52002DC0499

Communication de la Commission - Plus de recherche pour l'Europe objectif - 3 % du PIB /* COM/2002/0499 final */


COMMUNICATION DE LA COMMISSION - PLUS DE RECHERCHE POUR L'EUROPE - Objectif : 3 % du PIB

Table des matières

Synthèse

1. Introduction: Placer l'Europe en tête

2. Le déficit de l'Europe dans les investissements de R & D

2.1. Un écart d'investissement massif et croissant ...

2.2. ... et des performances à la traîne en haute technologie

2.3. Structure et secteurs industriels

2.4. Diversité des situations nationales et régionales

3. Inverser la tendance: les domaines pour des actions concertées

3.1. Des conditions cadres plus attrayantes

3.1.1. Des ressources humaines suffisantes et de grande qualité

3.1.2. Une base de recherche publique solide et de meilleurs liens avec l'industrie

3.1.3. L'esprit d'entreprise pour et par la R & D

3.1.4. Adaptation et utilisation efficaces des régimes de propriété intellectuelle

3.1.5. Des réglementations favorables à la recherche et à l'innovation

3.1.6. Un environnement concurrentiel et des règles de concurrence favorables

3.1.7. Des marchés financiers porteurs couvrant les différentes étapes du développement des entreprises de haute technologie et autres sociétés innovantes

3.1.8. Stabilité macroéconomique et conditions fiscales favorables

3.2. Une utilisation plus efficace du financement public pour la R & D des entreprises

3.2.1. Mesures de soutien direct

3.2.2. Incitations fiscales

3.2.3. Mécanismes de garantie

3.2.4. Soutien public au capital-investissement

3.2.5. Amélioration de la combinaison de l'ensemble des instruments

3.3. La R & D et l'innovation dans les stratégies et la gestion des entreprises

4. Conclusion: vers une approche européenne concertée

Synthèse

En mars 2000, au Conseil européen de Lisbonne, les chefs d'État et de gouvernement ont assigné à l'Union européenne l'objectif de devenir, d'ici à 2010, "l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale". Deux ans plus tard, lors du Conseil européen de Barcelone, au cours duquel ont été examinés les progrès réalisés en direction de l'objectif de Lisbonne, ils ont convenu que les investissements de recherche et de développement technologique (R & D) dans l'UE doivent augmenter en visant à approcher 3% du PIB d'ici à 2010, contre 1,9% en 2000. Ils ont également appelé de leurs voeux une augmentation du financement par les entreprises de manière à le porter de son niveau actuel de 56% à deux tiers des investissements de R & D totaux, une proportion qui est déjà atteinte aux États-Unis et dans certains pays européens. Ce double objectif est ambitieux mais réaliste: aujourd'hui, plusieurs pays européens sont proches de ce niveau ou l'ont dépassé. Les grandes orientations de politique économique des États membres et de la Communauté pour 2002 reconnaissent l'importance de cet objectif et recommandent d'améliorer les mesures incitant les entreprises à investir dans la R & D, tout en conservant un cadre de politique fiscale sain.

Les objectifs en matière d'investissements de R & D fixés à Barcelone résultent de la reconnaissance du fait que le renforcement de nos systèmes de R & D et d'innovation est essentiel pour atteindre l'objectif stratégique de Lisbonne. Sa réalisation est compromise par l'écart important et grandissant qui sépare l'UE des États-Unis en ce qui concerne ces investissements. Cet écart, qui a atteint 120 milliards d'euros en 2000, est dû à 80% aux investissements de R & D inférieurs des entreprises en Europe.

Le rôle de la R & D en tant que moteur d'une économie fondée sur la connaissance concurrentielle et dynamique est lié à la capacité de l'économie de transformer de nouvelles connaissances en innovation technologique [1]. Bien que nombre d'entreprises reconnaissent l'importance grandissante d'investir dans la R & D, elles ne le feront que dans la mesure où elles peuvent effectivement en exploiter les résultats et espérer un retour suffisant pour contrebalancer le risque inhérent à ce genre d'investissement.

[1] Ci-après dénommée "innovation".

La présente communication vise à lancer le débat sur les moyens permettant d'atteindre les objectifs en matière d'investissements de R & D. Elle identifie le large éventail de secteurs politiques qui doivent être mobilisés d'une façon cohérente. Elle expose, pour chaque secteur, les principaux buts à poursuivre en intensifiant les actions en cours dans le cadre de la stratégie de Lisbonne et de l'Espace européen de la connaissance ou en prenant de nouvelles initiatives. Même là où une action a été lancée et approuvée au niveau européen, il est notoire qu'il faut redoubler d'efforts pour garantir qu'elle porte ses fruits au niveau national et local. En même temps, il est reconnu que la diversité des situations dans les États membres et les pays candidats appelle une réponse politique différenciée.

Des conditions cadres plus attrayantes sont essentielles si l'Europe veut atteindre les objectifs d'investissement en R & D qu'elle s'est fixés. À cet égard, les plus importantes sont notamment un approvisionnement suffisant en ressources humaines hautement qualifiées, une base de recherche publique solide, une culture dynamique d'esprit d'entreprise, des régimes appropriés de protection de la propriété intellectuelle, un environnement concurrentiel avec une réglementation et des règles de concurrence propices à la recherche et à l'innovation, des marchés financiers porteurs, la stabilité macroéconomique et des conditions fiscales favorables.

Il y a également lieu d'utiliser de manière plus efficace et ciblée les incitations financières publiques à la R & D privée et à l'innovation basée sur la technologie dans le contexte du régime des aides d'État et du pacte de stabilité et de croissance, qui implique que les efforts destinés à améliorer le soutien du secteur public à la R & D passent, dans une large mesure, par une restructuration des dépenses publiques. À cet égard, les pouvoirs publics ont à leur disposition un ensemble d'instruments de financement, dont notamment les mesures de soutien direct, les incitations fiscales, les systèmes de garantie et le soutien public au capital-investissement. Un mélange de ces instruments est nécessaire puisque aucun d'entre eux n'est individuellement capable de fournir la gamme complète des incitations.

Enfin, la place de la R & D dans la stratégie commerciale globale des sociétés et l'efficacité des activités de R & D de celles-ci sont des facteurs importants à considérer.

L'engagement de l'ensemble des acteurs au niveau des États membres et au niveau européen est indispensable pour susciter une poussée ascendante commune en faveur des investissements de R & D dans toute l'Europe.

Sur la base du débat initié par la présente communication, la Commission envisagera de proposer un ensemble ciblé d'actions prioritaires au printemps 2003.

1. Introduction: Placer l'Europe en tête

En mars 2000, au Conseil européen de Lisbonne, les chefs d'État et de gouvernement ont assigné à l'Union l'objectif ambitieux de devenir, d'ici à 2010, "l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale".

La création d'un Espace européen de la recherche et de l'innovation au sein de l'Espace européen de la connaissance est l'une des étapes essentielles du cheminement de l'Union vers l'accomplissement de cet objectif [2]. Le progrès scientifique et technique est crucial pour une croissance durable et un emploi de qualité dans l'économie moderne fondée sur la connaissance.

[2] Commission européenne, Vers un espace européen de la recherche , COM(2000)6 du 18.1.2000.

Des progrès considérables ont été accomplis ces deux dernières années dans l'établissement de la base politique nécessaire pour des systèmes de recherche et d'innovation plus efficaces et intégrés en Europe. Tandis que cet effort doit être poursuivi, il faut aussi prêter attention à la faiblesse des investissements de R & D en Europe, et en particulier à l'écart important et grandissant en matière d'investissements de R & D entre l'Union européenne et ses grands concurrents, avec en tête les États-Unis. L'écart annuel avec ces derniers a dépassé 120 milliards d'euros en 2000 [3]. Ce déficit se reflète dans la performance relativement faible de l'économie européenne. C'est ce genre d'analyse [4] qui, en mars 2002, a conduit le Conseil européen de Barcelone à fixer un nouveau cap pour aider à atteindre l'objectif de Lisbonne. Sur recommandation de la Commission européenne [5], les chefs d'État et de gouvernement ont convenu que les investissements de R & D dans l'UE devraient croître en visant à approcher 3% du PIB d'ici à 2010, contre 1,9% en 2000. Plusieurs recommandations appelant à fixer un tel objectif ont été formulées ces dernières années, notamment par le Parlement européen [6] et le Comité économique et social [7]. Ce seuil est également soutenu par les objectifs quantitatifs concernant l'augmentation des investissements de R & D qui ont été récemment arrêtés dans plusieurs États membres [8]. Les grandes orientations de politique économique des États membres et de la Communauté pour 2002 en reconnaissent l'importance et recommandent d'améliorer les mesures incitant les entreprises à investir dans la R & D, tout en conservant un cadre de politique fiscale sain.

