52003DC0452(02)

Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité Économique et Social européen sur le rôle de la douane dans la gestion intégrée des frontières extérieures /* COM/2003/0452 final */


COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL, AU PARLEMENT EUROPEEN ET AU COMITE ECONOMIQUE ET SOCIAL EUROPEEN sur le rôle de la douane dans la gestion intégrée des frontières extérieures

La présente Communication fait suite à la Communication de la Commission de mai 2002 « Vers une gestion intégrée des frontières extérieures des Etats membres de l'Union européenne » [1].

[1] COM (2002)233 final 7.5.2002.

Elle tient compte également de la Communication de la Commission de février 2001 concernant une stratégie pour l'union douanière [2] et de la Résolution du Conseil de juin 2001 qui s'y rapporte [3]. La stratégie pour l'union douanière doit à présent être orientée et étendue de façon à mieux intégrer les préoccupations croissantes de sécurité. Les douanes sont avant tout responsables du contrôle des marchandises. Toutefois, dans le contexte nouveau caractérisé par l'émergence de nouvelles menaces, les douanes doivent se voir conférer un rôle majeur pour combattre les menaces éventuellement liées aux marchandises qui franchissent les frontières communautaires. Qu'il s'agisse de trafic illégal de marchandises, de dangers pour la santé et l'environnement ou de terrorisme, la Communauté doit se donner les moyens de garantir la sécurité et la sûreté de ses citoyens.

[2] COM (2001) 51 final 8.2.2001.

[3] OJ No C 171 du 15.6.2001, p. 1

La présente Communication suggère une rationalisation de la gestion des contrôles douaniers. Elle opte pour une approche commune des risques liés aux marchandises, établie en coopération étroite avec tous les services concernés et dans une structure et un cadre communs. En proposant d'articuler des priorités dans les contrôles douaniers, de mettre en place un système communautaire de gestion des risques, d'identifier les systèmes et équipements nécessaires, l'objectif de cette Communication est de conférer aux douanes et aux autres services chargés de la gestion des marchandises à la frontière extérieure les moyens de combattre ensemble toute forme de risques pour la sécurité et la sûreté de la Communauté.

Elle conclut que les gardes frontières, chargés en priorité du contrôle des personnes, et les autorités douanières chargées du contrôle des marchandises poursuivent l'objectif commun d'offrir aux citoyens un niveau élevé de protection dans un espace de liberté, de sécurité et de justice. Le caractère complémentaire et étroitement lié de leurs missions implique d'accroître les synergies entre ces services en s'appuyant sur les points forts de chacun et en prévoyant les mécanismes garantissant une coopération accrue et efficace.

Table des matières

1. INTRODUCTION

2. DOUANE ET SECURITE : UN PREMIER CONSTAT

3. LES PRINCIPALES MENACES POUR LA SECURITE

4. LE RENFORCEMENT DE LA SECURITE DES MARCHANDISES

4.1 Le rôle traditionnel de la douane pour le contrôle des marchandises.

4.2 Rationaliser les contrôles douaniers aux frontières extérieures.

4.3 Doter les fonctions de sécurité de la douane d'un cadre législatif et financier.

5. LES AMELIORATIONS SOUHAITABLES

5.1 Une approche commune des risques

5.2 Garantir un niveau adéquat de ressources humaines et d'équipement.

5.3 Faciliter le commerce sans compromettre la sécurité et la sûreté.

5.4 Etudier la possibilité de partager les responsabilités.

5.5 Renforcer la coopération avec les pays tiers.

5.6 Mesures de soutien à l'élargissement

6. CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

1. INTRODUCTION

1.1 En décembre 2001, le Conseil européen de Laeken demandait " (...) au Conseil et à la Commission de définir les mécanismes de coopération entre les services chargés du contrôle des frontières extérieures et d'étudier les conditions dans lesquelles pourrait être créé un mécanisme ou des services communs de contrôle des frontières extérieures" [4]. En réponse à cette demande, la Commission élabore une stratégie européenne intégrée de la gestion des frontières extérieures qui tienne compte de la pluralité de ses dimensions. L'objectif principal de cette stratégie est d'améliorer la sécurité et les autres contrôles effectués à la frontière extérieure, tout en facilitant le mouvement des voyageurs bona fide et du commerce légitime.

[4] Conclusion n°42 du Conseil européen de Laeken des 14 et 15 décembre 2001. P12.

1.2 La Commission a présenté en mai 2002 une Communication sur « une gestion intégrée des frontières extérieures des Etats membres de l'Union européenne » [5]. Celle-ci traitait essentiellement des questions de contrôles des personnes et soulignait qu'une gestion commune effective des frontières extérieures de l'Union européenne renforcerait la sécurité et le sentiment des citoyens de l'Union d'appartenir à un espace et une destinée communs. La Communication de mai 2002 annonçait une seconde contribution centrée sur les contrôles de marchandises. C'est l'objet de la présente Communication qui suggère des améliorations pour une gestion intégrée des contrôles liés aux marchandises et à leur moyen de transport (bagages inclus) ainsi que d'autres propositions dans des domaines où l'action douanière peut appuyer les contrôles de personnes effectués par d'autres services. Les deux Communications sont complémentaires et constituent les premières étapes de la stratégie globale que la Commission propose pour une gestion intégrée et efficace des frontières extérieures. Il s'agit d'arriver à un cadre cohérent pour une action en commun au niveau de l'Union européenne.

[5] COM (2002) 233 final du 7.5.2002.

1.3 Répondre à la demande du Conseil européen nécessite non seulement d'examiner comment améliorer les contrôles à travers une coopération accrue entre les services responsables des contrôles aux frontières extérieures, mais aussi d'examiner si les contrôles actuels procurent suffisamment de sécurité pour la Communauté et ses citoyens. dans le cadre d'une stratégie intégrée prenant progressivement en compte la pluralité des dimensions de la gestion des frontières extérieures. Le terme sécurité est utilisé dans un sens large au sein de ce document. Il recouvre les menaces pour la sécurité publique (intentions criminelles, danger d'attaques terroristes ou autres) qui impliquent le mouvement de marchandises (trafic ou échanges illicites d'armes à feu, de produits biologiques ou d'explosifs, par exemple) et les menaces pour la sûreté de la société en raison du commerce de marchandises dangereuses pour la santé, l'environnement et les consommateurs. D'autre part, qu'il s'agisse de mesures du premier ou du troisième pilier, elles servent toujours les mêmes objectifs et sont complémentaires. Elles doivent donc progresser ensemble dans l'esprit de l'objectif d'un espace de liberté, de sécurité et de justice tel qu'instauré par le traité d'Amsterdam.

