11.1.2012   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

L 7/3


DÉCISION DE LA COMMISSION

du 20 décembre 2011

relative à l’application de l’article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général

[notifiée sous le numéro C(2011) 9380]

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

(2012/21/UE)

LA COMMISSION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 106, paragraphe 3,

considérant ce qui suit:

(1)

L’article 14 du traité dispose que l’Union, sans préjudice des articles 93, 106 et 107 du traité, utilise les pouvoirs qui lui sont conférés afin de veiller à ce que les services d’intérêt économique général fonctionnent sur la base de principes et dans des conditions qui leur permettent d’accomplir leurs missions.

(2)

Afin que certains services d’intérêt économique général fonctionnent sur la base de principes et dans des conditions qui leur permettent d’accomplir leurs missions, un soutien financier de l’État peut se révéler nécessaire pour prendre en charge tout ou partie des coûts spécifiques résultant des obligations de service public. Conformément aux dispositions de l’article 345 du traité, telles qu’interprétées par la Cour de justice de l’Union européenne, il est indifférent que ces services d’intérêt économique général soient gérés par des entreprises publiques ou privées.

(3)

L’article 106, paragraphe 2, du traité dispose à cet égard que les entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général ou présentant le caractère d’un monopole fiscal sont soumises aux règles des traités, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l’application de ces règles ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l’intérêt de l’Union.

(4)

Dans l’arrêt rendu dans l’affaire Altmark (1), la Cour de justice a décidé que les compensations de service public ne constituaient pas des aides d’État au sens de l’article 107 du traité pour autant que quatre critères cumulatifs soient remplis. Premièrement, l’entreprise bénéficiaire doit réellement avoir la charge d’obligations de service public et ces obligations doivent être clairement définies. Deuxièmement, les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation doivent être préalablement établis, de façon objective et transparente. Troisièmement, la compensation ne doit pas dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable. Enfin, quatrièmement, lorsque le choix de l’entreprise à charger de l’exécution d’obligations de service public, dans un cas concret, n’est pas effectué dans le cadre d’une procédure de marché public permettant de sélectionner le candidat capable de fournir ces services au moindre coût pour la collectivité, le niveau de la compensation nécessaire doit être déterminé sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement équipée des moyens nécessaires, aurait encourus.

(5)

Si ces critères ne sont pas respectés et si les conditions générales d’applicabilité de l’article 107, paragraphe 1, du traité sont remplies, les compensations de service public constituent des aides d’État et sont soumises aux dispositions des articles 93, 106, 107 et 108 du traité.

(6)

Outre la présente décision, trois actes sont utiles à l’application des règles en matière d’aides d’État aux compensations accordées pour la prestation de services d’intérêt économique général:

a)

une nouvelle communication relative à l’application des règles de l’Union européenne en matière d’aides d’État aux compensations octroyées pour la prestation de services d’intérêt économique général (2) précise l’application de l’article 107 du traité et des critères fixés par l’arrêt rendu dans l’affaire Altmark à ces compensations;

b)

un nouveau règlement, que la Commission se propose d’adopter, relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité aux aides de minimis accordées lors de la prestation de SIEG énonce certaines conditions – dont le montant de la compensation – dans lesquelles les compensations de service public sont considérées comme ne répondant pas à tous les critères de l’article 107, paragraphe 1;

c)

un encadrement modifié des aides d’État sous forme de compensations de service public (3) précise comment la Commission analysera les cas non couverts par la présente décision qui, de ce fait, doivent lui être notifiés.

(7)

La décision 2005/842/CE de la Commission du 28 novembre 2005 concernant l’application des dispositions de l’article 86, paragraphe 2, du traité CE aux aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général (4) précise le sens et la portée de l’exception prévue à l’article 106, paragraphe 2, du traité et définit les règles visant à permettre un contrôle efficace du respect des critères fixés dans cette disposition. La présente décision remplace la décision 2005/842/CE et énonce sous quelles conditions une aide d’État sous la forme d’une compensation pour un service d’intérêt économique général n’est pas soumise à l’obligation de notification préalable prévue à l’article 108, paragraphe 3, du traité étant donné qu’elle peut être considérée comme compatible avec l’article 106, paragraphe 2, du traité.

