52004DC0312

Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen - Compensation et règlement-livraison dans l'Union européenne - Un plan pour avancer /* COM/2004/0312 final */


COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL ET AU PARLEMENT EUROPÉEN - Compensation et règlement-livraison dans l'Union européenne - Un plan pour avancer

TABLE DES MATIÈRES

Introduction

Situation actuelle

1. Les systèmes de compensation et de règlement-livraison

2. Les obstacles mis en évidence par les rapports Giovannini

3. L'absence de cadre réglementaire et prudentiel commun

4. L'inégalité des conditions de concurrence

Les objectifs de la Commission

Les initiatives concrètes de la Commission

1. La création du «groupe consultatif et de suivi sur la compensation et le règlement-livraison»

2. Une directive-cadre pour une compensation et un règlement-livraison efficaces et sûrs au niveau paneuropéen

2.1 La liberté de choix et d'accès

2.2 Un cadre réglementaire et prudentiel commun

2.3 Gouvernance

3. Remédier aux différences existant sur le plan juridique et fiscal

3.1 Sécurité juridique

3.2 Questions fiscales

4. Politique de concurrence

Conclusions

INTRODUCTION

La création d'un marché européen des capitaux intégré et efficace représente l'un des projets économiques les plus importants et ambitieux actuellement mené dans l'Union européenne. Depuis le lancement du plan d'action pour les services financiers (PASF) en 1999, des progrès considérables ont été accomplis en ce sens, tant en termes de mesures législatives que d'intégration du marché.

La sécurité et l'efficacité des dispositifs nécessaires à la finalisation des opérations sur titres («compensation et règlement-livraison») sont un élément crucial de ce cadre législatif. Largement invisibles aux yeux des petits investisseurs, ces dispositifs sont au coeur de tous les marchés de valeurs mobilières et indispensables à leur bon fonctionnement.

Si les concepts qui les sous-tendent sont plutôt simples, eux-mêmes se révèlent très difficiles à mettre en place et à faire fonctionner, notamment dans un contexte transfrontalier. Dans l'Union européenne, les activités de compensation et de règlement-livraison exercées à un niveau strictement national sont relativement rentables et sûres. En revanche, les dispositifs transfrontaliers sont complexes et fragmentés, ce qui est source de surcoûts importants, de risques et d'inefficacité. Or, en l'absence de compensation et de règlement-livraison efficaces, la capacité et le désir des investisseurs de conclure des transactions sur valeurs mobilières européennes ne peuvent être optimaux; la liquidité des marchés financiers en pâtit, et le coût du capital est plus élevé que nécessaire.

Dans ce contexte, les forces du marché tirent la demande d'une efficacité fortement accrue au niveau paneuropéen. L'introduction de l'euro et l'amélioration des technologies de l'information ont contribué à l'augmentation du nombre et de l'importance relative des transactions transfrontalières. En conséquence, les pressions qui s'exercent sur les dispositifs de compensation et de règlement-livraison transfrontaliers et les attentes formulées à leur égard se sont considérablement renforcées. Les prestataires de services de compensation et de règlement-livraison s'efforcent donc d'améliorer leur performance, de réduire les coûts et de développer une présence paneuropéenne, seuls ou au moyen de fusions et d'alliances, ce qui commence à générer une importante activité de restructuration. Parallèlement, les autorités de réglementation et de surveillance prennent des mesures visant à renforcer la clarté et l'homogénéité des normes applicables aux systèmes de compensation et de règlement-livraison, à actualiser leurs méthodes prudentielles de façon à pouvoir relever les défis posés par l'évolution des marchés et à renforcer la sécurité.

Dans la présente communication, la Commission expose les actions qu'elle entend mettre en oeuvre en vue d'améliorer les dispositifs de compensation et de règlement-livraison. Son approche est fondée sur les considérations suivantes:

-l'objectif poursuivi est la réalisation d'un marché intégré, efficace et sûr pour la compensation et le règlement-livraison des titres;

-l'intégration des systèmes de compensation et de règlement-livraison nécessite l'intervention combinée des forces du marché et des autorités publiques. Dans ce contexte, et afin d'atteindre le résultat souhaité dans les meilleurs délais, la Commission s'efforcera de promouvoir la coordination des actions respectivement menées par les organismes de droit privé, les autorités de réglementation et les législateurs;

-dans un environnement intégré, libre de tout obstacle, les fournisseurs d'infrastructure et les utilisateurs des services concernés devraient avoir accès au système de compensation et de règlement-livraison de leur choix, dûment agréé et surveillé et respectant pleinement les règles européennes de concurrence. Pour parvenir à une telle libéralisation et garantir la reconnaissance mutuelle des systèmes, une intervention réglementaire au niveau communautaire, sous forme d'adoption d'une directive-cadre, apparaît nécessaire;

-dans l'exercice de ses compétences, la Commission respectera les principes de subsidiarité et de proportionnalité inscrits dans le traité CE ainsi que la diversité des approches privilégiées par les États membres pour ce qui concerne les structures de marché;

-la base juridique des activités de compensation et de règlement-livraison exercées dans l'Union européenne devrait être claire, fiable et cohérente;

-toute nouvelle concentration de ces activités dans l'UE devrait surtout être tirée par les forces du marché, sous réserve qu'il soit satisfait aux préoccupations légitimes d'ordre public.

La Commission invite le Parlement européen, le Conseil, la Banque centrale européenne, le Comité économique et social européen, le Comité des régions, les autorités nationales de réglementation et de surveillance, d'autres organisations et fédérations européennes et nationales, les acteurs du marché, les investisseurs institutionnels, les fournisseurs d'infrastructure et toutes les autres parties intéressées à lui soumettre leurs observations sur tous les aspects de la présente communication avant le 30 juillet 2004.

En 2005, elle arrêtera ensuite son approche et le contenu exact de toute mesure apparaissant nécessaire.

SITUATION ACTUELLE

1. Les systèmes de compensation et de règlement-livraison

Dans la présente communication, l'expression «compensation et règlement-livraison» désigne l'ensemble des dispositifs nécessaires à la finalisation d'une transaction sur valeurs mobilières ou instruments dérivés [1]. Ces dispositifs recouvrent une large palette d'institutions, d'instruments, de règles, de procédures, de normes et de moyens techniques.

[1] Sauf spécification contraire, le terme «transactions» sera supposé couvrir aussi bien les transactions sur valeurs mobilières que les transactions sur instruments dérivés.

La prestation des services de compensation et de règlement-livraison incombe essentiellement à des institutions telles que les dépositaires centraux de titres et les contreparties centrales. Les premiers exercent, avant tout, les fonctions liées au règlement-livraison et à la tenue de compte-conservation des titres, les secondes celles afférentes à la compensation. En règle générale, les dépositaires centraux de titres et les contreparties centrales ne traitent pas avec les petits investisseurs. L'accès à ces institutions est offert par d'autres entités (plus précisément, les teneurs de compte-conservateurs et les membres compensateurs), qui font office d'intermédiaires des processus de compensation et de règlement-livraison. Cependant, certains intermédiaires ne souhaitant pas d'accès direct, peuvent eux-mêmes recourir à d'autres intermédiaires - d'où la possibilité d'une structure d'intermédiation à niveaux multiples.

Synthétiquement, on peut définir l'éventail complet des dispositifs institutionnels nécessaires à la finalisation d'une opération sur titres comme un système de compensation et de règlement-livraison. À l'intérieur de ce cadre général, on distingue les systèmes de règlement-livraison de titres, les contreparties centrales, les teneurs de compte-conservateurs et les membres compensateurs. On peut considérer que les systèmes de règlement-livraison de titres recouvrent toutes les institutions exerçant les fonctions de pré-règlement, de règlement-livraison et de tenue de compte-conservation de titres. Les contreparties centrales peuvent, quant à elles, être définies comme les institutions exerçant la fonction de compensation. Dans la présente communication, on désignera par «fonction de compensation» les activités ayant pour effet d'offrir une garantie contre le risque de pertes lié à une défaillance d'une contrepartie à une transaction («risque de coût de remplacement»). Enfin, les teneurs de compte-conservateurs offrent des services d'intermédiation dans le processus de règlement-livraison, et les membres compensateurs dans le processus de compensation.

Traditionnellement, le terme compensation est principalement utilisé pour désigner le processus de calcul des obligations mutuelles provenant de l'échange de titres et d'argent, sur une base brute ou nette, préalablement au règlement-livraison. Cette activité peut aussi inclure de la compensation avec délégation parfaite ('novation') ce qui a pour effet de garantir les contreparties du « risque de coût de replacement ». Comme le profil de risque de ces activités est différent, les premières (c'est-à-dire, le simple processus de calcul des obligations mutuelles) seront considérées comme faisant des opérations pré règlement-livraison, tandis que les dernières activités (c'est-à-dire celles qui ont pour effet de garantir les contreparties du « risque de coût de replacement ») sont définies par le terme Compensation. Enfin, le transfert définitif des titres du vendeur vers l'acheteur et des fonds de l'acheteur vers le vendeur est considéré comme inclus dans le Règlement-livraison.

Les transactions transfrontalières peuvent être réglées via les canaux suivants:

1) un accès direct à distance au système de règlement-livraison de titres étranger;

2) le recours à un teneur de compte-conservateur bénéficiant d'un accès direct ou indirect (typiquement, via un participant local) au système de règlement-livraison de titres étranger;

3) le recours, en tant qu'intermédiaire, à un dépositaire central de titres ou à un dépositaire central international de titres [2] bénéficiant d'un accès direct ou indirect au système de règlement-livraison étranger.

[2] Par «dépositaires centraux internationaux de titres», on désigne les systèmes de règlement-livraison des transactions portant sur des euro-obligations. Les deux seuls exemples existants sont Euroclear Bank et Clearstream Banking Luxembourg.

Dans un contexte transfrontalier, les systèmes de règlement-livraison de titres peuvent offrir des services d'accès direct à distance, dans le cas de transactions sur valeurs mobilières pour lesquelles ils représentent le point ultime de règlement-livraison (option 1 ci-dessus). Comme on l'a déjà mentionné, les teneurs de compte-conservateurs font typiquement office d'intermédiaires du processus de règlement-livraison. Ils interviennent également en cette qualité dans le règlement-livraison des transactions transfrontalières (option 2). Cependant, les systèmes de règlement-livraison de titres peuvent aussi jouer un rôle d'intermédiaire, en tant que «système de règlement-livraison de titres-investisseur», pour des transactions portant sur des valeurs mobilières conservées en dépôt final auprès d'un autre système de règlement-livraison de titres ou «système de règlement-livraison de titres-émetteur» (option 3).

Il s'ensuit que, dans la prestation de services de règlement-livraison transfrontalier, les systèmes de règlement-livraison de titres agissant en qualité d'intermédiaires et les teneurs de compte-conservateurs sont, au moins potentiellement, en concurrence. De plus, la possibilité qu'a le système de règlement-livraison de titres-émetteur d'offrir un accès direct à distance signifie qu'il peut aussi, au moins potentiellement, faire concurrence aux systèmes de règlement-livraison de titres-investisseurs et aux teneurs de compte-conservateurs pour le règlement-livraison des transactions transfrontalières [3].

[3] La même remarque s'applique à la compensation effectuée par une contrepartie centrale: la compensation des transactions transfrontalières peut être effectuée soit sur la base d'un accès à distance, soit via les services offerts par un membre compensateur général ou par une contrepartie centrale différente; dans ce dernier cas, la contrepartie centrale étrangère traite la «contrepartie centrale-investisseur» comme un participant dont les marges doivent être proportionnées à ses positions.

D'une manière générale, les dispositifs actuels de finalisation des transactions dans l'Union européenne sont considérés comme performants au niveau national, mais très inefficaces au niveau transfrontalier. D'un point de vue historique, les systèmes européens de compensation et de règlement-livraison se sont, en effet, développés sur une base strictement nationale, justifiée par une activité de négociation transfrontalière alors très limitée. Étant donné les grandes économies d'échelle qui caractérisent les systèmes de règlement-livraison de titres et les contreparties centrales, les dispositifs nationaux ont toutefois entrepris un processus de concentration, qui a donné naissance à des monopoles ou quasi-monopoles fonctionnant à l'intérieur d'un cadre technique, juridique et réglementaire homogène.

L'inefficacité des dispositifs transfrontaliers dans l'Union européenne s'explique par l'absence de normes techniques globales, la coexistence de pratiques commerciales différentes et l'incohérence des fondements fiscaux, juridiques et réglementaires. En conséquence, la compensation et le règlement-livraison transfrontaliers se révèlent beaucoup plus coûteux et complexes au niveau européen qu'au niveau strictement national et potentiellement moins sûrs. Cette structure de marché fragmentée n'est plus acceptable à une époque où les stratégies d'investissement sont de plus en plus fondées sur des considérations sectorielles paneuropéennes et où un marché européen unique est créé pour les services financiers.

