Strasbourg, le 24.11.2015

COM(2015) 587 final

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, à la Banque centrale européenne, au Comité économique et social européen et au Comité des régions

«Vers l’achèvement de l’union bancaire»


Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, à la Banque centrale européenne, au Comité économique et social européen et au Comité des régions

«Vers l’achèvement de l’union bancaire»

1.    Contexte

Le rapport des cinq présidents du 22 juin 2015 1 et la communication de suivi de la Commission du 21 octobre 2015 2 ont présenté un plan d'approfondissement de l’Union économique et monétaire (UEM). L’achèvement de l’union bancaire en est l'un des éléments essentiels. L’UEM a besoin d’une union bancaire pleinement opérationnelle afin d’assurer une transmission efficace de la politique monétaire unique, une meilleure diversification des risques entre les États membres et un financement adéquat de l’économie. En outre, l’achèvement de l’union bancaire renforcera la stabilité financière de l’UEM en rétablissant la confiance dans le secteur bancaire par un ensemble de mesures conçues à la fois pour partager et réduire les risques.

L’Union a mis en œuvre un important programme de réforme du secteur financier au cours des dernières années. Dans ce contexte, le cadre réglementaire applicable aux banques a été renforcé sur la base de règles communes, qui garantissent une réglementation plus cohérente et une surveillance de haute qualité dans l’ensemble de l’Union. Ce cadre favorisera un comportement plus responsable dans le secteur bancaire. Ainsi:

-la directive et le règlement sur les exigences de fonds propres (CRD IV et CRR) ont introduit pour les banques des exigences prudentielles plus strictes, fondées sur de nouvelles normes mondiales. La capacité des banques à absorber les chocs économiques et financiers négatifs a de ce fait été renforcée par l'augmentation de la qualité et du volume des fonds propres, par l'élargissement de la couverture des risques, par la modération de l’effet de levier et par l’amélioration de la gouvernance et de la transparence;

-la directive relative au redressement des banques et à la résolution de leurs défaillances (BRRD) a établi, pour les banques en situation de défaillance avérée ou prévisible, un nouveau cadre qui permettra aux États membres de protéger les contribuables en gérant les crises bancaires avec davantage de méthode et dans de meilleurs délais;

-la directive relative aux systèmes de garantie des dépôts (la «directive SGD») a amélioré le fonctionnement des systèmes de garantie des dépôts (les «SGD») des États en harmonisant leur niveau de garantie, en renforçant leurs dispositifs de financement et en raccourcissant les délais de remboursement.

Ce cadre réglementaire renforcé (le «règlement uniforme») constitue une base commune pour le marché unique des 28 États membres, mais aussi pour l’union bancaire.

Cette dernière a pour principal objectif de mettre fin à la fragmentation des marchés financiers constatée depuis la crise de l’euro en affaiblissant le lien entre les banques et leur emprunteur souverain (à travers lequel des défaillances bancaires peuvent mettre à mal les finances publiques et des tensions sur la dette souveraine peuvent déstabiliser les banques). À cette fin, il a été décidé que la surveillance, la résolution des défaillances et le financement des résolutions des grandes banques devraient être pilotés au niveau de l'union bancaire.

Le Mécanisme de surveillance unique (MSU) et le Mécanisme de résolution unique (MRU) – les deux premiers piliers de l’union bancaire – ont été mis en place à cet effet. Le MSU est devenu opérationnel en novembre 2014 et permet déjà une surveillance prudentielle indépendante et uniforme. Le MRU sera pleinement opérationnel à partir de janvier 2016, date à laquelle seront versées les premières contributions au Fonds de résolution unique (FRU). Toutefois, trois ans après que le Conseil européen est convenu d'une feuille de route pour l’achèvement de l’UEM, sur la base d’une intégration accrue et d’un soutien mutuel 3 , le troisième pilier de l’union bancaire – un système commun de garantie des dépôts – fait toujours défaut. En outre, il a été décidé que l’union bancaire devrait disposer d'un dispositif de soutien budgétaire commun efficace à n'utiliser qu’en dernier ressort, mais les travaux en ce sens n’ont pas encore commencé (voir la section 3.2).

