52003DC0615

Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et Comité Économique et Social Européen - Gouvernance et développement /* COM/2003/0615 final */


COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL, AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPEEN - GOUVERNANCE ET DÉVELOPPEMENT

TABLE DE MATIERES

1. Introduction

2. Dialogue sur la gouvernance : principales questions et principes de base

2.1. Réduction de la pauvreté

2.2. Appropriation par les pays partenaires

2.3. Dialogue sur les politiques

2.4. Sécurité

2.5. Clauses droits de l'homme et bonne gouvernance : procédures de consultation

2.6. Corruption

2.7. Migration

2.8. Approches sectorielles et intégration de la notion de bonne gouvernance

2.9. Appui budgétaire

2.10. Commerce

2.11. Rôle des entreprises

3. Pratiques et approches des pays partenaires

4. Vers une approche plus dynamique et volontariste

4.1. Un agenda stratégique pour la gouvernance

4.2. Partenariats difficiles

4.3. Situations post-conflits

4.4. Partenariats efficaces

5. Conclusion

1. INTRODUCTION

(1) Les structures et la qualité de la gouvernance sont des facteurs déterminants de la cohésion sociale ou des conflits sociaux, du succès ou de l'échec du développement économique, de la préservation ou de la dégradation de l'environnement naturel et du respect ou de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ces liens sont largement reconnus par la communauté internationale et montrent en quoi la gouvernance exerce une influence sur le développement.

(2) La Déclaration du Millénaire des Nations unies proclame que la création d'un environnement propice au développement et à l'éradication de la pauvreté dépend, entre autres choses, d'une bonne gouvernance dans chaque pays, d'une bonne gouvernance à l'échelle internationale et de la transparence des systèmes financiers, monétaires et commerciaux. Dans le cadre du consensus issu de la conférence de Monterrey, les chefs d'État sont convenus qu'une bonne gouvernance à tous les niveaux était essentielle pour atteindre un développement durable, une croissance économique soutenue et l'éradication de la pauvreté. La gouvernance, la démocratisation et le développement se rejoignent aussi dans les objectifs généraux de l'UE définis dans les traités, dans le «Livre blanc de la Commission sur la gouvernance» [1] et dans les conclusions du Conseil de mai 2002. Par ailleurs, plusieurs communications et documents stratégiques liés au thème de la gouvernance ont été publiés par la Commission ces dernières années [2].

[1] COM (2001) 428 final; 25.07.2001; Rapport de la Commission sur la gouvernance européenne, COM (2002) 705, 11.12.2002

[2] Par exemple, communication sur les politiques de proximité de l'UE vis-à-vis de ses voisins («Europe élargie» (COM (2003)104 final du 11 mars 2003) et communication sur les droits de l'homme dans la région méditerranéenne (COM (2003)294 final du 21 mai 2003)

(3) La gouvernance est un élément clé des politiques et des réformes en faveur de la réduction de la pauvreté, de la démocratisation et de la sécurité mondiale. C'est la raison pour laquelle le «renforcement des capacités institutionnelles, notamment dans le domaine de la bonne gouvernance et de l'État de droit» est l'un des six domaines prioritaires de la politique communautaire de développement, qui est abordé dans le cadre des programmes d'aide aux pays en développement.

(4) Bien qu'il n'existe pas de définition agréée sur le plan international de la gouvernance, ce concept a gagné en importance et, au cours de la dernière décennie, tous les partenaires du développement ont approfondi leur travail dans ce domaine. La Commission a notamment financé, de manière pragmatique, plusieurs programmes dans ce vaste domaine d'activités au cours des dernières années. La gouvernance a trait à la capacité d'un État à servir ses citoyens. Cette approche large permet de dissocier au plan conceptuel la gouvernance d'autres sujets, comme les droits de l'homme, la démocratie ou la corruption. La gouvernance concerne les règles, les processus et les comportements par lesquels les intérêts sont organisés, les ressources générées et le pouvoir exercé dans la société. La manière dont les services publics fonctionnent, les ressources publiques sont gérées et les pouvoirs réglementaires publics sont exercés constitue le principal problème à traiter dans ce contexte. La valeur réelle de la notion de «gouvernance» est qu'elle propose une terminologie plus pragmatique que démocratie, droits de l'homme, etc. En dépit de son caractère large et ouvert, la gouvernance est un concept pratique et éloquent qui touche les aspects de base du fonctionnement de toute société et de tout système politique et social. On peut la décrire comme une mesure de base de la stabilité et des acquis d'une société. A mesure que les notions de droits de l'homme, de démocratisation, de démocratie, d'État de droit, de société civile, de décentralisation et de saine gestion des affaires publiques gagnent en importance et en pertinence, cette société prend la forme d'un système politique plus complexe et la gouvernance se transforme en bonne gouvernance. Cette interprétation plus simple de la gouvernance s'est toutefois progressivement étoffée et, aujourd'hui, la gouvernance est généralement utilisée comme une mesure fondamentale de la qualité et de la performance de tout système politique ou administratif.

(5) L'article 9, paragraphe 3, de l'accord de partenariat de Cotonou propose une approche intéressante définie à la fois par les États ACP signataires et par l'UE. «Dans le cadre d'un environnement politique et institutionnel respectueux des droits de l'homme, des principes démocratiques et de l'État de droit, la bonne gestion des affaires publiques se définit comme la gestion transparente et responsable des ressources humaines, naturelles, économiques et financières en vue du développement équitable et durable. Elle implique des procédures de prise de décision claires au niveau des pouvoirs publics, des institutions transparentes et soumises à l'obligation de rendre compte, la primauté du droit dans la gestion et la répartition des ressources, et le renforcement des capacités pour l'élaboration et la mise en oeuvre de mesures visant en particulier la prévention et la lutte contre la corruption».

(6) La bonne gouvernance est d'abord et avant tout un problème national. Dans de nombreux pays, et pas seulement les pays en développement, des politiques nationales inadaptées ont contribué à creuser l'écart entre pauvres et riches, tant à l'intérieur des pays et des régions qu'entre ceux-ci. C'est pourquoi la bonne gouvernance est, à tous les niveaux du système (national, régional et multilatéral), cruciale pour garantir un système de gouvernance mondiale qui soit à la fois légitime, efficace et cohérent. Ces dernières années, des efforts continus ont été faits pour pallier le déficit mondial en matière de gouvernance par le biais de diverses initiatives et de dialogues instaurés au niveau multilatéral, notamment à l'initiative des Nations unies, et plus particulièrement de la Commission de la gouvernance, et, plus récemment, de la conférence sur le financement du développement de Monterrey et le sommet sur le développement durable de Johannesburg. L'UE a participé activement à ce dialogue. Les thèmes liés à la gouvernance mondiale font également l'objet d'un dialogue entre la CE et certains pays tiers importants tels que la Chine, la Russie, l'Inde et le Brésil. Du point de vue de la CE, la bonne gouvernance passe nécessairement par une amélioration continue de la cohérence des stratégies menées dans tous les domaines concernés tels que l'environnement, le commerce ou l'agriculture.

(7) La bonne gouvernance est indispensable à l'efficacité de l'aide au développement et contribue à la réalisation des objectifs vers lesquels nous devons tendre. Il reste qu'elle ne peut être mise en place du jour au lendemain. Par conséquent, tant que la bonne gouvernance n'a pas été réalisée, il convient de poursuivre des approches pragmatiques afin d'encourager les progrès. Dans ce contexte, les indicateurs ne sauraient être considérés comme une simple liste de thèmes à inclure dans une grille d'évaluation destinée à instaurer une sélectivité exclusivement fondée sur la gouvernance, mais plutôt comme un outil permettant d'intégrer cette notion dans toutes les interventions et stratégies financées par la CE.

(8) La présente communication est axée sur le renforcement des capacités et le dialogue sur la gouvernance dans différents types de situations. Les études de cas porteront tant sur des partenariats efficaces que sur des partenariats posant problème et sur des situations post-conflictuelles.

(9) Sur la base des enseignements tirés des approches de la gouvernance adoptées par la CE et d'autres donateurs ainsi que de l'avis des pays partenaires et de leurs propres expériences, la présente communication tend à définir des voies concrètes pour :

- renforcer la capacité de gouvernance et accroître l'appropriation des pays partenaires en ce qui concerne l'élaboration des programmes de réformes pertinents;

- assurer des synergies et une cohérence entre les différents instruments et politiques de la CE et de l'UE;

- renforcer les partenariats de développement sur une base nationale ou régionale afin de parvenir à coordonner les priorités des donateurs et les programmes des pays partenaires grâce au dialogue stratégique et d'assurer la complémentarité entre les bailleurs de fonds.

- contribuer à la protection des droits de l'homme et à la promotion de la démocratie, de la bonne gouvernance et de l'État de droit.

Par ce biais, la présente communication orientera l'approche de l'UE dans le domaine de la gouvernance et du développement, mettra en évidence le type de mesures à soutenir dans différentes situations et contribuera au débat international sur ces questions. Un manuel permettra de traduire cette approche stratégique dans la pratique de la coopération.

2. DIALOGUE SUR LA GOUVERNANCE : PRINCIPALES QUESTIONS ET PRINCIPES DE BASE

2.1. Réduction de la pauvreté

(10) La gouvernance est devenue l'un des maillons essentiels de la coopération au développement et fait désormais partie intégrante des processus de «stratégie de réduction de la pauvreté» (SRP).

(11) Il s'agit tout à la fois d'une question de mobilisation, de représentation et d'autonomisation réelles de la société civile, et en particulier des pauvres, et d'une question de capacité réelle des institutions publiques et des administrations à définir et à proposer les politiques requises. Dans un grand nombre de pays en développement, la réduction de la pauvreté dépend dans une large mesure de la capacité ou de l'incapacité des institutions publiques à remplir efficacement et de manière responsable les fonctions suivantes :

- permettre aux pauvres d'améliorer leur niveau de vie et renforcer leur capacité à accroître leurs revenus et leurs biens,

- garantir leur accès aux services publics,

- garantir leur sécurité et leur accès aux voies de recours et protéger et promouvoir leurs droits.

(12) La marginalisation est un élément à part entière de la pauvreté et l'autonomisation est primordiale pour réduire cette dernière. Parmi les thèmes à traiter en priorité, il convient de citer l'amélioration du pouvoir et de l'influence des pauvres dans la société par le biais de la mise en place d'un système politique dynamique ainsi que la promotion de la participation des femmes et des hommes en se concentrant, notamment, sur les règles, les normes et les pratiques institutionnelles dont découlent les droits et les privilèges et, en particulier, les préjugés sexistes qu'elles peuvent contenir. La mise en oeuvre d'approches inclusives et la promotion de l'intégration sociale doivent faire partie de tout programme de gouvernance en faveur des pauvres afin de donner la parole aux minorités, aux exclus et aux plus pauvres et de refléter leurs préoccupations.

(13) Ces approches participatives garantiront une meilleure équité intergénérationnelle fondée sur le développement durable, car l'environnement en est une composante essentielle, tout comme les aspects sociaux et économiques. La participation d'acteurs non étatiques et d'organisations de la société civile à toutes les étapes du processus de développement et leur engagement dans des débats stratégiques au niveau national contribueront à inscrire ces questions à l'ordre du jour [3]. C'est aussi le cas des thèmes de politique sociale, qui constituent un facteur de production et contribuent au développement durable. Le dialogue social et la participation d'organisations d'employeurs et d'employés à l'élaboration et à la mise en oeuvre des politiques sociales et en matière d'emploi et au fonctionnement des institutions du marché du travail peut devenir le moteur de réformes efficaces ayant un impact sur la vie quotidienne des citoyens. Dans le contexte d'une économie émergente basée sur le savoir, il est essentiel, pour mener à bien un tel programme, de fournir un réel effort éducatif, et de garantir notamment un accès aux technologies de l'information et de la communication afin d'éviter une «fracture numérique». Dans cet ordre d'idées, un effort spécifique en matière de coopération scientifique et technologique internationale peut contribuer à atteindre un tel objectif. Le sixième programme-cadre de recherche et développement technologique est l'outil tout indiqué.

[3] Participation des acteurs non étatiques à la politique communautaire de développement (COM (2002) 598 final du 7 novembre 2002)

2.2. Appropriation par les pays partenaires

(14) Un dialogue interne sur la gouvernance est essentiel à l'élaboration de programmes de réformes mues par les pays dans un contexte de légitimité et de responsabilité.

(15) Outre les parlements et les institutions autres que le gouvernement central, d'autres acteurs nationaux (représentants d'intérêts politiques, sociaux et économiques, autorités municipales et autres entités décentralisées) jouent un rôle important dans le dialogue. Chacun peut apporter une contribution précieuse et participer à des évaluations globales nationales sur les programmes de réforme de la gouvernance en faveur des pauvres, assortis de besoins, de priorités et d'objectifs clairement identifiés.

(16) La participation d'instances régionales ou supranationales et des évaluations à l'échelle régionale peuvent s'avérer utiles dans tous les domaines auxquels est attachée une valeur ajoutée régionale claire (intégration économique, prévention des conflits, sécurité), ou qui ont un caractère transfrontalier, ce qui est souvent le cas dans le domaine de l'environnement, notamment en ce qui concerne la gestion commune des ressources naturelles transfrontalières.