La résolution du Parlement européen de janvier 2003 [4] a souligné que les systèmes existants de compensation et de règlement-livraison ne permettent pas aux transactions transfrontalières d'être traitées efficacement et, par conséquent, il est impossible d'exploiter pleinement le Marché Intérieur des services financiers. Le Parlement a noté qu'en l'état actuel du marché, il est indispensable de proposer une directive. Il a suggéré que l'exercice des risques par les dépositaires centraux de titres (DCT) devrait être limité au risque opérationnel et que la fourniture de services à valeur ajoutée par les DCT devrait faire l'objet d'une séparation fonctionnelle. Elle a également invité la Commission à étudier complètement l'exemple des USA d'un cadre unifié de compensation, de règlement-livraison et de conservation. A la lumière de la demande du Parlement, la Commission invite les parties intéressées à faire tout commentaire en vue de l'élaboration d'un futur rapport.

[4] Résolution du Parlement européen sur la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen intitulée "Les mécanismes de compensation et de règlement-livraison dans l'Union européenne - Principaux problèmes et défis futurs".

2. Les obstacles mis en évidence par les rapports Giovannini

La nature des problèmes évoqués a récemment suscité un vif intérêt. Parmi d'autres rapports consacrés à la question, les deux rapports produits par le groupe Giovannini ont pointé du doigt quinze obstacles de types différents (obstacles techniques ou inhérents aux pratiques du marché, obstacles liés aux procédures fiscales et obstacles juridiques, ci-après «les obstacles Giovannini» [5]) comme étant les principales sources de fragmentation et d'inefficacité. Ils concluaient que, tant que ces obstacles ne seraient pas éliminés, le secteur européen de la compensation et du règlement-livraison resterait une juxtaposition de marchés nationaux non intégrés [6].

[5] Voir l'annexe 1 pour la liste des obstacles répertoriés dans les rapports Giovannini. Le texte intégral de ces rapports est disponible sur le site Internet de la Commission; leur contenu n'est donc pas discuté en détail dans la présente communication.

[6] La pertinence des obstacles répertoriés par le groupe Giovannini - outre l'absence de cadre réglementaire et prudentiel commun et d'égalité des conditions de concurrence entre les systèmes de compensation et de règlement-livraison (voir ci-après) -était examinée dans une première communication de la Commission intitulée «Les mécanismes de compensation et de règlement-livraison dans l'Union européenne - Principaux problèmes et défis futurs», COM(2002)257 final du 28.5.2002, disponible sur: http://europa.eu.int/comm/internal_market/ en/finances/mobil/compensation/index.htm

S'ils constituent tous une entrave à l'intégration des dispositifs européens de compensation et de règlement-livraison, les obstacles Giovannini ont toutefois des effets différents sur le déroulement de la compensation et du règlement-livraison transfrontaliers. Selon les rapports, l'un des premiers obstacles à l'intégration réside dans les restrictions imposées au lieu de prestation de la compensation et du règlement-livraison. De fait, ces restrictions ne permettent pas aux participants au marché d'accéder librement au dispositif de compensation et de règlement-livraison de leur choix et, partant, suppriment une condition essentielle au renforcement de la concurrence et de l'efficacité dans la prestation de services transfrontaliers.

Toutefois, même si les restrictions qui portent sur le lieu d'exécution de la compensation et du règlement-livraison étaient abolies, d'autres obstacles mis en évidence par le groupe Giovannini continueraient à entraver l'exercice effectif de la liberté de choix et d'accès. Certains de ces obstacles ont notamment pour effet de rendre plus attrayant, voire d'imposer le recours à des participants locaux pour accéder aux systèmes de règlement-livraison de titres étrangers. Tel est le cas de toutes les actions dont l'exécution suppose des connaissances spécialisées ou une expérience de l'environnement local (par exemple, du fait de différences nationales dans le traitement réservé aux droits détenus sur des titres confiés à un intermédiaire, aux opérations de sociétés (« corporate actions»), dans les pratiques d'émission, etc.) ou de toutes les actions pour lesquelles une participation locale est imposée de fait (par exemple, par des règles nationales attribuant aux intermédiaires locaux la responsabilité exclusive des retenues fiscales). Ces obstacles empêchent effectivement les intermédiaires ou investisseurs étrangers de passer par des canaux de règlement-livraison transfrontalier autres qu'une participation locale.

Un autre type d'obstacles empêche le recours aux systèmes de règlement-livraison de titres comme intermédiaires du processus de règlement-livraison transfrontalier. À titre d'exemple, on peut citer le fait de réserver le recouvrement des taxes sur les transactions à une fonctionnalité intégrée dans le système de règlement-livraison local - d'où un renchérissement possible de ces taxes en cas d'utilisation d'un autre système. Des préoccupations de coût peuvent ainsi amener les participants au marché à ne pas utiliser le système de règlement-livraison de leur choix.

D'autres obstacles (tels que des différences dans les technologies de l'information et les interfaces proposées) génèrent des surcoûts et/ou un surcroît de risques par rapport aux dispositifs de compensation et de règlement-livraison nationaux. Leur suppression réduira donc les différences de coût global et de risques entre compensation et règlement-livraison transfrontaliers et nationaux.

3. L'absence de cadre réglementaire et prudentiel commun

Une autre caractéristique importante des dispositifs européens de compensation et de règlement-livraison est l'absence de cadre réglementaire et prudentiel commun. Il incombe aux autorités publiques nationales de garantir la sûreté de ces dispositifs, en termes de protection des investisseurs comme de stabilité systémique. En cas de transaction transfrontalière, elles doivent également s'assurer de ce que tous les dispositifs étrangers participant à cette transaction soient adéquatement réglementés et surveillés.

En l'absence de cadre réglementaire commun, elles peuvent ainsi refuser l'accès ou le recours à des dispositifs étrangers, afin de préserver le bon fonctionnement des marchés et la stabilité financière.

En réaction à ce problème, le Système européen des banques centrales (SEBC) et le comité européen des régulateurs des marchés de valeurs mobilières (CERVM) ont constitué un groupe de travail commun (le groupe de travail SEBC/CERVM), chargé d'élaborer des normes communes pour les prestataires de services de compensation et de règlement-livraison de l'Union européenne. Leurs travaux sont fondés sur une adaptation des recommandations [7] CSPR-OICV [8] au contexte européen. En juillet 2003, le SEBC et le CERVM ont publié leurs projets de normes pour consultation [9]. Ces normes ne seront pas contraignantes. Elles ne prévaudront donc pas sur les éventuelles dispositions de droit national pouvant affecter leur mise en oeuvre concrète par les autorités nationales compétentes.

[7] «Recommendations for Securities Settlement Systems», rapport de la task force CSPR-OICV sur les systèmes de règlement-livraison de titres, novembre 2001.

[8] Comité sur les systèmes de paiement et de règlement-livraison des banques centrales du G10 et Organisation internationale des commissions de valeurs mobilières.

[9] «Consultative Report: Standards for Security Compensation and Settlement Systems in the European Union», juillet 2003.

4. L'inégalité des conditions de concurrence

L'absence de cadre législatif européen propre aux dispositifs de compensation et de règlement-livraison, combinée au fait que certaines entités fournissant des services de compensation et de règlement-livraison sont agréées comme banques ou entreprises d'investissement, pose deux problèmes majeurs d'inégalité des conditions de concurrence.

Ainsi, si les banques et les entreprises d'investissement peuvent, en vertu du passeport créé par la directive sur les services d'investissement, proposer des services de tenue de compte-conservation de titres et de règlement-livraison sur une base transfrontalière, aucun droit équivalent n'est offert aux prestataires de services de compensation et de règlement-livraison qui ne sont ni des banques ni des entreprises d'investissement.

De la même manière, les différents prestataires de services de compensation et de règlement-livraison sont soumis à des exigences de fonds propres variables. En particulier, on observe des différences entre les entités agréées comme banques et les autres. Faute d'harmonisation dans ce domaine, des différences existent également entre ces autres entités non agréées comme banques.

En outre, alors qu'il est possible que des entités agrées comme banques puissent offrir des services bancaires et d'intermédiation ainsi que des services de base de conservation et de règlement livraison, des teneurs de compte conservateurs de certains Etats membres peuvent ne pas avoir accès à ces mêmes droits.

LES OBJECTIFS DE LA COMMISSION

La Commission a pour objectif premier la création de systèmes européens de compensation et de règlement-livraison qui soient sûrs et efficaces et qui garantissent l'égalité des conditions de concurrence entre les différents prestataires des services concernés. Elle estime que, pour atteindre cet objectif, les mesures et politiques suivantes s'imposent:

(a) la libéralisation et l'intégration des systèmes de compensation et de règlement-livraison existants, par l'introduction de pleins droits d'accès à tous les niveaux et la suppression des obstacles actuels à la compensation et au règlement-livraison transfrontaliers;

(b) l'application continue de la politique de concurrence, en vue de mettre un terme aux pratiques de marché restrictives et d'encadrer toute nouvelle concentration du secteur;

(c) l'adoption d'un cadre réglementaire et prudentiel commun, qui soit garant de la stabilité financière et de la protection des investisseurs et, partant, qui permette la reconnaissance mutuelle des systèmes.

(d) la mise en oeuvre de codes de gouvernance appropriés.

La libéralisation et l'intégration des systèmes de compensation et de règlement-livraison dans l'Union européenne supposent que les marchés, les prestataires des services concernés et les investisseurs aient accès à toute la palette des options possibles pour procéder à une compensation et un règlement-livraison transfrontaliers. En effet, ce n'est qu'une fois que ces acteurs auront totalement le choix des modalités de compensation et de règlement-livraison des transactions transfrontalières que la concurrence s'exercera pleinement et pourra générer des effets positifs en termes de réduction des prix et d'efficacité économique.

Pour qu'un tel choix existe réellement, il faut que les systèmes puissent avoir accès les uns aux autres. La Commission considère donc qu'une étape fondamentale, pour créer un marché libéralisé et intégré de la compensation et du règlement-livraison dans l'Union européenne, consiste à accorder une totale liberté de choix et d'accès à tous les prestataires de ces services, y compris les contreparties centrales et les systèmes de règlement-livraison de titres. Ce n'est pas le cas aujourd'hui, pas plus que ce ne le sera avec l'adoption de la nouvelle directive sur les services d'investissement, puisque celle-ci ne supprime pas les dernières restrictions de droit national ou de nature commerciale afférentes au lieu d'exécution de la compensation et du règlement-livraison.

Toutefois, l'introduction d'une totale liberté de choix et d'accès ne sera pas effective ou pas suffisante sans la suppression de tous les autres obstacles répertoriés dans les rapports Giovannini. L'abolition des obstacles techniques ou inhérents aux pratiques de marché, des obstacles liés aux procédures fiscales et des obstacles juridiques constitue, en effet, un facteur essentiel pour achever l'intégration des systèmes de compensation et de règlement-livraison dans l'Union européenne. Aussi la Commission avalise-t-elle l'approche générale retenue dans les deux rapports. Elle est également favorable à la recommandation spécifique formulée par le groupe Giovannini, selon laquelle les obstacles précités doivent être supprimés par les efforts combinés du secteur privé et du secteur public et dans un ordre approprié.

Un autre obstacle important à la compensation et au règlement-livraison transfrontaliers auquel doivent s'attaquer les autorités publiques a trait au règlement du volet «liquidités» des transactions sur valeurs mobilières. Actuellement, les participants à distance à l'Eurosystème des banques centrales nationales n'ont pas accès aux facilités de crédit intrajournalier offertes par celles-ci aux participants nationaux. Ce n'est pas un problème pour le règlement-livraison des titres durant les heures de fonctionnement de TARGET [10], puisque les participants à ce système peuvent alors transférer aisément des fonds d'un compte à un autre. Mais ça le devient en dehors de ces heures de fonctionnement, notamment lorsque les systèmes de règlement-livraison de titres travaillent de nuit.

[10] TARGET est le réseau européen des systèmes de paiement brut en temps réel.

La Commission considère que, d'une manière générale, le règlement transfrontalier du volet «liquidités» des transactions sur valeurs mobilières devrait être facilité dans toute la mesure possible, compte tenu des objectifs de l'Eurosystème et des autres banques centrales européennes, par exemple en permettant aux établissements bancaires de concentrer des liquidités sur un compte de banque centrale, puis de les transférer durant les heures de fonctionnement des systèmes de règlement-livraison de titres, ou en leur permettant d'utiliser un compte unique, comme cela sera possible avec la version améliorée de TARGET actuellement en projet (TARGET 2 [11]) - le but étant de soutenir leur activité de règlement-livraison dans l'Union européenne [12].