Il s'agit à présent de veiller à la mise en œuvre intégrale et correcte des éléments de l’union bancaire déjà adoptés et à la mise en place des éléments qui font défaut. Les États membres sont convenus de fournir au FRU un mécanisme de financement-relais efficaces pour janvier 2016 au plus tard et de mettre en place le dispositif de soutien budgétaire commun au plus tard à la fin de l’année 2023 4 . Plus récemment, le rapport des cinq présidents a proposé plusieurs mesures visant à compléter l'union bancaire, auxquelles la Commission a donné suite en publiant une communication axée sur quatre exigences essentielles:

1.la transposition et la mise en œuvre intégrales et rapides des dispositions juridiques approuvées et qui ont déjà fait l’objet d’un accord (notamment la «directive BRRD» et la «directive SGD» – voir le point 2);

2.un accord rapide sur un mécanisme de financement-relais efficace pour le FRU et sur un dispositif de soutien budgétaire commun qui devraient n'avoir aucune incidence budgétaire à moyen terme (c’est-à-dire que l'argent du contribuable utilisé devra être ensuite remboursé par les banques);

3.une proposition législative pour un système européen de garantie des dépôts (le «SEGD»); et

4.un effort parallèle pour réduire davantage les risques dans le secteur bancaire et pour affaiblir le lien entre banques et emprunteurs souverains.

La présente communication qui accompagne la proposition législative de la Commission pour le SEGD inscrit cette dernière dans le contexte plus large de l’achèvement de l’union bancaire et des nécessaires mesures additionnelles de partage et de réduction des risques dans le secteur bancaire.

2.    Mise en œuvre du règlement uniforme pour l'union bancaire

La directive et le règlement sur les exigences de fonds propres (CRD IV/CRR), la BRRD et la directive SGD constituent le règlement uniforme de l'union bancaire. Ces textes législatifs ont tous été adoptés en 2014 et doivent à présent être transposés en droit national pour assurer le bon fonctionnement de l’union bancaire. Alors que le paquet CRD IV/CRR a été intégralement transposé par tous les États membres, certains d'entre eux – y compris certains de ceux qui participent à l’union bancaire – n’ont pas encore rempli leurs obligations relatives à la transposition intégrale de la BRRD ni de la directive SGD, dont les délais de transposition (respectivement le 31 décembre 2014 et le 3 juillet 2015) sont d'ores et déjà dépassés. La Commission a engagé une procédure d’infraction à l’égard de plusieurs de ces États membres devant la Cour de justice de l’Union européenne. Dans ce contexte, la Commission a demandé que l’accord intergouvernemental sur le Fonds de résolution unique soit ratifié le 30 novembre au plus tard, un certain nombre d’États membres n’ayant pas encore achevé la procédure de ratification. Si la majorité des États membres devraient être en mesure de respecter leurs engagements en matière de transposition et de ratification avant la fin de 2015, la crédibilité de l’union bancaire repose néanmoins sur le respect de tous les engagements juridiques par l’ensemble des États membres participants 5 . Dans l’intervalle, la Commission veillera à l'adoption en temps utile de la législation dérivée nécessaire à la mise en œuvre de l’union bancaire, comme par exemple les dispositions relatives au renflouement interne prévues par la BRRD.

3.    Financement-relais pour le Fonds de résolution unique et dispositif de soutien budgétaire commun

3.1    Un mécanisme de financement-relais

Les banques commenceront à contribuer au Fonds de résolution unique en 2016, mais celui-ci n’atteindra sa taille définitive d’environ 55 milliards d’euros qu'en 2024. Les contributions seront mutualisées progressivement sur une période de huit ans. De ce fait, et aussi en raison de la structure complexe de compartiments nationaux distincts au cours de la période de transition vers une mutualisation complète, la capacité d’emprunt du Fonds de résolution unique sera limitée dans les années à venir. Une préoccupation majeure est que le FRU pourrait pâtir de contraintes de capacité, en particulier au cours de ses premières années, et pourrait ne pas être en mesure de fournir les financements nécessaires à une ou plusieurs éventuelles opérations de résolution de défaillances bancaires. Dans ce cas, l’État ou les États membres concernés seraient tenus de financer la résolution, entretenant ainsi le lien entre les banques et leur emprunteur souverain.

