52003DC0017

Livre Vert - Politique spatiale européenne /* COM/2003/0017 final */


LIVRE VERT - Politique spatiale européenne

(Présenté par la Commission)

Ce document a été préparé en coopération avec l'Agence Spatiale Européenne

TABLE DES MATIÈRES

LIVRE VERT sur la Politique spatiale européenne

AVANT-PROPOS

INTRODUCTION

Un débat nécessaire

Le processus Livre vert

1. L'EUROPE SPATIALE DANS UN CONTEXTE GLOBAL CHANGEANT

1.1. Les «fondamentaux»

1.1.1. L'indépendance d'accès à l'espace

1.1.2. Perpétuer l'excellence scientifique

1.1.3. La base industrielle et technologique

1.1.4. Le marché commercial et la demande institutionnelle

1.1.5. Les coopérations internationales

1.1.6. Les vols habités

1.2. Les ressources budgétaires et financières

1.3. Les vocations et compétences

2. METTRE DAVANTAGE L'ESPACE AU SERVICE DE L'EUROPE ET DES CITOYENS

2.1. Contribuer à l'avènement de la société de la connaissance et à la compétitivité de l'industrie européenne

2.2. Soutenir le développement durable

2.3. Renforcer la sécurité des citoyens

3. ETABLIR UNE ORGANISATION ET UN ENCADREMENT PLUS EFFICACE ET AMBITIEUX

3.1. Union Européenne, ESA et Etats membres: rôle et relations

3.2. Politique spatiale et cadres programmatiques

3.3. Faire évoluer l'industrie spatiale dans un cadre réglementaire prévisible et stable

CONCLUSIONS

AVANT-PROPOS

Les efforts développés en Europe durant ces dernières décennies ont été motivés par un souci d'autonomie en matière spatiale. Ils ont été menés jusqu'à présent essentiellement dans un cadre inter-gouvernemental, avec en premier lieu l'Agence Spatiale Européenne (ESA), dont la base de connaissance et d'expérience ainsi que le rôle fédérateur en font un acteur essentiel, ainsi que national (agences et industries nationales).

Ces divers efforts ont permis de créer une solide base industrielle et d'offrir à l'Europe une capacité reconnue dans le domaine des lanceurs, de la science et de la technologie, des applications, en particulier les satellites de télécommunications. Il en résulte une position de premier plan dans le domaine commercial.

Toutefois, le monde et l'Europe connaissent de profonds changements, qui concernent également la scène spatiale. Les succès acquis grâce notamment à l'action de l'Agence devraient être renforcés et seraient valorisés par leur mise au service de l'Union et le soutien de celle-ci.

Depuis quelques années, l'Union a en effet pris conscience de l'importance de l'espace. Elle intervient progressivement comme acteur, en fonction notamment des applications utiles à la poursuite de ses politiques (cf. le projet Galileo de positionnement et de navigation par satellites) et l'initiative GMES (Global Monitoring for Environment and Security) de surveillance pour l'environnement et la sécurité.

Le développement des applications spatiales, notamment pour l'observation de la terre, a permis d'élargir leur champ d'intérêt. L'espace représente un outil aux caractéristiques uniques pouvant être mis au service de nombreux objectifs et politiques, tels que les transports et la mobilité, la société de l'information et la compétitivité industrielle, la protection de l'environnement, l'aménagement du territoire, l'agriculture et la pêche, la protection civile, le développement durable et, plus généralement, la stratégie de Lisbonne visant «..à faire de l'Union la société basée sur la connaissance la plus avancée du monde..».

Par ailleurs, les défis croissants en matière de sécurité, associés aux usages multiples qui peuvent être faits de l'espace, amènent également aujourd'hui à reconsidérer dans son ensemble le rôle de l'Europe dans le domaine spatial. A cet égard, le développement rapide de la Politique Extérieure et de Sécurité Commune (PESC) et de la Politique Européenne de Sécurité et de Défense (PESD) appelle une attention particulière.

Inscrire l'espace dans la dynamique politique européenne en cours offrirait à ce secteur deux avantages principaux: d'une part l'ouverture sur un vaste domaine d'applications et d'utilisateurs; d'autre part, la possibilité d'une meilleure intégration des ressources et d'une plus grande attention politique.

Sur ce plan, la question fondamentale est celle de l'ambition européenne. Aucune des nations européennes ne saurait conduire de manière indépendante une politique spatiale à la hauteur des enjeux. Le fait que les Etats-Unis consacrent six fois plus de ressources publiques à l'espace que l'ensemble des pays européens ne peut laisser l'Europe indifférente si elle veut jouer un rôle dans le monde sur ces questions.

Certains des sujets à traiter sont délicats: il s'agit par exemple du degré d'indépendance dont veut disposer l'Europe dans ce domaine stratégique; de sa capacité à traiter globalement la dimension de sécurité et du niveau, du mode et de la cohérence d'investissements qu'elle est prête à consentir.

Sur le plan organisationnel, pour refléter les évolutions politiques, répondre plus efficacement à une volonté européenne renouvelée et résoudre certaines ambiguités de la situation actuelle, une rediscussion des rôles et responsabilités des différents acteurs est nécessaire, dans un esprit de subsidiarité.

INTRODUCTION

Ce Livre vert a pour but d'ouvrir un débat sur le futur à moyen et long terme de l'utilisation de l'espace au bénéfice de l'Europe et sur la politique spatiale de celle-ci.

Ce débat s'inscrit naturellement dans les discussions sur l'avenir de l'Europe devant mener à la prochaine Conférence intergouvernementale.

Dans son contenu, le Livre vert reflète les préoccupations de la Commission européenne, souvent partagées par l'Agence spatiale européenne (ESA). Il apporte notamment un premier élément de réponse à la demande exprimée par le Parlement européen dans sa Résolution sur l'espace [1].

[1] Résolution du Parlement, 17 janvier 2002, PR TAPROV(2002)0015 «L'Europe et l'espace»

Un débat nécessaire

«..Frontière ultime..», «..découverte de l'univers et de ses origines..», «..vie sur d'autres planètes..», «..on a marché sur la lune.. », «..héros de l'espace..». L'espace représente pour l'humanité une source infinie de rêves intemporels et de réalités marquantes.

En pratique, l'espace constitue depuis longtemps pour l'Europe une source de progrès et de succès technologique et commercial. Les systèmes spatiaux jouent déjà un rôle sensible dans de nombreux aspects de la vie quotidienne des citoyens européens: les communications par satellites permettent d'acheminer des messages dans les contrées les plus reculées de la planète; chacun peut regarder les chaînes de télévision propres à sa culture à des milliers de kilomètres de son pays d'origine; les données satellitaires d'observation de la terre sont à la base des prévisions météorologiques.

La technologie spatiale permet de sauver des vies humaines grâce aux moyens de recherche et sauvetage déployés à l'échelle mondiale, mais aussi grâce aux infrastructures de surveillance permettant une intervention efficace lors des catastrophes naturelles.

D'une manière générale, les données et informations provenant des systèmes spatiaux sont indispensables à l'organisation et au bon fonctionnement d'une société moderne.

La situation présente et les perspectives d'avenir du secteur spatial européen sont cependant préoccupantes.

Tout d'abord, l'espace est, et restera pour longtemps encore, un secteur d'activité à haut risque, à la viabilité économique fragile, même si le potentiel de ses applications va en s'accroissant.

Dans les faits, l'équilibre du modèle économique sur lequel a reposé le développement de l'espace en Europe jusqu'à présent, associant au soutien des autorités publiques une forte composante commerciale, s'est largement dégradé, comme suite notamment aux difficultés du marché des télécommunications et de la montée en puissance de plusieurs régions du monde. Il est aujourd'hui compromis.

Dans le même temps, des choix et des investissements lourds doivent être sans cesse faits pour rester dans la course sur le plan technologique, tandis que le différentiel d'investissement, en particulier vis-à-vis des Etats-Unis, s'aggrave.

Enfin, la situation de l'espace en Europe reflète certaines ambiguités. Ceci résulte en premier lieu de la nature plus stratégique que commerciale de l'espace et du rôle primordial que jouent les Etats. Les positions prises par ceux-ci, selon qu'on se situe au niveau national, inter-gouvernemental ou communautaire, peuvent varier sensiblement et les interventions nationales dans le jeu industriel, à l'heure où cette industrie tend à prendre une dimension trans-nationale, sont lourdes de conséquences.