2.3. Dialogue sur les politiques

(17) Le dialogue politique devrait consister en des contacts permanents entre partenaires concernant toutes les questions d'intérêt commun et mutuel liées à la gouvernance.

(18) Il existe une tendance à accentuer le dialogue avec les pays en cas de crise ou de problème, sur une base ad hoc ou en réaction à des événements spécifiques. Cela peut donner une connotation négative au dialogue politique vu sous l'angle des pays partenaires. Un dialogue stratégique plus régulier devrait permettre de définir ensemble un ordre de priorités et d'aboutir à une définition commune des domaines prioritaires de coopération, y compris pour ce qui concerne les questions liées à la gouvernance, en se fondant sur les besoins de chaque pays partenaire et en faisant preuve de flexibilité.

(19) S'il est adéquatement rapproché des programmes et des priorités communautaires en matière de coopération, le dialogue stratégique peut contribuer à la promotion d'un environnement politique démocratique et stable, aux processus de paix et à la sécurité. Il doit comprendre des moyens et des ressources afin d'intégrer ces objectifs dans les programmes d'aide de l'UE et d'encourager les gouvernements des pays partenaires à poursuivre ces objectifs dans le cadre de leur stratégie globale de développement. Le dialogue stratégique, combiné à une aide appropriée, est utilisé par l'UE dans le cadre de plusieurs partenariats difficiles. Les indicateurs, qui constituent d'importants outils de contrôle et d'évaluation ainsi que d'amélioration de la qualité des programmes et des interventions.

(20) Les indicateurs de gouvernance sont des outils de contrôle et d'évaluation importants, qui permettent d'améliorer la qualité des programmes et des interventions. Ils ne sont pertinents que s'ils sont élaborés et évalués de manière participative et si les acteurs concernés interviennent efficacement dans un processus transparent mené par le pays partenaire. Ils doivent couvrir tous les aspects de la gouvernance et ne pas se limiter aux domaines directement liés à un programme de réforme particulier. Ils doivent illustrer l'élaboration de la politique, les résultats en termes de fourniture de service, la transparence de la gestion des finances publiques, l'égalité des sexes, le respect et la promotion des droits de l'homme, les principes démocratiques et l'État de droit. Chaque indicateur doit, dans le même temps, être suffisamment spécifique pour suggérer une solution institutionnelle appropriée. Des indicateurs qui se bornent à épingler un problème dans un secteur pouvant faire intervenir plusieurs institutions et politiques en même temps, sans proposer aucune solution, sont moins utiles.

(21) Il n'en reste pas moins qu'élaborer des processus appropriés pour définir et accepter des indicateurs de gouvernance est un défi. D'importants travaux sur les indicateurs de gouvernance sont actuellement menés par les donateurs par le biais du réseau sur la gouvernance du CAD de l'OCDE (GOVNET), au sein duquel les principaux donateurs sont représentés. La CE participe au réseau GOVNET et finance conjointement un projet sur les indicateurs de gouvernance mené par l'OCDE.

2.4. Sécurité

(22) La sécurité est directement liée au développement : aucun développement n'est possible dans un contexte d'insécurité permanente. A l'inverse, des lacunes en matière de gouvernance dues à la pauvreté contribuent largement à l'éclatement de conflits violents. La sécurité est essentielle à la stabilité régionale, la réduction de la pauvreté et la prévention des conflits. L'une des principales attentes des citoyens est que l'État soit en mesure de garantir leur sécurité: la sécurité de la vie, des biens et des droits politiques, économiques et sociaux.

(23) De plus en plus souvent, le concept de sécurité recouvre non seulement la sécurité de l'État, mais la vaste notion de sécurité de l'être humain, et notamment la capacité de vivre en liberté, en paix et en sûreté. Il s'agit à la fois d'un intérêt national et de droits individuels. La réforme des systèmes de sécurité fait partie intégrante de la bonne gouvernance. Une gestion, une transparence et une responsabilisation réelles du système de sécurité sont autant de conditions nécessaires à la création d'un environnement sûr qui préserve les principes démocratiques et les droits de l'homme. Par conséquent, pour oeuvrer en faveur d'une bonne gouvernance et d'une paix durable, il convient de mener à bien une réforme du système de sécurité, notamment à l'issue d'un conflit.

(24) Selon la définition de l'OCDE, le système de sécurité englobe : a) les institutions publiques ayant officiellement pour mission de garantir la sécurité de l'État et des citoyens contre tout acte de violence ou de coercition (par exemple, l'armée, la police, les forces paramilitaires, les services de renseignements et organes similaires) ; et b) les autorités civiles élues et dûment désignées pour assurer le contrôle et la supervision de ces institutions (par exemple, le Parlement, le pouvoir exécutif, le ministère de la défense, l'appareil judiciaire et pénitentiaire, etc.). La réforme de corps de sécurité essentiels tels que les forces militaires et paramilitaires ou la police est essentielle pour créer un environnement sûr en matière de sécurité et pour garantir que le secteur de la sécurité respecte en permanence les même normes en matière de gouvernance que les autres acteurs du secteur public et des forces militaires et soit placé sous le contrôle politique d'une autorité civile. Ces institutions font partie d'un système sécuritaire global et dépendent de l'existence d'une justice efficace et d'institutions capables de faire respecter la loi. La réforme du système de sécurité doit donc se doubler d'efforts visant à renforcer l'État de droit au niveau national et local. Toute intervention dans les domaines suivants peut avoir une influence sur la réforme du système de sécurité : forces armées et services de renseignements; justice et appareil de sécurité interne; forces de sécurité non étatiques; mécanismes de contrôle civils; organes de gestion civils; renforcement des capacités civiles; initiatives régionales; initiatives visant à démilitariser la société.

(25) La sécurité mondiale et le terrorisme international ont également des répercussions sur le développement. Parallèlement à l'aide apportée à des pays partenaires dans le cadre de la résolution 1373 du Conseil de sécurité de l'ONU, l'aide au développement peut contribuer à lutter contre le terrorisme international en se concentrant sur la réduction de la pauvreté et des inégalités.

2.5. Clauses droits de l'homme et bonne gouvernance : procédures de consultation

(26) Depuis le début des années 90, une clause d'«élément essentiel» relative aux droits de l'homme est systématiquement inclus aux accords de la CE avec des pays tiers, y compris les accords commerciaux et de coopération et les accords d'association. Ces clauses stipulent que le respect des droits de l'homme et des principes démocratiques sous-tendent les politiques internes et externes des pays et constituent un «élément essentiel» de l'accord. En cas de violation de ces clauses, une série de mesures peut être envisagée, pour autant que celles-ci respectent le principe de proportionnalité entre la violation et le degré de réaction. Ces mesures peuvent être les suivantes : modification du contenu des programmes de coopération ou des canaux utilisés; réduction des programmes de coopération culturelle, scientifique et technique; report de la tenue d'une commission mixte; suspension des contacts bilatéraux à haut niveau; ajournement de nouveaux projets; refus de donner suite à des initiatives du partenaire; embargos commerciaux; suspension des ventes d'armes, interruption de la coopération militaire et suspension de la coopération. Ces clauses relatives à cet «élément essentiel» ne constituent pas une approche négative ou punitive. Elles visent à promouvoir le dialogue et à encourager l'adoption de mesures positives, telles que le soutien commun de la démocratie et des droits de l'homme, l'adhésion, la ratification et la mise en oeuvre d'instruments internationaux de droits de l'homme lorsqu'ils font défaut ainsi que la prévention de crises par le biais d'une relation solide et durable.

(27) Dans le cas de l'accord de partenariat de Cotonou [4], 77 pays ACP et l'UE ont convenu de mettre sur pied des procédures de consultation liées au respect des éléments essentiels du partenariat. L'article 9 de cet accord dispose que le respect des droits de l'homme, des principes démocratiques et de l'État de droit en constitue l'élément essentiel et que la bonne gouvernance en constitue son élément fondamental. L'article 96 prévoit qu'en cas de violation de l'un de ces éléments essentiels, l'une des parties peut inviter l'autre à procéder à des consultations (une procédure similaire avait été instaurée pour la première fois en 1995, par le biais de l'article 366 bis de la version révisée de la Convention de Lomé IV). Les consultations organisées en vertu de l'article 96 visent à examiner la situation en vue de trouver une solution acceptable pour les deux parties. Si aucune solution n'est trouvée, ou en cas d'urgence ou de refus des consultations par l'une des parties, des mesures appropriées peuvent être prises. La suspension de la coopération dans ce cadre n'est envisagée qu'en dernier recours. Les mesures appropriées au sens de cet article, qui doivent être proportionnelles à la violation de l'élément essentiel, ont pour objet de donner une indication claire aux gouvernements quant au respect de l'article 9.

[4] J.O. L 317 du 15.12.2000

(28) Avant l'introduction, en 1995, de la procédure de consultation, la coopération avait été suspendue de facto entièrement ou partiellement pour plusieurs pays. Depuis 1995, des consultations ont été menées dans 12 cas, notamment 10 pays ACP [5]. Le Zimbabwe constitue un exemple récent, pour lequel des consultations ont été engagées en vertu de l'article 96 de l'accord ACP-CE, à la suite desquelles des sanctions ciblées ont été prises, notamment le gel de fonds et d'avoirs de membres du gouvernement, l'interdiction faite à ceux-ci de voyager dans les États membres ou de transiter par ceux-ci, un embargo sur les exportations d'équipements de répression ainsi qu'une interdiction de fournir toute formation liée à des activités militaires [6].

[5] Niger, Guinée-Bissau, Togo, Haïti, Comores, Côte d'Ivoire, République de Fidji, Liberia, Zimbabwe et République centrafricaine

[6] Position commune du Conseil et règlement 310/2002 du Conseil du 18 février 2002

(29) Sur la base de l'expérience acquise, il est possible de mettre en évidence certains éléments essentiels au succès des consultations, c'est-à-dire permettant de trouver une solution acceptable pour les deux parties et/ou de mettre en oeuvre les mesures nécessaires pour remédier à la situation : a) l'engagement des autorités de revenir à une situation normale est fondamentale, en particulier après un coup d'État, et b) la cohérence de la position de l'UE et la coordination entre donateurs. En vue d'assurer le contrôle du processus, il convient de mettre en exergue les violations concrètes des éléments essentiels, de définir les secteurs pour lesquels des mesures correctives sont exigées par les autorités et de maintenir un dialogue politique étroit pendant la tenue officielle des consultations et après celles-ci. Finalement, il est nécessaire d'adopter des mesures positives telles qu'un engagement fort et actif de l'UE dans la résolution des crises et des conflits.

(30) La Commission examine les possibilités de tirer un meilleur parti de la clause «droits de l'homme». L'idée de l'utiliser pour mettre sur pied des groupes de travail sur les droits de l'homme avec des pays tiers fait son chemin. En 2003, un sous-groupe sur la gouvernance et les droits de l'homme a été créé pour la première fois dans le cadre de l'accord de coopération avec le Bangladesh. Il permet des échanges approfondis entre fonctionnaires de l'UE et du Bangladesh sur des questions dans le domaine des droits de l'homme. Sa première réunion, qui s'est tenue le 19 mai 2003 à Dhaka, a porté sur de nombreux sujets, notamment la peine de mort, le système judiciaire, le soutien apporté aux processus électoraux et la création d'une commission des droits de l'homme. La possibilité de fournir un appui supplémentaire aux projets relatifs aux droits de l'homme a également été examinée. Par ailleurs, la communication intitulée «Donner une nouvelle impulsion aux actions menées par l'UE dans le domaine des droits de l'homme et de la démocratisation, en coopération avec les partenaires méditerranéens» [7] prône l'utilisation de la clause susmentionnée afin de promouvoir une approche axée davantage sur les droits de l'homme et sur la démocratisation dans la région. La communication mentionne dix domaines susceptibles de faire l'objet d'améliorations, y compris l'élaboration de plans d'action nationaux et régionaux relatifs aux droits de l'homme, une approche plus opérationnelle des droits de l'homme dans le cadre du dialogue politique et une plus grande attention accordée à ce sujet et aux questions de démocratisation dans les documents de stratégie nationale et les programmes indicatifs nationaux.

[7] Communication sur les droits de l'homme dans la région méditerranéenne (COM (2003)294 final du 21 mai 2003)

2.6. Corruption

(31) La lutte contre la corruption est de plus en plus à l'ordre du jour du programme de réduction de la pauvreté de l'UE et de la communauté internationale. Dans leur programme mondial contre la corruption, les Nations unies définissent cette notion comme l'abus d'un pouvoir à des fins de profit personnel et inclut l'ensemble du secteur public et privé («on entend par corruption toute transaction entre acteurs du secteur privé et public par laquelle des services collectifs d'utilité publique sont illégalement transformés en profits personnels»). La corruption porte atteinte à la crédibilité du gouvernement et à la légitimité de la démocratie. Elle constitue très souvent une taxe sur les pauvres. La bonne gouvernance se trouve lésée parce que des procédures formelles ont été enfreintes ou contournées. La corruption durant des élections générales ou locales ou au sein d'un parlement réduit la responsabilité et la représentativité; la corruption au sein du système judiciaire est une négation de l'état de droit et, au sein du secteur public, elle engendre une distribution inégale des services sociaux. L'une des caractéristiques de la bonne gouvernance est que les institutions et les procédures mises en place combattent la corruption et les comportements corrompus.