[11] BCE, «TARGET 2: principes et structure», 16 décembre 2002. TARGET 2 offrira la possibilité d'opérer une concentration de leurs plates-formes techniques aux banques centrales acceptant de renoncer à leur propre système. Il ne fait pas de doute qu'une telle concentration facilitera le règlement-livraison transfrontalier.

[12] Le rapport consultatif du SEBC et du CERVM adresse une recommandation similaire aux banques centrales, qui se voient invitées à «améliorer les mécanismes de fourniture de monnaie de banque centrale, par exemple en étendant les plages de fonctionnement du système de transfert de liquidités et en facilitant l'accès aux comptes de trésorerie».

Toutefois, même si elles constituent un maillon essentiel de tout le processus, la libéralisation et l'intégration des systèmes européens de compensation et de règlement-livraison ne suffiront pas à en garantir l'efficacité. Les autorités compétentes doivent également veiller à ce que les prestataires des services concernés respectent pleinement les règles de concurrence. L'intégration des systèmes de compensation et de règlement-livraison existants peut potentiellement en accroître l'efficacité. Ce potentiel ne doit pas être ruiné par l'adoption de pratiques anticoncurrentielles par ces systèmes, telles qu'un refus d'accès arbitraire ou l'imposition de prix excessifs et/ou discriminatoires.

Outre les mesures précitées, la Commission estime qu'un cadre réglementaire et prudentiel commun doit être mis en place dans l'Union européenne, car il renforcera la sécurité des systèmes de compensation et de règlement-livraison et permettra leur reconnaissance mutuelle. De fait, le bon fonctionnement de tous les dispositifs de post-négociation est un facteur crucial de sûreté des marchés financiers et de stabilité de l'ensemble du système financier. Les participants aux systèmes de compensation et de règlement-livraison sont confrontés à une série de risques [13]. Si la défaillance de l'un d'entre eux rendait tous les autres incapables d'honorer leurs engagements, tout système de compensation et de règlement-livraison pourrait devenir une source majeure d'instabilité financière.

[13] Dont les risques de trésorerie, de crédit et de tenue de compte-conservation, le risque opérationnel et le risque juridique. Voir les recommandations CSPR-OICV pour une discussion approfondie de ces questions.

Par ailleurs, les systèmes de compensation et de règlement-livraison détiennent les actifs qui sont utilisés dans les paiements effectués par les systèmes de paiement de gros montants ou comme garanties dans les opérations de politique monétaire; leur sûreté et leur efficacité sont donc aussi de la plus haute importance pour garantir l'efficacité desdits systèmes de paiement et de la politique monétaire.

Il convient enfin que les transactions sur valeurs mobilières soient finalisées de manière rapide et efficace, dans le respect des conditions de la négociation. En effet, s'ils jugent qu'un système de compensation et de règlement-livraison n'est pas sûr, les investisseurs ne souhaiteront pas conclure de transactions financières donnant lieu à une compensation et un règlement-livraison en son sein - ce qui influe directement sur la liquidité du marché financier et indirectement sur le coût du capital.

C'est pourquoi, dans le cadre réglementaire actuel, les autorités de réglementation peuvent refuser l'accès ou s'opposer au recours à des systèmes étrangers lorsqu'elles ne pensent pas que le bon fonctionnement des marchés dont elles sont responsables et la stabilité financière globale pourront alors être préservées.

La Commission estime que ce problème doit être réglé et que la libéralisation et l'intégration des systèmes de compensation et de règlement-livraison doivent s'accompagner de l'instauration d'un cadre réglementaire et prudentiel commun, qui renforcera la sûreté de toutes leurs opérations dans l'Union européenne, tout en permettant leur reconnaissance mutuelle.

L'adoption de mesures visant à instaurer la liberté d'accès et un cadre réglementaire et prudentiel commun créera aussi l'égalité des conditions de concurrence, en supprimant les disparités qui existent, en termes de droits d'accès et d'exigences de fonds propres, entre les prestataires de services de compensation et de règlement-livraison agréés comme banques et les autres. De fait, les mêmes activités devraient être soumises au même traitement («approche fonctionnelle»), quelles que soient les entités qui les exercent. Une telle approche suppose de s'accorder sur des définitions communes des activités entrant dans le processus de compensation et de règlement-livraison. Elle ne suppose pas, cependant, d'opérer une ségrégation des fonctions concernées à ce stade. Cependant, les personnes intéressées sont invitées à commenter une telle approche au regard des arrangements qui existent dans certains marchés nationaux européens et qui différencient l'infrastructure des fonctions bancaires.

L'adoption de codes de gouvernance efficaces permettrait également d'apporter une réponse ex-ante à certaines préoccupations des autorités publiques concernant la sûreté des systèmes de règlement-livraison de titres et des contreparties centrales et le risque de voir ces entités adopter des pratiques anticoncurrentielles. Il faut considérer que de tels codes seraient complémentaires des politiques précitées - politique de concurrence, d'une part, et réglementation et surveillance efficaces, d'autre part.

Dans sa politique en matière de compensation et de règlement-livraison, la Commission accordera donc la priorité: (a) à la libéralisation et à l'intégration des systèmes existants, (b) à l'application de la politique de concurrence, (c) à l'instauration d'un cadre réglementaire et prudentiel commun y compris le sujet des définitions et (d) à l'adoption de codes de gouvernance appropriés.

* * *

Une fois que toutes les mesures nécessaires auront été adoptées, la concentration des systèmes de règlement-livraison de titres et des contreparties centrales devrait s'accélérer. La Commission est toutefois d'accord avec les conclusions des rapports Lamfalussy et Giovannini, selon lesquelles ce processus de concentration devrait être tiré par le marché.

Elle estime que, pour autant que des garanties appropriées soient mises en place en termes de cadre réglementaire et prudentiel et de politique de concurrence, il lui incombe de rester neutre à l'égard de questions structurelles telles que (a) le degré et la forme de la concentration (horizontale ou verticale) et (b) l'opportunité, pour les systèmes de règlement-livraison de titres et les contreparties centrales, d'offrir des services d'intermédiation et/ou bancaires. Si de telles garanties sont mises en place, elle s'abstiendra de proposer ou d'imposer quelque structure institutionnelle et/ou de marché que ce soit, comme de proposer ou d'imposer une ségrégation des services d'intermédiation et bancaires éventuellement offerts par les systèmes de règlement-livraison de titres ou les contreparties centrales. Il appartiendra aux forces du marché de conférer au secteur de la compensation et du règlement-livraison sa structure «définitive». Ce sont en effet les marchés, et non les autorités de réglementation, qui sont les mieux placés pour décider de cette structure et de la combinaison de concentration et d'intégration qui répond le mieux à leurs besoins.

L'ambition générale des secondes doit être de faciliter ce processus, en encourageant les forces du marché, tout en veillant à la prise en compte des objectifs d'ordre public. Ces objectifs doivent être réalisés au moyen du cadre réglementaire et prudentiel commun qui est envisagé, par la mise en oeuvre et le plein respect des règles nationales et européennes de concurrence et par l'application de codes de gouvernance appropriés.

LES INITIATIVES CONCRÈTES DE LA COMMISSION

La réalisation de l'objectif exposé ci-dessus - à savoir, la création, dans l'Union européenne, de systèmes de compensation et de règlement-livraison efficaces et sûrs, qui garantissent l'égalité des conditions de concurrence entre les différents prestataires des services concernés - sera un processus long et complexe, qui requerra les efforts combinés des infrastructures de marché, des participants au marché, des autorités de réglementation et des législateurs. La Commission estime qu'elle devra y jouer un rôle majeur, consistant à donner l'impulsion politique requise, à coordonner les actions mises en oeuvre et à proposer des mesures spécifiques visant à créer le cadre législatif nécessaire.

Eu égard à ce qui précède, elle entend:

(a) instituer un groupe consultatif et de suivi: ce groupe devra s'attaquer à tous les obstacles Giovannini - le secteur privé étant seul ou conjointement responsable de ce travail - et promouvoir le projet global d'intégration et de libéralisation;

(b) proposer une directive sur la compensation et le règlement-livraison: la Commission juge nécessaire de compléter la suppression des obstacles Giovannini impulsée par le marché par la création d'un cadre législatif sûr, qui garantisse la libre prestation des services de compensation et de règlement-livraison dans toute l'Union européenne sur la base d'exigences communes. Un tel cadre abolira les restrictions quant au lieu de prestation de ces services. Il permettra également la reconnaissance des divers systèmes nationaux, en vertu du principe de l'État membre d'origine. La directive envisagée devrait être une directive-cadre se bornant à énoncer de grands principes, conformément à l'approche Lamfalussy;

(c) traiter les problèmes de nature juridique et fiscale: la Commission a l'intention de créer des groupes d'experts chargés d'examiner les obstacles de nature juridique et fiscale à l'intégration, de faire un bilan de la situation et, le cas échéant, de suggérer des méthodes d'harmonisation des législations et/ou procédures nationales;

(d) veiller à la mise en oeuvre effective des règles de concurrence: la Commission et les autorités nationales de la concurrence s'attaqueront aux pratiques de marché anticoncurrentielles, telles qu'un refus d'accès arbitraire et l'imposition de prix excessifs et/ou discriminatoires, et, parallèlement, contrôleront les positions de monopole existantes et toute concentration nouvelle du secteur, en intervenant si nécessaire.

La mise en place du groupe consultatif et de suivi et des groupes d'experts chargés des questions juridiques et fiscales doit être considérée comme une priorité.

1. La création du «groupe consultatif et de suivi sur la compensation et le règlement-livraison»

Parmi les mesures et politiques à mettre en oeuvre pour atteindre les objectifs fixés par la Commission, l'intégration des systèmes de compensation et de règlement-livraison existants est celui qui requiert la plus grande coordination des organismes de droit public et de droit privé. Pour supprimer les obstacles à l'intégration, ces organismes devront agir, et les synergies nécessaires être créées.

Le lancement de ces actions public/privé aura d'importantes répercussions sur la façon dont les activités de compensation et de règlement-livraison sont exercées dans toute l'Union européenne. Sous leur influence, les processus, politiques et comportements seront amenés à changer. La Commission a néanmoins conscience que les participants au marché n'ont pas nécessairement des intérêts concordants, selon les fonctions qu'ils assument et les services qu'ils fournissent. Pour certains, la participation à un marché ouvert et intégré sera synonyme d'investissements importants; pour d'autres, de risque élevé de perdre certains créneaux d'activité au profit de la concurrence. Cet état de fait pourrait être source de retards et de frictions dans l'adoption et l'acceptation des mesures visant à supprimer les obstacles existants.

C'est pourquoi tous les organismes concernés doivent être convaincus de la nécessité d'une action précise. À cet égard, un fort leadership politique s'impose. Un suivi des résultats produits par l'ensemble du processus est également nécessaire, pour garantir des efforts soutenus et faire en sorte de ne pas dévier de l'objectif général et des orientations qui ont été fixés.

Pour atteindre les résultats voulus, la Commission est favorable à la création d'un groupe consultatif et de suivi informel. Elle suit en cela les recommandations du groupe Giovannini, qui préconisait l'instauration d'un dispositif de coordination et de suivi pour assurer le succès de toute l'opération.

Ce groupe devrait notamment, en accord avec la Commission:

(a) promouvoir l'ensemble du projet et informer le public, en lui fournissant tout rapport ou explication nécessaire sur l'état des réformes, de manière à en garantir la transparence à tout moment;

(b) fonctionner comme un forum ouvert aux organismes de droit public et de droit privé, qui pourront ainsi s'assurer des avancées réalisées;

(c) se concerter avec les groupes d'experts chargés de traiter les problèmes juridiques et fiscaux (voir la section 3);

(d) fournir une assistance informelle à la Commission;

(e) faire office d'interface entre les organismes de droit public et de droit privé impliqués, dans l'objectif:

de cerner les interdépendances entre les différents obstacles existants;

de coordonner les plans d'action détaillés mis au point et d'assurer la cohérence du processus global de mise en oeuvre;

de suivre les avancées réalisées et de séquencer les actions;

(f) assurer une concertation avec le Groupe des 30 et les autres forums internationaux, de manière à garantir la cohérence des initiatives européennes avec celles conçues au niveau international.

Ce «groupe consultatif et de suivi sur la compensation et le règlement-livraison» devrait être composé de représentants de haut niveau des divers organismes de droit public et de droit privé associés au projet, dont le SEBC et le CERVM.

Il sera présidé par la Commission, qui escompte qu'il se réunira au moins deux fois par an et constituera aussi des sous-groupes spécialisés, chargés de volets précis du projet.