(8)

Une telle aide ne peut être considérée comme compatible avec le marché intérieur que si elle est octroyée pour assurer la prestation de services d’intérêt économique général au sens de l’article 106, paragraphe 2, du traité. Il résulte de la jurisprudence qu’en l’absence de réglementation sectorielle régissant cette question à l’échelle de l’Union, les États membres disposent d’un large pouvoir d’appréciation quant à la définition des services susceptibles d’être qualifiés de services d’intérêt économique général. Dès lors, la tâche de la Commission consiste à veiller à ce qu’il n’y ait pas d’erreur manifeste dans la définition des services d’intérêt économique général.

(9)

Sous réserve du respect d’un certain nombre de conditions, les compensations de montant limité octroyées à des entreprises chargées d’assurer des services d’intérêt économique général ne portent pas atteinte au développement des échanges et à la concurrence dans une mesure qui serait contraire à l’intérêt de l’Union. Il n’y aurait donc pas lieu d’exiger la notification individuelle de l’aide en cas de compensation inférieure à un montant annuel déterminé, dès lors que les conditions prévues dans la présente décision sont remplies.

(10)

Compte tenu du développement au sein de l’Union du marché des services d’intérêt économique général, comme l’atteste, par exemple, la forte augmentation du nombre de fournisseurs multinationaux dans un certain nombre de secteurs présentant une importance considérable pour le développement du marché intérieur, il est judicieux de fixer un plafond de compensation pouvant être exemptée de l’obligation de notification conformément à la présente décision, inférieur à celui fixé par la décision 2005/842/CE, tout en permettant que ce montant soit comptabilisé comme moyenne annuelle sur la période du mandat.

(11)

Les hôpitaux et les entreprises assurant des services sociaux, qui sont chargés de tâches d’intérêt économique général, présentent des spécificités qui doivent être prises en considération. En particulier, il convient de tenir compte du fait que dans la situation économique présente et au stade actuel de développement du marché intérieur, les services sociaux peuvent exiger un montant d’aide supérieur au seuil fixé dans la présente décision pour compenser les coûts de service public. Un montant de compensation plus élevé ne résulte donc pas nécessairement en un risque accru de distorsion de concurrence. En conséquence, les entreprises assurant des services sociaux, y compris la fourniture de logement social aux personnes défavorisées ou aux groupes sociaux moins avantagés qui, pour des raisons de solvabilité, ne sont pas en mesure de trouver un logement aux conditions du marché, doivent aussi bénéficier de l’exemption de notification prévue dans la présente décision, même si le montant de la compensation qu’elles reçoivent dépasse le seuil de notification général fixé dans la présente décision. Il doit en aller de même pour les hôpitaux fournissant des soins médicaux, y compris, le cas échéant, des services d’urgence et des services connexes directement liés à leurs activités principales, en particulier dans le domaine de la recherche. Pour bénéficier de l’exemption de notification, les services sociaux devront être des services bien définis répondant à des besoins sociaux concernant les soins de santé et de longue durée, la garde d’enfants, l’accès et la réinsertion sur le marché du travail, le logement social et les soins et l’inclusion sociale des groupes vulnérables.

(12)

La mesure dans laquelle une compensation particulière affecte les échanges et la concurrence ne dépend pas uniquement du montant moyen reçu par an et du secteur concerné, mais également de la durée globale du mandat confié. En conséquence, exception faite des cas où la réalisation d’investissements importants justifie une durée plus longue, par exemple dans le domaine du logement social, il convient de limiter l’application de la présente décision à une durée de mandat n’excédant pas dix ans.

(13)

Pour que l’article 106, paragraphe 2, du traité s’applique, l’entreprise en question doit avoir été spécifiquement chargée par l’État membre de la gestion d’un service d’intérêt économique général particulier.

