13.7.2007   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 161/8


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social européen sur la nécessité de développer une stratégie coordonnée en vue d'améliorer la lutte contre la fraude fiscale»

COM(2006) 254 — 2006/0076 (COD)

(2007/C 161/02)

Le 31 mai 2006, la Commission a décidé, conformément à l'article 262 du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la communication susmentionnée.

La section spécialisée «Union économique et monétaire, cohésion économique et sociale», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 23 février 2007 (rapporteur: E. IOZIA).

Lors de sa 434e session plénière des 14 et 15 mars 2007 (séance du 15 mars 2007), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 97 voix pour, 2 voix contre et 1 abstention.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité économique et social européen regrette que les initiatives de la Commission en matière de lutte contre la fraude fiscale ne soient pas encore suffisamment appuyées par la coopération des États membres; il soutient les initiatives futures dans ce domaine et exhorte la Commission à tirer profit de tous les pouvoirs que les traités confèrent aux Institutions européennes.

1.2

Le CESE estime que la communication de la Commission est suffisamment structurée et qu'elle aborde les problèmes liés à la lutte contre la fraude fiscale sous le bon angle en considérant le renforcement de la coopération administrative entre les États membres comme l'instrument principal pour contrecarrer la diffusion de ce phénomène.

1.3

La communication traite la question des relations avec les États tiers de manière concrète, en proposant une approche communautaire. Le CESE marque son accord sur cette proposition.

1.4

Le CESE est favorable au réexamen de la TVA, réexamen qu'il a du reste préconisé à plusieurs reprises. Il considère en effet qu'il est opportun d'organiser un cercle de réflexion sur la modification du régime de la TVA, étant entendu que le remplacement éventuel de cette dernière par une autre taxe ne devrait pas alourdir les charges qui pèsent sur les entreprises et les citoyens.

1.5

Le CESE recommande à la Commission de tirer pleinement profit des pouvoirs actuels de l'Office européen de lutte contre la fraude (OLAF), qui permettent déjà à celui-ci de remplir d'importantes fonctions. La Commission devrait évaluer si l'OLAF dispose des moyens adéquats pour exercer ses compétences institutionnelles.

1.6

Pour le CESE, il est absolument prioritaire d'améliorer constamment la coopération entre les organes nationaux de lutte contre la fraude, le cas échéant en mettant les forces de police et les organes d'investigation en réseau afin qu'ils puissent partager les bases de données disponibles, et préconise que les questions techniques et juridiques connexes soient approfondies.

1.7

Le CESE estime que la proposition de créer un forum de discussion à haut niveau pour la coopération administrative va dans le bon sens et juge tout à fait incompréhensibles les résistances bureaucratiques et les obstacles qui semblent s'opposer à cette idée.

1.8

Le CESE est d'avis qu'il est utile d'intégrer dans la législation communautaire les mesures prises par certains États membres et d'introduire le critère de «valeur normale du marché» aux fins de la lutte contre la fraude.

1.9

Le CESE recommande de faire preuve d'une grande prudence en introduisant des mesures de solidarité entre cédant et cessionnaire et de prévoir l'inversion de la charge de la preuve en cas de transaction manifestement injustifiée, compte tenu notamment de la jurisprudence de la Cour de Justice.

1.10

Le CESE considère que la proposition de la Commission visant à introduire des mesures de simplification pour les opérateurs qui coopèrent avec l'administration ainsi que des contrôles et procédures plus sévères pour les assujettis «à risque» mérite d'être davantage approfondie.

1.11

Le CESE invite la Commission à poursuivre le financement des programmes communautaires qui visent à promouvoir des actions dans le domaine de la protection des intérêts financiers de la Communauté, comme le programme Hercule II.

1.12

Le CESE recommande d'harmoniser les dispositions de la directive 77/799/CEE avec celles déjà prévues en matière d'imposition indirecte et de rendre homogènes les différents systèmes d'imposition de TVA.

2.   Contenu de la communication

2.1

La communication de la Commission se propose de «développer une stratégie coordonnée en vue d'améliorer la lutte contre la fraude fiscale». À cette fin, elle prend acte du fait que, même s'il a été amélioré et renforcé, le cadre juridique communautaire n'est pas suffisamment utilisé et le niveau de la coopération administrative n'est pas en proportion avec le développement du commerce intracommunautaire.

2.2

La Commission revient donc sur un thème déjà évoqué à plusieurs reprises, à savoir la nécessité de renforcer la coopération administrative entre les administrations des États membres, un instrument qui permet de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales susceptibles d'entraîner des pertes budgétaires et de causer des distorsions de la concurrence et de compromettre ainsi le fonctionnement du marché intérieur.

2.3

Lors de la présentation de la communication, László KOVÁCS, commissaire chargé de la fiscalité et de l'union douanière, a déclaré: «Je suis convaincu qu'il est temps de réfléchir à de nouvelles méthodes pour lutter plus efficacement contre la fraude fiscale. L'ampleur de la fraude fiscale est devenue vraiment préoccupante».

2.4

Les économistes estiment que la fraude fiscale s'élève à plus ou moins 2 à 2,5 % du PIB, ce qui représente un montant oscillant entre 200 et 250 milliards d'euros. La fraude à la TVA ou «fraude carrousel» constitue l'un des aspects les plus préoccupants, mais la contrebande et la contrefaçon d'alcools et de tabac tout comme la fraude en matière de fiscalité directe ne sont pas en reste. Depuis que la circulation des biens, des services, des personnes et des capitaux a été libéralisée dans le cadre de la mise en œuvre du marché intérieur en 1993, il est de plus en plus manifeste que les États membres sont incapables de combattre efficacement la fraude fiscale de façon isolée.