2. Une directive-cadre pour une compensation et un règlement-livraison efficaces et sûrs au niveau paneuropéen

La suppression des obstacles techniques et inhérents aux pratiques de marché, pour laquelle le secteur privé s'est vu confier certaines responsabilités, est une condition nécessaire, mais non suffisante pour la réalisation d'un marché libéralisé, intégré et concurrentiel des opérations de post-négociation dans l'Union européenne. La Commission estime que, pour atteindre cet objectif, il est nécessaire d'adopter une directive-cadre qui prévoie:

*une liberté totale de choix et d'accès;

*un cadre réglementaire commun;

*des codes de gouvernance appropriés.

2.1 La liberté de choix et d'accès

L'achèvement d'un marché intégré de la compensation et du règlement-livraison dépendra, dans une large mesure, de l'octroi aux prestataires de ces services d'une véritable liberté d'accès au lieu de compensation et de règlement-livraison de leur choix, à des conditions non discriminatoires. Il ressort toutefois clairement des réponses que la Commission a reçues à sa première communication que certaines restrictions en matière de choix et d'accès existent toujours. Très souvent, ces restrictions découlent de dispositions nationales ou de leur interprétation. Certaines lois prévoient, par exemple, que les transactions boursières doivent être réglées au sein d'un système affilié ou accordent des privilèges spéciaux aux banques nationales pour le règlement-livraison et le service des portefeuilles de titres. La façon la plus efficace de supprimer ces restrictions et toute autre restriction directe ou indirecte de nature similaire, que l'on trouve intégrées dans une multitude d'instruments juridiques de droit national, consiste probablement à adopter une directive-cadre instituant une totale liberté de choix et d'accès et définissant les conditions de son exercice. L'alternative, qui serait de se fonder sur une action volontaire des législateurs et régulateurs nationaux, apparaît beaucoup moins sûre et pourrait ne pas permettre de libéralisation paneuropéenne avant longtemps.

L'Union européenne a entrepris d'apporter une réponse législative au problème, mais il lui faut faire plus encore, aux fins de créer un environnement véritablement libéralisé et intégré pour les opérations transfrontalières de post-négociation. L'actuelle directive sur les services d'investissement (DSI) [14] prévoit que des entreprises agréées comme entreprises d'investissement ou comme banques jouissent d'un droit d'accès direct ou indirect aux infrastructures de compensation et de règlement-livraison mises à la disposition des membres des marchés réglementés dans toute l'Union européenne. En vertu de cette règle, les entreprises agréées qui bénéficient d'un accès à distance à un marché réglementé doivent aussi avoir accès au système de compensation et de règlement-livraison de ce marché, à des conditions non discriminatoires par rapport à celles offertes aux participants locaux.

[14] Directive 93/22/CEE, du 10 mai 1993, JO L 141 du 11.6.1993, p. 27.

La nouvelle DSI [15] étend ce droit, en permettant aux entreprises agréées d'accéder directement aux systèmes de compensation et de règlement-livraison d'un autre État membre, même si elles ne sont pas membres d'un marché réglementé ou d'un système de négociation multilatérale établi dans cet autre État membre. Elle accorde aussi des éléments de choix aux marchés et aux entreprises agréées, en matière de routage des transactions devant faire l'objet d'une compensation ou d'un règlement-livraison. Elle octroie ainsi:

[15] Directive du Parlement européen et du Conseil du 7 avril 2004 concernant les instruments financiers et les marchés, et modifiant les directives 85/611/CEE et 93/6/CEE du Conseil et la directive 2000/12/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 93/22/CEE du Conseil. La directive prévoit dans son article 34 que « Les États membres exigent que les entreprises d'investissement des autres États membres aient le droit d'accéder aux systèmes de contrepartie centrale, de compensation et de règlement existant sur leur territoire aux fins du dénouement ou de l'organisation du dénouement de transactions sur instruments financiers. Ils exigent également que l'accès desdites entreprises d'investissement à ces systèmes soit soumis aux mêmes critères non discriminatoires, transparents et objectifs que ceux qui s'appliquent aux participants nationaux. Ils ne limitent pas l'utilisation desdits systèmes à la compensation et au règlement des transactions sur instruments financiers effectuées sur un marché réglementé ou un MTF existant sur leur territoire. »

a) aux entreprises agréées: le droit d'accéder aux contreparties centrales et aux systèmes de règlement-livraison de titres des autres États membres;

b) aux entreprises agréées: le droit de choisir le lieu de règlement-livraison de leurs transactions, sous réserve que:

-les liens nécessaires à l'utilisation du système de leur choix soient en place;

-l'autorité compétente du marché réglementé convienne que le système choisi permet de préserver le fonctionnement harmonieux et ordonné des marchés financiers;

c) aux marché réglementés: le droit de recourir aux services des contreparties centrales d'autres États membres pour tout ou partie des transactions. Cependant, l'autorité compétente d'un marché réglementé peut s'opposer à un tel recours, lorsqu'elle peut démontrer que celui-ci menace le fonctionnement ordonné dudit marché réglementé [16].

[16] La nouvelle DSI reconnaît clairement les préoccupations d'ordre public concernant le recours à des systèmes étrangers, lorsque ceux-ci ne sont pas régis par un cadre réglementaire commun.

La liberté d'accès prévue dans la nouvelle DSI n'est pas totale et, partant, ne permet pas l'intégration des systèmes à tous les niveaux. Elle ne concerne que les entreprises agréées. Les contreparties centrales et les systèmes de règlement-livraison de titres ne disposent pas du droit correspondant de devenir membres d'autres systèmes - ce qui, en retour, limite la possibilité qu'ont les entreprises agréées de choisir le lieu du règlement-livraison de leurs transactions.

La liberté de choisir le lieu du règlement-livraison, prévue dans la nouvelle DSI, vise à affranchir les entreprises agréées de la nécessité de rester membres de nombreux systèmes de règlement-livraison de titres. Une telle liberté leur permettra de choisir où faire régler leurs transactions et où conserver leurs titres, en fonction de leurs propres besoins commerciaux. Elles pourront ainsi décider de confier l'intégralité de leurs avoirs à un système unique ou une combinaison de systèmes, sélectionnés librement sur la base de critères tels que le coût, l'efficacité, l'accès aux fonds, la qualité du service ou d'autres considérations importantes à leurs yeux - ce qui réduira la complexité de la négociation et permettra une gestion beaucoup plus efficace des garanties.

Cependant, pour que les entreprises agréées puissent véritablement exercer leur liberté de choix, il faudrait que le lieu de règlement qu'elles retiennent ait accès au «système de règlement-livraison de titres-émetteur». Il s'ensuit que les systèmes de règlement-livraison de titres des différents États membres devraient jouir d'un droit d'accès mutuel. En outre, la liberté de choix prévue dans la nouvelle DSI ne couvre pas la compensation. La Commission estime pourtant que les entreprises agréées devraient pouvoir choisir non seulement le lieu du règlement, mais aussi celui de la compensation de leurs transactions. En sélectionnant le lieu du règlement, les participants au marché pourraient obtenir un règlement-livraison transfrontalier, via le système de règlement-livraison de titres de leur choix. De la même manière, en sélectionnant le lieu de la compensation, ils pourraient obtenir une compensation transfrontalière, via la contrepartie centrale de leur choix. Là encore, pour que la liberté de choisir le lieu de la compensation soit effective, il faudrait que les contreparties centrales des différents États membres jouissent d'un droit d'accès mutuel.

Les contreparties centrales jouent typiquement un rôle d'intermédiaire entre les parties à une transaction, agissant comme acheteur à l'égard de tout vendeur et comme vendeur à l'égard de tout acheteur («novation»). Aux fins du règlement-livraison des transactions ayant fait l'objet d'une novation, elles doivent pouvoir accéder directement ou indirectement aux systèmes de règlement-livraison de titres assurant leur règlement-livraison ultime et la conservation des titres. En conséquence, les contreparties centrales devraient aussi bénéficier d'un droit d'accès aux systèmes de règlement-livraison de titres des autres États membres.

L'octroi de droits d'accès aux contreparties centrales et aux systèmes de règlement-livraison de titres n'aurait pas uniquement pour effet de rendre effective la liberté de choix des entreprises agréées; il garantirait également l'égalité des conditions de concurrence entre les différents prestataires des services de compensation et de règlement-livraison.

Le droit de recourir aux services d'une contrepartie centrale établie dans un autre État membre, octroyé aux marchés réglementés dans la nouvelle DSI, vise à renforcer la concurrence en matière de fourniture de services de compensation dans l'Union européenne.

Cette liberté de choix offerte aux marchés réglementés n'est cependant pas totale, en ce sens que les marchés réglementés, outre le droit de faire appel à une contrepartie centrale étrangère, devraient aussi pouvoir opter pour les services d'un système de règlement-livraison de titres établi dans un autre État membre. De plus, ces droits devraient être étendus aux systèmes de négociation multilatérale [17].

[17] Dans son accord politique du 7 octobre 2003 sur le projet de nouvelle DSI, le Conseil a supprimé ces limites, en accordant aux marchés réglementés comme aux systèmes de négociation multilatérale le droit de recourir aux services de contreparties centrales et de systèmes de règlement-livraison de titres étrangers.

La Commission estime, en conséquence, que les dispositions combinées de la directive-cadre sur la compensation et le règlement-livraison et de la nouvelle DSI devraient instaurer la série suivante de droits d'accès et de choix:

*entreprises d'investissement et banques: droit d'accès aux systèmes de compensation et de règlement-livraison des autres États membres;

*contreparties centrales: droit d'accès aux contreparties centrales et aux systèmes de règlement-livraison de titres des autres États membres;

*systèmes de règlement-livraison de titres: droit d'accès aux systèmes de règlement-livraison de titres des autres États membres;

*marchés réglementés et systèmes de négociation multilatérale: droit de conclure des accords ad hoc avec les contreparties centrales et les systèmes de règlement-livraison de titres des autres États membres.

Dans tous ces cas, l'accès devrait être régi par des règles transparentes et non discriminatoires, fondées sur des critères objectifs. Pour éviter toute discrimination, tout écart par rapport à un niveau de service ou des tarifs standard devrait également être justifié par des raisons objectives. Il convient néanmoins de noter que l'octroi d'une totale liberté d'accès aux systèmes de règlement-livraison de titres et aux contreparties centrales n'implique pas que ces entités devraient être tenues de demander et de maintenir l'accès à d'autres systèmes. Cependant, si un lien existe et fonctionne entre deux systèmes de règlement-livraison de titres, il ne devrait pas être possible à ceux-ci de refuser l'utilisation de ce lien aux fins du règlement de transactions portant sur des valeurs mobilières pour lesquelles l'un ou l'autre représente le point ultime de règlement-livraison.

2.2. Un cadre réglementaire et prudentiel commun

Les restrictions nationales à la liberté de choix et d'accès, si elles peuvent s'expliquer par des raisons historiques, peuvent aussi traduire l'intérêt légitime que prennent les autorités de réglementation et de surveillance à la préservation de la sûreté des systèmes et de la stabilité financière globale. Comme on l'a précédemment indiqué, le SEBC et le CERVM élaborent actuellement des normes visant à établir un cadre réglementaire et prudentiel qui servira de base pour le traitement de ce problème dans l'Union européenne. Les autorités de réglementation et de surveillance («les autorités nationales») devraient les intégrer dans leurs grilles d'évaluation respectives et contrôler ainsi leur application. Dénuées de caractère contraignant, ces normes ne prévaudront cependant pas sur les dispositions nationales éventuellement contraires.

Eu égard à la multiplication des fusions et des liens transfrontaliers entre les systèmes de compensation et de règlement-livraison, les autorités nationales vont aussi être amenées à coopérer plus étroitement, en vue de garantir une réglementation et une surveillance transfrontalières efficaces. Dans ce contexte, il importe de déterminer clairement le régime applicable, c'est-à-dire de désigner l'autorité compétente pour la réglementation et la surveillance d'un ensemble donné d'activités transfrontalières de compensation et de règlement-livraison. Faute de cadre commun, la coopération transfrontalière entre les autorités nationales chargées de contrôler un système ou ses participants prend actuellement la forme d'un accord conclu directement entre ces autorités, lorsque l'évolution du marché l'exige. Encore une fois, les projets de normes SECB-CERVM prévoient un schéma approprié de répartition des responsabilités entre les autorités nationales compétentes. Toutefois, aucune norme ne prévaudra sur les responsabilités leur incombant en vertu de la législation nationale.

Ces défauts intrinsèques des normes montrent bien que la normalisation, si elle permet d'établir, dans une certaine mesure, une base commune pour le contrôle de la compensation et du règlement-livraison, ne saurait remplacer un véritable cadre législatif. Comme pour la question de l'instauration d'une totale liberté de choix et d'accès, la Commission estime donc que le fait de se fonder sur une action volontaire des législateurs ou régulateurs nationaux pour la création d'un cadre réglementaire et prudentiel commun offrirait une moindre sécurité juridique et pourrait ne pas garantir d'équité réglementaire avant longtemps.