Pour remédier au risque de capacité inadéquate du FRU, les États membres participants débattent de la mise en place de lignes de crédit nationales pour garantir leurs compartiments nationaux. Puisque la taille de ces compartiments diminuera à mesure que seront mutualisées les contributions, les lignes de crédit des États membres financeraient une part du Fonds de résolution unique qui ira décroissant. Il est dès lors essentiel que les États membres prennent non seulement les mesures nécessaires à la mise en place de ces lignes de crédit nationales avant le 1er janvier 2016, date à laquelle le conseil de résolution unique deviendra pleinement opérationnel, mais qu’ils engagent aussi une discussion sur l'ouverture d’une ligne de crédit mutualisée plus solide par l’intermédiaire du Mécanisme européen de stabilité (MES).

3.2    Un dispositif de soutien budgétaire commun en tant que dernier recours

À la condition qu'ils fonctionnent correctement, le MSU et le MRU réduiront de manière significative la probabilité de défaillances bancaires et permettront d'éviter que les contribuables ne paient les coûts d'éventuelles résolutions bancaires. Une protection supplémentaire découle du large éventail de mesures prudentielles prises à l’égard des banques dans l’objectif de renforcer la surveillance et la gestion des crises, d’améliorer la quantité et la qualité des capitaux, de réduire la concentration des risques, de favoriser le désendettement, de limiter le comportement procyclique en matière de prêts, de renforcer l’accès aux liquidités, de remédier au risque systémique dû à la taille, à la complexité et aux interconnexions, de renforcer la confiance des déposants et d'encourager une bonne gestion des risques par des règles sur la gouvernance.

Toutefois, même ce vaste ensemble de mesures prudentielles et de gestion de crise ne suffit pas à écarter entièrement le risque d'un recours à un financement public pour augmenter la capacité financière des fonds de résolution. C'est pourquoi les États membres sont convenus que l’union bancaire devait avoir accès à un dispositif de soutien budgétaire commun efficace, qui ne serait utilisé qu'en dernier ressort. Ce dispositif nécessiterait une mutualisation temporaire des risques budgétaires éventuels liés à la résolution des défaillances dans l’union bancaire. Toutefois, son utilisation devrait n'avoir aucune incidence sur le budget à moyen terme, car les fonds publics utilisés seraient remboursés au fil du temps par les banques (par l'intermédiaire de contributions ex post au Fonds de résolution unique).

4.    Un système européen de garantie des dépôts (SEGD)

4.1 Fondements du SEGD

Un système commun de garantie des dépôts a été envisagé au cours des discussions préliminaires de l’union bancaire en 2012. La Commission a proposé, dans le cadre de la révision de la directive SGD en 2012, d’imposer des prêts et des emprunts mutuels entre les systèmes nationaux de garantie des dépôts, mais sa proposition n’a pas été acceptée. La directive SGD de 2014 a amélioré les systèmes nationaux de garantie des dépôts en réduisant les délais de remboursement en faveur des déposants et en imposant que les fonds de garantie atteignent un certain niveau («niveau cible») d’ici à 2024. Elle prévoit également des modalités de prêts volontaires entre systèmes nationaux, ce qui constitue une source de liquidités en cas de besoin.

Malgré les améliorations apportées par la directive de 2014, l’absence d’un système commun de garantie des dépôts pour l'union bancaire laisse les déposants vulnérables aux chocs locaux importants, qui pourraient excéder les capacités des systèmes nationaux de garantie des dépôts. Dans le même temps, les conditions de concurrence au sein de l’union bancaire ne sont pas équitables pour les déposants ni pour les banques qui veulent attirer leurs dépôts. Les divergences entre les systèmes nationaux de garantie des dépôts peuvent également contribuer à fragmenter le marché en influant sur la capacité et la volonté des banques d'étendre leurs activités au-delà des frontières nationales. Le choix d'une structure de groupe transfrontière pour les banques (c’est-à-dire avec des succursales ou avec des filiales) pourrait notamment être influencé, les banques choisissant leur système national de garantie des dépôts (succursale) ou celui du pays d'accueil (filiale) en fonction de la solidité de l'un ou de l'autre.