[3] Données de l'OCDE et d'Eurostat/estimations des services de la Commission, en euros actuels.

[4] Pour une analyse factuelle détaillée, voir le document de travail des services de la Commission joint en annexe à la présente communication. En outre, un récent rapport sur la R & D élaboré par les États membres et soumis au Conseil ECOFIN analyse la manière dont celle-ci peut contribuer à la réalisation de l'objectif stratégique de Lisbonne et souligne la nécessité d'améliorer la R & D et l'innovation dans l'UE.

[5] Communication de la Commission au Conseil européen de printemps à Barcelone : La stratégie de Lisbonne - Réussir le changement, COM(2002)14 du 15.1.2002.

[6] "Rapport sur la communication de la Commission Vers un espace européen de la recherche" Document de séance, Parlement européen, A5-0131/2000 du 9 mai 2000.

[7] JO C 204.du 18 juillet 2000, p. 70.

[8] Autriche, Danemark, Finlande, Grèce, Irlande, Luxembourg.

Approcher les 3% du PIB pour les dépenses de R & D est un objectif valable pour l'Union européenne dans son ensemble. Tous les États membres présents et à venir ne sont pas censés pouvoir l'atteindre individuellement d'ici à 2010, mais tous devraient contribuer à l'effort. Ils devraient coordonner leurs efforts afin de créer une dynamique commune favorable à la croissance des investissements de R & D dans toute l'Union.

Les ressources et les politiques qui doivent être mobilisées englobent beaucoup plus que les dépenses publiques de R & D. En effet, plus de 80% du déficit d'investissement en R & D de l'Europe par rapport aux États-Unis est imputable au niveau du financement par les entreprises. C'est pourquoi le Conseil européen de Barcelone demandé que le financement par le secteur privé augmente de son taux actuel de 56 % à deux tiers des investissements totaux de R & D, une proportion qui est déjà atteinte aux États-Unis et dans certains pays européens.

Le principal défi pour susciter un accroissement de l'investissement privé de R & D consiste donc à rendre l'investissement de R & D plus attrayant et plus profitable pour les entreprises au sein de l'Espace européen de la recherche (EER). Ceci suppose la mobilisation cohérente d'un large éventail de politiques afin de renforcer le cercle vertueux par lequel un investissement accru dans la connaissance et la technologie est transformé en nouveaux produits et services, et conduit à améliorer la compétitivité, la croissance et l'emploi.

Le double objectif défini au Conseil européen à Barcelone est ambitieux, mais nécessaire. Il est également réalisable. La Suède et la Finlande atteignent déjà l'objectif de 3%, et les dépenses de R & D de l'Allemagne dépassent les 2,5 %. En outre, les entreprises fournissent déjà au moins les deux tiers des investissements de R & D en Belgique, en Allemagne, en Finlande et en Suède, et l'Irlande approche ce niveau. La présente communication vise à lancer le débat sur les moyens de promouvoir l'investissement et l'innovation dans le domaine de la R & D en Europe [9]. À cet égard, elle reconnaît que le succès dépend de la capacité des États membres à s'assurer que les politiques déjà en place commencent à porter leurs fruits à travers l'UE tout entière, et de la conception de nouvelles actions susceptibles de faire davantage progresser l'Union vers son objectif. L'enjeu est non seulement la réussite de l'objectif des 3%, mais aussi, par ce biais, la réalisation de l'engagement pris à Lisbonne quant à l'instauration d'un niveau élevé de croissance, d'emploi et de cohésion sociale.

[9] Dans ce contexte, il y a également lieu de faire référence au document COM(2002) 262 du 21.5.2002 Productivité : la clé de la compétitivité des économies et entreprises européennes, et à d'autres communications que la Commission compte présenter sur l'Espace européen de la recherche, le rôle des universités et la compétitivité des entreprises novatrices.

2. Le déficit de l'Europe dans les investissements de R & D

2.1. Un écart d'investissement massif et croissant ...

La comparaison des dépenses de R & D dans l'UE et aux États-Unis montre un écart sensible qui se creuse rapidement en valeur absolue comme en part du PIB. Ce déficit a atteint 124 milliards d'euros d'aujourd'hui en 2000 et il a doublé à prix constants depuis 1994. L'intensité de la R & D, mesurée à l'aune du pourcentage du PIB représenté par le total des investissements de R & D, a stagné à environ 1,9% ces dix dernières années dans l'UE, tandis qu'elle a constamment augmenté aux États-Unis pour passer de 2,4 % en 1994 à 2,7% en 2000.

L'essentiel de ce déficit (plus de 80 %) et de son augmentation au cours des dernières années est imputable à un financement inférieur de la part des entreprises communautaires. En outre, le gouvernement américain consacre presque un tiers du financement qu'il octroie à la R& D au soutien de la recherche des entreprises, alors que, dans l'UE, le financement public fournit seulement la moitié de cette proportion (16 %). L'effet de levier de cette aide gouvernementale substantielle et soutenue aux États-Unis est l'un des facteurs qui ont contribué à l'augmentation de la R & D financée par les entreprises dans la deuxième moitié des années 1990.

L'écart entre l'UE et le Japon en termes d'intensité de la R & D est encore plus large puisque ce pays consacre 3 % de son PIB à la R & D. En outre, les entreprises représentent 72 % des dépenses de R & D au Japon contre 56 % en Europe et 67 % aux États-Unis. Néanmoins, la comparaison avec le Japon se heurte à des limites significatives à cause des différences dans le rôle des secteurs public et privé et des problèmes du système financier japonais qui ont affaibli la performance économique du pays et occulté les bénéfices tirés de son intensité de R & D élevée.

2.2. ... et des performances à la traîne en haute technologie

Les indicateurs de production donnent à penser que l'Europe est insuffisante en matière d'innovation. Les gains de productivité de la main-d'oeuvre, partiellement engendrés par l'innovation, ont ralenti dans l'UE au cours de la deuxième moitié des années 1990, tandis qu'ils ont accéléré aux États-Unis durant la même période [10] . En outre, l'évolution des échanges internationaux de produits de haute technologie met en évidence les faiblesses européennes du point de vue de la compétitivité de certains segments de l'économie basés sur la technologie. En effet, la part de l'UE dans le marché mondial des produits en cause (18% abstraction faite des échanges intracommunautaires) reste toujours loin derrière celle des États-Unis (22%).

[10] Commission européenne, Productivité : la clé de la compétitivité des économies et entreprises européennes, COM(2002)240 du 14.5.2002.

Les politiques communautaire et nationales visant à inverser la tendance devraient se baser sur une analyse approfondie des causes du déficit d'investissement et prendre en compte les différences entre les structures et les secteurs industriels, et entre les États membres.

2.3. Structure et secteurs industriels

La structure de l'industrie aux États-Unis est beaucoup plus spécialisée dans la haute technologie et dans les secteurs à forte intensité de recherche qu'au sein de l'UE [11] . Cette situation explique une partie du déficit d'investissement de l'Europe. Une grande partie de la différence entre les États-Unis et l'UE provient de l'industrie de défense et du secteur des technologies de l'information et des communications (TIC). Néanmoins, les effets structurels ne peuvent pas expliquer entièrement l'écart dans les investissements de R & D entre les États-Unis et l'UE. Dans la plupart des secteurs, y compris la fabrication de moyenne et de faible technicité et le tertiaire, les entreprises européennes investissent moins dans la R & D en proportion de leur chiffre d'affaires que leurs homologues américaines. Cela signifie que les entreprises de l'UE ont tendance à se spécialiser dans des produits et services technologiquement moins élaborés. Elles risquent donc de perdre de leur compétitivité au profit de concurrents plus en pointe sur le plan de l'innovation, même dans les secteurs de moyenne et de faible technicité qui constituent le plus clair de l'économie de l'UE.

[11] Voir également le document de travail des services de la Commission, Rapport européen de concurrence 200, 2001.

Par conséquent, l'UE doit promouvoir un glissement vers des secteurs à forte intensité de R & D dotés d'un potentiel de croissance élevé et, chose peut-être plus importante encore, une intensification de l'effort de R & D dans tous les secteurs si elle veut atteindre l'objectif fixé au Conseil européen de Lisbonne.