Toute puissance spatiale est synonyme de volonté politique. Pour sa part, l'Europe a beaucoup à gagner - ou à perdre - selon sa présence ou son absence dans ce domaine. Pour éviter que des occasions ne soient manquées, pour guider les décisions à prendre et les actions à mener, un débat de fond s'avère nécessaire.

Pour faciliter et structurer celui-ci, le présent document passe tout d'abord en revue les «fondamentaux» sur lesquels repose l'activité spatiale en Europe (chapitre I); il illustre ensuite le potentiel considérable qu'elle peut apporter au bénéfice des citoyens et des politiques de l'Union (chapitre II); il s'achève sur l'examen de certains aspects institutionnels et réglementaires et sur les conséquences à en tirer sur le plan organisationnel (chapitre III).

Le processus Livre vert

Le Livre vert constitue une nouvelle étape dans la dynamique d'évolution du secteur spatial européen. Au travers de celui-ci, la Commission souhaite contribuer à une prise de conscience des autorités politiques, des entreprises et des citoyens sur la signification stratégique et politique de ces sujets, trop souvent réservés aux spécialistes.

Ce document prend en compte les réflexions communes de la Commission européenne et de l'Agence spatiale européenne [2] développées dans le cadre de la Task force sur l'espace créée en 2001 et poursuit les travaux conjoints sur la stratégie européenne pour l'espace et la politique spatiale européenne [3].

[2] Il a également bénéficié, dans sa préparation, de travaux réalisés récemment dans chacune des deux institutions, notamment :

[3] COM(2001)718 final

Sans prétendre à l'exhaustivité, le Livre vert vise à soulever les questions qui apparaissent les plus pertinentes pour déterminer les options à prendre pour le moyen et long terme. Les réponses des parties intéressées aux questions posées permettront par la suite d'établir un plan d'action («Livre blanc»).

1. L'EUROPE SPATIALE DANS UN CONTEXTE GLOBAL CHANGEANT

Le Livre vert est articulé autour d'un postulat et d'une prémisse:

- l'espace doit, par nature, être envisagé au plan global;

- la présence effective de l'Europe dans l'espace conditionne le succès de certaines de ses politiques.

1.1. Les «fondamentaux»

La disponibilité de capacités européennes dans un certain nombre de domaines est indispensable, afin que l'Europe et ses différents acteurs puissent continuer à assurer les conditions d'un tel succès, soit en concurrence, soit en coopération avec les autres puissances spatiales mondiales.

La première de celles-ci, les Etats-Unis, utilise les systèmes spatiaux comme un instrument pour s'assurer un leadership stratégique, politique, scientifique et économique associant les concepts de «space dominance» et d'«information dominance».

Cette volonté politique se traduit par un niveau d'investissement sans aucun équivalent: les dépenses américaines pour et dans l'espace représentent environ 80% des dépenses mondiales en la matière (civil + défense).

La Russie pour sa part, qui est également un pionnier des développements spatiaux, a su maintenir une base scientifique, technologique et opérationnelle très importante. Dans l'état actuel, ce pays a développé davantage de liens institutionnels et de coopérations industrielles avec les Etats-Unis qu'avec des partenaires européens. L'Ukraine a, par ailleurs, développé un savoir-faire technologique conséquent, notamment dans le secteur des lanceurs.

Enfin, les activités des nouvelles puissances spatiales apparues plus récemment (Japon, Chine, Inde, Brésil) sont très empreintes de considérations stratégiques.

L'Europe pour sa part a choisi une voie originale, marquée jusqu'à présent de quelques caractéristiques particulières (cf. figure 1):

- une ambition politique: l'acquisition et le maintien d'un accès autonome à l'espace garanti par le développement de lanceurs indépendants et de satellites;

- un effort soutenu pour le développement de la science, des applications et des infrastructures associées;

- une politique industrielle visant au développement d'une base industrielle compétitive et innovante et à la répartition géographique des activités;

- la priorité donnée aux aspects civils et commerciaux, notamment dans le domaine des services de lancement et des satellites;

- le choix de la coopération internationale avec les grandes puissances spatiales pour la réalisation de grands instruments et de missions d'envergure, notamment pour les vols habités.

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

Fig. 1: Répartition des investissements européens publics et privés en matière spatiale (année 2000) [source: Euroconsult, ESA]

1.1.1. L'indépendance d'accès à l'espace

Lanceurs et infrastructures de lancement constituent des éléments de base pour tout projet spatial. Depuis 1980 l'Europe dispose, avec Ariane et le Centre Spatial Guyanais (qui constitue une infrastructure d'intérêt européen), d'un accès indépendant et fiable à l'espace qui lui garantit une large liberté d'initiative dans la réalisation de ses ambitions spatiales.

Cette autonomie s'est doublée d'une réussite commerciale qui a pris son essor au cours des années 80, dans un contexte international favorable marqué notamment par:

- le quasi-abandon des lanceurs classiques par les Etats-Unis au profit de la navette spatiale, jusqu'à son accident en 1986;

- l'interdiction d'accès au marché commercial imposée aux lanceurs russes jusqu'à la fin du régime soviétique (1990).

Cette période est aujourd'hui révolue. L'opérateur européen Arianespace est désormais confronté à une situation concurrentielle sévère, à laquelle s'ajoute un fléchissement conjoncturel du marché des services de lancement.

Le lanceur de nouvelle génération Ariane-5 est opérationnel. Mais dans ces circonstances, sa compétitivité à moyen terme repose à la fois sur de nouveaux développements techniques et sur un renouvellement, en préparation, du mode de soutien public à son exploitation.

Parallèlement, un élargissement de la gamme s'ébauche avec le lanceur Vega prévu pour 2006 et l'implantation, à l'étude également pour 2006, du lanceur russe Soyouz sur le Centre Spatial Guyanais.

Autonomie européenne et compétitivité: un équilibre délicat

* La disponibilité permanente d'un lanceur fiable pour la demande institutionnelle européenne - de 0 à 3 missions par an - a reposé jusqu'à aujourd'hui sur un lanceur capable de compléter son plan de charge par des contrats de service sur le marché mondial, c'est-à-dire en pratique un lanceur optimisé pour les satellites de télécommunications.

* Sur ce principe, la réussite commerciale d'Ariane a assuré l'équilibre économique de son exploitation et a permis aux Etats de faire porter en priorité leur effort sur les nouveaux développements destinés à préserver la compétitivité.

* Cet équilibre est actuellement remis en cause par la conjonction de trois facteurs : la contrainte économique de la transition entre les deux générations Ariane-4 et Ariane-5, la contraction du marché commercial et la chute des prix due à la surcapacité mondiale des moyens de lancement.

Au-delà du processus de rétablissement de la stabilité économique du lanceur européen à moyen terme, la question fondamentale reste posée de la garantie de l'accès européen à l'espace sur le long terme:

Q1.: L'Europe entend-elle maintenir, à l'horizon 2020 et au-delà, son indépendance d'accès à l'espace, fondée sur le développement d'une famille de lanceurs européens et sur leur utilisation privilégiée par les acteurs institutionnels?

Quelle est, dans cette perspective, l'évolution souhaitable du partage des responsabilités entre puissance publique et secteur privé dans l'équilibre économique de l'exploitation de ces lanceurs et dans le financement des nouveaux développements?

1.1.2. Perpétuer l'excellence scientifique

La communauté scientifique européenne occupe une position de premier plan dans les deux disciplines majeures de la science spatiale que sont l'astrophysique et l'exploration du système solaire, de même que dans l'observation de la terre. Outre la compétence propre des laboratoires européens, plusieurs facteurs ont joué de façon décisive :

- Le cadre programmatique fortement intégré représenté par l'ESA pour définir la plupart des missions et développer les systèmes spatiaux (cf. encadré);

Caractéristiques du programme scientifique intégré de l'ESA

* Stabilité du budget voté par périodes quinquennales (niveau annuel : 360 MEUR) auquel les Etats membres ESA contribuent de manière obligatoire.

* Programmation à long terme organisant l'alternance entre missions de différente ampleur, assurant l'équilibre entre les disciplines, et déterminant le choix entre autonomie européenne ou cadre coopératif.

* Complémentarité de responsabilité entre l'ESA, développant les plates-formes, et les laboratoires nationaux, développant les instruments embarqués.