2.5

Dans le domaine de la fiscalité indirecte, la législation communautaire prévoit des règles communes pour les États membres (procédures uniformes, identification des autorités compétentes, modalités de transmission des données) dans le but de favoriser la coopération administrative et l'échange d'informations.

2.6

La Commission a recensé trois secteurs d'intervention prioritaires:

2.6.1   L'amélioration de la coopération administrative entre les États membres

2.6.1.1

La Commission considère que les mesures suivantes permettront d'améliorer les résultats de la lutte contre la fraude fiscale:

des mécanismes de coopération plus efficaces. L'absence de culture administrative communautaire constitue une entrave à la lutte contre la fraude fiscale. Elle s'explique souvent par des problèmes linguistiques, le manque de ressources humaines et de connaissance des procédures de coopération de la part des fonctionnaires concernés. Au niveau opérationnel, ces problèmes se traduisent par le non-respect des délais prévus pour traiter les demandes de coopération dans le domaine fiscal provenant d'autres États membres;

le renforcement de la législation en matière de coopération dans le domaine de la fiscalité directe et l'assistance au recouvrement;

une identification plus rapide et une meilleure gestion des risques, qui permettrait aux États membres d'êtres avertis rapidement des risques de fraude auxquels ils peuvent être exposés, en particulier dans le cas de nouvelles entreprises étrangères qui s'établissent pour la première fois sur leur territoire;

la création d'un Forum permanent de coopération administrative au niveau communautaire pour toutes les taxes directes et indirectes.

2.6.2   Une nouvelle approche communautaire de coopération avec les pays tiers

2.6.2.1

«La fraude fiscale ne s'arrête pas aux frontières externes de l'Union européenne». La Commission propose une approche communautaire de la coopération avec les pays tiers. Étant actuellement basée sur des accords bilatéraux entre États, la coopération donne lieu à des situations diversifiées facilement exploitées par les fraudeurs. De plus, la Commission propose d'inclure des clauses de coopération en matière fiscale dans le cadre d'accords de partenariat économique que l'Union conclut avec ses partenaires économiques.

2.6.3   La modification du régime actuel de TVA

2.6.3.1

La Commission ouvre le débat sur la possibilité de renforcer le principe de responsabilité solidaire pour l'acquittement de la TVA dans le respect des principes de proportionnalité et de sécurité juridique.

2.6.3.2

La Commission prend également en compte la possibilité d'étendre aux opérations internes d'un État membre l'utilisation du mécanisme de l'autoliquidation, qui n'est actuellement obligatoire que pour certaines transactions, alors que pour d'autres, la possibilité de l'imposer ou pas est laissée à la discrétion des États membres. La Commission considère que tout changement apporté à la législation sur la TVA en vigueur devra réduire sensiblement les possibilités de fraude, exclure de nouveaux risques, surtout ne pas engendrer d'obligations administratives disproportionnées pour les entreprises et les administrations fiscales et garantir la neutralité de la taxe ainsi qu'un traitement non discriminatoire des opérateurs.

2.7   Autres pistes innovatrices

2.7.1

La Commission propose en outre de mener une réflexion sur d'autres mesures spécifiques, telles que:

le renforcement des obligations déclaratives pour les assujettis «à risques»;

l'allégement de celles-ci pour les entreprises qui obtiendraient une autorisation en s'engageant dans un partenariat avec l'administration fiscale;

l'utilisation de méthodes informatiques standardisées et performantes afin de permettre un échange rapide d'informations.

3.   Le cadre juridique communautaire

3.1

Le Comité considère que les instruments juridiques mis à disposition par le cadre juridique communautaire en vigueur sont suffisants pour lutter contre la fraude fiscale. En revanche, il apparaît nécessaire et urgent d'inviter les États membres à utiliser les instruments de coopération administrative en vigueur de manière plus fréquente et en respectant les modalités et délais prévus. En effet, dans le contexte actuel d'une économie mondialisée où même la fraude a une dimension transnationale, il est indispensable de disposer des informations requises dans des délais compatibles avec la réalisation des enquêtes.

3.2

Afin de disposer d'un système plus homogène dans les domaines de la fiscalité directe et indirecte, la Commission pourrait harmoniser les dispositions de la directive 77/799/CEE et celles relatives à la fiscalité indirecte, et prévoir des méthodes plus efficaces concernant l'échange d'informations, en prenant en compte les possibilités offertes par l'informatique. Il est également important de rendre homogènes les différents systèmes d'imposition de la TVA, en prêtant une attention particulière aux obligations des assujettis.

3.3

Le cadre juridique communautaire peut s'articuler en cinq groupes principaux:

l'assistance mutuelle;

la coopération en matière de TVA;

la coopération en matière d'accises;

le recouvrement de créances;

le programme Fiscalis.

3.4

Les références à la législation communautaire ainsi qu'un résumé succinct des mesures prévues figurent à l'annexe A.

4.   Observations générales

4.1

Le Comité est d'avis que la propagation croissante de la fraude fiscale doit être combattue plus énergiquement et regrette que la Commission juge l'action des États membres et leur coopération tout à fait insuffisante, en dépit de l'existence d'un cadre juridique détaillé et bien structuré.

