu’il serait habilité à initier ses propres enquêtes et à contraindre les entreprises concernées à répondre à celles-ci.

128

Par conséquent l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440 et l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14 ne prévoient pas expressément que doivent être mises en œuvre par l’État membre des mesures permettant à l’organisme de contrôle d’obtenir des renseignements en l’absence de plainte ou de suspicion d’infraction auxdites directives et de prévoir des sanctions à ces éventuelles infractions. Ainsi, il ne saurait être reproché à la République fédérale d’Allemagne de ne pas avoir prévu de telles mesures dans sa législation nationale.

129

Il s’ensuit que le grief de la Commission relatif aux compétences de l’organisme de contrôle doit être écarté. Partant, il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours de la Commission doit être rejeté.

Sur les dépens

130

En vertu de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La République fédérale d’Allemagne ayant conclu à la condamnation de la Commission et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

131

En application de l’article 140, paragraphe 1, du règlement de procédure, la République tchèque et République italienne supporteront leurs propres dépens.

 

Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête:

 

1)

Le recours est rejeté.

 

2)

La Commission européenne est condamnée aux dépens.

 

3)

La République tchèque et la République italienne supportent leurs propres dépens.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: l’allemand.


Parties
Motifs de l'arrêt
Dispositif

Parties

Dans l’affaire C-556/10,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 26 novembre 2010,

Commission européenne, représentée par MM. G. Braun et H. Støvlbæk, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République fédérale d’Allemagne, représentée par MM. T. Henze, J. Möller et M. N. Graf Vitzthum, en qualité d’agents, assistés de M e  R. Van der Hout, advocaat,

partie défenderesse,

soutenue par:

République tchèque, représentée par M. M. Smolek, M me  J. Očková et M. T. Müller, en qualité d’agents,

République italienne, représentée par M me  G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. S. Fiorentino, avvocato dello Stato, ayant élu domicile à Luxembourg,

parties intervenantes,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. A. Borg Barthet (rapporteur), E. Levits, J.-J. Kasel et M me  M. Berger, juges,

avocat général: M. N. Jääskinen,

greffier: M me  C. Strömholm, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 mai 2012,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 6 septembre 2012,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1. Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que:

– en ne prenant pas les mesures nécessaires pour assurer que l’entité à laquelle est confié l’exercice des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440/CEE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au développement de chemins de fer communautaires (JO L 237, p. 25), telle que modifiée par la directive 2001/12/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001 (JO L 75, p. 1, ci-après la «directive 91/440»), soit indépendante de l’entreprise qui fournit les services de transport ferroviaire;

– en n’adoptant pas de mesures d’incitation à réduire les coûts;

– en n’assurant pas une transposition correcte des dispositions relatives à la tarification de l’infrastructure ferroviaire figurant dans la directive 2001/14/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001, concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire (JO L 75, p. 29), telle que modifiée par la directive 2007/58/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2007 (JO L 315, p. 44, ci-après la «directive 2001/14»), et

– en ne dotant pas l’organisme de contrôle prévu à l’article 30 de la directive 2001/14 de certaines compétences en matière d’obtention de renseignements et de sanctions,

la République fédérale d’Allemagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6, paragraphe 3, et de l’annexe II de la directive 91/440, des articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14, des articles 6, paragraphe 2, 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de cette dernière directive, ainsi que de l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14, lu en combinaison avec l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 91/440

2. Le quatrième considérant de la directive 91/440 énonce:

«[...] le développement futur et une exploitation efficace du réseau ferroviaire peuvent être facilités par une séparation entre l’exploitation des services de transport et la gestion de l’infrastructure; [...] dans ces conditions, il est nécessaire que ces deux activités aient obligatoirement des comptes distincts et puissent être gérés séparément».

3. L’article 6, paragraphes 1 à 3, de cette directive prévoit:

«1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer la tenue et la publication de comptes de profits et pertes séparés et de bilans séparés, d’une part, pour les activités relatives à la fourniture de services de transport par des entreprises ferroviaires et, d’autre part, pour celles relatives à la gestion de l’infrastructure ferroviaire. Les aides publiques versées à l’une de ces deux activités ne peuvent pas être transférées à l’autre.

Les comptes relatifs aux deux activités sont tenus de façon à refléter cette interdiction.

2. Les États membres peuvent, en outre, prévoir que cette séparation comporte des divisions organiques distinctes au sein d’une même entreprise ou que la gestion de l’infrastructure est assurée par une entité distincte.

3. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour assurer que les fonctions essentielles en vue de garantir un accès équitable et non discriminatoire à l’infrastructure, qui sont énumérées à l’annexe II, sont confiées à des instances ou entreprises qui ne sont pas elles-mêmes fournisseurs de services de transport ferroviaire. Quelles que soient les structures organisationnelles, cet objectif doit être atteint d’une manière probante.

Les États membres peuvent, toutefois, confier aux entreprises ferroviaires ou à toute autre entité la perception des redevances et la responsabilité de la gestion des infrastructures, par exemple, tels que, l’entretien et le financement.»

4. L’article 10, paragraphe 7, de ladite directive dispose:

«Sans préjudice des réglementations communautaire et nationale relatives à la politique de la concurrence et des institutions compétentes en la matière, l’organisme réglementaire créé conformément à l’article 30 de la directive 2001/14/CE, ou tout autre organisme disposant du même degré d’indépendance, contrôle la concurrence sur les marchés des services ferroviaires, y compris le marché du transport de fret ferroviaire.

Cet organisme est établi conformément aux règles prévues à l’article 30, paragraphe 1, de ladite directive. Tout demandeur ou toute partie intéressée peut adresser une plainte à cet organisme s’il estime avoir été traité injustement ou avoir fait l’objet d’une discrimination ou avoir été lésé de toute autre manière. L’organisme de contrôle statue dans les meilleurs délais, sur la base d’une plainte et, le cas échéant, d’office, sur les mesures propres à remédier aux développements négatifs sur ces marchés. Pour assurer la possibilité nécessaire d’un contrôle juridictionnel et la coopération requise entre les organismes de contrôle nationaux, l’article 30, paragraphe 6, et l’article 31 de ladite directive s’appliquent en l’occurrence.»

5. L’annexe II de la directive 91/440 mentionne la liste des fonctions essentielles visées à l’article 6, paragraphe 3, de cette directive dans les termes suivants:

«– préparation et adoption des décisions concernant la délivrance de licences aux entreprises ferroviaires, y compris l’octroi de licences individuelles,

– adoption des décisions concernant la répartition des sillons, y compris la définition et l’évaluation de la disponibilité, ainsi que l’attribution de sillons individuels,

– adoption des décisions concernant la tarification de l’infrastructure,

– contrôle du respect des obligations de service public requises pour la fourniture de certains services».

La directive 2001/14

6. Les considérants 12, 16, 20, 40 et 46 de la directive 2001/14 énoncent les objectifs de cette directive comme suit:

(12) Dans le cadre défini par les États membres, il est opportun que les systèmes de tarification et de répartition des capacités incitent les gestionnaires d’infrastructure ferroviaire à optimiser l’utilisation de leur infrastructure.

[...]

(16) Il y a lieu que les systèmes de tarification et de répartition des capacités permettent une concurrence équitable dans la fourniture de services ferroviaires.

[...]

(20) Il est souhaitable de laisser une certaine marge de manœuvre aux gestionnaires d’infrastructure afin de permettre une utilisation plus efficace du réseau de l’infrastructure.

[...]

(40) L’infrastructure ferroviaire est un monopole naturel. Il est dès lors nécessaire d’inciter, par des mesures d’encouragement, les gestionnaires de l’infrastructure à réduire les coûts et à gérer leur infrastructure de manière efficace.

[...]

(46) La gestion efficace et l’utilisation équitable et non discriminatoire de l’infrastructure ferroviaire exigent la mise en place d’un organisme de réglementation, chargé de surveiller l’application de ces règles communautaires et d’agir comme organisme de recours, nonobstant la possibilité d’un contrôle juridictionnel.»

7. Aux termes de l’article 1 er , premier alinéa, de ladite directive:

«La présente directive a pour objet les principes et les procédures à suivre pour la fixation et la perception de redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire et pour la répartition des capacités de cette infrastructure.»

8. L’article 4, paragraphes 1 et 2, de la même directive dispose:

«1. Les États membres mettent en place un cadre pour la tarification, mais en respectant l’indépendance de gestion prévue à l’article 4 de la directive 91/440/CEE.

Sous réserve de ladite condition d’indépendance de gestion, les États membres établissent également des règles de tarification spécifiques ou délèguent ce pouvoir au gestionnaire de l’infrastructure. La détermination de la redevance pour l’utilisation de l’infrastructure et son recouvrement incombent au gestionnaire de l’infrastructure.