Un programme comparable a été mis en place par l'ESA pour les utilisateurs scientifiques de l'observation de la terre.

- La disponibilité d'un moyen de lancement indépendant, qui a permis la réalisation de plusieurs missions spatiales de grande envergure entièrement européennes, plaçant l'Europe en position de pionnier dans certains domaines (par exemple astrométrie, astronomie infrarouge ou rayons X) ;

- Les compétences technologiques de l'industrie, et les synergies existant dans ce domaine avec les programmes d'applications civiles et de défense.

La science spatiale européenne apporte une contribution importante à la connaissance du monde physique et à la recherche de la vie dans l'espace. Elle est aujourd'hui complétée par les disciplines des sciences de la terre et celles qui utilisent la microgravité. C'est aussi un puissant moteur technologique, grâce à une prise de risque supérieure à celle admise pour les systèmes opérationnels. Le niveau de financement sur le long terme, le partage des responsabilités entre acteurs nationaux et européens, et l'équilibre entre autonomie européenne et coopération internationale sont des éléments décisifs pour la vitalité du programme de science spatiale, lui-même composante essentielle du programme spatial européen.

1.1.3. La base industrielle et technologique

Pour être compétitive et crédible, l'Europe spatiale doit disposer d'un tissu industriel de qualité et d'un accès aux technologies clés.

L'industrie

La base industrielle forte et compétitive au plan mondial existant en Europe, capable de maîtriser toute la filière, doit être maintenue et/ou renforcée si l'Europe veut pouvoir exercer sa liberté d'initiative dans le domaine de l'espace.

Aujourd'hui, le secteur spatial en Europe représente 30000 emplois directs hautement qualifiés, répartis dans environ 2000 sociétés, et assurant l'ensemble des compétences en matière de systèmes, sous-systèmes et composants.

L'industrie spatiale est à la fois:

- Stratégique: elle assure à l'Europe l'indépendance dans l'essentiel des secteurs de l'espace;

- Duale: elle intervient à la fois sur les marchés civils et de défense;

- «Catalyseur»: elle agit au delà du secteur strictement spatial, notamment pour l'industrie des équipements électroniques grand public et de la distribution télévisuelle.

Une concurrence de plus en plus forte a conduit l'industrie spatiale européenne, au cours des dernières années, à opérer des restructurations majeures. Elle est maintenant organisée à l'échelle de l'Europe et se présente désormais en concurrent ou en partenaire crédible de son homologue américaine.

Elle est cependant touchée par la crise de croissance dans le domaine des télécommunications et la chute sensible de la demande de ce type de satellites de la part des opérateurs qui en a résulté.

Une industrie compétitive

* Le chiffre d'affaires total de l'industrie spatiale européenne est de l'ordre de 5.5 MdEUR/an.

* Au cours des dernières années, la moitié du chiffre d'affaires total de l'industrie spatiale européenne provient des commandes institutionnelles, l'autre moitié du marché commercial (cf. figure 2). Cette situation contraste avec celle qui existe aux Etats-Unis, où les trois quarts du chiffre d'affaires proviennent des commandes de la NASA et du ministère de la défense.

* Au sein de la dépense publique, le rapport entre civil et défense est de 1 à 5 en Europe, tandis que les deux secteurs sont à parité aux Etats-Unis. L'industrie européenne ne bénéficie donc pas des mêmes synergies que son homologue américaine.

* Les investissements réalisés dans le secteur des applications spatiales induit en général un marché de services (par exemple la distribution TV) supérieur d'un facteur 10 (cf. figure 3).

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

Fig. 2: Evolution du chiffre d'affaire consolidé de l'industrie spatiale européenne (en MEUR) [Source : Commission]

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

Fig. 3: Estimation de la chaîne de valeur cumulée pour le marché global commercial (navigation et communication par satellites - 1998-2007)(en MdEUR)

[Source: Arianespace, ESA]

L'Europe doit déterminer si elle veut maintenir une base industrielle couvrant l'ensemble de la filière spatiale et de ses applications. Dans le secteur industriel, elle doit également identifier quels sont les domaines à valeur ajoutée maximum, où elle pourrait développer les meilleurs avantages comparatifs.

La technologie

Pour assurer sa compétitivité, l'industrie européenne requiert une base technologique large et efficace, entretenue par des programmes de recherche et de démonstration.

Ceci suppose en particulier le maintien d'une coopération étroite entre l'industrie spatiale, les fournisseurs de services et les organismes publics de recherche, ainsi que l'identification précoce des besoins technologiques des décennies à venir.

Dans le domaine spatial, les filières technologiques sont chères et les volumes de marché étroits; ceci rend l'intervention de la puissance publique incontournable.

Dans ce contexte, l'Union Européenne, l'ESA, les acteurs nationaux et l'industrie ont mis en place différents instruments pour intervenir sur toute la chaîne de la valeur.

Soutien à la technologie: une palette d'actions

* Le plan directeur de technologie spatiale développé par l'ESA fournit le cadre dans lequel tous les acteurs de l'espace en Europe, publics et privés, sont invités à identifier les besoins européens et à participer à des actions conjointes. L'ESA conduit elle-même plusieurs programmes de recherche et de démonstration technologique.

* Le 6ème programme cadre de recherche de l'Union concentre, pour la partie spatiale, ses efforts sur les applications liées à la télédétection, la navigation, et les communications.

* Les programmes nationaux de R&D et les initiatives auto-financées par l'industrie complètent le paysage européen de la technologie spatiale.

Ceci n'exclut pas un besoin éventuel de programmes, instruments ou mécanismes de coordination additionnels.

Q2.: Dans quels domaines - y compris en ce qui concerne les systèmes spatiaux utilisés pour la sécurité et la défense - l'Europe présente-t-elle des déficits technologiques et industriels critiques, et comment y remédier?

1.1.4. Le marché commercial et la demande institutionnelle

Le marché commercial ouvert représente environ 30% du marché global des activités spatiales mondiales. Le solde est le fait d'une demande institutionnelle dont la part essentielle - américaine - n'est, jusqu'à ce jour, pas accessible aux acteurs européens. Ces derniers ont principalement investi le segment commercial.

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

Fig.4: Satellites commerciaux: commandes passées respectivement à l'industrie européenne et américaine depuis 1995

(en nombre de satellites) [Source: Euroconsult, AIA]

N.B.: en 2000, la demande accrue des opérateurs de satellites de télécommunications, jointe à un contrôle à l'exportation plus sévère de l'administration américaine, a été particulièrement bénéfique à l'industrie européenne

Les dysfonctionnements du marché spatial commercial (notamment certaines pratiques de prix, des surcapacités, des restrictions gouvernementales) rendent ce marché difficile.

Les industriels européens sont plus vulnérables, car la part relative que représente ce type de marché dans leur activité est plus importante pour eux que pour leurs homologues américains. Les analyses convergent pour indiquer cependant que certaines niches, essentiellement dans les applications, présentent un potentiel commercial favorable.

Pour instaurer un meilleur équilibre à long terme, les industriels réclament le développement d'une véritable demande institutionnelle en Europe, centrée en particulier sur les aspects environnementaux, de sécurité et de défense, posant au passage également la question de la préférence européenne.

Les Etats-Unis en particulier protègent leur industrie des pressions commerciales extérieures grâce au soutien d'un large marché national de sécurité et de défense fermé aux fournisseurs étrangers. L'application aux satellites civils commerciaux de lois de contrôle à l'exportation - notamment l'application des clauses relatives aux technologies duales - permet de renforcer ce soutien.

Le marché spatial mondial: comparaison entre dépense publique et commerciale

[Source: ESA]

* Le marché spatial mondial - y compris les revenus commerciaux générés par l'exploitation des applications spatiales (télécommunications, navigation, observation de la Terre) - est estimé à 167 MdEUR en 2001.

* Les budgets des programmes spatiaux institutionnels dans le monde en 2001 s'élèvent à un total de 42 MdEUR (activités civiles: 26 MdEUR, activités de défense: 16 MdEUR). Le marché commercial mondial - satellites, services de lancement et opérations - en 2001 est estimé à 49 MdEUR.

* Pour 2002, la dépense publique des Etats-Unis dans le domaine spatial s'élève à 31.8 MdEUR (en augmentation de 5% par rapport à 2001) et se divise sensiblement à parts égales entre dépenses civile et militaire.

