RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL sur les progrès accomplis par la Turquie dans la mise en oeuvre des exigences de la feuille de route sur la libéralisation du régime des visas /* COM/2014/0646 final */
1. INTRODUCTION Le 21 juin 2012, alors que les autorités
turques paraphaient le texte de l’accord de réadmission UE-Turquie qu'elles
avaient négocié avec la Commission européenne depuis 2005, le Conseil de
l’Union européenne adoptait des conclusions dans lesquelles il invitait la
Commission européenne «à prendre, parallèlement à la signature de l'accord de
réadmission entre la Turquie et l'UE, des mesures en vue d'une libéralisation
progressive et à long terme du régime des visas». Dans sa résolution du 18 avril
2013 sur le rapport 2012 concernant les progrès accomplis par la Turquie,
le Parlement européen préconisait lui aussi que la Commission suive cette
approche. L’accord de réadmission UE-Turquie a été signé le 16 décembre
2013. Parallèlement, l’UE et la Turquie entamaient un dialogue sur la
libéralisation du régime des visas, dans le but de mettre progressivement fin à
l’obligation de visa pour les citoyens turcs se rendant dans l’espace Schengen
pour une visite de courte durée. Le dialogue est en cours et la
Commission européenne examine actuellement les dispositions législatives et les
pratiques administratives turques concernées. Ces travaux sont menés sur la
base de la «Feuille de route pour l’instauration
d’un régime d’exemption de visa avec la Turquie»,
document élaboré par les services de la Commission en étroite concertation avec
des experts compétents d'États membres de l’UE. Il expose les critères sur
lesquels la Commission s’appuiera pour décider si et quand il sera approprié de
proposer au Conseil et au Parlement européen de lever l’obligation de visa
actuellement imposée aux citoyens turcs, en modifiant le règlement (CE)
n° 539/2001. Les exigences fixées dans les critères énoncés dans
la feuille de route sont réparties en cinq volets: sécurité des documents,
gestion des migrations, ordre public et sécurité, droits fondamentaux et
réadmission des migrants en situation irrégulière. La Commission fera régulièrement rapport au Conseil
et au Parlement sur les progrès accomplis par la Turquie afin de satisfaire aux
exigences fixées dans la feuille de route. Les rapports ainsi rédigés serviront
également de référence aux autorités turques pour les domaines spécifiques dans
lesquels il y a lieu d'intervenir. Pour préparer le présent premier rapport, la
Commission a effectué plusieurs missions en Turquie entre le 16 mars et le
20 juin 2014 afin de collecter des informations sur la législation et les
procédures dans les domaines couverts par la feuille de route. La Commission
était assistée par la délégation de l’UE en Turquie et par des experts d'États
membres de l’UE et des agences de l’UE concernées (Frontex, Europol, EASO). Le présent rapport contient une analyse de la
situation et des progrès accomplis au regard de chaque critère et présente
l’évaluation de la Commission permettant de déterminer si la Turquie satisfait
aux exigences fixées dans la feuille de route. Chaque critère fait l'objet d'une évaluation qui
correspond à l'une des appréciations suivantes:
«exigence satisfaite»;
«exigence presque satisfaite»
(il ne reste que certains travaux limités à réaliser pour que l’exigence
soit pleinement satisfaite);
«exigence partiellement
satisfaite, mais avec de bonnes perspectives d'évolution» (il reste
encore beaucoup de travail à faire, mais les résultats obtenus et le
travail effectué par les autorités turques sont importants, et les
avancées à ce jour sont encourageantes);
«exigence que partiellement
satisfaite» (il reste encore beaucoup de travail à faire pour
satisfaire aux exigences fixées dans le critère, aucune avancée positive
particulière pour y remédier n'a été observée);
«exigence non satisfaite»
(la Turquie est loin de remplir ce critère).
Dans tous les domaines pour lesquels la Commission
estime que les exigences fixées pour un critère ne sont pas encore pleinement
satisfaites, le rapport fournit quelques suggestions de mesures qui, de l’avis
de la Commission, pourraient contribuer à palier les faiblesses recensées. Enfin, il convient de rappeler que le présent
rapport se concentre sur les résultats obtenus par la Turquie dans le respect
des critères énoncés dans la «Feuille de route pour l’instauration d’un régime
d’exemption de visa», qui ont été fixés dans le but de déterminer les
conditions permettant de progresser de manière sûre vers la libéralisation du
régime des visas. Le présent rapport n'a donc pas pour objectif d'évaluer les
progrès globaux réalisés par la Turquie dans sa préparation à l’adhésion à
l’UE: cet aspect continue de faire l’objet du «Rapport sur les progrès
accomplis par la Turquie», qui est présenté chaque année par la Commission, et
dont la dernière version a été publiée le 8 octobre 2014[1]. 2. VOLET 1: SÉCURITÉ DES DOCUMENTS 2.1. Évaluation générale La Turquie a suivi l'évolution des techniques et des
actions mises en œuvre au sein de la communauté internationale dans le domaine
des documents de voyage et d’identité, et envisage de prendre des mesures
supplémentaires. La Turquie ne satisfait pas encore pleinement à toutes les
exigences fixées dans le volet 1 de la feuille de route, mais elle a déjà
bien progressé pour la plupart d'entre elles et dispose de la capacité technique
nécessaire pour atteindre cet objectif, pour autant que les réformes et les
modalités techniques pertinentes soient mises en place en temps utile. 2.2. Observations détaillées sur les
critères énoncés dans le volet «Sécurité des documents» Ø La Turquie
devrait continuer de délivrer des documents de voyage biométriques lisibles à
la machine, conformément aux normes de l'OACI, et de suivre la pratique
recommandée de l'OACI, en éliminant progressivement tout passeport ne répondant
pas aux normes de l'OACI et en introduisant progressivement des passeports
internationaux comprenant des données biométriques, y compris une photographie
et les empreintes digitales, conformément aux normes de l'UE, et en particulier
le règlement (CE) n° 2252/2004 du Conseil; En
2010, conformément aux normes fixées par l'Organisation de l'aviation civile
internationale (OACI), les autorités turques ont cessé de délivrer des
passeports ne répondant pas aux normes de l'OACI (c’est-à-dire des passeports
n'incluant pas de données biométriques) et ont commencé à ne délivrer que des
passeports conformes aux exigences de l’OACI (c’est-à-dire des passeports
incluant des éléments de sécurité très efficaces et certaines données
biométriques; dans le cas de la Turquie, il s'agit d'une photographie numérique
du visage du titulaire). Quelques passeports ne répondant pas aux normes de
l'OACI sont toujours en circulation mais ils expireront tous le 25 novembre
2015 au plus tard. Les
autorités turques n’ont pas encore commencé à introduire des passeports
conformes aux normes de l'UE fixées par le règlement (CE) n° 2252/2004
du Conseil (c’est-à-dire des passeports incluant des éléments de sécurité très
efficaces et plusieurs éléments biométriques, y compris les empreintes
digitales et une photographie numérique). La Commission recommande que les
autorités turques commencent à délivrer systématiquement des nouveaux
passeports incluant les empreintes digitales du titulaire du passeport. Sur
le plan technologique, les autorités turques seraient en mesure de le faire
puisqu'elles collectent et stockent déjà systématiquement les empreintes
digitales de tous les citoyens introduisant une demande de passeport (bien que
ces données ne soient, à ce jour, pas sauvegardées sur la puce du passeport).
La Commission estime donc que l'exigence fixée pour ce critère est partiellement
satisfaite, mais avec de bonnes perspectives d'évolution. Ø mettre en œuvre
des mesures administratives adéquates pour garantir l'intégrité et la sécurité
du processus de personnalisation et de distribution ainsi que de validation des
passeports internationaux et autres documents sources; Le
système en vigueur en Turquie est conforme aux normes de l'OACI et semble être
fiable, efficace et robuste. Toutefois,
la Commission estime que cette exigence n’est que presque satisfaite. En
effet, certaines faiblesses ont été relevées par les experts au cours de leurs
missions, qui, bien que mineures, requièrent une attention particulière pour
éviter des problèmes ultérieurs. Les
services de police devraient notamment améliorer la façon dont ils détruisent
les passeports périmés, de manière à réduire davantage la quantité de parties
physiques du document pouvant être frauduleusement réutilisées pour la création
de faux passeports. La Commission recommande également de renforcer la sécurité
de l’installation de stockage des passeports vierges située à Ankara. Ø
mettre
en place des programmes de formation et adopter des codes de déontologie
relatifs à la lutte contre la corruption, destinés aux fonctionnaires et agents
de toute autorité publique chargée des visas, des documents sources ou des
passeports; La
Turquie a mis en place des procédures, des formations et des systèmes de
contrôle adaptés. La Commission estime donc que l'exigence fixée pour ce critère
est satisfaite. Ø veiller à ce que
les vols et pertes de passeports soient rapidement et systématiquement signalés
dans la base de données d'Interpol (LASP); Le
système mis en place pour satisfaire à cette exigence semble adéquat. La
Commission estime donc que l'exigence fixée pour ce critère est satisfaite. Ø conférer un
niveau de sécurité élevé aux documents sources et aux cartes d'identité et
définir des procédures rigoureuses de demande et de délivrance de ces
documents; Sur
le plan physique, les cartes d’identité actuellement en circulation ne sont pas
très sécurisées et sont relativement faciles à falsifier. La probabilité que de
fausses cartes d’identité soient utilisées dans le cadre de procédures
administratives, y compris la délivrance d’un passeport, est cependant
négligeable, en raison notamment de l’existence en Turquie d’un système solide
et fiable de registre d'état civil, dans lequel tous les citoyens sont inscrits
et se voient attribuer un numéro d’identification. Ce système, géré de façon effective
par le service population du ministère de l’intérieur, et sa base de données
électronique (MERNIS), que toutes les autorités turques concernées peuvent
consulter, fournissent une base fiable pour l’identification des citoyens
turcs. L'une
des faiblesses du système actuel est que les cartes d’identité sont délivrées
pour une période de validité indéterminée, de sorte que la photographie du
titulaire est susceptible de devenir obsolète au fil du temps. En l’absence
d’une photographie fiable, il pourrait, dans certains cas, s'avérer très
difficile de déterminer avec certitude si une personne qui présente une carte
d’identité en est effectivement le détenteur légitime. Par
conséquent, la Commission estime que l'exigence fixée pour ce critère est presque
satisfaite. Afin
que cette exigence soit pleinement remplie, la Commission recommande aux
autorités turques d'instaurer des dispositions garantissant la fin de validité
de toute carte d’identité contenant une photographie devenue obsolète. Une
autre manière d’atteindre un résultat équivalent pourrait être d’introduire une
durée de validité limitée pour les cartes d’identité existantes, ou de
remplacer celles-ci par une nouvelle carte contenant des données biométriques
qui ne risquent pas de devenir obsolètes. Ø procéder à des
échanges réguliers de spécimens de passeports et de formulaires de visa ainsi
que d'informations sur les faux documents et coopérer avec l'UE en matière de
sécurité des documents; Plusieurs États membres indiquent déjà régulièrement
qu'ils reçoivent des spécimens de passeports envoyés par les autorités turques.
Cependant, aucun État membre n’a signalé avoir reçu des informations sur les
documents de voyage falsifiés qui auraient été détectés par les autorités
turques. Dès lors, la Commission estime que cette exigence n’est que
partiellement satisfaite. La Commission recommande que les autorités turques
transmettent, à intervalles réguliers et en temps utile, à tous les États
membres de l’UE, des informations sur les spécimens de passeports et les
formulaires de visa délivrés par la Turquie. Elle recommande également qu’elles partagent, en
temps utile et avec tous les États membres, des informations sur les faux
documents de voyage et visas détectés par les services répressifs turcs et les
agents de voyage exerçant leurs activités en Turquie. À cet égard, une
attention particulière devrait être accordée aux signalements à l’aéroport
Atatürk d’Istanbul, qui est aujourd’hui l'un des principaux points de départ et
de transit des passagers voyageant vers l'UE. Les autorités turques sont également encouragées à
développer une assistance mutuelle et une coopération opérationnelle avec les
États membres de l’UE, et notamment avec les officiers de police de liaison
détachés par les États membres de l’UE en Turquie, afin d'améliorer la capacité
des services répressifs à détecter les faux documents de voyage et visas, tant
en Turquie que dans les États membres de l'UE. Ø adopter et
mettre en œuvre des mesures assurant l'intégrité et la sécurité de l'état civil
et du processus d'inscription à l'état civil, y compris l'intégration et
l'interconnexion des bases de données pertinentes et la vérification des
données scannées au regard de la base de données d'état civil, en accordant une
attention particulière à la modification des informations personnelles de base
d'une personne. Le
système mis en place pour satisfaire à cette exigence est adéquat. La
Commission estime donc que cette exigence est satisfaite. 3. VOLET 2: GESTION DES MIGRATIONS 3.1. Évaluation générale Les frontières turques sont difficiles à contrôler
en raison de leur longueur et de la complexité de leurs caractéristiques
géographiques et environnementales. Ces dernières années, la situation en Syrie
et en Iraq a rendu leur gestion encore plus difficile. Pays traditionnel de
destination et de transit des flux de migration irrégulière en provenance de
diverses régions du monde, la Turquie a récemment dû faire face à d’importants
flux de réfugiés sans précédent, y compris à l’arrivée d'environ 1,5 million
de Syriens fuyant le conflit qui frappe leur pays. Les autorités turques ont lancé une réforme complète
du système de gestion des migrations, engagée par la loi sur les étrangers et
la protection internationale, qui a été adoptée en 2013 et est entrée en
vigueur le 11 avril 2014. Cette loi a institué une nouvelle autorité
unique civile spécialisée (la direction générale de la gestion des migrations
du ministère de l’intérieur) chargée des migrants et des réfugiés, tâche
précédemment assurée par les services de police. D’un point de vue juridique et institutionnel, cette
réforme permet à la Turquie de se rapprocher des normes de l'UE et des normes
internationales dans le domaine de la gestion des migrations, et de progresser
vers le respect des exigences fixées dans la feuille de route. Cette loi et
d'autres aspects de cette réforme doivent maintenant être mis en œuvre. Des
réformes similaires sont également nécessaires dans d’autres domaines relevant
du volet 2, notamment la gestion des frontières et la politique des visas. 3.2. Observations détaillées sur les
critères énoncés pour le volet «Gestion des migrations» 3.2.1.