Les sociétés multinationales se taillent la part du lion dans les dépenses de R & D des entreprises. De plus en plus, elles ont tendance à investir sur la base d'une analyse globale des emplacements possibles [12] . Une évolution inquiétante dans ce contexte est la concentration croissante des dépenses transnationales de R & D aux États-Unis, qui tend à indiquer une diminution du pouvoir d'attraction global de l'UE comme lieu d'implantation pour la R & D comparativement aux États-Unis [13]. En même temps, une proportion croissante de PME et de grandes sociétés nationales sont confrontées à la concurrence internationale sur leurs marchés domestiques, ce qui les oblige à augmenter leur capacité d'innovation en faisant appel à la R & D interne ou externe. Les données indiquent que les petites sociétés européennes investissent relativement moins dans la R & D que leurs consoeurs américaines [14].

[12] "Assessing the Impact of Technology and Globalisation. The effects of Growth and Employment", Projet de recherche de la Commission européenne , 5 e programme-cadre (IHP), AITEG, 2000-2002.

[13] En 1991, les États-Unis et les trois principaux États membres (France, Allemagne et GB) ont attiré ensemble env. 45% de l'ensemble des investissements transnationaux de R & D des entreprises dans la zone OCDE. En 1998, ces trois pays européens ont attiré seulement 35% de ces investissements tandis que la part des États-Unis a grimpé à 55% (OCDE, Mesurer la mondialisation - Le poids des multinationales dans les économies de l'OCDE , Édition 2001).

[14] Commission européenne, Troisième rapport sur les indicateurs scientifique set techniques, à paraître en 2002.

Ces évolutions sont dues à une série d'obstacles en matière, par exemple, de ressources humaines, d'accès aux sources extérieures de financement et aux infrastructures locales appropriées, de diffusion de la connaissance au sein de l'UE, et de création et d'expansion des entreprises basées sur la technologie.

2.4. Diversité des situations nationales et régionales

Les États membres et les régions de l'UE [15] partent de niveaux d'intensité de la R & D très différents qui vont d'environ 1 % ou moins du PIB dans les États membres méridionaux à 3,4% en Finlande et 3,8 % en Suède. Les différences sont encore plus sensibles entre régions dans ces pays. L'évolution de l'intensité de la R & D varie également ; en croissance rapide dans les pays nordiques, en Irlande et en Autriche, la part des investissements de R & D dans le PIB a diminué en France et au Royaume-Uni. Il convient d'accorder une attention particulière à l'évolution interrégionale étant donné que les tendances au niveau régional semblent avoir divergé ces dernières années.

[15] "Régions" désigne ici les entités subnationales.

Le poids relatif du financement par le secteur public et par les entreprises varie aussi largement entre les États membres; ainsi, la R & D des entreprises approche ou dépasse deux tiers des dépenses totales en Finlande, en Suède, en Allemagne, en Belgique et en Irlande, tandis qu'elle en représente moins de 30% en Grèce et au Portugal.

D'une façon générale, la performance des pays candidats en matière de R & D est aujourd'hui en progrès. L'intensité de la R & moyenne y atteint 0,7 % du PIB, soit un niveau semblable à celui de la Grèce et du Portugal, avec des pointes de 1,25% pour la République tchèque et de 1,5% pour la Slovénie. Néanmoins, la part du financement par le secteur privé reste très faible dans la plupart des pays concernés et n'augmentera sans doute qu'au prix d'une aide spécifique.

La diversité des situations en Europe exige des politiques différenciées mais coordonnées afin de susciter une poussée ascendante commune qui permette d'atteindre l'objectif des 3%.

3. Inverser la tendance: les domaines pour des actions concertées

Une vaste mosaïque de secteurs politiques doivent être mis en branle pour renforcer l'attrait et la profitabilité des investissements de R & D. Ces secteurs se rapportent aux conditions cadres qui régissent la R & D en Europe et au soutien financier des gouvernements à la R & D des entreprises. Un cadre général attrayant est une condition préalable essentielle pour une R & D et une innovation plus performantes au sein de l'UE. En outre, une aide gouvernementale plus efficace peut exercer un effet de levier considérable sur les investissements de R & D des entreprises. De nombreuses initiatives sont déjà en chantier dans ce domaine, au niveau européen comme à celui des États membres. Toutefois, il faut encore évaluer leur efficacité individuelle et cumulée à la lumière du nouvel objectif en matière d'investissement dans la R & D, en s'attachant particulièrement à recenser les domaines dans lesquels il conviendrait d'envisager des mesures nouvelles ou renforcées. Les paragraphes suivants inventorient les principaux domaines de politique et objectifs pour lesquels un débat ciblé doit être organisé avec toutes les parties intéressées afin de pouvoir procéder à cette évaluation.

3.1. Des conditions cadres plus attrayantes

Les entreprises investiront plus en R & D dans la mesure où elles peuvent en exploiter effectivement les résultats et en espérer un retour suffisant pour contrebalancer le risque inhérent à ces activités. L'augmentation des investissements de R & D suppose un cadre général plus favorable. Les entreprises doivent avoir accès à un approvisionnement suffisant en ressources humaines de qualité et à une base de recherche publique solide. D'autres conditions cadres telles que la culture de l'esprit d'entreprise, un régime de droits de propriété intellectuelle approprié, un environnement concurrentiel avec une réglementation et des règles de concurrence propices à la recherche et à l'innovation, des marchés financiers porteurs, un environnement fiscal favorable et la stabilité macroéconomique sont également essentielles.

3.1.1. Des ressources humaines suffisantes et de grande qualité

Les politiques communautaires reconnaissent déjà qu'il est important d'avoir un nombre suffisant de chercheurs et d'ingénieurs possédant les qualifications appropriées. La R & D est particulièrement consommatrice de main-d'oeuvre et les données disponibles montrent que le manque de ressources humaines est une restriction importante à la capacité de l'UE d'atteindre l'objectif des 3%.

La question doit être examinée d'urgence car le marché européen des chercheurs montre déjà des signes de tension dans certains secteurs. Bien que la proportion des personnes diplômées de l'enseignement supérieur ait augmenté dans tous les pays, globalement, la situation des ressources humaines en S & T est proche du plein emploi. Même au niveau actuel de la R & D, le recrutement de nouveaux chercheurs pour compenser les départs à la retraite sera difficile dans certains États membres en raison de l'âge relativement élevé de la main-d'oeuvre scientifique et technique, d'autant plus que l'on constate une désaffection inquiétante des étudiants pour certains cursus de sciences naturelles, d'ingénierie et de technologie [16]. Le problème s'aggravera si la demande de chercheurs en dehors de l'Europe augmente aussi et si l'exode net des ressources humaines en S & T de l'Europe vers les États-Unis, principalement, se poursuit [17]. Lors de leur réunion informelle commune à Uppsala, en mars 2001, les ministres de la recherche et de l'éducation ont déclaré que cette situation était un motif de "préoccupation grave" pour certains pays.

[16] Voir le "Plan d'action de la Commission en matière de compétences et de mobilité", COM(2002)72 du 13 2 2002, et le groupe d'experts STRATA-ETAN, op. cit.

[17] Bien que la question doive être approfondie, on sait que les étudiants européens représentent 36% des étudiants étrangers aux États-Unis et que 60% d'entre eux sont encore présents dans le pays cinq ans après leur arrivée. Pour une étude des tendances à la fin des années 1990, voir S. Mahroum, "L'Europe et le défi de l'exode des cerveaux", The IPTS Report n°29, novembre 1998.

De nombreuses initiatives ont été prises récemment en vue d'améliorer la disponibilité, la mobilité et la qualité des ressources humaines en R & D.La Commission a présenté une stratégie pour créer un environnement favorable à la mobilité des chercheurs et exposé une série d'actions destinées à relever le niveau de compétence et d'excellence de R & D, en tenant compte de la situation spécifique des régions en retard de développement [18]. Ces mesures ont été également transposées dans le plan d'action de la Commission en matière de compétences et de mobilité [19]. Au niveau du Conseil, le programme de travail détaillé concernant le suivi des objectifs des systèmes d'éducation et de formation en Europe a identifié un certain nombre d'actions relatives au recrutement pour les études scientifiques et techniques [20].

[18] COM (2001) 331 du 20.6.2001

[19] COM (2002) 72 du 13.2.2002

[20] JO C142 du 14.6.2002

L'objectif d'accroître les investissements de R & D pour les approcher de 3% du PIB est non seulement un défi mais également une chance d'améliorer le profil des carrières en S & T. Il constitue une incitation puissante pour modifier les conditions d'éducation, de formation et de mobilité en Europe.