2. Si le gestionnaire de l’infrastructure n’est pas indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel ou décisionnel, les fonctions décrites dans le présent chapitre, autres que celles de recouvrement des redevances, sont assumées par un organisme de tarification qui est indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel.»

9. L’article 6 de la directive 2001/14 prévoit:

«1. Les États membres définissent les conditions appropriées, comprenant, le cas échéant, des paiements ex ante, pour que les comptes du gestionnaire de l’infrastructure, dans des conditions normales d’activité et par rapport à une période raisonnable, présentent au moins un équilibre entre, d’une part, les recettes tirées des redevances d’utilisation de l’infrastructure, les excédents dégagés d’autres activités commerciales et le financement par l’État et, d’autre part, les dépenses d’infrastructure.

Sans préjudice d’un objectif éventuel, à long terme, de couverture par l’utilisateur des coûts d’infrastructure pour tous les modes de transport sur la base d’une concurrence intermodale équitable et non discriminatoire, lorsque le transport ferroviaire est en mesure de concurrencer d’autres modes, un État membre peut exiger, à l’intérieur du cadre de tarification défini aux articles 7 et 8, du gestionnaire de l’infrastructure qu’il équilibre ses comptes sans apport financier de l’État.

2. Le gestionnaire de l’infrastructure est, tout en respectant les exigences en matière de sécurité, et en maintenant et en améliorant la qualité de service de l’infrastructure, encouragé par des mesures d’incitation à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès.

3. Les États membres veillent à ce que la disposition prévue au paragraphe 2 soit mise en œuvre soit dans le cadre d’un contrat conclu, pour une durée minimale de trois ans, entre l’autorité compétente et le gestionnaire de l’infrastructure et prévoyant le financement par l’État, soit par l’établissement de mesures réglementaires appropriées, prévoyant les pouvoirs nécessaires.

[...]

5. Une méthode d’imputation des coûts est élaborée. Les États membres peuvent la soumettre à approbation préalable. Il convient de mettre à jour cette méthode de temps à autre en fonction des meilleures pratiques internationales.»

10. L’article 7, paragraphes 3 à 5, de cette directive dispose:

«3. Sans préjudice des dispositions des paragraphes 4 ou 5 ou de l’article 8, les redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services, sont égales au coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire.

4. La redevance d’utilisation de l’infrastructure peut inclure une redevance au titre de la rareté des capacités de la section identifiable de l’infrastructure pendant les périodes de saturation.

5. La redevance d’utilisation de l’infrastructure peut être modifiée pour tenir compte du coût des effets sur l’environnement de l’exploitation des trains. Cette modification est différenciée en fonction de l’ampleur de l’effet engendré.»

11. L’article 8, paragraphes 1 et 2, de ladite directive se lit comme suit:

«1. Un État membre peut, afin de procéder au recouvrement total des coûts encourus par le gestionnaire de l’infrastructure et, si le marché s’y prête, percev oir des majorations sur la base de principes efficaces, transparents et non discriminatoires, tout en garantissant une compétitivité optimale, en particulier pour le transport ferroviaire international de marchandises. Le système de tarification respecte les gains de productivité réalisés par les entreprises ferroviaires.

Le niveau des redevances ne doit cependant pas exclure l’utilisation des infrastructures par des segments de marché qui peuvent au moins acquitter le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, plus un taux de rentabilité si le marché s’y prête.

2. Pour des projets d’investissement spécifiques qui seront réalisés à l’avenir ou dont la réalisation ne remonte pas à plus de quinze ans avant l’entrée en vigueur de la présente directive, le gestionnaire de l’infrastructure peut fixer ou maintenir des redevances plus élevées basées sur le coût à long terme de tels projets, pour autant qu’il s’agisse de projets améliorant le rendement et/ou la rentabilité qui, dans le cas contraire, ne pourraient pas ou n’auraient pas pu être mis en œuvre. De tels arrangements en matière de tarification peuvent également comporter des accords sur le partage des risques liés à de nouveaux investissements.»

12. L’article 9, paragraphe 1, de la même directive prévoit:

«Sans préjudice des articles 81, 82, 86 et 87 du traité et nonobstant l’article 7, paragraphe 3, de la présente directive, toute réduction consentie sur les redevances perçues auprès d’une entreprise ferroviaire par le gestionnaire de l’infrastructure, pour une prestation de service quelle qu’elle soit, remplit les critères énoncés au présent article.»

13. Aux termes de l’article 14, paragraphes 1 et 2, de la directive 2001/14:

«1. Les États membres peuvent mettre en place un cadre pour la répartition des capacités de l’infrastructure, mais en respectant l’indépendance de gestion prévue à l’article 4 de la directive 91/440/CEE. Des règles spécifiques de répartition des capacités sont établies. Le gestionnaire de l’infrastructure accomplit les procédures de répartition de ces capacités. Il veille notamment à ce que les capacités d’infrastructure soient réparties sur une base équitable et non discriminatoire et dans le respect du droit communautaire.

2. Si le gestionnaire de l’infrastructure n’est pas indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel ou décisionnel, les fonctions visées au paragraphe 1 et décrites au présent chapitre sont assumées par un organisme de répartition qui est indépendant des entreprises ferroviaires sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel.»

14. L’article 30 de cette directive, intitulé «Organisme de contrôle», prévoit:

«1. [...] les États membres instituent un organisme de contrôle. [...] Cet organisme fonctionne conformément aux principes énoncés au présent article, les fonctions de recours et de contrôle pouvant être attribuées à des organismes séparés.

2. Un candidat peut saisir cet organisme dès lors qu’il estime être victime d’un traitement inéquitable, d’une discrimination ou de tout autre préjudice, notamment pour introduire un recours contre les décisions prises par le gestionnaire de l’infrastructure ou, le cas échéant, par l’entreprise ferroviaire en ce qui concerne:

[...]

3. L’organisme de contrôle veille à ce que les redevances fixées par le gestionnaire de l’infrastructure soient conformes aux dispositions du chapitre II et non discriminatoires. [...]

4. L’organisme de contrôle est habilité à demander les informations utiles au gestionnaire de l’infrastructure, aux candidats et à toute autre partie intéressée dans l’État membre concerné; ces informations sont fournies sans tarder.

5. L’organisme de contrôle est obligé de se prononcer sur toute plainte et adopte les mesures nécessaires afin de remédier à la situation dans un délai maximum de deux mois suivant la réception de toutes les informations.

Nonobstant le paragraphe 6, les décisions prises par l’organisme de contrôle sont contraignantes pour toutes les parties concernées.

[...]»

Le droit allemand

15. L’article 5a, paragraphe 2, de la loi générale sur les chemins de fer (Allgemeines Eisenbahngesetz) du 27 décembre 1993 (BGBl. I, p. 2378, 2396), telle que modifiée par la loi du 29 juillet 2009 (BGBl. I, p. 2542, ci-après la «loi générale sur les chemins de fer»), prévoit:

«Dans l’exercice de leurs fonctions, les autorités de surveillance des chemins de fer peuvent prendre, à l’égard de ceux qui sont contraints par les dispositions citées à l’article 5, paragraphe 1, les mesures nécessaires pour remédier aux infractions constatées et prévenir des infractions futures aux dispositions visées à l’article 5, paragraphe 1.»

16. L’article 9a, paragraphe 1, de la loi générale sur les chemins de fer dispose:

«1) Les gestionnaires publics des voies ferrées doivent être indépendants d’entreprises de transport ferroviaire sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel, pour autant que les décisions en cause concernent l’attribution de sillons et la tarification. Pour atteindre les objectifs visés à la première phrase, il y a lieu

1. de séparer, au sein des sociétés de chemins de fer qui sont à la fois des entreprises de transport ferroviaire et des gestionnaires des voies ferrées, ces deux activités pour les confier chacune à une ou plusieurs sociétés distinctes;

2. de donner aux contrats conclus entre le gestionnaire des voies ferrées et des tiers une forme garantissant au premier son autonomie organisationnelle;

3. de n’autoriser que le personnel du gestionnaire des voies ferrées n’exerçant pas de fonctions dans des entreprises de transport ferroviaire, ni dans des entreprises liées à celles-ci, à prendre les décisions concernant l’horaire de service, l’attribution des sillons et la tarification;

4. de considérer comme non autorisées les instructions données par des tiers au gestionnaire des voies ferrées ou à son personnel en ce qui concerne les décisions relatives à l’horaire de service, à l’attribution des sillons et à la tarification;

5. d’élaborer, de maintenir et de publier, dans les entreprises au sens de l’article 9, paragraphe 1, première phrase, points 2 et 3, des règlements qui empêchent des tiers extérieurs au gestionnaire des voies ferrées d’exercer une influence sur les décisions concernant l’horaire de service, l’attribution des sillons et la tarification; ces règlements doivent en particulier énumérer les obligations spécifiques imposées aux employés pour empêcher l’exercice d’une telle influence; les gestionnaires des voies ferrées sont en outre tenus, si l’autorité de surveillance compétente le leur demande, de communiquer à cette dernière le nom d’un représentant veillant au respect de ces règlements; ce dernier est tenu de communiquer chaque année à l’autorité de surveillance compétente un rapport sur les problèmes survenus et les mesures prises pour les résoudre;

6. de désigner des personnes différentes aux postes des conseils de surveillance des entreprises au sens de l’article 9, paragraphe 1, première phrase, points 2 et 3; ainsi, le conseil de surveillance du gestionnaire des voies ferrées ne peut comprendre ni des membres des conseils de surveillance d’entreprises au sens de l’article 9, paragraphe 1, première phrase, points 2 et 3, ni des membres du personnel de ces dernières; cette disposition s’applique aussi aux autres participations de la société mère.»