(14)

En vue d’assurer le respect des critères énoncés à l’article 106, paragraphe 2, du traité, il convient de définir plus précisément les conditions à remplir en ce qui concerne la gestion des services d’intérêt économique général confiés. Le montant des compensations ne peut être calculé et contrôlé adéquatement que si les obligations de service public incombant aux entreprises et les éventuelles obligations à la charge de l’État sont clairement indiquées dans un ou plusieurs actes délivrés par les autorités publiques compétentes de l’État membre concerné. La forme de l’acte peut varier d’un État membre à l’autre, mais il doit préciser à tout le moins l’identité des entreprises concernées, la nature exacte, la durée et, s’il y a lieu, la portée géographique des obligations de service public imposées, tout droit exclusif ou spécial qui serait octroyé, et décrire le mécanisme de compensation ainsi que les paramètres de calcul de la compensation et ceux utilisés pour prévenir ou récupérer toute surcompensation éventuelle. Dans un souci de transparence quant à l’application de la présente décision, l’acte officiel devrait comporter une référence à cette dernière.

(15)

Afin d’éviter des distorsions de concurrence non justifiées, la compensation ne doit pas dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts nets supportés par l’entreprise assurant le service, y compris un bénéfice raisonnable.

(16)

Une compensation excédant ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts nets supportés par l’entreprise assurant le service n’est pas nécessaire à la gestion du service d’intérêt économique général et, partant, constitue une aide d’État incompatible avec le marché intérieur qui devra être remboursée à l’État. Une compensation accordée pour la gestion d’un service d’intérêt économique général, mais utilisée en réalité par l’entreprise concernée pour intervenir sur un autre marché à des fins autres que celles énoncées dans le mandat, n’est pas nécessaire à la gestion du service d’intérêt économique général et peut donc constituer également une aide d’État incompatible avec le marché intérieur qui devra être remboursée.

(17)

Le coût net à prendre en considération doit être calculé sur la base de la différence entre le coût occasionné par la gestion du service d’intérêt économique général et les recettes tirées du service d’intérêt économique général ou, alternativement, sur la base de la différence entre le coût net pour l’entreprise assurant l’obligation de service public et le coût net ou bénéfice de la même entreprise n’assurant pas l’obligation de service public. Notamment, si l’obligation de service public conduit à une diminution des recettes, en raison, par exemple, de tarifs réglementés, mais n’a pas d’incidence sur les coûts, le coût net occasionné par l’exécution de l’obligation de service public doit pouvoir être déterminé sur la base du manque à gagner. Afin d’éviter des distorsions de concurrence non justifiées, toutes les recettes tirées de la gestion du service d’intérêt économique général (c’est-à-dire tout revenu dont le prestataire n’aurait pas bénéficié si le mandat ne lui avait pas été confié) doivent être prises en compte aux fins du calcul du montant de la compensation. Si l’entreprise en question est titulaire d’un droit exclusif ou spécial lié à des activités, qui ne relèvent pas du service d’intérêt économique général pour lequel l’aide est octroyée, et qui génèrent un bénéfice excédant le bénéfice raisonnable, ou que cette entreprise bénéficie d’autres avantages octroyés par l’État, ceux-ci doivent être inclus dans ses recettes, quelle que soit la catégorie dont ils relèvent aux fins de l’article 107 du traité.

(18)

Le bénéfice raisonnable doit être déterminé comme le taux de rendement du capital, compte tenu du risque encouru ou de son absence. Le taux de rendement du capital devra être défini comme le taux de rendement interne que l’entreprise obtient sur son capital investi pendant la durée du mandat.

(19)

Un bénéfice n’excédant pas le taux de swap applicable majoré de 100 points de base ne doit pas être jugé déraisonnable. Dans ce contexte, le taux de swap applicable est considéré comme un rendement adéquat dans le cas d’un investissement dénué de risque. La prime de 100 points de base sert, entre autres, à compenser le risque de liquidité lié à l’apport de capitaux engagés pour la gestion du service pendant la durée du mandat.

(20)

Lorsque l’entreprise chargée d’un service d’intérêt économique général ne supporte pas un niveau substantiel de risque commercial, par exemple parce que les coûts occasionnés par la prestation du service concerné sont intégralement compensés, un bénéfice dépassant le taux de swap applicable majoré de 100 points de base ne doit pas être considéré comme raisonnable.