Les objectifs à poursuivre qui exigent une intensification des efforts ou des initiatives supplémentaires sont notamment:

- Évaluer et renforcer la sensibilisation aux besoins en matière d'emploi ou de compétences et aux perspectives de carrière futures dans différents secteurs scientifiques et techniques; évaluer la capacité du système d'éducation et de formation à satisfaire ces besoins, en étroite collaboration avec les entités du secteur public et privé qui emploient et forment des scientifiques et des ingénieurs qualifiés.

- Encourager davantage les femmes à embrasser des carrières scientifiques et techniques [21] .

[21] Selon le groupe d'experts STRATA-ETAN "Benchmarking National R&D Policies - Human Resources in RTD" (mai 2002), les femmes ne représentent actuellement qu'un quart à un tiers des chercheurs dans les États membres de l'UE.

- Encourager davantage le développement et la visibilité des pôles et des réseaux d'excellence pour un enseignement supérieur et une R & D capables de concurrencer les filières non européennes.

- Encourager le développement et la visibilité des carrières scientifiques et techniques en Europe dans les entreprises et dans le secteur public en veillant davantage aux conditions financières, à l'évolution de carrière des jeunes scientifiques, à l'équipement de recherche et à la disponibilité de fonds pour la recherche.

- Faciliter la formation tout au long de la vie, le transfert des connaissances et le développement des carrières grâce à la mobilité des chercheurs en Europe et à l'accueil de chercheurs des pays tiers, principalement en supprimant les obstacles nationaux et en fournissant des informations et une aide appropriées à tous les niveaux.

3.1.2. Une base de recherche publique solide et de meilleurs liens avec l'industrie

L'excellence et la dimension de la base scientifique de l'Europe, notamment la recherche à long terme, revêtent une importance critique pour la dynamique de l'économie fondée sur la connaissance. Les pôles d'excellence technologique créés autour des instituts de recherche publics ont tendance à exercer un puissant effet de levier sur les investissements de R & D de toutes sortes d'entreprises du secteur concerné, y compris celles qui, dans d'autres circonstances, n'investiraient pas dans la R & D. Néanmoins, il apparaît que l'intensité des relations sciences-industrie est plus forte aux États-Unis qu'en Europe et varie considérablement entre les pays européens. Se pose donc la question de l'efficacité de la R & D publique pour ce qui est de procurer une base scientifique forte aux entreprises en Europe.

Les politiques publiques ont un rôle important à jouer en facilitant le développement de pôles et réseaux d'excellence régionaux. Les pouvoirs régionaux remplissent un rôle de plus en plus grand, par exemple en attirant les investissements de R & D de l'extérieur. C'est pourquoi les investissements de R & D dépassent le seuil de 3% dans certaines régions qui ont fortement insisté sur la recherche et l'innovation et réalisé un mélange efficace de partenariats publics et privés. Au niveau communautaire, les Fonds structurels contribuent grandement au développement des infrastructures, des capacités et de la formation en matière de R & D au plan régional et aident ainsi à réduire des déséquilibres existants.

Les politiques doivent viser à encourager la mise en réseau de la recherche publique et privée indépendamment de leur lieu d'implantation. Avec un budget de 17,5 milliards d'euros, le programme-cadre de R & D communautaire 2002-2006 constituera un puissant instrument de soutien de partenariats entre le public et le privé dans des réseaux d'excellence et des projets intégrés transeuropéens. Néanmoins, son effet ne sera maximisé que si les actions prévues sont relayées et soutenues par une coordination plus forte entre les programmes nationaux et européens de R & D, ainsi qu'entre les programmes nationaux, qui représentent toujours environ 80 % [22] des budgets de R & D civile publique dans l'UE.

[22] La coopération scientifique communautaire ou intergouvernementale n'excède pas 17 % des dépenses civiles publiques totales dans l'Union. Le programme-cadre de recherche de l'UE ne représente que 5,4 % de l'effort public total. "Vers un espace européen de la recherche", COM(2000)6 final, 18 janvier 2000.

Faciliter la mobilité des chercheurs entre la recherche publique et le secteur privé est également un moyen important d'améliorer la création de réseaux entre la R & D publique et privée dans l'UE.

Les objectifs à poursuivre qui exigent une intensification des efforts ou des initiatives supplémentaires sont notamment [23]:

[23] Ces domaines d'action doivent être également considérés par rapport au financement public de la R & D privée (voir 3.2.1.).

- Établir des priorités plus claires et plus cohérentes pour la R & D publique en faisant participer plus systématiquement l'industrie à leur définition dans les domaines industriels ou technologiques où cela est pertinent.

- Encourager davantage le développement de partenariats et de regroupements de R & D entre le secteur public et le secteur privé qui aboutissent au transfert des connaissances et à la commercialisation des résultats [24].

[24] Parmi les exemples récents de grands partenariats de R & D entre le secteur public et le secteur privé, on peut citer l'entreprise commune constituée pour le système européen de navigation par satellite Galileo. Pour les regroupements de R & D régionaux, on retiendra entre autres un regroupement dans le secteur de l'électronique et d'autres secteurs organisé autour de l'université d'Oulu en Finlande, des regroupements dans le secteur de la biotechnologie dans les trois « Biorégions » allemandes, et plusieurs regroupements dans le secteur des transports en Andalousie.

- Encourager des initiatives supplémentaires pour renforcer la base de recherche publique et ses liens avec l'industrie dans le cadre des politiques régionale et de cohésion communes et des instruments financiers destinés aux pays candidats.

- Ouvrir davantage les programmes de R & D nationaux aux collaborations transnationales.

- Supprimer les obstacles à la mobilité des chercheurs entre l'université et les entreprises en réglant notamment la question du transfert des droits à pension et en reconnaissant que la mobilité constitue un élément positif pour la progression de la carrière.

3.1.3. L'esprit d'entreprise pour et par la R & D

L'accroissement des investissements dans la R & D passera par une augmentation des investissements des exécutants de R & D existants, mais aussi par les investissements réalisés dans les activités de R & D (internes ou externalisées) par un nombre croissant d'entreprises, notamment des PME, ainsi que par la création de nouvelles entreprises innovantes fondées sur la R & D, à condition que ces créations d'entreprises soient soutenues par une culture d'esprit d'entreprise appropriée.

L'esprit d'entreprise est extrêmement important pour la création de sociétés à croissance rapide qui valorisent les investissements de R & D et qui sont également de nouveaux exécutants de R & D. L'essaimage, en particulier, a été une voie essentielle pour exploiter et promouvoir la R & D tant dans le secteur public que privé.

Néanmoins, les Européens sont beaucoup plus réservés que les Américains dans la création de nouvelles entreprises [25]. La Commission prépare actuellement un Livre vert sur l'esprit d'entreprise [26] afin de lutter contre ce handicap.

[25] voir les Flash Eurobaromètres de la Commission européenne n° 107 de novembre 2001, et n° 81 d'octobre 2000.

[26] Ce document abordera des aspects tels que la simplification des procédures d'enregistrement des sociétés, la réglementation des faillites et la promotion de l'enseignement commercial.

La promotion réussie de l'essaimage tient à une combinaison de multiples facteurs, dont certains ont trait aux dotations de régions et d'institutions déterminées et d'autres aux pratiques gestionnaires et aux situations réglementaires.

Les programmes de R & D publique en collaboration sont signalés comme ayant une influence importante sur le lancement et la croissance initiale des sociétés essaimées en facilitant l'établissement de liens stratégiques [27]. L'essaimage de la recherche publique est de plus en plus encouragé au niveau régional, national et communautaire en soutenant des activités de formation [28] en plus des parcs scientifiques et technologiques et des incubateurs d'entreprises. Les grandes sociétés encouragent aussi de plus en plus l'essaimage afin d'exploiter les compétences en matière de recherche et les résultats qui offrent un potentiel de croissance à long terme. Néanmoins, rares sont encore les tentatives européennes réussies pour reproduire les réalisations de la Silicon Valley.

[27] Pietro Moncada, Alexander Tübke, Jeremy Howells et Maria Carbone:"L'impact de l'essaimage privé sur la compétitivité et l'emploi dans l'UE", The IPTS Report, n°44, mai 2000, Martin Meyer,"Aide au démarrage et croissance des entreprises", The IPTS Report, n°51, février 2001.