(32) L'expérience internationale tirée de la coopération au développement visant spécifiquement à prévenir la corruption a fait apparaître que pour avoir un impact, la lutte contre la corruption doit passer par un soutien marqué au renforcement des processus de bonne gouvernance et de démocratisation. La société civile, les médias, le ministère public et le système judiciaire, l'administration financière (avec ses procédures d'audit et de contrôle) doivent être consolidés, les procédures de marchés publics et de recrutement des fonctionnaires doivent être transparentes et il convient de veiller à ce que le Parlement soit effectivement tenu de rendre des comptes.

(33) Tolérer la corruption n'est pas compatible avec des partenariats de coopération. Il est toutefois malaisé de mesurer et d'évaluer l'ampleur de ce phénomène. Par conséquent, il vaut mieux traiter cette question dans le cadre du dialogue régulier entre partenaires afin d'évaluer les efforts déployés par le pays concerné pour combattre la corruption à l'aune des changements en cours, de la continuité des progrès enregistrés et de la qualité et de la détermination des efforts des autorités pour mettre en oeuvre des mesures et des réformes adéquates. Les avis exprimés par la société civile contribueront à ce processus et devraient explicitement pris en compte à tous les stades.

(34) L'accord de Cotonou a franchi un pas important à cet égard, qui pourrait constituer un exemple pour de futurs accords avec d'autres pays tiers ou régions. Les négociations sur la notion plus large de bonne gouvernance ont abouti à une double approche : d'une part, un engagement envers la bonne gouvernance en tant qu'élément fondamental et positif du partenariat, sujet du dialogue régulier et domaine bénéficiant d'un soutien actif de la Communauté et, de l'autre, un accord pour considérer que les cas de corruption graves, ainsi que les pots-de-vin entraînant cette corruption, constituent une violation de l'accord nécessitant des mesures correctrices appropriées. La procédure de consultation visée à l'article 97 s'applique certes aux cas de corruption impliquant des fonds communautaires, mais aussi plus largement, à tout pays dans lequel la Communauté intervient financièrement et où la corruption constitue un obstacle sérieux à des stratégies de développement axées sur les résultats. Elle ne se limite donc pas aux cas de corruption affectant directement les activités de coopération financière de la CE. Cet élément est particulièrement important si l'on considère la fongibilité des finances publiques. Ces dispositions traduisent un véritable engagement des parties à prendre les mesures qui s'imposent pour prévenir et combattre la corruption. Elles montrent que la corruption est une préoccupation commune et non pas unilatérale.

(35) L'Amérique latine est un autre exemple qu'il convient de citer. La lutte contre la corruption est un sujet récurrent du dialogue et de la coopération spéciale faisant actuellement l'objet de négociations avec l'Amérique centrale et les pays du pacte andin. La déclaration politique de Madrid (sommet UE-Amérique latine/Caraïbes de Madrid des 16 et 17 mai 2002) contient un engagement de renforcer les institutions démocratiques, l'État de droit, les systèmes judiciaires, la promotion et la protection des droits de l'homme ainsi que la lutte contre la corruption et la criminalité organisée. Par ailleurs, la nouvelle génération d'accords bilatéraux entre l'UE et les pays d'Amérique latine comportera un engagement ferme aux principes de bonne gouvernance.

(36) La manière dont la lutte contre la corruption est abordée dans les documents de stratégie nationale et dans les programmes indicatifs nationaux consiste à s'attaquer aux causes institutionnelles de la corruption ou à un environnement qui tolère la corruption en renforçant les capacités des institutions et des acteurs non étatiques et en soutenant l'amélioration du cadre réglementaire. Cette question est notamment abordée avec les pays où la corruption est une entrave majeure au développement (selon des sources comme Transparency International) et où la lutte contre la corruption est inscrite dans le programme du gouvernement.

(37) La récente communication de la Commission relative à une politique globale de l'UE contre la corruption [8] invite les institutions de l'UE et des États membres à faire des efforts visant à combattre cette forme de criminalité. En ce qui concerne les relations de l'UE avec les pays tiers, la Commission propose d'incorporer 10 principes généraux aux stratégies nationales relatives à la lutte contre la corruption des pays adhérents et candidats à l'UE ainsi que des autres partenaires de l'UE. Il s'agit notamment de mesures préventives et répressives, de codes de conduite et d'incitations en faveur du secteur privé ainsi que de listes blanches. Au niveau mondial/multilatéral, des progrès supplémentaires devraient être accomplis grâce à la future convention de l'ONU contre la corruption, qui adoptera une approche globale et multidisciplinaire tout en visant un juste milieu entre la nécessité de créer un mécanisme fonctionnel de recouvrement d'avoirs et la nécessité d'institutionnaliser des mesures préventives efficaces.

[8] COM (2003) 317 final du 28.05.2003

2.7. Migration

(38) Une saine gestion de la migration est également un facteur garantissant une bonne gouvernance au niveau mondial. Bien gérée, la migration peut être un facteur de croissance et de succès pour les pays en développement. L'amélioration de la gestion de la migration passe nécessairement par un effort commun. Il importe d'intensifier le dialogue entre le pays d'origine et les pays de destination et de développer la coopération dans un esprit de partenariat. Les principes exposés dans la communication du 3 décembre 2002 sur la migration et le développement fournissent un cadre au renforcement du dialogue sur la migration avec les pays en développement. En promouvant la bonne gouvernance, l'UE s'attaque à l'une des principales causes de la migration.

2.8. Approches sectorielles et intégration de la notion de bonne gouvernance

(39) Un recours accru à des approches sectorielles de la notion de bonne gouvernance, pour autant qu'elles se doublent d'un soutien budgétaire et d'autres mécanismes financiers, tels que des paniers de financement («basket funding»), peut contribuer à étendre l'appropriation des projets et à améliorer leur coordination et leur efficacité.

(40) Les programmes sectoriels nécessitent un document stratégique sectoriel intégré à un cadre stratégique général (tel que le CSLP), un cadre de dépenses sectoriel à moyen terme, un budget annuel ainsi qu'un processus de coordination entre donateurs géré par les autorités gouvernementales. Une analyse en matière de bonne gouvernance peut être effectuée à chaque étape.

(41) Les actions en matière de gouvernance peuvent faire suite à des approches sectorielles et sont particulièrement indiquées dans le cas de réformes administratives (programmes de réforme du secteur public, décentralisation, réforme du système de sécurité, réforme de l'appareil judiciaire, etc.). Dans certains cas, il est nécessaire de collaborer avec des acteurs non étatiques.

(42) L'intégration du renforcement des capacités institutionnelles dans les programmes sectoriels contribue à la bonne gouvernance. Dans des domaines tels que les transports, la santé ou l'éducation, elle se fait par le biais de l'appui apporté, d'une part, aux institutions concernées en matière d'élaboration des politiques, de leur suivi et de leur mise en oeuvre et, d'autre part, à la programmation et à la gestion budgétaires.

2.9. Appui budgétaire

(43) La première fois que la CE a apporté un appui budgétaire aux programmes de réforme économique des pays ACP remonte à une quinzaine d'années, dans le contexte des programmes d'ajustement structurel convenus par les pays avec les institutions de Bretton Woods. Ces derniers temps, cet appui budgétaire bénéficie de plus en plus souvent à des régions situées à l'extérieur des ACP.

(44) L'une des conditions sine qua non d'un appui budgétaire efficace est une bonne (ou meilleure) gestion des finances publiques. Un appui budgétaire est une incitation supplémentaire à procéder à des réformes en ce sens qu'il mobilise des fonds liés à des objectifs définis (basés sur des indicateurs de progrès) portant sur une meilleure gestion des finances publiques. En fournissant des crédits par le biais des budgets nationaux, il permet à la Commission d'avoir son mot à dire dans le dialogue relatif aux systèmes budgétaires. Les rapports annuels sur les résultats obtenus contribuent à renforcer le sentiment qu'ont les pays d'être tenus de rendre des comptes. De plus, l'utilisation accrue qui est faite des rapports périodiques présentés par ces pays à leur propre parlement pour les actions d'appui budgétaire de la CE vise à améliorer la qualité et le contenu de ces rapports et à promouvoir ainsi la responsabilisation des gouvernements devant leurs parlements respectifs. Elle contribue également à réduire certaines pressions très fortes sur les budgets nationaux, qui sont souvent elles-mêmes à l'origine de difficultés de gestion des finances publiques.

(45) L'approche de la Commission en matière d'appui budgétaire, qui consiste à lier les montants octroyés à la concrétisation d'objectifs convenus dans le domaine de la réduction de la pauvreté et de la gestion des finances publiques est une mesure d'incitation supplémentaire visant à améliorer le dialogue interne entre les ministères des finances et les principaux ministères d'exécution étant donné que les premiers ont ainsi intérêt à suivre les réalisations des seconds, d'une part, et à veiller à ce que ceux-ci bénéficient d'un financement adéquat, d'autre part. Par ailleurs, en fournissant un soutien en matière de renforcement des capacités, les opérations d'appui budgétaire contribuent à améliorer la capacité à traduire dans les faits les améliorations convenues.

(46) En outre, un appui budgétaire peut aider à résoudre les difficultés de gestion dans le domaine des finances publiques dans la mesure où le processus d'aide lui-même peut être à l'origine de difficultés pour les gouvernements. L'aide hors budget est rarement prise en compte dans les systèmes de programmation nationaux, et quasiment jamais dans les systèmes comptables. Or, l'appui budgétaire fournit un financement par le biais de ces systèmes. De ce fait, la programmation des ressources se fait sur la base d'une vue d'ensemble, plutôt que sur une vision partielle, ce qui est le cas lorsque la plupart des dépenses d'investissement sont financées hors budget par des donateurs et que leurs conséquences financières récurrentes sont invisibles pour les programmateurs. Il permet également aux parlements nationaux d'avoir une vue complète de la situation, sans les omissions et distorsions créées par les flux de donateurs hors budget, et d'améliorer l'obligation de rendre des comptes au niveau national.

(47) Parmi les résultats les plus intéressants de ces réformes, il convient de citer, dans de nombreux pays, une réduction durable du déficit budgétaire, la suppression des exemptions fiscales et tarifaires arbitraires, qui ont retardé la création de conditions équitables pour les acteurs du secteur privé, et le renforcement de la stabilité du secteur bancaire grâce à l'élimination de la pratique des prêts politiques. Toutefois, il apparaît de plus en plus clairement que les réformes ne peuvent être achetées, qu'elles n'ont pas suffisamment profité aux pauvres et qu'elles nécessitent un soutien suffisant (appropriation) dans le pays. Depuis 1999, les programmes d'ajustement structurel ont été remplacés par un appui aux stratégies nationales de réduction de la pauvreté.

(48) Conformément aux bonnes pratiques des donateurs prônées par les cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté (CSLP), l'aide fournie par ces derniers doit être affectée à un programme national de réformes et à sa concrétisation en termes budgétaires et s'aligner sur ceux-ci. Dans de nombreux pays bénéficiant d'un tel cadre, les donateurs conviennent de cadres conjoints dans lesquels sont inscrits les principes régissant l'appui budgétaire et qui décrivent, souvent sous forme de tableau, les domaines et les résultats escomptés sur lesquels ils souhaitent axer leur dialogue avec les gouvernements. L'amélioration de la gouvernance économique par le renforcement de l'efficacité, de l'efficience et de la transparence des dépenses publiques et l'amélioration des services sociaux apportés aux pauvres sont des éléments essentiels de ce dialogue entre donateurs et gouvernements. La plupart des pays dotés d'un DSRP ont commencé à améliorer la viabilité des dépenses publiques en instaurant un objectif à moyen terme sous forme de cadres budgétaires ou de dépenses à moyen terme. Par ailleurs, on observe un recours accru à des études de suivi portant sur les dépenses dans le secteur social en vue de déterminer dans quelle mesure les fonds alloués par le gouvernement central atteignent le bénéficiaire final.

2.10. Commerce

(49) La gouvernance à tous les niveaux est d'une importance cruciale pour l'intégration des pays en développement dans le système commercial multilatéral et la création d'un environnement commercial attractif et propice à l'investissement et au commerce. Elle est dès lors vitale pour assurer le développement économique et, donc, s'attaquer à la pauvreté et aux problèmes qui y sont liés.

(50) L'intégration des pays en développement dans le système commercial multilatéral ne dépend pas seulement d'un accès au marché digne de ce nom et d'une production domestique accrue de biens et de services négociables et exportables. Le contexte intérieur dans lequel s'inscrit la gouvernance détermine la capacité à tirer parti de la mondialisation. Les pays en développement ne pourront en effet attirer des investissements domestiques, régionaux et internationaux suffisants que s'ils disposent aussi des capacités institutionnelles appropriées, sont déterminés à mettre en place un environnement juridique, réglementaire, judiciaire et institutionnel transparent et efficace et sont capables de faire appliquer les règles et réglementations. La Commission en est tout à fait consciente, raison pour laquelle elle a adopté un cadre politique spécifique pour l'assistance technique liée au commerce qui jette les bases de la coopération dans ce domaine [9].

