17.11.2017   

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Journal officiel de l'Union européenne

L 301/1


RÈGLEMENT DÉLÉGUÉ (UE) 2017/2100 DE LA COMMISSION

du 4 septembre 2017

définissant des critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien, conformément au règlement (UE) no 528/2012 du Parlement européen et du Conseil

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

LA COMMISSION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,

vu le règlement (UE) no 528/2012 du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 concernant la mise à disposition sur le marché et l'utilisation des produits biocides (1), et notamment son article 5, paragraphe 3, premier alinéa,

considérant ce qui suit:

(1)

Il convient d'élaborer des critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien, conformément au règlement (UE) no 528/2012, en tenant compte de l'objectif dudit règlement, à savoir améliorer la libre circulation des produits biocides dans l'Union tout en garantissant un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale et de l'environnement.

(2)

Dans le cadre de son programme international sur la sécurité des substances chimiques, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a proposé en 2002 une définition des perturbateurs endocriniens (2), puis, en 2009, une définition des effets indésirables (3). Ces définitions font désormais l'objet d'un très large consensus entre scientifiques. L'Autorité européenne de sécurité des aliments les a approuvées dans son avis scientifique concernant les perturbateurs endocriniens adopté le 28 février 2013 (4). Le comité scientifique pour la sécurité des consommateurs partage également ce point de vue (5). Il convient par conséquent de fonder les critères pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien sur ces définitions de l'OMS.

(3)

Pour mettre en œuvre ces critères, il y a lieu d'effectuer une analyse de la valeur probante en tenant compte, en particulier, de la méthode prévue dans le règlement (UE) no 528/2012 et le règlement (CE) no 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil (6) en ce qui concerne l'analyse de la valeur probante. Il convient également de prendre en considération l'expérience acquise lors de l'utilisation du document d'orientation de l'OCDE sur leslignes directrices normalisées pour évaluer l'effet perturbateur des produits chimiques sur le système endocrinien (7). En outre, la mise en œuvre des critères devrait se fonder sur l'ensemble des données scientifiques pertinentes, notamment les études soumises conformément aux exigences actuelles réglementaires en matière de données prévues par le règlement (UE) no 528/2012. Ces études sont pour la plupart basées sur des protocoles convenus au niveau international.

(4)

La détermination des propriétés perturbant le système endocrinien en rapport avec la santé humaine devrait s'appuyer sur des données humaines et/ou animales, permettant ainsi l'identification des perturbateurs endocriniens aussi bien connus que présumés.

(5)

L'une des caractéristiques des perturbateurs endocriniens est leur mode d'action endocrinien. Il existe plusieurs modes d'action endocriniens. Des organismes appartenant à des phylums distincts diffèrent sur le plan biologique quant à leurs caractéristiques essentielles, et, partant, présentent des modes d'action endocriniens différents. Par conséquent, un certain mode d'action endocrinien pertinent pour un phylum spécifique peut ne pas être biologiquement plausible pour des organismes d'un phylum différent. Les substances dont le mode d'action biocide prévu, au sens de l'annexe II, titre 1, point 6.5, du règlement (UE) no 528/2012 de la Commission, est de contrôler des organismes cibles autres que des vertébrés via leur système endocrinien, présentent donc un mode d'action qui n'est pas censé être pertinent pour les vertébrés. Dès lors, ces substances ne posent généralement pas de risque, via leur mode d'action prévu, pour les humains et les vertébrés dans l'environnement et sont donc particulièrement efficaces et utiles pour la lutte intégrée contre les organismes nuisibles. Lors de l'établissement des critères pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien qui peuvent causer des effets indésirables sur des organismes non cibles, il est approprié, au vu des objectifs du règlement (UE) no 528/2012, ainsi que du principe de proportionnalité, de tenir compte des considérations scientifiques susmentionnées. Aussi, lorsque le mode d'action prévu consiste à contrôler des organismes cibles autres que des vertébrés via leur système endocrinien, les effets causés par ce mode d'action prévu sur les organismes du même phylum que celui ciblé ne devraient pas être pris en considération aux fins de l'identification des propriétés perturbant le système endocrinien en ce qui concerne les organismes non cibles. Les substances actives présentant un tel mode d'action prévu ne peuvent toutefois être approuvées que si, à la suite d'une évaluation des risques, et en prenant en considération les exigences spécifiques en matière de données prévues par le règlement (UE) no 528/2012, leur utilisation ne conduit pas à des effets inacceptables sur des organismes non cibles, y compris sur des organismes du même phylum que l'organisme cible.