[28] Comme celles soutenues au titre du Fonds social européen

Du côté de la demande, l'esprit d'entreprise basé sur la R & D est favorisé par un niveau élevé d'instruction scientifique et technologique et une culture de confiance et de compréhension concernant les relations entre la science et la société. La mise en oeuvre du plan d'action « Science et société » de la Commission [29] jouera un rôle à cet égard.

[29] COM(2001)714 du 4 12 2001.

Les objectifs à poursuivre qui exigent une intensification des efforts ou des initiatives supplémentaires sont notamment:

- Promouvoir des projets de haute technologie liés à la recherche publique grâce à une étroite collaboration avec la communauté des investissements à risque et au développement des compétences de gestion (particulièrement en relation avec les droits de propriété intellectuelle et le transfert de technologies).

- Explorer les mesures appropriées pour soutenir l'essaimage des grandes entreprises.

3.1.4. Adaptation et utilisation efficaces des régimes de propriété intellectuelle

Les droits de propriété intellectuelle (DPI) - notamment les brevets, les droits d'auteur, le secret de fabrication, la protection des modèles - sont un facteur de plus en plus important dans la définition des règles de collaboration en matière de recherche et de transfert de technologies entre les entreprises et entre celles-ci et les organismes de recherche publics. Ils sont également essentiels dans les accords de coopération scientifique et technique et commerciaux internationaux.

Les entreprises de nombreux secteurs n'investiraient pas dans la R & D et seraient incapables de produire de la richesse si leur propriété intellectuelle pouvait être librement copiée. L'importance croissante de la propriété intellectuelle pour les entreprises transparaît dans l'accroissement de l'activité de brevetage et des revenus provenant de l'octroi de licences sur la technologie. Les régimes des DPI sont complexes et évoluent rapidement en réponse à la nécessité d'adapter la protection à de nouveaux secteurs technologiques, ainsi qu'à la demande des détenteurs de la propriété intellectuelle qui réclament des normes de protection internationales juridiquement plus sûres, plus strictes, plus harmonisées et mieux appliquées. L'amélioration des régimes des DPI et de leur application exige une approche concertée entre les politiques de la recherche et de l'innovation cohérente, du marché intérieur, du commerce international et de la concurrence .

La législation de l'UE: Une série de mesures ont été adoptées ou proposées afin de mettre en place un cadre communautaire plus efficace et unifié pour les DPI ; on y trouve notamment un brevet communautaire abordable qui garantit la sécurité juridique, le brevetage des inventions issues de la biotechnologie et de l'informatique, un droit d'auteur adapté à l'ère numérique, et la protection des bases de données et des modèles. Tout retard dans leur adoption ou leur application nuirait à la compétitivité de l'industrie européenne.

Harmonisation et application au plan international: Les coûts et l'incertitude juridique dans le domaine de la protection des droits de propriété intellectuelle peuvent constituer un frein aux investissements dans la R & D et à l'innovation. Il faut poursuivre l'harmonisation de la législation relative aux DPI au niveau européen. Au niveau international, la protection et l'application des DPI par la mise en oeuvre de l'accord ADPIC [30] de l'OMC et des conventions de l'OMPI [31] sont cruciales pour le développement des échanges, de la collaboration internationale en matière de R & D et du transfert de technologies.

[30] Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce; élaboré sous les auspices de l'Organisation mondiale du commerce, il établit des normes minimales pour la protection et l'application des DPI.

[31] Organisation mondiale de la propriété intellectuelle.

Transfert de technologies des institutions publiques et collaborations public/privé dans le domaine de la R & D: Les règles nationales applicables à la détention et à la gestion des DPI issus de la R & D financée par le secteur public et les dispositions concernant les DPI et les aspects financiers connexes qui régissent les collaborations entre universités et entreprises varient considérablement à travers l'Europe et dans les pays. Ces différences entravent le développement efficace des collaborations entre le public et le privé et le transfert de technologies au niveau international.

Sensibilisation, formation et services de soutien: La protection, la valorisation et le transfert efficaces des connaissances dépendent non seulement de l'existence d'instruments juridiques et d'application appropriés, mais également de la capacité des producteurs de connaissance à les utiliser. Ce n'est pas encore tout à fait le cas, notamment au niveau des PME, des universités et d'autres organismes de recherche publics.

Les objectifs à poursuivre qui exigent une intensification des efforts ou des initiatives supplémentaires sont notamment:

- Améliorer davantage le cadre juridique des DPI au niveau de l'UE si c'est nécessaire pour répondre à l'évolution de la technologie et au processus mondial d'harmonisation, en se basant sur une évaluation opportune des effets de la législation en vigueur et de nouvelles questions de DPI résultant notamment du progrès technologique.

- Suivre activement les progrès de l'harmonisation et de l'application des régimes de DPI au niveau international et aider les pays les moins développés et les pays en développement à acquérir leur propre capacité et en promouvant des collaborations mutuellement avantageuses en matière de R & D dans des domaines d'intérêt commun.

- Promouvoir l'application de bonnes pratiques concernant les aspects des DPI dans la R & D financée au moyen de ressources publiques et dans les collaborations entre universités et entreprises.

- Promouvoir une gestion plus efficace des DPI par les producteurs et les utilisateurs de la connaissance (sensibilisation, formation des scientifiques et des ingénieurs, développement et professionnalisation des services de soutien à l'innovation).

3.1.5. Des réglementations favorables à la recherche et à l'innovation

La régulation sectorielle des marchés influe sur les activités de R & D à la fois directement et indirectement étant donné la capacité de commercialiser des produits et services novateurs. Deux types de réglementation horizontale exercent également une influence directe et considérable, à savoir les règles et pratiques de la normalisation et des marchés publics.

La réglementation des marchés de produits et de services devrait tendre à favoriser la concurrence et le développement des entreprises tout en assurant un niveau élevé de protection des consommateurs et de l'environnement, ainsi que des règles du jeu équitables pour les entreprises (voir la section 3.1.6). Ces objectifs peuvent être convergents et même mutuellement avantageux. Nombreux sont les cas où les contraintes imposées sur le plan de la sécurité ou de l'environnement ont créé de nouvelles possibilités commerciales pour les produits ou les processus de haute technologie en entraînant des effets positifs à long terme sur la croissance et la productivité qui s'avèrent bien plus importants que les effets négatifs à court terme des nouvelles contraintes.

Dans d'autres cas, cependant, des réglementations inappropriées ou excessivement restrictive se révèlent néfastes au développement des entreprises et de la R & D. Un exemple frappant est le développement plus lent des biotechnologies en Europe à cause des limitations rigoureuses imposées à la R & D, alors que ce secteur prospérait ailleurs grâce à une réglementation moins restrictive. Il existe également des exemples où la réglementation complique l'accession de nouveaux venus (par exemple les jeunes pousses bâties sur la technologie) à un marché.

Un exemple intéressant de réglementation équilibrée est le traitement spécial des médicaments orphelins dans le droit américain et dans le droit communautaire. Grâce à ce dispositif, des entreprises essaimées ont bénéficié d'incitations pour développer des médicaments à destination de ces minuscules créneaux. La R & D stimulée par cette législation a également conduit à des retombées technologiques significatives dans d'autres branches de la biotechnologie.

L'existence d'une politique de normalisation formelle et l'adoption de normes en temps opportun jouent un rôle critique dans la commercialisation de nouvelles technologies, comme le démontre l'exemple de la téléphonie mobile. Grâce à cette politique, les entreprises peuvent déterminer leurs propres solutions techniques pour la normalisation, qui peut être souvent utilisée pour soutenir la législation au niveau européen.

Les marchés publics relatifs à l'infrastructure publique sont une source de financement importante pour certaines branches secteurs tels que le transport, les communications et la défense. Toutefois, la tendance des gouvernements de l'UE d'exiger des technologies bien établies dans leurs procédures d'adjudication décourage l'innovation. En outre, la fragmentation persistante du marché communautaire des commandes publiques dans certains domaines fait que les entreprises innovantes qui prennent des risques sont moins récompensées dans l'UE que leurs équivalents aux États-Unis.

Des changements dans ces domaines pourraient avoir un impact considérable sur l'augmentation des investissements de R & D du secteur privé dans les entreprises concernées, et il convient de les explorer en détail avec les institutions européennes, les États membres et le secteur industriel.

Les objectifs à poursuivre qui exigent une intensification des efforts ou des initiatives supplémentaires sont notamment:

- Explorer les possibilités offertes par les réglementations européenne et nationales des marchés des produits et des services pour promouvoir la R & D et l'innovation, et veiller particulièrement aux effets qu'elles ont sur la R & D et l'innovation tant directement que par la capacité de commercialiser des produits et services nouveaux. Des réexamens ciblés de la réglementation se justifient peut-être à cet égard.