[9] COM (2002) 513 final, 18.09.2002

(51) Dans le cadre de sa politique commerciale et en particulier du schéma des préférences généralisées (SPG), l'UE accorde aux pays en développement un accès préférentiel aux marchés européens. Ce régime vise à soutenir le développement en accordant aux marchandises des pays en développement des niveaux de droits inférieurs à ceux appliqués aux partenaires industrialisés. Toutefois, ces préférences peuvent être retirées [10] (c'est actuellement le cas du Myanmar) lorsque des insuffisances patentes sont constatées sur le plan de la gouvernance, telles que la mise au travail de prisonniers, le recours à l'esclavage et la violation du droit d'association. De plus, le SPG comporte un certain nombre d'incitants positifs, tels que l'octroi de préférences supplémentaires aux pays qui ont intégré des conventions de l'OIT dans leur législation nationale et/ou qui assurent une gestion durable de leurs forêts. Par le biais de ces mesures d'incitation positives et négatives, l'UE cherche donc à favoriser la bonne gouvernance dans les domaines liés au commerce.

[10] En vertu de l'article 26 du SPG.

2.11. Rôle des entreprises

(52) La promotion du développement social dans les pays en développement ne peut, d'une manière générale, être durablement assurée par le seul secteur public. Les entreprises privées peuvent elles aussi jouer un rôle important.

(53) Dans les pays en développement, les mauvaises performances en termes de gouvernance (administrations inefficientes, manque de responsabilisation et de transparence financière, corruption, systèmes financiers inefficients et autres défaillances des pouvoirs publics) constituent un sérieux élément dissuasif pour l'investissement, l'épargne et la mobilisation des ressources, tant au niveau national qu'international. Une détérioration rapide de la gouvernance risque même de provoquer des sorties de capitaux soudaines, voire une fuite des capitaux. L'assiette fiscale étant généralement très réduite, les recettes fiscales sont souvent insuffisantes pour financer de manière adéquate le secteur de la santé et d'autres services sociaux. Seule une croissance économique forte et durable peut créer la richesse nécessaire pour lutter efficacement contre la pauvreté et faire en sorte que les recettes fiscales soutiennent les fondements du secteur public. Un secteur commercial dynamique est le principal moteur de la croissance économique. Les investissements directs étrangers (IDE) peuvent jouer un rôle capital dans les pays en développement. Pour attirer ces IDE, les pays doivent créer un environnement propice. La prévisibilité, l'obligation de rendre des comptes et la transparence du gouvernement en font partie. Tout comme l'application cohérente de politiques économiques saines et la promotion d'un cadre macroéconomique associé à un cadre réglementaire et juridique fort pour protéger les citoyens contre la coercition, l'arbitraire et la corruption. Les investisseurs nationaux et étrangers doivent être assurés que leurs avoirs seront en sécurité et que les obligations contractuelles seront respectées.

(54) Un dialogue réel et un partenariat solide entre secteurs public et privé sont des éléments importants pour promouvoir le développement durable et devraient englober un certain nombre de questions telles que les droits de l'homme et la responsabilité sociale des entreprises (RSE). La RSE [11] est une notion selon quelle les entreprises intègrent dans leurs activités commerciales des préoccupations sociales et environnementales et consultent les acteurs concernés de manière volontaire. Les pratiques sociales et environnementales volontaires des entreprises, qui vont au-delà de leurs obligations légales actuelles, peuvent jouer un rôle majeur pour combler de manière novatrice le fossé de la gouvernance. La RSE ne doit pas se substituer à une législation stricte et au dialogue social, mais bien les compléter. En tant que telle, elle ne doit pas nuire à la mission des pouvoirs publics d'établir des règles contraignantes, au niveau national et/ou international, pour faire respecter certaines normes sociales, environnementales ou d'information. Des questions comme l'application des normes sociales fondamentales, le développement des ressources humaines et de conditions de travail décentes, la transparence financière et la protection de l'environnement peuvent toutes tirer profit d'un engagement responsable du secteur privé.

[11] COM (2002) 347 final, juillet 2002, "Responsabilité sociale des entreprises: une contribution des entreprises au développement durable"

(55) L'adoption, en août 2003, du projet de normes des Nations unies sur les responsabilités des sociétés transnationales et autres entreprises commerciales en matière de droits humains [12] met en lumière la reconnaissance croissante des responsabilités des entreprises à l'égard de leurs parties prenantes. Ces normes réunissent, en une sorte de recueil, les principes éthiques qui régissent les obligations légales des sociétés en matière de droits humains et de normes sociales et environnementales et fournissent un certain nombre de conseils aux sociétés opérant en zone de conflit.

[12] Projet de normes sur les responsabilités des sociétés transnationales et autres entreprises commerciales en matière de droits humains. E/CN.4/Sub.2/2003/12/Rev.1

(56) En adoptant une résolution sur un "code de conduite pour les entreprises européennes opérant dans les pays en voie de développement" [13], le Parlement européen a reconnu l'influence exercée par le secteur privé européen sur les processus de développement, sur l'environnement et les droits de l'homme dans les pays en développement dans lesquels ils opèrent.

[13] Normes communautaires applicables aux entreprises européennes opérant dans les pays en développement: Vers un code de conduite européen (A4-0508/98). Rapport du Parlement européen.

(57) Les principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales constituent un vaste recueil, faisant aujourd'hui autorité, de principes et normes non contraignants à l'intention des entreprises qui souhaitent se conduire, de manière responsable, dans un certain nombre de domaines tels que les droits de l'homme, les normes sociales fondamentales et la lutte contre la corruption. Les principes directeurs ont une portée universelle étant donné qu'ils sont recommandés par les gouvernements des 37 pays adhérents aux entreprises multinationales établies dans ces pays, où qu'elles opèrent dans le monde [14]. La Commission a joué un rôle actif dans la promotion de ces principes directeurs.

[14] LES PAYS ADHERENTS SONT LES 30 MEMBRES DE L'OCDE AINSI QUE L'ARGENTINE, LE BRESIL, LE CHILI, L'ESTONIE, ISRAËL, LA LITHUANIE ET LA SLOVENIE. L'ADHESION DE LA LETTONIE EST EN COURS DE FINALISATION ET UNE DEMANDE DE SINGAPOUR EST A L'EXAMEN.

3. PRATIQUES ET APPROCHES DES PAYS PARTENAIRES

(58) Le lancement de l'Union africaine (UA) et la création du nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) ont conduit à un nouveau niveau de gouvernance panafricain. Les dirigeants africains sont convenus que la paix et la sécurité, la démocratie, la bonne gouvernance, les droits de l'homme et une gestion saine sont quelques-unes des conditions indispensables au développement durable et à l'éradication de la pauvreté et nécessaires pour mettre un terme aux conflits armés sur le continent.

(59) L'approche suivie par le NEPAD en matière de gouvernance est énoncée dans la déclaration des chefs d'État et de gouvernement sur la démocratie et la gouvernance politique, économique et d'entreprise [15].

[15] Assemblée des Chefs d'Etat et de gouvernement, 38ème session ordinaire de l'organisation de l'Unité africaine, 8 juillet 2002, Durban, Afrique du Sud

(60) L'un des faits marquants de l'initiative est le mécanisme africain de révision par les pairs (MARP), qui est un instrument auquel les États membres de l'Union africaine adhèrent librement et un mécanisme africain d'autocontrôle. Quinze pays africains ont déjà signé un protocole d'accord en vue d'adhérer au processus MARP. L'objectif est de faire en sorte que les politiques et pratiques des membres soient conformes aux valeurs, codes et normes de gouvernance politique, économique et d'entreprise énoncés dans la déclaration du NEPAD. Pour accéder au processus de révision par les pairs, chaque État est tenu de définir clairement un programme d'action, à réaliser dans un délai déterminé, en vue de mettre en oeuvre la déclaration sur la gouvernance, y compris les révisions périodiques. Le MARP pourrait inciter des pays à prendre sérieusement en compte l'impact des politiques nationales, non seulement sur la croissance économique et la stabilité politique internes, mais aussi sur les pays voisins, et à promouvoir une responsabilité mutuelle.

(61) Dans d'autres régions, un large éventail de groupements, d'enceintes et d'accords de coopération régionaux et sous-régionaux abordent le thème de la gouvernance. La gouvernance figure en bonne place dans le programme (présentation de rapports généraux à l'assemblée générale notamment) de l'Organisation des États américains (OEA). Dans le domaine de la lutte contre la corruption, l'OEA a ainsi mis en place un mécanisme global de suivi de la convention interaméricaine contre la corruption, et notamment un mécanisme spécifique destiné à associer la société civile. La gouvernance démocratique est également l'une des cinq priorités d'action que le groupe de Rio a définies lors de son dernier sommet à Cuzco (mai 2003). Les pays y ont confirmé leur engagement en faveur de la consolidation de la démocratie, de l'État de droit et de la nécessité d'établir des systèmes politiques plus efficaces. C'est également le cas en Asie, où les questions de gouvernance sont inscrites prioritairement à l'ordre du jour des pays asiatiques ou de leurs groupements, en particulier depuis la crise financière asiatique. Le débat dans cette partie du monde se focalise sur la place des pouvoirs publics dans l'économie, appelés à jouer un rôle moins envahissant et moins direct, en mettant en oeuvre des principes économiques fondés sur les lois du marché, en promouvant l'intégration commerciale régionale, en renforçant les marchés financiers nationaux et en élargissant les possibilités d'apporter une réponse collective aux menaces potentiellement déstabilisatrices, etc. Les banques régionales de développement, telles que la Banque asiatique de développement (ADB) et la Banque interaméricaine de développement (IDB), qui appartiennent majoritairement à des pays partenaires ayant de vastes missions de développement, considèrent également les problèmes de gouvernance (par exemple, dans le cadre de la modernisation de l'État et des réformes du secteur public) comme des domaines prioritaires de leurs politiques et de leurs interventions. De plus, s'agissant en particulier de l'IDB, cette banque a, dans le cadre de la "modernisation de l'État", récemment élaboré un cadre stratégique pour la réforme de l'État et la consolidation de la gouvernance démocratique.

4. VERS UNE APPROCHE PLUS DYNAMIQUE ET VOLONTARISTE

4.1. Un agenda stratégique pour la gouvernance

(62) La gouvernance peut s'appréhender sous des angles différents selon les situations propres à chaque pays. Les orientations politiques différeront selon qu'il s'agit de partenariats difficiles, de situations postconflictuelles ou de partenariats efficaces. La bonne gouvernance doit être analysée et promue sur une base nationale spécifique. Elle ne peut s'appréhender sur la base d'un modèle universel, mais plutôt sur la base de situations existantes. Cela implique un processus de renforcement progressif d'institutions responsables, efficaces et démocratiques et l'instauration d'un dialogue ouvert avec les acteurs non étatiques, y compris les partenaires sociaux et économiques et les autres organisations de la société civile. La viabilité institutionnelle et le renforcement des capacités constituent des éléments-clés de tout programme axé sur la gouvernance.

(63) De par sa présence dans pratiquement tous les pays en développement et en transition et au travers de ses politiques et son vaste éventail d'instruments, la CE est rompue à la fourniture d'une assistance et au maintien d'un dialogue avec des gouvernements confrontés à des situations nationales différentes. En tout état de cause, la ligne politique et l'appui fourni par la CE en matière de gouvernance sont intégrés dans ces instruments normaux de coopération. Selon la situation particulière de chaque pays, il peut s'agir des instruments suivants:

* dialogue,

* aide humanitaire,

* aide au développement au sens le plus large, comprenant notamment:

- l'appui au renforcement des capacités institutionnelles;

- l'appui à la décentralisation administrative, l'appui électoral et l'appui aux acteurs non étatiques,

- l'appui aux activités déployées dans le domaine des droits de l'homme.

Les instruments techniques et financiers comprennent notamment des projets, des programmes sectoriels et un appui budgétaire, le financement de coûts récurrents ainsi que la fourniture d'une assistance technique. Dans toutes ses interventions, la CE cherche à renforcer la cohérence, la complémentarité et la coordination avec les politiques de la CE et des États membres de l'Union européenne ainsi qu'avec les autres bailleurs de fonds afin de renforcer l'efficience et à adresser des signaux cohérents aux gouvernements et aux populations des pays partenaires.

(64) Dans ce contexte, le dialogue devrait servir à assurer des contacts réguliers avec les pays partenaires et aller au-delà des situations de crise imminentes ou en cours. Il devrait inclure une évaluation régulière et, si possible, commune des progrès concernant le respect des droits de l'homme, les principes démocratiques, l'État de droit et la bonne gouvernance. Une coordination plus étroite entre l'Union européenne, les États membres et les autres bailleurs de fonds peut contribuer à renforcer l'efficacité du dialogue.

(65) Traiter des partenariats difficiles est un problème que la communauté internationale doit continuer à chercher à résoudre. La coopération au développement avec ces pays nécessite des approches spécifiques, qui s'attaquent aux causes des problèmes, très souvent liés à la gouvernance, ainsi qu'un éventail de mesures adaptées au contexte national spécifique.

