52005DC0014

Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, Comité économique et social européen et au Comité des régions - Projet de rapport conjoint sur la protection sociale et l’inclusion sociale {SEC(2005)69} /* COM/2005/0014 final */


Bruxelles, 27.01.2005

COM(2005)14 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL, AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

Projet de rapport conjoint sur la protection sociale et l’inclusion sociale {SEC(2005)69}

TABLE DES MATIÈRES

Introduction 3

1. Protection sociale et inclusion sociale : réagir au changement 3

2. Favoriser l’inclusion sociale 5

3. Retraites et vieillissement actif 9

4. Principaux messages 11

INTRODUCTION

La stratégie de Lisbonne a pour but de promouvoir un modèle de développement durable qui relève le niveau de vie de tous les citoyens européens en associant la croissance économique à la volonté de privilégier la cohésion sociale et de préserver l’environnement. Elle souligne ainsi la nécessité d’améliorer les mécanismes de coordination communautaires afin de favoriser la conduite, dans les domaines de l’économie, de l’emploi et des affaires sociales, de politiques cohérentes qui se renforcent mutuellement.

Si une croissance énergique de l’économie et de l’emploi est une condition sine qua non de la viabilité des systèmes de protection sociale, il est essentiel, pour stimuler cette croissance, de progresser dans le renforcement de la cohésion sociale et de disposer en même temps de systèmes d’éducation et de formation efficaces. Dans ce contexte, le présent rapport conjoint sur la protection sociale et l’inclusion sociale, premier du genre, préconise un effort de modernisation des systèmes de protection sociale par des stratégies de réforme résolues et crédibles.

L’inclusion sociale et les stratégies nationales de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale occupent une place importante dans le rapport, qui s’appuie sur deux cycles d’application de la méthode ouverte de coordination (MOC) à l’inclusion sociale à l’échelon de l’UE-15, ainsi que sur son extension aux dix nouveaux États membres en 2004, extension qui s’est déroulée avec succès. Les retraites sont également abordées, mais dans une moindre mesure. Le rapport se fonde principalement sur le rapport conjoint de 2003 consacré à l’adéquation et à la viabilité des retraites. D’autres éléments sont issus de travaux plus récents du comité de la protection sociale (CPS), ainsi que des résultats d’échanges bilatéraux qui ont eu lieu entre la Commission européenne et les nouveaux États membres avant l’adhésion de ces derniers.

Le rapport est destiné à compléter le rapport conjoint sur l’emploi et le rapport d’application des grandes orientations des politiques économiques (GOPE), de manière à dresser un tableau équilibré et intégré des principaux défis à relever par les États membres pour atteindre les ambitieux objectifs de Lisbonne. Il fait écho aux recommandations du rapport du groupe d’experts indépendants de haut niveau (groupe Kok) sur la nécessité d’une action concrète plus énergique et d’un engagement politique plus fort à tous les niveaux pour atteindre les objectifs de Lisbonne.

PROTECTION SOCIALE ET INCLUSION SOCIALE : R É AGIR AU CHANGEMENT

Un haut niveau de protection sociale donne à une société les moyens de faire face à l’adversité et d’éliminer et de prévenir les formes de pauvreté les plus graves et les plus inhumaines. Des systèmes de protection sociale bien conçus favorisent également le développement économique en créant un environnement propice à la croissance, un environnement où particuliers et entreprises consomment et investissent avec confiance ; de tels systèmes facilitent les changements structurels en atténuant les effets des restructurations sur les travailleurs ; enfin, ils stabilisent la demande globale au fil des cycles économiques et engendrent des conditions favorables à la relance.

Pour remplir leur rôle essentiel dans la société et l’économie européennes, les systèmes de protection sociale doivent être en mesure de réagir à l’évolution sociale en général. L’alliance complexe de facteurs démographiques, économiques et sociétaux qui a sous-tendu et continuera de sous-tendre les mutations structurelles à l’échelle de l’Union pousse les États à adapter et à moderniser leurs systèmes de protection sociale.