* En 2002, la dépense publique européenne en matière spatiale est de l'ordre de 6 MdEUR (en décroissance légère par rapport à 2001), dont 90% consacrée aux programmes civils.

Q3.: Quelles sont les perspectives de développement de la demande institutionnelle européenne? Faut-il, parallèlement, recourir à des accords avec les partenaires internationaux clés (Etats-Unis, Russie) pour établir des conditions de marché plus équitables?

1.1.5. Les coopérations internationales

La coopération internationale peut être envisagée dans les activités spatiales en fonction du souhait ou de la nécessité:

- d'atteindre certains objectifs de façon coopérative plutôt qu'autonome;

- de clarifier certains sujets dans un contexte mondial, par exemple les questions de commerce international, de réglementation, de normalisation, etc...

L'ESA et certains Etats membres ont établi une longue tradition de coopération avec les autres puissances spatiales. Plus récemment, de nouvelles coopérations internationales ont vu le jour, notamment à l'occasion du lancement des initiatives Galileo et GMES par l'Union Européenne, rendant plus que jamais souhaitable que l'Europe «..s'exprime d'une seule voix..».

Les relations de coopération spatiale de l'Europe avec les Etats-Unis ont été privilégiées depuis l'origine, compte tenu notamment de l'envergure du programme américain et de la parenté des cultures scientifiques, technologiques et industrielles.

Elles sont néanmoins marquées par une affirmation constante de la volonté américaine de prééminence dans l'espace. L'Europe participe aux initiatives américaines en science spatiale et dans le domaine des vols habités mais, en règle générale, la NASA, grâce à l'importance du montant de ses investissements entend garder la maîtrise du concept, des développements et du moyen de lancement, de sorte que l'Europe contribue à des éléments moins stratégiques de la mission.

La proportion d'instruments embarqués, le partage des temps d'observation ou d'expérimentation entre les deux communautés scientifiques dans le cadre d'un projet coopératif reflète souvent ce type de relation.

Dans la coopération spatiale avec la Russie, de moindre ampleur, la contribution européenne a comporté la fourniture d'instruments scientifiques embarqués sur des sondes interplanétaires ou à bord des stations spatiales. Dix-sept astronautes européens ont participé à des programmes russes.

D'un point de vue politique, une coopération plus poussée de l'Europe avec la Russie, dans le cadre d'un partenariat plus étroit et grâce aux instruments actuels ou futurs, pourrait être d'intérêt mutuel. L'Ukraine pourrait également faire l'objet d'une attention politique particulière.

L'Europe a aujourd'hui acquis une forte capacité dans le domaine des lanceurs, de la science et des applications. Elle est désormais capable de prendre l'initiative, d'intervenir à parité avec ses partenaires et de jouer un rôle stratégique dans les grands projets spatiaux réalisés en coopération. Une réflexion paraît nécessaire sur l'ensemble des grands programmes spatiaux du futur quant à l'équilibre à trouver entre autonomie européenne et coopération internationale.

1.1.6. Les vols habités

Le vol spatial habité constitue l'un des aspects les plus emblématiques de l'activité spatiale et consomme une part importante du budget de l'ESA, qui a créé un corps des astronautes européens. Quarante ans après la première mission orbitale, le vol spatial habité s'organise aujourd'hui entièrement dans le cadre coopératif de la station spatiale internationale (ISS).

L'ISS intègre, sous responsabilité américaine, les contributions des cinq principaux participants: Etats-Unis, Russie, Japon, Canada et Europe. Il s'agit de l'infrastructure de recherche civile la plus ambitieuse et la plus coûteuse jamais construite (environ 30 MdEUR de coûts de développement).

La contribution de l'Europe, via l'ESA, à l'ISS reste modeste (cf. encadré). Comparée aux précédentes coopérations avec Américains et Russes dans le domaine des vols habités (Spacelab, accès à la station Mir), elle représente néanmoins une évolution sensible, à la fois par la dimension technologique et industrielle des développements et par les possibilités accrues d'expérimentation offertes à la communauté scientifique européenne.

La participation européenne à l'ISS

La contribution européenne représente environ 8% de l'effort total (soit 3 MdEUR d'investissements et 300 MEUR/an pour les coûts d'exploitation). Elle comporte:

- un élément de la station, le laboratoire pressurisé «Columbus»;

- l'instrumentation scientifique associée;

- un vaisseau automatique de transport de fret, l'«ATV» (Automated Transfert Vehicle), qui sera régulièrement lancé par Ariane-5 vers la station pour répondre à ses besoins logistiques.

Les astronautes européens ont accès à la station via la navette spatiale américaine ou le vaisseau Soyouz russe pour participer à la mise en oeuvre des expériences.

Le niveau de l'effort européen dans le domaine des vols habités - Spacelab et ISS principalement - a été parfois discuté, notamment au regard de son intérêt scientifique et des possibilités effectives d'expérimentation à bord et d'accès des astronautes européens.

Actuellement, les décisions américaines concernant le financement de l'ISS, le programme d'expérimentation à bord, de visites de astronautes et de desserte de la station doivent être examinés à la lumière des objectifs de l'Europe.

Q4.: D'un point de vue européen, les résultats attendus à terme du programme d'expérimentation à bord de l'ISS sont-ils à la hauteur de l'investissement et des coûts d'exploitation ? Comment l'Europe doit-elle faire évoluer sa participation et ses objectifs?

1.2. Les ressources budgétaires et financières

Le niveau moyen de financement public des activités spatiales en Europe (EUR 15) est inférieur à 15 EUR par habitant et par an. Le montant correspondant aux Etats-Unis est d'environ 110 EUR. A titre illustratif, la répartition des ressources affectées au secteur spatial en 2000 figure ci-dessous.

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

Fig. 5: Distribution des sources de revenus du secteur spatial en Europe (année 2000)

(en %) [Source:Euroconsult, ESA]

L'optimisation de certains instruments et de l'architecture institutionnelle devrait permettre d'atteindre une plus grande efficacité dans l'usage des ressources existantes (cf. chapitre 3). Par rapport au principal concurrent, les Etats-Unis, le rapport d'investissement restera toutefois largement défavorable, et l'Europe devra déterminer jusqu'où elle souhaite accroître ses investissements dans le domaine spatial.

En Europe, l'espace a été jusqu'à présent financé de manière prépondérante sur des fonds issus des budgets de recherche. Le développement et l'exploitation des lanceurs, des applications et des infrastructures dépasse cependant largement ce cadre budgétaire.

Par ailleurs, au niveau communautaire, il est possible de faire appel à plusieurs instruments (réseaux trans-européens, recherche et développement, fonds structurels, aide au développement,...) aux règles différentes.

Q5.: Comment organiser de la façon la plus cohérente le financement des activités spatiales au niveau européen, et éviter qu'un accroissement des ressources au niveau européen s'accompagne d'une réduction équivalente des investissements au niveau national?

1.3. Les vocations et compétences

Les réflexions menées pour la mise en place de l'Espace européen de la recherche et à l'occasion de STAR21 montrent qu'il existe en Europe une série de problèmes génériques propres aux disciplines à caractère scientifique, avec notamment une affluence moindre d'étudiants.

Compte tenu du très long cycle de vie des projets spatiaux et de leurs spécificités, le secteur est particulièrement sensible au maintien du transfert de connaissances et d'informations entre les générations de scientifiques et d'ingénieurs. Toutefois, on observe que la population des spécialistes de l'espace vieillit.

Ressources humaines: un constat préoccupant

* En Europe, il est estimé que près de 30% des employés du secteur spatial partiront en retraite dans les prochaines 10 années. Aux Etats-Unis, 26% des personnes employées dans le secteur aérospatial partiront en retraite dans les 5 prochaines années; 54% ont plus de 45 ans.

En dépit des gains de productivité de l'industrie spatiale (cf. figure 6), l'Europe doit investir dans le personnel et les compétences. En ce qui concerne le secteur spatial, la question des vocations et de la mobilité des scientifiques et ingénieurs se pose avec une acuité particulière.

L'Europe doit accroître le nombre de ses chercheurs dans ce domaine, par exemple en tirant un meilleur parti du potentiel scientifique féminin, en attirant des chercheurs et ingénieurs de pays tiers, en facilitant le retour des scientifiques européens expatriés (en évitant notamment le risque de "fuite des cerveaux"), et en mettant sur pied des programmes attrayants pour de jeunes scientifiques.