- Le cas échéant, et en étroite collaboration avec le secteur industriel, encourager davantage l'élaboration et l'utilisation plus systématiques de normes européennes communes. Cette promotion pourrait notamment s'effectuer dans le cadre de la création de plates-formes technologiques qui rassemblent les différents acteurs intéressés par le développement, l'essai et l'utilisation de nouvelles technologies [32].

[32] Parmi les exemples récents au niveau européen, on peut citer la proposition de partenariat pour des essais cliniques entre les pays européens et les pays en développement, qui regroupe des gouvernements et des entreprises au sein d'une initiative axée sur le développement et les essais de nouveaux médicaments et vaccins contre le VIH/SIDA, le paludisme et la tuberculose. Il s'agit de la première action de ce type fondée sur l'article 169 du traité CE .

- Évoluer vers des règles et des pratiques de marchés publics plus favorables à l'innovation, améliorer les possibilités de participation offertes aux PME, notamment grâce à l'adoption et à la mise en oeuvre de propositions législatives visant à moderniser le droit de l'UE dans le domaine des marchés publics. Les entreprises européennes pourraient ainsi disposer d'un groupe d'utilisateurs plus vaste pour leurs plus nouvelles technologies et réaliser rapidement la pénétration du marché requise pour un succès commercial mondial.

3.1.6. Un environnement concurrentiel et des règles de concurrence favorables

Un degré de concurrence suffisant est fondamental pour permettre à l'économie de réaliser l'allocation optimale des ressources et d'assurer le maximum de bien-être possible. La concurrence sur les marchés de produits est essentielle pour que les entreprises innovent, ce qui leur permet de se différencier et de prendre l'avantage sur leurs concurrents.

La politique européenne de la concurrence a évolué d'une approche formelle vers une approche plus économique et concrète. Elle tient maintenant compte de la nature dynamique des marchés et des spécificités de la R & D et de l'innovation. Trois éléments de cette politique ont une incidence plus directe sur les activités de R & D et d'innovation des entreprises. Ils ont trait aux accords de coopération en matière de R & D, aux conventions de transfert de technologie et aux aides d'État à la R & D.

La coopération entre entreprises dans le domaine de la R & D est de plus en plus nécessaire pour mettre à profit les économies d'échelle, le partage des connaissances et la complémentarité des technologies. La plupart des accords de coopération ne posent pas de problème de concurrence et bénéficient d'exemptions au titre de l'article 81, paragraphe 3, du traité concernant les considérations d'efficacité. Le nouveau règlement n° 2659/2000 relatif à l'exemption de certaines catégories d'accords de R & D [33] réduit la charge réglementaire imposée aux sociétés et leur donne une plus grande liberté contractuelle.

[33] JO L 304 du 5.12.2000

En ce qui concerne les accords de licence sur la technologie, le règlement actuel relatif à l'exemption par catégories [34] sera également révisé suivant la même approche que pour d'autres exemptions catégorielles. Le but est de simplifier et d'élargir autant que possible l'exemption par catégories pour les accords de licence concernant la technologie en limitant la scrutation de ces accords à la lumière des règles de la politique de concurrence aux cas dans lesquels elle est indispensable et en renforçant la sécurité juridique.

[34] Règlement (CE) n° 240/96 de la Commission, JO L 031 du 9.12.1996.

Quant aux aides d'État à la R & D, la Commission reconnaît leur légitimité pour remédier aux défaillances du marché et leur rôle important dans l'économie de la connaissance. Conformément aux demandes formulées par le Conseil européen de Lisbonne et de Stockholm, la Commission s'est également engagée à encourager la réorientation des aides d'État vers des objectifs horizontaux, notamment la R & D. À la lumière de l'objectif des 3% fixé à Barcelone, elle a considéré que l'actuel encadrement communautaire des aides d'État à la recherche et au développement, qui prévoit des intensités de R & D suffisantes, devrait être prolongé jusqu'en 2005 [35]. Dans le cadre de la prochaine révision du règlement d'exemption par catégories pour les PME, la Commission envisagera de l'élargir aux aides d'État à la R & D.

[35] Encadrement communautaire des aides d'État à la recherche et au développement, JO C 45 du 17.2.1996.

Un des défis permanents dans les décisions en matière de concurrence est de comprendre les changements dans les processus de R & D et d'innovation industriels et d'évaluer leurs effets sur l'avenir de la dynamique du marché et des conditions de concurrence, notamment dans les secteurs très innovants. Une vue dynamique qui dépasse l'évaluation et l'extrapolation statiques du comportement antérieur est nécessaire, notamment dans l'appréciation du pouvoir du marché.

Les objectifs à poursuivre qui exigent une intensification des efforts ou des initiatives supplémentaires sont notamment:

- Tenir dûment compte, dans le cadre des décisions en matière de concurrence, de la dynamique du marché et des conditions de concurrence pour évaluer les activités de R & D et d'innovation, notamment dans les secteurs hautement innovants.

- Contrôler la réorientation des aides d'État à la R & D et son effet d'entraînement sur les investissements, et poursuivre l'étude de l'adaptation possible de l'encadrement communautaire dans le contexte de sa prochaine révision en 2005.

3.1.7. Des marchés financiers porteurs couvrant les différentes étapes du développement des entreprises de haute technologie et autres sociétés innovantes

Beaucoup de sociétés novatrices ont besoin d'accéder aux marchés financiers des participations ou des emprunts pour pouvoir investir dans les activités de R & D et d'innovation. Les sociétés de haute technologie à croissance rapide dépendent de façon cruciale d'un accès au financement par prise de participation aux différentes étapes de leur croissance: marché du capital-investissement au départ (amorçage et démarrage) et en phase de développement, et marchés secondaires [36] pour financer les premières offres publiques de souscription et les phases d'expansion ultérieures.

[36] P. ex. le Neuer Markt allemand, le Nouveau Marché français, et le segment "haute technologie" d'Euronext et du NASDAQ-Europe (précédemment EASDAQ)

La mise en oeuvre intégrale du plan d'action sur les services financiers (PASF) et du plan d'action sur le capital-investissement (PACI) est donc importante pour créer des marchés financiers plus efficaces et intégrés en Europe et améliorer ainsi l'accès au financement externe tout en en réduisant le coût. Cette mesure est d'autant plus nécessaire que les conditions du marché se sont considérablement dégradées depuis l'an 2000. La confiance dans ces marchés doit être restaurée en parallèle avec la poursuite de leur rationalisation. Les grandes entreprises utilisent de plus en plus les prêts de Banque européenne d'investissement (BEI) pour financer leurs activités de R & D et d'innovation. Cela indique que des instruments bien conçus, tels que les emprunts obligataires et les prêts titrisés, pourraient devenir une importante source de capitaux pour les entreprises et autres organisations de taille moyenne qui investissent dans la R & D et l'innovation.

Les objectifs à poursuivre qui exigent une intensification des efforts ou des initiatives supplémentaires sont notamment:

- Dans le cadre de la mise en oeuvre et éventuellement du suivi du PASF et du PACI, identifie les mesures qui aideraient à stimuler le financement par le marché des participations et de l'emprunt de la R & D et de l'innovation dans les entreprises aux différentes étapes de leur développement.

- Dans le cadre du suivi de l'"Initiative Innovation 2000" de la BEI, mettre en place les instruments financiers qui contribuent le mieux à cet objectif.

3.1.8. Stabilité macroéconomique et conditions fiscales favorables

Les politiques publiques de soutien à la R & D devraient être considérées dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance, notamment à la lumière de ses exigences concernant le maintien d'une situation budgétaire "proche de l'équilibre ou d'excédent" sur le cycle économique. La discipline fiscale contribue à la stabilité macroéconomique et à la création d'un environnement porteur pour la R & D et l'innovation.

Des finances publiques saines sont profitables aux investissements de R & D de plusieurs manières. Des taux d'intérêt réels faibles réduisent le coût des investissements à long terme, y compris pour la R & D. La stabilité des prix réduit l'incertitude quant au taux de rendement pour les investisseurs. Cette situation est spécialement utile pour la R & D, où les retours ne se matérialisent souvent qu'à moyenne ou longue échéance. Un carcan budgétaire plus contraignant avec des restrictions claires concernant le financement des déficits souligne la nécessité de politiques de dépenses publiques prudentes. Le déplacement des dépenses publiques vers des domaines tels que la R & D et l'innovation exerce un effet de retombée positif sur les investissements privés. Toutefois, les gouvernements doivent veiller à ce que les dépenses publiques de R & D n'évincent pas des investissements privés plus productifs.