Gestion des frontières Ø Effectuer des
contrôles adéquats et assurer une surveillance appropriée le long de toutes les
frontières du pays, et notamment les frontières avec les États membres de l'UE,
de manière à réduire de façon significative et durable le nombre de personnes
qui parviennent à franchir illégalement les frontières turques, que ce soit
pour pénétrer en Turquie ou en sortir; Le nombre de migrants en situation irrégulière qui
parviennent à franchir irrégulièrement les frontières turques et qui ne sont
pas détectés par les organes turcs de contrôle aux frontières reste
relativement élevé. Il faut toutefois reconnaître que les autorités turques
chargées de la gestion des frontières font des efforts considérables pour
remédier à cette situation et déploient d’importantes ressources humaines,
financières et techniques à cette fin. La Commission estime que la Turquie ne satisfait
que partiellement aux exigences fixées pour ce critère, mais avec de bonnes
perspectives d'évolution. La Commission recommande que les autorités turques
continuent d'œuvrer à l'amélioration de leurs performances dans ce domaine,
notamment en réformant et en renforçant leurs organes de contrôle aux
frontières. La Commission est d'avis que les mesures suivantes pourraient aider
les autorités turques à accomplir des progrès considérables en ce qui concerne
le respect des exigences fixées pour ce critère. ·
Il y a lieu de réaliser une analyse des risques
appropriée portant sur l'ensemble des frontières turques, et en particulier sur
les zones les plus exposées aux pressions exercées par la migration irrégulière
et au risque d’utilisation de documents falsifiés. Cette analyse devrait
permettre d'apprécier les ressources spécifiques et les méthodes les plus
appropriées nécessaires pour chaque zone frontalière. ·
Les forces terrestres devraient avoir recours à des
procédures de contrôle plus souples afin de mieux lutter contre les passeurs
dans toutes les zones frontalières dont elles sont responsables. ·
Il y a lieu de renforcer la coopération
opérationnelle entre les services de police et l'administration des douanes.
Les outils d’investigation et les informations dont dispose l'administration
des douanes devraient être davantage utilisés pour aider les services de
police. Les points de passage frontaliers devraient être organisés et gérés de
manière à prévoir le temps et le personnel suffisants, ainsi que les moyens et
l'espace appropriés, pour pouvoir assurer également le contrôle des personnes. ·
Il y a lieu de renforcer les activités de
patrouille de la gendarmerie dans les zones adjacentes à la frontière et dans
les zones côtières. Cette mesure augmentera la probabilité d’intercepter, d'une
part, les migrants en situation irrégulière qui ont traversé les frontières
orientales du pays en contournant les contrôles des forces terrestres et,
d'autre part, ceux qui se préparent à quitter illégalement le pays par ses frontières
avec la Grèce et la Bulgarie. ·
Les services de police devraient mettre davantage
l’accent sur la détection des faux documents de voyage et des documents de
voyage authentiques utilisés par des imposteurs, notamment à l’aéroport Atatürk
d’Istanbul mais aussi à n'importe quel autre lieu de passage frontalier du
pays. Les documents de voyage détectés devraient être systématiquement saisis
et les personnes les utilisant devraient faire l'objet de poursuites pénales,
mais des enquêtes devraient également être lancées dans tous les cas pour
permettre l'identification et le démantèlement des réseaux criminels ayant
fourni les documents concernés. ·
Il y a lieu de systématiser les contrôles de
passeport pour les passagers passant par la zone internationale de transit des
aéroports turcs, en particulier pour les passagers se rendant dans l’UE. ·
Il y a lieu de réexaminer la possibilité
actuellement offerte à certaines catégories de personnes de franchir la
frontière turque avec des cartes d’identité ne répondant pas aux normes de
l'OACI. Ø adopter et
mettre en œuvre effectivement une législation régissant la circulation des
personnes aux frontières extérieures, ainsi qu'une législation relative à
l'organisation et aux fonctions des autorités chargées de la surveillance des
frontières, conformément au plan d'action national pour la mise en œuvre de la
stratégie turque de gestion intégrée des frontières, approuvé par les autorités
turques le 27 mars 2006, et en conformité avec les principes et les
meilleures pratiques consignées dans le code frontières Schengen de l'UE et le
catalogue Schengen de l'UE; La
Commission considère que cette exigence est non satisfaite étant donné
que le «plan d'action national pour la mise en œuvre de la stratégie turque de
gestion intégrée des frontières» n’a été mis en œuvre que de manière très
limitée et que l’un de ses éléments essentiels n’a pas été mis en œuvre du
tout. Cet élément proposait de mettre en place un organisme de contrôle aux
frontières spécialisé, non militaire et unique, et de lui transférer l'ensemble
des responsabilités et ressources liées à la gestion des frontières. Ces
responsabilités et ressources sont actuellement réparties entre plusieurs
agences (douanes, services de police, garde-côtes et forces terrestres). La
Commission recommande donc que les autorités turques adoptent toutes les
mesures nécessaires à la mise en œuvre du plan d’action, et notamment la
législation requise pour créer le nouvel organisme de contrôle aux frontières. En
outre, jusqu'à l'établissement de cet organisme de contrôle aux frontières
spécialisé, non militaire et unique, la Commission recommande aux autorités
turques d'améliorer la manière dont les différents organes de contrôle aux
frontières actuellement en place fonctionnent et coopèrent les uns avec les
autres, afin de garantir une gestion moderne et intégrée des frontières. La
Commission recommande en particulier que les autorités turques: ·
réexaminent la manière dont les forces terrestres
agissent en matière de gestion des frontières, afin de veiller à ce que les
troupes chargées du contrôle des frontières terrestres fassent l'objet du moins
de restrictions possible découlant de règles et d'obligations contradictoires
dues à leur appartenance à l’armée et soient de plus en plus autorisées à: v
coopérer pleinement avec les autres services
répressifs et organes de contrôle aux frontières compétents; v
développer des techniques de patrouille plus
souples; et v
organiser leur travail et concentrer leurs
activités sur leur mission prioritaire qu'est la lutte contre le trafic de
migrants transfrontière; ·
adoptent des mesures visant à garantir que les
organes de contrôle aux frontières coopèrent plus étroitement les uns avec les
autres ainsi qu’avec la gendarmerie. Ces mesures pourraient, notamment, être
les suivantes: v
utiliser et mettre au point des outils de
communication interopérables; v
organiser l'échange d’officiers de liaison afin de
partager ressources techniques et informations; v
prévoir un accès mutuel à leurs bases de données
respectives afin de permettre à chacune des deux parties, dans des
circonstances exceptionnelles, de travailler dans les zones qui relèvent des
compétences de l'autre partie; v
mettre au point des méthodes de travail communes ou
réaliser des opérations conjointes sur la base d’analyses de menaces élaborées
en concertation; v
partager des statistiques; v
développer des programmes de formation communs; v
mettre en place des procédures permettant aux
patrouilles des différentes institutions de communiquer directement entre elles
et de prendre l’initiative d’agir de concert chaque fois que nécessaire; v
établir des mécanismes pour l’échange, en temps
utile, d’informations et de renseignements au niveau opérationnel, ainsi que
pour la coordination des opérations, de manière à ce que les migrants en
situation irrégulière qui transitent par des zones relevant de la compétence de
plusieurs services puissent être plus facilement interceptés grâce à une
utilisation efficace des ressources dont sont dotés tous ces services; v
renforcer le rôle de coordination du bureau pour la
gestion intégrée des frontières. Ø arrêter les
mesures budgétaires et autres mesures administratives nécessaires pour assurer
le déploiement, aux points de passage frontaliers et le long de toutes les
frontières du pays, notamment les frontières avec les États membres de l'UE,
d'un nombre suffisant de gardes-frontières bien formés et qualifiés, ainsi que
d'infrastructures, d'équipements et de systèmes informatiques efficaces,
notamment en recourant davantage à du matériel de surveillance, et en
particulier des dispositifs électroniques, mobiles et fixes, la surveillance
vidéo, des caméras infrarouge et autres systèmes de détection; Les
autorités turques déploient des ressources humaines, des moyens techniques et
des infrastructures considérables tout le long des frontières du pays. Elles
font preuve d'une volonté manifeste d'améliorer constamment la préparation du
personnel dans les organes de contrôle aux frontières et d’augmenter la qualité
des équipements à leur disposition. Le travail effectué par les forces
terrestres responsables de la surveillance le long des frontières terrestres de
la Turquie et le professionnalisme des garde-côtes sont particulièrement
impressionnants. Les services de police possèdent une base de données, POLNET,
qui constitue un outil effectif pour l'enregistrement des données relatives aux
entrées et sorties des passagers franchissant les frontières et pour le
contrôle de leur droit d'entrée ou de sortie. Il
existe cependant une grande marge d’amélioration, de sorte que la Commission
estime que l'exigence fixée pour ce critère n'est que partiellement
satisfaite, mais avec de bonnes perspectives d'évolution. La
Commission recommande en particulier que les autorités turques prennent les
mesures suivantes: ·
le recours aux conscrits de l'armée pour exercer
des tâches de contrôle des «frontières vertes» devrait progressivement se
limiter aux tâches auxiliaires uniquement. Cette mesure peut également
nécessiter l’utilisation accrue de moyens de contrôle techniques (en
particulier, l’utilisation de radars montés sur des voitures, de véhicules
aériens sans équipage et de caméras thermiques, et le contrôle centralisé des
données de surveillance); ·
la formation dispensée au personnel en activité le
long des «frontières vertes» devrait différer du programme normal de l'armée et
porter plus particulièrement sur les questions de gestion des frontières; ·
la rotation du personnel professionnel des forces
terrestres devrait se limiter aux brigades chargées du contrôle aux frontières
afin de permettre le développement d'une spécialisation, d'une culture et d'une
méthodologie de travail en matière de contrôles aux frontières. Si cela s'avère
impossible, il y a lieu d'offrir des incitants aux personnes qui souhaitent se spécialiser
dans ce domaine. Il en va de même pour les services de police, afin que les
personnes intéressées puissent être formées de manière à devenir de véritables
spécialistes de la détection des faux documents de voyage et des imposteurs; ·
un système intégré de radars côtiers devrait être
progressivement mis au point afin de contrôler les frontières maritimes, de
manière à pouvoir dresser un véritable état de la situation. Il y a lieu de
compléter cette mesure par l’utilisation accrue de moyens de surveillance
aérienne, de manière à assurer une réaction rapide aux départs clandestins de
migrants depuis les eaux territoriales turques. Ø améliorer la
coopération et l'échange d'informations entre le personnel et les services
chargés de la gestion des frontières, l'administration des douanes et les
autres services répressifs, en vue de renforcer les capacités de collecte de
renseignement, d'utiliser plus efficacement les ressources humaines et
techniques et d'agir de façon coordonnée; La
Commission estime que cette exigence n’est que partiellement satisfaite,
notamment en raison du fait que les mesures actuellement prises par les
autorités turques ne garantissent qu'une coordination insuffisante entre les
organes de contrôle aux frontières, fondée sur des réunions régulières entre
hauts fonctionnaires mais sans mécanismes institutionnels adaptés pour veiller
à la coopération effective et intégrée des différents services. Afin
de satisfaire à l’exigence fixée pour ce critère, les autorités turques sont
invitées à mettre en œuvre les mesures déjà recommandées dans le cadre des