4.2

Les distorsions de l'économie et du marché intérieur dues à la fraude et à l'évasion fiscales constituent un problème sérieux qui a jusqu'ici été sous-estimé, tout comme l'a été le lien entre les capitaux soustraits au fisc, le blanchiment d'argent et la criminalité économique. En effet, des actes frauduleux dont l'objectif est de bénéficier indûment d'aides nationales ou communautaires sont souvent commis en falsifiant des documents fiscaux, et, vice versa, les capitaux provenant de la fraude fiscale, obtenus notamment dans le cadre d'opérations transfrontalières, sont souvent utilisés pour commettre d'autres actes illicites ou délictueux.

4.3

S'agissant de l'importance de la fraude fiscale qui, contrairement à l'évasion, se traduit par des pratiques qui ne sont pas illégales en soi mais qui ont pour seul objectif d'obtenir indûment une baisse du montant de la taxe, le Comité souligne que ce thème n'est pas traité de manière uniforme par toutes les législations nationales. Afin d'éviter la multiplication des coûts administratifs et sociaux induits par des législations qui ne sont pas toujours cohérentes, le Comité juge opportun de rapprocher les législations nationales en la matière, en introduisant une clause générale antifraude ou une liste commune des cas dans lesquels les administrations fiscales peuvent, à des fins fiscales, refuser les effets juridiques produits par des transactions jugées frauduleuses.

4.4

Le Comité considère que les propositions de la Commission restent trop timides pour affronter ce problème, d'autant que les traités l'habilitent à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir l'équilibre financier des Institutions européennes. La Commission dispose en effet d'importantes compétences de mise en œuvre qui lui ont été attribuées par le Conseil, conformément à la décision 1999/468/CE du Conseil du 28 juin 1999. À cet égard, le Comité rappelle que le principe de subsidiarité consacré par l'article 5 du traité sur l'UE, s'applique, principe qui prévoit l'intervention de la Communauté dans les matières qui ne relèvent pas exclusivement de sa compétence si les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être réalisés par les États membres ou peuvent mieux être réalisés au niveau communautaire. Le Comité invite la Commission à utiliser pleinement ces compétences.

4.5

Dans sa communication sur La politique fiscale de l'Union européennepriorités pour les prochaines années (COM(2001) 260 final) de juin 2001, la Commission avait déjà mis l'accent sur la nécessité d'adopter, outre les instruments législatifs, tous les outils disponibles pour atteindre les objectifs prioritaires. Dans l'avis qu'il avait élaboré sur cette communication, le Comité avait souligné que la politique fiscale était et reste subordonnée à l'adoption des décisions à l'unanimité (1).

4.6

À l'époque déjà, le Comité avait préconisé de modifier le régime transitoire et de passer rapidement au régime définitif basé sur le principe d'imposition dans le pays d'origine. Non sans une certaine emphase, il se demandait «combien d'années encore on devra supporter ce système transitoire défectueux avant que cet objectif puisse être atteint», et réclamait la simplification et la modernisation des règles, une application plus uniforme de celles-ci et une coopération administrative plus étroite. Il semblerait qu'aucun progrès n'ait été accompli dans ce domaine.

4.7

Le Comité appuie l'orientation générale consistant à renforcer la coopération en allant au-delà du système d'échanges d'informations en vigueur (VIES) et en développant des mesures d'échanges automatiques ou spontanés d'informations entre États membres.

4.8

Si le Comité se réjouit de l'ouverture du débat sur la modification du système de la TVA, il souligne toutefois qu'il est impératif de procéder à une étude d'impact approfondie, en gardant à l'esprit que les modifications éventuelles doivent aller dans le sens de l'efficacité et de la simplification, et non alourdir la charge fiscale pour les citoyens et les entreprises. À cet égard, le Comité (2) rappelle qu'il avait, dans un précédent avis, proposé d'examiner notamment l'opportunité d'un système alternatif à celui de la TVA, qui garantisse un rendement au moins égal au rendement actuel tout en étant moins onéreux pour la collectivité et plus efficace du point de vue du recouvrement.

5.   Observations spécifiques

5.1   La taxe sur la valeur ajoutée

L'actuel régime de TVA sur les échanges intracommunautaires repose sur le principe de l'imposition dans l'État de destination. Ce principe garantit l'égalité de traitement des produits nationaux et des produits importés d'autres États membres grâce à la non-imposition des opérations de vente et à l'imposition des achats effectués dans le pays de destination au taux prévu pour les opérations domestiques.

Ce système avait été introduit dans le cadre d'un régime transitoire et donc, à titre temporaire, dans la mesure où l'application du principe d'imposition dans le pays d'origine aurait exigé le respect du délai nécessaire pour adopter une structure adéquate permettant de redistribuer les recettes, où qu'elles soient perçues, entre les différents États membres, proportionnellement à leur consommation respective. Un système de ce type ne peut par conséquent être adopté sans une harmonisation des taux de TVA, si l'on veut éviter toute distorsion de la concurrence.

5.1.1   Les fraudes «carrousel» à la TVA

Bien qu'il offre de vastes possibilités en matière de libre-circulation des marchandises, le régime transitoire des échanges intracommunautaires expose les États membres à des pertes de recettes découlant d'évasions et fraudes fiscales importantes.