(66) Dans les interventions liées à la gouvernance, l'Union européenne devrait envisager, lorsque le besoin s'en fait sentir, de passer d'une "approche projet" à une "approche programme sectoriel". L'objectif est de faciliter l'élaboration par les gouvernements partenaires de stratégies et de plans d'action cohérents, faisant intervenir les donateurs et les autres acteurs concernés dans un cadre et une procédure unifiés. Cette approche sectorielle offre également la possibilité d'harmoniser les pratiques et les procédures des différents donateurs et de traiter de manière coordonnée des questions telles que les coûts récurrents dans l'administration publique.

(67) Pour renforcer l'efficacité et l'impact des interventions de l'Union européenne dans le domaine de la gouvernance, ainsi que dans d'autres domaines du développement, des progrès doivent être accomplis de manière à parvenir à des politiques et à des approches communes au niveau de l'Union européenne, à des stratégies nationales/régionales et à une harmonisation des procédures. Dans l'ensemble, pour les États membres de l'Union européenne, le concept de la gouvernance s'écarte de l'accent initial mis sur les processus économiques et l'efficacité de l'administration pour se préoccuper davantage de démocratie, de justice et de participation. D'autres donateurs bilatéraux et multilatéraux tirent également des enseignements de cette expérience. Il semble en effet que l'on s'oriente généralement davantage vers des programmes de coopération bilatérale conçus à l'échelle nationale. Le renforcement du cadre institutionnel et législatif en vue de consolider la viabilité des institutions, les processus de démocratisation, l'État de droit et le respect et la protection des droits de l'homme et des libertés individuelles constitue une caractéristique commune à toutes les interventions de la CE. Ces différents domaines sont à la fois des secteurs d'intervention et des questions transversales dans les documents de stratégie nationale et régionale. La CE continuera à rechercher la complémentarité et la cohérence avec les autres donateurs bilatéraux et partenaires multilatéraux.

(68) L'utilisation d'indicateurs de gouvernance présente un intérêt réciproque pour les partenaires. Ils peuvent faciliter le dialogue à l'intérieur du pays et les processus de réforme des systèmes de gouvernance (système électoral, justice) menés par le pays, comme ils peuvent améliorer la qualité des interventions dans le domaine du développement.

(69) Les approches actuelles de la gouvernance suivies par la CE dans différentes situations, c'est-à-dire les partenariats difficiles, les situations postconflictuelles et les partenariats efficaces sont présentées ci-dessous. Des études de cas ont été sélectionnées afin d'illustrer ces approches et de donner une orientation dans différents domaines et situations en tirant les enseignements du passé.

(70) La présente communication est ciblée sur les pays en développement et s'inscrit ainsi dans le droit fil de la déclaration commune du Conseil et de la Commission concernant la politique de développement de la Communauté européenne [16]. Cela étant, les expériences menées dans d'autres pays et régions peuvent apporter un éclairage intéressant sur les approches et pratiques utiles pouvant éventuellement être partagées par d'autres régions.

[16] COM(2000) 212 final, 26.4.2000

(71) Les Balkans occidentaux peuvent illustrer la politique menée par l'Union européenne dans un contexte postconflictuel.

BALKANS OCCIDENTAUX

PRINCIPALES CONTRAINTES QUI PÈSENT SUR LE DÉVELOPPEMENT: la situation post-conflictuelle et l'héritage laissé par la partition de la Fédération yougoslave sont les deux faits marquants. De plus, des complexités institutionnelles spécifiques ont été induites par les accords de paix (présidence tricéphale de la BiH, nouvelle constitution pour la Serbie-et-Monténégro, Kosovo sous administration des Nations unies, accord d'Ohrid dans l'ARYM). La communauté internationale, chargée de l'administration totale ou partielle de vastes entités (mandats des Nations unies pour la BiH et le Kosovo notamment) a été fortement impliquée. D'autres contraintes sont notamment la nécessité de créer des services entièrement nouveaux dans les États qui ont succédé à l'ex-Yougoslavie (par exemple des services nationaux de contrôle des frontières), la délimitation et le contrôle des frontières ainsi que les risques de litiges liés aux problèmes de cadastre et de revendication de propriété. La région est également confrontée aux défis traditionnels que pose tout passage d'un système socialiste à une démocratie véritable et une économie de marché performante. Le processus de stabilisation et d'association (PSA) mis en place par l'Union européenne doit aider ces pays à relever ces défis institutionnels, à établir une relation de partenariat, à s'engager sur la voie de la réappropriation et à progresser sur la voie de l'intégration européenne.

PRINCIPALES MESURES/RÉPONSES POLITIQUES: La reconnaissance du fait que les pays des Balkans occidentaux sont des candidats potentiels à l'adhésion à l'Union européenne (Conseil européen de Feira, juin 2000, réaffirmée à Copenhague, décembre 2002 et Thessalonique, juin 2003) et que les critères de Copenhague de 1993 [17] continueront à s'appliquer se trouve au coeur de la politique menée par l'Union européenne à l'égard de la région - matérialisée par le Processus de stabilisation et d'association (PSA). L'appui à la réforme du système de gouvernance et des institutions est donc prédéterminé par une perspective plus large: l'adoption par les pays des Balkans occidentaux des normes européennes dans les domaines politique, économique et législatif. Il convient de souligner en particulier que l'Union européenne s'attache à tirer parti de l'expérience très précieuse qu'elle a acquise tout au long du processus d'élargissement (expérience de la transition postcommuniste, expérience de l'alignement sur l'acquis en Europe centrale et orientale). L'approche suivie est globale et couvre l'ensemble du processus de stabilisation démocratique (comprenant notamment la protection des minorités, le retour des réfugiés, etc.), une éventuelle réforme constitutionnelle, l'État de droit (y compris la réforme de la police et du système judiciaire, la lutte contre la corruption), la réforme de l'administration publique, la gouvernance économique (dépenses publiques, gestion, processus de privatisation, respect des droits de propriété) et le renforcement de la capacité à répondre aux obligations du PSA (facilitation des échanges et coopération statistique par exemple). L'aide apportée par la Communauté dans le cadre du programme CARDS affecte actuellement 40 % des ressources aux actions visant à relever les défis institutionnels et à satisfaire les besoins en matière de renforcement institutionnel. Une assistance macrofinancière (AMF), qui contribue de manière importante à l'amélioration de la gouvernance économique, est fournie à titre exceptionnel, pour appuyer les économies des Balkans occidentaux. De plus, la CE développe ses stratégies dans le domaine de la justice et des affaires intérieures, notamment en aidant les pays des Balkans occidentaux à renforcer leur capacité de lutte contre la criminalité organisée. Des efforts intensifs sont consacrés au développement d'une gestion intégrée des frontières. La migration et le droit d'asile constituent également des lignes de force de l'intervention.

[17] Adoptés lors du Conseil européen de Copenhague (1993); les critères d'adhésion à l'UE se fondent notamment sur la stabilité de la démocratie, le respect des droits de l'homme, la primauté du droit, la protection des minorités, une économie de marché en état de fonctionnement et l'adoption des règles, normes et politiques communes qui constituent le corps de la législation de l'UE.

4.2. Partenariats difficiles

(72) Les partenariats difficiles se caractérisent par un manque d'engagement en faveur de la bonne gouvernance. Ils se différencient des cas de faible gouvernance où, malgré les efforts et l'engagement du gouvernement, les capacités et les résultats sont limités.

(73) Les bailleurs de fonds ne peuvent se permettre de complètement abandonner les mauvais élèves ou les partenariats difficiles, en particulier pour les trois raisons suivantes: (1) pour des raisons de solidarité: les populations ne doivent pas payer le prix d'un manque d'engagement de leurs gouvernements; (2) pour des raisons de sécurité, liées aux dangers que représente le fait d'isoler un pays et de laisser l'extrémisme et le terrorisme s'installer dans des États faillis; (3) pour des raisons d'efficacité de l'aide à plus long terme, compte tenu des risques et coûts potentiellement élevés associés à l'abandon durable d'un pays (augmentation de la pauvreté, effondrement des institutions, paralysie du secteur privé, pour autant que celui-ci existe) et des risques de contagion (extension des conflits aux pays voisins ou à la communauté internationale).

(74) En conséquence, plutôt que de se retirer totalement d'un pays, l'Union européenne et les autres donateurs devraient trouver des points d'entrée et des approches alternatives en ce qui concerne la coopération avec le pays en question.

(75) Les partenariats difficiles couvrent aussi bien les pays dans lesquels l'approche de la CE en matière de gouvernance prévoit la tenue d'un dialogue et l'octroi d'un appui financier dans le cadre de différents instruments financiers que les pays caractérisés par des partenariats extrêmement difficiles, avec lesquels la coopération a été suspendue.

(76) Les points d'entrée sont particulièrement difficiles à trouver dans les cas les plus extrêmes, c'est-à-dire ceux dans lesquels "des mesures appropriées" ou des sanctions ont parfois été prises ou doivent être prises par la communauté internationale. Même dans ces situations, les activités suivantes peuvent néanmoins encore être maintenues:

* assistance humanitaire ou aide alimentaire, à condition que leurs principes de base continuent à être respectés (accès à l'aide pour toutes les personnes touchées, indépendamment de la sensibilité politique, du sexe, etc.);

* appui aux activités déployées par les organisations de la société civile, notamment pour appuyer les droits de l'homme ou couvrir les besoins fondamentaux de la population;

* initiatives politiques lancées aux niveaux international ou régional afin de trouver une solution durable à la crise;

* lorsque les articles 96 ou 97 de l'accord de Cotonou ou d'autres procédures de consultation pertinentes ont été mises en oeuvre, la tâche de la CE est de contrôler l'agenda des mesures correctives qui ont été décidées, y compris celles que le pays partenaire s'est engagé à adopter. À l'issue des consultations, les adaptations nécessaires à ces mesures doivent être identifiées et évaluées, si possible conjointement. Si les consultations sont couronnées de succès et les mesures pertinentes sont effectivement mises en oeuvre par le gouvernement, ces cas peuvent peu à peu évoluer vers un partenariat plus efficace.

(77) CORÉE DU NORD

PRINCIPALES CONTRAINTES QUI PÈSENT SUR LE DÉVELOPPEMENT - La situation économique et sociale dans la RPDC est très mauvaise. L'aide humanitaire internationale a permis d'éviter les conséquences les plus dramatiques de la famine et de l'effondrement économique, mais n'a cependant pas permis d'insuffler un nouvel élan à l'économie et d'améliorer les conditions sociales de la population nord-coréenne. En dépit des réformes économiques introduites en juillet 2002 (liberté des prix et des salaires, suppression du système de distribution publique de denrées alimentaires, acceptation des marchés agricoles), les clés de voûte d'une reprise économique durable font défaut. La RPDC ne dispose tout simplement pas des ressources nécessaires à la reconstruction de sa base agricole, industrielle, infrastructurelle et sociale. Cette situation ne peut être retournée sans: i) un engagement en faveur des réformes politiques et institutionnelles nécessaires pour mettre l'économie durablement sur la voie de la croissance (introduction de principes de gouvernance et instauration de l'État de droit, de la transparence et d'une société sociale, qui font actuellement défaut); et ii) l'établissement de relations économiques avec la communauté internationale afin d'attirer le commerce, les investissements et l'aide économique nécessaires pour assurer un développement économique à moyen et long termes. La crise nucléaire nord-coréenne actuelle ne facilite pas les choses et constituera une entrave à l'indispensable soutien économique international tant qu'elle ne sera pas résolue.

PRINCIPALES RÉPONSES/MESURES POLITIQUES - En dépit de la crise nucléaire qui a éclaté en octobre 2002, l'Union européenne continue de fournir une aide humanitaire et alimentaire. Depuis 1995, l'Union européenne fournit à la RPDC une aide alimentaire et humanitaire, qui totalise aujourd'hui 283 millions d'euros. Malgré la situation politique, le CAGRE du 18 novembre 2002 a décidé que l'Union européenne devait poursuivre son aide humanitaire et alimentaire en faveur de la Corée du Nord.

Le document de stratégie nationale 2001-2004 pour la RPDC avait prévu une enveloppe de 15 millions d'euros pour des projets d'assistance technique qui devaient aider la Corée du Nord à élaborer les réformes économiques nécessaires dans le cadre d'un vaste programme de formation et de renforcement des institutions. La mise en oeuvre de cette aide à la coopération économique (qui aurait dû commencer par deux projets-pilotes axés sur la formation aux principes de l'économie de marché et le rendement énergétique, dotés chacun d'un million d'euros, auxquels devaient s'ajouter 15 millions d'euros pour les activités de suivi), a été suspendue compte tenu de la situation politique actuelle. L'Union européenne est toutefois disposée à réactiver sa coopération économique avec la Corée du Nord si la crise actuelle peut être résolue de manière satisfaisante.