17. L’article 14, paragraphe 4, de cette loi prévoit:

«Les gestionnaires de voies ferrées doivent fixer leurs tarifs conformément à une ordonnance prise en vertu de l’article 26, paragraphe 1, points 6 et 7, de manière à compenser les coûts encourus par eux pour la fourniture de prestations réglementaires au sens du paragraphe 1, première phrase, plus un taux de rentabilité si le marché s’y prête. Ce faisant, ils peuvent percevoir des majorations sur le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, une différenciation pouvant être opérée aussi bien en fonction des services de transport de voyageurs à grande distance, de transport de voyageurs à courte distance ou de fret ferroviaire qu’en fonction des segments de marché à l’intérieur de ces services de transport, tout en garantissant la compétitivité, en particulier pour le transport ferroviaire international de marchandises. Le niveau des redevances ne peut toutefois pas excéder, en ce qui concerne la deuxième phrase, pour un segment de marché, le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, plus un taux de rentabilité si le marché s’y prête. Dans l’ordonnance prise en vertu de l’article 26, paragraphe 1, points 6 et 7,

1. des dérogations à la détermination du montant de la redevance selon la première phrase peuvent être autorisées si les coûts sont couverts d’une autre manière, ou

2. l’autorité de surveillance compétente peut être autorisée à dispenser, par une décision générale, en consultation avec l’agence fédérale de l’électricité, du gaz, des télécommunications, de la poste et des chemins de fer (organisme de contrôle), tous les gestionnaires des voies ferrées du respect des exigences fixées à la première phrase.»

18. L’article 14c de ladite loi dispose:

«(1) Dans l’exercice de ses fonctions, l’organisme de contrôle peut prendre, à l’égard d’entreprises publiques d’infrastructure ferroviaire, les mesures nécessaires pour remédier aux infractions constatées et prévenir des infractions futures aux dispositions de la législation des chemins de fer relatives à l’accès à l’infrastructure ferroviaire.

(2) Les entités autorisées à accéder à l’infrastructure, les entreprises publiques d’infrastructure ferroviaire et leur personnel doivent permettre à l’organisme de contrôle et à ses représentants, dans l’exercice de leurs tâches,

1. de pénétrer dans les locaux commerciaux et les installations aux heures d’ouverture habituelles et

2. de consulter les livres, documents commerciaux, fichiers et autres documents et de les stocker sur des supports d’information appropriés.

(3) Les entités autorisées à accéder à l’infrastructure, les entreprises publiques d’infrastructure ferroviaire et leur personnel doivent fournir à l’organisme de contrôle et à ses représentants

1. toutes les informations,

2. tous les éléments de preuve,

3. tous les moyens et tous les services auxiliaires nécessaires à l’accomplissement de leurs tâches.

Cette disposition s’applique également aux négociations, en cours ou clôturées, concernant le montant des redevances d’utilisation de l’infrastructure et autres. Les renseignements fournis doivent être exacts et établis de bonne foi. Toute personne tenue de fournir des renseignements peut refuser de répondre aux questions dont la réponse l’exposerait, elle ou l’un des membres désignés à l’article 383, paragraphe 1, points 1 à 3, du code de procédure civile, à des risques de poursuites pénales ou à une procédure pour infraction administrative.

(4) En vertu de la présente loi, l’organisme de contrôle peut faire appliquer ses injonctions conformément aux dispositions régissant l’exécution des mesures administratives. Le montant de l’astreinte peut atteindre 500 000 euros.»

19. L’article 1 er du contrat de prise de contrôle et de transfert de bénéfices conclu le 1 er  juin 1999 entre Deutsche Bahn AG (ci-après «DB AG») et Deutsche Bahn Netz AG (ci après «DB Netz»), intitulé «Gestion de [DB Netz]», dispose, dans sa version résultant de l’accord modificatif du 2 mai 2005:

«Il n’est pas dérogé au principe d’indépendance juridique et organisationnelle de [DB Netz] en ce qui concerne les décisions relatives à l’horaire de service, à l’attribution des sillons et à la tarification. [DB AG] ne donnera aucune instruction remettant en cause ce principe.»

20. Aux termes de l’article 4 du règlement intérieur du directoire de DB Netz, modifié avec effet au 9 mai 2005, intitulé «Prise de décisions»:

«[...]

3. Les membres du directoire exerçant des fonctions dans des entreprises de transport ferroviaire liées à [DB Netz] ou dans des entreprises liées à ces dernières ne prennent pas part au vote lors de l’adoption de décisions concernant l’horaire de service, l’attribution des sillons et la tarification. Ils ne peuvent davantage participer à la préparation de ces décisions.»

La procédure précontentieuse et la procédure devant la Cour

21. Au mois de mai 2007, la Commission a adressé un questionnaire aux autorités allemandes en vue de vérifier la transposition par la République fédérale d’Allemagne des directives 2001/12, 2001/13/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2001, modifiant la directive 95/18/CE du Conseil concernant les licences des entreprises ferroviaires (JO L 75, p. 26), et 2001/14. Ledit État membre y a répondu par lettre du 25 septembre 2007 ainsi que, à titre complémentaire, par lettre du 14 décembre suivant.

22. Par lettre du 26 juin 2008, la Commission a relevé des disparités entre la législation ferroviaire allemande et les directives 91/440, 95/18/CE du Conseil, du 19 juin 1995, concernant les licences des entreprises ferroviaires (JO L 143, p. 70), ainsi que 2001/14, et a mis en demeure la République fédérale d’Allemagne de se conformer à celles-ci.

23. Par lettre du 22 octobre 2008, cet État membre a répondu à cette mise en demeure.

24. Par lettre du 24 février 2009, la Commission a adressé à la République fédérale d’Allemagne une lettre de mise en demeure complémentaire dans laquelle elle lui reprochait de nouvelles infractions, fondées sur une lecture combinée des directives 2001/14 et 91/440 en ce qui concerne la tarification de l’infrastructure et les compétences de l’organisme de contrôle allemand.

25. Par lettre du 17 avril 2009, la République fédérale d’Allemagne a répondu à cette mise en demeure complémentaire.

26. Par lettre du 9 octobre 2009, la Commission a adressé à cet État membre un avis motivé dans lequel elle invitait celui-ci à prendre les mesures nécessaires pour se conformer audit avis motivé dans le délai de deux mois à compter de sa réception.

27. Par lettre du 3 décembre 2009, la République fédérale d’Allemagne a répondu à cet avis motivé en contestant le manquement reproché par la Commission.

28. N’étant pas satisfaite de la réponse de cet État membre, la Commission a décidé d’introduire le présent recours.

29. Par ordonnance du président de la Cour du 19 mai 2011, la République tchèque et la République italienne ont été admises à intervenir au soutien des conclusions de la République fédérale d’Allemagne.

Sur le recours

Sur le grief relatif à l’indépendance de l’entité à laquelle est confié l’exercice des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440

Argumentation des parties

30. La Commission soutient que l’entité à laquelle a été confié l’exercice des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440 doit être indépendante économiquement, et non pas seulement juridiquement, de l’entreprise qui fournit les services de transport ferroviaire.

31. À cet égard, elle fait valoir que, bien que l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440 n’exige pas explicitement que l’entité à laquelle est confié l’exercice de ces fonctions essentielles soit «indépendante» des sociétés qui fournissent les services de transport ferroviaire, le terme «entreprise» utilisé à cette disposition doit néanmoins être interprété, conformément à la jurisprudence de la Cour, comme couvrant toutes les entités qui, même si elles sont juridiquement séparées, agissent comme une «unité économique».

32. Selon la Commission, il convient d’interpréter l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440 en ce sens que les fonctions essentielles exercées par le gestionnaire de l’infrastructure doivent être assurées par une entité distincte des entreprises ferroviaires non seulement au regard du droit, mais également indépendantes de celles-ci sur les plans organisationnel et décisionnel.