(21)

Lorsque, en raison de circonstances particulières, il n’est pas approprié de recourir au taux de rendement du capital, les États membres, pour déterminer le niveau du bénéfice raisonnable, devront pouvoir se fonder sur d’autres indicateurs de bénéfice, tels que le rendement des capitaux propres moyen, le rendement du capital employé, le rendement de l’actif ou la marge d’exploitation.

(22)

Pour déterminer ce qui constitue un bénéfice raisonnable, les États membres devront pouvoir introduire des critères incitatifs, liés notamment à la qualité du service fourni et aux gains d’efficience productive. Ces gains d’efficience ne devront pas réduire la qualité du service fourni. À titre d’exemple, les États membres devront pouvoir définir des objectifs en matière d’efficience productive dans le mandat, de telle sorte que le niveau de compensation soit fonction de la mesure dans laquelle ces objectifs ont été atteints. Le mandat peut prévoir que si l’entreprise ne réalise pas les objectifs fixés, la compensation devra être réduite selon une méthode de calcul qu’il précise, tandis que si elle les dépasse, la compensation est accrue selon une méthode de calcul qu’il précise également. Tout avantage lié aux gains d’efficience productive doit être fixé à un niveau qui permette une répartition équilibrée des gains réalisés entre l’entreprise et l’État membre et/ou les utilisateurs.

(23)

L’article 93 du traité constitue une lex specialis par rapport à l’article 106, paragraphe 2, du traité. Il établit les règles applicables aux compensations de service public dans le secteur du transport terrestre. L’article 93 est interprété par le règlement (CE) no 1370/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, et abrogeant les règlements (CEE) no 1191/69 et (CEE) no 1107/70 du Conseil (5), qui fixe les règles applicables aux compensations des servitudes inhérentes à la notion de service public dans le secteur du transport public de voyageurs. Son application au transport de passagers par voie fluviale est à la discrétion des États membres. Le règlement (CE) no 1370/2007 exempte de la notification prévue à l’article 108, paragraphe 3, du traité toutes les compensations accordées dans le secteur du transport terrestre qui remplissent les conditions fixées par ce règlement. Conformément à la jurisprudence Altmark, les compensations accordées dans le secteur du transport terrestre qui ne respectent pas les dispositions de l’article 93 du traité ne peuvent pas être déclarées compatibles avec le traité sur la base de l’article 106, paragraphe 2, du traité ou de toute autre disposition de ce dernier. Par conséquent, la présente décision ne s’applique pas au secteur du transport terrestre.

(24)

Contrairement au transport terrestre, les secteurs du transport aérien et du transport maritime sont soumis à l’article 106, paragraphe 2, du traité. Certaines règles applicables aux compensations de service public dans les secteurs des transports aérien et maritime figurent dans le règlement (CE) no 1008/2008 du Parlement européen et du Conseil du 24 septembre 2008 établissant des règles communes pour l’exploitation de services aériens dans la Communauté (6) et dans le règlement (CEE) no 3577/92 du Conseil du 7 décembre 1992 concernant l’application du principe de la libre circulation des services aux transports maritimes à l’intérieur des États membres (cabotage maritime) (7). Toutefois, contrairement au règlement (CE) no 1370/2007, ces règlements ne concernent pas la compatibilité avec le marché intérieur des éléments susceptibles de constituer des aides d’État et ne prévoient pas d’exemption de l’obligation de notification établie par l’article 108, paragraphe 3, du traité. La présente décision doit donc s’appliquer aux compensations de service public dans les secteurs des transports aérien et maritime, pour autant qu’en plus de remplir les conditions définies par la présente décision, ces compensations respectent également les règles sectorielles contenues dans le règlement (CE) no 1008/2008 et dans le règlement (CEE) no 3577/92, s’il y a lieu.

(25)

Dans les cas spécifiques de compensations de service public accordées pour des liaisons aériennes ou maritimes avec les îles ou à des aéroports ou à des ports qui constituent des services d’intérêt économique général au sens de l’article 106, paragraphe 2, du traité, il convient de fixer des seuils sur la base du nombre moyen de passagers par an, ce qui est davantage conforme à la réalité économique de ces activités et à leur nature de services d’intérêt économique général.