1.4 Les méthodes actuelles de contrôles douaniers des marchandises ne permettent pas de répondre de manière adéquate aux préoccupations croissantes de sécurité. C'est pourquoi la présente Communication recommande des changements fondamentaux sur la façon de combattre les menaces pour la sécurité sans entraver le commerce légitime. L'approche proposée combine une rationalisation des contrôles douaniers et la définition commune, en coopération avec les autres services impliqués, des méthodes et moyens pour mieux contrôler les marchandises. Les recommandations visent à maximiser l'impact combiné de contrôles effectués par différentes autorités tout en assurant une meilleure disponibilité des ressources et des équipements nécessaires. Une fois mises en oeuvre, ces propositions amélioreront la sécurité des citoyens et auront des retombées positives sur le commerce, l'investissement, la croissance, et par conséquent sur l'emploi au sein de la Communauté.

1.5 La présente Communication propose également toutes les améliorations nécessaires aux contrôles effectués dès le franchissement de la frontière communautaire pour accroître la sécurité tout en accueillant de nouveaux Etats membres qui, à partir de l'adhésion, devront assurer que les marchandises dangereuses ou illicites ne compromettent pas la sécurité des autres Etats membres et de la Communauté. Il faut noter à cet égard que la plupart des contrôles de sécurité, à l'inverse de certains contrôles financiers, doivent impérativement être effectués à la frontière.

1.6 La présente Communication s'inscrit dans la poursuite des orientations de la Communication de la Commission concernant une stratégie pour l'Union douanière de février 2001 [6] et de la Résolution du Conseil de juin 2001 qui s'y rapporte [7]. Elle développe ces propositions et vise à mieux y intégrer la dimension sécurité.

[6] COM (2001) 51 final 8.2.2001.

[7] OJ No C 171 of 15.6.2001, p. 1

1.7 La présente communication n'a pas pour objectif de remettre en question les orientations et les activités prioritaires prévues dans le cadre de la Protection des intérêts financiers des Communautés et de la lutte contre la fraude telles qu'elles figurent dans la Communication de la Commission COM(2000) 358 final du 28.06.2000 relative à l'approche stratégique globale 2000-2005, ni les actions d'assistance mutuelle en matière douanière couvertes, d'une part, par le règlement (CE) n° 515/97 [8]et, d'autre part, par les protocoles ou accords d'assistance mutuelle en matière douanière conclus avec des pays tiers.

[8] Règlement (CE) n°515/97 du Conseil du 13 mars 2003 relatif à l'assistance mutuelle entre les autorités administratives des États membres et à la collaboration entre celles-ci et la Commission en vue d'assurer la bonne application des réglementations douanière et agricole (Journal officiel n° L 082 du 22/03/1997 p. 0001 - 0016)

La Commission invite le Conseil, le Parlement européen et le Comité économique et social européen à débattre des orientations proposées et à soutenir les mesures proposées au point 6 de cette communication afin de pouvoir présenter au plus vite des propositions concrètes pour les mettre en oeuvre.

2. DOUANE ET SECURITE : UN PREMIER CONSTAT

Dans la Communauté, le travail douanier s'est typiquement développé au cours des dernières décennies dans le cadre des contrôles d'ordre financier et commercial. D'une manière générale, la lutte contre les activités frauduleuses est traditionnellement liée à la mission de surveillance des flux de marchandises. Plus récemment, l'accent a été mis sur la sécurité des citoyens face aux marchandises dangereuses ou risquées. L'organisation du travail s'est développée selon cette logique et les instruments communautaires, tels que les programmes douaniers de modernisation, ont surtout été utilisés pour identifier les meilleures pratiques de travail dans le domaine des contrôles financiers et commerciaux.

Face aux menaces croissantes, provenant de marchandises dangereuses, du crime organisé ou d'organisations terroristes, il convient de se demander si l'approche qui prévaut à ce jour assure une protection appropriée de la Communauté et de ses citoyens en tout point de la frontière extérieure.

La Commission considère que la réponse à cette question est largement négative.

Certes les contrôles actuels permettent de protéger les intérêts financiers de la Communauté et des Etats membres, d'autant que lorsque ce type de problème est constaté après l'entrée des marchandises, des audits a posteriori permettent de les redresser. En revanche, les contrôles ne permettent pas, à ce jour, de contrer suffisamment ou prévenir les agissements terroristes. Ils ne sont pas non plus suffisants pour garantir un niveau de protection élevé des citoyens contre des marchandises dangereuses ou défectueuses.

Chaque Etat membre est actif dans ces domaines, mais les mesures et priorités diffèrent d'un Etat membre à l'autre, de même que les investissements en équipements et en ressources. Ainsi, à l'échelle communautaire, les contrôles de sécurité sont diversifiés, non harmonisés et parfois lents à répondre aux nouvelles menaces. Il en résulte des différences de performance dans ces domaines en différents points du territoire douanier : en certains lieux, un système informatisé de gestion des risques est mis en place, accompagné des ressources humaines et des équipements nécessaires ; ailleurs, le manque d'investissements et de systèmes modernes conduit à des contrôles moins performants.

En termes de sécurité, cela signifie que les chances d'arrêter à temps un dispositif explosif, une arme biologique ou une marchandise dangereuse dépend du point de la frontière extérieure par lequel ces marchandises passeront. Après l'élargissement, les risques de traitements diversifiés ne feront que s'accroître. Il y a, donc, un réel besoin de coordonner ces approches individuelles pour que les meilleures pratiques nationales deviennent des standards communautaires.

Cette communication s'applique à l'ensemble des frontières extérieures (terrestres, ports et aéroports) de la Communauté tout en tenant compte de l'importance du 5ème élargissement.

Pour assurer une gestion commune effective et intégrée des frontières extérieures de l'Union européenne, des solutions rapides et pragmatiques doivent être soutenues par un engagement politique et financier ferme. A défaut, la Communauté court le risque de devenir une cible facile pour les agissements frauduleux et terroristes.

Les contrôles actuels de sécurité des marchandises doivent par conséquent être améliorés pour assurer un niveau de protection élevé et identique en tout point de la frontière extérieure de la Communauté.

Ce document propose des pistes de réflexion pour renforcer la sécurité des marchandises. Il énumère les principales menaces à contrer, les faiblesses des systèmes actuels et met en avant des domaines spécifiques qui nécessitent une attention particulière. Il indique ce que la Douane devrait faire pour améliorer la situation et comment renforcer la coopération avec les autres services chargés de la sécurité des marchandises.

3. LES PRINCIPALES MENACES POUR LA SECURITE

Les menaces pour la sécurité et la sûreté de la Communauté sont diverses. Elles peuvent être classées en plusieurs catégories :

* Les menaces criminelles ou terroristes : celles-ci peuvent être

- directes, elles impliquent alors une intention délibérée d'introduire des marchandises interdites comme des explosifs ou des armes nucléaires, biologiques, ou chimiques ;

- indirectes lorsqu'elles impliquent la contrebande ou le trafic de marchandises illicites (drogues, cigarettes, alcool, contrefaçons) à des fins d'approvisionnement ou de financement (blanchiment d'argent) d'organisations terroristes ou du crime organisé.