Le SEGD renforcerait la résilience de l’union bancaire en cas de nouvelle crise financière en rendant les systèmes nationaux de garantie des dépôts moins vulnérables aux grands chocs locaux et en relâchant davantage le lien entre les banques et leur État d'origine. Dans ces conditions, le SEGD pourrait contribuer à rassurer les déposants dans toute l’union bancaire et ainsi réduire le risque de panique bancaire et renforcer la stabilité financière. Il permettrait également d’améliorer la coopération entre les SGD nationaux en cas de défaillances de banques transfrontières. Il renforcera la confiance des déposants indépendamment de la localisation des banques, ce qui favorisera l'instauration de conditions de concurrence équitables et consolidera l’intégration financière. À tous ces égards, le SEGD constitue le complément logique du transfert vers l’union bancaire de la responsabilité en matière de surveillance et de résolution des défaillances bancaires. Étant donné que le MSU et le MRU font que la responsabilité en matière de surveillance et de résolution est à présent partagée, les circonstances dans lesquelles un SGD national doit rembourser les déposants assurés ou intervenir dans la résolution des défaillances bancaires échappent désormais, dans une large mesure, au contrôle national. En conséquence, la Commission a adopté, en même temps que la présente communication, une proposition législative pour le SEGD.

4.3. Quel serait le fonctionnement du SEGD?

4.3.1. Le Fonds européen de garantie des dépôts

Un Fonds européen de garantie des dépôts (ci-après le «Fonds de garantie des dépôts»), distinct du FRU, sera établi en complément des fonds nationaux de garantie des dépôts. Des contributions seront prélevées auprès des banques pour le financer.

Durant la phase de réassurance du SEGD, lorsque les risques se situent encore majoritairement au niveau national, le profil de risque d'une banque donnée est déterminé en fonction de l'ensemble de son système bancaire national. Une fois que le SEGD sera un système de responsabilité conjointe au niveau de l’union bancaire (dès la première année de la phase de coassurance), le profil de risque d'une banque donnée sera déterminé par rapport à l'ensemble des banques de l’union bancaire. Ainsi, le SEGD resterait globalement neutre du point de vue des coûts pour les banques et pour les SGD nationaux, et la définition du profil de risque des banques durant la phase de constitution du Fonds de garantie des dépôts ne serait pas plus difficile.

L'un des principes fondamentaux est qu'aucune des phases de mise en place du SEGD ne devrait accroître les coûts totaux supportés par le secteur bancaire par rapport aux obligations découlant actuellement de la directive SGD de 2014. En d’autres termes, le SEGD améliorera l’efficience économique des mécanismes de garantie des dépôts déjà en place dans l’union bancaire en mettant en commun progressivement les fonds disponibles pour les remboursements sans augmentation générale des contributions bancaires. Les contributions que verseront les banques au SEGD seront déduites de celles qu'elles versent aux SGD nationaux. Les contributions aux systèmes nationaux diminueront en même temps qu'augmenteront les contributions au SEGD.

Une autorité forte et indépendante au niveau de l'union bancaire serait nécessaire pour gérer le SEGD, pour décider des contributions des banques en fonction des risques ainsi que pour suivre les rentrées et gérer les remboursements. Ce rôle pourrait être joué par le Conseil de résolution unique, moyennant une modification de sa structure de gouvernance pour l'adapter à ses nouvelles tâches relatives au SGD et lui permettre de gérer d'éventuels conflits d’intérêts entre les fonctions de résolution et de garantie des dépôts. Le Conseil de résolution unique pourrait gérer à la fois le FRU et le Fonds de garantie des dépôts, ce qui créerait des synergies grâce au regroupement des responsabilités en matière de résolution et de garantie des dépôts et devrait permettre un processus décisionnel cohérent et efficace ainsi qu'une prise de décision rapide. Ce mécanisme ferait du Conseil de résolution unique le premier point de contact en cas de crise, lui permettrait de gérer plus rapidement les crises et, de ce fait, limiterait les risques de contagion. Il serait néanmoins nécessaire de prévenir d’éventuels conflits d’intérêts en veillant à ce que le Fonds de garantie des dépôts soit séparé comme il convient du Fonds de résolution unique.

4.3.2. De la réassurance à la coassurance

La proposition de SEGD combine les approches de réassurance et de coassurance sous la forme d’étapes successives: on passerait de l’approche de réassurance à un système de coassurance dans lequel le taux de mutualisation augmenterait progressivement jusqu’à parvenir à un système d'assurance complète. La Commission propose que le SEGD repose dans un premier temps sur le principe de réassurance et qu'à court terme, les risques ne soient pas intégralement mutualisés.