33. La Commission fait ensuite valoir que, lorsque lesdites fonctions essentielles sont exercées par une société dépendant d’une holding ferroviaire, comme c’est le cas de DB Netz, il convient d’évaluer dans quelle mesure et dans quelles conditions cette société, qui est, par ailleurs, le gestionnaire d’infrastructure ferroviaire chargé d’exercer ces mêmes fonctions essentielles, peut être considérée comme «indépendante» de l’entreprise qui fournit les services de transport ferroviaire, à savoir la holding et les sociétés dépendant de cette dernière qui assurent les services de transport des personnes et des marchandises, malgré leur appartenance à un même groupe.

34. Or, la République fédérale d’Allemagne n’aurait pas prévu de mécanismes efficaces pour garantir l’indépendance organisationnelle et décisionnelle du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire DB Netz et l’exercice indépendant par ce dernier des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440. La Commission en déduit que cet État membre a ainsi manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 6, paragraphe 3, et de l’annexe II de cette directive, ainsi que des articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14.

35. Afin d’examiner si les États membres sont en mesure de prouver que leurs sociétés holdings ferroviaires nationales ou leurs autres organismes de contrôle garantissent l’indépendance nécessaire desdites fonctions essentielles et que les conflits d’intérêts sont évités, la Commission aurait fait connaître dès 2006 les critères sur la base desquels elle examine l’indépendance requise par la directive 2001/14 et les mesures prévues pour garantir cette indépendance. Il s’agirait des critères mentionnés à l’annexe 5 du document de travail des services de la Commission accompagnant le rapport de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions du 3 mai 2006 sur la mise en œuvre du premier paquet ferroviaire [COM(2006) 189] (ci-après l’«annexe 5»).

36. À cet égard, la Commission fait valoir, en premier lieu, que le respect des obligations d’indépendance doit faire l’objet d’un contrôle de la part d’une autorité indépendante, telle que l’autorité de régulation ferroviaire, ou d’un tiers. Les concurrents devraient avoir la possibilité de se plaindre en cas de non-respect de l’exigence d’indépendance. La Commission estime qu’aucune de ces deux dispositions n’est respectée par la République fédérale d’Allemagne.

37. En effet, il ressort, selon la Commission, de l’article 5a de la loi générale sur les chemins de fer que l’Eisenbahn-Bundesamt (Office fédéral des chemins de fer) est seulement autorisé à mettre en œuvre des dispositions relatives à l’indépendance qui sont déjà inscrites dans le droit allemand, à l’instar de celles figurant à l’article 9a de cette loi. L’Eisenbahn-Bundesamt ne disposerait d’aucune compétence en ce qui concerne l’adoption de mesures structurelles, telles que la modification de la structure organisationnelle de la holding, ou de décisions relatives à la structure organisationnelle du gestionnaire d’infrastructure par rapport à la holding ou concernant le remplacement de dirigeants qui ne remplissent pas le critère d’indépendance ou encore le changement de procédés organisationnels de gestion des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440.

38. En deuxième lieu, la Commission estime que doivent exister des dispositions légales ou à tout le moins contractuelles en matière d’indépendance dans la relation entre la holding et l’entité chargée de ces fonctions essentielles, entre cette dernière entité et d’autres entreprises du groupe fournissant des services ferroviaires, ou les autres instances qui sont contrôlées par la holding, notamment l’assemblée des actionnaires de l’entité chargée desdites fonctions essentielles.

39. La Commission soutient que l’article 9a de la loi générale sur les chemins de fer, qui contient des dispositions relatives à l’indépendance, ainsi que les dispositions du règlement interne de la société holding ferroviaire, telles que l’article 1 er , paragraphe 3, du contrat de prise de contrôle et de transfert de bénéfices qui interdisent à DB AG de donner des instructions remettant en cause l’indépendance juridique et organisationnelle de DB Netz AG, en ce qui concerne les décisions concernant l’horaire de service, l’attribution de sillons et la tarification, sont des mesures de sauvegarde qui ne suffisent toutefois pas à elles seules à garantir l’indépendance des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440, à éviter les conflits d’intérêts et à affranchir l’instance chargée de ces fonctions essentielles du contrôle de la holding.

40. En troisième lieu, la Commission estime que les membres du directoire de la holding et d’autres entreprises de la holding ne doivent pas faire partie du directoire de l’entité chargée de fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440.

41. En effet, selon elle, il serait difficile de faire valoir que le directoire de l’entité chargée desdites fonctions essentielles est indépendant sur le plan décisionnel du directoire de la holding, dès lors que ces deux directoires seraient composés des mêmes personnes. La Commission fait remarquer qu’aucune disposition légale ne s’oppose à ce qu’une telle situation se présente.

42. En quatrième lieu, aucune disposition n’interdirait aux administrateurs de l’entité chargée de fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440 et aux cadres supérieurs traitant de ces fonctions essentielles d’être empêchés, pendant un nombre raisonnable d’années après avoir quitté l’entité concernée, d’accepter tout emploi de cadre supérieur au sein de la holding ou d’autres instances placées sous son contrôle.

43. En effet, de telles dispositions n’existent pas dans le droit allemand et, dans la pratique, de nombreux dirigeants de DB Netz seraient passés de cette entité à la holding ou à d’autres filiales.

44. En cinquième lieu, la Commission soutient que le conseil d’administration de l’entité chargée de fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440 doit être nommé selon des conditions clairement définies et avec des engagements juridiques garantissant l’indépendance totale de sa prise de décisions. Il devrait être nommé et révoqué sous le contrôle d’une autorité indépendante.

45. En sixième lieu, la Commission fait valoir que l’entité chargée de ces fonctions essentielles doit posséder son propre personnel et être située dans des locaux séparés ou dotés d’un accès protégé. Le règlement intérieur de cette entité ou les contrats de travail conclus par celle-ci devraient indiquer clairement que les contacts avec la holding et les autres sociétés placées sous son contrôle se limitent aux communications officielles liées à l’exercice desdites fonctions essentielles. L’accès aux systèmes d’information devrait être protégé de manière à assurer l’indépendance des mêmes fonctions essentielles.

46. La République fédérale d’Allemagne fait valoir que les articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14 exigent non pas une indépendance économique complète, mais simplement une indépendance du gestionnaire de l’infrastructure sur le plan juridique, organisationnel ou décisionnel, et ce dans le cadre de l’adoption de certaines décisions clairement définies, telles que la répartition des sillons et la tarification de l’infrastructure, conformément à l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440, lu en combinaison avec l’annexe II de cette directive.

47. Ledit État membre soutient que, en ce qui concerne les critères d’examen relatifs à la preuve de l’indépendance, prévus à l’annexe 5, ceux-ci ne coïncident pas avec les dispositions contraignantes pertinentes en l’espèce, fixées à l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440, à l’annexe II de cette dernière, ainsi qu’aux articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14. En outre, le document comportant cette annexe 5 n’aurait pas été publié au Journal officiel de l’Union européenne et ne constituerait pas un acte juridique contraignant. Ainsi, ladite annexe 5 ne saurait être invoquée dans le cadre de la présente procédure.

48. La République italienne intervient à la procédure uniquement au soutien des arguments présentés par la République fédérale d’Allemagne dans le cadre de sa réponse au présent grief de la Commission.

49. La République italienne rappelle que l’obligation de séparation prévue par le législateur de l’Union, en ce qui concerne les fonctions de transport ferroviaire et de gestion de l’infrastructure, est de nature comptable.

50. Cet État membre souligne que la Commission, en ce qui concerne le modèle de holding, défend une approche contradictoire en ce qu’elle arriverait à une présomption d’incompatibilité, ce modèle étant reconnu légalement, mais ne pouvant être compatible avec les directives 91/440 et 2001/14 que dans l’hypothèse où la holding ne détiendrait où n’exercerait aucune des prérogatives propres à une telle holding.

51. La législation de l’Union n’aurait nullement entendu introduire une obligation de séparation des structures de propriété ou des régimes organisationnels ayant des effets équivalents sur le plan de l’autonomie de gestion, mais aurait entendu respecter et garantir le pouvoir discrétionnaire des États membres et des entreprises intéressées d’adopter des modèles d’organisation de différents types.

52. La République italienne, à la lumière tant du texte que de la finalité de ladite législation, ne pourrait faire sien l’argument de la Commission selon lequel les fonctions essentielles visées à l’annexe II de la directive 91/440 devraient être attribuées à des entités extérieures au groupe auquel appartient une entreprise ferroviaire.

Appréciation de la Cour

53. Par son grief, la Commission reproche à la République fédérale d’Allemagne de ne pas avoir adopté de mesures spécifiques permettant de garantir l’indépendance du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, DB Netz, auquel ont été confiées certaines fonctions essentielles visées à l’annexe II de la directive 91/440, alors même que DB Netz appartient à une holding, DB AG, comprenant des entreprises de transport ferroviaire.