On peut éviter le problème en adoptant une directive fixant un ensemble commun de principes de haut niveau pour l'agrément, la réglementation et la surveillance des systèmes de compensation et de règlement-livraison. Cependant, les règles spécifiquement applicables à ces systèmes devraient être souples et tenir dûment compte des pratiques prudentielles comme de celles du marché. C'est pourquoi la Commission estime que les principes précités devraient prendre corps dans des mesures spécifiques, arrêtées conformément à l'approche à quatre niveaux préconisée par le groupe Lamfalussy. Les normes SECB/CERVM pourraient alors former la base de toute mesure d'exécution de niveau 2, qui serait élaborée en vertu des dispositions d'habilitation de la directive-cadre.

Dans l'idée de la Commission, cette directive devrait:

*se fonder sur une approche fonctionnelle;

*fixer des exigences initiales et continues en matière de contrôle prudentiel et de protection des investisseurs; et

*prévoir une coopération des autorités de surveillance.

Approche fonctionnelle: dans le droit fil des travaux récemment conduits par les groupes de travail CSPR-OICV et SEBC-CERVM, la Commission estime que la directive devrait être fondée sur une approche fonctionnelle, qui garantira une cohérence d'approche et évitera les conflits réglementaires.

Dans cette perspective, la directive devrait introduire un ensemble de définitions fonctionnelles communes relatives à la compensation et au règlement-livraison. Ces définitions pourraient couvrir - mais pas nécessairement refléter - un large éventail d'activités de post-négociation, telles que l'appariement et la confirmation des ordres, la compensation, le règlement-livraison, la tenue de compte-conservation et la fonction notariale. Dans tous les cas, elles devraient être fondées sur des segments ad hoc de la chaîne de valeur, et non sur le statut d' «intermédiaire» ou d' «infrastructure» du prestataire de services, même si une telle dichotomie peut rester pertinente pour apprécier le niveau de risque associé aux différentes fonctions. Les personnes intéressées sont invitées à commenter sur la pertinence d'une telle dichotomie dans ce contexte. La Commission estime que leur degré de précision dépendra de la façon dont on fera correspondre, aux différentes fonctions précitées, les exigences de contrôle prudentiel et de protection des investisseurs jugées appropriées, au regard notamment des diverses catégories de risques - risque de crédit, risque opérationnel, risque de conservation, etc. -que celles-ci sont censées encadrer. Il conviendrait également d'examiner l'opportunité d'étendre ces définitions et le champ d'application de la directive à d'autres activités de post-négociation, telles que la gestion des garanties et la gestion d'actifs.

La Commission a conscience du fait que les pratiques actuelles du marché ont parfois conduit à employer un même terme pour désigner des fonctions différentes et/ou complémentaires. La directive doit régler ce problème, en énonçant des définitions qui décrivent sans ambiguïté certaines fonctions, même si elles ne recouvrent pas nécessairement tous les usages actuels d'un terme. Dans la présente communication, la Commission s'est intentionnellement bornée à définir deux grandes catégories de fonctions, à savoir la compensation et le règlement-livraison. La compensation désigne les activités, telles que la novation, qui ont pour effet de garantir les contreparties contre le risque de coût de remplacement, tandis que le règlement-livraison recouvre, selon la définition assez large qui en est donnée, les opérations de pré-règlement, de règlement-livraison et de tenue de compte-conservation. Dans la directive envisagée, ces définitions devront être précisées et affinées, compte tenu de leur corrélation avec les exigences pertinentes de contrôle prudentiel et de protection des investisseurs.

Exigences initiales et continues de contrôle prudentiel et de protection des investisseurs: l'objectif du nouveau cadre législatif qui devrait prendre corps avec la directive sur la compensation et le règlement-livraison est de permettre aux systèmes de compensation et de règlement-livraison de proposer librement leurs services dans d'autres États membres. En même temps, ces entités représentent, pour les autres participants au marché, une source importante de risque de contrepartie et de risque systémique. C'est pourquoi la Commission juge nécessaire, si leur reconnaissance mutuelle au sein du Marché intérieur des services financiers doit devenir réalité, d'instaurer un jeu commun d'exigences initiales et continues de contrôle prudentiel et de protection des investisseurs, outre certaines exigences en matière de gouvernance (voir la section 2.3).

Il conviendrait ainsi que la directive prévoie l'application, aux systèmes de compensation et de règlement-livraison établis dans l'Union européenne, d'exigences de fonds propres initiales et continues appropriées. Ces exigences de fonds propres devraient être clairement liées aux fonctions exercées, telles qu'adéquatement définies, ainsi qu'au niveau de risque associé à ces fonctions («approche fonctionnelle»). La Commission estime, en outre, qu'elles devraient tenir compte des exigences actuellement applicables aux banques, notamment en matière de risque de crédit. Cependant, dans la mesure où le régime de fonds propres applicable aux banques, dans sa forme actuelle et telle que sa révision est envisagée, n'est pas jugé approprié pour la couverture des risques inhérents à la compensation et au règlement-livraison, il devrait être adapté en conséquence. À ce stade, la formulation d'exigences prudentielles supplémentaires n'est pas exclue.

La directive devrait également fixer des principes de haut niveau sur la gestion des risques, tel que le principe de la livraison contre paiement, outre certains autres principes relatifs à la protection des investisseurs, visant notamment à préserver l'intégrité de l'émission et à protéger les titres des consommateurs. En particulier, il est fondamental de garantir la fiabilité des écritures comptables à tous les niveaux de la chaîne d'intermédiation. Des pratiques comptables saines et des procédures adéquates de conciliation des écritures comptables tout au long de cette chaîne d'intermédiation sont, en effet, des compléments indispensables de tout effort visant à préciser les effets juridiques de la détention indirecte de titres (sur les efforts d'harmonisation de ces effets juridiques, voir la section 3.1 ci-après). La Commission considère enfin que ces principes de haut niveau sur la gestion des risques et la protection des investisseurs devraient se concrétiser par l'adoption de mesures spécifiques, telles que celles élaborées par le SEBC et le CERVM.

Coopération prudentielle: l'introduction d'une totale liberté d'accès, la suppression des obstacles existants à la prestation transfrontalière de services de compensation et de règlement-livraison et l'instauration d'un cadre réglementaire commun devraient déboucher sur un plus haut degré d'intégration et de concentration du secteur de la compensation et du règlement-livraison. Aussi est-il nécessaire que le cadre réglementaire précité prévoie un modèle de coopération prudentielle, afin que les systèmes de compensation et de règlement-livraison exerçant une activité transfrontalière ne soient pas soumis au contrôle de multiples autorités de surveillance, car cela augmenterait le coût de la régulation et sa complexité.

Le modèle prudentiel appliqué dans les secteurs harmonisés au niveau européen (banque, services d'investissement, etc.) est fondé sur le principe du contrôle par l'État membre d'origine. Selon ce principe, ancré dans plusieurs directives, la surveillance d'une entité, au regard des activités qu'elle exerce dans son pays d'origine ou à l'étranger via une succursale ou en libre prestation de services, incombe aux autorités du pays d'origine. Toute filiale d'une telle entité est, quant à elle, contrôlée par les autorités de l'État membre sur le territoire duquel elle est établie. Les autorités du pays d'accueil conservent des responsabilités comme la surveillance de la liquidité des succursales, les mesures de mise en oeuvre de la politique monétaire, etc. Ce modèle prudentiel offre également un cadre permettant l'échange régulier d'informations entre les autorités de surveillance et leur coopération mutuelle.

La Commission estime qu'il conviendrait d'instaurer, dans le secteur de la compensation et du règlement-livraison, un modèle similaire convenablement adapté à sa spécificité, afin de coordonner les missions prudentielles des autorités nationales.

Ce cadre de coopération prudentielle devrait aussi tenir compte du fait que certaines entités relèvent peut-être déjà d'un régime de surveillance (comme celui applicable aux banques). La directive devrait, en effet, éviter de dupliquer les exigences prudentielles.

Sur la base de ces dispositions, les systèmes de règlement-livraison de titres, les contreparties centrales, les teneurs de compte-conservateurs et les membres compensateurs acquerraient un passeport européen, qui leur permettrait d'exercer leur activité sur une base transfrontalière. Actuellement, seuls les teneurs de compte-conservateurs disposent d'un tel passeport, en vertu de la directive sur les services d'investissement. Le passeport relatif à la compensation et au règlement-livraison garantira l'égalité des conditions de concurrence entre tous les prestataires des services concernés.

2.3. Gouvernance

Les systèmes de règlement-livraison de titres et les contreparties centrales jouissent d'un très grand pouvoir sur le marché. Ils représentent aussi une source d'instabilité potentielle pour l'ensemble du système financier. Or, le risque de voir n'importe quel système de règlement-livraison de titres ou n'importe quelle contrepartie centrale se transformer en source d'instabilité financière augmente d'autant plus que le processus d'intégration entraîne une plus grande concentration de leur secteur. Les codes de gouvernance peuvent néanmoins contribuer à limiter ce risque.

La Commission juge donc extrêmement important que les systèmes de règlement-livraison de titres et les contreparties centrales mettent en oeuvre des codes de gouvernance appropriés. De son point de vue, il conviendrait, en conséquence, que des principes de haut niveau y afférents soient inscrits dans la directive-cadre. Les codes de gouvernance doivent régir les relations entre propriétaires, administrateurs, directeurs et toute autre partie intéressée, dont les usagers et les autorités représentant l'intérêt public. Toutes ces catégories d'acteurs ont des intérêts divers. Les propriétaires des systèmes de règlement-livraison de titres et des contreparties centrales ont légitimement intérêt à maximiser leurs profits. Les usagers veulent bénéficier de services répondant à leurs attentes, pour un prix raisonnable. Les autorités publiques doivent veiller à ce que les systèmes de règlement-livraison de titres et les contreparties centrales: (i) n'adoptent pas des pratiques anticoncurrentielles; et (ii) disposent de garanties adéquates contre le risque. Ces divers intérêts peuvent être conflictuels. Par exemple, la maximisation des profits ne doit pas avoir pour corollaire une augmentation du risque, ce qui pourrait être le cas si un système de règlement-livraison de titres ou une contrepartie centrale ne réalise pas les investissements nécessaires, en termes de systèmes d'information comme de personnel.

Les principales composantes de la gouvernance sont les suivantes: (i) la structure de l'actionnariat et celle du groupe; (ii) la composition du conseil d'administration; (iii) les canaux d'information entre la direction et le conseil d'administration; et (iv) les initiatives prises par la direction et les modalités selon lesquelles elle doit rendre compte des résultats atteints, par exemple à un comité d'audit [18].

[18] Voir les recommandations CSPR-OICV et les normes SEBC-CERVM.

Il faut opérer une distinction nette entre deux types de structures de gouvernance: (i) les entités détenues/régies par les usagers; et (ii) les entités à but lucratif. Dans le premier cas, les usagers possèdent la société. Est toutefois pertinent le fait que les parts sont distribuées selon l'utilisation qui est faite des prestations de la société. En outre, les participations doivent aussi se refléter dans la composition du conseil d'administration. De cette façon, la société n'est pas uniquement détenue par les usagers, mais aussi régie par eux. Cependant, dans la mesure où l'utilisation peut varier sur la durée, un dispositif est nécessaire pour assurer sa correspondance continue avec les participations. Dans le second cas, les parts ne sont pas liées à l'utilisation. Entre ces deux types de structures de gouvernance, il existe néanmoins une marge pour la conception de solutions intermédiaires.

La Commission estime qu'une structure de gouvernance appropriée est fondamentale pour régler les problèmes qui peuvent se poser dans ce domaine. Mais elle n'entend pas entrer dans le débat quant à sa forme - entités détenues/régies par les usagers ou entités à but lucratif. Ce qui importe, c'est que, quel que soit le modèle retenu, les exigences fixées soient pleinement respectées.

* * *

Il conviendrait que les dispositions en matière de gouvernance soient clairement libellées et transparentes. À ce titre, les propriétaires des systèmes de règlement-livraison de titres et des contreparties centrales devraient faire connaître, à compter d'un seuil donné, le montant de leur participation. Le traitement versé aux directeurs et administrateurs et tout régime d'incitation mis en place devraient également être rendus publics ou au moins révélés aux usagers. De telles dispositions permettraient de connaître les attributaires des bénéfices, la rémunération des directeurs et administrateurs et les mesures incitatives dont ceux-ci bénéficient. La transparence de la gouvernance suppose aussi que les objectifs fixés et les grandes décisions prises soient communiqués aux propriétaires, aux usagers et aux autorités publiques.