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

Fig. 6: Evolution de la productivité dans le secteur spatial industriel européen (kEUR par employé) [Source: Eurostat]

Q6.: Quelles actions faut-il entreprendre par rapport aux professions de l'espace et des domaines connexes pour rendre celles-ci plus attirantes, en particulier vis-à-vis des jeunes?

2. METTRE DAVANTAGE L'ESPACE AU SERVICE DE L'EUROPE ET DES CITOYENS

Les technologies spatiales peuvent offrir, de manière croissante, des opportunités d'usages multiples, permettant d'élaborer des solutions en réponse aux divers besoins des citoyens européens. Elle doit toutefois pour cela répondre davantage à l'attente des utilisateurs, en matière de coût des solutions, d'adéquation aux besoins réels et de continuité dans les services offerts.

Au-delà de l'utilisation très large des satellites de télécommunications pour l'échange d'informations (téléphonie, télévision et transmission de données numériques), l'Europe a déjà développé ces dernières années une série d'applications démontrant l'apport des infrastructures spatiales, qui sont pour la plupart à l'origine de services d'intérêt général pour les citoyens.

Exemples actuels d'applications spatiales pour les citoyens et les politiques

* Les prévisions météorologiques à court terme (5 jours) et à moyen terme (3 mois) sont rendues possibles notamment grâce à l'utilisation systématique des satellites d'observation de la terre. Ceux-ci sont aussi particulièrement importants pour la détection de phénomènes météorologiques majeurs tels que les cyclones ou El Niño.

* La mise en place d'un système mondial de navigation et de localisation par satellites permet de réduire la durée des déplacements des voyageurs qui peuvent disposer à tout moment d'une information précise et fiable de positionnement leur permettant d'optimiser leur trajet.

* La sécurité des citoyens bénéficie également de l'utilisation de la technologie spatiale (suivi du transport des matières dangereuses, surveillance des frontières, échange d'informations sensibles entre administrations).

* La mise en oeuvre rigoureuse de la politique agricole commune requiert des moyens de contrôle, notamment de la production ou de la mise en jachère. Les satellites d'observation de la terre offrent aux administrations nationales et aux acteurs concernés des moyens uniformes pour l'ensemble de l'Union, mobilisables avec peu de contraintes administratives, offrant des résultats d'une grande précision et fiabilité.

* Compte tenu des possibilités de surveillance en haute mer, la politique de la sécurité maritime et la nouvelle politique de la pêche généralisent l'emploi de la technologie de localisation par satellites. Ces applications combinent positionnement et télécommunication par satellites.

Valeur ajoutée pour l'Union

Plus généralement, une forte présence européenne dans certains domaines clés des applications spatiales est indispensable, à la fois comme atout sur le plan politique, et pour permettre à l'Union de préserver son indépendance stratégique et contribuer à la compétitivité de son économie.

La décision de lancer le programme Galileo démontre la volonté européenne de réussir à prendre une place à sa mesure dans le marché émergent des services de navigation et de localisation. A ce titre, les nouvelles technologies spatiales offrent également un potentiel considérable pour accroître la coopération internationale et accéder à de nouveaux marchés (en particulier l'Asie et l'Amérique du Sud).

Cette plus grande ouverture vers les citoyens et les intérêts de l'Union permet d'élargir le champ à d'autres acteurs que ceux de l'industrie spatiale classique: fourniture de services, de contenus, utilisateurs privés et publics. De facto, elle enrichit considérablement le potentiel du secteur spatial.

Ce faisant, il s'agit d'accorder une priorité plus importante au processus de transfert de technologies du secteur de la recherche vers le secteur commercial, par exemple en encourageant l'investissement privé par le biais d'engagements à long terme des autorités publiques concernant leurs besoins à satisfaire.

Il est également essentiel de favoriser le passage des actions de recherche vers des applications industrielles et des services à valeur ajoutée qui dépassent la stricte filière spatiale. En cela, il s'agit d'accroître l'influence de la demande des utilisateurs sur la fourniture et la structure du secteur spatial offrant. L'Union pourrait jouer un rôle déterminant dans la structuration et la fédération progressive de cette demande, notamment la demande publique.

Pour les décennies à venir, l'Europe doit faire face à de nouveaux défis et des besoins de grande ampleur. Trois thèmes majeurs, objets de l'attention de Sommets européens, peuvent servir d'illustration à l'apport potentiel du secteur spatial. Ceux-ci portent sur:

- l'objectif de faire de l'Europe la société de la connaissance la plus avancée au monde d'ici 2010 (y compris dans sa dimension élargie et en permettant sa diversité culturelle);

- la position forte prise par l'Union sur les questions de développement durable;

- la PESC et la PESD, qui se développent activement.

2.1. Contribuer à l'avènement de la société de la connaissance et à la compétitivité de l'industrie européenne

Les systèmes spatiaux sont intimement liés à l'établissement d'une société de la connaissance compétitive visant à la fois à assurer que tous les citoyens européens, notamment ceux ayant des besoins particuliers, puissent avoir accès aux technologies et services avancés, et à rendre l'industrie européenne plus compétitive. La télévision numérique, les communications mobiles de 3ème génération et internet, isolément ou en combinaison, sont des exemples de plates-formes utiles au déploiement de ces services, auxquelles les systèmes spatiaux peuvent techniquement contribuer [4].

[4] La Commission a lancé, en 2002, le plan d'action «eEurope 2005» qui s'appuie sur ces technologies pour moderniser les services publics, créer un environnement favorable pour l'e-business, et sécuriser les réseaux à large bande qui sont nécessaires pour une économie moderne.

Le problème clé dans ce domaine est de développer de nouvelles applications, économiquement viables, exploitant au mieux les avantages respectifs des technologies terrestres et spatiales, lesquelles ont des cycles industriels et des profils de rendements de capitaux investis généralement différents. Toutefois, dans un contexte très concurrentiel, le niveau du soutien public aux développements mérite débat.

Exemples de services liés à la société de la connaissance

* A la mi-2002, 40% des foyers dans l'Union avaient un accès à internet - soit environ 150 millions d'utilisateurs web en Europe - à parité avec les Etats-Unis.

* Malgré des difficultés conjoncturelles actuelles, les satellites de télécommunications constituent le plus important marché pour l'espace dans le monde. Les entreprises européennes connaissent de réels succès: elles comptent par exemple actuellement 2 opérateurs de services parmi les 4 premiers mondiaux.

* En Europe, plus de 1250 chaînes de TV sont diffusées par satellite, directement ou indirectement, à 100 millions de foyers.

De même, il serait utile de définir quels pourraient être les nouveaux systèmes spatiaux nécessaires à l'optimisation du réseau global d'échange d'information, pour quelles applications, et sur quelle base économique.

Q7.: Quelles seraient les conditions pour l'émergence d'applications et de services spatiaux économiquement viables et compétitifs pour les citoyens et les entreprises? Des actions politiques seraient-elles justifiées et si tel était le cas, dans quel mesure un soutien public pourrait-il être considéré nécessaire?

En 2004, dix nouveaux Etats membres rejoindront l'Union, ajoutant soixante quinze millions de citoyens à la communauté existante de trois cent soixante quinze millions de personnes, ce qui augmente d'autant le bénéfice apporté par tout investissement dans des systèmes spatiaux.

"L'inclusion sociale", en termes d'échanges de communications, de circulation des contenus culturels et d'accès à des services de qualité, est cruciale pour le succès d'une intégration rapide; "l'inclusion numérique" - qui fait appel aux moyens spatiaux- en constitue un élément primordial.

Une Union élargie à la dimension continentale, à la géographie encore plus diversifiée et au niveau d'équipements et d'infrastructures très inégal, suscite une demande accrue, tirant parti des caractéristiques particulières des infrastructures basées dans l'espace.

Ces capacités devraient accélérer l'intégration des nouveaux Etats membres et permettre d'améliorer plus rapidement la qualité des services auxquels ont accès leurs citoyens, leurs entreprises et les autorités publiques pour:

- le développement de leurs liens avec le reste des pays de l'Union (par exemple en vue du renforcement des infrastructures de communications);

- préserver les intérêts de l'Union élargie (notamment en vue de la surveillance et de la sécurité aux frontières).