Sur le plan démographique, les mutations profondes de la pyramide des âges auront des incidences significatives sur l’ensemble des politiques sociales. Le recul enregistré dans la tranche d’âge de 0 à 14 ans souligne l’importance de la création d’un environnement favorable à l’enfant, et notamment d’une aide permettant d’assurer au plus tôt son développement et son éducation élémentaire. La baisse des chiffres dans la tranche d’âge des 15 à 29 ans rend d’autant plus nécessaire une optimisation du passage de l’école au travail. La croissance rapide de la tranche d’âge de 50 à 64 ans donne beaucoup plus d’importance au vieillissement actif. L’accroissement de la population des 65 ans et rend plus urgente encore la viabilité de retraites adéquates. Enfin, l’expansion de la tranche d’âge des plus de 80 ans entraînera une augmentation progressive des besoins de soins de santé et de soins de longue durée liés à l’âge.

Une immigration nette plus importante pourrait aider à remédier au déséquilibre résultant de ces changements démographiques en compensant les pénuries de main-d’œuvre et, dans le contexte des réformes des retraites, en améliorant la viabilité financière des régimes de retraite. Mais, pour récolter ces avantages potentiels, les sociétés devront impérativement créer les conditions nécessaires à l’insertion des immigrants sur le marché du travail formel, apprendre à gérer les tensions interculturelles et être capables d’éliminer les obstacles à l’intégration économique et sociale des immigrants[1].

Aux mutations démographiques s’ajoute une évolution plus générale des valeurs culturelles, des relations sociales, de l’organisation familiale et de la nature du travail.

Des exigences plus élaborées et diversifiées se sont fait jour dans le domaine social : les citoyens se soucient de plus en plus de qualité de la vie et d’équilibre entre le travail et les loisirs. Le choix individuel a pris de l’importance. La diversité revêt une dimension ethnique significative, surtout dans les grands centres urbains. La féminisation croissante de la main-d’œuvre se traduit par de nouvelles exigences sociales (liées, par exemple, aux installations d’accueil des enfants, des personnes âgées et des personnes à charge) et modifie la base sur laquelle repose la répartition traditionnelle des responsabilités au sein des ménages. Les structures familiales ont subi des changements notables – réduction de la taille et accroissement de la diversité – dictés par des formations de partenariat proportionnellement moins nombreuses et des dissolutions plus fréquentes. En conséquence, le nombre de ceux qui doivent faire appel à d’autres formes d’aide va en augmentant. Enfin, le milieu de travail est devenu bien plus instable et hétérogène. De plus en plus, des qualifications de haut niveau sont exigées alors même que se créent de nombreux emplois à faible productivité.

Dans ce contexte changeant, les systèmes de protection sociale doivent être conçus de manière à répondre aux besoins économiques et sociaux de l’avenir. Ainsi, les politiques d’inclusion sociale ne sont pas seulement utiles à la prévention et à l’éradication de la pauvreté : elles peuvent aussi contribuer à l’accroissement de la main-d’œuvre par le développement de l’aptitude au travail et l’application judicieuse du principe de la «rentabilisation du travail». Les réformes destinées à assurer des retraites viables et adéquates devraient viser la mise en place de mesures susceptibles, tout à la fois, d’inciter les travailleurs à rester en activité plus longtemps et d’encourager les employeurs à recruter et retenir les travailleurs âgés. Des systèmes de soins de santé caractérisés par leur facilité d’accès, leur qualité et leur viabilité jouent un rôle essentiel, non seulement dans la lutte contre la maladie et la vulnérabilité face à l’exclusion sociale, mais dans le maintien d’une main-d’œuvre productive.