54. En effet, la Commission considère que, pour que soit garantie l’indépendance de cette entité sur les plans juridique, organisationnel et décisionnel au sens des articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14, il est nécessaire que l’État membre concerné adopte des règles spécifiques et détaillées, telles qu’elles résultent de l’annexe 5.

55. À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’article 6, paragraphes 1 et 2, de la directive 91/440 ne requiert qu’une séparation comptable entre les activités de transport fournies par les entreprises ferroviaires et les activités de gestion de l’infrastructure ferroviaire, la séparation entre les activités relatives à la fourniture de services de transport par des entreprises ferroviaires et celles relatives à la gestion de l’infrastructure ferroviaire pouvant se faire au moyen de divisions organiques distinctes au sein d’une même entreprise, comme c’est le cas dans le cadre d’une holding.

56. Toutefois, l’article 6, paragraphe 3, de la directive 91/440 prévoit que, en vue de garantir un accès équitable et non discriminatoire à l’infrastructure ferroviaire, les États membres doivent prendre les mesures nécessaires pour assurer que les fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de cette directive sont confiées à des instances ou à des entreprises qui ne sont pas elles-mêmes fournisseurs de services de transport ferroviaire, et ce de manière probante, quelles que soient les structures organisationnelles prévues.

57. En tout état de cause, les articles 4, paragraphe 2, et 14, paragraphe 2, de la directive 2001/14 prévoient que les entités chargées des fonctions de tarification et de répartition sont indépendantes sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel.

58. En l’occurrence, DB Netz est intégrée, en tant que gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire, dans l’entreprise DB AG qui, en tant que holding, supervise également des entreprises ferroviaires. Partant, pour pouvoir assumer les fonctions de tarification et de répartition, DB Netz doit être indépendante de DB AG sur le plan juridique, organisationnel et décisionnel.

59. À cet égard, il n’est pas contesté que DB Netz dispose, d’une part, d’une personnalité juridique distincte de celle de DB AG et, d’autre part, d’organes et de ressources propres différents de ceux de DB AG.

60. Pour le reste, la Commission fait valoir, dans sa requête, que, pour apprécier l’indépendance décisionnelle du gestionnaire de l’infrastructure qui, comme DB Netz, se trouve intégré dans une entreprise dont certaines unités sont des entreprises ferroviaires, il convient d’appliquer l’annexe 5.

61. Ladite annexe prévoit, ainsi, que le respect des obligations d’indépendance devrait faire l’objet d’un contrôle de la part d’une autorité indépendante ou d’un tiers, qu’il devrait exister des dispositions légales ou à tout le moins contractuelles en matière d’indépendance, qu’il devrait être prévu une interdiction des doubles fonctions entre les organes de direction des différentes sociétés de la holding, qu’un délai de carence devrait être mis en place en cas de transferts de membres dirigeants entre l’entité chargée de fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440 et toute autre entité de la holding, que la révocation et la nomination des administrateurs du gestionnaire de l’infrastructure ferroviaire devraient se faire sous le contrôle d’une autorité indépendante et que l’entité chargée de ces fonctions essentielles devrait posséder son propre personnel et être située dans des locaux séparés.

62. En premier lieu, il convient de relever que l’annexe 5 n’a pas de valeur juridique contraignante. En effet, elle n’a jamais fait l’objet d’une publication au Journal officiel de l’Union européenne et a été rendue publique cinq ans après l’entrée en vigueur de la directive 2001/14, soit trois ans après l’expiration du délai de transposition de celle-ci. Ainsi, au moment de la mise en œuvre des directives 91/440 et 2001/14, les critères énumérés dans cette annexe n’existaient pas. De plus, et indépendamment de ce décalage chronologique, ladite annexe et les critères y figurant n’ont été repris ni dans le texte de la directive 91/440 ni dans celui de la directive 2001/14, non plus que dans aucun autre acte législatif. Partant, il ne saurait être reproché à un État membre de ne pas avoir traduit ces critères dans des dispositions légales ou réglementaires de transposition des directives 91/440 et 2001/14.

63. En deuxième lieu, la comparaison faite par la Commission avec les dispositions concernant le marché intérieur de l’électricité et le marché intérieur du gaz naturel ne saurait être retenue. En effet, la directive 2009/72/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE (JO L 211, p. 55), et la directive 2009/73/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE (JO L 211, p. 94), confèrent à l’autorité de régulation de larges prérogatives en matière de surveillance en ce qui concerne l’indépendance du gestionnaire de réseau de transport. Conformément à l’article 19, paragraphe 2, de chacune de ces directives, l’autorité de régulation peut émettre des objections au sujet de la nomination et de la révocation de membres de la direction générale et des organes administratifs du gestionnaire de réseau de transport. Le paragraphe 3 de cet article 19 prévoit qu’aucune activité ou responsabilité professionnelle ne peut être exercée, aucun intérêt ne peut être détenu ni aucune relation commerciale entretenue, directement ou indirectement, avec l’entreprise verticalement intégrée, ou une partie de celle-ci ou ses actionnaires majoritaires autres que le gestionnaire de réseau de transport, pendant une période de trois ans avant la nomination des responsables de la direction et/ou des membres des organes administratifs du gestionnaire de réseau de transport. Conformément au paragraphe 4 dudit article 19, les employés du gestionnaire de réseau de transport ne peuvent exercer d’autre activité avec une autre partie de la société holding du secteur de l’énergie. Le paragraphe 7 du même article 19 prévoit une période d’incompatibilité entre l’exercice de fonctions au sein du gestionnaire de réseau de transport et l’exercice d’une activité en relation avec une autre partie de l’entreprise verticalement intégrée.

64. Ainsi, ces deux directives prévoient expressément des dispositions relatives aux conditions d’exercice d’activités au sein de la société gestionnaire de réseau et à des périodes d’incompatibilité, ce qui n’est pas le cas de la directive 2001/14, qui ne précise pas les critères relatifs à l’indépendance devant être assurée entre le gestionnaire de l’infrastructure chargé de fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440 et les entreprises ferroviaires, ces critères ne pouvant donc être déduits des directives 91/440 et 2001/14 et leur respect ne pouvant être imposé à la République fédérale d’Allemagne.

65. Dans ces circonstances, force est de constater que la non-transposition en droit allemand des critères résultant de l’annexe 5 ne peut conduire, à elle seule, à conclure à l’absence d’indépendance décisionnelle de DB Netz, en tant que gestionnaire de l’infrastructure, par rapport à DB AG.

66. Or, il est de jurisprudence constante que, dans le cadre d’une procédure en manquement au titre de l’article 258 TFUE, il incombe à la Commission d’établir l’existence du manquement allégué. C’est donc elle qui doit apporter à la Cour les éléments nécessaires à la vérification par celle-ci de l’existence de ce manquement, sans pouvoir se fonder sur des présomptions quelconques (voir, notamment, arrêts du 26 avril 2005, Commission/Irlande, C-494/01, Rec. p. I-3331, point 41; du 6 octobre 2009, Commission/Finlande, C-335/07, Rec. p. I-9459, point 46, et du 10 décembre 2009, Commission/Royaume-Uni, C-390/07, point 43).

67. Toutefois, la Commission n’a fourni aucune preuve concrète démontrant que DB Netz n’est pas indépendante de DB AG en ce qui concerne les modalités de prise de décisions.

68. À cet égard, il résulte, notamment, de l’article 1 er du contrat de prise de contrôle et de transfert de bénéfices conclu le 1 er  juin 1999 entre DB AG et DB Netz ainsi que de l’article 4 du règlement intérieur du directoire de DB Netz que certaines dispositions de ces actes de droit privé visent précisément à garantir, en pratique, une indépendance décisionnelle de DB Netz à l’égard de DB AG.

69. Dès lors, il appartenait à la Commission, eu égard non seulement aux objectifs des directives 91/440 et 2001/14, mais également à l’ensemble des éléments, y compris de nature privée, qui encadrent les relations existant entre DB Netz et DB AG, de prouver que, en pratique, DB Netz ne dispose pas d’une indépendance décisionnelle à l’égard de DB AG.

70. Il résulte des considérations qui précèdent qu’il convient de rejeter le grief de la Commission relatif à l’indépendance de l’entité à laquelle est confié l’exercice des fonctions essentielles énumérées à l’annexe II de la directive 91/440.

Sur le grief relatif à la tarification

Argumentation des parties

71. La Commission soutient que la République fédérale d’Allemagne n’a pas rempli les obligations qui lui incombent en vertu des articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14.

72. Elle fait valoir que l’article 14, paragraphe 4, de la loi générale sur les chemins de fer, par lequel la République fédérale d’Allemagne a transposé ces dispositions, présente des lacunes. En effet, cette disposition ne permettrait toujours pas de déterminer avec certitude, d’une part, si c’est le principe des coûts directs, prévu à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, ou celui des coûts totaux, énoncé à l’article 8, paragraphe 1, de cette directive, qui est appliqué et, d’autre part, les conditions dans lesquelles il convient d’appliquer l’un ou l’autre de ces principes.