Il conviendrait, en outre, que les systèmes de règlement-livraison de titres et les contreparties centrales disposent d'un comité indépendant au moins, tel qu'un comité d'audit, composé en majeure partie d'administrateurs indépendants. Il incomberait à ce comité d'audit de veiller à ce que les préoccupations des autorités publiques et les intérêts des usagers soient dûment pris en considération sur les points suivants: (a) organisation interne et adéquation globale des ressources humaines et technologiques; (b) comptabilité; (c) fiabilité des systèmes d'information; et (d) politique de gestion des risques. Certaines des missions confiées au comité d'audité pourraient, du fait de leur caractère hautement technique, être déléguées à des sociétés extérieures. Il appartiendrait, par ailleurs, au comité d'audit de cerner et de gérer les conflits d'intérêts potentiels entre propriétaires et usagers ainsi qu'entre propriétaires et/ou usagers, d'une part, et autorités publiques, de l'autre. Enfin, l'indépendance des administrateurs est généralement appréciée par rapport aux directeurs et aux actionnaires détenant une participation de contrôle. En raison de l'intérêt naturel des autorités publiques au bon fonctionnement des systèmes de règlement-livraison de titres et des contreparties centrales, il conviendrait toutefois qu'un nombre ad hoc d'administrateurs soit également indépendant par rapport aux usagers et aux actionnaires ne détenant pas de participation de contrôle.

La question des dispositions en matière de gouvernance qui devraient s'appliquer aux intermédiaires en particulier par rapport à leurs besoins dans les activités de services liés aux titres, doit aussi être traitée. La Commission considère que le régime applicable qui leur est applicable, devrait être conforme aux dispositions en matière de gouvernance envisagées pour les actionnaires et la gestion des systèmes de règlement-livraison de titres et des contreparties centrales qui sont importants pour assurer la transparence, la tenue, la convenance et la retenue des risques.

* * *

Les mesures ci-dessus sont globalement conformes aux orientations politiques exposées dans la communication de la Commission sur le droit des sociétés et le gouvernement d'entreprise [19]. La Commission estime cependant que, en raison de l'intérêt qu'ont les autorités publiques à ne pas voir les systèmes de règlement-livraison de titres et les contreparties centrales adopter des comportements anticoncurrentiels, d'autres mesures de gouvernance pourraient se révéler appropriées, compte tenu du développement actuel de leur secteur et de ce qu'on peut prévoir de son développement futur. Sous l'effet d'une intégration accrue, différentes catégories d'institutions vont probablement se trouver en concurrence pour la prestation de services transfrontaliers de compensation et de règlement-livraison. Tel va sans doute être le cas des teneurs de compte-conservateurs, des dépositaires centraux de titres et des dépositaires centraux internationaux de titres pour la fourniture de services transfrontaliers de règlement-livraison. Aussi est-il envisagé d'imposer aux contreparties centrales et aux systèmes de règlement-livraison de titres de dissocier les services qu'ils proposent en qualité d'intermédiaires et de tenir des comptes séparés à cet égard. Les mêmes dispositions devraient s'appliquer à toute activité «annexe», bancaire par exemple, éventuellement exercée par les systèmes de règlement-livraison de titres et/ou les contreparties centrales. Bien qu'elles puissent paraître plus intrusives que d'autres obligations de publicité - la séparation des comptes peut notamment impliquer des choix discrétionnaires quant à l'imputation des charges-, ces dispositions sont de nature à renforcer le degré de transparence des contreparties centrales et des systèmes de règlement-livraison de titres. À cet égard, la présente communication suit l'approche proposée dans la communication sur le droit des sociétés et le gouvernement d'entreprise, selon laquelle il conviendrait «chaque fois que possible [...] de donner la préférence aux obligations de publicité, qui supposent une ingérence moindre dans la vie de la société et constituent un instrument sensible au marché, hautement efficace et susceptible de donner rapidement des résultats» (p. 14).

[19] COM(2003)284 final du 21.5.2003.

Séparation des comptes: aux fins de l'établissement de comptes séparés, il est nécessaire d'opérer une séparation des produits et une séparation des charges. L'obligation de tarifer distinctement des services différents, telle qu'analysée ci-après, permettrait une séparation des produits. Dans la mesure où les contreparties centrales et les systèmes de règlement-livraison de titres sont caractérisés par de grandes économies d'échelle pour ce qui concerne l'exercice de leurs activités-clés, d'une part, et de leurs activités annexes, d'autre part, la séparation des charges implique toutefois d'opérer des choix discrétionnaires.

Par exemple, en imputant un très faible pourcentage de charges à ses activités annexes, tout système de règlement-livraison de titres ou toute contrepartie centrale pourrait montrer qu'il/elle réalise un bénéfice sur ces activités, ce qui serait le signe qu'aucun financement croisé n'intervient. Un tel signe serait néanmoins trompeur: si le «bon» pourcentage de charges fixes était imputé aux activités annexes, celles-ci apparaîtraient moins rentables ou, à l'extrême, effectivement déficitaires. La question de l'imputation des charges appelle donc la plus grande prudence, si les résultats désirés doivent être atteints. À cet effet, la directive envisagée pourrait renvoyer aux normes internationalement reconnues en la matière, ce qui permettrait aux entités concernées de disposer d'une base solide pour satisfaire à leurs obligations. Dans tous les cas, comme on l'a précédemment évoqué, la communication prévoit que les questions comptables, y compris celle de l'imputation des charges, seront de la responsabilité d'un comité d'audit, composé en majeure partie d'administrateurs indépendants.

Dissociation des activités: il est également envisagé d'imposer la tarification distincte et, sur demande, la prestation distincte des services annexes, tels que les services offerts en qualité d'intermédiaire et les services bancaires. Une telle obligation pourrait apporter une réponse adéquate aux préoccupations suscitées par le fait que les contreparties centrales et les systèmes de règlement-livraison de titres peuvent être tentés de forcer leurs usagers, lors de l'achat de tout service qu'ils proposent en tant que monopoles, à leur acheter également d'autres services, non voulus. De telles pratiques posent des problèmes de concurrence et restreignent la capacité des usagers à transférer leur portefeuille au prestataire le plus performant - d'où des pertes potentielles d'efficacité.

L'offre de services bancaires (y compris la collecte des dépôts et l'octroi de crédits) soulève des problèmes particuliers. D'une manière générale, les participants aux systèmes de règlement-livraison de titres peuvent avoir besoin de crédits pour surmonter un manque temporaire de liquidités au moment du règlement de leurs opérations sur titres. Ces crédits dont ils ont besoin doivent consister en des actifs du même type (monnaie de banque centrale ou monnaie de banque commerciale) que celui qui est utilisé aux fins du règlement du volet «liquidités» des opérations sur titres. Par ailleurs, les systèmes de règlement-livraison de titres qui procèdent au règlement dans leur propre monnaie (de banque commerciale) octroient aussi des crédits à leurs participants.

Il existe plusieurs manières de régler le problème des services bancaires offerts par les systèmes de règlement-livraison de titres en situation de monopole. La première consiste à rendre le règlement en monnaie de banque centrale obligatoire; la seconde, à obliger les systèmes de règlement-livraison de titres à proposer l'option d'un règlement en monnaie de banque centrale; la troisième, à obliger les systèmes de règlement-livraison de titres assurant le règlement en monnaie de banque commerciale à autoriser d'autres banques à régler le volet «liquidités» des opérations sur titres. Aucune de ces solutions ne contraindrait toutefois les participants aux systèmes de règlement-livraison de titres à recourir aux services bancaires proposés par le système de règlement-livraison de titres-émetteur.

Pour sa part, la Commission estime que les systèmes de règlement-livraison de titres assurant le règlement en monnaie de banque commerciale devraient, au minimum, donner aussi le choix à leurs participants d'un règlement en monnaie de banque centrale. C'est d'ailleurs l'approche retenue dans les projets de normes sur la compensation et le règlement-livraison élaborés par le SEBC et le CERVM.

* * *

Enfin, pour garantir l'équité à cet égard, les directeurs des systèmes de compensation et de règlement-livraison et leurs actionnaires qualifiés devraient remplir les exigences d'honorabilité et de compétence ou les conditions de qualité respectivement requises de leurs homologues des banques ou des entreprises d'investissement.

Pour toutes les raisons mentionnées aux précédentes sections, la Commission considère que la directive-cadre envisagée devra nécessairement instaurer: (a) une totale liberté de choix et d'accès, (b) un cadre réglementaire commun et (c) des codes de gouvernance appropriés.

La directive envisagée est seulement une première étape. Elle devrait assurer un équilibre adéquat entre une réglementation ex ante et une intervention a posteriori des autorités compétentes en matière de concurrence afin de s'assurer du respect de la réglementation en matière de concurrence. La Commission continuera de surveiller de près et, si besoin est, d'adapter son approche à des développements nouveaux. Dans le cas de nouveautés dans le fonctionnement du marché, il sera peut être nécessaire de revoir l'approche présentée, y compris par l'adoption de nouvelles mesures afin que le cadre juridique en place assure des conditions d'activités équitables pour les différents opérateurs et aborde de manière adéquate les problèmes potentiels qui pourraient survenir.

3. Remédier aux différences existant sur le plan juridique et fiscal

3.1 Sécurité juridique

La sécurité de tout système de compensation et de règlement-livraison de titres dépend en dernier ressort de la solidité du dispositif juridique sur lequel il repose. Tant la législation générale, comme celle qui traite de la propriété, des valeurs mobilières ou de l'insolvabilité, que les dispositions plus spécifiques - dont les règles internes aux systèmes-, influent sur le fonctionnement des systèmes de compensation et de règlement-livraison ainsi que sur leur efficacité globale. Il importe donc, pour que ces systèmes remplissent leur rôle de manière adéquate, que le cadre juridique soit tout à la fois clair, fiable, cohérent et prévisible dans son interprétation comme dans sa mise en oeuvre. Le risque juridique pour les participants comme pour le système dans son ensemble s'en trouve considérablement réduit.

La compensation et le règlement-livraison transfrontaliers impliquent de multiples juridictions représentant des traditions et approches juridiques différentes. Alors que chacune de ces juridictions peut traiter de manière appropriée les questions qui se posent dans le contexte national, il est nécessaire, en cas de prestation de services de compensation et de règlement-livraison transfrontaliers, d'identifier clairement le droit national applicable aux aspects contractuels et patrimoniaux de l'ensemble de l'opération (question du conflit de lois). En outre, même si le problème de l'indentification du droit matériel applicable est convenablement réglé par l'harmonisation des dispositions nationales en matière de conflit de lois, les différences existant entre les lois substantielles des diverses juridictions concernées peuvent encore affecter l'ensemble du processus. Ces questions légales particulièrement complexes rendent la compensation et le règlement-livraison transfrontaliers infiniment plus coûteux et incertains.

Les deux rapports Giovannini décrivent de façon claire les problèmes que soulèvent les questions juridiques dans ce contexte. L'application inégale des dispositions nationales en matière de conflit de lois, le régime juridique différent, selon les États membres, du netting bilatéral, ainsi que l'absence de cadre communautaire pour le traitement des droits détenus sur des titres sont pointés du doigt comme autant d'obstacles importants à une intégration plus poussée. Ils voient aussi comme une entrave majeure les disparités nationales concernant l'instant à partir duquel l'acquéreur d'un titre est réputé en être le propriétaire aux fins des opérations de sociétés.

Le cadre juridique actuel de l'Union européenne couvre déjà certaines de ces questions. Ainsi, les différences concernant le traitement juridique du netting et les questions relatives aux conflits de lois sont traitées, dans une large mesure, dans les directives sur le caractère définitif du règlement [20] et sur les contrats de garantie financière [21]. Ces deux directives contiennent aussi des dispositions spéciales concernant l'application de la législation en matière d'insolvabilité aux systèmes de compensation et de règlement-livraison et aux contrats de garantie financière, qui visent à renforcer la sécurité de ces systèmes et contrats.

[20] Directive 98/26/CE, du 19 mai 1998, JO L 166 du 11.6.1998, p. 45.

[21] Directive 2002/47/CE, du 6 juin 2002, JO L 168 du 27.6.2002, p. 43.

La directive sur le caractère définitif du règlement minimise les perturbations qu'entraînent les procédures d'insolvabilité pour un système de règlement-livraison de titres et fait en sorte que les ordres de transfert et le netting produisent leurs effets en droit et soient opposables aux tiers. En conséquence, le netting ne pourra être remise en cause lorsque les ordres de transfert ont été entrés dans le système. Il ne sera pas possible non plus de revenir sur les opérations réglées, en vertu de la règle dite «zéro heure» quelquefois intégrée dans la législation sur l'insolvabilité. La directive prévoit aussi que les ordres de transfert deviennent irrévocables à partir d'un moment fixé par le système. Enfin, les garanties fournies aux banques centrales ou en rapport avec la participation à un système sont soustraites aux effets de la législation sur l'insolvabilité.