Favoriser l ’INCLUSION SOCIALE

La situation de l ’inclusion sociale dans les 25 États membres

La lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale reste un défi majeur pour l’Union européenne et ses États membres. En la matière, les chiffres pour l’ensemble de l’Union sont très élevés : plus de 68 millions de personnes, soit 15% de la population communautaire, étaient menacées de pauvreté en 2002. La fourchette allait de 10% ou moins dans la République tchèque, en Suède, au Danemark, en Hongrie et en Slovénie à 20% ou plus en Irlande, dans la République slovaque, en Grèce et au Portugal.

En règle générale, le risque de pauvreté est nettement plus grand pour les chômeurs, les familles monoparentales (où l’adulte responsable est le plus souvent une femme), les personnes âgées isolées (principalement des femmes, ici aussi), ainsi que les familles ayant plusieurs personnes à charge. La pauvreté a tendance à toucher surtout les enfants : ceux qui grandissent dans la pauvreté sont plus exposés aux problèmes de santé, parviennent à un moins bon niveau d’éducation et risquent davantage de ne pas trouver d’emploi plus tard ou d’adopter un comportement antisocial. Par ailleurs, l’existence d’un lien entre la pollution de l’environnement et la privation sociale a été démontrée.

La mesure du risque de pauvreté ne révèle qu’une partie de la situation ; des données récentes illustrent l’ampleur de la privation matérielle, surtout dans les pays où le seuil de pauvreté national est particulièrement bas.

Un facteur aggravant s’ajoute souvent à la pauvreté et à la privation matérielle : l’incapacité de participer pleinement à la vie sociale, conséquence de difficultés d’accès à l’emploi, à l’éducation et à la formation, au logement, aux moyens de transport ou aux soins de santé.

L’emploi est un facteur clé de l’inclusion sociale : non seulement il engendre des revenus, mais il peut favoriser la participation à la société et l’épanouissement personnel et il contribue, par l’acquisition de droits à pension, au maintien d’un niveau de vie adéquat à l’arrivée de la vieillesse. Le passage de la situation de chômeur à celle de travailleur réduit considérablement la probabilité d’être exposé à la pauvreté ; de plus, le bien-être des sans-emploi ou des inactifs en âge de travailler est encore plus menacé si les ménages concernés ne perçoivent aucun revenu d’origine professionnelle.

Les statistiques disponibles à l’échelon de l’Union dans le domaine de la pauvreté et de l’exclusion sociale ne portent toujours pas sur certains des groupes les plus exposés. Les plans d’action nationaux pour l’inclusion (PAN « inclusion ») mettent en lumière les risques très particuliers auxquels sont confrontés les immigrants, les minorités ethniques et les Roms, les handicapés, les sans-abri, les victimes de la traite des êtres humains, les personnes qui résident dans une institution de soins ou qui en sortent, ainsi que les fermiers pratiquant une agriculture de subsistance. Autre grand aspect : la concentration des handicaps dans des communautés ou régions géographiques spécifiques, tant urbaines que rurales, dont la population est aux prises avec des facteurs d’exclusion profondément enracinés qui tendent à se transmettre d’une génération à l’autre.

Les années qui ont immédiatement précédé la mise en place de la nouvelle stratégie ont été marquées par une tendance à la baisse de la pauvreté relative, qui a reculé en moyenne, dans l’UE-15, de 18 % à 15 % entre 1995 et 2000. Cette évolution peut s’expliquer dans une large mesure par une amélioration sensible de la situation sur le marché du travail. Un risque se profile à présent de manière évidente : le récent ralentissement économique, qui se conjugue à une montée du chômage et à une raréfaction des possibilités d’emplois, expose davantage de personnes à la pauvreté et à l’exclusion sociale et aggrave la situation de celles qui en sont déjà victimes.

Le problème est plus grave encore dans bon nombre de nouveaux États membres, où la croissance économique rapide s’appuie sur des restructurations industrielles et agricoles de grande ampleur qui, faute d’être assorties de mesures appropriées dans le domaine de l’inclusion sociale, pourraient menacer de pauvreté une population plus vaste.