La diversité et les échanges culturels des populations pourront également être mieux servis grâce à la souplesse permise notamment par la diffusion de chaînes de télévision par satellites.

L'espace en soutien du processus d'intégration

* Des exemples d'applications spatiales adaptées ont été identifiés dans des domaines comme le contrôle aux frontières et la distribution des données pour permettre la pleine participation au système d'information de Schengen.

* Les données collectées par les moyens spatiaux sont utiles à l'établissement du cadastre et à l'aménagement du territoire, ainsi qu'au suivi et au contrôle des processus de réduction de la pollution industrielle.

* Les satellites peuvent contribuer à l'accès internet à large bande, notamment au bénéfice des régions rurales.

* Plusieurs futurs Etats membres ont déjà décidé de participer à des systèmes satellitaires européens régionaux de distribution de télévision.

2.2. Soutenir le développement durable

L'Union s'est engagée à soutenir une politique de développement durable, tout spécialement en faveur des pays en voie de développement. Ceci s'est notamment traduit par les engagements pris au sommet mondial pour le développement durable à Johannesburg en août 2002.

L'observation de la terre, notamment à des fins météorologiques et environnementales, est un domaine d'excellence en Europe, grâce notamment aux réalisations issues des programmes de l'ESA dans ce domaine (e.g. Météosat, géré par l'agence EUMETSAT, Envisat). Les applications spatiales de ce type contribuent à un suivi global des évolutions de la planète, par exemple pour ce qui concerne le climat et la météorologie, les océans, la végétation.

Elle permet également une meilleure gestion des ressources naturelles et un contrôle plus strict des paramètres et de la réglementation environnementale. Des capacités de gestion des crises environnementales commencent également à être développées.

Toutefois, les solutions spatiales de ce genre sont encore généralement sous-utilisées, en raison notamment du caractère expérimental et fragmentaire des éléments de systèmes disponibles. L'initiative GMES a justement pour but de parvenir à un ensemble de solutions cohérentes opérationnel en 2008.

Sur le plan global, les systèmes spatiaux ont prouvé qu'ils peuvent jouer un rôle déterminant dans la mise en oeuvre et le contrôle de l'application des traités internationaux grâce à leur capacité de surveillance et de contrôle.

Dans le cas du protocole de Kyoto, les engagements pris par l'Union représentent un effort considérable en termes économiques. L'Union devra avoir la capacité de s'assurer que les partenaires à l'accord respectent leurs engagements; il lui faudra également déterminer l'effet des réductions d'émissions.

L'Europe pourrait mieux valoriser sa participation à ce type d'accords par le développement et la mise à disposition de techniques spatiales de surveillance et de contrôle, comme elle l'a fait récemment avec le satellite Envisat.

Contribuer au développement durable grâce à l'espace

Aspects environnementaux: protection et surveillance de l'environnement global

* Les satellites d'observation peuvent fournir une information rapide et cohérente sur les évolutions des massifs forestiers, la couverture et l'utilisation des sols, facteurs qui affectent le changement climatique global. Durant la dernière décennie, la planète a perdu 94 millions d'hectares de forêt.

* Les mesures par satellites radar des températures atmosphériques et de la surface des eaux fournissent des indications précieuses pour estimer la montée du niveau des océans et le réchauffement global. Le retrait des glaciers et les mouvements de banquises peuvent également être suivis.

* Les systèmes satellitaires peuvent être efficaces pour détecter et surveiller les nappes d'hydrocarbures en mer.

Aspects économiques et sociaux: l'incidence de l'espace sur les transports

* L'utilisation de systèmes de navigation par satellites tel que Galileo offre la possibilité aux services de navigation aérienne de rationaliser l'infrastructure terrestre, redondante et coûteuse, en remplaçant les aides conventionnelles par des satellites. De nombreuses possibilités sont offertes pour la navigation maritime et terrestre, notamment pour simplifier et fiabiliser les tâches de gestion et de contrôle des opérateurs et des administrations.

* Les études menées pendant la phase de définition du programme Galileo indiquent des bénéfices macro-économiques possibles sur 20 ans à hauteur d'environ 18 MdEUR, ainsi que la création de 145000 emplois [source: PriceWaterhouse].

2.3. Renforcer la sécurité des citoyens

La PESD, qui va progressivement compléter le chantier de l'intégration européenne, ambitionne de doter l'Union de la capacité de décider et d'agir de manière autonome en vue d'une approche globale de la gestion des crises, y compris la prévention des conflits, au moyen de divers instruments, civils et/ou militaires (cf. «tâches de Petersberg»).

Elle tient compte des évolutions profondes de la notion de sécurité des dernières années et du fort potentiel de progrès que pourrait générer sa dimension scientifique, technologique et industrielle. Par ailleurs, il importe que les services offerts par l'espace en temps normal et en temps de crise soient dûment protégés.

Les systèmes spatiaux forment le principal outil de collecte, transmission et distribution d'information sur un plan global et le seul qui soit physiquement non-intrusif, grâce aux capacités offertes par exemple par les systèmes de communications large bande et d'imagerie à base optique, infra-rouge ou radar, dont les performances connaissent des progrès spectaculaires. Une composante spatiale en soutien à une capacité de prise de décision rapide contribuerait à rendre crédible et efficace la PESC.

Dans une certaine mesure, les déficits critiques de gestion des crises ont une relation directe avec la maîtrise des technologies spatiales, ceci étant valable pour tous les acteurs - civils et militaires - de la gestion de crises, qu'ils agissent ensemble ou séparément [5].

[5] Rapport "European Capacities Action Plan (ECAP)", Novembre 2002, réf. 13809/1/02

En Europe, l'espace peut jouer un rôle unique au bénéfice de la convergence de processus divers vers des buts communs. Les capacités strictement militaires demeurent en effet largement un sujet du ressort des Etats membres, de sorte qu'il existe plusieurs programmes satellitaires différents.

Un exemple de duplication de systèmes spatiaux en Europe

* Dans le domaine spatial militaire, il existe 5 programmes en Europe pour les satellites de télécommunications et 3 pour les satellites d'observation, chacun basé sur sa technologie propre, rendant délicate une éventuelle inter-opérabilité.

* En pratique, ces systèmes ont été réalisés sans concertation: dans aucun des domaines militaires il n'existe à ce jour de système opérationnel européen.

Par ailleurs, il existe de nombreux caractères communs entre les technologies spatiales à finalité civile et militaire, de sorte qu'il paraît adéquat de combiner au mieux les moyens, compte tenu notamment de l'évolution des performances des systèmes commerciaux, des pressions budgétaires en Europe, et du fossé technologique qui s'est creusé entre les deux rives de l'Atlantique.

Le rapport STAR21 recommande que l'Union développe une capacité satellitaire de défense et de sécurité sur une base entièrement européenne. A ce jour, plusieurs états-majors nationaux se sont associés pour définir conjointement des «besoins opérationnels communs pour un système global européen d'observation par satellites à des fins de sécurité et de défense (BOC)», qui pourrait être élargi à d'autres partenaires.

Ce premier pas pourrait être complété par l'initiative GMES en vue d'un système spatial européen d'observation élargi ensuite au renseignement et à la reconnaissance. Selon certaines estimations, l'acquisition d'une capacité spatiale minimale commune représenterait un investissement annuel de l'ordre de 800 MEUR pendant une dizaine d'années.

Q.8: Comment mieux définir et préciser, dans un ensemble cohérent (incluant cadre et délai) la nature et l'ampleur des capacités spatiales requises pour la concrétisation des objectifs politiques de la PESD? Selon quelles modalités les éventuelles capacités spatiales nouvelles pourraient-elles être mises au service de la sécurité des citoyens?

L'enjeu est d'assurer que les Etats membres y trouvent une valeur ajoutée.

3. ETABLIR UNE ORGANISATION ET UN ENCADREMENT PLUS EFFICACE ET AMBITIEUX

En Europe, plusieurs intervenants publics poursuivent des activités spatiales, à des degrés divers et dans des cadres politiques et instrumentaux variés.

Cette diversité est caractéristique de l'Europe. Elle amène toutefois à s'interroger sur l'usage optimal des moyens et sur les différents types d'instruments nécessaires pour assurer une efficacité accrue.