5.1.1.1

Parmi les différents types de fraudes à la TVA, la fraude dite «carrousel» a de sérieuses conséquences en termes de perte de recettes et est insidieuse parce que difficile à détecter. Elle implique un système dont le but est de se soustraire à la TVA, dans le cadre duquel des sociétés opérant au niveau international sont créées spécialement à cet effet. L'objectif consiste à ne pas s'acquitter de la TVA afin de permettre aux autres maillons de la chaîne frauduleuse de déduire des montants fictifs, afin d'obtenir un remboursement de la TVA ou de réduire le montant qui est dû. Pour atteindre cet objectif illicite, l'opérateur défaillant n'exerce en règle générale pas d'activité économique réelle, ne dispose pas de structures opérationnelles et son siège se limite souvent à une boîte postale. Après quelques mois «d'activités formelles», il disparaît sans remplir de déclaration fiscale et sans s'acquitter des sommes dues, de sorte que les administrations fiscales ont beaucoup de difficultés à l'identifier.

5.1.1.2

Le Comité considère que les «fraudes carrousel» ont pu se développer notamment en raison d'un manque de coopération entre les États membres et des taux de TVA différents. Aussi le Comité suggère-t-il que toutes les formes de coopération et d'échange d'informations nécessaires susceptibles de contrecarrer efficacement ce type de fraude soient mises en œuvre.

5.1.2   La coopération administrative dans le domaine de la TVA

5.1.2.1

Les fraudes à la TVA ont incité les administrations des finances des États membres à affiner constamment leurs techniques d'investigation pour combattre plus efficacement ce phénomène.

La coopération administrative joue un rôle décisif dans la lutte contre les fraudes à la TVA, dans la mesure où ces dernières sont commises par plusieurs opérateurs économiques implantés dans différents États membres.

L'utilisation d'instruments conventionnels adéquats a permis aux États membres de mettre en place un système d'échange d'informations qui s'est avéré utile pour déterminer la situation fiscale des contribuables et pour contrecarrer et réprimer les fraudes fiscales transnationales.

S'agissant de la coopération, le Comité avait signalé depuis longtemps que la Commission devait impérativement jouer un rôle plus actif. Aussi est-il favorable à la mise en place d'un système de suivi pour vérifier la qualité et le volume de l'assistance fournie.

5.1.2.2

En effet, à ce jour, l'échange d'informations est encore loin d'être une pratique courante en raison des différences culturelles, du niveau d'informatisation variable et de l'absence de règles visant à sanctionner l'inertie des États. Aussi est-il nécessaire de créer une culture communautaire dans ce domaine, en étant conscient du fait que les demandes d'information transfrontalières ne doivent pas être considérées comme une possibilité à n'utiliser qu'à titre exceptionnel, mais bien comme une étape ordinaire du processus d'investigation, chaque fois que le contrôle l'exige.

À cette fin, il convient d'éliminer les obstacles qui s'opposent à la diffusion d'une culture administrative communautaire en encourageant l'utilisation pleine et entière des instruments de coopération existants et en respectant les délais et modalités prévus afin de permettre aux organes d'investigation de disposer des informations requises dans des délais compatibles avec le déroulement des enquêtes.

5.1.2.3

Par ailleurs, comme le suggère la Commission concernant l'utilisation de systèmes informatiques standardisés pour l'échange d'informations, on pourrait envisager la mise en réseau des forces de police et des organes d'investigation des différents États membres engagés dans la lutte contre la fraude fiscale, en vue de l'échange direct d'informations par un système de messagerie électronique certifiée, et du partage des bases de données relatives aux informations sur les déclarations de revenu des différents États membres, à l'instar de ce qui se pratique déjà avec les données VIES de niveau I et II.

Cette initiative, qui requiert toutefois un accord préalable sur les données enregistrées dans ces fichiers et leur compatibilité avec les législations nationales en matière de protection de la vie privée, constituerait une avancée sensible vers l'amélioration de la lutte contre la fraude fiscale. En effet, les organes d'investigation disposeraient ainsi des informations nécessaires directement, en temps réel et sans charges administratives superflues.

5.1.2.4

En outre, bien que la législation qui régit les échanges d'informations entre les États membres soit bien structurée et satisfaisante, les principales entraves à la lutte contre la fraude au sein de l'UE sont l'absence d'uniformité des législations sur l'exercice des pouvoirs d'instruction des différentes administrations nationales et le degré de sévérité variable des mesures répressives.

Il s'ensuit que les fraudes sont principalement commises dans les États où les pouvoirs d'investigation des organes chargés des contrôles sont moins étendus ou dans les États où les sanctions applicables sont insuffisantes pour jouer un rôle dissuasif.

5.1.2.5

Aussi serait-il opportun d'harmoniser, au niveau de l'UE et dans le respect du principe de souveraineté des États membres, les sanctions prévues pour des fraudes d'une telle gravité, à l'instar de ce qui est par exemple prévu dans le cadre de la législation sur la lutte contre le blanchiment d'argent, et ce, afin d'éviter que des législations moins sévères ou des systèmes de contrôle moins efficaces ne créent de fait des «paradis pénaux» vers lesquels afflueraient les recettes des activités criminelles ou les «fraudes carrousel».

5.1.3   La valeur normale comme critère de détermination des montants imposables aux fins de la lutte contre la fraude

5.1.3.1

Comme la Cour de Justice l'a souligné à plusieurs reprises, la nécessaire lutte contre les pratiques frauduleuses doit satisfaire aux principes communautaires, y compris aux principes de non-discrimination et de proportionnalité. L'un des domaines dans lequel les législations sont le plus divergentes concerne les critères — autres que la contrepartie convenue entre les parties — utilisés pour déterminer le montant imposable, non seulement dans le cas de biens destinés à la consommation personnelle ou à des fins autres que commerciales, mais aussi dans tous les cas dans lesquels on estime qu'il y a un risque de fraude ou d'évasion fiscale.