* Les risques pour la santé et la sûreté des consommateurs:

Risques pour la santé : il s'agit de préoccupations liées aux menaces de bio-sécurité, par exemple, en raison de l'importation non autorisée de produits contaminés (l'extension de certains cas de vache folle ont été attribués à l'importation de lots de viandes contaminées) ou de produits issus de nouveaux développements scientifiques tels que les OGM. En termes de consommation, les produits stupéfiants, les anabolisants ou autres produits dopants, peuvent également être classés dans cette catégorie.

Risques liés aux produits dangereux : ceux-ci regroupent certains bien contrefaits ou non conformes aux normes communautaires de sécurité, par exemple, des médicaments, des produits alimentaires ou des ustensiles (briquets, pièces détachées...).

* Les risques environnementaux et sanitaires: ceux-ci se posent lorsque, par exemple, des espèces en voie de disparition de la faune et de la flore, des substances radioactives ou des animaux malades franchissent illégalement la frontière.

Les risques pour la sécurité publique : comme le trafic d'armes illicites ou de stupéfiants.

Contrer ces menaces croissantes d'attaques délibérées ou de dangers pour la sécurité et la sûreté de la société communautaire exige de se concentrer davantage sur les contrôles de marchandises.

Pour faire face aux menaces pour la sécurité, des améliorations sont déjà proposées dans le domaine des contrôles de personnes effectués en premier lieu par les services de gardes frontières, souvent en étroite coordination avec les douanes. Mais pour lutter efficacement contre, la criminalité, le terrorisme ou toute autre menace pour la sécurité, il faut également couvrir d'autres aspects que le contrôle des personnes. De fait, les risques liés à l'introduction dans la Communauté d'armes, de substances radioactives ou d'explosifs, mais également de viandes contaminées ou de médicaments hors normes impliquent généralement des mouvements de marchandises aux frontières communautaires. Les quelques 100 000 [9] fonctionnaires des douanes dans l'Union européenne ont un rôle majeur à jouer en renforçant leur coordination au niveau européen et en travaillant en plus étroite coopération avec les autres services de contrôle aux frontières et au premier rang avec la police.

[9] Ce chiffre peut paraître significatif, mais il couvre en fait l'ensemble des tâches douanières qui varient d'un Etat membre à l'autre (missions fiscales, gestion douanière, missions nationales spécifiques).

4. LE RENFORCEMENT DE LA SECURITE DES MARCHANDISES

4.1 Le rôle traditionnel de la douane pour le contrôle des marchandises.

Les administrations douanières prêtent parfois assistance aux services dont la mission principale est le contrôle des personnes aux frontières. Par ailleurs, les informations obtenues par les contrôles de routine des voyageurs et des véhicules, ou simplement par une présence physique aux frontières, permettent souvent de remonter certaines filières liées à la criminalité transnationale, parfois en étroite coopération avec d'autres services répressifs.

Pour les contrôles de marchandises, toutefois, seule la douane dispose d'une connaissance suffisamment large et développée pour assurer des contrôles adéquats de sécurité.

De fait, la douane bénéficie d'une longue expérience du contrôle de l'ensemble du commerce légitime qui lui a permis d'établir des réseaux de contacts étroits avec les opérateurs économiques et d'acquérir une connaissance approfondie des marchandises. A travers l'expertise acquise et les réseaux constitués, la douane a accès à des informations qui lui permettent de mieux cibler et combattre les trafics illicites ou à hauts risques. En plus de ces contacts privilégiés, les bureaux de douane sont présents à tous les postes frontières y compris aux ports et aéroports internationaux et parfois même dans les locaux des opérateurs économiques. Elle est de ce fait la seule organisation capable de suivre les marchandises tout au long de leurs déplacements vers, hors voir au sein même de la Communauté. Ces compétences s'exercent tant sur les points de passage et de dédouanement, qu'à la circulation, quel que soit le mode d'acheminement, terrestre, maritime ou aérien. Ces avantages doivent être mis à profit pour accroître la sécurité des marchandises.

La douane remplit ainsi un rôle central pour le contrôle des marchandises licites permettant la détection des marchandises illicites. Par ailleurs, par sa présence aux frontières, la douane est prédestinée à détecter des trafics illicites en dehors des circuits de dédouanement. Elle doit donc disposer des moyens nécessaires pour assurer une coopération et une coordination étroite et efficace avec les autres services en charge de la sécurité aux frontières. De fait, les administrations douanières disposent de certains types de renseignements et ont développé des instruments d'assistance et de coopération [10]; la police et les autres services ont également leurs propres systèmes et sources d'informations (ex : systèmes d'intelligence permettant de détecter les personnes suspectes ou les criminels). Le renforcement du partage de tous ces renseignements sera un élément clé pour renforcer la détection des délits, quels qu'ils soient, dans le respect des compétences de chaque service. De plus, des synergies entre services en seraient fortement renforcées.

[10] Règlement (CE) nº515/97 du Conseil du 13 mars 1997 relatif à l'assistance mutuelle entre les autorités administratives des États membres et à la collaboration entre celles-ci et la Commission en vue d'assurer la bonne application des réglementations douanière et agricole, JO L 82 du 22.03.1997; Convention établie sur la base de l'article K.3 du traité sur l'Union européenne relative à l'assistance mutuelle et à la coopération entre les administrations douanières, JO C 24 du 23.01.1998.

Permettre à la douane d'assumer cette fonction implique de repenser l'allocation des tâches douanières de façon à rationaliser les contrôles aux frontières extérieures. Ce point est essentiel, d'autant qu'au lendemain de l'élargissement, les nouveaux Etats membres devront immédiatement appliquer la législation douanière communautaire. L'Acquis Schengen s'appliquera également dès l'adhésion, mais il faudra cependant une décision du Conseil pour la levée des contrôles aux frontières intérieures avec les nouveaux Etats membres.

4.2 Rationaliser les contrôles douaniers aux frontières extérieures.

En règle générale, les Etats membres appliquent les contrôles douaniers dans le respect des législations communautaires, mais souvent les intérêts nationaux dictent la sélection des priorités de contrôles. Cela conduit inévitablement à des niveaux et des degrés de protection différents d'un point à l'autre du territoire douanier, en particulier concernant les contrôles de sécurité qui ne sont pour l'instant pas forcément conçus au niveau communautaire. Cette situation a pour effet d'encourager les trafics illicites de marchandises aux points de frontière où les contrôles sont les moins stricts. Cette lacune doit être comblée. Il est en effet nécessaire de garantir le niveau le plus uniforme possible de protection des frontières extérieures en identifiant des contrôles de sécurité communs à tous les Etats membres, d'autant qu'à l'avenir un grand nombre de contrôles devront être effectués par de nouveaux Etats membres ayant, eux aussi, leurs propres priorités nationales.