Afin de limiter la responsabilité du Fonds de garantie des dépôts, de réduire l’aléa moral au niveau national et de remédier aux éventuelles divergences dans le niveau de capitalisation des SGD nationaux existants durant la phase de réassurance, un système national ne pourra accéder au SEGD que s'il a épuisé toutes ses ressources propres et respecte la directive SGD et que l'État membre concerné respecte pleinement les obligations qui lui incombent en vertu de cette même directive. En outre, le Fonds de garantie des dépôts ne participerait que dans une certaine mesure aux remboursements, venant ainsi en aide au système national jusqu'à un certain pourcentage des fonds manquants et dans la limite d'un plafond global précis. Ces conditions mises à l'intervention du Fonds de garantie des dépôts sont nécessaires pour écarter le risque d’aléa moral ainsi que pour éviter que les avantages ne soient plus grands pour le premier demandeur et qu'un système national ne bénéficie d'une assistance plus importante du SEGD simplement parce qu'aucune mesure n'a été prise pour constituer un fonds suffisant au niveau national. Les États membres devraient continuer à renforcer leurs systèmes nationaux. Les remboursements versés par le Fonds de garantie des dépôts étant subordonnés à la conformité avec la directive SGD, ce système inciterait davantage les États membres à se conformer pleinement à ladite directive. Ce mécanisme de sauvegarde garantirait que, lorsqu'ils sont épuisés, les systèmes nationaux n'abusent pas du SEGD. En outre, des plafonds pour l’intervention du SEGD sont également prévus de sorte que ce dernier ne soit pas tari par les différents remboursements.

Cette approche de réassurance affaiblirait le lien entre les banques et leur emprunteur souverain, mais elle ne permettrait pas d'offrir une garantie globale aux systèmes nationaux, ni de garantir que tous les dépôts de détail de l’union bancaire bénéficient d’un niveau de protection équivalent.

Ainsi, après une phase de fonctionnement en tant que système de réassurance, le SEGD deviendrait progressivement un système mutualisé («coassurance»), toujours assorti des limites et garde-fous appropriés, avant de devenir un système d'assurance complète en 2024. Au cours de la période allant jusqu’à 2024, la contribution relative apportée par le Fonds de garantie des dépôts au remboursement des déposants devrait augmenter progressivement jusqu'à atteindre 100 % et ainsi fournir une assurance complète dans l'ensemble de l’union bancaire.

La principale différence entre les approches de réassurance et de coassurance est qu'en vertu de la coassurance, les remboursements seraient partagés entre les SGD nationaux et le Fonds de garantie des dépôts dès le premier euro perdu. Toutefois, les approches de réassurance et de coassurance ont de nombreux points communs: le passage entre les deux approches ne devrait dès lors pas présenter de difficulté majeure d’un point de vue opérationnel. Dans les deux approches, notamment, les remboursements versés par le Fonds de garantie des dépôts resteraient soumis à la conformité de SGD nationaux avec la directive SGD et les SGD nationaux seraient tenus de rembourser le SEGD s'ils recevaient a posteriori des contributions de la part des banques nationales et/ou des fonds à la suite d’une procédure d’insolvabilité.

L'architecture du SEGD devrait suivre la construction caractéristique de l'union bancaire: un règlement uniforme matérialisé par l'actuelle directive SGD, pour les 28 États membres, et par le SEGD, qui serait obligatoire pour les États membres de la zone euro et ouvert aux États membres n'appartenant pas à la zone euro désireux d'y prendre part. Étant donné les liens étroits unissant le SEGD, le Mécanisme de surveillance unique et le Mécanisme de résolution unique, les États membres n’appartenant pas à la zone euro qui adhéreraient à l’union bancaire seraient tenus de participer à ces trois volets.