Dans le cadre du dialogue politique mené avec la Corée du Nord, et en particulier lors de la dernière réunion qui s'est tenue en juin 2002 à Pyongyang, l'Union européenne a fait part de ses préoccupations concernant la situation des droits de l'homme dans la RPDC. Des progrès ont été enregistrés dans les discussions et la RPDC a fait preuve d'une attitude plus constructive concernant les droits de l'homme, notamment en évoquant de manière positive le rôle des ONG et en promettant de résoudre les problèmes concernant leurs conditions de travail. L'Union européenne a demandé que les réfugiés rentrant de Chine soient traités de manière humaine, étant donné que ce pays avait durci sa position dans ce domaine après une série d'incidents provoqués par des réfugiés nord-coréens sollicitant l'asile dans des ambassades étrangères à Beijing. L'Union européenne a par ailleurs déposé une résolution sur la situation des droits de l'homme en Corée du Nord lors de la session de la Commission des droits de l'homme des Nations unies, qui s'est tenue à Genève. Cette résolution a été adoptée le 16 avril.

(78) Dans les partenariats moins dramatiques mais néanmoins toujours difficiles, la ligne et l'appui politiques de la CE peuvent être intégrés dans ses instruments normaux de coopération. Les principales priorités sont généralement les suivantes:

* maintien d'un dialogue régulier avec les autorités des pays partenaires;

* appui au renforcement des capacités institutionnelles;

* appui aux droits de l'homme et aux autres activités liées à la gouvernance;

* projets ou programmes visant à satisfaire les besoins fondamentaux des groupes les plus vulnérables, et notamment à améliorer la qualité des services fournis aux pauvres et à promouvoir la société civile, en particulier dans le cadre d'actions destinées à soutenir les acteurs non étatiques et à coopérer avec ceux-ci.

(79) ANGOLA

PRINCIPALES CONTRAINTES QUI PÈSENT SUR LE DÉVELOPPEMENT - Après 28 années de guerre civile, qui ont empêché l'émergence d'institutions et de pratiques démocratiques stables et responsables, l'Angola manque toujours des ressources humaines nécessaires et ne dispose, dans la situation post-conflictuelle, que d'une faible capacité institutionnelle. Les bases sur lesquelles repose la réorganisation d'un système juridique indépendant sont très fragiles. Des problèmes particuliers se posent en ce qui concerne la transparence des finances publiques, notamment le fait qu'une grande partie des revenus du pétrole n'apparaît pas dans le budget, ce qui signifie que les revenus tirés par l'Angola de ses vastes ressources naturelles pourraient être mieux gérés au bénéfice de sa propre population. Les organisations de la société civile sont encore très fragiles et la situation des droits de l'homme demeure médiocre. La corruption est généralisée. Le gouvernement angolais et la CE ont une perception différente des priorités actuelles. Pour le gouvernement, les réformes institutionnelles ne viennent qu'au deuxième rang des priorités après la réhabilitation physique. La CE exprime de vives inquiétudes en ce qui concerne la mise en oeuvre des principaux programmes de réforme institutionnelle, notamment dans le secteur de la justice et de l'administration publique.

PRINCIPALES RÉPONSES/MESURES POLITIQUES - Trois éléments distincts interviennent dans le traitement des problèmes de gouvernance. La première priorité dans cette situation postconflictuelle était de faire face à l'urgence, c'est-à-dire essentiellement apporter une aide humanitaire. Les autres problèmes sont pour l'instant relégués à l'arrière-plan. Ensuite, il a fallu tenir compte du contexte dans lequel se déroule la coopération, à savoir l'accord de Cotonou et les engagements internationaux en matière de gouvernance. Dans ce contexte, le dialogue politique entre en jeu et, dans le cas de l'Angola, il y a eu une interaction étroite entre la position commune et la stratégie en matière de coopération (DSN/PIN). Compte tenu de ces aspects et du principe d'établissement de liens entre l'aide d'urgence, la réhabilitation et le développement, qui est à la base de la stratégie de coopération CE/Angola, l'approche suivie est une approche progressive, pas à pas, fondée sur la situation évolutive (postconflictuelle) du pays et sur le passage de l'aide d'urgence à une aide à la réhabilitation. Cette approche globale a conduit à la sélection de points d'entrée et d'instruments appropriés. La position commune du Conseil du 25.6.2002 [18] met fortement l'accent sur la bonne gouvernance, qui doit être l'instrument qui établit le lien entre les volets politiques et de réduction de la pauvreté et de la coopération et constitue ainsi le cadre du dialogue politique. Le manque de transparence des revenus pétroliers est l'un des principaux points de discussion entre le gouvernement et les donateurs. Le gouvernement a indiqué qu'il s'engageait à gérer le budget de manière parfaitement transparente. Cette déclaration positive pourrait permettre d'entamer un dialogue sur les réformes liées à la gouvernance. S'agissant de la transparence des revenus pétroliers, un processus similaire à celui de Kimberley [19] pourrait être envisagé. Des discussions et des développements sur ce point pourraient avoir lieu en dehors des domaines classiques de la coopération dans une sorte de stratégie des donateurs qui ne revêtirait pas la forme d'une aide. L'initiative "publiez ce que vous payez", qui propose de garantir la transparence des revenus pétroliers en obligeant les compagnies pétrolières cotées en bourse aux États-Unis et dans l'Union européenne à publier les sommes qu'elles ont versées aux gouvernements des pays tiers, pourrait être un instrument utile dans ce contexte. Il en va de même de l'initiative EITI (Extractive Industries Transparency Initiative) lancée par le Royaume-Uni en juin 2003, qui s'appuie sur l'initiative "publiez ce que vous payez". Pour l'heure, l'Angola a décidé de se limiter au statut d'observateur dans ce processus.

[18] JO L 167, 26.6.2002.

[19] Le processus de Kimberley est une initiative globale qui doit mettre un terme au commerce des "diamants de la guerre" en établissant que les gemmes exportées ne peuvent provenir de zones de conflit.

(80) BANGLADESH

PRINCIPALES CONTRAINTES QUI PÈSENT SUR LE DÉVELOPPEMENT - La bonne gouvernance a été identifiée comme le plus grand défi posé en termes de développement au Bangladesh, compte tenu de l'ampleur des problèmes de gouvernance et de leurs effets néfastes sur la pauvreté et le développement. La situation est particulièrement critique dans le domaine de la gouvernance politique, où les questions les plus urgentes à résoudre sont les suivantes: (1) mise en place d'une stratégie globale de lutte contre la corruption et d'une commission de lutte contre la corruption indépendante et efficace; (2) la reforme du secteur de la justice criminelle, et notamment une réforme globale des services de police et la séparation entre les pouvoirs judiciaire et exécutif; (3) la décentralisation et l'amélioration de l'efficacité des services fournis par les collectivités locales; (4) l'institutionnalisation et la promotion des droits de l'homme et la création d'une commission indépendante des droits de l'homme et d'un médiateur.

PRINCIPALES RÉPONSES/MESURES POLITIQUES - L'approche adoptée par la CE est double, puisqu'elle fait partie de la communauté internationale des donateurs mais qu'elle est également partenaire bilatéral. En tant que membre de la communauté internationale des donateurs, la CE a engagé l'État sur la voie d'un dialogue politique par l'octroi d'un appui à des programmes sectoriels. Au niveau bilatéral, l'accord de coopération de 2001 a renforcé le rôle de la gouvernance dans les relations CE-Bangladesh. Bien que le financement d'actions spécialement liées à la gouvernance dans le cadre du PIN soit limité par rapport à l'ampleur du problème, la bonne gouvernance constitue un thème transversal important du PIN. La CE s'est récemment engagée dans un dialogue politique avec l'État, qui s'avère constructif et fructueux. Depuis la dramatique opération "Coeur propre", l'état déplorable dans lequel se trouve la gouvernance figure parmi les priorités du programme politique des institutions de l'Union européenne. Alors que le Bangladesh vit assez mal certaines remontrances publiques, des contacts récents ont néanmoins montré que le message adressé par l'UE dans le domaine de la gouvernance commence à être pris plus au sérieux.

4.3. Situations post-conflits

(81) Bien souvent, on constate que dans une situation postconflictuelle, les institutions de l'État soit fonctionnent mal, soit sont inexistantes. Leurs capacités à fournir des services publics sont fortement limitées. Un cessez-le-feu ou un accord de paix, qui constituent le cadre de la réhabilitation du pays, comportent les processus de démocratisation et de réconciliation nationale ainsi qu'une stratégie de développement économique. Un mécanisme de dialogue entre les représentants du pays et la communauté des donateurs est généralement mis en place. Celui-ci vise à faciliter les discussions entre partenaires concernant l'aide à apporter au pays dans son processus de transition sur la voie du développement à long terme.

(82) Le principales priorités dans un contexte postconflictuel sont généralement les suivantes:

* identification des causes profondes du conflit;

* aptitude et volonté des différents acteurs (gouvernement, autorités parlementaires et judiciaires, partis politiques, société civile) à s'attaquer aux causes profondes du conflit;

* démarches à entreprendre dans le cadre du processus de réconciliation;

* volonté des autorités de prendre en compte les questions liées à la gouvernance, qui très souvent se sont trouvées à l'origine du conflit et qui peuvent, dans certains cas, rester profondément enracinées dans l'environnement d'après-guerre;

* établissement d'un lien entre secours d'urgence, réhabilitation et développement.

(83) Pour promouvoir l'émergence d'un programme de gouvernance en faveur des pauvres et inciter le gouvernement à faire preuve d'une volonté de changement, les donateurs combinent le dialogue avec différents instruments financiers. Ils fournissent en parallèle une aide humanitaire, qui est neutre et vise à satisfaire les besoins des populations. La coordination entre les donateurs est essentielle pour parvenir à un dialogue véritable et privilégiant les résultats avec les pays partenaires.

(84) GUATEMALA

PRINCIPALES CONTRAINTES QUI PÈSENT SUR LE DÉVELOPPEMENT - Les principales contraintes sont la lenteur de la mise en oeuvre des accords de paix (AP) signés en 1996 et le peu de progrès enregistrés sur la voie de la démocratisation et du développement économique. La plupart des causes structurelles qui s'étaient trouvées à l'origine du conflit ne sont toujours pas résolues. On constate un manque à la fois de capacité institutionnelle et de volonté politique de mettre en oeuvre le processus de réforme imposé par les accords de paix. Les autres grands problèmes sont l'exclusion et la discrimination à l'encontre des populations indigènes, qui constituent la majorité de la population, le faible niveau de participation de la société civile, notamment dans les régions rurales, les menaces dirigées contre les défenseurs des droits de l'homme et le secteur de la justice, la lutte contre la corruption, le trafic de drogue et le blanchiment d'argent. La faiblesse du système judiciaire et de la police nationale contraste avec la montée de l'insécurité et l'existence supposée de structures de pouvoir parallèles. Sur le plan économique, la distribution très inégale des revenus, l'assiette fiscale très fragile et le faible niveau d'imposition par rapport au PIB sont des problèmes auxquels il convient de s'attaquer, notamment par la réforme du système fiscal.

PRINCIPALES RÉPONSES/MESURES POLITIQUES - Affectation d'une part considérable de l'assistance communautaire à des domaines liés à la gouvernance (démobilisation et réhabilitation de l'ancienne guérilla et des forces armées, amélioration de la sécurité des citoyens en créant et en assurant le fonctionnement d'une force de police civile, renforcement du système judiciaire, protection juridique des biens en introduisant un registre foncier national, appui à un médiateur national chargé des droits de l'homme). Le principal objectif du document de stratégie nationale 2002-2006 est de créer et de renforcer les conditions nécessaires à la mise en oeuvre de l'accord de paix. Le programme dans le domaine de la coopération met principalement l'accent sur le suivi de la réunion du groupe consultatif - qui doit accélérer la mise en oeuvre de l'accord de paix - et les prochaines élections législatives présidentielles qui doivent se tenir en novembre 2003, et notamment l'organisation d'une mission d'observation des élections par l'UE. Le Guatemala est également un pays de concentration visé par l'Initiative européenne pour la démocratie et les droits de l'homme. Le « Mesodialogo », qui est un forum permanent sur la coopération de la CE avec le Guatemala et qui se compose de représentants de la CE, des États membres de l'UE, du gouvernement et d'organisations européennes et locales de la société civile, appuyées par la CE, doit encore être renforcé. Dans le cadre du document de stratégie nationale 2002-2006, le Mesodialogo a contribué à préparer des actions fondamentales destinées, notamment, à renforcer la participation de la société civile et à consolider le processus de décentralisation de l'État. L'approche adoptée par la CE au niveau bilatéral est complétée par les principes et objectifs définis dans le cadre du dialogue dit de San José entre l'UE et six pays d'Amérique centrale, qui a apporté une contribution au processus de paix et de démocratisation de la région, et qui, dans un deuxième temps, a été recentré sur de nouveaux défis liés au développement social et économique durable et équitable et à l'approfondissement des relations économiques entre les deux régions.