On n'oubliera pas à ce propos que les Etats membres chargés de la gestion de la frontière extérieure sont responsables de la sécurité de l'ensemble de la Communauté et pas seulement de celle de leur propre pays. Il est donc d'intérêt communautaire d'assurer que les principaux risques pour la sécurité soient traités suffisamment tôt et de façon équivalente en tout point de la frontière extérieure.

Une réorganisation des opérations douanières serait nécessaire pour maximiser l'efficacité des contrôles à travers un processus de rationalisation établissant les priorités et combinant sécurité effective et gestion optimale des ressources.

A cet égard, deux catégories de rôles douaniers fondamentaux seront distingués:

* Une mission de nature fiscale et commerciale, qui vise à protéger les intérêts économiques et financiers communautaires et nationaux ;

* Une mission liée à des préoccupations de sûreté et de sécurité dont l'objectif est de protéger la société européenne.

Les risques de ces deux catégories doivent être pondérés de façon à identifier les risques majeurs pour lesquels un contrôle dès le passage à la frontière extérieure s'impose. Pour les autres risques, également importants, un contrôle en d'autres lieux pourrait être envisagé, à condition que cela n'entraîne pas un accroissement de la fraude. L'objectif serait ainsi de focaliser aux postes frontières les contrôles des risques les plus élevés, c'est-à-dire les contrôles qui, s'ils n'étaient pas effectués dès le passage des marchandises aux frontières, pourraient engendrer des conséquences irréparables.

Dans ce contexte, les contrôles liés aux missions fiscales et de politique commerciale de la douane pourraient, dans de nombreux cas, aisément être menés en d'autres lieux qu'aux postes frontières. De fait, en simplifiant et en modernisant les procédures douanières- ce que la Communication sur la douane électronique s'applique à faire- un usage accru pourrait être fait de la transmission de données de contrôle par voie électronique d'une façon qui assure un haut niveau de protection des intérêts communautaires et nationaux et n'accroît pas les risques de fraude. Ce faisant, l'on pourrait mieux délimiter parmi les contrôles de nature fiscale et de politique commerciale ceux qui doivent être maintenus aux postes frontières. Rationaliser les contrôles de cette manière permettrait, par exemple, d'éviter les longues files d'attente aux postes frontières.

En revanche, une grande partie des contrôles liés à la sécurité et à la sûreté de la CE ne peuvent être conduits qu'aux postes frontières : il est impératif que des explosifs, des aliments contaminés ou des substances radioactives ne puissent franchir les frontières de la CE, sans avoir été contrôlés et pris en charge. Il faut donc identifier parmi ces contrôles ceux qui n'offrent pas de garanties suffisantes s'ils sont effectués dans des bureaux intérieurs et les concentrer aux postes frontières.

La définition de priorités dans les risques et donc les contrôles qui doivent impérativement être menés aux postes frontières doit être clairement exprimée par les autorités politiques. Il faut également conférer aux douanes les moyens législatifs, réglementaires et financiers de mettre en oeuvre cette approche de rationalisation des contrôles.

4.3 Doter les fonctions de sécurité de la douane d'un cadre législatif et financier.

En vue d'une stratégie globale visant une efficacité accrue de la gestion intégrée des frontières extérieures, il est nécessaire de considérer les contrôles dans leur ensemble, qu'ils relèvent du domaine communautaire ou national. La distinction arbitraire qui prévaut à ce jour entre les contrôles qui relèvent du premier pilier ou du troisième pilier est inadaptée aux objectifs à atteindre : assurer un haut niveau de protection en tout point de la frontière extérieure sans pour autant compromettre le commerce légitime. A plus long terme, cette distinction pourra probablement être éliminée. Les travaux de la Convention sur l'avenir de l'UE semblent déjà aller dans ce sens. Toutefois, et sans préjuger des résultats de la Convention, les instruments existants doivent être utilisés pour renforcer le rôle de sécurité de la douane.

De fait, lorsque les douanes appréhendent les flux de marchandises, elles appliquent deux logiques. Une logique de contrôle, qui découle de l'application des procédures douanières. Une logique d'enquête dont la finalité est de prévenir ou de lutter contre la fraude et qui peut également servir soit d'input dans le processus de sélection des contrôles, soit de complément permettant la détection des risques ayant échappé aux contrôles. Des améliorations sont nécessaires dans la poursuite de chacune de ces logiques.

Concernant les contrôles, il faut assurer d'une part une application uniforme des dispositions communautaires, en ce compris les restrictions et interdictions fixées par le droit communautaire. D'autre part, il faut harmoniser les contrôles qui découlent de mesures nationales et dont l'application différenciée d'un Etat membre à l'autre est préjudiciable pour la sécurité de l'ensemble de la Communauté. Une approche commune des contrôles et de leur traitement, développée au niveau communautaire, permettra de renforcer les performances de sécurité à l'échelle de toute la Communauté. Une telle approche n'empêche pas de maintenir également des priorités nationales de risque, à condition que les contrôles fondamentaux pour la sécurité de tous les états membres soient pondérés et appliqués de la même façon en tout point des frontières extérieures.

Dans le domaine des enquêtes douanières, les pouvoirs des douanes varient fortement d'un Etat membre à l'autre. Or, le pouvoir d'enquête est un complément logique aux contrôles douaniers et indispensable pour lutter efficacement contre la fraude, depuis la recherche des infractions jusqu'à leur constatation. Il faut donc opter pour une approche commune quant aux pouvoirs, mandats et rôles des douanes des Etats membres. Cela implique aussi de renforcer les synergies avec les services de police. Le rôle des douanes en tant que 'police des marchandises' doit être plus explicite. Les douanes doivent contribuer activement aux investigations menées par la police pour identifier ou retrouver d'éventuels fraudeurs, d'autant que les objectifs poursuivis sont identiques. Croiser les flux d'informations policières et douanières, qui sont souvent complémentaires, mettre en commun l'expérience spécialisée de ces services en s'appuyant sur les forces de chacun renforcera la recherche, l'identification et la constatation des infractions.

Parallèlement, la Communauté doit encourager une coopération toujours plus étroite entre services impliqués, le rapprochement des méthodes de travail, le recoupement des informations pertinentes et la constitution de réseaux interdisciplinaires. Cela inclut aussi le développement, la mise en place ou l'utilisation accrue de systèmes (existants ou à développer) de stockage, de traitement et d'échanges d'information sécurisés.