Enfin, la Commission veillera à ce qu’aucune distorsion ne se manifeste dans le marché unique en appliquant de manière cohérente les règles relatives aux aides d’État. Les fonds utilisés par les SGD, y compris le Fonds de garantie des dépôts, pour rembourser les déposants en raison de l’indisponibilité de dépôts garantis conformément à la directive SGD, ne constituent pas une aide d’État ou une aide au titre du Fonds. Toutefois, lorsque ces fonds sont utilisés en vue de la restructuration d'établissements de crédit et qu'ils constituent une aide d’État ou une aide au titre du Fonds, ils doivent être conformes à l’article 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et à l’article 19 du règlement relatif au MRU, tel que modifié. En outre, ne serait-ce que parce que les délais ont déjà expiré, la Commission compte sur la transposition intégrale de la BRRD et de toutes ses règles applicables par tous les États membres ainsi que sur sa mise en œuvre par les autorités responsables de procédures de résolution bien avant la mise en place du SEGD.

5.    Réduire davantage les risques dans l’union bancaire 

La Commission est déterminée à réduire encore les risques et à garantir des conditions de concurrence équitables dans l’union bancaire en affaiblissant le lien entre les banques et l'emprunteur souverain national. Du point de vue des mesures spécifiques de réduction du risque, il est important de réaffirmer l'importance de mettre en œuvre les mesures convenues: la première priorité est de garantir que les États membres transposeront intégralement la BRRD et la directive SGD. À cette fin, des procédures d’infraction ont été engagées contre les États membres concernés. La Commission a aussi instamment prié les États membres de ratifier l’accord intergouvernemental concernant les contributions des banques au Fonds de résolution unique.

Un mécanisme de financement-relais adapté au FRU, un dispositif de soutien budgétaire commun et un système commun de garantie des dépôts permettraient de garantir une efficacité maximale à l'union bancaire. Ces mesures ont pour caractéristique commune d'affaiblir le lien entre banques et emprunteurs souverains nationaux grâce au partage des risques entre tous les États membres de l’union bancaire. Toutefois, le partage des risques qu’impliquent ces mesures doit s’accompagner de mesures parallèles aux étapes de mise en place du SEGD afin de réduire les risques dans le secteur bancaire. Si les coûts liés aux faillites et à l’insolvabilité des banques doivent être mutualisés, il est essentiel que le risque d'avoir à supporter ces coûts soit réduit autant que possible. La question n'est pas nouvelle et de nombreuses mesures ambitieuses de réduction des risques ont déjà été prises (voir le point 1). En effet, la BCE a confirmé que les bilans des banques qui ont fait l'objet de son évaluation complète de 2014 sont désormais suffisamment solides, même en cas de graves tensions économiques et financières. Des mesures supplémentaires d'atténuation des risques resteront toutefois nécessaires pour accompagner les travaux de mise en place du SEGD.

-Premièrement, des mesures supplémentaires sont nécessaires pour que le MSU puisse fonctionner aussi efficacement que possible. Même si le MSU est opérationnel depuis plus d’un an et s’est rapidement imposé comme l'autorité de surveillance unique de l’union bancaire, il est nécessaire de réduire les options et les marges d'appréciation nationales dans l’application des règles prudentielles. Dans ce contexte, des progrès importants sont en cours de réalisation en ce qui concerne l'élimination des options et des marges d'appréciation relatives aux règles prudentielles (par exemple, dans la directive CRD IV/CRR) qui s'appliquent aux banques relevant de la responsabilité du MSU: le 11 novembre 2015, le MSU a lancé une consultation publique sur l'harmonisation des options et des marges d'appréciation dans l'exercice de la surveillance au sein de l'union bancaire 6 . Toutefois, il est encore possible de supprimer certaines des options et marges d'appréciation restantes par l'intermédiaire de mesures réglementaires de l’Union. La Commission agira en collaboration avec les États membres et en étroite coordination avec le MSU afin de proposer des mesures réglementaires visant à harmoniser, pour autant que de besoin, l'utilisation des options et marges d'appréciation nationales. Lors de la révision du MSU, la Commission examinera également le fonctionnement de ce mécanisme dans d’autres domaines et réfléchira à de possibles améliorations. En ce qui concerne les options et les marges d'appréciation nationales dans l’application des règles macroprudentielles, la Commission envisagera également un éventuel réexamen du régime actuel, tout en conservant la souplesse nécessaire pour faire face aux particularités de chaque pays;

-Deuxièmement, l’harmonisation des SGD nationaux devra aller de pair avec la mise en place du SEGD. Cette harmonisation sera essentielle au bon fonctionnement du SEGD durant la phase d'assurance complète. Malgré l'introduction de mesures d'harmonisation supplémentaires par la directive SGD de 2014, d’importantes différences subsistent entre les SGD nationaux et il y a lieu d'y remédier dans le cadre de l’union bancaire. Dans la proposition relative au SEGD, l’accès à la garantie offerte par le système suppose le respect d'exigences parfaitement harmonisées en matière de financement;