exigences précédentes, de manière à garantir une coopération plus étroite entre
les services répressifs et les forces terrestres et à permettre la mise en
place d'une gestion intégrée des frontières. Ø mettre en place
des programmes de formation et adopter des codes de déontologie relatifs à la
lutte contre la corruption, destinés aux gardes-frontières, aux douaniers et
autres agents participant à la gestion des frontières; La
Commission estime que cette exigence est partiellement satisfaite, avec de
bonnes perspectives d'évolution. Les autorités turques disposent d'une
réglementation définissant le code d'éthique que chaque membre de
l’administration publique et des services répressifs doit respecter. La
Commission recommande toutefois que la Turquie: ·
élabore des versions de ce code d'éthique général
qui permettent de faire face plus particulièrement aux situations auxquelles
sont confrontés les officiers chargés de la gestion des frontières; ·
développe des modules de formation adaptés pour
mieux faire connaître ces versions; et ·
mette en place des mécanismes de contrôle. Ø mettre en œuvre
effectivement le mémorandum d'accord signé avec Frontex, y compris au moyen
d'initiatives de coopération, d'échanges d'informations et d'analyses des
risques; La
Commission estime que cette exigence est, à l'heure actuelle, satisfaite. Les
autorités turques sont toutefois encouragées à poursuivre et à approfondir la
mise en œuvre de la stratégie de coopération triennale qu'elles ont approuvée
avec Frontex dans le cadre du mémorandum d’accord. Ø veiller à ce que
la gestion des frontières soit assurée en conformité avec le droit
international des réfugiés, dans le plein respect du principe de
non-refoulement, et en permettant aux personnes ayant besoin d'une protection
internationale d'avoir effectivement accès aux procédures d'asile; Ces dernières années, les autorités turques ont
accordé une protection internationale à plus d’un million de demandeurs d’asile
en provenance de Syrie et de nombreux autres pays. Aucun cas de refoulement n’a
été signalé. Par conséquent, la Commission estime que cette exigence est, à
l'heure actuelle, satisfaite. Ø assurer une
coopération adéquate avec les États voisins de l'UE, en vue, en particulier, de
renforcer la gestion des frontières avec les États membres de l'UE. La Commission peut estimer que cette exigence est partiellement
satisfaite, en raison notamment de récentes améliorations de la coopération
transfrontalière, aux frontières terrestres, entre les autorités turques et les
autorités bulgares et grecques afin de lutter contre la migration clandestine. Afin que cette exigence soit pleinement satisfaite, la Commission
recommande que les autorités turques prennent les mesures suivantes: ·
approfondir et consolider la coopération avec les autorités
bulgares et grecques le long des frontières terrestres, y compris en organisant
régulièrement des réunions auxquelles seront conviées les forces terrestres
turques, permettant ainsi de mettre en place des canaux de communication
sécurisés et un mécanisme stable et structuré pour la coordination et le
partage d’informations, en contribuant notamment à la mise en place d’un centre
de contact tripartite situé au point de passage frontalier «Capitan Andreevo»; ·
renforcer la coopération opérationnelle avec les autorités
grecques dans la région de l'Égée, afin de veiller, d'une part, à ce que les
activités de coopération en mer incluent la prévention de la migration
clandestine au moyen de l'échange d'informations, et, d'autre part, à ce
qu'elles soient réalisées au moyen non seulement de communications formelles
entre les sièges des garde-côtes des deux parties concernées mais aussi par des
échanges opérationnels entre les officiers en activité au niveau local. Pour ce
qui est de ce dernier point, il serait particulièrement utile de mettre en
place un système de partage d’informations et d’alertes rapides réciproques
entre toutes les autorités locales associées à la prévention et à la répression
de la migration clandestine; ·
comme recommandé pour le volet 1, veiller à ce que les
services de police turcs coopèrent avec les officiers de police de liaison
détachés par les États membres de l’UE, partagent des informations avec eux et
leur fournissent une assistance mutuelle pour ce qui est de la détection de
documents faux et falsifiés pouvant être utilisés par des passagers quittant le
territoire turc en partant d'un aéroport, ou transitant par un aéroport situé
en Turquie, et voyageant à destination d'un aéroport de l’UE. 3.2.2.
Politique des visas Ø Améliorer la
formation relative à la sécurité des documents à l'intention du personnel
consulaire et des agents des services chargés de la gestion des frontières de
la Turquie, et mettre au point et exploiter le système turc d'information sur
les visas; Compte tenu de l’attention déjà accordée par les
autorités turques aux programmes de formation du personnel consulaire et des
agents des services chargés de la gestion des frontières en matière de
détection des documents d’identité falsifiés, et en raison du fait que
plusieurs bases de données incluant les visas délivrés existent déjà et peuvent
toutes être consultées par les services de police, la Commission estime que
l'exigence fixée pour ce critère est partiellement satisfaite, avec de
bonnes perspectives d'évolution. La Commission recommande néanmoins que les autorités
turques:
améliorent la formation du
personnel consulaire et des agents des services chargés de la gestion des
frontières, notamment pour renforcer leur capacité à reconnaître les
passeports et les visas délivrés par les pays de l'espace Schengen et les
pays de l’OCDE, ainsi que les nouveaux visas turcs répondant à des normes
de sécurité élevées qui sont sur le point d’être introduits; et
poursuivent sur la voie d’une
pleine intégration des bases de données sur les visas, de manière à ce que
tout service répressif turc intervenant dans la gestion des frontières ou
la lutte contre la migration clandestine puisse rapidement vérifier
l’authenticité d’un visa turc sur le document de voyage d’un étranger qui
souhaite entrer ou qui est entré sur le territoire turc.
Ø mettre fin à la
délivrance de visas aux frontières en tant que procédure ordinaire pour les
ressortissants de certains pays n'appartenant pas à l'UE, et notamment les pays
qui représentent pour l'UE un risque élevé en matière de migration et de
sécurité; Les autorités turques continuent de délivrer des
visas aux frontières aux citoyens de 89 pays qui, pour beaucoup, sont des
sources potentielles de migration clandestine vers l’UE. Toutefois, la nouvelle
loi sur les étrangers et la protection internationale, qui est entrée en
vigueur en avril 2014, a supprimé la possibilité légale pour la Turquie de
délivrer des visas aux frontières dans le cadre d’une procédure ordinaire, et,
sur la base des déclarations faites par les autorités turques, il devrait être
mis fin prochainement au système de délivrance de visas aux frontières
(probablement à la fin de 2014 au plus tard). Compte tenu de ce qui précède,
la Commission estime que l'exigence fixée pour ce critère est partiellement
satisfaite, mais avec de bonnes perspectives d'évolution. La Commission
recommande que les autorités turques mettent ce changement en œuvre le plus
rapidement possible. Ø introduire les
nouvelles vignettes-visas turques dotées d'éléments de sécurité plus efficaces
et mettre un terme à l'utilisation de timbres de visas; Alors que les autorités turques continuent à
utiliser les timbres de visas, qui sont facilement falsifiables, elles ont mené
à bien les préparatifs techniques pour de nouvelles vignettes-visas dotées
d'éléments de sécurité efficaces et ont annoncé leur prochaine introduction. La
Commission estime donc que l'exigence fixée pour ce critère est partiellement
satisfaite, mais avec de bonnes perspectives d'évolution. La Commission recommande que les autorités turques
mettent un terme à l'utilisation de timbres de visas, commencent à les
remplacer par les nouvelles vignettes-visas plus sécurisées et, en temps utile,
étendent l’utilisation de ces dernières et remplacent tout autre type de visa
actuellement utilisé. Ø introduire des
visas de transit aéroportuaire; La Commission estime que cette exigence est presque
satisfaite, dans la mesure où la nouvelle loi sur les étrangers et la
protection internationale octroie aux autorités turques la capacité légale de
demander aux étrangers qui voyagent par avion et souhaitent transiter par la
Turquie pour prendre un vol vers un autre pays, et qui envisagent donc d'entrer
dans la zone internationale d’un aéroport turc, d'introduire une demande de
visa de transit auprès d’un consulat de Turquie avant d'entamer leur voyage. La Commission recommande que les autorités turques
mettent en œuvre les dispositions pertinentes de la nouvelle loi. Ø modifier les
règles sur la base desquelles la Turquie autorise l'entrée sur son territoire
aux ressortissants des principaux pays qui constituent une source importante de
migration clandestine à destination de l'UE, afin de rendre cet accès plus
difficile pour les personnes cherchant à pénétrer sur le territoire turc dans
le but de franchir ensuite illégalement les frontières extérieures de l'UE; Comme indiqué plus haut, les ressortissants de 89 pays
qui, pour beaucoup, sont considérés comme des sources potentielles de migration
clandestine vers l’UE, sont actuellement autorisés à entrer sur le territoire
de la Turquie en obtenant simplement un visa à la frontière turque. Toutefois,
les autorités turques ont annoncé leur intention de mettre fin au système de
délivrance de visas aux frontières. Une fois ce système supprimé, les citoyens des pays
concernés continueront, en principe, de pouvoir obtenir un visa facilement, en
introduisant une demande via le système de visa électronique. Ce système a
d'abord été mis en place sous la forme d'un projet pilote en 2013 pour
ensuite être utilisé dans des conditions normales à partir d'avril 2014,
mais il présente les mêmes faiblesses que le système de délivrance de visas aux
frontières. Toutefois, en vertu des règles actuelles du système
de visa électronique, la possibilité d’obtenir un visa électronique ne sera pas
ouverte à tous. En effet, à quelques exceptions près, les citoyens des pays qui
sont considérés comme des sources potentielles de migration clandestine ne
pourront introduire une demande de visa électronique pour la Turquie que s'ils
sont déjà titulaires, au moment d'introduire leur demande, d'un visa ou d'un
titre de séjour en cours de validité délivré par un pays de l’OCDE ou de
l’espace Schengen. À la lumière de ce qui précède, la Commission estime
que, pour l'heure, l'exigence fixée pour ce critère n'est que partiellement
satisfaite, mais avec de bonnes perspectives d'évolution. Afin qu'elles progressent sur cette voie, la
Commission recommande aux autorités turques:
mettent immédiatement fin à la
possibilité qui s'offre aux ressortissants de pays considérés comme des
sources potentielles de migration clandestine d’obtenir un visa aux
frontières;
continuent d'appliquer des règles
strictes et adoptent une approche sélective en matière de délivrance de
visas par l’intermédiaire du système de visa électronique;
suivent de près la manière dont les
personnes autorisées à entrer en Turquie en utilisant le système de visa
électronique ou sans avoir besoin d’un visa ont recours à ces
possibilités; et
mettent en place des mesures
appropriées pour réagir en temps utile à d’éventuelles pratiques abusives,
si celles-ci devaient s’avérer très répandues parmi des nationalités ou
des catégories de personnes particulières.
Pour ce qui est du dernier point, et afin de
permettre à la Commission d’apprécier les progrès réalisés par la Turquie en ce
qui concerne le respect des exigences fixées pour ce critère, les autorités
turques devront soumettre des informations régulières sur:
le nombre de visas qu'elles ont
délivrés aux ressortissants de certains pays, accompagné d'une indication
des types de visas délivrés (visas aux frontières, visas électroniques ou
visas délivrés en ambassade);
le nombre de migrants en situation
irrégulière de nationalités particulières interceptés en Turquie,
accompagné d'une indication du type de visa qu'ils avaient, le cas
échéant; et
le nombre et les types de visas et
titres de séjour faux et falsifiés provenant de pays de l’OCDE et de pays de
l'espace Schengen recensés par les autorités turques chez les titulaires
de visas électroniques turcs.