(26)

L’exemption de l’obligation de notification préalable pour certains services d’intérêt économique général n’exclut pas la possibilité pour les États membres de notifier un projet d’aide spécifique. Dans un tel cas, ou si la Commission apprécie la compatibilité d’une aide spécifique à la suite d’une plainte ou d’office, la Commission appréciera si les conditions de la présente décision sont remplies. Si tel n’est pas le cas, la mesure sera évaluée conformément aux principes de la communication de la Commission relative à l’encadrement des aides d’État sous forme de compensations de service public.

(27)

La présente décision doit s’appliquer sans préjudice des dispositions de la directive 2006/111/CE de la Commission du 16 novembre 2006 relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques ainsi qu’à la transparence financière dans certaines entreprises (8).

(28)

La présente décision doit s’appliquer sans préjudice des dispositions de l’Union en matière de concurrence, notamment des articles 101 et 102 du traité.

(29)

La présente décision doit s’appliquer sans préjudice des dispositions de l’Union en matière de marchés publics.

(30)

La présente décision doit s’appliquer sans préjudice des dispositions plus strictes relatives aux obligations de service public contenues dans les législations sectorielles de l’Union.

(31)

Il convient de prévoir des dispositions transitoires pour les aides individuelles octroyées avant l’entrée en vigueur de la présente décision. Les régimes d’aide octroyés conformément à la décision 2005/842/CE avant l’entrée en vigueur de la présente décision doivent rester compatibles avec le marché intérieur et être exemptés de l’obligation de notification pendant une période supplémentaire de deux ans. Les aides octroyées avant l’entrée en vigueur de la présente décision qui n’ont pas été accordées conformément à la décision 2005/842/CE mais qui remplissent les conditions énoncées dans la présente décision doivent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur et exemptées de l’obligation de notification.

(32)

La Commission se propose de procéder à la révision de la présente décision cinq ans après son entrée en vigueur,

A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Objet

La présente décision énonce les conditions en vertu desquelles les aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général sont compatibles avec le marché intérieur et exemptées de l’obligation de notification prévue à l’article 108, paragraphe 3, du traité.

Article 2

Champ d’application

1.   La présente décision s’applique aux aides d’État sous forme de compensations de service public accordées à des entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général au sens de l’article 106, paragraphe 2, du traité, et qui relèvent d’une des catégories suivantes:

a)

compensations ne dépassant pas un montant annuel de 15 millions d’EUR pour la prestation de services d’intérêt économique général dans des domaines autres que le transport et les infrastructures de transport.

Lorsque le montant de la compensation varie pendant la durée du mandat, le montant annuel est calculé en tant que moyenne des montants annuels de compensation qu’il est prévu de réaliser au cours du mandat;

b)

compensations octroyées à des hôpitaux fournissant des soins médicaux, notamment, s’il y a lieu, des services d’urgence; l’exercice d’activités connexes directement liées aux activités principales, notamment dans le domaine de la recherche, ne fait cependant pas obstacle à l’application du présent paragraphe;

c)

compensations octroyées pour des services répondant à des besoins sociaux concernant les soins de santé et de longue durée, la garde d’enfants, l’accès et la réinsertion sur le marché du travail, le logement social et les soins et l’inclusion sociale des groupes vulnérables;

d)

compensations octroyées pour des liaisons aériennes ou maritimes avec les îles, dont le trafic annuel moyen au cours des deux exercices précédant celui de l’octroi du service d’intérêt économique général n’a pas dépassé 300 000 passagers;

e)

compensations octroyées aux aéroports et aux ports dont le trafic annuel moyen au cours des deux exercices précédant celui de l’octroi du service d’intérêt économique général n’a pas dépassé 200 000 passagers pour les aéroports et 300 000 passagers pour les ports.