La directive aborde également la question des conflits de lois liés à cette fourniture de garanties lorsque les droits du preneur de garantie sont inscrits dans un registre, dans un compte ou chez un DCT. Elle suit à cet égard «l'approche du lieu de l'intermédiaire pertinent» (connue sous le nom de PRIMA), qui veut que les droits des preneurs de garanties soient régis par le droit de l'État membre dans lequel le registre, le compte ou le DCT est situé.

La directive concernant les contrats de garantie financière, que les États membres sont en train de mettre en oeuvre, a un champ d'application beaucoup plus vaste puisqu'elle couvre (presque) toutes les opérations de garantie financière effectuées par les systèmes et les «intermédiaires financiers» [22]. Elle réduit les exigences formelles relatives aux contrats de garantie financière et protège leur validité et leur caractère irrévocable contre certaines dispositions de la législation sur l'insolvabilité, telles que la règle dite «zéro heure». Elle reconnaît le netting bilatéral avec déchéance du terme («close-out netting»), même lorsque son application est déclenchée par l'ouverture ou la poursuite de procédures de liquidation ou de mesures d'assainissement. La directive adopte la même approche PRIMA pour traiter les conflits de lois concernant la nature juridique et les effets patrimoniaux des garanties sous forme d'instruments financiers transmissibles par inscription en compte [23], les exigences en matière de mise au point et d'opposabilité aux tiers, l'existence de droits concurrents sur ces garanties et les formalités requises pour leur réalisation.

[22] Les opérations de garantie financière réalisées auprès de personnes physiques ne sont pas couvertes.

[23] Garanties consistant en instruments financiers, sur lesquels la possession d'un droit de propriété est attestée par une inscription dans un registre ou sur un compte.

Les questions de conflits de lois relatives aux titres dématérialisés ont été, par la suite, à nouveau traitées dans la nouvelle «convention de La Haye sur la loi applicable à certains droits sur des titres détenus auprès d'un intermédiaire».

Conformément à cette convention, la loi applicable à certains droits afférents aux titres détenus auprès d'un intermédiaire est celle dont ont convenu le titulaire du compte et l'intermédiaire concerné, à condition qu'elle satisfasse à un test dit «de réalité» permettant de vérifier que les activités de cet intermédiaire dans le domaine des valeurs mobilières ont un rapport avec la juridiction en question, sinon avec le compte lui-même.

L'application de la convention de La Haye dans toute l'Union européenne permettra aux participants de déterminer à l'avance, avec certitude et au prix d'un effort raisonnable, quelle est la loi substantielle qui régit leurs droits sur des titres détenus indirectement. La Commission prendra toutes les dispositions nécessaires, dans le cadre de ses prérogatives, en vue de la signature puis de l'adhésion à la convention de l'Union européenne, ainsi que de sa ratification par les États membres. Elle fera également le nécessaire pour adapter les directives sur le caractère définitif du règlement et sur la garantie financière aux dispositions sur les conflits de lois de la convention de La Haye.

Malgré les progrès qu'entraîneront ces mesures en termes de clarté juridique, mais aussi de solidité globale et d'efficacité des activités de compensation et de règlement-livraison transfrontaliers à l'intérieur de l'Union, il subsistera un certain nombre d'obstacles juridiques non négligeables.

Le premier d'entre eux est l'absence de cadre communautaire régissant le traitement des droits détenus sur des titres confiés à un intermédiaire. Cette lacune est considérée par le groupe Giovannini comme la source principale de risque juridique dans les opérations transfrontalières.

Les valeurs mobilières sont de plus en plus fréquemment détenues et transférées sous forme d'inscriptions comptables. Par exemple, les titres dématérialisés sont exclusivement représentés par une inscription sur un compte détenu chez un intermédiaire. Lorsque tel est le cas, il est d'abord nécessaire de déterminer la nature des droits que possèdent les investisseurs à l'égard de ces inscriptions comptables. En fait, l'interprétation légale de ces droits varie considérablement d'un État membre à l'autre.

Tout aussi important est le cadre juridique applicable aux transferts des droits concernant les titres détenus indirectement. Si, en pratique, la cession de ces droits s'effectue par simple jeu d'écritures comptables, il semble que toutes les juridictions nationales n'aient pas adapté comme il convient leur système juridique à ces dispositions. Il est également important de définir clairement l'instant exact auquel les droits indirects sont transférés.

D'autres questions restent à traiter, parmi lesquelles la fixation des priorités entre droits concurrents tels qu'enregistrés dans les comptes pertinents, ainsi que le moyen d'éviter que des créanciers ne cherchent à saisir ou revendiquent un droit à un niveau de la chaîne de détention supérieur à celui où ce droit est effectivement enregistré ou constitué («saisie à un niveau supérieur»). Les titres étant généralement regroupés dans des comptes uniques ou «omnibus», une saisie à un niveau supérieur aurait pour effet de geler tous les titres enregistrés dans le compte que vise la saisie, et non pas seulement ceux de l'investisseur concerné.

L'absence d'approche cohérente sur ces questions au niveau de l'Union européenne nuit gravement à l'efficacité et à la sécurité de la compensation et du règlement-livraison transfrontaliers. La Commission considère que cette question devrait être réglée en priorité, bien qu'il faille sans doute un certain temps pour soumettre des propositions concrètes.

Une autre question qui demande à être réglée est celle des différences de législations nationales qui affectent le traitement des opérations de sociétés, notamment pour ce qui est de la détermination du moment exact où l'acquéreur d'un titre est réputé être son propriétaire, aux fins du paiement des dividendes, par exemple. Selon les législations, il s'agira de la date de l'opération, ou bien de celle prévue pour son règlement ou encore de la date du règlement-livraison effectif. Comme le notent les deux rapports Giovannini, de telles différences peuvent gêner la centralisation du règlement-livraison, constituant de ce fait un obstacle à la poursuite de l'intégration. Il pourrait donc être nécessaire d'harmoniser les règles correspondantes.

Enfin, la Commission souhaite examiner plus en détails la question de la localisation des titres. Il a été dit en effet que les restrictions affectant la liberté de l'émetteur de choisir la localisation de ses titres constituent une entrave supplémentaire à l'intégration des systèmes de règlement-livraison de titres. L'origine de ces restrictions est à rechercher soit dans la législation nationale liant l'admission à la cotation sur un marché déterminé à l'utilisation du DCT local, soit dans le droit des sociétés. La Commission entend étudier la question plus avant, en tenant compte des différences existant entre les divers types de titres ainsi que des implications qu'ont ces exigences en termes de droit des sociétés.

Eu égard à l'importance de ces questions, la Commission, s'appuyant sur la recommandation du groupe Giovannini, estime qu'un travail spécifique devrait être entrepris à leur sujet. Elle propose la création d'un groupe composé d'experts des milieux académiques, des autorités publiques et de la profession juridique. Ce groupe serait chargé d'approfondir l'analyse de ces questions, de proposer des solutions et, pour finir, d'aider à rédiger des propositions de lois dans ce domaine. La composition du groupe devra refléter les traditions juridiques des États membres présents et futurs. Toutefois, un secrétariat central fournira l'élan nécessaire au projet. Le groupe sera également en contact avec d'autres organismes, tels qu'Unidroit [24], qui pourraient avoir entrepris un travail similaire au niveau mondial.

[24] Unidroit (institut international pour l'unification du droit privé) est une organisation intergouvernementale indépendante, qui a pour vocation d'étudier les besoins en matière de modernisation, d'harmonisation et coordination du droit privé, notamment commercial, d'États ou de groupes d'États ainsi que les méthodes à employer à cet effet.

Étant donné la complexité du sujet et son étroite imbrication avec les législations nationales en matière de propriété et de sociétés, la Commission s'attend à ce qu'il s'agisse d'un projet à long terme. Le champ exact de ce travail sera défini au moment de la création du groupe. Toutefois, il devrait couvrir des questions telles que :

la nature de droits de l'investisseur concernant les titres détenus dans un compte auprès d'un intermédiaire;

le transfert de ces droits;

le caractère définitif des transferts dématérialisés;

le traitement des saisies au niveau supérieur;

la protection de l'investisseur contre l'insolvabilité de l'intermédiaire;

l'acquisition de ces droits en bonne foi par des tiers;

les différences existant dans les règles relatives aux transferts de propriété aux fins des opérations de sociétés, dans la mesure où ces différences se reflètent dans les législations nationales;

le choix de la localisation des titres.

Pour chacune de ces questions, les différences existant entre les diverses législations nationales devraient être appréciées et, le cas échéant, faire l'objet d'une proposition d'harmonisation.

3.2 Questions fiscales

Les États membres ont passé des accords bilatéraux en vertu desquels tant l'État d'où provient le revenu que celui dans lequel le bénéficiaire est réputé résider aux fins de l'impôt peuvent imposer le revenu tiré d'un investissement. Il existe deux moyens d'éviter la double imposition qui peut en résulter: soit l'un des États exempte purement et simplement le revenu considéré de l'impôt (cas de figure inhabituel et principalement limité, selon la terminologie consacrée, aux «investisseurs directs», qui détiennent une participation minimum de, par exemple, 10 %), soit l'État de résidence accorde un crédit pour tout impôt prélevé dans l'État source. Ces deux solutions sont généralement connues sous les noms de «méthode d'exemption» et de «méthode de crédit».

Cependant, le taux d'imposition normal de l'État source peut être globalement comparable à celui de l'État de résidence. L'utilisation de la méthode de crédit aurait pour conséquence de limiter très fortement l'impôt payé dans l'État de résidence, car l'impôt acquitté dans l'État source couvrirait la totalité (ou la quasi-totalité) de l'impôt exigible. Or, c'est dans l'État de résidence que le propriétaire est le plus susceptible de bénéficier des services qui sont financés à l'aide de l'impôt. C'est la raison pour laquelle les accords bilatéraux prévoient généralement un abaissement du taux normal de la retenue à la source dans l'État source, afin de laisser un certain montant d'impôt à acquitter dans l'État de résidence.

Les rapports Giovannini ont mis en lumière un certain nombre de problèmes pratiques liés aux procédures qui n'autorisent que certains intermédiaires à pratiquer une réduction du taux normal de la retenue à la source, et ont invité les autorités publiques à s'y attaquer. Certains États membres, notamment, restreignent les procédures de retenue à la source aux seules institutions établies sur leur territoire. D'autres États membres permettent aux intermédiaires étrangers d'appliquer ces procédures, mais à la condition qu'ils désignent un représentant fiscal local. Ces rapports font observer en outre qu'une telle situation empêche concrètement un intermédiaire de travailler sur une base transfrontalière ou d'utiliser les services d'intermédiaire d'un système de règlement-livraison de titres, limitant largement de ce fait la concurrence en matière de règlement-livraison transfrontalier. Dans ces conditions, les participants au marché ne peuvent choisir le moyen le plus efficient d'opérer dans les autres États membres, ce qui accroît l'inefficience de tout le processus.

En outre, il existe des différences dans les procédures qu'utilisent les États membres pour recouvrer l'impôt à la source ou exonérer de cet impôt. Même en cas d'exonération totale ou partielle, les investisseurs éligibles peuvent être tenus de commencer par acquitter l'impôt avant de demander son remboursement. Or, les procédures applicables au remboursement de l'impôt à la source peuvent être très complexes et peuvent aussi varier considérablement d'un État membre à l'autre. Tant de complexité et de différences augmentent sensiblement le coût du règlement-livraison transfrontalier.

La pertinence de ces obstacles à l'efficience du règlement-livraison transfrontalier a également été discutée durant la consultation ayant précédé la première communication de la Commission concernant la compensation et le règlement-livraison. Pour certains, en effet, si une harmonisation poussée n'est pas nécessaire actuellement dans le domaine fiscal, il convient en revanche d'avancer dans l'harmonisation des diverses procédures relatives au traitement de l'impôt, tout en assurant parallèlement l'égalité de traitement des investisseurs nationaux et étrangers.

La Commission note une tendance croissante à l'abandon des retenues à la source au profit de l'échange d'informations. Celui-ci permet aux autorités fiscales de disposer des informations nécessaires pour imposer comme il convient la personne qui convient. L'échange d'informations sur une base aussi large que possible est le principe qui sous-tend la directive 2003/48/CE relative à l'imposition des revenus perçus sous forme de paiements d'intérêts transfrontaliers [25]. En outre, il existe désormais une directive sur l'assistance mutuelle en matière de recouvrement [26], en vertu de laquelle les autorités d'un État membre peuvent aider leurs homologues d'un autre État membre à recouvrer à la fois des impôts directs et indirects dus dans le premier État mentionné par un contribuable établi dans le second. Enfin, la directive initiale sur l'assistance mutuelle [27] est en cours d'actualisation, l'objectif étant de la renforcer. Les États membres disposeront par conséquent de plus de moyens pour contrôler leurs contribuables installés en dehors du territoire national.