(85) RWANDA

PRINCIPALES CONTRAINTES QUI PÈSENT SUR LE DÉVELOPPEMENT - Entre 1959 et 1994, des lois à fondement ethnique ont été introduites et plusieurs massacres ont été perpétrés à l'encontre des minorités tutsi et twa, contraintes de se réfugier massivement. La guerre civile éclate en 1990 avec l'invasion des milices rwandaises arborant la bannière de l'armée patriotique rwandaise dominée par les tutsis. Les accords d'Arusha signés en 1993 prévoient la formation d'un gouvernement à large représentation, une réduction des forces armées et un programme de transition. Le génocide des tutsis et des hutus modérés éclate toutefois en avril 1994 et rend impossible la mise en oeuvre des accords. Le génocide conduit à la perte massive de ressources humaines et à la destruction de la capacité institutionnelle, ainsi que des infrastructures sociales et économiques: quelque 800.000 personnes sont tuées, 2.000.000 de personnes trouvent refuge dans d'autres pays et 1.500.000 autres sont déplacées à l'intérieur du pays. Les conséquences de la guerre et du génocide sont à l'origine des problèmes sociaux, politiques et économiques que traverse aujourd'hui le Rwanda. Les couches éduquées de la population sont décimées (tuées, emprisonnées ou exilées). La sécurisation des frontières grève lourdement le budget et aggrave le fardeau de la dette. Les coûts d'emprisonnement des suspects du génocide et des procès, avec l'indemnisation des victimes, mettent également à mal le budget. Les coûts de la démobilisation rwandaise et du programme de réintégration sont également considérables. Le Rwanda a toujours été confronté à une pénurie de terres et à une forte pression démographique et l'intégration de milliers d'ex-combattants ne sera pas une mince affaire. Le Rwanda se reconstitue une nouvelle identité non fondée sur les caractéristiques ethniques. Il s'agira à présent - et c'est là le principal problème - de mener à bien le processus de réconciliation en assurant la transition vers la démocratie, en poursuivant devant les tribunaux les personnes accusées de participation au génocide et en améliorant la situation des droits de l'homme.

PRINCIPALES RÉPONSES/MESURES POLITIQUES - L'Union européenne et ses États membres ont été parmi les premiers acteurs internationaux à reconnaître le régime postgénocidaire. Au lendemain du génocide, la coopération de la CE a été axée sur l'aide humanitaire et la réhabilitation. Fin 1999, le Rwanda n'était plus confronté à des besoins humanitaires pressants et ECHO s'est donc retiré du pays. Les donateurs ont appuyé le programme de réforme économique et du gouvernement et certains d'entre eux, dont la CE, ont commencé à fournir une aide budgétaire. Le Rwanda a atteint le point de décision le rendant éligible à l'initiative PPLE.

Les interventions en cours mettent l'accent sur l'appui institutionnel, assorti d'un soutien technique/logistique au ministère des Finances, le recensement général de la population et l'appui à la bonne gouvernance et au secteur de la justice. Le volet "infrastructure" se concentre sur les systèmes de distribution d'eau et la gestion du réseau routier. Enfin, l'appui macroéconomique et le financement des micro-projets ruraux et des chantiers urbains à forte intensité de main-d'oeuvre s'est poursuivi. Le Programme indicatif national du 9ème FED a été signé en mars 2003, le secteur de concentration étant le développement rural, y compris l'économie rurale, ainsi que les transports et la distribution d'eau dans les régions rurales. L'appui au programme de réforme économique du gouvernement se poursuivra. L'importance du renforcement des capacités institutionnelles, la transition vers la démocratie et la justice et le renforcement des structures décentralisées et de la société civile sont également mis en avant.

Le cadre du dialogue politique est la position commune [20] de l'UE, qui est révisée annuellement. Il couvre un certain nombre d'aspects liés à la situation intérieure (jugement des génocidaires, droits de l'homme, processus de démocratisation, ...) et à la politique étrangère du Rwanda (implication dans le conflit dans la RDC, exploitation illégale des ressources naturelles de la RDC). Un envoyé spécial de l'UE pour la région des Grands Lacs a été nommé en 1996. Les chefs de délégation font régulièrement rapport sur la situation des droits de l'homme et les questions économiques. Une nouvelle constitution a été adoptée par référendum le 4 juin 2003, marquant ainsi la fin de la période de transition. Des élections présidentielles au suffrage universel direct ont eu lieu en août 2003. Ces deux processus ont fait l'objet d'une mission d'observation de l'Union européenne et, même si quelques irrégularités ont été relevées, ils ont été considérés comme un pas important sur la voie de la consolidation du processus de démocratisation. Pour achever le processus de transition vers la démocratie, des élections législatives, qui ont également fait l'objet d'une mission d'observation de l'Union européenne, ont eu lieu fin septembre/début octobre 2003. Le rapport final de la mission UE d'observation des élections, qui couvrira l'ensemble du processus électoral, est attendu d'ici la mi-octobre 2003.

[20] JO L 285, 23.10.2002

4.4. Partenariats efficaces

(86) Dans un partenariat efficace, le gouvernement s'engage en faveur d'objectifs liés au développement et fixés au niveau international. Des institutions nationales, la société civile et les donateurs prennent part aux discussions qui conduisent à une stratégie nationale de développement (ou de réduction de la pauvreté) qui est progressivement mise en oeuvre par le gouvernement avec l'aide des donateurs. Les résultats attendus dépendent, dans une large mesure, non seulement de l'engagement du pays partenaire et de la volonté politique ou de l'appui technique et financier fourni par les donateurs, mais également du niveau de viabilité institutionnelle. Tous les thèmes et questions liés à la coopération sont régulièrement et ouvertement examinés dans le cadre du dialogue normal avec le pays partenaire.

(87) Les priorités en ce qui concerne les actions à engager dans le cadre des partenariats effectifs devraient assurer l'adoption et la mise en oeuvre, dans le domaine de la gouvernance, de politiques adéquates et de programmes de réforme favorables aux pauvres. Les principales priorités sont généralement les suivantes:

* assurer un dialogue permanent et efficace avec les pays partenaires;

* apporter un concours contribuant au renforcement de la gouvernance démocratique, à la participation des citoyens et à l'accès à la justice;

* appuyer les activités déployées dans le domaine des droits de l'homme;

* renforcer la transparence, la responsabilisation et l'efficacité des institutions de l'État en appuyant le renforcement des capacités institutionnelles à tous les niveaux dans le domaine de la bonne gouvernance et de l'État de droit, notamment la réforme des services publics dans tous les domaines, la réforme du système de sécurité, la réforme du système fiscal et de l'administration, le processus budgétaire et les procédures d'audit, les statistiques, etc.;

* intégrer l'appui institutionnel dans les autres secteurs des programmes de coopération ;

* favoriser la capacité de la société civile à participer aux processus et débats conduisant à l'élaboration des politiques.

(88) RÉGION MÉDITERRANÉENNE

PRINCIPALES CONTRAINTES QUI PÈSENT SUR LE DÉVELOPPEMENT - Tous les pays MEDA sont confrontés à des défis importants, tant sur le plan politique qu'économique. Sur le plan politique, la plupart des pays allient des pratiques de gouvernance opaques à une société civile peu développée. En termes économiques, une vaste réforme structurelle est nécessaire dans la région, non seulement pour améliorer la performance des partenaires MEDA sur le plan de la croissance, mais aussi pour créer les emplois nécessaires à une population active en rapide augmentation. La stabilisation de l'emploi au niveau élevé actuel supposerait en effet un taux de croissance d'environ 7 %, largement supérieur au niveau actuel. L'incapacité d'atteindre cet objectif aggravera la pauvreté et avivera les tensions sociales, ce qui pourrait avoir d'importantes répercussions au-delà des frontières des pays concernés. La transparence des marchés et la lutte contre la corruption constituent des défis importants. Les flux d'immigrés clandestins en provenance des partenaires méditerranéens ou transitant par ces pays suscitent aujourd'hui des inquiétudes croissantes dans l'Union européenne et le problème de la migration est dès lors devenu un enjeu majeur. Pour leur part, les partenaires se plaignent du traitement réservé aux migrants régulièrement établis dans l'UE. Notre défi commun consistera à trouver une approche globalement équilibrée à l'égard de la migration. Les questions liées à la lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée et le trafic de drogue doivent également être traitées en priorité. La situation en ce qui concerne le respect des droits de l'homme et la démocratie dans la région continue à susciter des inquiétudes; les régimes autocratiques et le faible niveau de développement de la société civile conduisent à un important déficit en termes de respect des droits de l'homme et des principes démocratiques.

PRINCIPALES RÉPONSES/MESURES POLITIQUES - La réforme institutionnelle constitue un élément-clé du partenariat Euro-MED, tant au niveau de la coopération bilatérale que multilatérale. Le processus de Barcelone est mis en oeuvre dans différentes enceintes, notamment les réunions ministérielles Euro-MED, le comité Euro-MED et les différents groupes et comités techniques, au sein desquels sont examinées des questions liées à la gouvernance (réforme institutionnelle, transparence et ouverture des marchés, administration équitable de la justice, etc.). En ce qui concerne les relations bilatérales, la réforme institutionnelle est élaborée dans le cadre des accords d'association conclus avec presque l'ensemble (à l'exception de la Syrie) des partenaires MEDA. Ces accords prévoient la tenue d'un dialogue politique, l'établissement progressif du libre-échange avec l'UE et la coopération dans un certain nombre de domaines économiques, sociaux et culturels.

Dans sa communication sur l'initiative "Europe élargie et nouveau voisinage", la Commission a présenté un projet ambitieux: la création d'un espace élargi de paix, de stabilité et de prospérité englobant les voisins de l'Est et du Sud (pays méditerranéens) sur la base de valeurs communes et d'une intégration approfondie. En contre partie des progrès réalisés dans la mise en oeuvre des réformes politiques, économiques et institutionnelles, les voisins de l'UE devraient, à terme, bénéficier de liens politiques et économiques plus étroits avec l'Union européenne. Cet objectif sera mis en oeuvre dans le cadre de plans d'actions qui couvriront, notamment, les réformes visant à renforcer la démocratie et le respect des droits de l'homme, la bonne gouvernance et l'État de droit.

L'appui aux réformes politiques et à la gestion économique constitue un axe majeur des relations que l'UE entretient avec ses partenaires méditerranéens, notamment sous forme de sessions régulières organisées dans le cadre du dialogue économique mené au niveau bilatéral et régional. Le dialogue sur les politiques économiques et les cadres juridique et réglementaire se double d'une assistance politique comprenant notamment la modernisation du processus budgétaire afin d'accroître la transparence et les mécanismes de contrôle dans le domaine des finances publiques et des institutions. Une assistance technique appropriée est également fournie afin de faciliter le processus de réforme.

La coopération dans le domaine de la justice et des affaires intérieures dans la région méditerranéenne est un phénomène récent. Réunis à Valence en avril 2002, les ministres des affaires étrangères ont pour ce faire adopté un document-cadre visant à élaborer un programme Euro-MED dans le domaine de la coopération judiciaire et la lutte contre le terrorisme, le trafic de drogue et la criminalité organisée, ainsi que la coopération sur des questions liées à l'intégration sociale des migrants, la migration et les flux de populations. Un plan d'action régional "Justice et affaires intérieures" a été adopté lors de la réunion ministérielle Euro-MED qui s'est tenue à Valence. Après plusieurs réunions et un atelier de cinq jours (juin 2003) avec les partenaires MEDA, des priorités ont été définies. Les experts et les praticiens des États membres et des pays méditerranéens vont à présent collaborer pour créer des outils/programmes communs pour la formation des juges, des procureurs et de la police dans les grands domaines prioritaires que sont le terrorisme, la criminalité organisée et le blanchiment d'argent. Des programmes JAI ont également été inclus dans plusieurs programmes indicatifs nationaux.

Les droits de l'homme et la démocratie sont renforcés avec les partenaires MEDA dans le cadre des accords d'association, de l'initiative IEDDH et du programme MEDA. Très récemment, la Commission a adopté une communication sur la nouvelle impulsion à donner aux actions menées par l'UE dans le domaine des droits de l'homme et de la démocratisation, en coopération avec les partenaires méditerranéens, définissant un certain nombre d'orientations stratégiques afin d'élaborer une approche globale concernant cette question-clé.

(89) BURKINA FASO

PRINCIPALES CONTRAINTES QUI PÈSENT SUR LE DÉVELOPPEMENT - Les capacités des institutions et de la société civile doivent être renforcées. L'indispensable réforme du système juridique est en cours. Le manque de ressources naturelles, la dégradation de l'environnement, la sécheresse (climat du Sahel), ainsi qu'une forte dépendance à l'égard de l'agriculture (80 % de la population active et 40 % du PIB) et le manque de diversification des exportations constituent autant d'obstacles majeurs à un développement à long terme. Les conflits sociaux, certes limités et sporadiques, constituent une autre source de préoccupation. Enfin, la situation dans la région peut avoir des conséquences économiques et sociales dans la mesure où un grand nombre de Burkinabés vivent dans les pays voisins.