À cet égard, on note que dans toutes les législations des États membres le critère utilisé pour déterminer le montant imposable prend en compte la volonté de négocier des parties et vise à garantir l'imposition de la contrepartie réelle dans la mesure où la base imposable est généralement la contrepartie contractuelle convenue pour la vente du bien ou la prestation du service. Outre ce critère de «base», on utilise également la «valeur normale du marché» afin de rectifier ou de rétablir l'assiette de calcul de l'impôt, sous certaines conditions.

5.1.3.2

La notion de valeur normale du marché aux fins de la TVA est pratiquement la même dans tous les États membres et correspond, dans une large mesure, à celle qui est définie dans la directive no 77/388/CEE du 17 mai 1977 (sixième directive), à savoir le prix moyen demandé pour des biens et des services de même type dans des conditions de libre-concurrence, au même stade de commercialisation, à l'endroit et au moment où la transaction est effectuée ou, à défaut, au moment et à l'endroit les plus proches.

5.1.3.3

Dans toutes les législations communautaires, le recours à la valeur normale est une méthode alternative pour déterminer la base d'imposition:

en l'absence totale ou partielle d'une contrepartie en argent, le recours à la valeur normale répond à la nécessité de définir un critère susceptible d'exprimer la base imposable en termes monétaires. On lui attribue également une fonction anti-fraude;

lorsque le législateur a jugé en première analyse qu'il existe un risque (3) de fraude fiscale.

5.1.3.4

En outre, il est également dérogé au principe de fixation de l'assiette d'imposition sur la base de la contrepartie dans les cas suivants:

les autorités normatives ou administratives ont prévu de fixer une base d'imposition minimale ou au moins égale à la valeur normale en ce qui concerne certains biens ou secteurs commerciaux, en particulier les ventes immobilières;

des dispositions prévoient que la base d'imposition est la valeur normale des biens ou des services lorsqu'un prix unitaire est payé pour des biens et des services différents;

bien qu'il y ait une contrepartie en argent, des dispositions prévoient que le montant imposable est la valeur normale, la valeur d'importation ou le prix d'achat, lorsqu'il existe un lien de dépendance entre les parties;

il y a cession ou constitution de droits réels ou de droits d'utilisation sur la propriété immobilière.

5.1.3.5

À ce propos, la Cour de Justice (4) a précisé que des mesures nationales de nature à éviter des fraudes ou évasions fiscales ne peuvent en principe déroger au respect de la base d'imposition de la TVA visée par l'article 11 de la sixième directive que dans les limites strictement nécessaires pour atteindre cet objectif.

5.1.3.6

En d'autres termes, la valeur normale est le point de référence pour la détection d'une fraude éventuelle. Si la base d'imposition constituée par la contrepartie convenue est inférieure à la valeur normale, elle n'est pas remplacée par cette dernière, mais l'administration fiscale peut présumer l'existence d'une fraude et inverser la charge de la preuve.

5.1.4   La responsabilité solidaire concernant le paiement de l'impôt

5.1.4.1

Afin de lutter contre la diffusion des «fraudes carrousel», certaines législations nationales ont été pourvues de dispositions consacrant la responsabilité solidaire du cessionnaire en ce qui concerne le paiement de la TVA lorsque le cédant a omis de s'en acquitter et que la vente a été réalisée à un prix inférieur à la valeur normale.

5.1.4.1.1

Ces dispositions se basent sur l'article 21 de la sixième directive, qui reconnaît aux États la faculté de prévoir qu'une autre personne que la personne redevable est solidairement tenue d'acquitter la taxe, dans le respect du principe de proportionnalité.

5.1.4.2

Ce choix repose sur le raisonnement selon lequel une opération convenue à un prix différent de la valeur du marché peut cacher une intention frauduleuse. En substance, dans les conditions prévues par la législation, l'on présume que l'acheteur est de mauvaise foi parce que, compte tenu du prix payé, il ne pouvait pas ne pas être conscient de la fraude (5). Il s'agit d'une présomption relative, dans la mesure où l'acheteur peut prouver, documents à l'appui, que le prix est inférieur à la valeur normale en raison de circonstances et de situations de fait objectivement démontrables ou compte tenu de la législation et qu'il n'a pas de lien avec le défaut de paiement de la taxe, ce qui affaiblit la responsabilité solidaire pour défaut de paiement de la taxe par le cédant.

5.1.4.3

Le Comité partage les préoccupations exprimées par de nombreux opérateurs concernant le principe de la responsabilité solidaire. À la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice (6), il estime que les mesures éventuelles doivent se limiter à exiger une garantie pour le paiement de la taxe aux seules personnes clairement identifiées comme étant des assujettis. On pourrait donc prévoir que l'acheteur soit solidairement tenu avec le fournisseur de payer la taxe lorsque le bien a été cédé à un prix inférieur à sa valeur normale. Étant donné qu'il s'agit d'une règle très stricte qui pénalise l'acquéreur en l'exposant au paiement d'une taxe à laquelle d'autres échappent parce qu'ils fraudent, il convient de lier son application à des conditions spécifiques:

la vente doit avoir lieu entre assujettis à la TVA, en excluant expressément les consommateurs finaux;

le vendeur a omis, en tout ou en partie, de s'acquitter de la TVA due;

le bien qui fait l'objet de la transaction doit appartenir à l'une des catégories expressément identifiées dans un décret ministériel pertinent;

la vente doit être conclue à un prix inférieur à la valeur normale du bien;

la différence entre le prix convenu et la valeur normale ne peut être justifiée par des événements ou des situations de fait objectivement démontrables.