-Troisièmement, le Conseil de résolution unique doit pouvoir fonctionner aussi efficacement que possible. Il sera pleinement opérationnel à partir de 2016 et œuvre depuis mars 2015 à l'élaboration de plans de résolution pour les banques relevant de sa responsabilité. Afin de préserver la stabilité financière et de limiter les coûts potentiels pour le secteur bancaire en général et pour les contribuables, il est essentiel que le CRU puisse réagir rapidement et efficacement lorsqu'une banque est en situation de défaillance avérée ou prévisible. À cette fin, il est fondamental de disposer d'éléments du passif pouvant servir à un renflouement interne grâce à l'application correcte de l’exigence minimale de fonds propres et d’engagements éligibles. En outre, l'exigence relative à la capacité totale d’absorption des pertes a été élaborée au niveau international par le Conseil de stabilité financière. La Commission présentera une proposition législative en 2016 afin que cette exigence puisse être mise en œuvre dans les délais prévus, à savoir 2019. La mise en œuvre de la capacité totale d'absorption des pertes constituerait une exigence minimale harmonisée supplémentaire permettant de garantir que les banques disposent de capacités d’absorption des pertes et de recapitalisation suffisantes. La mise en route du FRU devrait également se dérouler sans heurts, les contributions des banques concernées devant lui parvenir intégralement et en temps utile à partir de 2016;

-Quatrièmement, il est essentiel que les fonds publics utilisés pour soutenir un secteur bancaire résilient et solvable soient réduits au minimum et ne soient libérés qu’en dernier ressort. À cette fin, il est nécessaire de prévoir une application cohérente des règles de renflouement interne prévues par la BRRD, de façon à ce que les coûts de résolution des défaillances des banques en situation de défaillance avérée ou prévisible soient supportés en premier lieu par les actionnaires et les créanciers. S'il est fait appel à des fonds publics ou au FRU, l’application des règles relatives aux aides d’État et à l'aide au titre du Fonds sera essentielle. Ces règles continueront donc à être appliquées pour garantir que l'utilisation de fonds publics soit réduite au minimum par des mesures appropriées de partage des charges, que les banques bénéficiaires soient viables et que la concurrence sur le marché unique ne soit pas faussée;

-Cinquièmement, comme l'indique le plan d'action de la Commission pour la mise en place d'une union des marchés de capitaux du 30 septembre 2015 7 , une plus grande convergence de la législation en matière d’insolvabilité et des procédures de restructuration dans les États membres est nécessaire. L’inefficacité et les divergences des législations en matière d’insolvabilité compliquent l'évaluation et la gestion du risque de crédit. La Commission envisagera de présenter des propositions destinées à renforcer la sécurité juridique et à encourager la restructuration en temps utile des emprunteurs en difficulté financière, ce qui est particulièrement important pour le succès des stratégies visant à résoudre le problème des prêts non productifs dans certains États membres. Dans le contexte du Semestre européen, la Commission demandera également aux États membres de se concentrer davantage sur le problème des prêts non productifs, notamment en adaptant les régimes d’insolvabilité à la lumière des meilleures pratiques;

-Sixièmement, un certain nombre d’autres mesures prudentielles ciblées portant sur les faiblesses identifiées devraient être mises en œuvre. Ces mesures comprennent les éléments restants du cadre réglementaire convenu au sein du Comité de Bâle, et notamment des mesures visant à limiter l’endettement des banques, à garantir la stabilité du financement bancaire et à améliorer la comparabilité des actifs pondérés en fonction des risques. Comme suite aux discussions qui ont eu lieu au sein du Comité de Bâle, la Commission envisage de présenter des propositions de modification de la CRD IV et du CRR;

-enfin, il convient de réexaminer l'adéquation du traitement prudentiel des expositions des banques sur le risque souverain. Des travaux sur ces questions sont actuellement en cours au niveau international. Dans ce contexte, le rapport des cinq présidents évoque la possibilité de limiter l’exposition des banques à un emprunteur souverain particulier, pour que leur risque souverain global soit suffisamment diversifié. La Commission présentera les propositions nécessaires relatives au traitement prudentiel du risque souverain, en s’appuyant sur une analyse quantitative en préparation au sein du comité économique et financier et du Comité de Bâle et en accordant une attention particulière aux points liés à la stabilité financière.