Si le nombre de migrants en situation irrégulière
d'une nationalité particulière appréhendés en Turquie ou le long de la
frontière entre l’UE et la Turquie devait sensiblement augmenter, la Commission
aurait également besoin que les autorités turques lui communiquent des
informations sur le type de mesures que la Turquie a prises ou envisage de
prendre afin de remédier à ce problème. Ø poursuivre
l'alignement de la politique turque en matière de visas pour l'UE et
l'alignement des capacités législatives et administratives sur l'acquis de
l'UE, notamment vis-à-vis des principaux pays constituant une source importante
de migration clandestine à destination de l'UE; Comme expliqué plus haut, les autorités turques ont
annoncé leur intention de mettre fin à la délivrance de visas aux frontières et
de remplacer les timbres de visas par des vignettes-visas dotées d'éléments de
sécurité efficaces, conformément aux règles et éléments en vigueur dans le
système Schengen. Lorsqu'il sera mis fin au système de délivrance de visas aux
frontières, l'élaboration de la liste turque des pays qui ne sont pas soumis à
l'obligation de visa (liste négative) constituera une étape importante sur la
voie de l’alignement (qui ne sera encore que partiel) avec la liste négative
utilisée par les pays de l’espace Schengen. Toutefois, aucune de ces réformes n’a été mise en
œuvre à ce stade. Il ressort des informations disponibles que les vérifications
effectuées par les autorités consulaires turques sur les demandeurs de visa
sont plus limitées que les vérifications pratiquées dans les États membres de
l’UE. Un visa est normalement octroyé après que les autorités ont vérifié que
le demandeur satisfait à certaines exigences (par exemple, qu'il n'est pas
interdit d'entrée sur le territoire turc pour des raisons juridiques ou de
sécurité, et qu’il est en mesure de démontrer qu’il dispose des ressources
financières suffisantes pour couvrir les coûts de son séjour en Turquie et de
son retour chez lui). Aucun document supplémentaire n’est collecté et aucune
analyse plus substantielle n'est réalisée qui permettrait, par exemple, de
détecter si le demandeur de visa prévoit d’entrer en Turquie avec l’intention
d'y séjourner par la suite en tant que migrant en situation irrégulière, ou de
mettre son séjour en Turquie à profit pour franchir irrégulièrement la
frontière avec l’UE. À la lumière de ce qui précède, la Commission estime
que l'exigence fixée pour ce critère n'est que partiellement satisfaite. Afin qu'elles progressent sur cette voie, la
Commission recommande aux autorités turques de mettre en œuvre toutes les
réformes qu'elles ont annoncées, et de réexaminer leur système de délivrance
des visas et la formation du personnel consulaire chargé de la délivrance des
visas, en s’inspirant du système des visas Schengen. Afin d’apprécier les
progrès réalisés par la Turquie dans la mise en œuvre de cette recommandation,
la Commission aura besoin:
des copies des instructions
rédigées à l'intention du personnel consulaire et des agents des services
chargés de la gestion des frontières de la Turquie en ce qui concerne les
critères et les procédures qu'ils doivent respecter pour accepter ou
rejeter une demande de visa, y compris la liste des documents devant être
présentés par les demandeurs de visa; et
des statistiques détaillées sur les
demandes de visa qui ont été acceptées et rejetées, ainsi que les motifs
des rejets.
Les autorités turques sont également encouragées à
poursuivre leurs travaux concernant l'alignement de leur liste négative sur la
liste négative utilisée par les pays de l’espace Schengen, et, en tout état de
cause, à éviter toute disparité supplémentaire. Ø accorder un
accès non discriminatoire sans obligation de visa au territoire turc aux
ressortissants de tous les États membres de l'UE. La Commission estime que l'exigence fixée pour ce
critère n'est pas satisfaite car, actuellement, seuls les citoyens
de 19 des 28 États membres de l’UE sont autorisés à voyager vers le
territoire turc sans visa. La discrimination de facto à l'égard des demandeurs ressortissants
de la République de Chypre demeure préoccupante. En effet, pour pouvoir voyager
vers le territoire turc, les ressortissants chypriotes doivent obtenir un visa.
Pour ce faire, ils peuvent introduire une demande via le système turc de visa
électronique. Or, sur le site web du système, la République de Chypre est
désignée par l'expression «Administration chypriote grecque de Chypre Sud». La Commission recommande que les autorités turques
mettent fin à ce traitement discriminatoire afin de satisfaire à l’exigence
fixée pour ce critère. 3.2.3 Responsabilité du transporteur Ø Adopter et
mettre en œuvre effectivement la législation relative à la responsabilité du
transporteur définissant les sanctions applicables. Les transporteurs qui exercent leurs activités en
Turquie sont déjà tenus de réacheminer les passagers vers leur point de départ
si les autorités turques leur ont refusé l'entrée sur le territoire turc, une
obligation qui a été confirmée dans la nouvelle loi sur les étrangers et la
protection internationale. Compte tenu de ce qui précède, la Commission estime
que l'exigence fixée pour ce critère est partiellement satisfaite, avec de
bonnes perspectives d'évolution. Afin de mettre en place un système plus
contraignant, de prévenir les arrivées de clandestins sur le territoire turc et
de progresser en ce qui concerne le respect des exigences fixées pour ce
critère, la Commission recommande que les autorités turques instaurent un
régime de sanctions pour les transporteurs négligents, qui s'inspirerait des
meilleures pratiques européennes et internationales. 3.2.4. Protection internationale Ø En conformité
avec l'acquis de l'UE et les normes définies par la convention de Genève de 1951
relative au statut des réfugiés et son protocole de 1967, excluant ainsi toute
limitation géographique, adopter et mettre en œuvre effectivement les
dispositions législatives et d'exécution nécessaires, pour garantir le respect
du principe de non-refoulement, en tenant compte également de la convention
européenne des droits de l'homme, permettre à toute personne ayant besoin d'une
protection internationale de déposer une demande d'asile et d'obtenir la
protection liée au statut de réfugié ou une forme de protection subsidiaire et
permettre au HCR d'exercer effectivement son mandat sans restrictions sur le
territoire turc; La Commission estime que, grâce à l’adoption et à
l’entrée en vigueur, en avril 2014, de la nouvelle loi sur les étrangers
et la protection internationale, la Turquie a fait un pas important vers le
respect des exigences fixées pour ce critère, étant donné que cette loi prévoit
la mise en place d’une procédure d’asile nationale et de statuts de protection
conformes, dans l’ensemble, aux normes internationales et de l’UE. La loi réduit également à un niveau très marginal
l’incidence de la «limitation géographique» qu'applique la Turquie à la
convention de Genève de 1951 et que les autorités turques ont décidé, pour
l'heure, de continuer à appliquer. Cette limitation restreint le champ
d’application de la convention en Turquie aux «personnes qui sont devenues des
réfugiés à la suite d'événements survenus en Europe». Toutefois, la nouvelle
loi permet également à toutes les personnes non concernées par la «limitation
géographique» (dénommées «réfugiés conditionnels» dans la loi) de bénéficier
d'une protection internationale en Turquie. Le statut accordé aux «réfugiés
conditionnels» est légèrement moins avantageux que le statut accordé aux
personnes non concernées par la «limitation géographique», mais les différences
ne sont pas énormes. Dans les cas où la loi laisse une marge d'appréciation
pour la mettre en œuvre, ces différences pourraient même devenir presque
symboliques. La Commission note cependant que, ces dispositions
étant nouvelles, il n’existe toujours pas de bilan de leur mise en œuvre.
Certains aspects essentiels de la situation vécue par les demandeurs d’asile et
les bénéficiaires d’une protection internationale en Turquie ne sont pas
couverts par la législation, mais dépendront de dispositions de droit dérivé
qui n’ont pas encore été adoptées. À la lumière de ce qui précède, la Commission estime
que l'exigence fixée pour ce critère est partiellement satisfaite, mais avec
de bonnes perspectives d'évolution. Pour que la Commission puisse améliorer son
appréciation, les autorités turques devront veiller:
à ce que l’ensemble des
dispositions de droit dérivé nécessaires à la mise en œuvre effective et
complète de la loi soient adoptées; et
à ce que les dispositions de la loi
soient mises en œuvre de manière effective et cohérente dans tout le pays.
En ce qui concerne le premier point, il sera
particulièrement important de veiller:
à ce que les dispositions de la
loi, et notamment la possibilité d’accéder à une procédure de
détermination du statut conféré par la protection internationale et
d'obtenir une protection internationale, soient également appliquées de
manière effective aux demandeurs d’asile et aux réfugiés (reconnus par le
HCR) qui étaient déjà présents sur le territoire turc lorsque la loi est
entrée en vigueur;
à ce que les personnes déclarées
bénéficiaires d'une «protection temporaire» conformément à la loi
puissent, en vertu des dispositions de droit dérivé qui seront adoptées,
se voir offrir, d'une part, des droits comparables aux droits prévus par
la directive européenne relative à la protection temporaire et, d'autre
part, la possibilité d’accéder aux procédures de détermination du statut
conféré par la protection internationale individuelle, si nécessaire; et
à ce que les «réfugiés
conditionnels» se voient accorder un statut qui ne diffère pas, dans la
pratique, du statut accordé aux réfugiés relevant de la «limitation
géographique», en offrant à ces deux catégories de réfugiés des permis de
travail, une assistance sociale et des possibilités de s’intégrer,
conformément à l’approche préconisée dans la directive européenne relative
aux conditions que doivent remplir les demandeurs d'asile.
Ø établir un
organisme spécialisé responsable des procédures de détermination du statut de
réfugié, en prévoyant une possibilité de recours effectif en fait et en droit
devant une juridiction et en assurant protection et assistance aux demandeurs d'asile
et aux réfugiés, et veiller à ce que cet organisme et son personnel disposent
des moyens d'action et de la formation appropriées; Deux mesures
importantes ont été prises afin d'assurer le respect des exigences fixées pour
ce critère, à savoir la création de la direction générale de la gestion des
migrations et l’entrée en vigueur de la loi sur les étrangers et la protection
internationale, qui contient notamment des dispositions relatives au réexamen
des demandes de protection internationale rejetées et des décisions s'y
rapportant, telles que les décisions de placement en rétention, tant au niveau
administratif que judiciaire. La direction générale est toujours en cours de mise en
place, notamment au niveau provincial, et la responsabilité qui lui incombe de
mettre œuvre la loi est encore en grande partie déléguée à d’autres organismes
du secteur public agissant sous son autorité. Les dispositions
institutionnelles nécessaires à la mise en œuvre de la nouvelle législation
n’ont pas encore toutes été prises, notamment en ce qui concerne la délégation
de pouvoirs des autorités centrales vers les autorités régionales et
provinciales. Compte tenu de ce qui précède, la Commission estime
que l'exigence fixée pour ce critère est partiellement satisfaite, mais avec
de bonnes perspectives d'évolution. Pour que la Commission puisse améliorer son
appréciation, les autorités turques devraient veiller:
à ce que les dispositions de la loi
en ce qui concerne l’introduction d'un recours au niveau administratif et
judiciaire contre le rejet d’une demande de protection internationale, et
les décisions s'y rapportant, telles que les décisions de placement en
rétention, soient mises en œuvre de manière effective et cohérente dans
tout le pays, y compris en ce qui concerne l’indépendance et
l’impartialité du contrôle juridictionnel;
·
à ce que la direction générale
de la gestion des migrations termine de définir ses dispositions
intra-institutionnelles, dispose du personnel adéquat, notamment au niveau
provincial, et assume la responsabilité d'exécuter, dans la pratique, les
procédures d’asile; ·
à ce qu'une séparation claire
des responsabilités soit établie pour ce qui est de garantir les droits des
demandeurs et des bénéficiaires d’une protection internationale, respectivement. La Commission recommande également aux autorités turques
d'instaurer un système intégré et fiable d’identification des demandeurs et des
bénéficiaires d’une protection internationale. Le système devrait fournir des
informations statistiques complètes et harmonisées. Ø prévoir des
infrastructures adéquates et des ressources humaines et financières suffisantes
pour assurer aux demandeurs d'asile et aux réfugiés un accueil décent et la
protection de leurs droits et de leur dignité; Les autorités turques ne proposent normalement pas
de solution d'hébergement aux demandeurs et aux bénéficiaires d’une protection
internationale en Turquie. Elles permettent toutefois à 220 000 réfugiés
syriens de bénéficier d'un hébergement de haute qualité dans des camps de
réfugiés. La Commission estime que la Turquie satisfait partiellement aux
exigences fixées pour ce critère, avec de bonnes perspectives
d'évolution. Dans les circonstances actuelles, on ne saurait
raisonnablement attendre des autorités turques qu'elles apportent une solution
d'hébergement à tous les demandeurs d’asile et les bénéficiaires d’une
protection internationale présents en Turquie. Néanmoins, la Commission
recommande que les autorités turques: ·
créent un nombre suffisant de
centres d’accueil accessibles également aux demandeurs d'asile et aux
bénéficiaires d’une protection internationale n'ayant pas la nationalité
syrienne qui n’ont pas d’autre solution d'hébergement et de proposer un
hébergement au moins aux personnes des catégories les plus vulnérables, en
s’inspirant des normes définies dans la directive européenne relative aux
conditions d'accueil et dans la directive européenne relative aux conditions
que doivent remplir les demandeurs d'asile; ·
élaborent des stratégies et
mettent en place des outils institutionnels pour prévenir la discrimination à
l’encontre des bénéficiaires d’une protection internationale et pour garantir
l’égalité d’accès à un hébergement pour tous les bénéficiaires d’une protection
internationale, en s’inspirant des normes définies dans la directive européenne
relative aux conditions que doivent remplir les demandeurs d'asile. Ø les personnes
bénéficiant du statut de réfugié devraient pouvoir assurer leur propre
subsistance, avoir accès aux services publics, bénéficier de droits sociaux et
avoir la possibilité de s'intégrer en Turquie. La Turquie a fait un pas important vers le respect
de l'exigence fixée pour ce critère, d'une part grâce à l’entrée en vigueur de
la loi sur les étrangers et la protection internationale, qui contient des
dispositions accordant aux bénéficiaires d'une protection internationale les
droits d'accéder à l'enseignement public, aux soins de santé et au marché du
travail, et d'autre part grâce aux mesures qu’elle a prises pour assurer le
financement de la mise en œuvre, dans la pratique, des dispositions sur
l’enseignement et les soins de santé. Cependant, pour diverses raisons,
l’accès effectif à ces droits n’est pas garanti de la même manière partout et
pour toute personne en Turquie. À la lumière de ce qui précède, la
Commission estime que l'exigence fixée pour ce critère est partiellement
satisfaite, mais avec de bonnes perspectives d'évolution. La Commission recommande
que les autorités turques: ·
veillent à ce que tous les
bénéficiaires d’une protection internationale, y compris les bénéficiaires
d'une protection temporaire et les «réfugiés conditionnels», tels qu'ils sont
définis dans la nouvelle loi, puissent effectivement et systématiquement
exercer leurs droits en ce qui concerne les cartes d’identité et l’accès au
marché du travail, de manière à favoriser leur autosuffisance et leur
intégration;
conçoivent et mettent en œuvre des politiques
visant à faciliter l’accès aux droits des bénéficiaires d’une protection
internationale, qui risquent d'être socialement marginalisés, en
particulier ceux qui sont hébergés dans des structures non
publiques;
contrôlent et vérifient, y compris par la
collecte d'informations statistiques, les capacités réelles des
bénéficiaires d’une protection internationale à accéder aux services
publics et à bénéficier des possibilités d'aide sociale prévues par la
loi.