PRINCIPALES RÉPONSES/MESURES POLITIQUES - La réduction de la pauvreté est le fil conducteur de toutes les activités communautaires, qui s'appuient sur le processus DSRP piloté par le gouvernement. Les différents types d'aides fournies par la CE présentent un degré élevé de cohérence et de convergence avec les interventions des États membres et des autres partenaires. Tout en maintenant son appui à la consolidation des politiques macro-économiques et sectorielles, la stratégie de partenariat entre le Burkina Faso et l'UE vise à renforcer l'appui au processus de réforme par la consolidation de l'État de droit et de la dévolution, impliquant une participation accrue des bénéficiaires. Les principaux programmes financés par la CE, axés sur l'appui budgétaire, les transports et le renforcement des institutions, prévoient la consolidation du système judiciaire, l'amélioration des conditions de vie de la population (distribution d'eau) et un programme de coopération décentralisée. Le Burkina Faso a également bénéficié d'une aide dans le cadre du budget portant notamment sur le cofinancement de projets avec des ONG, les droits de l'homme, la démocratie, etc.

Le Burkina Faso a également été retenu comme pays-pilote dans le cadre d'une nouvelle approche en matière d'appui budgétaire. La mise à disposition de crédits budgétaires permet de dégager des ressources financières pour couvrir les coûts récurrents (salaire des enseignants, livres scolaires, médicaments, etc.) nécessaires pour que les investissements puissent effectivement contribuer à la réduction de la pauvreté. Le recours aux systèmes budgétaires nationaux permet de réduire la pénurie criante de crédits rendant pratiquement impossible toute bonne gestion. La subordination du financement aux progrès accomplis dans le domaine de la gestion des finances publiques constitue un incitant à apporter les améliorations nécessaires, d'autant qu'elles sont assorties d'un appui au renforcement des capacités. D'autre part, la liaison d'autres moyens de financement aux résultats incite le gouvernement à porter son attention non plus sur les intrants - que dépense-t-on et où ? - mais sur les résultats tangibles - quel est l'impact de ces dépenses sur la scolarisation, le taux de réussite aux examens, le taux de vaccination, etc. Cette démarche permet d'améliorer la gouvernance administrative en l'assortissant de mesures incitatives plus adéquates et par une obligation de rendre compte des résultats. Au Burkina, l'utilisation en tant qu'indicateur de l'accès aux services sanitaires pour évaluer l'impact des premières mesures d'appui budgétaire a permis de constater que alors qu'on construisait davantage de centres de santé, le nombre de personnes qui s'y rendaient diminuait en raison de la pénurie d'autres intrants. Ce constat a conduit à un recentrage de l'action dans le secteur de la santé et la disponibilité de crédits supplémentaires pour couvrir les coûts récurrents dans le cadre de l'appui budgétaire a favorisé cette réorientation. De plus, l'association avec les autres donateurs dans le cadre d'un processus conjoint a permis de réduire la charge de travail imposée aux services publics burkinabés par les nombreuses missions des donateurs, et donc de réaliser d'importantes économies dans un pays confronté à une capacité administrative chroniquement limitée. Enfin, la mise à disposition de crédits par l'entremise des systèmes de budgets nationaux permet la mise en place d'un cadre de planification et de responsabilisation unifié.

(90) EUROPE ORIENTALE ET ASIE CENTRALE

PRINCIPALES CONTRAINTES QUI PÈSENT SUR LE DÉVELOPPEMENT - Les institutions et donc la gouvernance présentent toujours de grandes faiblesses dans de nombreux pays d'Europe orientale et d'Asie centrale. Les différents instruments de mesure de la corruption - et notamment l'indice de perception de la corruption de Transparency International - montre que la corruption reste un problème dans de nombreux NEI. Cela est confirmé par les études de la BERD et de la Banque mondiale sur l'environnement commercial et les performances des entreprises établies dans la région. Les services publics dans les NEI souffrent d'un certain nombre de déficiences telles que (a) la persistance d'institutions dont la structure fonctionnelle et organisationnelle n'a pas été adaptée; (b) la nécessité de créer ex nihilo de nouveaux organes et institutions capables d'assumer les nouvelles missions de l'État; (c) la suppression des fonctions inutiles; (d) la législation régissant les droits et obligations des fonctionnaires reste incomplète et n'a toujours pas été réformée; (e) l'existence d'une corruption répandue dans les administrations publiques en raison du manque de transparence et de responsabilisation et de la faiblesse des salaires; (f) la faible capacité de gestion ou, à tout le moins, la capacité sous-utilisée de gestion des ressources humaines au sein de l'administration publique; (g) le manque de professionnalisme de l'administration publique est également à l'origine d'un certain nombre de problèmes importants, tels que la faiblesse des salaires, le manque d'incitants et le manque de possibilités d'améliorer les capacités professionnelles.

PRINCIPALES RÉPONSES/MESURES POLITIQUES - Les objectifs de la coopération de l'UE sont l'établissement d'un partenariat avec les NEI favorisant et appuyant le respect des principes démocratiques et les droits de l'homme ainsi que le passage à l'économie de marché. Ces objectifs se fondent sur les accords de partenariat et de coopération (APC) conclus avec la plupart de ces pays et les stratégies communes avec la Russie et l'Ukraine, et s'inscrivent dans le cadre d'une politique de proximité reflétant l'importance politique et stratégique de la région pour l'UE. L'importance stratégique de ce partenariat ne fait qu'augmenter étant donné que l'UE s'élargit à l'Est. Pour la Russie et les NEI occidentaux, une attention particulière est accordée aux initiatives qui couvrent les grands problèmes transfrontaliers, et notamment la criminalité organisée et la corruption. La réforme administrative est un facteur déterminant pour l'amélioration de la gouvernance et la lutte contre la corruption, étant donné qu'elle s'attaque au coeur même du problème, c'est-à-dire la surréglementation bureaucratique de l'activité économique, qui crée les possibilités de corruption. Une priorité-clé à long terme du programme Tacis est l'appui à la réforme de la fonction publique, de l'appareil judiciaire et du système juridique. Tacis accompagne l'action des pouvoirs publics dans des domaines tels que la réforme du budget de l'État, la réforme des finances régionales, la réforme des marchés publics, les règles destinées à prévenir des conflits d'intérêts dans la fonction publique, l'accès public à l'information, le statut ainsi que la formation et la gestion des ressources humaines dans la fonction publique. L'Initiative européenne pour la démocratie et les droits de l'homme appuie, dans les NEI, la promotion et le renforcement de l'État de droit, l'indépendance du système judiciaire et l'humanité du système carcéral, la promotion de la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption. L'UE travaille en étroite coopération avec les organisations européennes et internationales concernées, en particulier le Conseil de l'Europe, l'OSCE et les Nations unies, dans le domaine de la gouvernance, du blanchiment d'argent et de la lutte contre la criminalité organisée. Dans le cadre du réseau anticorruption pour les économies en transition mis en place par l'OCDE, six NEI (Arménie, Azerbaïdjan, Géorgie, Fédération de Russie, Tadjikistan et Ukraine) ont récemment adopté un plan régional de lutte contre la corruption. Les pays qui ont souscrit à ce plan s'engagent à engager des actions spécifiques afin de renforcer l'intégrité et la transparence dans les services publics, de promouvoir la responsabilité et la responsabilisation des entreprises et de permettre une participation active du citoyen au processus de réforme.

5. CONCLUSION

(91) La gouvernance est devenue un domaine de soutien important pour les donateurs dans le contexte de l'élaboration de programmes de coopération fondés sur l'appropriation des stratégies et la reconnaissance de la responsabilité première des autorités nationales et du rôle des politiques internes. Elle fait référence aux règles, processus et comportements qui régissent l'articulation des intérêts, la gestion des ressources et l'exercice du pouvoir dans la société. Elle constitue un volet capital des stratégies de réduction de la pauvreté. La focalisation sur la gouvernance fait naître des relations de coopération avec les gouvernements, notamment au travers des actions qui visent à renforcer leur capacité dans tous les secteurs de la coopération, tels que la santé, l'éducation, les transports, le développement rural, etc. Elle implique également l'octroi d'un appui spécifique aux réformes administratives, à l'amélioration de la gestion des finances publiques, des systèmes de sécurité, etc. Elle conduit enfin à un renforcement de la société civile et à la promotion des approches participatives à l'égard des politiques publiques. À l'échelle nationale, elle constitue un instrument de mesure brut de la qualité des performances du système politique et administratif.

(92) L'accord de Cotonou reflète cette approche globale et est, à ce titre, un outil de référence utile pour les autres accords de l'UE avec les pays tiers. Il comporte un engagement en faveur de la bonne gouvernance, qui est un élément fondamental du partenariat ACP-UE, fait l'objet d'un dialogue régulier et est désignée comme domaine d'appui communautaire. La participation des acteurs non étatiques fait partie du processus. L'accord comporte également des dispositions qui traitent des cas graves de corruption, lesquels pourront faire l'objet de mesures appropriées à la suite de consultations.

(93) La déclaration de politique générale de novembre 2000 a inscrit la gouvernance au rang de domaine prioritaire de la politique de développement de la CE et, à ce titre, elle fait l'objet d'un vaste éventail de programmes et d'instruments dans les actions externes de l'UE. L'impact de ces programmes et instruments sur la réduction de la pauvreté, le développement durable et la viabilité des institutions dépend dans une large mesure de la qualité du dialogue politique et de la participation de tous les acteurs au processus de réforme. La CE gère actuellement un grand nombre de programmes et mène des dialogues politiques dans la plupart des pays et régions en développement (région méditerranéenne, Asie, Amérique latine, Afrique, etc.), illustrant l'action engagée par l'Union européenne pour améliorer la gouvernance administrative, économique et politique dans les pays partenaires. Un dialogue est également mené au niveau multilatéral.

(94) Cette approche de la gouvernance amène la CE à progressivement élaborer un cadre politique s'inspirant des expériences et meilleures pratiques des États membres et des autres donateurs. L'agenda stratégique et les exemples spécifiques d'intervention présentés au chapitre 4 de la présente communication sont destinés à nourrir le débat avec le Conseil, le Parlement européen et les pays partenaires. Il constitue une approche à la carte fondée sur un ensemble de principes directeurs à mettre en oeuvre en fonction des spécificités de chaque pays. La présente communication plaide pour une approche pragmatique à l'égard de la gouvernance et de l'usage qui peut être fait des indicateurs et confirme la nécessité d'utiliser, de manière cohérente, plusieurs types d'instruments politiques et financiers.

(95) Des progrès doivent être accomplis en ce qui concerne la coordination et la complémentarité entre la CE et les États membres de l'UE, en adoptant des principes politiques communs dans ce domaine spécifique. Le degré de cohérence globale entre les approches adoptées par les différents États membres vis-à-vis de la gouvernance semble être un point de départ utile pour ce type d'exercice.

(96) En fonction des résultats du débat avec le Conseil et le Parlement, la Commission transposera les principes politiques précités en lignes directrices et rédigera un manuel qui aidera les délégations à gérer de manière cohérente les programmes de coopération de la CE liés à la gouvernance. Le processus des documents de stratégie nationale/régionale et leur réexamen périodique constituent le cadre approprié pour lier de manière cohérente les priorités de l'action extérieure de l'UE, les instruments et les dotations au niveau national ou régional.

ANNEXE Glossaire

ACP Afrique, Caraïbes et Pacifique

ADB Banque asiatique de développement

AP Accord de paix

ARYM Ancienne république yougoslave de Macédoine

BiH Bosnie-et-Herzégovine

CAD Comité d'aide au développement

CARDS Programme d'assistance communautaire en faveur des Balkans occidentaux

CAGRE Conseil Affaires générales et Relations extérieures

CBMT Cadre budgétaire à moyen terme

CDMT Cadre de dépenses à moyen terme

CE Communauté européenne

DSN Document de stratégie nationale

DSR Document de stratégie régionale

ECHO Office d'aide humanitaire de la Communauté européenne

FED Fonds européen de développement

GOVNET Réseau du CAD/OCDE sur la bonne gouvernance

GROUPE DE SAN JOSE Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras, Nicaragua, Panama

IDB Banque interaméricaine de développement

IDE Investissement direct étranger

IEDDH Initiative européenne pour la démocratie et les droits de l'homme

LRRD Lien entre l'aide d'urgence, la réhabilitation et le développement

MACP Mécanisme africain de contrôle par les pairs

MEDA Programme d'assistance communautaire en faveur du Maroc, de l'Algérie, de la Tunisie (Maghreb), de l'Égypte, d'Israël, de la Jordanie, de l'Autorité palestinienne, du Liban, de la Syrie (Mashrek), de la Turquie, de Chypre, de Malte; un statut d'observateur a été accordé à la Libye

NEI Nouveaux États indépendants

NPDA Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique

NU Nations unies

OCDE Organisation de coopération et de développement économiques

OEA Organisation des États américains

OMC Organisation mondiale du commerce

ONG Organisation non gouvernementale

PPFE Pays pauvres fortement endettés

PSA Processus de stabilisation et d'association (Balkans occidentaux)

RDC République démocratique du Congo

RPDC République démocratique populaire de Corée

RSE Responsabilité sociale des entreprises

SCNU Conseil de sécurité des Nations unies

SMDD Sommet mondial pour le développement durable

TACIS Programme d'assistance communautaire en faveur de l'Arménie, de l'Azerbaïdjan, du Belarus, de la Géorgie, du Kazakhstan, du Kyrgyzstan, de la Moldova, de la Mongolie, de la Russie, du Tadjikistan, du Turkménistan, de l'Ukraine et de l'Ouzbékistan

UA Union africaine

UE Union européenne