Les efforts de réorientation des dépenses publiques devraient aussi s'opérer dans un cadre de politique fiscale saine. Par conséquent, les efforts déployés pour accroître l'accumulation de capital, notamment le soutien public à la R & D, doivent, dans une large mesure, passer par une restructuration des dépenses publiques [37]. Un bon environnement fiscal exerce des effets positifs sur la R & D et l'innovation. Concernant les entreprises qui exercent des activités transnationales au sein du marché intérieur, il est nécessaire de créer un environnement approprié en matière de fiscalité directe de sorte que les décisions relatives aux investissements de R & D ne soient pas biaisées des considérations purement fiscales. L'objectif de la Commission [38] qui tend à permettre aux entreprises d'être imposées sur la base d'une assiette consolidée de l'impôt sur les sociétés pour l'ensemble de leurs activités dans l'UE supprimerait les obstacles à l'allocation efficace des investissements, y compris ceux des entreprises dans la R & D.

[37] Rapport de la Commission et du Conseil (ECOFIN) au Conseil européen (Stockholm, 23-24 mars 2001), "La contribution des finances publiques à la croissance et à l'emploi: améliorer la qualité et la viabilité", doc 6997/01.

[38] Proposé dans la communication de la Commission "Vers un marché intérieur sans entraves fiscales", COM(2001)582 du 23.10.2001.

En outre, des impôts comme la TVA et certains impôts locaux [39] sont payables indépendamment du résultat final de l'activité. Ces formes de taxation peuvent particulièrement décourager des activités, telles que la R & D, pour lesquelles le retour sur investissement est incertain ou assez éloigné dans le temps.

[39] Ainsi, par exemple, la TVA payée lors de l'acquisition d'actifs à des fins commerciales peut ne pas être déductible de la TVA à charge des clients finals, et certains impôts locaux sont souvent prélevés simplement parce qu'une activité économique est entreprise. L'impôt sur le travail (notamment sur le salaire) peut également peser lourd pour les entités qui exercent des activités de R & D car elles nécessitent parfois une proportion supérieure à la moyenne de main d'oeuvre très qualifiée.

Les objectifs à poursuivre qui exigent une intensification des efforts ou des initiatives supplémentaires sont notamment:

- Explorer de quelle manière les États membres pourraient réformer leurs systèmes fiscaux afin de réduire les actuelles incitations négatives aux investissements dans la R & D et l'innovation.

3.2. Une utilisation plus efficace du financement public pour la R & D des entreprises

Dans le cadre de l'objectif des 3% et conformément aux règles applicables aux aides d'État, des mécanismes de soutien public pour stimuler les investissements privés dans la R & D se justifient si le retour privé est inférieur au retour social ou pour remédier à des défaillances systémiques [40]. À cet égard, les pouvoirs publics disposent d'une série d'instruments financiers, notamment les mesures de soutien direct, les incitations fiscales, les systèmes de garantie et le soutien du capital-investissement. Chaque instrument a ses caractéristiques et mérites propres, qui peuvent varier selon les secteurs et les pays. Une conception et une mise en oeuvre plus efficaces de ces instruments, individuellement ou en association, peuvent agir comme un stimulant sur l'augmentation des investissements privés et contribuer à la réalisation de l'objectif des 3%.

[40] P. ex. pour améliorer les interactions entre les différentes parties du système de recherche et d'innovation.

3.2.1. Mesures de soutien direct

Les mesures de soutien direct sont particulièrement appropriées lorsque les gouvernements veulent garder le contrôle du type de recherche effectué et orienter l'effort de recherche vers des objectifs de la politique publique ou à long terme. Il s'agit du mécanisme prédominant de promotion des investissements privés dans la recherche dans la plupart des pays.

Ces mesures devraient être judicieusement dirigées vers les domaines dans lesquels le secteur privé bute sur des obstacles significatifs à l'investissement. À cet égard, les partenariats entre le secteur public et le secteur privé peuvent jouer un rôle important dans la stimulation de l'investissement privé tout en réduisant le risque connexe.

Un large éventail de programmes de soutien direct sont à l'oeuvre dans les États membres pour favoriser la collaboration entre les créateurs et les utilisateurs de la connaissance [41] dans des secteurs technologiques spécifiques, la création et le développement de parcs scientifiques et technologiques et la mise en réseau des unités de recherche privées et publiques. Leurs instruments comprennent les subventions, les aides concurrentielles, les achats publics, les subsides remboursables en cas d'exploitation commerciale réussie et le financement catégoriel des institutions publiques. Beaucoup de pays pratiquent plusieurs types de systèmes en même temps.

[41] Cela concerne également le nombre croissant des entreprises qui n'ont guère ou pas de capacité de R & D mais qui externalisent leurs besoins dans ce domaine.

3.2.2. Incitations fiscales

Des incitations fiscales bien conçues encouragent une allocation souple et adaptée des investissements de R & D par le marché entre les technologies et les secteurs concurrents et entraînent moins d'interventions sur le marché. Elles permettent une redistribution plus rapide des ressources entre les technologies en réaction à l'accélération de l'évolution technologique et des développements du marché. Elles réduisent également l'incertitude puisque les entreprises connaissent à l'avance le niveau de l'incitation disponible.

Par contre, les incitations fiscales sont plus susceptibles de créer des bénéfices exceptionnels inattendus en récompensant des investissements qui auraient eu lieu sans elles. Leurs coût et impact finals sont plus difficiles à prévoir en raison de la diversité des variables qui entrent en jeu.

Des incitations fiscales à la R & D de différents types sont de plus en plus utilisées; dix-huit pays de l'OCDE les pratiquent aujourd'hui, contre douze au milieu des années 1990 [42]. Les crédits d'impôt pour les dépenses de R & D deviennent plus populaires que les dégrèvements fiscaux. Un certain nombre de pays dirigent les incitations fiscales à la R & D vers les petites entreprises ou prévoient des dispositions plus généreuses pour celles-ci que pour les grandes sociétés. En outre, un certain nombre de régimes fiscaux sont axés sur les coûts salariaux et d'autres visent à encourager la collaboration entre les entreprises et les organismes de recherche publics.

[42] Les pays européens concernés sont l'Autriche, la Belgique, le Danemark, la France, l'Italie, les Pays-Bas, le Portugal, l'Espagne, le Royaume-Uni et la Hongrie. Si un petit nombre de pays ont supprimé ou envisagent d'éliminer progressivement leurs incitations fiscales à la R & D, d'autres, plus nombreux, les ont perfectionnées ces dernières années ou étudient les moyens de le faire.

La conception judicieuse des mesures fiscales influe fortement sur leur efficacité à stimuler les investissements de R & D. Les États membres doivent coordonner leurs initiatives à cet égard pour éviter les pratiques fiscales dommageables au sein de l'UE.

3.2.3. Mécanismes de garantie

L'accès insuffisant au financement externe (emprunt ou prise de participation) à un coût raisonnable est un problème commun pour les PME et notamment pour les sociétés de haute technologie de petite taille et nouvellement créées. Le problème est encore plus aigu pour le financement de la R & D étant donné le risque qui y est associé. Dans ces conditions, les mécanismes de garantie de participation au capital comme des emprunts peuvent être des moyens attrayants d'augmenter la disponibilité de capitaux et le coût d'accès à ceux-ci. Les garanties de participation au capital sont en général dirigées vers les investisseurs potentiels en R & D. Les garanties d'emprunt fournissent aux entreprises une incitation directe au développement de leur effort de R & D. Les garanties sont un moyen de partager le risque et donc de moins exposer les emprunteurs/investisseurs et les sociétés. En général et si elles sont appliquées correctement, elles peuvent potentiellement influer sur les investissements privés de R & D à un moindre coût que des mesures directes ou fiscales.

Les mécanismes de garantie varient selon le type de société concerné. Pour les jeunes pousses de haute technologie, les garanties de participation au capital peuvent stimuler l'investissement en réduisant le niveau du risque associé et en augmentant le taux de rendement. Les garanties d'emprunt conviennent généralement mieux aux PME des secteurs traditionnels en raison de leur préférence pour le financement par l'emprunt. Elles peuvent également être attrayantes pour les jeunes entreprises de haute technologie une fois que celles-ci sont suffisamment mûres pour générer un flux de recettes stables.