3.2.5.
Migration clandestine Ø
Adopter
et mettre en œuvre une législation permettant d'assurer une gestion efficace
des migrations et dont les dispositions soient alignées sur les normes de l'UE
et du Conseil de l'Europe en ce qui concerne l'entrée, la sortie et les séjours
de courte ou de longue durée des ressortissants étrangers et des membres de
leur famille ainsi que l'accueil, le retour et les droits des ressortissants
étrangers qui sont entrés ou résident illégalement en Turquie; Compte
tenu des récentes adoption et entrée en vigueur de la loi sur les étrangers et
la protection internationale, la Commission estime que l'exigence fixée pour ce
critère est partiellement satisfaite, mais avec de bonnes perspectives
d'évolution. Pour
que la Commission puisse améliorer son appréciation, les autorités turques
devront veiller à ce que les dispositions de cette nouvelle loi soient
pleinement et effectivement mises en œuvre dans tout le pays, et que l'ensemble
des dispositions de droit dérivé soient adoptées. Ø établir et
mettre en œuvre un mécanisme de surveillance des flux migratoires produisant
des données sur la migration aussi bien régulière que clandestine; établir des
organismes chargés de collecter et d'analyser les données sur les populations
de migrants et les flux migratoires; et dresser le tableau des flux migratoires
clandestins aux niveaux national, régional et local, et faire le point de la
situation dans les différents pays d'origine des migrations clandestines, y
compris grâce au renseignement et à l'analyse des risques; Compte tenu, d'une part, de la nouvelle mission de
collecte et d'analyse des données statistiques sur les migrations de la
direction générale de la gestion des migrations et, d'autre part, des activités
de coopération entre les autorités turques et Frontex, la Commission estime que
l'exigence fixée pour ce critère est partiellement satisfaite. La Commission recommande que les autorités turques
dotent la direction générale de la gestion des migrations des ressources dont
elle a besoin pour pouvoir commencer, dans la pratique, à accomplir sa mission
de collecte et d'analyse des données statistiques sur tous les aspects
pertinents des migrations. La Commission recommande également que la Turquie
poursuive ses activités de coopération avec Frontex et commence à élaborer une
analyse du risque posé par différents pays considérés comme des sources de
migration clandestine vers la Turquie. Ø remédier aux facteurs
d'attraction favorisant les flux migratoires clandestins à destination du pays
et prendre des mesures pour renforcer les moyens permettant d'enquêter sur la
migration clandestine organisée ou facilitée; L'exigence fixée pour ce critère est partiellement
satisfaite, mais avec de bonnes perspectives d'évolution. La Commission recommande que les autorités turques
mettent en œuvre les réformes récemment adoptées du système d’asile et de
visas, suppriment les passeports turcs n'incluant pas d'éléments d'identification
biométriques, et renforcent la capacité dont dispose le ministère du travail
pour faire des inspections et empêcher les migrants en situation irrégulière
d'entrer sur le marché du travail. Afin que la Commission puisse apprécier les progrès réalisés
par les autorités turques en ce qui concerne le respect de l'exigence fixée
pour ce critère, elle devra constater que les services répressifs turcs sont
davantage en mesure d'identifier et d'arrêter les migrants en situation
irrégulière et les passeurs, et également de mener des enquêtes plus complexes
permettant de détecter et de démanteler des réseaux criminels de trafic de
clandestins. Ø s'efforcer
effectivement de conclure et de mettre en œuvre des accords de réadmission avec
les pays qui sont à la source d'importants flux de migration
clandestine vers la Turquie ou les États membres de l'UE; Les
autorités turques disposent de quelques accords de réadmission, mais très peu
d’entre eux sont conclus avec des pays considérés comme des sources importantes
de migration clandestine. Dans certains cas, les autorités turques ont négocié
ou proposé de négocier des accords de réadmission avec ces pays, mais elles
n'ont, malheureusement, pas obtenu de résultats, notamment en raison du fait
que certains des accords qui ont été signés par la Turquie n'ont pas été
ratifiés par la suite. La Turquie dispose d'accords de coopération frontalière
avec certains de ses pays voisins, qui contiennent des dispositions sur la
réadmission des migrants en situation irrégulière, mais ces dispositions ne
sont que rarement mises en œuvre. À la lumière de ce qui précède, la Commission
estime que la Turquie n'a que partiellement satisfait à l'exigence fixée
pour ce critère. La
Commission recommande que les autorités turques mettent tout en œuvre pour
veiller:
à
ce que les accords de réadmission signés à ce jour entrent en vigueur;
à
ce que les dispositions en matière de réadmission contenues dans les
accords de coopération frontalière avec certains pays voisins soient
effectivement mises en œuvre;
à
ce que des progrès soient accomplis en termes de négociation et de
conclusion d’accords de réadmission avec au moins quelques-uns des pays
considérés comme des sources principales de migration clandestine vers la
Turquie.
Ø
affecter
des ressources financières et humaines suffisantes pour une gestion efficace
des migrations, et notamment mettre en place des programmes de formation
adéquats; La
Commission estime que l'exigence fixée pour ce critère est presque satisfaite. En
vue d'accomplir des progrès supplémentaires, les autorités turques devront:
achever
la création et la mise en place de la direction générale de la gestion des
migrations;
continuer
à doter la direction générale de ressources suffisantes pour lui permettre
d’assumer ses responsabilités.
Ø
assurer
l'éloignement effectif des ressortissants de pays tiers séjournant illégalement
sur son territoire; La
Commission estime que l'exigence fixée pour ce critère est presque satisfaite. La Commission recommande que les autorités turques
renforcent leur capacité à déterminer la nationalité des migrants en situation
irrégulière qu'elles ont interceptés, diminuant ainsi le risque que certains
d’entre eux évitent l’éloignement du territoire en fournissant de fausses
informations sur leurs origines. Ø créer les
conditions permettant le retour volontaire des ressortissants de pays tiers en
voie d'éloignement du territoire et qui souhaitent bénéficier de cette solution; Compte
tenu des dispositions de la loi sur les étrangers et la protection internationale
et du caractère limité des programmes pilotes d'aide au retour volontaire déjà
menés en Turquie, la Commission estime que l'exigence fixée pour ce critère est
partiellement satisfaite, mais avec de bonnes perspectives d'évolution. Pour que la Commission puisse améliorer son
appréciation, les autorités turques devront lui fournir:
des informations lui permettant de
vérifier la manière dont sont effectivement mises en œuvre les nouvelles
dispositions introduites dans la législation turque pour permettre le
retour volontaire des migrants en situation irrégulière;
des données statistiques concernant
le nombre de retours volontaires autorisés et effectivement mis en œuvre
par les autorités turques.
Ø mettre en place
les infrastructures nécessaires (y compris des centres de rétention) et
renforcer les services compétents pour assurer l'éloignement effectif des
ressortissants de pays tiers qui séjournent sur le territoire turc et/ou y
transitent illégalement, tout en proposant aux rapatriés toute l'aide juridique
nécessaire, ainsi qu'une assistance sociale et psychologique et aussi des
conditions de rétention et d'éloignement décentes et équitables. La
Commission estime que l'exigence fixée pour ce critère est partiellement
satisfaite, mais avec de bonnes perspectives d'évolution. Afin
qu'elles puissent progresser davantage en ce qui concerne le respect des
exigences fixées pour ce critère, la Commission recommande que les autorités
turques poursuivent les travaux menés en vue de construire et d'équiper des
centres permettant d’accueillir les migrants en situation irrégulière dans des
conditions décentes pendant qu'ils font l'objet de procédures de réadmission et
d’éloignement. La Commission recommande également qu'elles
améliorent l’accès pratique de ces personnes à l’aide juridique, à l’aide
sociale et au soutien psychologique et à des procédures leur permettant de
bénéficier de conditions de rétention décentes et équitables, notamment en
travaillant avec des organismes spécialisés, en octroyant les financements
appropriés et en déployant du personnel correctement formé et motivé. 4. VOLET 3: ORDRE PUBLIC ET
SÉCURITÉ 4.1. Évaluation générale Dans
ce domaine, la situation en Turquie est variable, voire parfois contradictoire. Les
services répressifs disposent de bonnes ressources et sont actifs. De manière
générale, ils sont dotés de spécialistes très professionnels et engagés et
déploient des efforts considérables pour lutter contre la criminalité, qui sont
porteurs de nombreuses avancées importantes. Toutefois, les résultats obtenus
en matière de détection et de démantèlement d'organisations criminelles actives
dans le pays ou impliquées dans des réseaux transnationaux ne répondent pas aux
attentes. Le
pays possède des instruments importants et bien établis pour la coopération
policière et judiciaire avec ses partenaires internationaux, y compris les
États membres de l’UE et les agences de l’UE. Toutefois, les résultats de ces
activités de coopération se situent sous le niveau requis, tant pour l’UE que pour
la Turquie. Les difficultés sont dues à plusieurs facteurs, dont notamment des
différences entre la législation de l’UE et celle de la Turquie, les différents
accords auxquels les parties ont adhéré, et des différences d’approche adoptée
sur certaines questions. Dans
de nombreux cas, les fonctionnaires turcs ont élaboré des projets de lois et
d'accords dont la mise en œuvre permettrait de renforcer la coopération ou de
mieux exploiter le potentiel des services répressifs turcs, mais l'approbation
ou la signature de ces projets par le gouvernement sont en suspens depuis des
années, pour des raisons inconnues de la Commission. De
nombreux progrès importants semblent être à portée de main et rapidement
réalisables, mais ils devraient être appuyés par une volonté politique de
réforme. 4.2. Observations détaillées sur les
critères énoncés pour le volet «Ordre public et sécurité» 4.2.1.
Prévention de la criminalité organisée, du terrorisme et de la corruption et
lutte contre ces phénomènes Ø Poursuivre et
mener à bien la mise en œuvre de sa stratégie nationale et de son plan d'action
pour la lutte contre la criminalité organisée (en particulier pour ce qui est
des aspects transfrontières) et affecter les ressources humaines et financières
nécessaires à leur exécution; La Turquie affecte des ressources financières,
techniques et humaines considérables à la lutte contre la criminalité
organisée. Comme indiqué, entre autres, dans le rapport 2013 sur la lutte
contre les trafics illicites et le crime organisé publié par les services de
police turcs, les services répressifs nationaux obtiennent des résultats
notables dans ce domaine. Toutefois, la Commission ne dispose toujours pas
d'informations sur les mesures spécifiques prises par les autorités turques
pour mettre en œuvre le plan d’action pour la lutte contre la criminalité
organisée, ou sur la manière dont ces mesures et la stratégie globale sur la
criminalité organisée peuvent aider à effectivement contrer la menace que
représentent les organisations criminelles actives en Turquie. Par ailleurs,
aucune analyse de la structure et du fonctionnement des organisations
criminelles en Turquie ne semble être disponible. Par conséquent, la Commission
estime que les exigences fixées pour ce critère ne sont que partiellement
satisfaites. Pour que la Commission puisse améliorer son
appréciation, les autorités turques devront fournir: · des
informations sur les mesures spécifiques effectivement prises pour mettre en
œuvre le plan d’action; · des
informations permettant à la Commission de comprendre la nature et la taille
des organisations criminelles basées en Turquie, en mettant l’accent sur les
organisations actives au niveau national ou transnational, accompagnées
d'indications sur leurs domaines d'activité géographiques et économiques
habituels; et une explication de la méthode élaborée par les autorités turques
pour démanteler ces organisations criminelles et lutter contre leurs activités. Ø signer et
ratifier la convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des
êtres humains et adopter et mettre en œuvre effectivement une législation dont
les dispositions soient alignées sur les normes prévues dans cette convention
ainsi que dans l'acquis de l'UE en matière de prévention de la traite des êtres
humains, de poursuites contre les trafiquants ainsi que de protection des
victimes et d'assistance à celles-ci; Le code pénal turc et la loi sur les étrangers et la
protection internationale contiennent des dispositions permettant de poursuivre
les trafiquants d'êtres humains et de porter assistance aux victimes de la
traite des êtres humains. Toutefois, aucun cadre juridique global sur la traite
des êtres humains n’a encore été mis en place, et la convention du Conseil de
l'Europe s'y rapportant a été signée mais pas ratifiée. À la lumière de ce qui précède, la Commission estime
que cette exigence n'est que partiellement satisfaite. La Commission recommande que les autorités turques:
ratifient la convention du Conseil
de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains; et
adoptent une loi permettant de
lutter de manière globale contre la traite des êtres humains, dans le
respect des normes fixées par la convention et l’acquis de l’UE.