3.1. Union Européenne, ESA et Etats membres: rôle et relations

Le fait que la politique spatiale ne puisse se concevoir en Europe dans un contexte uniquement national a été tranché il y a une trentaine d'années.

L'ESA, créée en 1975, a répondu avec succès à l'objectif initial de rassembler les ressources et les compétences nécessaires à la construction d'un programme intégré de science spatiale et à la réalisation d'un lanceur européen. Les agences nationales de certains Etats membres, les organismes à vocation opérationnelle et les initiatives spatiales communautaires complètent le paysage spatial européen (cf. encadré).

Activités spatiales publiques en Europe: diversité institutionnelle et programmatique

L'ESA, agence de développement de technologies et de systèmes spatiaux, est un instrument de coopération entre certains Etats européens. Elle a donné à l'Europe maîtrise et autonomie dans ce domaine.

D'autres activités existent, notamment sur la base:

- des compétences propres et de la capacité d'initiative que certains Etats membres ont souhaité préserver grâce à des agences spatiales nationales et des centres de recherche nationaux;

- du rôle confié à des structures chargées d'exploiter les systèmes opérationnels développés par l'ESA et d'assurer la continuité de service sur le long terme (avec notamment EUMETSAT) et à divers instruments spécialisés (par exemple l'European Southern Observatory);

- des initiatives prises par la Communauté pour inclure la dimension spatiale dans les politiques communautaires, dont les plus importantes sont menées conjointement avec l'ESA (e.g. Galileo, GMES).

Cette diversité du paysage spatial s'est constituée de façon pragmatique au fil des ans. Elle pose aujourd'hui la question d'une organisation optimisée, respectant le principe de subsidiarité, qui permette à l'Europe de se fixer de nouveaux objectifs et de nouvelles ambitions.

- ESA et agences spatiales nationales: Les programmes de l'ESA fonctionnent en liaison avec les agences nationales. Afin d'éviter des lacunes ou des redondances entre les centres techniques de l'ESA et nationaux. L'Agence a entrepris d'organiser l'ensemble dans un réseau de centres techniques européens et nationaux cohérent. Une optimisation des compétences et des moyens doit être recherchée en permanence, dans l'esprit de l'Espace Européen de la Recherche.

- Union Européenne et ESA: L'espace constitue la raison d'être de l'ESA, un fort accent étant mis sur la maîtrise scientifique et industrielle de la technologie et des systèmes («technology push»). L'Union pour sa part fait appel à l'espace comme outil générique lorsqu'il apporte un soutien utile aux différentes politiques communautaires («demand pull»).

La rencontre de ces deux approches dans une vision commune de l'espace européen peut s'avérer particulièrement féconde. Les efforts de coopération et de rapprochement déjà entrepris mettent cependant en évidence des différences et l'absence de certains liens entre les deux organisations au plan institutionnel et procédural, ce qui compliquent les relations et les décisions. Au titre des questions soulevées - dont certaines ne pourront être résolues dans le cadre des conditions existantes -, on peut citer les exemples suivants, portant sur:

- la composition (par exemple le cas des deux pays de l'Union non-membres de l'ESA, dont il s'agit de savoir s'ils ont vocation à rejoindre celle-ci, et des pays ESA non-membres de l'Union, et l'accueil éventuel dans le cadre ESA des pays de l'élargissement);

- les principes de fonctionnement (par exemple le principe de «juste retour»);

- la décision (avec notamment l'absence d'une instance décisionnelle commune).

Q9.: Comment mettre de la manière la plus efficace l'acquis spatial en Europe au bénéfice des politiques de l'Union?

3.2. Politique spatiale et cadres programmatiques

La diversité actuelle du cadre institutionnel et programmatique du domaine spatial et les discussions en cours sur les évolutions de la gouvernance de l'Union incitent à réexaminer l'architecture du dispositif en Europe. De premiers mouvements dans ce sens ont été récemment entrepris dans le cadre de structures ad-hoc comme la Joint Task Force ESA/Commission sur l'espace. Des solutions institutionnelles permanentes devraient maintenant être apportées.

L'ampleur du domaine couvert en Europe par les techniques spatiales, la diversité des structures concernées et le besoin croissant d'une plus grande cohérence d'action entre elles militent en faveur d'une globalisation de la politique spatiale européenne.

Cette stratégie spatiale globale doit également établir les orientations qui assurent la convergence des contributions des divers acteurs institutionnels, en premier lieu les Etats Membres, vers les objectifs fixés en commun. Ce faisant, elle doit couvrir l'ensemble des aspects du domaine civil, de la sécurité et de la défense.

Le bénéfice attendu est, au plan politique, celui d'une réelle homogénéité des décisions prises par les Etats membres dans les différents cadres programmatiques correspondants. Ceux-ci constitueraient ainsi, sur le plan global, et sur base d'un agenda stratégique commun, un programme spatial européen, outil essentiel de la mise en oeuvre de la politique choisie.

Un objectif à atteindre est celui d'une définition plus précise des responsabilités respectives et des relations mutuelles des acteurs institutionnels en matière spatiale - notamment les agences de développement et les structures d'exploitation - et de leurs relations avec le secteur privé.

Futur Traité de l'Union

Plusieurs raisons plaident en faveur de l'insertion de dispositions sur l'espace dans le futur Traité de l'Union. Tout d'abord, l'espace est un domaine extraterritorial par nature, qui requiert souvent des ressources humaines et financières dépassant largement le cadre et les moyens purement nationaux.

Comme on l'a vu au chapitre précédent, il s'agit d'un domaine qui peut offrir des capacités uniques au service de l'Union pour le développement et la mise en oeuvre de ses politiques actuelles et futures, sur le plan civil ou de la sécurité.

Celle-ci présente l'avantage de fournir un cadre politique plus global pour traiter l'ensemble des questions relatives au domaine spatial.

Au moment où un nouveau Traité est en cours de définition, il paraît utile de s'interroger sur l'opportunité de doter l'Union d'une politique spatiale, ainsi que sur le partage des compétences et des rôles à l'avenir entre l'Union, les Etats-membres de l'ESA dans ce domaine.

Q10.: Comment renforcer les bases politique et juridique nécessaires pour une action efficace de l'Union et de l'Europe dans le domaine spatial, en particulier au regard de la définition du futur Traité de l'union?

3.3. Faire évoluer l'industrie spatiale dans un cadre réglementaire prévisible et stable

Les investissements dans le secteur spatial sont souvent considérables, risqués et demandent une longue période de planification et de mise en place. Compte tenu de ces caractéristiques, il importe d'assurer un cadre réglementaire stable et prévisible pour motiver décideurs et investisseurs. Certains obstacles administratifs doivent également encore être aplanis tant au niveau national qu'européen.

Evolution du paysage industriel

L'espace est un marché stratégique et «pionnier», caractérisé par des risques techniques et financiers extrêmes et des coûts d'entrée pour de nouveaux acteurs très élevés, ce qui explique le rôle important joué par la puissance publique dans ce domaine.

L'objectif de concurrence dans ce contexte est particulièrement important pour assurer l'allocation optimale des ressources, le maintien de la transparence, un haut niveau de compétitivité et, in fine, l'abaissement des coûts.

De nouveaux mouvements de regroupement dans le secteur spatial ne sont pas à exclure, notamment sur la scène européenne. Le cours de cette industrie a été jusqu'à présent largement déterminé par la volonté de la puissance publique, à travers une politique industrielle de l'ESA.

Q11: Les pressions économiques conduisent les industries aérospatiales en Europe et ailleurs à se restructurer. Quels sont les enjeux d'une telle restructuration? Comment organiser au mieux les actions des pouvoirs publics afin de favoriser la compétitivité de l'industrie spatiale?

Réglementation et normalisation

L'opération de systèmes et de réseaux spatiaux de nature globale pose des problèmes complexes. Des efforts visant à la simplification et une plus grande rapidité des procédures paraissent nécessaires en particulier dans trois domaines:

- Spectre des fréquences, positions orbitales: L'allocation des fréquences et les positions orbitales des satellites sont des ressources de plus en plus limitées, partagées au niveau mondial. Elles sont attribuées aux états par une instance spécialisée des Nations Unies, l'Union Internationale des Télécommunications (UIT). Les décisions sont prises dans le cadre de conférences mondiales des radiocommunications.