Priorités essentielles de l’action publique

Le processus d’inclusion sociale a eu pour résultat positif, entre autres, de clarifier les priorités essentielles de l’action publique contre la pauvreté et l’exclusion sociale, telles qu’elles ressortent des démarches adoptées par les États membres. Sept priorités essentielles se dégagent à l’échelle de l’Union :

accroître la participation au marché du travail : les mesures prises pour donner suite à cette priorité, considérée comme la plus importante par la plupart des États membres, consistent à étendre les politiques actives du marché du travail et à mieux relier entre elles la protection sociale, l’éducation et la formation tout au long de la vie et les réformes du marché du travail, de manière qu’elles s’épaulent mutuellement ;

moderniser les systèmes de protection sociale : il s’agit de mettre en place des régimes de protection sociale viables, adéquats et accessibles à tous et de faire en sorte que les prestations destinées aux personnes capables de travailler les incitent effectivement à le faire et leur apportent une sécurité suffisante pour s’adapter au changement ;

remédier aux désavantages dans l’éducation et la formation : les mesures prises visent principalement à prévenir la sortie précoce du système traditionnel d’éducation et de formation, à faciliter le passage de l’école au travail, en particulier pour les jeunes quittant l’école avec des qualifications limitées, à améliorer l’accès à l’éducation et à la formation pour les groupes défavorisés et à intégrer ceux-ci dans le système traditionnel, à favoriser l’éducation et la formation tout au long de la vie, y compris l’apprentissage en ligne, au bénéfice de tous. La nécessité d’investir davantage, et plus efficacement, dans le capital humain à tous les âges est largement reconnue ;

éliminer la pauvreté des enfants : cette démarche est jugée essentielle dans la lutte contre la transmission intergénérationnelle de la pauvreté. Les mesures prises s’attachent surtout à intervenir rapidement en faveur des enfants défavorisés et à leur donner très tôt une éducation, ainsi qu’à accroître l’aide au revenu et l’assistance fournie aux familles, y compris les familles monoparentales. En outre, plusieurs pays mettent de plus en plus l’accent sur la promotion des droits de l’enfant comme action à part entière ;

assurer un logement décent : certains États membres portent leur attention sur l’amélioration de la qualité du logement, d’autres sur la nécessité de remédier au manque de logements sociaux pour les groupes vulnérables. Plusieurs États membres élaborent actuellement des démarches plus intégrées pour remédier à la situation des sans-abri ;

améliorer l’accès à des services de qualité : il s’agit ici d’offrir un meilleur accès aux services de santé, aux soins de longue durée, aux services sociaux et aux transports, d’améliorer l’environnement local et d’investir dans des infrastructures adéquates. L’exploitation du potentiel de nouvelles technologies de l’information et de la communication accessibles à tous et la prévention de l’exclusion numérique constituent également une question clé ;

éliminer la discrimination et renforcer l’insertion des minorités ethniques et des immigrants : la lutte contre l’exclusion importante à laquelle se heurtent certains groupes, en particulier les Roms, consiste à la fois à donner à ceux-ci un meilleur accès aux possibilités et services traditionnels, à faire appliquer la législation en matière de lutte contre la discrimination et à mettre au point des méthodes ciblées pour faire face à des situations particulières.

Pour mettre en pratique ces priorités, les États membres doivent élaborer des stratégies intégrées et coordonnées sur le double plan local et régional, et surtout dans les communautés urbaines et rurales aux prises avec des handicaps multiples. De telles stratégies doivent adapter les politiques à la situation locale et faire intervenir tous les acteurs concernés. Il faudra également veiller à ce que la dimension de genre soit intégrée dans toutes ces priorités, pour favoriser l’égalité entre les hommes et les femmes.