(6)

Il convient que la Commission évalue, sur la base des objectifs du règlement (UE) no 528/2012, l'expérience acquise dans le cadre de l'application des critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien introduits par le présent règlement.

(7)

Les critères pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien reflètent l'état actuel des connaissances scientifiques et techniques et permettent d'identifier, avec plus de précision, les substances ayant des propriétés perturbant le système endocrinien. Sans préjudice de l'article 90, paragraphe 2, du règlement (UE) no 528/2012, il convient donc que les nouveaux critères s'appliquent dès que possible, en tenant compte du temps nécessaire pour permettre aux États membres et à l'Agence européenne des produits chimiques de se préparer à leur application. C'est pourquoi, à partir du 7 juin 2018, ces critères devraient s'appliquer sauf si le comité visé à l'article 82 du règlement (UE) no 528/2012 a voté sur un projet de règlement au plus tard le 7 juin 2018. La Commission examinera les conséquences pour chaque procédure en cours en vertu du règlement (UE) no 528/2012 et prendra, le cas échéant, les mesures appropriées dans le respect des droits des demandeurs. Cela pourrait inclure une demande d'informations complémentaires au demandeur et/ou de données supplémentaires à l'organisme réglementaire et/ou un avis révisé de l'Agence,

A ADOPTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT:

Article premier

Les critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien conformément au règlement (UE) no 528/2012 sont définis en annexe du présent règlement.

Article 2

Les critères définis en annexe du présent règlement sont applicables à partir du 7 juin 2018, à l'exception des procédures pour lesquelles le comité visé à l'article 82 du règlement (UE) no 528/2012 a voté sur un projet de règlement au plus tard le 7 juin 2018.

Article 3

Pour le 7 juin 2025, la Commission présente au groupe d'experts (la «réunion des autorités compétentes en matière de produits biocides») composé de représentants des autorités compétentes des États membres pour les produits biocides une évaluation de l'expérience acquise dans le cadre de l'application des critères scientifiques pour la détermination des propriétés perturbant le système endocrinien introduits par le présent règlement.

Article 4

Le présent règlement entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l'Union européenne.

Il est applicable à partir du 7 juin 2018.

Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre.

Fait à Bruxelles, le 4 septembre 2017.

Par la Commission

Le président

Jean-Claude JUNCKER


(1)  JO L 167 du 27.6.2012, p. 1.

(2)  OMS/PISSC (Organisation mondiale de la santé/Programme international sur la sécurité des substances chimiques), 2002. «Global Assessment of the State-of-the-science of Endocrine Disruptors», WHO/PCS/EDC/02.2, accessible au public à l'adresse suivante: http://www.who.int/ipcs/publications/new_issues/endocrine_disruptors/en/.

(3)  OMS/PISSC (Organisation mondiale de la santé/Programme international sur la sécurité des substances chimiques), 2009. «Principles and methods for the risk assessment of chemicals in food»,Environmental Health Criteria 240, accessible au public à l'adresse suivante: http://www.who.int/foodsafety/publications/chemical-food/en/

(4)  «Scientific Opinion on the hazard assessment of endocrine disruptors: Scientific criteria for identification of endocrine disruptors and appropriateness of existing test methods for assessing effects mediated by these substances on human health and the environment», EFSA Journal, 2013, 11(3):3132, doi: 10.2903/j.efsa.2013.3132.