2.   La présente décision ne s’applique que si la période pendant laquelle l’entreprise est chargée de la gestion du service d’intérêt économique général ne dépasse pas dix ans. Si la durée du mandat est supérieure à dix ans, la présente décision ne s’applique que dans la mesure où le prestataire de service doit consentir un investissement important qui doit être amorti sur une plus longue période, conformément aux principes comptables généralement admis.

3.   Si, pendant la durée du mandat, les conditions d’application de la présente décision cessent d’être remplies, l’aide est notifiée conformément à l’article 108, paragraphe 3, du traité.

4.   Dans le domaine des transports aérien et maritime, la présente décision s’applique uniquement aux aides d’État sous forme de compensations de service public accordées à des entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général au sens de l’article 106, paragraphe 2, du traité qui satisfont, respectivement, au règlement (CE) no 1008/2008 et au règlement (CEE) no 3577/92, s’il y a lieu.

5.   La présente décision ne s’applique pas aux aides d’État sous forme de compensations de service public accordées à des entreprises dans le domaine du transport terrestre.

Article 3

Compatibilité et exemption de notification

Les aides d’État sous forme de compensations de service public qui remplissent les conditions énoncées dans la présente décision sont compatibles avec le marché intérieur et exemptées de l’obligation de notification préalable prévue à l’article 108, paragraphe 3, du traité, pour autant qu’elles soient conformes aux exigences découlant du traité ou des législations sectorielles de l’Union.

Article 4

Mandat

La gestion du service d’intérêt économique général est confiée à l’entreprise concernée au moyen d’un ou de plusieurs actes, dont la forme peut être déterminée par chaque État membre. Ce ou ces actes mentionnent notamment:

a)

la nature et la durée des obligations de service public;

b)

l’entreprise et, s’il y a lieu, le territoire concerné;

c)

la nature de tout droit exclusif ou spécial octroyé à l’entreprise par l’autorité octroyant l’aide;

d)

la description du mécanisme de compensation et les paramètres de calcul, de contrôle et de révision de la compensation;

e)

les modalités de récupération des éventuelles surcompensations et les moyens d’éviter ces dernières, et

f)

une référence à la présente décision.

Article 5

Compensation

1.   Le montant de la compensation n’excède pas ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts nets occasionnés par l’exécution des obligations de service public, y compris un bénéfice raisonnable.

2.   Le coût net peut être calculé sur la base de la différence entre les coûts tels que définis au paragraphe 3, et les recettes, telles que définies au paragraphe 4. Il peut également être calculé sur la base de la différence entre le coût net pour l’entreprise assurant l’obligation de service public et le coût net ou bénéfice de la même entreprise n’assurant pas l’obligation de service public.

3.   Les coûts à prendre en considération englobent tous les coûts occasionnés par la gestion du service d’intérêt économique général. Ils sont calculés comme suit, sur la base de principes de comptabilité analytique généralement acceptés:

a)

lorsque les activités de l’entreprise concernée se limitent au service d’intérêt économique général, tous ses coûts peuvent être pris en considération;

b)

lorsque l’entreprise exerce également des activités ne relevant pas du service d’intérêt économique général, seuls les coûts liés au service d’intérêt économique général sont pris en considération;

c)

les coûts alloués au service d’intérêt économique général peuvent englober tous les coûts directs occasionnés par l’accomplissement dudit service et une contribution adéquate aux coûts communs au service en cause et à d’autres activités;

d)

les coûts liés aux investissements, notamment dans les infrastructures, peuvent être pris en considération lorsque ces investissements sont nécessaires au fonctionnement du service d’intérêt économique général.

4.   Les recettes à prendre en considération incluent à tout le moins la totalité des recettes tirées du service d’intérêt économique général, que celles-ci soient ou non considérées comme des aides d’État au sens de l’article 107 du traité. Si l’entreprise en question est titulaire d’un droit exclusif ou spécial lié à des activités, qui ne relèvent pas du service d’intérêt économique général pour lequel l’aide est octroyée, et qui génèrent un bénéfice excédant le bénéfice raisonnable, ou que cette entreprise bénéficie d’autres avantages octroyés par l’État, ceux-ci doivent être inclus dans ses recettes, quelle que soit la catégorie dont ils relèvent aux fins de l’article 107 du traité. L’État membre concerné peut décider que les bénéfices tirés d’autres activités ne relevant pas du service d’intérêt économique général en question doivent être affectés en tout ou en partie au financement du service d’intérêt économique général.