Ø prévoir des
infrastructures adéquates et des ressources humaines et financières suffisantes
pour assurer aux victimes de la traite un accueil décent et la protection de
leurs droits et de leur dignité, et favoriser leur réintégration sociale et
professionnelle; La Commission estime que l'exigence fixée pour ce
critère est partiellement satisfaite, compte tenu notamment des travaux
déjà réalisés en Turquie pour apporter une aide aux victimes de la traite des
êtres humains. La Commission recommande que les autorités turques:
renforcent l'aide qu’elles
apportent, pour pouvoir faire face au nombre de victimes auxquelles elles
portent secours, notamment en ouvrant et en gérant des lieux d'hébergement
supplémentaires;
élaborent des programmes destinés à
augmenter les chances de réinsertion sociale des victimes, tant sur le
plan social que professionnel; et
veillent à ce que le personnel qui
travaille avec les victimes de la traite des êtres humains reçoive une
formation adaptée.
Ø ratifier la
convention du Conseil de l'Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la
saisie et à la confiscation des produits du crime et au financement du
terrorisme, et en transposer les dispositions dans sa législation interne, et
adopter et mettre en œuvre effectivement une législation permettant de
satisfaire aux exigences de cette convention et de donner suite aux
recommandations du Groupe d'action financière relatives à l'établissement d'un
système de gel des avoirs et à une définition du financement du terrorisme; Bien que la Turquie n’ait pas encore
ratifié la convention concernée, elle a élaboré une législation nationale et
déployé les capacités administratives nécessaires pour lutter contre le
blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Par conséquent, la
Commission estime que l'exigence fixée pour ce critère est partiellement
satisfaite, mais avec de bonnes perspectives d'évolution. La Commission recommande que les
autorités turques:
ratifient et commencent à
mettre en œuvre la convention;
révisent la législation
nationale afin d'en garantir le parfait alignement sur les dispositions de
la convention;
mettent en place un système
permettant de centraliser la collecte de données statistiques sur la
confiscation des produits du crime; et
mettent pleinement en œuvre les
recommandations formulées par le Groupe d'action financière.
Les autorités turques sont également encouragées à
réfléchir à la mise en place d’un bureau de recouvrement des avoirs pour la
confiscation et le recouvrement des produits du crime. Ø
ratifier
la convention du Conseil de l'Europe sur la cybercriminalité, adopter des instruments
législatifs et mettre en œuvre des mesures permettant de mettre en application
cette convention; Compte tenu de la récente ratification, par la
Turquie, de la convention, que les autorités turques n’ont pas encore commencé
à mettre en œuvre, et des importantes capacités déployées par les services
répressifs pour lutter contre la cybercriminalité, la Commission estime que
cette exigence est partiellement satisfaite, mais avec de bonnes
perspectives d'évolution. La Commission recommande que les autorités turques
commencent à mettre en œuvre la convention et révisent la législation nationale
afin de la rendre pleinement conforme aux dispositions de la convention, en
portant une attention particulière aux articles 9, 16, 17 et 18 de la
convention. Ø
poursuivre
la mise en œuvre de la stratégie nationale et du plan d'action contre la drogue
et la toxicomanie et intensifier la coopération avec l'Observatoire européen
des drogues et des toxicomanies (OEDT); Les
autorités turques semblent être très engagées dans la lutte contre le trafic de
drogue. Elles travaillent par ailleurs avec l’OEDT et mettent en œuvre la
stratégie nationale et le plan d’action dans ce domaine. Le
rapport 2013 sur la drogue publié par le ministère turc de l’intérieur
contenait des informations très complètes sur les phénomènes de trafic de
drogue et de toxicomanie en Turquie, ainsi que sur les politiques élaborées par
les autorités turques pour lutter contre ces phénomènes. Toutefois, les
autorités turques n'ont fourni aucune information détaillée sur les mesures
spécifiques prises pour mettre en œuvre le plan d’action. La
Turquie a ratifié l’accord de coopération avec l’OEDT le 29 juin 2012,
mais les autorités turques n'ont jamais déposé le document officiel de
ratification de cet accord, raison pour laquelle il ne peut entrer en vigueur. À
la lumière de ce qui précède, la Commission estime que l'exigence fixée pour ce
critère est partiellement satisfaite, mais avec de bonnes perspectives
d'évolution. Pour
que la Commission puisse améliorer son appréciation, les autorités turques
devront lui fournir des informations détaillées sur les mesures qu'elles ont
prises pour mettre effectivement en œuvre l’actuel plan d'action contre la
drogue et la toxicomanie. La
Commission recommande également que les autorités turques continuent
d'améliorer la qualité (déjà élevée) de leur rapport annuel, et permettent
l'entrée en vigueur de l’accord de coopération avec l’OEDT en déposant le
document officiel de ratification. Ø poursuivre la
mise en œuvre de la stratégie nationale et du plan d'action de lutte contre la
corruption et des recommandations du GRECO issues des premier, deuxième et
troisième cycles d'évaluation. La Commission
estime que l'exigence fixée pour ce critère n'est que partiellement satisfaite,
étant donné que, sur la base des informations limitées fournies par les
autorités turques, seules quelques-unes des recommandations formulées par le
GRECO ont été correctement suivies, et seules quelques-unes des mesures
définies dans le plan d’action de lutte contre la corruption ont été mises en
œuvre. La Commission
recommande que les autorités turques: ·
donnent
suite à l’ensemble des recommandations du GRECO; ·
achèvent
la mise en œuvre du plan d’action de lutte contre la corruption; ·
fournissent
des informations détaillées sur les mesures prises pour mettre en œuvre ces
deux recommandations. Étant donné que
la stratégie et le plan d’action de lutte contre la corruption actuellement en
vigueur arriveront à expiration en 2014, la Commission recommande également
que les autorités turques adoptent et commencent à mettre en œuvre une nouvelle
stratégie et un nouveau plan d’action. Ces documents
devraient s'appuyer sur une analyse approfondie de la prévention et de la
répression de la corruption, et devraient contenir: ·
des
délais stricts pour la mise en œuvre des mesures envisagées; ·
des
enveloppes budgétaires; ·
des
informations sur les institutions et les personnes responsables de la
réalisation des actions; et ·
des
indicateurs de réussite. La société civile
devrait être associée au processus de rédaction et de suivi de ces documents,
tandis que le suivi général de la mise en œuvre du plan d'action et la
présentation de rapports la concernant devraient être confiés à un organisme du
secteur public ou à un groupe de travail habilité à agir avec le degré
d'indépendance nécessaire. 4.2.2.
Coopération judiciaire Ø mettre en œuvre
les conventions internationales relatives à la coopération judiciaire en
matière pénale [en particulier les conventions du Conseil de l'Europe relatives
à l'extradition (n° 24 de 1957, y compris ses protocoles additionnels
de 1975, 2010 et 2012 non encore mis en œuvre), à l'entraide
judiciaire en matière pénale (n° 30 de 1959, y compris son protocole
additionnel de 2001 non encore mis en œuvre) et au transfèrement des
personnes condamnées (n° 112 de 1983, y compris son protocole
additionnel de 1997 non encore mis en œuvre)] et s'y conformer; La Turquie est déjà partie à plusieurs conventions
et protocoles mentionnés dans le cadre de ce critère; elle les met en œuvre et
prévoit d'en signer d'autres. La Commission estime que l'exigence fixée pour ce
critère est partiellement satisfaite, mais avec de bonnes perspectives
d'évolution. La Commission recommande que les autorités turques
signent, ratifient et commencent à mettre en œuvre les trois protocoles à la
convention relative à l’extradition, le protocole à la convention relative à
l’entraide judiciaire en matière pénale et le protocole à la convention
relative au transfèrement des personnes condamnées, auxquelles la Turquie n'est
pas encore partie. Ø prendre des
mesures pour renforcer l'efficacité de la coopération judiciaire en matière
pénale des juges et des procureurs avec les États membres de l'UE et les pays
de la région; Les experts et autorités turcs ont travaillé à la
préparation d'un acte juridique global unique, qui présente clairement et
simplement les procédures que doivent suivre les autorités turques pour
demander et fournir une coopération judiciaire internationale en matière pénale
de la manière la plus efficace et effective qui soit. À ce jour, cet acte n'a
toutefois toujours pas été adopté. À la lumière de ce qui précède, la Commission estime
que l'exigence fixée pour ce critère est partiellement satisfaite, mais avec
de bonnes perspectives d'évolution. Afin qu'elles puissent progresser en ce qui concerne
le respect de l'exigence fixée pour ce critère, la Commission encourage les
autorités turques à envisager l’adoption d’un tel acte juridique global. Par ailleurs, la Commission recommande que la
Turquie continue d’introduire les mesures administratives, techniques et
juridiques nécessaires, y compris en matière de formation, pour que les
autorités turques puissent réagir plus rapidement aux demandes d'entraide
judiciaire en matière pénale. Ø établir des
relations de travail avec Eurojust; Les autorités turques tirent parti de toutes les
occasions qui leur sont offertes par Eurojust de développer des relations de
travail. Toutefois, la capacité de la Turquie à développer une coopération à
part entière avec Eurojust est limitée sur le plan structurel par l’absence
d'une législation nationale sur la protection des données qui soit conforme à
l’acquis de l’UE. Eurojust n’est donc pas en mesure d'échanger avec les
autorités turques des informations à caractère personnel et confidentielles se
rapportant à des affaires judiciaires spécifiques. À la lumière de ce qui précède, la Commission estime
que cette exigence n'est que partiellement satisfaite. La Commission recommande que les autorités turques
adoptent et commencent à mettre en œuvre une législation nationale sur la
protection des données qui soit conforme à l’acquis de l’UE. Dans l’intervalle, la Commission recommande
également qu'elles lui transmettent des informations sur les actions qu’elles
envisagent de mener pour développer leurs relations de travail avec Eurojust. Ø poursuivre la
mise en œuvre de la convention de la Haye de 1980 sur les aspects civils de
l'enlèvement international d'enfants et adhérer à la convention de la Haye de 1996
concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l'exécution et
la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de
protection des enfants, ainsi qu'à la convention de la Haye de 2007 sur le
recouvrement international des aliments destinés aux enfants et à d'autres
membres de la famille; La
Turquie met en œuvre la convention de La Haye de 1980, bien que les
procédures fassent fréquemment l’objet de retards. Elle n’est pas partie aux
conventions de 1996 et de 2007, mais elle est partie à d’autres
conventions qui traitent, d’une autre manière, de questions similaires. Du fait
de cette situation, la Commission estime que cette exigence n'est que
partiellement satisfaite. La
Commission recommande que les autorités turques:
adhèrent
aux conventions de La Haye de 1996 et de 2007;
prennent
des mesures effectives pour garantir une réduction acceptable des retards
dans les procédures résultant de la convention de La Haye de 1980.