Renforcement du processus d’inclusion sociale

L’élaboration et l’application de PAN « Inclusion » par tous les États membres attestent clairement une volonté d’intensifier la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Notamment, la forte détermination politique manifestée par les dix nouveaux États membres a insufflé une dynamique nouvelle au processus et, de manière plus générale, elle souligne la pertinence de la MOC.

Les méthodes adoptées par les États membres varient beaucoup entre elles : elles sont fonction des situations de départ, des régimes de prévoyance sociale et de l’expérience des pouvoirs publics dans la mise au point de stratégies de lutte contre la pauvreté. Pour faire pièce, précisément, à la pauvreté et à l’exclusion, la plupart des États membres ont conçu une méthode globale qui couvre les domaines les plus variés. Les dispositions institutionnelles destinées à la prise en compte systématique de l’inclusion sociale dans les mécanismes décisionnels nationaux sont en voie de consolidation. Les pouvoirs publics s’emploient plus activement à coordonner les interventions des ministères et autres services gouvernementaux, de manière à obtenir des réponses mieux intégrées. Enfin, les parties prenantes de premier plan (partenaires sociaux, organisations non gouvernementales et entreprises) sont plus vivement encouragées à participer au processus.

Dans l’ensemble, la MOC appliquée à l’inclusion sociale a jusqu’ici porté ses fruits, et elle offre une bonne assise pour la suite des opérations. Le programme communautaire d’action contre l’exclusion sociale a, en l’occurrence, apporté une contribution non négligeable en encourageant les travaux de recherche, les évaluations par les pairs, les projets d’échanges transnationaux et la mise en réseau à l’échelon de l’Union. Il est clair, cependant, que beaucoup reste à faire sur le double plan national et communautaire pour atteindre l’objectif global du processus d’inclusion sociale, à savoir : effectuer une avancée décisive sur la voie de l’éradication de la pauvreté d’ici à 2010. Pour y parvenir, les États membres devraient :

- associer plus étroitement politiques économiques et politiques pour l’emploi : les liens qui unissent les unes et les autres doivent être resserrés grâce, essentiellement, à une transparence accrue autour des ressources budgétaires nécessaires à la réalisation des objectifs et des buts fixés dans les PAN « Inclusion », d’une part, et de l’utilisation des fonds structurels au bénéfice de l’inclusion sociale, d’autre part ;

- renforcer les moyens d’application : renforcement des capacités administratives et institutionnelles (y compris la protection sociale, les services sociaux et les instruments de mesure de l’intégration de la dimension de genre), meilleure coordination entre les services et échelons gouvernementaux (au niveau national, régional, local) et amélioration des mécanismes d’association des parties prenantes ;

- insister sur les questions clés et définir des objectifs plus ambitieux : il conviendrait que les États membres dressent la liste des questions revêtant pour eux une importance cruciale et qu’ils fixent pour chacune d’elles des objectifs quantifiés, ce qui profiterait beaucoup au processus d’inclusion sociale ; en effet, les progrès accomplis au titre de chacun de ces objectifs pourraient être supervisés et commentés. Les États membres qui accuseraient un certain retard dans tel ou tel autre secteur pourraient prendre comme point de repère les résultats des États membres les plus avancés ;

- consolider les activités de supervision et d’évaluation des politiques : l’un des facteurs essentiels à l’obtention de meilleurs résultats sera la mise en place de dispositions plus efficaces pour la supervision et l’évaluation des politiques et de leurs incidences, pour l’association de toutes les parties prenantes – dont les partenaires sociaux – et pour la préparation de données plus pertinentes et plus rapidement disponibles.