5.   Aux fins de la présente décision, on entend par «bénéfice raisonnable» le taux de rendement du capital qu’exigerait une entreprise moyenne s’interrogeant sur l’opportunité de fournir le service d’intérêt économique général pendant toute la durée du mandat, en tenant compte du niveau de risque. Le taux de rendement du capital est défini comme le taux de rendement interne que l’entreprise obtient sur son capital investi pendant la durée du mandat. Le niveau de risque dépend du secteur concerné, du type de service et des caractéristiques de la compensation.

6.   Pour déterminer ce qui constitue un bénéfice raisonnable, les États membres peuvent introduire des critères incitatifs, liés notamment à la qualité du service fourni et aux gains d’efficience productive. Ces gains d’efficience ne réduisent pas la qualité du service fourni. Tout avantage lié aux gains d’efficience productive est fixé à un niveau qui permette une répartition équilibrée des gains réalisés entre l’entreprise et l’État membre et/ou les utilisateurs.

7.   Aux fins de la présente décision, un taux de rendement du capital qui ne dépasse pas le taux de swap applicable majoré d’une prime de 100 points de base est considéré comme raisonnable en tout état de cause. Le taux de swap applicable est celui dont la maturité et la monnaie correspondent à la durée et à la monnaie du mandat. Lorsque l’accomplissement du service d’intérêt économique général n’est pas lié à un risque commercial ou contractuel important, en particulier lorsque le coût net occasionné par la prestation du service d’intérêt économique général est, pour l’essentiel, intégralement compensé a posteriori, le bénéfice raisonnable ne saurait dépasser le taux de swap applicable majoré d’une prime de 100 points de base.

8.   Lorsque, en raison de circonstances particulières, il n’est pas approprié de recourir au taux de rendement du capital, les États membres peuvent, pour déterminer le niveau du bénéfice raisonnable, se fonder sur d’autres indicateurs de bénéfice, tels que le rendement des capitaux propres moyen, le rendement du capital employé, le rendement de l’actif ou la marge d’exploitation. On entend par «rendement» les bénéfices avant intérêts et impôts pour cet exercice. Le rendement moyen est calculé en appliquant le taux d’actualisation pendant toute la durée du contrat tel que défini dans la communication de la Commission relative à la révision de la méthode de calcul des taux de référence et d’actualisation (9). Quel que soit l’indicateur retenu, l’État membre est en mesure de fournir à la Commission, sur demande de celle-ci, des éléments prouvant que le bénéfice n’excède pas ce qu’exigerait une entreprise moyenne s’interrogeant sur l’opportunité de fournir le service; il peut, par exemple, communiquer à titre de référence des rendements obtenus pour des contrats similaires exécutés dans des conditions de concurrence.

9.   Lorsqu’une entreprise exerce des activités qui se situent à la fois dans le cadre du service d’intérêt économique général et en dehors de celui-ci, sa comptabilité interne indique séparément les coûts et les recettes liés à ce service et ceux liés aux autres services, ainsi que les paramètres de répartition des coûts et des recettes. Les coûts liés à d’éventuelles activités ne relevant pas du service d’intérêt économique général englobent tous les coûts directs, une contribution adéquate aux coûts communs ainsi qu’un rendement des capitaux propres approprié. Aucune compensation n’est octroyée pour ces coûts.

10.   Les États membres exigent de l’entreprise concernée qu’elle rembourse toute surcompensation éventuelle.

Article 6

Contrôle de la surcompensation

1.   Les États membres veillent à ce que la compensation octroyée pour la prestation du service d’intérêt économique général remplisse les conditions énoncées dans la présente décision et, notamment, que l’entreprise ne bénéficie pas d’une compensation excédant le montant déterminé conformément à l’article 5. Ils fournissent des éléments de preuve à la Commission, sur demande de celle-ci. Ils procèdent, ou font procéder, à des contrôles réguliers, au minimum tous les trois ans pendant la durée du mandat et au terme de celui-ci.