Pour
ce qui est de ce dernier point, les autorités turques sont encouragées à
accorder une attention particulière à la réforme de la procédure par laquelle
la convention de La Haye est actuellement mise en œuvre, afin de veiller à ce
que les procédures judiciaires soient lancées plus rapidement et soient plus
courtes (notamment pour ce qui est des appels) et que les compétences en ce qui
concerne ces procédures soient attribuées à des juridictions spécialisées. Les
autorités turques sont également invitées à envisager la nomination d’un juge
comme point de contact du Réseau international de juges de La Haye, afin de
faciliter la coopération sur des questions couvertes par les conventions de La
Haye. Ø assurer
une coopération judiciaire effective en matière pénale avec tous les États
membres de l'UE, y compris en matière d'extradition, notamment en favorisant
les contacts directs entre autorités centrales. La capacité de la Turquie à coopérer
pleinement avec les États membres de l’UE sur les questions d'extradition est
essentiellement entravée par quelques limites structurelles et, en particulier,
par son choix constitutionnel de ne pas autoriser l’extradition de ses
nationaux. De même, les citoyens de l’UE ne peuvent pas être extradés vers la
Turquie. Malgré ces limites, et compte tenu du principe de réciprocité et des
conventions internationales applicables, les autorités turques sont prêtes, en
principe, à coopérer avec les États membres de l’UE en ce qui concerne
l'extradition de ressortissants étrangers. L’ordre juridique turc contient
également des dispositions permettant à la Turquie de lancer des poursuites
nationales ou d'exécuter des peines étrangères prononcées à l’encontre de
citoyens turcs qui ont fui vers le territoire turc après avoir commis une
infraction à l’étranger. Une autre limite à la capacité de la
Turquie à coopérer avec les États membres de l’UE en matière pénale réside dans
la réticence avérée des autorités turques à donner une suite favorable aux
demandes de coopération judiciaire soumises par certains États membres de l’UE
dont les autorités judiciaires ont, par le passé, rejeté des demandes de
coopération judiciaire introduites par la Turquie. Les autorités turques
adoptent même cette approche dans des cas où le rejet d'un État membre tenait à
des raisons techniques, et notamment aux disparités entre les législations et
les garanties de l'État membre de l’UE et de la Turquie en ce qui concerne
l’infraction spécifique faisant l’objet de la demande. Malgré cette limite de
taille, les autorités turques coopèrent pleinement en matière pénale avec la
plupart des États membres de l’UE, bien que l’étendue et l’efficacité de cette
coopération puissent connaître d'importantes variations. À la lumière de ce qui précède, la
Commission estime que l'exigence fixée pour ce critère est partiellement
satisfaite. La Commission recommande que les
autorités turques: ·
adoptent, envers les autorités
des États membres qui s’adressent à elles sur des questions de coopération
judiciaire en matière pénale, une approche de coopération tout en développant
un bon niveau d'échanges d'information mutuels sur la législation et les
procédures applicables respectives, et s’abstiennent d'appliquer le principe de
réciprocité de manière stricte; ·
poursuivent la réforme de leur
système de justice pénale et de leur législation pénale, de manière à les
aligner davantage sur les normes de l'UE et les normes européennes, tout en
préservant l’indépendance de la justice et en renforçant les garanties
procédurales; ·
aident les autorités des États
membres à déterminer et à appliquer des procédures conformes à la législation
turque, qui permettraient d'engager des poursuites pour les infractions
commises sur le territoire de l’UE par des ressortissants turcs ayant ensuite
fui vers la Turquie; ·
assurent une coopération judiciaire en matière
pénale avec tous les États membres de l’UE sans discrimination, y compris les
autorités de la République de Chypre. 4.2.3. Coopération entre les services
répressifs Ø Prendre les
mesures nécessaires pour assurer une coopération effective et efficace en
matière répressive entre les services nationaux compétents, en particulier les
gardes-frontières, les services de police et les agents des douanes, à travers
une pleine collaboration interservices dans le domaine du renseignement et de
l'échange d'informations, ainsi qu'une coopération avec les autorités
judiciaires; Les services répressifs turcs n'ont pas l'habitude
de partager leurs ressources et leurs outils de travail ni l'accès à leurs
bases de données et renseignements respectifs. Cependant, ils ont mis en place
des mécanismes de coordination et de partage d'informations, ils partagent avec
le corps judiciaire l’accès à toutes les procédures judiciaires pertinentes
grâce au système de bases de données UYAP, et les services de police et des douanes
ont renforcé leur coopération par l'intermédiaire d’un protocole permettant le
partage de données. Par conséquent, la Commission estime que l'exigence fixée
pour ce critère est presque satisfaite. La Commission recommande que les autorités turques
poursuivent le développement de la coopération entre les services répressifs et
les autres organismes du secteur public concernés et, en particulier,
améliorent leur capacité à évaluer les menaces de manière conjointe, à réaliser
des opérations communes, et à recourir davantage à leurs compétences
respectives lors de l’ouverture et de la réalisation d'enquêtes. Ø renforcer la
coopération entre les services répressifs à l'échelle régionale et mettre en
œuvre les accords bilatéraux et multilatéraux de coopération opérationnelle,
notamment par le partage en temps utile d'informations pertinentes avec les
services répressifs compétents des États membres de l'UE; Compte tenu de la participation de la Turquie à
diverses organisations internationales en matière policière, et notamment à
Interpol, et du fait que ce pays a conclu des accords de sécurité avec la
plupart des États membres de l’UE, la Commission estime que cette exigence est presque
satisfaite. La Commission recommande que les autorités turques
assurent une coopération policière, notamment pour les questions relevant
d'Interpol, avec les autorités de tous les États membres de l’UE, y compris les
autorités de la République de Chypre. Ø améliorer la
qualité et les moyens des services répressifs en matière opérationnelle et
d'enquêtes spéciales afin de lutter plus efficacement contre la criminalité
transfrontière grave, notamment l'usurpation d'identité et les fraudes liées
aux documents de voyage; Les services répressifs turcs semblent être bien
équipés et dotés des moyens évoqués dans le cadre de ce critère. La Commission
estime que l'exigence fixée pour ce critère est satisfaite. Ø coopérer
effectivement avec l'OLAF et Europol afin de protéger l'euro contre le faux
monnayage; Les autorités turques coopèrent effectivement et
régulièrement avec les institutions concernées de l’UE et de ses États membres
en matière de protection de l’euro contre le faux monnayage. La Commission
estime que l'exigence fixée pour ce critère est satisfaite. Ø renforcer les
capacités de la commission turque d'enquête contre la criminalité financière
(MASAK) et développer la coopération entre celle-ci et les services de
renseignement financier des États membres de l'UE; La MASAK est une institution relativement récente,
mais compte tenu de son large éventail d’activités et des activités de
coopération qu’elle a déjà instaurées avec les services de renseignement
financier des États membres de l'UE, la Commission estime que l'exigence fixée
pour ce critère est partiellement satisfaite, mais avec de bonnes
perspectives d'évolution. La Commission recommande que les autorités turques
prennent certaines mesures supplémentaires pour renforcer la capacité de la
MASAK et élaborer des outils de travail lui permettant d’accroître la qualité,
la quantité et l’éventail de ses enquêtes. Ces mesures sont notamment les
suivantes:
améliorer la capacité de la MASAK
en matière de collecte, de traitement et d’analyse des données sur les
transactions suspectes, en vue de mener des enquêtes plus efficaces et
fructueuses;
collecter et produire des
statistiques sur le nombre de transactions suspectes entraînant des
poursuites pour blanchiment de capitaux et le nombre de condamnations
obtenues;
réaliser une analyse des
ressources internes sous l'angle de l’adéquation des systèmes, du
recrutement du personnel et des niveaux de ressources au sein de la MASAK;
réaliser une évaluation des risques
au niveau national afin de recenser les méthodes de blanchiment de
capitaux en Turquie, déterminer les produits financiers et les entreprises
à haut risque, et travailler avec les secteurs régulés pour réduire ces
menaces au maximum. Cette évaluation des risques pourrait servir à
élaborer un nouveau plan d'action turc pour la lutte contre le blanchiment
de capitaux;
analyser les procédures de
surveillance en place pour la lutte contre le blanchiment de capitaux et
le financement du terrorisme, afin d’en assurer la conformité et
l’alignement avec les pratiques des États membres de l’UE;
concevoir un système permettant
d'évaluer la compétence des personnes responsables de la vérification de
la conformité qui travaillent dans les domaines de la lutte contre le
blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme; et
dispenser
des formations communes dans les domaines de la lutte contre le
blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme avec les services
répressifs turcs.
Ø poursuivre la
mise en œuvre de l'accord stratégique avec Europol; La Commission estime que cette exigence est presque
satisfaite. Elle recommande que les autorités turques continuent
d'œuvrer au développement de toutes les formes de coopération possibles dans le
cadre de l’accord stratégique. Ø conclure un
accord de coopération opérationnelle avec Europol et le mettre pleinement et
effectivement en œuvre. Cette exigence n'est pas satisfaite. Afin que la Turquie puisse progresser sur la voie de
la signature d’un accord de coopération opérationnelle avec Europol, la
Commission recommande que les autorités turques adoptent et commencent à mettre
en œuvre une législation nationale sur la protection des données qui soit
conforme à l’acquis de l’UE. 4.2.4 Protection des données Ø Signer, ratifier
et mettre en œuvre les conventions internationales pertinentes, notamment la
convention du Conseil de l'Europe de 1981 pour la protection des personnes à
l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel et son
protocole additionnel n° 181; La Commission estime que cette exigence n'est pas
satisfaite. Elle recommande que les autorités turques ratifient
et mettent en œuvre la convention et son protocole additionnel. Ø adopter et
mettre en œuvre une législation sur la protection des données à caractère
personnel qui soit conforme aux normes de l'UE, notamment en ce qui concerne
l'indépendance de l'autorité chargée de veiller à la protection de ces données. La Commission estime que cette exigence n'est pas
satisfaite. Elle recommande que les autorités turques adoptent
et commencent à mettre en œuvre une législation nationale sur la protection des
données qui soit conforme à l’acquis de l’UE. 5. VOLET 4: DROITS FONDAMENTAUX 5.1. Évaluation générale Dans la mesure où cela est pertinent pour apprécier
les progrès accomplis en vue d'une libéralisation du régime des visas, on peut
affirmer que la Turquie a bien progressé et pris des mesures importantes dans
les domaines couverts par les critères énoncés pour ce volet. Dans plusieurs
cas, des réformes et de nouvelles approches sont déjà en cours. La Commission
encourage la Turquie à les poursuivre. 5.2. Observations détaillées sur les
critères énoncés pour le volet «Droits fondamentaux» 5.2.1.
Libre circulation des citoyens
Veiller à ce que la liberté de
circulation des citoyens turcs ne fasse pas l'objet de restrictions
injustifiées, y compris de mesures à caractère discriminatoire, fondées
sur des motifs tels que le sexe, la race, la couleur, les origines
ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la
religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre
opinion, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la
naissance, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. Effectuer des
enquêtes complètes à ce sujet, si nécessaire.
Étant
donné que la liberté de circulation est largement garantie en Turquie et qu'il
ne semble pas exister, dans la pratique, d'obstacles majeurs à cette liberté,
la Commission considère que cette exigence est satisfaite. 5.2.2.
Conditions et procédures relatives à la délivrance de documents d’identité Ø Fournir des
informations sur les conditions et les modalités d'acquisition de la
nationalité turque; La
Turquie a fourni des informations suffisantes sur les conditions d'accès à la
nationalité turque. Par conséquent, la Commission estime que la Turquie a satisfait
à l'exigence fixée pour ce critère. Ø fournir des informations sur les conditions relatives à la
modification des données à caractère personnel; La Turquie a fourni des informations suffisantes sur
les conditions relatives à la modification des données à caractère personnel.
Par conséquent, la Commission estime que la Turquie a satisfait à
l'exigence fixée pour ce critère. Ø garantir un
accès total et effectif à des documents de voyage et d'identité pour tous les
citoyens, notamment les femmes, les enfants, les personnes handicapées, les
personnes appartenant à des minorités, les personnes déplacées à l'intérieur du
pays, les autres catégories de personnes vulnérables; La législation turque prévoit un accès aux documents
de voyage et d’identité pour tous les citoyens. Par conséquent, la Commission
estime que la Turquie a satisfait à l'exigence fixée pour ce critère. Ø garantir un
accès total et effectif à des documents d'identité pour les réfugiés et les
apatrides séjournant en Turquie; La
Commission estime que cette exigence est presque satisfaite. Elle
recommande que les autorités turques poursuivent leurs travaux afin de garantir
à la fois l’inscription en temps utile et l’accès à de véritables documents
d’identité pour tous les demandeurs et les bénéficiaires d’une protection
internationale présents dans le pays.
fournir aux étrangers souhaitant
séjourner en Turquie des informations accessibles sur les exigences en
matière d'enregistrement, et assurer une mise en œuvre équitable et
transparente de la législation en la matière.
Compte tenu des dispositions de la nouvelle loi sur
les étrangers et la protection internationale, la Commission estime que
l'exigence fixée pour ce critère est satisfaite. 5.2.3. Droits des citoyens et respect et
protection des minorités Ø Élaborer et
mettre en œuvre des politiques qui remédient efficacement à la situation
d'exclusion sociale des Roms, à leur marginalisation et à la discrimination
dont ils font l'objet en matière d'accès à l'éducation et aux services de
santé, ainsi qu'aux difficultés qu'ils rencontrent pour obtenir des cartes
d'identité, accéder au logement et à l'emploi et participer à la vie publique; La Commission estime que cette exigence n’est que partiellement
satisfaite. Elle recommande que les autorités turques:
adoptent une stratégie globale et un plan
d’action pour améliorer la situation des Roms en Turquie, en s’inspirant
des dispositions du cadre 2011 de l'UE pour les stratégies nationales
d'intégration des Roms et en associant les organisations de la société
civile rom à la mise en œuvre et au suivi de la stratégie;
dotent le ministère compétent des ressources
suffisantes pour pouvoir coordonner effectivement la mise en œuvre de la
stratégie et du plan d’action;
améliorent la collecte de données qualitatives
et quantitatives sur l’intégration des Roms et sur les progrès réalisés
grâce à la mise en œuvre de la stratégie globale et du plan d'action;
veillent à ce que, dans le cadre des mesures
prévues en matière de logement pour les Roms, des programmes intégrés
d'insertion sociale accompagnent les mesures en matière de logement; et
adoptent une législation en matière de lutte
contre les discriminations, en s’inspirant de l’acquis de l’UE sur
l’égalité de traitement des personnes sans distinction de race ou
d’origine ethnique.