5.1.5

Le Comité est favorable à la possibilité d'étendre l'utilisation du mécanisme d'autoliquidation aux opérations internes d'un État membre. Dans l'un de ses récents avis, le Comité a estimé que ce mécanisme «pourrait s'avérer nécessaire pour lutter contre la fraude fiscale. Cette solution est particulièrement indiquée dans les cas où le fournisseur éprouve des difficultés financières» (7). La Commission a élargi le champ d'application facultatif de l'autoliquidation à la suite d'une expérience positive dans le secteur des matériaux de construction et des prestations de services liées au bâtiment. Les mesures ne devront toutefois pas affecter les échanges intracommunautaires de biens et de services, lorsque des obligations différentes en matière de facturation sont susceptibles de compromettre le bon fonctionnement du marché intérieur.

5.2   La fiscalité directe

5.2.1

La fraude fiscale doit impérativement être combattue également sur le plan plus général de l'harmonisation des législations des États membres en matière de taxation directe et de contrôle.

5.2.1.1

À la suite de l'augmentation du nombre d'États membres de l'Union européenne, les différences entre régimes fiscaux influenceront de manière croissante les décisions relatives à l'octroi de fonds aux différents États et aux modalités de gestion des activités commerciales. En effet, en raison de la coordination importante des politiques économiques, les différentes législations fiscales nationales seront l'instrument qui permettra aux États membres d'influer sur les décisions relatives à la localisation des investissements et des ressources au sein de l'Union européenne. Toutefois, les divergences sensibles qui subsistent entre les différents régimes de taxation directe des États membres pourraient entraver dans certains cas le processus d'intégration des marchés (8) et avoir un impact négatif sur la compétitivité de l'économie européenne.

5.2.2

Le rapprochement des législations fiscales des États membres a été analysé par la Commission dans sa communication COM(2003) 726 du 24 novembre 2003. Toutefois, s'agissant de l'imposition des sociétés, et plus particulièrement des mesures globales destinées à favoriser la mise en place d'un impôt européen sur les sociétés sur une base d'imposition commune consolidée (9), d'importantes difficultés d'application se posent encore en raison des différences qui existent entre États membres concernant les critères de calcul de la base d'imposition. Par ailleurs, outre une forte convergence des politiques économiques, l'adoption d'une taxe commune exige aussi un cadre juridique adéquat. En l'état actuel des choses, l'article 94 du traité CE prévoit que le Conseil, statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission, arrête des directives pour le rapprochement des dispositions législatives et réglementaires des États membres qui ont une incidence directe sur l'établissement ou le fonctionnement du marché commun.

5.2.3

Le maintien de cette disposition et le fait que la fiscalité reste du ressort des États membres, qui ne semblent pas faciliter les initiatives visant à créer une base d'imposition consolidée commune pour les sociétés opérant dans l'Union européenne, sont un obstacle considérable au rapprochement des régimes fiscaux des sociétés, tant en raison de l'augmentation du nombre d'États membres, qui rend la prise de décisions à l'unanimité particulièrement difficile, qu'en raison de l'absence de disposition, dans le texte définitif de la Constitution européenne, sur l'adoption à la majorité qualifiée de lois ou de lois-cadres établissant des mesures dans le secteur de la taxation des sociétés.

5.2.4

Dans la perspective de l'abandon de la règle de l'unanimité, la communication SEC(2005) 1785 du 23 décembre 2005 de la Commission «Lutte contre les obstacles liés à la fiscalité des sociétés qui affectent les petites et moyennes entreprises dans le marché intérieurDescription d'un éventuel système pilote d'imposition selon les règles de l'État de résidence» contient une analyse de l'application expérimentale du système des règles de l'État de résidence pour les petites et moyennes entreprises (10). Il ressort de cette étude que les 23 millions de petites et moyennes entreprises que compte l'Union des vingt-cinq jouent un rôle prépondérant dans l'économie européenne, dans la mesure où elles représentent 99,8 % de toutes les entreprises européennes, et qu'elles garantissent environ 66 % de l'emploi dans le secteur privé (11). L'adoption de ce système permettrait d'internationaliser davantage l'activité de ces entreprises, en raison de la réduction des coûts de mise en conformité (12) qu'elles supportent et qui sont bien supérieurs à ceux des grosses entreprises (13), ainsi que d'élargir les possibilités de report des pertes qui est les principal obstacle au développement des activités économiques transfrontalières, en contribuant au rapprochement, au niveau communautaire, des législations en matière d'imposition des sociétés.

5.3   Le commerce électronique

5.3.1

Si le développement et l'évolution technologique du commerce électronique offre de nouvelles opportunités aux opérateurs économiques, les nouvelles méthodes commerciales exigent toutefois une adaptation des régimes fiscaux, plus particulièrement en ce qui concerne les aspects liés à la mise en œuvre des taxes à la consommation. En effet, les régimes fiscaux, principalement ancrés dans les règles du commerce traditionnel, doivent tenir compte de ces transformations et s'adapter aux nouvelles formes de commerce qui sont en train de se développer.