(5)  Comité scientifique pour la sécurité des consommateurs, «Memorandum on Endocrine Disruptors», 16.12.2014 (SCCS/1544/14).

(6)  Règlement (CE) no 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) no 1907/2006 (JO L 353 du 31.12.2008, p. 1).

(7)  Série de l'OCDE sur les essais et évaluations, numéro 150.


ANNEXE

Une substance est considérée comme ayant des propriétés perturbant le système endocrinien en ce qui concerne l'homme ou des organismes non cibles si elle répond aux critères énoncés dans la partie A ou B.

Partie A — Propriétés perturbant le système endocrinien en ce qui concerne l'homme

1)

Une substance est considérée comme ayant des propriétés perturbant le système endocrinien qui peuvent causer des effets indésirables chez l'homme si, sur la base des points a) à d) du point 2), il s'agit d'une substance qui répond à l'ensemble des critères suivants, à moins qu'il soit démontré que les effets indésirables identifiés ne concernent pas l'homme:

a)

elle présente un effet indésirable chez un organisme intact ou ses descendants, à savoir un changement dans la morphologie, la physiologie, la croissance, le développement, la reproduction ou la durée de vie d'un organisme, d'un système ou d'une (sous-)population qui se traduit par l'altération d'une capacité fonctionnelle ou d'une capacité à compenser un stress supplémentaire ou par l'augmentation de la sensibilité à d'autres influences;

b)

elle a un mode d'action endocrinien, c'est-à-dire qu'elle altère la ou les fonctions du système endocrinien;

c)

l'effet indésirable est une conséquence du mode d'action endocrinien.

2)

L'identification d'une substance comme ayant des propriétés perturbant le système endocrinien qui peuvent causer des effets indésirables chez l'homme conformément au point 1) s'appuie sur l'ensemble des points suivants:

a)

toutes les données scientifiques pertinentes disponibles (études in vivo ou systèmes d'essai prédictifs de substitution dûment validés concernant les effets indésirables chez l'homme ou les animaux; études in vivo, in vitro ou, le cas échéant, in silico fournissant des informations sur les modes d'action endocriniens):

i)

les données scientifiques obtenues conformément à des protocoles d'étude internationalement reconnus, notamment celles visées aux annexes II et III du règlement (UE) no 528/2012;

ii)

les autres données scientifiques retenues en appliquant une méthode d'examen systématique;

b)

une évaluation des données scientifiques pertinentes disponibles sur la base d'une analyse de la valeur probante afin d'établir si les critères énoncés au point 1) sont remplis; en appliquant la détermination fondée sur l'analyse de la valeur probante, l'évaluation des preuves scientifiques doit, en particulier, prendre en considération l'ensemble des facteurs suivants:

i)

aussi bien les résultats positifs que les résultats négatifs;

ii)

la pertinence de conception des études pour l'évaluation des effets indésirables et du mode d'action endocrinien;

iii)

la qualité et la consistance des données, compte tenu des caractéristiques et de la cohérence des résultats dans une même étude et entre études de conception similaire ainsi que pour différentes espèces;

iv)

la voie d'exposition, les études toxicocinétiques et de métabolisme;

v)

la notion de dose limite, ainsi que les lignes directrices internationales applicables aux doses maximales recommandées et utilisées aux fins de l'évaluation des effets perturbateurs de toxicité excessive;

c)

sur la base de l'analyse de la valeur probante, le lien entre le ou les effets indésirables et le mode d'action endocrinien doit être établi en se fondant sur la plausibilité biologique, qui doit être déterminée à la lumière des connaissances scientifiques actuelles et en tenant compte des lignes directrices convenues au niveau international;

d)

les effets indésirables qui sont des conséquences secondaires non spécifiques d'autres effets toxiques ne sont pas pris en considération lors de l'identification de la substance en tant que perturbateur endocrinien.