La mise en place de ces améliorations requière d'étendre et d'adapter le cadre législatif existant. Il faudra d'une part élargir le champ d'action des textes législatifs aux pouvoirs et tâches douanières. D'autre part, il faudra adapter les dispositions douanières existantes pour intégrer les critères de sécurité. A titre d'exemple, le code des douanes est essentiellement axé sur la dimension fiscale et de politique commerciale du rôle de la douane, l'aspect « sécurité » est beaucoup plus marginal. Il faut l'adapter pour que, par exemple, les instruments tels que la gestion des risques et les mesures de facilitation du commerce intègrent les préoccupations de sécurité.

Enfin, force est de constater qu'à ce jour, il n'existe pas de réelle politique communautaire des équipements nécessaires aux contrôles. Cet aspect pourrait s'accentuer dans une Communauté élargie. Il conviendrait donc d'examiner des solutions financières appropriées [11] et d'explorer, notamment, les possibilités qu'offrent les fonds communautaires (structurels ou autres) tout en veillant au non-cumul des interventions.

[11] y inclut l'utilisation possible du pourcentage de 25% retenu par les Etats membres à titre de frais de perception des ressources propres traditionnelles pour le financement de la lutte contre la fraude et de la protection des intérêts financiers des Communautés, tel qu'applicable depuis l'entrée en vigueur de la décision N°2000/597 du Conseil du 29.09.2000.

C'est donc l'ensemble des instruments légaux, financiers et douaniers ainsi que les méthodes de travail qui doivent intégrer cette dimension de sécurité et de sûreté. Pour ce faire, la Commission peut jouer un rôle important : elle ne doit pas remplacer les Etats membres, mais dans le respect de la subsidiarité et via une coordination accrue, les encourager à travailler ensemble pour atteindre des objectifs communs.

5. LES AMELIORATIONS SOUHAITABLES

5.1 Une approche commune des risques

Rationaliser l'approche et les méthodes de gestion des risques est un point de départ incontournable. Cela implique, dans un premier temps, de sélectionner les contrôles qui peuvent être délocalisés, sans encourager la prolifération des risques auxquels ils s'adressent, et ceux qui doivent impérativement être effectués aux postes frontières. L'objectif est d'assurer que soit traité en priorité ce qui est strictement nécessaire pour la sécurité de la Communauté et d'assurer que les contrôles qui s'y rapportent soient effectués là où ils sont le plus efficace.

Sur cette base, une approche commune des risques à la frontière extérieure implique un cadre:

* Commun

* Rationalisé

* Informatisé

* Complet

Commun

Les contrôles qui pour des raisons de sécurité et de sûreté doivent être maintenus aux postes frontières doivent être pondérés par ordre de priorité. Tous les services concernés (la douane, la police, la protection des consommateurs, les services de protection de la santé, de l'environnement,...) doivent ensemble établir ces priorités et définir des profils de risques communs qui s'y rapportent. Selon les profils établis, il faut également identifier les données disponibles, provenant de toutes les agences concernées pour sélectionner celles qui seront les plus utiles à l'analyse des risques. Un certain nombre de progrès ont déjà été réalisés dans la Communauté, mais ces efforts ne sont pas suffisamment coordonnés. Un cadre organisationnel unique, mettant en commun l'ensemble de ces services, s'avère de plus en plus indispensable pour davantage coordonner les efforts déployés et identifier les améliorations ou innovations qui s'imposent.

La Communication de la Commission de mai 2002 proposait la mise en place d'une instance commune de praticiens des frontières extérieures associant les responsables de tous les services chargés de la sécurité aux frontières extérieures et ayant un rôle de pilotage et de conceptualisation [12].

[12] Cette instance devrait "agir comme la "tête" de la politique commune de gestion des frontières extérieures pour effectuer l'évaluation commune et intégrée des risques; agir comme un "chef d'orchestre" coordonnant et pilotant des actions opérationnelles de terrain, notamment en situation de crise; agir en gestionnaire et en stratège pour assurer une plus grande convergence entre les politiques nationales dans le domaine des personnels et des équipements; exercer une forme de pouvoir d'inspection, notamment en cas de crise ou si l'évaluation des risques devait l'exiger". COM (2002) 233, p14

Au sein de cette instance (si elle s'oriente vers un profil pluridisciplinaire) ou d'une autre structure organisationnelle à définir, les administrations douanières devraient être responsables de toutes les questions relatives au contrôle des marchandises du commerce légitime et illégitime en coopération avec les autres autorités. Sur la base des politiques adoptées au niveau communautaire par le Groupe de politique douanière et en synergie avec les travaux des autres groupes, des orientations à caractère douanier pourraient être alors examinées. Cela permettrait, le cas échéant, d'étendre les activités de l'instance au-delà de l'article 66 proposé dans la précédente Communication et de ne pas se cantonner aux aspects liés à la libre circulation des personnes.

Rationalisé

L'ensemble des données relatives aux marchandises devraient être transmises par les opérateurs aux douanes en vue d'une première sélection des risques, sur base des profils communs. Certaines informations devraient obligatoirement être transmises avant l'arrivée des marchandises. De cette façon, la douane centraliserait les données nécessaires, réduisant le nombre de canaux empruntés actuellement. L'expertise des douanes en matière de marchandises et de commerce serait ainsi mise à disposition des autres services sans empiéter sur leurs compétences respectives. De fait, les services douaniers transmettraient instantanément aux services compétents les informations de risques collectées qui les concernent, pour qu'ils puissent y donner suite.

Il s'agirait donc d'instaurer un canal unique de transmission, puis de traitement d'informations sur base de profils établis par l'ensemble des services concernés. Cette approche aura le double mérite, d'une part, de clarifier le cadre organisationnel nécessaire à la sécurité de la future frontière de l'Union ; et d'autre part, de simplifier les formalités administratives requises de la part des opérateurs économiques, par exemple, en réduisant l'envoi en double ou triple exemplaire de données semblables à plusieurs services différents ou encore en assurant un format unique de transmission d'informations.

Des systèmes efficaces et rapides de transmission d'informations entre les douanes et les autres services compétents devront être assurés. La Communication COM (2002) 233 proposait la mise en place, par l'instance des praticiens de la frontière extérieure, d'une procédure de sécurité (PROSECUR) permettant le transfert rapide des informations entre autorités concernées par la sécurité de la frontière extérieure. Les administrations douanières et les autres autorités chargées de la mise en oeuvre des réglementations douanières représentées au sein de cette instance devraient être responsables du cadrage de ces procédures pour l'échange d'information liées aux marchandises, en tenant compte et en adaptant, en particulier, les systèmes d'informations existants (tels que le système TARIC, le réseau AFIS - Anti Fraud Information System - ou le SID - système d'information douanier [13]).

[13] Règlement (CE) nº515/97 du Conseil du 13 mars 1997, JO L 82 du 22.03.1997; Convention sur l'emploi de l'informatique dans le domaine des douanes du 26 juillet 1995, JO C 316 du 27.11.95.