73. En outre, cet État membre aurait apparemment opté pour le principe des coûts totaux. Or, il n’aurait pas respecté intégralement les conditions nécessaires à l’application de l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 et, notamment, celle consistant à préciser les circonstances dans lesquelles un test de capacité du marché à supporter ces coûts doit être effectué, lequel serait nécessaire afin de vérifier si tous les segments de marché peuvent supporter lesdits coûts.

74. La République fédérale d’Allemagne estime que, s’agissant de la prise en compte de la compétitivité, les dispositions de la réglementation allemande satisfont pleinement aux exigences fixées à l’article 8, paragraphe 1, première phrase, de la directive 2001/14. En effet, la directive 2001/14 n’exigerait pas, en ce qui concerne le test de capacité à supporter les coûts, que l’appréciation de la compétitivité se fasse pour chaque segment de marché. L’article 14, paragraphe 4, de la loi générale sur les chemins de fer, par lequel ledit article de cette directive a été transposé obligerait, et cela en conformité avec le libellé et l’objectif de ladite directive, uniquement les destinataires à garantir la compétitivité, en particulier pour le transport ferroviaire international de marchandises. Ainsi, le droit national respecterait les exigences et les objectifs visés par la directive 2001/14.

75. Les coûts pourraient être intégralement imputés lors de l a détermination du montant de la redevance. DB Netz aurait, dès lors, le pouvoir de fixer sa tarification de manière à compenser les coûts de l’infrastructure qui ne sont pas couverts par des subventions étatiques.

76. La République fédérale d’Allemagne réfute l’argumentation de la Commission selon laquelle la réglementation allemande ne prévoit pas de définition des segments de marché visés à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14. Cet État membre soutient qu’il garantit pleinement l’effet utile de cet objectif réglementaire au moyen de l’article 14, paragraphe 4, troisième phrase, de la loi générale sur les chemins de fer. En outre, il résulterait des dispositions relatives à l’indépendance dans le cadre de la fixation des prix que la législation de l’Union laisse aux entreprises actives sur le marché le soin d’évaluer la capacité contributive de la demande. L’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 ne prévoirait expressément aucune exigence plus large en ce qui concerne, notamment, l’information des entreprises de transport en matière de procédure et de contrôle.

77. La République tchèque partage les arguments de la République fédérale d’Allemagne selon lesquels les dispositions citées par la Commission ont été correctement mise en œuvre par ce dernier État membre, en ce qui concerne tant les griefs tirés d’une transposition prétendument incorrecte des dispositions du droit de l’Union en cause que celui tiré d’une prétendue violation des dispositions combinées des articles 7, paragraphe 3, et 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14.

78. Plus particulièrement en ce qui concerne la violation de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, la République tchèque considère qu’il convient de clarifier la notion de «coûts directement imputables à l’exploitation du service ferroviaire» afin de vérifier si les dispositions susmentionnées ont ou non été enfreintes.

Appréciation de la Cour

79. Par le présent grief, la Commission reproche, en substance, à la République fédérale d’Allemagne de ne pas avoir adopté une législation indiquant avec certitude, d’une part, s’il convient d’appliquer le principe des coûts directs prévu à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14 ou celui des coûts totaux prévu à l’article 8, paragraphe 1, de cette dernière et, d’autre part, les conditions dans lesquelles il y a lieu d’appliquer l’un ou l’autre de ces principes.

80. Conformément à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, les redevances perçues pour l’ensemble des prestations minimales et l’accès par le réseau aux infrastructures de services doivent être égales au coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, sans préjudice des dispositions des paragraphes 4 ou 5 de cet article ou de l’article 8 de cette directive.

81. L’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 prévoit que, lorsque le marché s’y prête, des majorations peuvent être perçues par l’État membre afin de procéder au recouvrement total des coûts encourus par le gestionnaire de l’infrastructure.

82. Il convient de rappeler que l’un des objectifs poursuivis par le système de tarification mis en place par la directive 2001/14 consiste à assurer l’indépendance de gestion du gestionnaire de l’infrastructure. En d’autres termes, ce dernier doit, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 80 de ses conclusions, faire usage du système de tarification comme d’un instrument de gestion. Il ressort ainsi du considérant 12 de cette directive que les systèmes de tarification et de répartition des capacités doivent inciter les gestionnaires d’infrastructure ferroviaire à optimiser l’utilisation de leur infrastructure dans le cadre défini par les États membres. Or, afin de rendre possible une telle optimisation, lesdits gestionnaires doivent disposer d’une certaine marge de manœuvre, ainsi que le mentionne le considérant 20 de ladite directive.

83. De même, d’autres dispositions de la directive 2001/14 nécessitent, dans leur application, de laisser une certaine marge de manœuvre aux gestionnaires d’infrastructure, afin de les inciter à optimiser l’utilisation de leur infrastructure. En effet, l’article 8, paragraphe 2, de cette directive dispose que le gestionnaire de l’infrastructure peut fixer ou maintenir des redevances plus élevées, fondées sur le coût à long terme de certains projets d’investissement. L’article 9 de ladite directive permet audit gestionnaire d’instaurer des systèmes de réduction des redevances perçues par les opérateurs.

84. Il convient également de relever que l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2001/14 établit une répartition des compétences entre les États membres et le gestionnaire de l’infrastructure en ce qui concerne les systèmes de tarification. En effet, il revient aux États membres d’établir un cadre pour la tarification tandis que la détermination de la redevance et son recouvrement incombent au gestionnaire de l’infrastructure. Toutefois, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 78 de ses conclusions, l’État peut procéder au recouvrement total des coûts de l’infrastructure par des majorations si le marché s’y prête et si cela n’exclut pas l’utilisation des infrastructures par des segments de marché qui peuvent à tout le moins acquitter le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire, majoré d’un taux de rentabilité.

85. Force est de constater que, afin de respecter les objectifs poursuivis par la directive 2001/14, la redevance d’utilisation de l’infrastructure constitue, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 77 de ses conclusions, un minimum, qui correspond au coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire prévu à l’article 7, paragraphe 3, de cette directive, et un maximum, qui résulte des coûts totaux encourus par le gestionnaire de l’infrastructure, ainsi que le prévoit l’article 8, paragraphe 1, de ladite directive.

86. Entre ces deux extrêmes, la directive 2001/14 prévoit que la redevance peut varier par la prise en compte de la rareté des capacités, ainsi que le prévoit l’article 7, paragraphe 4, de cette directive, ou du coût des effets sur l’environnement mentionné au paragraphe 5 de cet article 7, ou encore des projets d’investissement spécifiques visés à l’article 8, paragraphe 2, de ladite directive, ainsi que des réductions prévues à l’article 9 de cette dernière.

87. Ainsi, en ce qui concerne l’argument de la Commission selon lequel l’article 14, paragraphe 4, de la loi générale sur les chemins de fer ne permet pas de déterminer si c’est le principe des coûts directs, prévu à l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14, ou celui des coûts totaux prévu à l’article 8, paragraphe 1, de ladite directive qui s’applique, il convient de relever, ainsi qu’il a été relevé aux points 84 et 85 du présent arrêt, que ces deux principes ne sont pas substituables l’un à l’autre. En effet, le système prévu à l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2001/14 ne peut être utilisé que si le marché s’y prête, une étude de marché étant nécessaire aux fins de vérifier si tel est le cas.

88. En l’occurrence, ladite disposition nationale permet le recouvrement total des coûts encourus et laisse au gestionnaire de l’infrastructure la possibilité d’effectuer une différenciation en fonction des services de transport de voyageurs à grande distance, de transport de voyageurs à courte distance ou de fret ferroviaire ainsi qu’en fonction des segments de marché à l’intérieur de ces services de transport. Toutefois, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 85 de ses conclusions, la directive 2001/14 n’impose pas aux États membres de prévoir des règles de tarification plus détaillées.

89. En ce qui concerne l’argument de la Commission selon lequel un test de capacité du marché à supporter les coûts devrait être effectué afin de vérifier si tous les segments de marché peuvent supporter ces coûts, il convient de considérer que ce test ne doit être réalisé par le gestionnaire de l’infrastructure que lorsque ce dernier veut percevoir une majoration des coûts spécifiquement en fonction des segments de marché. Ainsi qu’il a été exposé au point 84 du présent arrêt, l’État membre est seulement tenu d’établir un cadre pour la tarification tandis que la tarification elle-même incombe au gestionnaire de l’infrastructure. Il en résulte que, en vertu de la directive 2001/14, la République fédérale d’Allemagne n’est pas tenue d’imposer, dans sa réglementation nationale, les modalités selon lesquelles le gestionnaire de l’infrastructure doit déterminer la capacité des segments de marché à supporter les éventuelles majorations de coûts et les circonstances dans lesquelles il doit le faire.