[25] Directive 2003/48/CE du Conseil, du 3 juin 2003, en matière de fiscalité des revenus de l'épargne sous forme de paiements d'intérêts, L 157 du 26.6.2003, p. 38.

[26] Directive 2001/44/CE du Conseil, du 15 juin 2001, modifiant la directive 76/308/CEE concernant l'assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances résultant d'opérations faisant partie du système de financement du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole, ainsi que de prélèvements agricoles et de droits de douane, et relative à la taxe sur la valeur ajoutée et à certains droits d'accise, JO L 175 du 28.6.2001, p. 17.

[27] Directive 77/799/CEE du Conseil, du 19 décembre 1977, concernant l'assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs, JO L 336 du 27.12.1977, p. 15.

Compte tenu de ce nouveau contexte, il paraît opportun d'examiner les possibilités supplémentaires qui s'offrent désormais pour voir s'il serait envisageable de modifier certaines des règles existantes afin de simplifier les choses pour les entreprises, tout en préservant les droits des États membres en matière de recouvrement de l'impôt.

Par ailleurs, le groupe Giovannini a laissé entendre que l'intégration du système de recouvrement des taxes sur les transactions dans les systèmes actuels de règlement-livraison de titres dans l'Union européenne constituait un obstacle fiscal supplémentaire. Les rapports faisaient observer à cet égard que l'utilisation d'un système de règlement-livraison de titres différent pouvait entraîner le paiement de taxes plus élevées sur les transactions. Si tel était effectivement le cas, les autres systèmes de règlement-livraison de titres pourraient se trouver de facto dans l'impossibilité d'offrir des services d'intermédiaire pour le règlement-livraison transfrontalier, réduisant de ce fait l'efficience du système. Les experts du groupe Giovannini ont donc invité les autorités publiques à étudier la question et à soumettre des solutions appropriées.

La Commission propose la création d'un groupe d'experts chargé d'examiner plus en détail les questions de fiscalité considérées comme faisant obstacle à un règlement-livraison transfrontalier efficient par le groupe Giovannini et les personnes ayant transmis des observations dans le cadre de la préparation de la première communication de la Commission sur la compensation et le règlement-livraison. Ce groupe d'experts devrait poursuivre l'analyse de ces questions et faire rapport sur leur pertinence ainsi que sur l'existence d'autres moyens de garantir aux États membres les recettes fiscales auxquelles ils ont droit, tout en permettant à toutes les institutions financières de l'Union de livrer concurrence sur un pied d'égalité.

Le mandat du groupe d'experts inclurait aussi le lancement d'une étude sur les différentes procédures en vigueur dans les États membres, afin de déterminer la possibilité de les rapprocher davantage et, ce faisant, d'éliminer ou de réduire nettement la multiplicité des règles qui, entre autres choses, renchérit le coût du règlement-livraison transfrontalier.

La Commission examinera les conclusions du groupe d'experts et s'en servira comme base de discussion avec les autorités fiscales des États membres, conformément à la pratique établie de consultation préalable en matière de fiscalité. Au cas où il serait jugé opportun d'entreprendre une action au niveau communautaire, la Commission ferait en sorte de soumettre les propositions appropriées.

4. Politique de concurrence

Une application cohérente de la politique de concurrence fait partie intégrante de l'approche globale de la Commission en matière de compensation et de règlement-livraison. Les mesures visant à promouvoir la libéralisation et l'intégration des systèmes existants et la politique de concurrence sont complémentaires pour ce qui est de la mise en place de systèmes efficients de compensation et de règlement-livraison dans l'Union.

En fait, le secteur financier, y compris toutes les activités de post-marché, est soumis aux mêmes règles de concurrence communautaires que les autres branches d'activités. La Commission travaille en étroite collaboration avec les autorités de concurrence nationales dans les cas qui revêtent à la fois des aspects intérieurs et transfrontaliers, par exemple lorsqu'il y a présomption d'accès discriminatoire concernant des participants nationaux et étrangers. En outre, l'entrée en vigueur, en mai 2004, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil [28] renforcera cette coopération en ce qui concerne la mise en oeuvre des règles de concurrence. Ceci ira dans le sens d'une application effective et cohérente des articles 81 et 82 du traité CE et contribuera à stimuler la concurrence dans le secteur financier.

[28] Règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, JO L 1 du 4.1.2003, p. 1.

Parallèlement à l'extension du champ de leurs activités, on a assisté récemment à certains regroupements transfrontaliers des systèmes de compensation et de règlement-livraison, dont l'intégration, traditionnellement, s'effectuait à l'intérieur des frontières nationales. On a vu ainsi fusionner des infrastructures nationales (telles que des dépositaires centraux de titres) avec des sociétés véritablement tournées vers l'extérieur (des dépositaires centraux internationaux de titres, par exemple).

Si la Commission ne prend pas position sur les questions d'intégration verticale ou horizontale ni sur celles de l'unicité ou de la multiplicité des structures et du profil de l'actionnariat, en revanche, comme dans toute branche d'activités, elle intervient lorsqu'il y a potentiellement création ou renforcement d'une position dominante sur le marché, et donc matière à préoccupation. À ce jour, la plupart des fusions qui ont eu lieu dans ce secteur n'ont pas atteint les seuils fixés dans le règlement (CEE) n° 4064/89 du Conseil [29], dit «règlement sur les concentrations», et n'ont donc pas été notifiées aux autorités de concurrence de l'Union.

[29] Règlement (CEE) n° 4064/89 du Conseil, du 21 décembre 1989, JO L 395 du 30.12.1989, p. 1.

La Commission continuera de surveiller attentivement les fusions et acquisitions réalisées dans ce secteur. En outre, dans le cas où elles occupent une position dominante, les entités résultant de ces opérations doivent respecter les contraintes spécifiques prévues par l'article 82 du traité. Par ailleurs, les accords passés entre prestataires de service de compensation et de règlement-livraison seront eux aussi contrôlés à la lumière de l'article 81 du traité.

À mesure que s'accélère l'intégration de ces systèmes, les droits et les responsabilités des acheteurs et fournisseurs de services dans ce secteur s'accroissent eux aussi. Certaines questions précises méritent d'être mentionnées, sans qu'il faille y voir une liste exhaustive des problèmes risquant de se poser sous l'angle de la concurrence, ni une forme d'anticipation des situations qui pourraient survenir.

Prestation de services et accès non discriminatoire: Dans le contexte actuel du secteur, on prête une attention particulière au respect des règles de concurrence lorsque des accords ou pratiques concertées entre sociétés, ou l'exercice par une entreprise de sa position dominante, ont pour effet de restreindre la concurrence sur un marché donné. Dans son évaluation, la Commission tient compte du contexte économique et de l'effet que de telles pratiques peuvent avoir, dans un sens positif comme négatif, sur l'efficience et la concurrence dans le marché intérieur.

Tarification: La Commission n'a pas vocation à réglementer les prix. Ceux-ci sont fixés par le marché, mais à l'intérieur de certaines limites. En particulier, une entreprise en position dominante est tenue, conformément à l'article 82 du traité CE, de ne pas «imposer de façon directe ou indirecte des prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction non équitables» [30] et d'éviter également d'«appliquer à l'égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence» [31].

[30] Article 82, point a).

[31] Article 82, point c).

Accords exclusifs: Le terme d' «accord exclusif» recouvre toute une série de situations juridiques différentes. Il peut être interprété comme englobant les actes législatifs et l'autoréglementation en même temps que les accords sectoriels. Les accords exclusifs en tant que tels ne sont pas interdits par les règles de concurrence. Cependant, ils peuvent être soumis à l'application des articles 81, 82 et 86 du traité CE, notamment dans le contexte de l'essor des services transfrontaliers. Dans le domaine de la compensation et du règlement-livraison de titres, ces accords peuvent par exemple limiter ces opérations à une infrastructure spécifique, prévoir l'utilisation exclusive d'une contrepartie centrale liée, etc. À l'inverse, les accords non exclusifs portant sur l'utilisation d'une infrastructure précise reflètent simplement le droit d'un marché de choisir les services d'une contrepartie centrale ou d'un système de règlement-livraison de titres, et ne posent donc pas de problème particulier. Lorsque des sociétés susceptibles d'occuper une position dominante, que ce soit du fait de mesures prises par l'État ou bien d'opérations de concentration, bénéficient de tels accords, il importe de prêter une attention particulière au respect de l'article 82 du traité.

La Commission suit de près l'évolution du marché dans le domaine de la compensation et du règlement-livraison. À cet égard, il est conseillé aux prestataires de services d'adopter, dans la conduite de leur société, une attitude proactive pour ce qui est de la concurrence et de chercher les moyens de régler à un stade précoce les problèmes qui pourraient se faire jour en la matière.

CONCLUSIONS

La présente communication expose les principaux objectifs qui ont guidé la Commission dans ses propositions concernant l'action à mener au niveau européen. Elle inclut en outre un plan d'action décrivant les diverses initiatives qui doivent être prises pour que la compensation et le règlement-livraison aient lieu, dans l'Union, dans un environnement intégré, sûr et efficient.

Le Parlement européen et le Conseil, la Banque centrale européenne, le Comité économique et social européen, le Comité des régions, ainsi que les autorités nationales de réglementation et de surveillance, les autres organisations et fédérations européennes et nationales, les acteurs du marché, les investisseurs institutionnels, les fournisseurs d'infrastructure et toutes les parties intéressées, sont invités à transmettre leurs observations sur tous les aspects de la présente communication avant le 30 juillet 2004. Ces observations doivent être envoyées à la DG MARKT G1, Commission européenne, B-1049 Bruxelles (adresse électronique: Markt-Clearing-Settlement@cec.eu.int).

La Commission invite aussi le Parlement européen et le Conseil à approuver l'approche décrite dans la présente communication.

Annexe 1

Obstacles Giovannini

Diversité des plates-formes/des interfaces informatiques

Restrictions quant au lieu de la compensation et du règlement-livraison

Différences nationales dans les règles régissant les opérations de sociétés

Divergences dans l'offre/les horaires de règlement-livraison intrajournalier

Obstacles à l'accès à distance

Différences nationales dans les délais de règlement-livraison

Différences nationales dans les heures de fonctionnement des systèmes de règlement-livraison

Différences nationales dans les pratiques d'émission

Restrictions quant à la localisation des titres

Restrictions sur l'activité des spécialistes en valeurs du Trésor et celle des teneurs de marché

Procédures de retenue fiscale désavantageant les intermédiaires étrangers

Recouvrement des taxes intégré comme fonction dans le système de règlement-livraison

Différences nationales dans le traitement légal des valeurs mobilières

Différences nationales dans le traitement légal du netting bilatéral

Application inégale des règles relatives aux conflits de lois

Annexe 2: GLOSSAIRE

Contrepartie centrale: entité exerçant la fonction de compensation

Coût de remplacement: risque de pertes encouru en cas de défaillance d'une contrepartie à une transaction

Fonction de compensation: ensemble des activités ayant pour effet de garantir les contreparties contre le risque de coût de remplacement

Marchés: les marchés réglementés ou les systèmes de négociation multilatérale, tels que définis dans la directive du Parlement européen et du Conseil sur les services d'investissement

Membre compensateur: intermédiaire dans la prestation de services de compensation

Prestataires de services de compensation et de règlement-livraison: les systèmes de règlement-livraison de titres, les contreparties centrales, les teneurs de compte-conservateurs et les membres compensateurs

Qualité d'intermédiaire: le fait de fournir un accès direct ou indirect à un système de règlement-livraison de titres-émetteur ou à une contrepartie centrale avec laquelle un marché a conclu des accords de compensation appropriés

Système de compensation et de règlement-livraison: l'ensemble des dispositifs institutionnels nécessaires à la finalisation d'une transaction sur valeurs mobilières

Système de règlement-livraison de titres: l'ensemble des entités exerçant les fonctions de pré-règlement, de règlement-livraison et de tenue de compte-conservation, à l'exception des teneurs de compte-conservateurs

Système de règlement-livraison de titres-émetteur: un système de règlement-livraison de titres au sein duquel les valeurs mobilières sont immobilisées ou dématérialisées

Système de règlement-livraison de titres-investisseur: toutes les institutions, notamment les dépositaires centraux de titres, exerçant les fonctions de pré-règlement, de règlement-livraison et de conservation, à l'exception des teneurs de compte-conservateurs.

TARGET: Trans-European Automated Real-Time Gross Settlement Express Transfer System; regroupe les systèmes de paiement brut en temps réel des États membres qui ont adopté l'euro, plus le mécanisme de paiement de la BCE

Teneur de compte-conservateur: intermédiaire dans la prestation de services de règlement-livraison