Ce travail devrait s'intégrer dans une approche globale afin de déployer tous les moyens qui, selon la nature des informations et des risques identifiés, auraient pour finalité d'établir des liens et échanges directs entre les autorités concernées par la sécurité des frontières extérieures.

Informatisé

La disponibilité des données n'est pas le seul point important, il faut aussi qu'elles soient délivrées dans un format adéquat au moment et à l'endroit appropriés. Pour une évaluation rapide des risques de très grands flux de marchandises, il faut que les données soient accessibles dans un format électronique. A l'heure actuelle, les données transmises à la douane ne sont pas toutes délivrées sous cette forme. Dans certains Etats membres, les informations de la déclaration en douane existent sous un format électronique, mais il n'est pas toujours possible de les transférer rapidement là où elles seraient le plus utile ; dans d'autres Etats membres, l'information n'est transmise que manuellement (en particulier concernant les données d'exportation). D'autres sources de données comme les manifestes, indispensables pour une évaluation précoce des risques, sont encore moins souvent accessibles par voie électronique.

Pour assurer un traitement rapide et efficace des données, il faudrait généraliser la transmission par voie électronique. Cela implique l'obligation pour les opérateurs économiques d'utiliser le format électronique, assortie d'une marge de flexibilité pour les PME et les personnes ; et la mise en place des bases de données douanières nécessaires au niveau communautaire et/ou national.

Complet

Mettre en place une approche commune de la gestion des risques n'a de sens que si elle est accompagnée d'une approche commune des contrôles nécessaires pour détecter les marchandises à risques. Cela implique de déterminer la nature et le type de contrôle nécessaire. Il faudrait aussi que soient développés des standards de contrôle identifiant, en particulier, où et par qui ces contrôles devraient être effectués et avec quels types d'équipements spécialisés.

Une approche commune, rationalisée, informatisée et complète des risques permettra d'accroître la sécurité de la Communauté en assurant que les risques essentiels soient traités avec le même ordre de priorité et de façon équivalente sur l'ensemble de la frontière extérieure. Mais le risque zéro n'existe pas et il faut également prévoir les moyens de rattraper ce qui a éventuellement pu échapper à la vigilance douanière. L'expérience acquise par les douanes pour identifier et suivre les flux de marchandise doit être utilisée en tout point (aux postes frontières ou intérieurs) dans tous les domaines ou secteurs d'activité où cette expertise est bénéfique pour la sécurité de la Communauté. C'est à cette fin, en particulier, que le rôle de « police des marchandises » des douanes doit être plus explicite. Les douanes devraient participer aux investigations menées pour retrouver ou identifier d'éventuels fraudeurs. Une plus grande synergie entre douanes et polices permettra aussi de mieux identifier les tendances de fraude et de pouvoir ainsi mieux les prévenir.

5.2 Garantir un niveau adéquat de ressources humaines et d'équipement.

Assurer un niveau adéquat de ressources humaines et d'équipements permettant de mener les contrôles nécessaires est un impératif. La question du caractère suffisant des ressources et équipements alloués aux frontières extérieures est d'intérêt communautaire. De fait, les frontières extérieures ne concernent pas uniquement le pays géographiquement concerné, mais l'ensemble des pays de la Communauté. C'est donc ensemble, en tenant compte de paramètres nationaux et communautaires, qu'il faut identifier quels sont les besoins réels. Dans l'immédiat, deux points doivent être soulignés:

* Il faut assurer la disponibilité de l'équipement minimal nécessaire en tout point de contrôle (comme les scanners, les détecteurs de radiations,...). Un inventaire des équipements nécessaires/existants permettrait de déterminer le niveau d'équipement à atteindre. Pour éviter des coûts disproportionnés, il faudrait spécialiser quelques postes frontières au contrôle de certains types de marchandises lorsque cela implique le recours à des équipements spécifiques et coûteux. Cela permettrait de mieux répartir les coûts d'équipements et de concentrer en ces points l'expertise spécifique requise. Toutefois, il faudra veiller à ce que cela n'entraîne pas d'entraves au commerce légitime sous la forme de barrières non tarifaires (ex : coûts accrus d'acheminement des marchandises vers des postes spécialisés éloignés des lieux de destination).

* Il conviendrait d'explorer la possibilité de constituer des équipes de réaction rapide aux risques inattendus. Pour assurer un haut niveau de sécurité et de sûreté en tout point de la frontière extérieure, il faudrait être capable de réagir rapidement aux dangers et risques inattendus où qu'ils surviennent. La constitution d'un « corps européen de réserve », mobilisable à tout moment et en tout point, répondrait à ce besoin. La possibilité de mobiliser des unités d'expertise très spécialisées permettrait de rapprocher les niveaux et types de contrôles effectués en tout point de la frontière extérieure. Les fonctions de ces équipes pourraient être consultatives dans un premier temps, quitte à les formaliser ultérieurement le cas échéant.

A noter que l'utilisation des ressources ainsi que leur financement relèvent de la compétence des Etats membres, la Commission peut toutefois encourager la coordination entre Etats membres, l'identification de moyens appropriés et la recherche de solutions communautaires là où cela s'avère désirable et possible.

5.3 Faciliter le commerce sans compromettre la sécurité et la sûreté.

L'objectif de cette Communication vise à repenser et à renforcer le rôle de « sécurité » de la douane. Cela n'implique toutefois pas de considérer ses autres fonctions comme moins importantes.

La Douane a en particulier un rôle économique essentiel : elle contribue à la fluidité du commerce légitime. Si les formalités administratives et les procédures douanières sont lentes, si chaque marchandise qui franchit les frontières doit être contrôlée physiquement, la douane devient un frein au commerce avec la Communauté. Ce n'est ni son but, ni sa fonction. La douane doit, au contraire, avoir un impact économique positif. Pour cette raison, de nombreuses mesures ont été prises en vue de faciliter les échanges en accélérant et en simplifiant les procédures et les contrôles douaniers du commerce légitime. Les instruments, tels que la Communication concernant une stratégie pour l'Union douanière de février 2001, le programme Douane 2002 et les actions de coopération douanière avec les pays tiers y ont fortement contribué. Cette Communication souligne l'importance de ces mesures et la nécessité de les poursuivre en veillant à trouver un juste milieu entre la protection de la Communauté et de ses citoyens et la facilitation du commerce légitime.

A titre d'exemple, parmi les actions de facilitation du commerce figure la simplification des formalités douanières. Mais jusqu'à présent, l'octroi de facilités était consenti principalement au regard de risques fiscaux et commerciaux.

Cela conduit également à se pencher sur la question de la sécurité du secteur des transports. Les facilités sont généralement octroyées aux opérateurs, importateurs ou exportateurs de marchandises, suffisamment connus de la douane ou qui ont présenté les garanties nécessaires. Mais, sauf dans les cas de transit, rien ne permet à ce stade de garantir les intermédiaires (transporteurs, ... ). Agréer un producteur n'aura que peu d'efficacité en terme de sécurité si le transporteur des marchandises n'est pas également fiable.