90. Au vu des considérations qui précèdent, il convient d’écarter le grief de la Commission relatif à la tarification.

Sur le grief relatif aux mesures d’incitation à réduire les coûts

Argumentation des parties

91. La Commission soutient que l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14 n’a pas été transposé dans la réglementation allemande. Selon cette institution, aucun des mécanismes cités par la République fédérale d’Allemagne n’incite le gestionnaire de l’infrastructure à limiter les coûts liés au service d’infrastructure ou le niveau des redevances d’accès. De surcroît, les conventions de prestation et de financement conclues entre l’État allemand, les entreprises d’infrastructure de DB AG et cette société elle-même ne contiendraient aucune disposition prévoyant une réduction des coûts d’infrastructure et des tarifs.

92. La République fédérale d’Allemagne fait valoir que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14 part du principe selon lequel il convient d’atteindre un équilibre entre, d’une part, les recettes tirées des redevances d’utilisation de l’infrastructure et le financement par l’État et, d’autre part, les dépenses d’infrastructure. Elle estime que l’importance des coûts liés au service de l’infrastructure, le montant des redevances d’accès et celui du financement étatique s’insèrent dans une relation économique qui exclut des exigences juridiques unilatérales. Ainsi, les dispositions de cette directive ne permettraient pas de conclure à une obligation unilatérale de réduction des coûts ou des tarifs. L’objectif de diminution des coûts et des redevances d’accès prévu à l’article 6, paragraphe 2, de ladite directive serait soumis au respect des exigences en matière de sécurité et d’amélioration de la qualité du service de l’infrastructure.

93. Ledit État membre soutient également que la directive 2001/14 n’exige pas une diminution effective des coûts ou des redevances d’accès. Cette obligation devrait, au contraire, se concilier avec les autres exigences en matière de structure de la tarification. Il conviendrait, globalement, d’assurer la réalisation de l’objectif à long terme visant à atteindre un équilibre entre les recettes et les dépenses relatives à l’infrastructure.

94. La République fédérale d’Allemagne estime également que, conformément au libellé de l’article 6, paragraphe 3, de la directive 2001/14, le législateur national peut décider de l’instrument d’action qu’il utilisera lors de la transposition, à savoir soit un contrat conclu entre l’autorité compétente et le gestionnaire de l’infrastructure, soit des mesures réglementaires appropriées.

95. Ledit État membre soutient qu’il a pleinement transposé le mécanisme incitatif prévu à l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14. La convention de prestation et de financement («Leistungs- und Finanzierungsvereinbarung», ci-après la «LuFV») remplirait les conditions exigées d’un contrat, au sens de l’article 6, paragraphe 3, de cette directive, et constituerait de ce fait un système efficace d’incitation à la diminution des coûts et des redevances d’accès, conformément à l’article 6, paragraphe 2, de ladite directive.

96. En effet, la LuFV imposerait notamment aux gestionnaires d’infrastructure de nombreuses obligations en matière de garantie de la qualité et d’information. Les exigences qualitatives imposées seraient structurées de manière à assurer une amélioration progressive de la qualité de l’infrastructure ferroviaire. Cette convention limiterait les subventions versées par l’État fédéral pour des investissements de remplacement à un montant annuel de 2,5 milliards d’euros et obligerait les gestionnaires d’infrastructure à prévoir des moyens financiers propres en vue d’assurer la maintenance des voies ferrées.

97. En outre, il existerait, dans le secteur des chemins de fer, de nombreux éléments systémiques incitant à la diminution des coûts, les sociétés gestionnaires d’infrastructure devant être gérées comme des entreprises commerciales soumises au respect des principes de l’économie privée par, notamment, une gestion d’entreprise orientée vers la concurrence, aux fins de maximiser les gains, ce qui inciterait fortement DB Netz à diminuer ses coûts.

Appréciation de la Cour

98. Par le présent grief, la Commission reproche, en substance, à la République fédérale d’Allemagne de ne pas avoir prévu de mécanismes incitant le gestionnaire de l’infrastructure à limiter les coûts liés au service d’infrastructure ou à réduire le niveau des redevances d’accès.

99. La Commission et la République fédérale d’Allemagne s’opposent sur le point de savoir si le gestionnaire de l’infrastructure doit faire l’objet tant de mesures incitatives en vue de la diminution des coûts de fourniture de l’infrastructure que, et cela indépendamment de ces dernières, de mesures incitatives en vue de la réduction des redevances d’accès.

100. Il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2001/14, les États membres doivent définir les conditions appropriées pour que les comptes dudit gestionnaire, dans des conditions normales d’activité et par rapport à une période raisonnable, présentent au moins un équilibre entre, d’une part, les recettes tirées des redevances, les excédents dégagés d’autres activités commerciales et le financement par l’État et, d’autre part, les dépenses d’infrastructure. Conformément à l’article 6, paragraphe 2, de cette directive, le gestionnaire de l’infrastructure est encouragé par des mesures d’incitation à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès.

101. À cet égard, l’article 6, paragraphe 3, de la directive 2001/14 prévoit que l’obligation découlant du paragraphe 2 de cet article 6 doit être mise en œuvre soit dans le cadre d’un contrat pluriannuel prévoyant le financement par l’État, conclu entre le gestionnaire de l’infrastructure et l’autorité compétente, soit par l’établissement de mesures réglementaires appropriées, prévoyant les pouvoirs nécessaires. Il est donc loisible aux États membres de mettre en œuvre les mesures d’incitation dans le cadre d’un contrat pluriannuel ou au moyen de dispositions réglementaires.

102. En l’espèce, la LuFV a été conclue entre l’État allemand, DB AG et les entreprises d’infrastructure ferroviaire de cette société et elle constitue un mécanisme incitatif au sens du contrat pluriannuel prévu à l’article 6, paragraphe 3, de la directive 2001/14.

103. En effet, les conditions auxquelles est soumis le financement étatique, telles que prévues par la LuFV, sont de nature à inciter le gestionnaire de l’infrastructure à réduire les coûts dans la mesure où elles limitent les subventions de l’État fédéral pour des investissements de remplacement à un montant annuel de 2,5 milliards d’euros, cela en dépit de l’inflation, ce qui oblige ledit gestionnaire, qui est tenu de respecter un standard de qualité constant, à diminuer les coûts. Il en va d’autant plus ainsi que le gestionnaire de l’infrastructure est tenu de fournir une contribution, prélevée sur ses propres ressources, pour la réalisation d’investissements de remplacement.

104. De même, la LuFV impose des obligations en matière de garantie de la qualité et d’information, auxquelles le gestionnaire de l’infrastructure doit se soumettre sous peine de sanctions.

105. Ainsi, ces mesures incitent le gestionnaire de l’infrastructure à réduire les coûts et, indirectement, à diminuer le niveau des redevances.

106. En ce qui concerne l’argument de la Commission selon lequel l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14 impose aux États membres de prévoir des mesures d’incitation à la réduction des redevances d’accès distinctes de celles prises en vue d’inciter à une diminution des coûts, force est de constater que le considérant 40 de ladite directive énonce que l’infrastructure ferroviaire est un monopole naturel et qu’il est dès lors nécessaire d’inciter, par des mesures d’encouragement, les gestionnaires de l’infrastructure à réduire les coûts et à gérer leur infrastructure de manière efficace. Or, ce considérant fait état non pas des redevances, mais uniquement des coûts.

107. Certes, l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2001/14 prévoit que des mesures d’incitation doivent être prises de manière à réduire les coûts et les redevances d’accès. Toutefois, cette disposition ne prévoit nullement que ces mesures doivent être prises de façon distincte.

108. En effet, admettre la position de la Commission reviendrait à reconnaître l’obligation, pour un État membre, d’inciter le gestionnaire de l’infrastructure à répercuter sur les utilisateurs du réseau, par une diminution des redevances, une partie des excédents obtenus par une augmentation de son efficacité, alors même qu’il pourrait ne pas être en mesure de recouvrer tous les coûts de fourniture de l’infrastructure. Cette interprétation obligerait l’État membre, en contrepartie de cette répercussion, à financer l’infrastructure. Force est de constater qu’une telle interprétation serait en contradiction avec l’article 6, paragraphe 1, second alinéa, de la directive 2001/14, qui prévoit qu’un État membre peut, à l’intérieur du cadre de tarification défini aux articles 7 et 8 de cette directive, exiger du gestionnaire de l’infrastructure qu’il équilibre ses comptes sans apport financier de l’État.

109. Il y a lieu, dès lors, de considérer que l’obligation d’encourager le gestionnaire de l’infrastructure, par des mesures d’incitation, à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure et le niveau des redevances d’accès est, en l’espèce, satisfaite par les mesures visant à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure, ces mesures ayant également un impact sur la réduction des redevances, ainsi qu’il a été mentionné aux points 102 à 105 du présent arrêt.