À l’échelon communautaire, la Commission et le Conseil devraient :

- renforcer la prise en considération des objectifs liés à l’inclusion sociale dans toutes les politiques communautaires : il est essentiel de tenir compte de l’inclusion sociale dans la conception et dans l’application des politiques de l’Union, de manière à s’assurer que celles-ci épaulent les efforts des États membres pour la promouvoir. Il conviendra à ce propos d’étendre la MOC aux soins de santé et aux soins de longue durée pour instaurer des systèmes se distinguant par leur facilité d’accès, leur qualité et leur viabilité ;

- utiliser plus largement le potentiel de MOC pour favoriser l’obtention de résultats effectifs : les échanges de bonnes pratiques doivent être complétés par un tri sans ambiguïté entre bonnes et mauvaises méthodes, de sorte que les États membres puissent s’inspirer des premières dans la conception de leurs politiques. Les indicateurs communs devraient jouer ici un rôle majeur ;

- veiller à ce que les fonds structurels demeurent un facteur de première grandeur dans la promotion de l’inclusion sociale : la contribution potentielle des fonds structurels – et, plus spécialement, du FSE – dans la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale doit être renforcée et exploitée pleinement. Il faudra réfléchir à cette dimension de la question lors du débat sur les perspectives financières pour la période 2007-2013 ;

- développer les indicateurs communs et améliorer les sources de données : en dépit des améliorations apportées aux indicateurs et à la capacité statistique sous-jacente (amélioration essentiellement due au lancement du projet SRCV-UE [Statistiques de l’Union européenne sur le revenu et les conditions de vie]), des lacunes persistent quant à la disponibilité et à l’opportunité des données, lacunes qui entravent toute analyse comparative. Il faut notamment mieux refléter la nature multidimensionnelle de l’exclusion sociale et de la pauvreté.

RETRAITES ET VIEILLISSEMENT ACTIF

Régimes de retraite : le problème de la viabilité et de l’adéquation

Les États membres, qui ont depuis longtemps conscience des conséquences du vieillissement des populations pour les régimes de retraite par répartition, perçoivent maintenant les menaces qui pèsent sur les régimes par capitalisation. La situation exige des réformes crédibles propres à garantir dans l’avenir des revenus adéquats d’une manière qui soit financièrement durable. Dans le contexte de la stratégie de Lisbonne, la MOC a été appliquée aux pensions afin de promouvoir de telles réformes, axées sur trois grands volets des objectifs communs : adéquation, durabilité financière et modernisation, pour prendre en compte les changements intervenant dans la société.

Le premier rapport conjoint sur des retraites adéquates et viables montrait que la plupart des États membres de l’UE-15 avait déjà accompli des progrès significatifs dans le ralentissement de la croissance des dépenses publiques consacrées aux retraites. Depuis la parution de ce document, plusieurs États membres ont adopté d’autres réformes. À l’occasion de la prochaine remise des rapports sur les stratégies nationales, les progrès enregistrés – y compris dans les dix nouveaux États membres – feront l’objet d’une nouvelle évaluation.

Le rapport conjoint mettait l’accent sur la nature indissociable de la viabilité et de l’adéquation. Les futurs régimes de retraite ne pourront (continuer à) assurer des retraites adéquates que s’ils sont financièrement viables et bien adaptés aux mutations sociétales ; inversement, si les régimes de retraite ne peuvent garantir des revenus adéquats aux bénéficiaires, il faudra s’attendre à des dépenses supplémentaires découlant, entre autres, d’une aide sociale accrue. L’un des grands problèmes consistera donc à parvenir à la viabilité financière sans remettre en cause l’adéquation.

Le rapport conjoint faisait également observer que de nombreuses réformes destinées à ralentir la progression des dépenses à venir s’accompagneraient de mesures de prévention de la pauvreté fondées sur une consolidation du revenu minimal garanti pour les personnes âgées. Certaines réformes se traduiront par une baisse sensible des taux de remplacement des régimes légaux de retraite, ce qui peut engendrer de graves problèmes d’adéquation si les États membres ne réagissent pas en encourageant les travailleurs à différer la date de leur départ à la retraite et en facilitant l’adhésion à des régimes de retraite complémentaire.