C'est donc l'ensemble de l'approche des « facilitations » qui prévalait jusqu'à présent qui doit être revu pour que des critères de sécurité et de sûreté conditionnent également l'octroi ou non de facilités. Cela impliquera inévitablement de veiller à garantir davantage l'ensemble de la chaîne logistique d'approvisionnement. L'Organisation Mondiale des Douanes traitant également de ces questions, il conviendra de continuer à coordonner les réflexions respectives en vue de leur mise en oeuvre harmonisée.

5.4 Etudier la possibilité de partager les responsabilités.

Certaines initiatives ont mis en pratique le concept de « responsabilités partagées des contrôles » entre partenaires commerciaux. La dernière en date, l'initiative américaine sur la sécurité des conteneurs, propose le partage de données relatives aux marchandises qui passent d'un pays à l'autre en vue d'une meilleure sélection du trafic à haut risque. Cette approche est intéressante du point de vue du renforcement de la sécurité internationale, mais à l'échelle de l'Europe, elle ne produira les effets escomptés que si elle est établie au niveau communautaire et basée sur une coopération étroite entre les Etats membres et, le cas échéant, avec les pays tiers concernés.

Au niveau européen, les principaux éléments de cette approche doivent être retenus : il est en effet généralement plus facile de contrôler dans le pays d'exportation qu'aux points d'entrée. Mettre cette approche en pratique permettrait d'assurer le transfert d'informations du point où elles sont le plus facilement localisables et les plus complètes pour accélérer les procédures douanières applicables au commerce légitime sans compromettre la sécurité. D'où gain de temps et accroissement d'efficacité.

La Communauté devrait promouvoir ce principe des responsabilités partagées, en particulier avec les pays limitrophes et les pays à destination ou au départ desquels sont établies les principales routes commerciales aériennes et maritimes.

Naturellement, le principe de responsabilités partagées s'applique également à la Communauté qui doit, par exemple, assumer ses propres responsabilités de contrôle des exportations. A ce jour, en effet, les contrôles communautaires se concentrent surtout sur les importations et les contrôles des exportations sont comparativement faibles. La Communauté est une zone commerciale importante ; elle doit donc se protéger mais aussi protéger le reste du monde, et en particulier les pays en voie de développement plus vulnérables, contre les intentions délictueuses et criminelles (comme par exemple les exportations illicites de substances chimiques dangereuses ou interdites). Le contrôle des exportations est un élément important de sécurité qu'il ne faut pas délaisser. Allouer certaines tâches de contrôle des exportations aux postes douaniers intérieurs permettrait à la Communauté de mieux s'acquitter de sa responsabilité sans surcharger les contrôles effectués aux frontières extérieures. La transmission informatique des données nécessaires permettrait de vérifier instantanément aux postes frontières si les contrôles requis ont effectivement eu lieu, quitte à ce que des contrôles particuliers requérant des équipements spéciaux ou coûteux soient effectués aux postes frontières spécialisés.

5.5 Renforcer la coopération avec les pays tiers.

Une gestion intégrée efficace de la frontière extérieure nécessite une politique globale de coopération avec les pays tiers.

D'une part, pour garantir la surveillance effective des frontières communes, une collaboration étroite avec les pays limitrophes est indispensable. Les initiatives régionales doivent être poursuivies et élargies [14]. De plus, comme le prévoit la communication de la Commission sur « l'Europe élargie - Voisinage : un nouveau cadre pour les relations avec nos voisins de l'Est et du Sud [15]», le développement de la coopération transfrontalière est essentiel à la sécurité comme au bon fonctionnement de la frontière, les bureaux frontières devant être avant tout des lieux de passage.

[14] Comme par exemple le processus d'Imatra lancé en 1999 et les actions entreprises par la "Conférence douanière de la Mer Baltique" dans le cadre du Conseil de la Mer Baltique.

[15] COM(2003)104 final du 11.03.2003.

D'autre part, s'agissant des autres pays tiers, il faudra également veiller à renforcer les coopérations existantes en adaptant les accords aux besoins mutuels de chaque pays ou ensembles géographiques et de la Communauté. De nombreux efforts sont déjà déployés à cet égard ; il s'agira donc de les poursuivre et de les adapter aux besoins nouveaux.

5.6 Mesures de soutien à l'élargissement

Accueillir de nouveaux Etats membres au moment où de nouveaux pays accèdent à l'OMC implique un accroissement du commerce, mais aussi davantage d'opportunités pour les criminels.

Des mesures spécifiques additionnelles de soutien aux nouveaux Etats membres pourraient être envisagées dans la phase qui précède l'adhésion, pour leur permettre de bénéficier des meilleures pratiques douanières existantes à travers, par exemple, la constitution « d'équipes conjointes ». Ces équipes seraient composées de douaniers des Etats membres et des pays candidats et traiteraient de questions techniques spécifiques à la demande de ces derniers. Le programme de modernisation douanière « Douane 2007 » pourrait être utilisé à cette fin.

6. CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

A l'aube de l'élargissement et compte tenu des préoccupations croissantes de sécurité, la Communauté doit doter ses frontières extérieures des moyens d'assurer la sécurité et la sûreté de ses citoyens. Une responsabilité de premier ordre revient à la douane pour un contrôle des marchandises garantissant la sécurité et le développement économique de la Communauté. Les contrôles et les méthodes de travail douanier doivent être réorientés pour assurer la protection de la Communauté et de ses citoyens contre les agissements criminels ou terroristes. Cette réorganisation doit s'intégrer dans un cadre général et intégré de gestion des frontières extérieures, ce qui impliquera de nouvelles structures organisationnelles mais aussi des mécanismes de coopération et de coordination étroite entre services impliqués.

Pour assurer le succès de cette approche, la Commission, dans le respect des responsabilités qui incombent aux Etats membres, devra s'efforcer d'agir comme catalyseur du changement et comme agent dynamique de coordination. Les actions engagées ne seront fructueuses que si elles sont mises en oeuvre dans toute la Communauté. Elles exigeront des engagements financiers, notamment au niveau communautaire.

La Commission invite le Conseil, le Parlement européen et le Comité économique et social européen à débattre des orientations proposées et à soutenir les mesures développées ci-dessous afin de pouvoir présenter au plus vite des propositions concrètes pour les mettre en oeuvre.

Les orientations suivantes sont recommandées:

I. Rationaliser la charge des contrôles douaniers aux postes frontières

1.1 Répartir le travail douanier entre postes frontières et postes intérieurs :

- sur base d'une définition et d'une sélection des risques prioritaires à contrer ;

- en développant des méthodes de contrôles permettant ce partage (ex. : développement d'une approche coordonnée d'audits à posteriori) et ;

- en adaptant les facilités octroyées au commerce pour qu'elles intègrent des critères de sécurité et de sûreté.