110. En outre, il convient également de constater que les mesures incitatives visant à réduire les coûts de fourniture de l’infrastructure ne pourront qu’entraîner une baisse du niveau des redevances d’accès, que celles-ci soient fixées sur la base de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2001/14 ou sur celle de l’article 8, paragraphe 1, de cette directive.

111. Il résulte des considérations qui précèdent que le grief de la Commission relatif aux mesures d’incitation à réduire les coûts doit être écarté.

Sur le grief relatif aux compétences de l’organisme de contrôle

Argumentation des parties

112. La Commission soutient, tout d’abord, que la République fédérale d ’Allemagne a manqué à ses obligations découlant de l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14, lu en combinaison avec l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440.

113. Selon la Commission, l’organisme de contrôle ne peut remplir l’obligation, qui lui est faite à l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440, de surveiller régulièrement la concurrence sur le marché des services ferroviaires et de corriger les développements négatifs sur ces marchés que si, indépendamment de plaintes ou d’une suspicion concrète d’infraction aux directives concernées, il est autorisé à interroger les entreprises ferroviaires et les gestionnaires d’infrastructure et s’il est en droit de les contraindre à répondre à ses demandes de renseignements par la menace de sanctions appropriées. Dans l’hypothèse où il ne disposerait pas d’informations obtenues au moyen de telles demandes de renseignements, l’organisme de contrôle, qui serait toujours tenu de s’appuyer sur des informations communiquées par les plaignants, ne serait pas en mesure d’engager une procédure de sa propre initiative.

114. Ensuite, la Commission estime que la transposition de l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14 est incomplète dès lors que cet article ne ferait pas de distinction entre les gestionnaires d’infrastructure et les entreprises de transport.

115. Enfin, si l’organisme de contrôle n’a pas la possibilité de faire exécuter une demande de renseignements, il ne pourrait compter que sur les informations que les entreprises ferroviaires veulent bien lui communiquer, ce qui ne correspondrait pas aux objectifs poursuivis par la directive 2001/14.

116. La République fédérale d’Allemagne fait valoir que l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14 n’exige pas que l’organisme de contrôle soit habilité à obtenir des renseignements en l’absence de raison particulière ou de toute suspicion d’infraction. Cette disposition devrait, au contraire, être interprétée dans le contexte du champ d’application et de l’objectif réglementaire de cette directive, à savoir la répartition des capacités de l’infrastructure ferroviaire et la tarification de cette dernière. Dans ce contexte, l’organisme de contrôle remplirait plutôt la fonction d’un organisme de recours, qui surveille et garantit l’accès non discriminatoire à l’infrastructure ferroviaire dans le cadre de la répartition des capacités et de la tarification. Ladite disposition prévoirait seulement un droit matériel d’obtenir des renseignements et une obligation correspondante d’en fournir, sans que la question de la sanction de tels droits soit évoquée dans ladite directive.

117. De même, l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440 n’habiliterait pas l’organisme de contrôle à obtenir des renseignements ou à infliger des sanctions dans le domaine de la concurrence.

Appréciation de la Cour

118. Par le présent grief, la Commission reproche, en substance, à la République fédérale d’Allemagne d’avoir manqué à ses obligations découlant de l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440 et de l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14, en ne prévoyant pas que l’organisme de contrôle prévu à cet article 30 soit autorisé, indépendamment de plaintes ou d’une suspicion concrète d’infraction aux directives concernées, à interroger les entreprises ferroviaires et les gestionnaires de l’infrastructure et à infliger des sanctions à ces derniers.

119. Conformément à l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14, l’organisme de contrôle est habilité à demander les informations utiles au gestionnaire de l’infrastructure, aux candidats et à toute autre partie intéressée dans l’État membre concerné, et ces informations sont fournies sans tarder.

120. Force est de constater que l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14 n’exige pas de l’organisme de contrôle qu’il ait des compétences en matière d’obtention de renseignements en l’absence de raison particulière ou de toute suspicion d’infraction.

121. À cet égard, il convient de relever que l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14 doit être interprété en tenant compte de son champ d’application et de l’objectif poursuivi par cette directive.

122. Ainsi qu’il ressort du considérant 16 de la directive 2001/14, les systèmes de tarification et de répartition des capacités permettent une concurrence équitable dans la fourniture de services ferroviaires. En outre, selon le considérant 46 de cette directive, la gestion efficace et l’utilisation équitable et non discriminatoire de l’infrastructure ferroviaire exigent la mise en place d’un organisme de réglementation, chargé de surveiller l’application de ces règles de l’Union et d’agir comme organisme de recours, nonobstant la possibilité d’un contrôle juridictionnel.

123. Cette interprétation est également corroborée par l’objet de la directive 2001/14, figurant à l’article 1 er de cette directive. En effet, selon cette disposition, ladite directive a pour objet les principes et les procédures à suivre pour la fixation et la perception de redevances d’utilisation de l’infrastructure ferroviaire et pour la répartition des capacités de cette infrastructure.

124. Il découle de ces éléments ainsi que du contexte réglementaire dans lequel s’inscrit l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14 que l’organisme de contrôle prévu à cette disposition a pour rôle de surveiller et de garantir un accès non discriminatoire à l’infrastructure ferroviaire, dans le cadre de la répartition des capacités et de la tarification. De ce fait, la possibilité, pour cet organisme, d’obtenir des renseignements découle de l’article 30, paragraphe 2, de la directive 2001/14 qui prévoit qu’un candidat peut saisir ledit organisme dès lors qu’il estime être victime d’un traitement inéquitable, d’une discrimination ou de tout autre préjudice.

125. En ce qui concerne la question de savoir si l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440, lu en combinaison avec l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14, permet à l’organisme de contrôle d’effectuer d’office des enquêtes, sans qu’une plainte ait été déposée et en l’absence de raison particulière ou de toute suspicion d’infraction, il convient de rappeler que l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440 prévoit que l’organisme réglementaire créé conformément à l’article 30 de la directive 2001/14, ou tout autre organisme disposant du même degré d’indépendance, contrôle la concurrence sur les marchés des services ferroviaires, y compris le marché du transport de fret ferroviaire.

126. Force est de constater que l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440 ne fait pas mention de la possibilité ou même de l’obligation pour un État membre d’exiger de l’organisme de contrôle, dans le cadre de sa mission de contrôle de la concurrence, qu’il obtienne des renseignements en l’absence de raison particulière ou de toute suspicion d’infraction ou qu’il inflige des sanctions.

127. Certes, il est vrai que l’article 10, paragraphe 7, second alinéa, troisième phrase, de la directive 91/440 prévoit que l’organisme de contrôle statue dans les meilleurs délais, sur la base d’une plainte et, le cas échéant, d’office, sur les mesures propres à remédier aux développements négatifs sur ces marchés. Toutefois, il ressort de l’économie de cette disposition, qui renvoie à l’article 30 de la directive 2001/14, dont la portée a été analysée aux points 121 à 125 du présent arrêt, que la place de cette phrase au sein même de l’article 10, paragraphe 7, second alinéa, de la directive 91/440 ainsi que la compétence de l’organisme de contrôle pour statuer d’office sur les mesures propres à remédier au développement négatif sur les marchés des services ferroviaires doivent être interprétées en ce sens que cet organisme peut agir, en dehors de toute plainte, sur la base d’informations dont il viendrait à avoir connaissance, notamment dans le cadre d’une suspicion concrète d’infraction, et non en ce sens qu’il serait habilité à initier ses propres enquêtes et à contraindre les entreprises concernées à répondre à celles-ci.

128. Par conséquent l’article 10, paragraphe 7, de la directive 91/440 et l’article 30, paragraphe 4, de la directive 2001/14 ne prévoient pas expressément que doivent être mises en œuvre par l’État membre des mesures permettant à l’organisme de contrôle d’obtenir des renseignements en l’absence de plainte ou de suspicion d’infraction auxdites directives et de prévoir des sanctions à ces éventuelles infractions. Ainsi, il ne saurait être reproché à la République fédérale d’Allemagne de ne pas avoir prévu de telles mesures dans sa législation nationale.

129. Il s’ensuit que le grief de la Commission relatif aux compétences de l’organisme de contrôle doit être écarté. Partant, il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours de la Commission doit être rejeté.

Sur les dépens

130. En vertu de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La République fédérale d’Allemagne ayant conclu à la condamnation de la Commission et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

131. En application de l’article 140, paragraphe 1, du règlement de procédure, la République tchèque et République italienne supporteront leurs propres dépens.

Dispositif

Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête:

1) Le recours est rejeté.

2) La Commission européenne est condamnée aux dépens.

3) La République tchèque et la République italienne supportent leurs propres dépens.