Les Etats membres ont intérêt à agir de façon concertée dans ces instances, ce qui est déjà en partie le cas, notamment via la Conférence Européenne des Postes et Télécommunications (CEPT), mais ces efforts devraient être encore accrus pour mieux présenter les positions européennes dans le cadre des instances internationales.

- Normalisation: A part quelques rares cas, les systèmes satellitaires sont développés avec des normes spécifiques, qui font l'objet d'une autorisation quasi automatique par l'Institut des Normes Européennes de Télécommunications (ETSI). Des normes ouvertes et partagées favoriseraient une réponse plus large des systèmes à la demande du grand public, et donc une plus grande efficacité commerciale [6]. Il conviendrait d'inciter l'industrie mondiale des satellites à s'entendre sur de telles normes.

[6] Cf. l'initiative « Coopération Européenne pour la Normalisation Spatiale », qui visait à promouvoir les normes spatiales industrielles.

- Licences: Il s'agit d'éliminer les barrières réglementaires qui constituent un obstacle au règlement rapide des problèmes de licences d'exploitation et d'implantation des terminaux, condition indispensable pour attirer l'investissement dans les services européens de télécommunication spatiale et pour développer le marché des nouveaux services, tels que l'internet à haut débit par satellite. Il est possible pour des organisations souhaitant établir un système satellitaire commercial en Europe de le faire via un «guichet unique», une demande unique déposée auprès des autorités réglementaires d'un pays devant faciliter le processus d'attribution des licences. Selon la réglementation en vigueur, celui-ci reste du ressort des Etats membres. Il serait nécessaire d'examiner comment le système actuel d'attribution des licences peut être adapté pour développer le secteur spatial et notamment, pour faciliter le déploiement de systèmes satellitaires avec une couverture pan-européenne, en particulier ceux qui proposent de nouveaux services.

Q.12:Y-a-t-il des barrières règlementaires qui freinent le développement des nouveaux services de télécommunication spatiale? Quelles seraient les mesures susceptibles d'améliorer l'environnement règlementaire (notamment en vue du développement de la société de la connaissance)?

CONCLUSIONS

Le Livre vert suggère un ensemble de questions auxquelles l'Europe se trouvera nécessairement confrontée à moyen et long terme. Des réponses qui y seront apportées et des choix qui seront faits dépendra le devenir de l'Europe comme puissance spatiale. Ceci aura, par voie de conséquence, une incidence sur les ambitions et le développement de l'Union elle-même.

La publication du Livre vert ouvre une période de consultation officielle. Celle-ci s'étendra jusqu'au 30 mai 2003. Son encadrement sera assuré par la Task Force conjointe Commission/ESA, qui organisera une série de séminaires, ateliers et auditions pour faciliter le processus. Un site internet sera également disponible pour collecter les réponses que les parties sont invitées à apporter aux questions posées.

Par la suite, un Plan d'action («Livre blanc») sera établi par la Commission, détaillant les actions à entreprendre et le rôle qu'il reviendra à chaque partenaire d'assumer pour le succès de leur mise en oeuvre. Ce Plan sera présenté avant la fin de l'année 2003.

Livre vert

Politique spatiale européenne processus de consultation

Début de la consultation: 22 janvier 2003; fin de la consultation: 30 mai 2003

Adresse à laquelle envoyer les contributions:

c/o Commission/ESA Joint Task Force

"Green paper on space"

rue Joseph II n°79 - Bureau 02/06 - 1049 Bruxelles

(une adresse e-mail sera disponible via le site internet).

Un site web dédié et un forum web permettant à chacun d'exprimer ses vues sont également disponibles à l'adresse suivante:

http://europa.eu.int/comm/ space

Information: une série de workshops est prévue au cours du premier semestre 2003 pour animer le débat en différents points de l'Europe. Les villes envisagées sont: Berlin, Bruxelles, Londres, Madrid, Paris, Prague et Rome.

Des événements additionnels pourront être organisés dans le cadre de conférences déjà programmées.

Ces workshops permettront un échange de vues ouvert à tous. Des présentations préparées par la Task Force conjointe Commission/ESA serviront à lancer et structurer les débats.

FICHE D'ÉVALUATION D'IMPACT IMPACT DE LA PROPOSITION SUR LES ENTREPRISES ET, EN PARTICULIER, SUR LES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES (PME)

Titre de la proposition

"Livre vert - Politique spatiale européenne"

Numéro de référence du document

D/549542

La proposition

L'objectif de la communication ci-jointe est de mettre en route un vaste processus de consultation visant principalement:

- à répondre à la demande du Parlement européen (cf. la résolution récente concernant l'espace [7]) invitant la Commission à élaborer un Livre blanc sur l'avenir de l'Europe dans l'espace;

[7] P5_TAPROV(2002)0015 - L'Europe et l'espace - Résolution du Parlement européen C5-0146/2001

- à promouvoir et renforcer davantage la politique européenne de l'espace;

- à faciliter l'utilisation de l'espace pour la mise en oeuvre des politiques européennes;

- à favoriser le développement d'une position politique sur le rôle stratégique de l'espace pour l'Europe et à stimuler l'attention des citoyens;

- à aborder les questions politiquement sensibles qui subsistent, notamment la sécurité, les usages multiples et les sujets institutionnels

Impact sur les entreprises

Ces dernières années, la mondialisation et la commercialisation croissante de l'espace ont entraîné une restructuration significative du secteur spatial dans le monde et en Europe. Contrairement à son homologue américaine, l'industrie spatiale européenne se caractérise par un équilibre entre les activités commerciales et institutionnelles. La politique industrielle européenne doit assurer l'existence de la base technologique et industrielle nécessaire au plan spatial de manière à garantir l'indépendance de l'Europe dans les secteurs clés stratégiques et un degré élevé de compétitivité et de rapport coût-efficacité au niveau mondial.

Toutefois, l'industrie spatiale européenne doit faire face à une situation très difficile sur le marché. Fortement tributaire du marché commercial, elle est confrontée à une nouvelle restructuration majeure au cours des années à venir.

La Commission européenne et l'ESA partagent notamment le point de vue selon lequel les petites et moyennes entreprises (PME) ont un rôle important à jouer dans l'exploitation des technologies développées grâce au financement institutionnel parce qu'elles sont proches du marché et des utilisateurs, présentes partout et capables d'innover et de s'adapter aux besoins rapidement. Les deux institutions entendent encourager cette exploitation, en particulier dans le domaine de la navigation ou des télécommunications, par exemple.

L'industrie spatiale européenne sera largement consultée et, ultérieurement, concernée par le processus de consultation lié au Livre vert et les mesures politiques qui en résulteront. Si l'exercice peut être conduit avec succès, son résultat peut avoir des répercussions sur l'emploi dans les industries spatiale et connexes, qui devrait être au moins maintenu à son niveau actuel, si pas augmenté.

Consultation

Les grandes entreprises et les PME directement ou indirectement concernées ou intéressées par le secteur spatial (équipementiers, sociétés de lancement, fournisseurs de télécommunications, etc.) constitueront le groupe cible. Il importe de définir les acteurs impliqués, les sujets de discussion et les procédures de consultation.

Compte tenu de l'abondance des sujets, de l'hétérogénéité des partenaires en présence, de la complexité de la tâche et des contraintes de temps, la procédure de consultation doit être soigneusement préparée.

La consultation peut être subdivisée en trois étapes:

- campagne d'information: diffusion et site internet.

- consultation ciblée: ateliers et conférences

- consultation élargie: courrier électronique, forum internet, courrier classique

Les premières réactions du secteur ont été recueillies lors d'un un atelier informel tenu le 3 octobre 2002 à Bruxelles. La tendance générale était que la consultation devait commencer dès que possible par le truchement du Livre vert sur l'espace.

Associations industrielles consultées:

Eurospace : Eurospace a été créée en 1961 en tant qu'organisation de l'industrie spatiale européenne. Il s'agit d'une association sans but lucratif internationale dont les membres sont les principales sociétés industrielles européennes du secteur. Ses adhérents représentent 90% du chiffre d'affaires spatial total de l'industrie de transformation européenne du domaine de l'espace.

ESOA: Association européenne des opérateurs de satellites

Sociétés individuelles consultées jusqu'ici:

EUTELSAT

EUMETSAT

EADS

ARIANESPACE

ALENIA SPAZIO

ALCATEL SPACE

SES-GLOBAL