6.    Conclusion

L’union bancaire a été mise en place avant tout en réaction à la crise financière qui s'est traduite en une crise de la dette souveraine, notamment dans la zone euro. Cette crise a été causée par le lien qui existe entre les banques et leur emprunteur souverain national respectif; l'affaiblissement de ce lien est dès lors devenu l'un des objectifs prioritaires dans la construction de l'union bancaire. Si certains éléments de l’union bancaire sont déjà opérationnels ou le seront bientôt, l'ensemble reste manifestement incomplet. Comme le souligne le rapport des cinq présidents et comme exposé dans la présente communication, l’un des éléments faisant défaut est un système commun d'assurance des dépôts.

La Commission propose donc un système commun d'assurance des dépôts pour l’union bancaire, sur la base d’une approche de réassurance qui se muera progressivement après un certain nombre d'années en un système d'assurance complète. Les États membres devraient également débuter les travaux visant à renforcer le mécanisme de financement-relais convenu pour le FRU et à mettre au point un dispositif de soutien budgétaire commun. Ces étapes vers l'achèvement de l’union bancaire s'inscrivent logiquement dans le contexte des efforts déployés afin d’approfondir l’union économique et monétaire. Elles se caractérisent toutes par le fait qu'elles affaiblissent le lien entre banques et emprunteur souverain dans les États membres grâce au partage des risques entre tous les États membres de l’union bancaire. Elles renforcent donc l'union bancaire en remplissant son principal objectif. Toutefois, le partage des risques que supposent ces étapes pour renforcer l’union bancaire doit aller de pair avec des mesures de réduction des risques visant à briser plus directement le lien entre banques et emprunteur souverain.

La Commission veillera à ce que des mesures supplémentaires de réduction des risques soient prises parallèlement aux travaux en cours pour la mise en place du SEGD, notamment les changements réglementaires nécessaires.

La Commission va poursuivre le dialogue avec le Parlement européen, les États membres et toutes les parties intéressées en ce qui concerne le paquet global relatif au SEGD et aux mesures de réduction des risques.

(1)

Rapport des présidents du Parlement européen, du Conseil européen, de la Commission européenne, de l’Eurogroupe et de la Banque centrale européenne intitulé «Compléter l'Union économique et monétaire européenne».

Voir: http://ec.europa.eu/priorities/economic-monetary-union/docs/5-presidents-report_fr.pdf. 

(2)

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil et à la Banque centrale européenne relative aux mesures à prendre pour compléter l’Union économique et monétaire

Voir: https://ec.europa.eu/transparency/regdoc/rep/1/2015/FR/1-2015-600-FR-F1-1.PDF. 

(3)

Conclusions du Conseil européen sur l’achèvement de l’UEM, adoptées le 14 décembre 2012.

Voir: http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/en/ec/134320.pdf. 

(4)

Voir la déclaration des ministres de l’Eurogroupe et du Conseil ECOFIN de décembre 2013.

(5)

Le 24 novembre 2015, 11 États membres n'avaient pas encore transposé la BRRD ou ne l'avaient transposée que partiellement: la Belgique, la République tchèque, l’Italie, Chypre, la Lituanie, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Pologne, la Roumanie, la Slovénie et la Suède.

Le 24 novembre 2015, 15 États membres n'avaient pas encore transposé la directive SGD ou ne l'avaient transposée que partiellement: la Belgique, la République tchèque, l’Estonie, l'Irlande, la Grèce, l'Italie, Chypre, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Pologne, la Roumanie, la Slovénie et la Suède.

Le 24 novembre 2015, neuf États membres n'avaient pas encore ratifié l’accord intergouvernemental ou n’en avaient pas encore déposé les instruments de ratification: la Belgique, l’Estonie, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte et la Slovénie.

(6)

 Voir: https://www.bankingsupervision.europa.eu/legalframework/publiccons/html/reporting_options.fr.html.

(7)

Voir: http://ec.europa.eu/finance/capital-markets-union/docs/building-cmu-action-plan_fr.pdf.