Deux grandes solutions : l’allongement de la vie active et la multiplication des régimes privés

La modernisation des systèmes de prévoyance sociale peut contribuer à promouvoir une retraite plus tardive. Seules les personnes véritablement incapables de gagner leur vie ou favorables à une diminution actuarielle de leur pension doivent pouvoir bénéficier de son versement anticipé, c’est-à-dire avant l’âge habituel de départ à la retraite ou l’échéance d’une carrière professionnelle normale. En même temps, les régimes de retraite doivent offrir aux intéressés la possibilité de cumuler des droits supplémentaires en travaillant plus longtemps. Un relèvement de l’âge effectif de départ à la retraite est donc l’instrument essentiel de la réconciliation entre adéquation et viabilité financière.

Une étude du comité de la protection sociale a montré que les principales solutions permettant une sortie précoce du marché du travail – en particulier la retraite anticipée, les allocations de chômage et les allocations d’invalidité – font l’objet d’un examen critique dans la plupart des États membres. Parallèlement, les retraités voient se multiplier les occasions d’augmenter leurs revenus : hausse du montant de la pension de vieillesse ou combinaison des revenus du travail et de la retraite (retraite progressive ou travail à temps partiel après la retraite). Toutefois, dans de nombreux États membres, la marge de manœuvre sur le terrain de la réforme reste considérable.

Le comité de la protection sociale examine aussi le rôle des fonds de pension gérés par le secteur privé. La majorité des États membres pensent que ces fonds – professionnels ou particuliers – occuperont une place plus importante dans l’avenir, même si, dans la plupart des pays, les régimes publics sont appelés à conserver leur statut de première source de revenus pour les retraités. Les régimes privés peuvent aussi accroître la complexité des systèmes de retraite sur le plan général et individuel. Il faudra donc mettre en place des mécanismes étendus d’information et de supervision et clarifier les relations entre régimes privés et finances publiques (à travers, essentiellement, le traitement fiscal des premiers), de même que les interactions entre prestations des régimes privés et revenus garantis des régimes publics. Par ailleurs, il est indispensable de permettre aux personnes intéressées d’opérer en toute connaissance de cause des choix difficiles qui auront des conséquences durables pour leurs revenus et leur niveau de vie.

Modernisation des régimes de retraite

La garantie de retraites adéquates et équitables pour tous est tributaire d’une bonne adaptation des régimes de retraite à l’évolution des besoins des particuliers. Ces régimes doivent tenir compte de la diversité grandissante de l’emploi et de l’aspiration à une égalité absolue des hommes et des femmes. Qui plus est, il convient de prendre en considération les nécessités inhérentes à la gouvernance, dont celle d’asseoir les réformes sur des informations fiables et un consensus sans faille.

Il convient aussi de reconnaître l’importance cruciale de la modernisation des régimes de retraite et, plus généralement, des systèmes de sécurité sociale dans la poursuite des objectifs de la stratégie de Lisbonne. Pour relever le défi du vieillissement, il faut revoir les cycles de vie traditionnels et estomper les distinctions entre phases d’apprentissage, de travail et de prise en charge. Les régimes de sécurité sociale doivent absorber ces changements et autoriser, voire encourager les citoyens à tirer le meilleur parti des occasions que leur offrent une économie et un marché du travail dynamiques.

PRINCIPAUX MESSAGES

- Il est essentiel pour la croissance, l’emploi et la cohésion sociale que la sécurité sociale soit améliorée, et sa modernisation doit rester sous-tendue par l’allongement de la vie professionnelle et la hausse des taux d’emploi. Inversement, elle facilitera la gestion des risques nouveaux en répondant à l’évolution des besoins des particuliers tout au long de la vie.