Partie B — Propriétés perturbant le système endocrinien en ce qui concerne des organismes non cibles

1)

Une substance est considérée comme ayant des propriétés perturbant le système endocrinien qui peuvent causer des effets indésirables sur des organismes non cibles si, sur la base des points a) à d) du point 2), il s'agit d'une substance qui répond à l'ensemble des critères suivants, à moins qu'il soit démontré que les effets indésirables identifiés ne sont pas pertinents au niveau de la (sous-)population pour les organismes non cibles:

a)

elle présente un effet indésirable chez des organismes non cibles, à savoir un changement dans la morphologie, la physiologie, la croissance, le développement, la reproduction ou la durée de vie d'un organisme, d'un système ou d'une (sous-)population qui se traduit par l'altération d'une capacité fonctionnelle ou d'une capacité à compenser un stress supplémentaire ou par l'augmentation de la sensibilité à d'autres influences;

b)

elle a un mode d'action endocrinien, c'est-à-dire qu'elle altère la ou les fonctions du système endocrinien;

c)

l'effet indésirable est une conséquence du mode d'action endocrinien.

2)

L'identification d'une substance comme ayant des propriétés perturbant le système endocrinien qui peuvent causer des effets indésirables sur des organismes non cibles conformément au point 1) s'appuie sur l'ensemble des points suivants:

a)

toutes les données scientifiques pertinentes disponibles (études in vivo ou systèmes d'essai prédictifs de substitution dûment validés concernant les effets indésirables chez l'homme ou les animaux; études in vivo, in vitro ou, le cas échéant, in silico fournissant des informations sur les modes d'action endocriniens):

i)

les données scientifiques obtenues conformément à des protocoles d'étude internationalement reconnus, notamment celles visées aux annexes II et III du règlement (UE) no 528/2012;

ii)

les autres données scientifiques retenues en appliquant une méthode d'examen systématique;

b)

une évaluation des données scientifiques pertinentes disponibles sur la base d'une analyse de la valeur probante afin d'établir si les critères énoncés au point 1) sont remplis; en appliquant la détermination fondée sur l'analyse de la valeur probante, l'évaluation des preuves scientifiques doit prendre en considération l'ensemble des facteurs suivants:

i)

aussi bien les résultats positifs que les résultats négatifs, en faisant la distinction entre les groupes taxinomiques (par exemple: mammifères, oiseaux, poissons, amphibiens), le cas échéant;

ii)

la pertinence de la conception de l'étude pour l'évaluation des effets indésirables et sa pertinence au niveau de la (sous-)population, et pour l'évaluation du mode d'action endocrinien;

iii)

les effets indésirables sur la reproduction, la croissance/le développement, et les autres effets indésirables pertinents qui sont susceptibles d'avoir une incidence sur les (sous-)populations. Les données de terrain ou de surveillance adéquates, fiables et représentatives et/ou les résultats de modèles de population sont également à prendre en considération s'ils sont disponibles;

iv)

la qualité et la consistance des données, compte tenu des caractéristiques et de la cohérence des résultats dans une même étude et entre études de conception similaire ainsi que pour des groupes taxinomiques différents;

v)

la notion de dose limite, ainsi que les lignes directrices internationales applicables aux doses maximales recommandées et utilisées aux fins de l'évaluation des effets perturbateurs de toxicité excessive;

c)

sur la base de l'analyse de la valeur probante, le lien entre le ou les effets indésirables et le mode d'action endocrinien doit être établi en se fondant sur la plausibilité biologique, qui doit être déterminée à la lumière des connaissances scientifiques actuelles et en tenant compte des lignes directrices convenues au niveau international;

d)

les effets indésirables qui sont des conséquences secondaires non spécifiques d'autres effets toxiques ne sont pas pris en considération pour l'identification de la substance en tant que perturbateur endocrinien en ce qui concerne les organismes non cibles.

3)

Si le mode d'action biocide prévu de la substance active évaluée consiste à contrôler des organismes cibles autres que des vertébrés via leur système endocrinien, les effets sur les organismes du même phylum que celui ciblé ne sont pas pris en considération pour l'identification de la substance comme ayant des propriétés perturbant le système endocrinien en ce qui concerne les organismes non cibles.