5.3.2

Le principal problème lié à l'imposition des transactions télématiques concerne les discriminations susceptibles de découler du traitement différent qui réservé à une opération en fonction des modalités de remise du bien qui fait l'objet de la transaction.

5.3.2.1

Lorsqu'on examine quelles sont les possibilités d'appliquer les principes traditionnels du droit fiscal aux situations spécifiques de l'ère numérique, il convient de s'assurer du respect du principe de neutralité de l'acte d'imposition, en vertu duquel aucune différence de traitement n'est admise pour des opérations analogues qui, en l'occurrence, ne diffèrent que par les modalités de remise (en ligne ou hors ligne).

5.3.3

Plus particulièrement, les principaux problèmes sont liés à la taxation, directe et indirecte, des biens immatériels (ou numérisés), dans la mesure où les phases de la transaction commerciale (vente et livraison) ont lieu par voie télématique (commerce en ligne), au moyen de la fourniture en réseau de produits virtuels. En effet, les services et les biens sont dématérialisés au départ par le prestataire, et matérialisés, à l'arrivée, par le destinataire. Il n'y a plus, en l'occurrence, de bien physiquement tangible susceptible de faire l'objet d'un contrôle matériel, notamment à des fins d'inspection.

5.4   Les compétences de l'OLAF

5.4.1

Le Comité estime que la législation communautaire actuelle, qui est la base juridique de référence pour la création de l'Office européen de lutte antifraude (OLAF), attribue déjà à cet organisme des fonctions importantes, comme il ressort de l'article 2 de la décision 1999/352/CE, CECA, Euratom, de la Commission. Aussi le Comité demande-t-il à la Commission de prendre toutes les mesures utiles pour traduire les compétences actuelles en actes concrets, si nécessaire en dotant l'Office des moyens supplémentaires requis pour s'acquitter de ses tâches institutionnelles, par exemple en utilisant le modèle prévu aux articles 81/86 qui réglementent l'Autorité de la concurrence.

5.4.2

Dans ce contexte, l'OLAF pourrait jouer le rôle d'organe d'analyse et de coordination au niveau de l'UE aux fins de la lutte contre la fraude, notamment fiscale, en se voyant attribuer des missions et des compétences dans le domaine de la coopération administrative en matière fiscale (taxation directe, indirecte et accises), afin de faciliter l'échange d'informations entre les organismes chargés, par les différentes législations nationales, de la lutte contre la fraude fiscale.

5.5

Le développement du commerce intracommunautaire invite à intensifier la coopération en matière d'échange d'informations sur la gestion des risques. Toutefois, la Commission ne propose pas d'initiatives concrètes, si ce n'est qu'elle demande aux États membres d'utiliser le «Guide de la gestion du risque pour les administrations fiscales». À ce propos, le Comité suggère de créer une banque de données centralisées vers laquelle convergeront les informations échangées entre administrations, qui ne sont actuellement uniformisées que dans le domaine des douanes et sur une base bilatérale.

5.5.1

Dans ce contexte, on pourrait dresser une liste des types de produits pour lesquels les conclusions des enquêtes effectuées par les organismes compétents des différents États membres indiquent qu'il y a un risque majeur de fraude carrousel. À titre d'exemple on peut citer les véhicules à moteur et les produits de haute technologie tels que le matériel informatique et de téléphonie. Cette mission d'analyse pourrait être confiée à l'OLAF, lequel pourrait transmettre régulièrement ses conclusions aux États membres afin d'orienter les activités de surveillance de la fraude et permettre des interventions opérationnelles ciblées. Il faudrait en outre prévoir et organiser des échanges d'informations de ce type entre les États membres et l'OLAF.

5.6

Le Comité considère que l'idée d'une approche communautaire des relations avec les pays tiers est sans aucun doute meilleure que la méthode des accords bilatéraux. À cette fin, des dispositions spécifiques pourraient être prévues dans le cadre des réflexions sur l'adoption d'un modèle de convention communautaire contre les doubles impositions, évoqué dans les communications de la Commission européenne SEC(2001) 1681 «La fiscalité des entreprises dans le marché intérieur» et COM(2003) 726 «Un marché intérieur sans obstacles liés à la fiscalité des entreprises: réalisations, initiatives en cours et défis restants», ainsi que dans la communication (SEC A5-0048) de 2003 du Parlement européen. Le Comité appuie la possibilité d'élaborer une convention de coopération spécifique, qui serait intégrée dans les accords de partenariat économique. Toutefois, il convient de souligner que, en l'absence de volonté claire et ferme des États membres, il est indispensable de poursuivre sur la voie des accords bilatéraux et de ne pas interrompre les procédures en cours.

5.7

Le Comité est d'avis que le renforcement des obligations déclaratives, proposé par la Commission, doit respecter rigoureusement les principes de proportionnalité et de simplification. La nécessaire lutte contre la fraude fiscale ne peut se traduire par l'imposition de charges supplémentaires injustifiées pour la grande majorité des contribuables honnêtes et des entreprises. À cette fin, il est opportun d'alléger sensiblement les obligations des entreprises qui n'ont rien à se reprocher et coopèrent activement avec l'administration fiscale, et d'augmenter les obligations des assujettis qui, sur la base de critères objectifs, sont considérés comme étant «à risques».