- À l’échelon communautaire, l’extension aux soins de santé et la rationalisation de tous les processus de protection et d’inclusion sociale, prévues pour 2006, doivent être l’occasion de mettre l’accent sur la concrétisation et les synergies dans l’ensemble du secteur concerné. Il y a lieu, ce faisant, de respecter la spécificité de chaque volet (inclusion, retraites, santé et soins de longue durée) dans le contexte de la MOC appliquée à la protection sociale.

- Dans le domaine de l’inclusion sociale, les résultats provisoires donnent à penser que la persévérance et l’ambition sont de mise : persévérance, dès lors que l’éradication de la pauvreté et de l’exclusion requerra une action concertée au-delà de 2010 ; ambition, parce que le principe de la démarche engagée collectivement par toutes les parties prenantes à l’échelle communautaire est désormais fermement établi.

- Certes, les politiques d’inclusion sociale doivent s’adapter à la diversité des problèmes qui se posent dans les États membres, mais l’adoption de méthodes multidimensionnelles n’en demeure pas moins une priorité. Les travaux menés jusqu’ici confirment la pertinence de plusieurs priorités majeures. Répondre à ces priorités contribuera à traiter quelques-unes des questions les plus urgentes, dont la prévention de la pauvreté chez les enfants, le soutien à la capacité de prise en charge des familles, l’élimination des inégalités entre les sexes, le traitement du phénomène des sans-logis et l’ouverture de nouvelles voies menant à l’intégration des minorités ethniques et des immigrés.

- Le processus d’évaluation qui doit être mené en 2005 devrait être axé avant tout sur les résultats, dans la perspective de la préparation d’un nouveau cycle de la MOC après 2006. Les États membres et la Commission devraient plus spécialement s’intéresser aux moyens d’accroître l’efficacité des stratégies nationales par la fixation d’objectifs, de jalons et d’indicateurs, une association plus marquée des politiques économiques et des politiques pour l’emploi, l’élaboration de dispositions pour un contrôle et une évaluation effectifs et, enfin, la mise en œuvre des fonds structurels, dont le FSE. Il faudrait également voir dans quelle mesure les stratégies nationales ont permis d’associer aux actions engagées autorités locales et régionales, partenaires sociaux et autres parties prenantes et de contribuer à sensibiliser les intéressés à la grave question de la pauvreté et de l’exclusion sociale.

- Remettre les gens au travail, maintenir les travailleurs sur le marché de l’emploi et accroître la participation à ce marché et les facultés d’emploi sont trois éléments clés pour la réalisation des objectifs de la stratégie de Lisbonne relatifs à la compétitivité, à l’emploi et à l’inclusion sociale. L’application de cette stratégie continue à se heurter, à l’intérieur d’une Union élargie, à d’immenses obstacles, si l’on en juge par la situation des personnes qui ont le moins de chances d’accéder au marché du travail. En fonction des enseignements tirés de la stratégie européenne pour l’emploi et de la MOC appliquée à l’inclusion, la Commission devrait, en 2005, consulter les partenaires sociaux, les États membres et toutes les parties prenantes sur l’opportunité et les modalités de nouvelles actions communautaires en la matière.

- Pour ce qui est des retraites, le maintien en activité des travailleurs les plus âgés reste un problème de taille à l’échelle de l’Union tout entière. Il conviendrait de lui accorder la priorité dans les réformes visant à garantir l’adéquation et la viabilité financière des régimes de retraite. L’augmentation de la longévité exigera un nouveau report de l’âge de sortie du marché du travail, ce qui suppose le démantèlement progressif des mesures d’incitation au départ à la retraite anticipé. Les États membres devraient analyser le rôle des régimes de sécurité sociale dans la promotion d’un allongement de la vie active.

[1] Le 11 janvier 2005, la Commission a adopté un livre vert sur une approche de l’Union en matière de gestion des migrations économiques (COM(2004) 881), qui traite en particulier des procédures nécessaires à l’admission légale des migrants économiques et à la délivrance des permis de travail et de résidence.