2.   Si une entreprise a bénéficié d’une compensation excédant le montant déterminé conformément à l’article 5, l’État membre exige de l’entreprise concernée qu’elle rembourse toute surcompensation éventuelle. Les paramètres de calcul de la compensation sont mis à jour pour l’avenir. Lorsque le montant de la surcompensation ne dépasse pas 10 % du montant de la compensation annuelle moyenne, la surcompensation peut être reportée sur la période suivante et déduite du montant de la compensation due pour cette période.

Article 7

Transparence

Pour les compensations supérieures à 15 millions d’EUR accordées à une entreprise ayant aussi des activités qui se situent en dehors du cadre du service d’intérêt économique général, l’État membre concerné publie les informations suivantes sur l’internet ou par d’autres moyens appropriés:

a)

le mandat ou une synthèse incluant les éléments indiqués à l’article 4;

b)

les montants annuels correspondant à l’aide octroyée à l’entreprise.

Article 8

Disponibilité des informations

Les États membres tiennent à la disposition de la Commission, pendant la durée du mandat et pendant dix ans au moins à compter de la fin du mandat, toutes les informations nécessaires pour établir si les compensations octroyées sont compatibles avec la présente décision.

Sur demande écrite de la Commission, les États membres communiquent à celle-ci toutes les informations qu’elle juge nécessaires pour déterminer si les mesures de compensation en vigueur sont compatibles avec la présente décision.

Article 9

Rapports

Tous les deux ans, chaque État membre remet à la Commission un rapport sur la mise en œuvre de la présente décision. Ces rapports comprennent une description détaillée de l’application de la présente décision en ce qui concerne les différentes catégories de services visées à l’article 2, paragraphe 1, exposant notamment:

a)

une description de l’application de la présente décision aux services relevant de son champ d’application, y compris les activités internes;

b)

le montant total des aides octroyées conformément à la présente décision avec une ventilation selon le secteur économique des bénéficiaires;

c)

si, pour un type donné de service, l’application de la présente décision a entraîné des difficultés ou des plaintes de la part de tiers;

et

d)

fournissent, sur demande de la Commission formulée en temps utile avant la présentation du rapport, toute autre information concernant l’application de la présente décision.

Le premier rapport est présenté le 30 juin 2014 au plus tard.

Article 10

Dispositions transitoires

La présente décision s’applique aux aides individuelles et aux régimes d’aide comme suit:

a)

tout régime d’aide octroyé avant l’entrée en vigueur de la présente décision, qui était compatible avec le marché intérieur et exempté de l’obligation de notification conformément à la décision 2005/842/CE, reste compatible avec le marché intérieur et est exempté de l’obligation de notification pendant une période supplémentaire de deux ans;

b)

toute aide octroyée avant l’entrée en vigueur de la présente décision, qui n’était pas compatible avec le marché intérieur ni exemptée de l’obligation de notification conformément à la décision 2005/842/CE mais remplit les conditions énoncées dans la présente décision, est compatible avec le marché intérieur et exemptée de l’obligation de notification préalable.

Article 11

Abrogation

La décision 2005/842/CE est abrogée.

Article 12

Entrée en vigueur

La présente décision entre en vigueur le 31 janvier 2012.

Article 13

Destinataires

Les États membres sont destinataires de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 20 décembre 2011.

Par la Commission

Joaquín ALMUNIA

Vice-président


(1)  Arrêt du 24 juillet 2003 dans l’affaire C-280/00, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg/Nahverkehrsgesellschaft Altmark (Recueil 2003, p. I-7747).

(2)  JO C 8 du 11.1.2012, p. 4.

(3)  JO C 8 du 11.1.2012, p. 15.

(4)  JO L 312 du 29.11.2005, p. 67.

(5)  JO L 315 du 3.12.2007, p. 1.

(6)  JO L 293 du 31.10.2008, p. 3.

(7)  JO L 364 du 12.12.1992, p. 7.

(8)  JO L 318 du 17.11.2006, p. 17.

(9)  JO C 14 du 19.1.2008, p. 6.