Une variété de systèmes de garantie d'emprunt sont actuellement pratiqués au plan national et communautaire, mais ils ne sont généralement pas conçus spécifiquement pour la R & D. Les systèmes de garantie de participation au capital ne sont apparus que récemment.

3.2.4. Soutien public au capital-investissement

Comme le nombre des sociétés de haute technologie augmente, le capital-investissement, qui constitue leur principale source de fonds à leurs débuts (amorçage et démarrage) et en phase de développement, contribue de plus en plus au financement de la R & D. Pourtant, ces entreprises ont souvent des difficultés à réunir des capitaux dans les premiers temps en raison du risque de l'opération et de l'échelle réduite de l'investissement nécessaire. Malgré l'augmentation récente des disponibilités de financement de démarrage (jusqu'à la crise de 2000-2001), le capital-investissement ne joue toujours pas un rôle aussi plein en Europe qu'aux États-Unis. Dans l'effort visant à combler cet écart, le secteur public prend une part croissante au niveau régional, national et européen grâce non seulement aux mécanismes de garantie et aux incitations fiscales, mais aussi aux aides remboursables, aux prêts subventionnés et aux investissements par prise de participation directe dans les fonds de capital-risque.

Récemment, divers systèmes ont été mis en place dans un certain nombre d'États membres pour stimuler l'investissement privé dans les fonds associés aux incubateurs et aux parcs scientifiques ou consacrés au financement de la R & D dans les jeunes pousses de haute technologie.

3.2.5. Amélioration de la combinaison de l'ensemble des instruments

Une combinaison d'instruments est nécessaire puisqu'aucun n'est individuellement capable de fournir la gamme complète des incitations. Il importe de s'assurer que les différents instruments présentent un bon rapport coût-efficacité et évitent d'éventuels effets d'évincement, à la fois par leurs caractéristiques propres et par leurs interactions.

La combinaison optimale différera nécessairement d'un pays et d'une région à l'autre et est susceptible d'évoluer avec le temps. Les besoins de financement varient selon les segments industriels et chaque segment contribue différemment à l'investissement privé global dans la R & D. En outre, le niveau optimal des dépenses publiques de R & D et de sa répartition entre les entreprises et établissements de recherche publics dépend également des caractéristiques du système de R & D d'un pays. Dans certains cas, cette répartition optimale peut impliquer un changement d'allocation entre les secteurs public et privé et/ou une augmentation des dépenses publiques globales.

L'utilisation de critères cohérents pour évaluer la conception et l'effet des différents instruments et de leur combinaison faciliterait l'élaboration de la politique et l'apprentissage mutuel entre les pays.

Au niveau communautaire, plusieurs programmes et initiatives contribuent à stimuler les investissements privés dans la R & D grâce à une variété d'instruments financiers (subventions, prêts, prise de participation et garanties) [43]. Une complémentarité et une synergie accrues entre ces instruments sont recherchées afin d'assurer un impact d'ensemble maximal [44] . Ces instruments communautaires constituent une plate-forme d'apprentissage européenne pour tester de nouveaux outils et pour faciliter les échanges d'expérience entre les différents établissements financiers nationaux concernés qui participent à la mise en oeuvre de certains d'entre eux.

[43] Outre le programme-cadre de R & D communautaire, ces instruments comprennent l'"Initiative Innovation 2000" du groupe de la BEI et les fonds structurels (programmes normaux et actions innovatrices). Le dispositif de garantie et de participation du programme pluriannuel pour les entreprises et l'esprit d'entreprise peut être également utilisé pour financer des activités de R & D et d'innovation.

[44] L'accord de coopération entre la Commission et la BEI dans le domaine de la R & D vise notamment à faciliter l'utilisation complémentaire de différents instruments et à mieux tenir compte des spécificités de la R & D dans la conception d'instruments de la BEI. La création d'un instrument de prêt de la BEI pour le financement de projets de R & D stratégiques européens, qui est envisagée pour faciliter le financement des projets multipartenaires, contribuerait également au développement des synergies entre le programme-cadre et EUREKA.

Les objectifs à poursuivre qui exigent une intensification des efforts ou des initiatives supplémentaires sont notamment:

- Dans le contexte de l'évaluation comparative des politiques de recherche, et compte tenu des différentes situations nationales, recenser les bonnes pratiques et les régimes novateurs afin d'améliorer l'effet de levier des différents instruments de financement publics sur les investissements privés en R & D.

- Aux niveaux régional, national et de l'Union, utiliser plus efficacement ces instruments, pris individuellement ou combinés, pour accroître leur impact global.

3.3. La R & D et l'innovation dans les stratégies et la gestion des entreprises

La décision d'une entreprise d'investir dans la R & D n'est pas seulement influencée par le cadre général et la mise à disposition d'aide publique. La place de la R & D dans sa stratégie commerciale d'ensemble et l'efficacité de sa gestion sont des facteurs importants qui mérite plus d'attention.

Plusieurs exemples montrant que les entreprises qui ont incorporé la R & D et l'innovation dans leur stratégie commerciale tendent à mieux réussir et à investir plus dans ce domaine. Beaucoup d'entreprises n'ont pas cependant pas opéré cette intégration et ne tirent pas pleinement parti des méthodes et outils de gestion de la R & D qui augmentent la productivité [45]. Cela concerne non seulement les secteurs de haute technologie, mais également les secteurs de moyenne et de faible technologie dont la consommation de connaissance s'accroît du fait que les entreprises doivent aussi y développer de plus en plus leur capacité d'acquérir et d'assimiler de nouvelles technologies.

[45] On s'attend à ce que le changement des processus et de la gestion de la R & D industrielle s'accélère dans les années à venir et augmente ainsi les possibilités d'améliorer la productivité de la R & D grâce à une utilisation plus étendue des TIC (collecte de renseignements, gestion de la connaissance, simulation et prototypage, évaluation des besoins de l'utilisateur, etc).

Un autre aspect significatif dans ce contexte est la reconnaissance de l'importance croissante du capital intellectuel comme actif clé des entreprises. Dans leurs rapports annuels, beaucoup de sociétés font référence à leurs activités de R & D sous la forme d'une simple note de bas de page dans leurs comptes, ce qui en réduit sensiblement la visibilité pour les investisseurs.

Les objectifs à poursuivre qui exigent une intensification des efforts ou des initiatives supplémentaires sont notamment:

- Explorer le rôle que les associations industrielles au niveau national et européen pourraient jouer dans la promotion de la prise de conscience et de l'utilisation des bonnes pratiques de gestion de la R & D.

- Encourager une analyse et une déclaration plus visibles des actifs de R & D et de propriété intellectuelle afin d'aider les gestionnaires de l'entreprise et la communauté des investisseurs à mieux évaluer les possibilités et les risques.

4. Conclusion: vers une approche européenne concertée

Les analyses développées dans la présente communication confirment qu'il est nécessaire non seulement d'améliorer l'efficacité du système européen de la R & D et de l'innovation, mais aussi de s'attaquer au sous-investissement dans la R & D dont soufre l'UE. La tendance actuelle des investissements de R & D doit être inversée d'urgence afin qu'ils approchent 3% du PIB d'ici 2010, avec un accroissement de la part du financement par les entreprises au niveau de deux tiers des dépenses totales de R & D. Ce changement est essentiel pour atteindre l'objectif de Lisbonne qui vise à faire de l'Europe la première économie de la connaissance dans le monde. À cette fin, des efforts conjoints impliquant les institutions européennes, l'ensemble des États membres et les pays candidats, ainsi que le secteur des entreprise sont indispensables.

Un vaste dispositif de politiques publiques doit être mobilisé de manière cohérente afin de s'attaquer au cadre général et aux mécanismes du financement public de la R & D et de l'innovation.

Dans un premier temps, la Commission engagera le débat sur la base de la présente communication avec les institutions européennes, les États membres, les régions et les parties concernées, notamment le secteur industriel. Ce débat sera conduit dans le but d'identifier les mesures qui devraient être introduites ou renforcées à différents niveaux afin d'encourager l'investissement dans la R & D en Europe d'une manière plus efficace, plus systématique et plus cohérente. L'apport de ces discussions permettra à la Commission de proposer des orientations dans le cadre de son rapport de synthèse au Conseil européen de printemps de 2003. Après le Conseil européen et en fonction de ses résultats, elle envisagera de proposer un ensemble ciblé d'actions prioritaires, soutenu par un processus de coordination ouverte.