2.2 Sécuriser la chaîne logistique d'approvisionnement des marchandises, notamment en développant et en améliorant les techniques de suivi des marchandises et de leurs moyens de transport.

II. Mettre en place une approche commune des risques liés aux marchandises et la rendre opérationnelle dans un mécanisme commun de concertation et de coopération

2.1 Les autorités douanières, en coopération avec les services concernés, devraient piloter, suivre et adapter le cadre de traitement des risques liés aux marchandises aux frontières extérieures, ce qui implique :

- de définir, d'identifier et de pondérer au niveau communautaire les risques prioritaires communs ;

- de mettre en place, au sein d'une structure organisationnelle à définir, des profils de risques communs qui puissent être régulièrement adaptés en fonction des résultats constatés ;

- de définir au niveau communautaire le type de contrôle à effectuer lorsque des risques ont été sélectionnés et développer des standards de contrôle.

2.2 Assurer que toutes les informations de risques concernant les marchandises et requises par les profils communs de risques soient toutes délivrées par les opérateurs économiques aux douanes communautaires, via un canal unique de transmission.

- ces données devraient impérativement être transmises par voie électronique ;

- certaines données sélectionnées devraient obligatoirement être transmises avant l'arrivée des marchandises, selon un délai à convenir.

2.3 Veiller à la mise en place d'une base de données et de systèmes (et/ou à une plus grande complémentarité et recoupement des systèmes existants) permettant de stocker, de traiter et d'échanger les données nécessaires, en particulier :

- une telle base de données, qu'elle soit centralisée au niveau de la Commission ou décentralisée au niveau des Etats membres, doit impérativement être accessible par tous les services des douanes des Etats membres ;

- les Etats membres devraient s'engager à mettre en place des systèmes informatisés de sélection des risques qui permettent d'intégrer les profils de risques identifiés au niveau communautaire de façon à compléter les profils nationaux ;

- il faudrait assurer la transmission rapide et efficace des informations sur les marchandises collectées par les douanes aux autres autorités compétentes et mettre en place des systèmes (ou accroître les recoupements entre systèmes existants) permettant l'échange entre tous ces services de renseignements ciblés.

III. Garantir un niveau adéquat de ressources humaines et d'équipements aux frontières extérieures.

3.1 Veiller à ce que les ressources nécessaires pour garantir un haut niveau de sécurité aux frontières extérieures soient assurées. Cela implique :

- Que les Etats membres assurent la disponibilité et la formation du personnel douanier nécessaire ; en terme de formation, il pourrait être fait appel au programme Douane 2007, à titre subsidiaire,

- de définir (au niveau communautaire) et d'assurer (au niveau national) l'équipement minimal nécessaire ;

- d'examiner les possibilités budgétaires communautaires, dans la mesure où les traités le permettent, en particulier en ce qui concerne le financement des équipements ;

- d'identifier les situations où une synergie accrue avec d'autres services aux frontières ou la concentration d'équipements douaniers coûteux en des postes frontières spécialisés, pourraient entraîner des économies d'échelle.

3.2 Envisager des actions spécifiques, déjà dans la phase qui précède l'adhésion, pour permettre aux pays candidats de bénéficier des meilleures pratiques douanières existantes à travers, par exemple, la constitution « d'équipes conjointes », composées de douaniers des Etats membres actuels et futurs et traitant, en fonction des demandes des états candidats, de questions spécifiques.

3.3 Envisager la constitution d'équipes de réaction rapide aux risques inattendus. Cela pourrait consister en un cadre comprenant une liste de points de contacts pour chaque Etat membre et d'agents de réserves spécialisés, rapidement mobilisables à la demande de l'un ou l'autre Etat concerné. De cette façon, cela ne devrait pas entraîner de charge budgétaire ou législative démesurée. Ultérieurement, la constitution d'équipes interdisciplinaires et spécialisées sur le traitement de risques particuliers pourrait être davantage formalisée, dans le cadre des débats sur la constitution d'un corps européen de garde frontières.

3.4 Recenser, développer et mettre en application au niveau communautaire les meilleures pratiques de travail pour la sécurité des frontières extérieures en s'appuyant sur les expériences nationales et communautaires.

3.5 Elaborer les mesures de formation commune et établir un cadre organisationnel pour la formation dans le domaine de la gestion des frontières extérieures pour le contrôle des marchandises.

IV. Assurer un cadre légal et réglementaire intégrant la dimension sécurité du travail douanier

4.1 Elargir le champ d'action des actes législatifs aux pouvoirs et tâches des douanes.

4.2 Adapter les actes législatifs et réglementaires, notamment le code des douanes et ses dispositions d'application, de façon à intégrer les évolutions de la gestion des risques, à insérer des critères de sécurité et de sûreté pour l'octroi de facilités douanières et à permettre un meilleur suivi de la chaîne d'approvisionnement, tout en assurant que les mesures ainsi prises sont conformes aux normes internationales en la matière et n'ont pas un effet restrictif sur le commerce et démesuré par rapport aux objectifs à atteindre.

4.3 Promouvoir des accords de responsabilités partagées dans un intérêt mutuel avec les pays limitrophes ainsi qu'avec les pays à destination ou au départ desquels sont établies les principales routes commerciales maritimes et aériennes. Cela implique également l'identification des flux à risque dès leur naissance dans des pays ou territoires tiers et, par ce biais, la recherche d'une organisation des contrôles économe en temps et en infrastructures et favorable à la coopération transfrontalière.

4.4 Renforcer et poursuivre la coopération avec les pays tiers.

V. Renforcer la Coopération avec la police, les gardes frontières et les autres autorités aux frontières extérieures.

5.1 Renforcer la coopération opérationnelle et l'échange d'informations, au niveau communautaire et à l'échelle nationale, entre les services chargés de la surveillance des frontières extérieures, notamment les gardes frontières, les services sanitaires, vétérinaires, environnementaux et autres, lorsque les tâches et missions de ces services se recoupent.

5.2 Veiller à mettre en place des structures de coopération/coordination entre services chargés de la surveillance des frontières extérieures aux postes frontières les plus importants.

5.3 Compte tenu de l'interdépendance et du caractère complémentaire des informations détenues par les douanes et les services de police, il faut accroître les synergies entre eux : impliquer activement les douanes dans les investigations menées par la police pour rechercher, identifier et poursuivre les criminels impliqués dans les trafics de marchandises illicites (et vice versa); prévoir des mécanismes communs d'échange et de croisement d'informations susceptibles de faciliter l'identification des fraudeurs et des tendances de fraude, assurer une coopération systématique entre ces services