5.8

Le Comité ne partage pas l'opinion de la Commission concernant l'imposition du tabac et de l'alcool au même titre qu'une marchandise «normale». Certains États membres tentent de résoudre, par la gestion des accises sur le tabac et l'alcool, les problèmes de santé qui y sont liés et dont la priorité sur le fonctionnement du marché intérieur est évidente. La Commission propose d'éliminer ces distorsions, mais ce processus d'élimination prendra encore beaucoup de temps, compte tenu des niveaux très disparates de revenu dans les divers États membres et des différents objectifs et mesures de ces derniers en matière de politique fiscale et de santé. Dans l'attente d'un niveau raisonnable d'harmonisation des taux d'imposition, il y a lieu de trouver d'autres solutions afin de garantir que chaque État membre conserve son entière capacité à poursuivre ses propres objectifs de politique fiscale et de santé. Il convient en tout cas de prendre en compte le fait que la contrebande de tabac en provenance d'États membres est minime et est contrôlée par des multinationales du crime. Bien qu'il soit conscient du coût élevé que l'abus de ces substances fait peser sur la société et le système de santé, abus contre lesquels il souhaite que les autorités compétentes adoptent des mesures de contrôle adéquates, le Comité considère que les accises sur le tabac et l'alcool doivent rester strictement du ressort des États membres.

5.9

Le Comité invite la Commission à poursuivre le programme Hercule II et espère que le Parlement et le Conseil approuveront rapidement le document COM(2006) 0339 final, qui sollicite la prorogation du programme communautaire pour la promotion d'actions dans le domaine de la protection des intérêts financiers de la Communauté. Le programme a donné des résultats notables, 19 actions de formation ayant été organisées, auxquelles ont participé 2.236 personnes provenant des différents États membres, de 5 pays tiers et d'autres Institutions européennes. À cet égard, il convient plus particulièrement de prendre en compte la nécessité de renforcer la coopération dans la perspective de l'adhésion à l'Union européenne de la Bulgarie et de la Roumanie qui devront elles aussi bénéficier de ces actions.

5.10

Le Comité juge utile la création d'un forum permanent de discussion et/ou de concertation à un haut niveau, afin de permettre une approche plus globale des questions relatives à la fraude et à la coopération entre les États membres. La fragmentation actuelle des activités de consultation en une multiplicité de hauts comités, qui se subdivisent en fonction de leur domaine de compétences, ne permet pas un échange utile de pratiques afin de renforcer la coopération et d'améliorer le comportement des administrations en la matière. Le Comité estime que toutes les résistances opposées par la bureaucratie et les doutes exprimés au sein de l'Ecofin sont incompréhensibles et critiquables.

Bruxelles, le 15 mars 2007.

Le Président

du Comité économique et social européen

Dimitris DIMITRIADIS


(1)  Avis du CESE «Politique fiscale de l'Union européenne — Priorités pour les prochaines années» — JO C 48 du 21.2.2002, pp. 73-79.

(2)  Avis du CESE sur la «Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne le lieu des prestations de service» — JO C 117, du 30.4.2004, pp. 15-20.

(3)  Ce risque doit être réel et la fraude doit être prouvée pour que la légitimité communautaire soit respectée.

(4)  Arrêt no 324/82 et 131/91 concernant la commercialisation de voitures neuves ou d'occasion et, plus récemment, arrêt C-412/03 du 20 janvier 2005.

(5)  À cet égard, il convient de souligner que dans sa communication no 2004/260/CE du 16 avril 2004, la Commission européenne a exprimé un jugement positif sur les effets dissuasifs qui avaient été enregistrés dans certains États membres à la suite de l'introduction de la notion de responsabilité solidaire et avait fait référence à un mécanisme opérationnel qui exige la démonstration de l'existence d'un lien de complicité entre cédant et cessionnaire.

(6)  Arrêts C-354/03, C-355/03, C-484/03 et C-384/04.

(7)  JO C 65 du 17.3.2006, pp. 103-104.

(8)  Cf. L. Kovàcs, The future of Europe and the role of taxation and customs policy, sur www.europa.eu.int/comm/commission_bassoso/kovacs/speeches/speach_amcham.pdf.

(9)  Avis du CESE «Création d'une assiette consolidée commune pour l'impôt sur les sociétés dans l'UE» — JO C 88/48 du 11.4.2006.

(10)  Avis du CESE «Lutte contre les obstacles liés à fiscalité des sociétés qui affectent les petites et moyennes entreprises dans le marché intérieur» — JO C 195/58, du 18.8.2006.

(11)  Sources: Les PME en Europe en 2003, Observatoire des PME européennes, 2003/7, Publications DG Entreprises et Commission européenne (2003): L'impact de l'élargissement de l'Union sur les PME européennes, Observatoire des PME européennes 2006/6, Publications DG Entreprises, en collaboration avec Eurostat. S'agissant de l'importance économique des petites et moyennes entreprises dans l'Union européenne, voir Commission européenne, Communication SEC(2005) 1785, du 23 décembre 2005, pages 15-17.

(12)  La communication SEC(2005) 1785 identifie les coûts de mise en conformité dans les services de consultation juridique et fiscale, la traduction des documents, les frais de voyage et les risques financiers et liés à l'entreprise.

(13)  Sur la base d'une étude de l'Association européenne de l'artisanat et des petites et moyennes entreprises, publiée le 11 juin 2004 et mentionnée dans la communication SEC(2005) 1785, les coûts de mise en conformité assumés par les petites et moyennes entreprises sont jusqu'à cent fois supérieurs à ceux supportés par les grandes entreprises. S'agissant des méthodes de détermination des coûts de mise en conformité, voir le document de travail des services de la Commission SEC(2004) 1128 du 10 septembre 2004, European Tax Survey.