Ø ratifier les
protocoles additionnels n° 4 et n° 7 de la convention européenne des
droits de l'homme (CEDH); Étant donné que la Turquie a signé mais n’a pas ratifié les
protocoles n° 4 et n° 7 de la CEDH, la Commission estime que
l'exigence fixée pour ce critère est partiellement satisfaite. Elle recommande que les autorités turques ratifient et mettent en
œuvre ces deux protocoles. La
Turquie pourrait également réaliser une étude visant à vérifier la conformité
de sa législation nationale avec les dispositions des protocoles susmentionnés.
Si l’étude révèle d’importantes lacunes, la Commission recommande que la
Turquie adopte des mesures appropriées.
réviser ‑ conformément à la
CEDH, à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, à
l'acquis de l'UE et aux pratiques des États membres ‑ le cadre
juridique relatif à la criminalité organisée et au terrorisme, ainsi que
son interprétation par les juridictions, les forces de sécurité et les
services répressifs afin de garantir, en pratique, le droit à la liberté
et à la sécurité, le droit à un procès équitable ainsi que la liberté
d'expression, de réunion et d'association.
La Commission estime que cette exigence
n’est que partiellement satisfaite. Elle recommande que les autorités turques:
poursuivent la mise en œuvre du plan d’action
pour la prévention des violations de la CEDH et fournissent les ressources
humaines et financières nécessaires pour en garantir la mise en œuvre et
le suivi;
persistent
dans leur engagement constructif en ce qui concerne le groupe d'affaires «Incal»,
pour faire en sorte que le Comité des ministres puisse enfin cesser sa
surveillance de ce groupe d'affaires;
prennent
des mesures pour garantir la mise en œuvre effective des droits des
individus à former un recours devant la Cour constitutionnelle et
renforcent les rôles du médiateur et des institutions nationales de
défense des droits de l'homme;
poursuivent
la révision et la modification de la législation antiterroriste, en
s’inspirant des normes de l’UE et en travaillant avec des représentants d'organisations
de la société civile;
prennent
toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les agents des
services répressifs, les juges et les procureurs interprètent la
législation en vigueur de manière cohérente, en tenant compte des
dispositions de la CEDH et de la jurisprudence de la Cour européenne des
droits de l’homme, y compris des actions de sensibilisation et de
formation, et établissent un organe indépendant et impartial pour enquêter
sur les infractions commises par les services de police.
6. VOLET 5: RÉADMISSION
DES MIGRANTS EN SITUATION IRRÉGULIÈRE 6.1. Évaluation générale Il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine.
Plusieurs initiatives positives déjà prises par la Turquie méritent d'être
saluées, notamment la ratification de l’accord de réadmission UE-Turquie et la
création d’une nouvelle structure administrative chargée de gérer le processus
de réadmission. Toutefois, l’accord n’est entré en vigueur que le 1er octobre
2014 et, par conséquent, un bilan de sa mise en œuvre n’a pas encore pu être
établi. Par ailleurs, l'une des dispositions essentielles de l’accord, relative
à la réadmission des migrants qui sont des ressortissants de pays tiers, ne
commencera à s’appliquer que trois ans après la date d'entrée en vigueur; il ne
sera donc possible d’apprécier globalement la mise en œuvre de ce volet qu'une
fois passé ce délai. Une autre exigence clé du présent volet, relative à la
pleine exécution des obligations de réadmission énoncées dans des accords avec
des États membres de l’UE, peut faire l'objet d'une appréciation mais n’est
malheureusement pas entièrement satisfaite. 6.2. Observations détaillées sur les
critères énoncés pour le volet «Réadmission des migrants en
situation irrégulière» Ø Mettre en œuvre
pleinement et effectivement les obligations de réadmission qui existent avec
les États membres; Étant donné le faible taux
d’acceptation, par les autorités turques, des demandes de réadmission
introduites par la Grèce et le fait que, en 2013, elles ont décidé
unilatéralement de cesser de coopérer avec la Bulgarie sur les questions de
réadmission (ce qu’elles avaient pourtant fait jusqu’alors), la Commission
estime que cette exigence n'est pas satisfaite. Elle recommande que la Turquie exécute l’ensemble de
ses obligations de réadmission envers les États membres et maintienne un bon
niveau de coopération dans ce domaine de travail. Ø ratifier
l'accord de réadmission entre l'UE et la Turquie qui a été paraphé le 21 juin
2012; Étant donné que la Turquie a ratifié l’accord de
réadmission, cette exigence est satisfaite. Ø mettre en œuvre pleinement et effectivement l'ensemble des
dispositions de l'accord de réadmission entre l'UE et la Turquie, afin de
pouvoir faire état de résultats probants quant au bon fonctionnement des
procédures de réadmission avec tous les États membres; Étant donné que l’accord de réadmission
avec l’UE n'est entré en vigueur que le 1er octobre 2014, et
que certaines des dispositions essentielles de l’accord ne commenceront à
s’appliquer que trois ans après cette date, la Commission estime que cette
exigence n'est pas satisfaite. Ø établir et mettre en œuvre des procédures internes afin de
permettre l'identification et le retour rapides et effectifs des citoyens
turcs, des ressortissants de pays tiers et des apatrides qui ne remplissent pas
ou plus les conditions d'entrée, de présence ou de séjour sur le territoire de
l'un des États membres, et de faciliter le transit des personnes qui doivent
être renvoyées dans leur pays de destination, dans un esprit de coopération; La Turquie possède des procédures internes pour le
retour de migrants en situation irrégulière, dont la mise en œuvre ne pose
normalement pas de difficultés en ce qui concerne les citoyens turcs. Aucun
élément n’a permis d'établir l'existence de procédures visant à garantir que la
réadmission des migrants en situation irrégulière, en particulier ceux qui sont
des ressortissants de pays tiers, s’effectue dans les délais requis. Dès lors,
la Commission estime que cette exigence n’est que partiellement satisfaite. Elle recommande que les autorités turques conçoivent
les procédures internes mentionnées dans le cadre de cette exigence, y compris
celles visant à garantir la mise en œuvre sans heurts de procédures accélérées
aux frontières, et tiennent la Commission informée des progrès réalisés. Les autorités turques devraient achever le
recrutement et la formation du personnel affecté à la direction générale de la
gestion des migrations, qui est maintenant compétente en matière de réadmission
et d'opérations de retour concernant les ressortissants de pays tiers. Les
autorités devraient également définir clairement, d'une part, les
responsabilités de la direction générale et, d'autre part, la manière dont elle
coopérera avec le personnel concerné dans d’autres services répressifs et
autorités frontalières compétents à l'égard des migrants en situation
irrégulière. Ø renforcer
la capacité de l'autorité compétente à traiter les demandes de réadmission dans
les délais prévus par l'accord de réadmission et réduire le nombre de demandes
de réadmission en attente, notamment celles concernant les ressortissants des
pays tiers; La mise en œuvre de l’accord de
réadmission entre l’UE et la Turquie n'a démarré que très récemment. Par
ailleurs, pendant trois ans après son entrée en vigueur, la mise en œuvre de
l’accord ne sera que partielle en raison de la non-applicabilité de certaines
de ses dispositions. Pour ces raisons, il n’est pas encore possible d’apprécier
la mesure dans laquelle les délais fixés dans l’accord pour le traitement des
demandes de réadmission sont respectés, c'est pourquoi la Commission estime que
cette exigence n’est pas satisfaite. Ø veiller
à ce que les demandes de réadmission soient traitées conformément aux exigences
nationales et européennes en matière de protection des données; Étant donné que la Turquie n’a toujours pas adopté
de législation sur la protection des données qui soit conforme aux normes de
l’UE, cette exigence n’est pas satisfaite. Ø recueillir
des statistiques détaillées relatives à la réadmission et les échanger en temps
voulu avec les autorités compétentes des États membres et la Commission
européenne; Étant donné que la mise en œuvre de
l’accord de réadmission entre l’UE et la Turquie n’a toujours pas commencé, il
n’est pas possible d'observer la manière dont sont compilées et partagées les
statistiques sur la réadmission; c’est pourquoi la Commission estime que cette
exigence n’est pas satisfaite. 7. STATISTIQUES 7.1. Évaluation générale Les indicateurs statistiques énoncés dans la feuille
de route, qui ont été sélectionnés pour suivre l’évolution du profil de risque
de la Turquie, montrent une tendance légèrement positive, à deux exceptions
près: d'une part, la coopération en matière de réadmission, qui reste
inefficace; d'autre part, le nombre croissant de personnes qui arrivent dans
l’UE en provenance de Turquie dont l'on constate qu'elles utilisent des
documents de voyage faux ou falsifiés. 7.2. Observations détaillées pour le
volet «Statistiques» Ø Le taux de refus
de visas demandés par des ressortissants turcs; Le taux de refus de visas en Turquie a baissé de
manière légère mais constante.
En 2010, 6,73 % des visas
de type C demandés ont été refusés (ce pourcentage est légèrement
supérieur au taux moyen de refus par les ambassades des États membres de
l'UE présentes dans le monde, qui se situe à 5,79 %).
En 2011, 5,04 % des visas
de type C demandés ont été refusés (ce pourcentage est légèrement
inférieur au taux moyen de refus par les ambassades des États membres de
l'UE présentes dans le monde, qui se situe à 5,5 %).
En 2012, 4,51 % des visas
de type C demandés ont été refusés (ce pourcentage est légèrement
inférieur au taux moyen de refus par les ambassades des États membres de
l'UE présentes dans le monde, qui se situe à 4,77 %).
En 2013, on a enregistré 780 846
demandes de visas de type C et 36 901 refus, ce qui correspond à
un taux de refus de 4,7 % (ce pourcentage est légèrement inférieur au
taux moyen de refus par les ambassades des États membres de l'UE présentes
dans le monde, qui se situe à 4,8 %).
Tandis que le taux de refus de visas a diminué, le
nombre de demandes de visas Schengen introduites en Turquie a continué
d’augmenter (plus 61 % entre 2009 et 2013) pour atteindre le
nombre de 780 846 demandes de visas de type C en 2013. Ø le taux de refus
d'entrée de ressortissants turcs dans l'espace Schengen commun; Le nombre de citoyens turcs qui se sont vu refuser
l’entrée dans l’espace Schengen a diminué pour passer de 1 889 en 2011
à 1 763 en 2012 et à 1 715 en 2013. Ø le nombre de
ressortissants turcs qui sont entrés illégalement ou se trouvent en situation
irrégulière sur le territoire des États membres; Le nombre de ressortissants turcs qui sont entrés
illégalement sur le territoire d’un État membre de l’UE a diminué pour passer
de 700 en 2011 à 416 en 2012 et à 317 en 2013. Le nombre de ressortissants turcs en séjour
irrégulier sur le territoire d’un État membre de l’UE a diminué pour passer
de 7 803 en 2011 à 7 220 en 2012 et à 6 744
en 2013. Dans ces deux cas, une tendance positive se dessine.
Ø le nombre total
de demandes d'asile introduites par des ressortissants turcs dans les États
membres de l'UE; Le nombre de demandes d'asile introduites par des
citoyens turcs a diminué depuis 2008, passant de 7 115 en 2008 à
7 030 en 2009, 6 360 en 2010, 6 505 en 2011, 6 210
en 2012, et 5 625 en 2013. Bien que ce nombre soit relativement
élevé pour un pays stable et démocratique comme la Turquie, la tendance
concernant cette exigence est positive. Toutefois, la proportion de décisions positives en
matière d’asile a augmenté pour passer de 11 % en 2008 à 19,3 %
en 2013, ce qui représente une hausse du nombre de ressortissants turcs
dont le besoin de protection internationale a été reconnu. Ø le nombre de
demandes de réadmission, y compris les demandes de ressortissants de pays
tiers, présentées par les États membres à la Turquie et rejetées par celle-ci; Le nombre de migrants en situation irrégulière
renvoyés en Turquie en 2011, en 2012 et en 2013 par les États
membres de l’UE était, respectivement, de 2 643, 2 161 et 1 777,
parmi lesquels respectivement 1 866, 1 666 et 1 445 étaient
des ressortissants turcs. Le nombre de migrants en situation irrégulière
(n'ayant pour la plupart pas la nationalité turque) pour lesquels les autorités
grecques ont introduit des demandes de réadmission en 2011, 2012 et 2013
était respectivement de 18 758, 20 464 et 3 413. Le nombre
de demandes que les autorités turques ont rejetées ou auxquelles elles n’ont
pas répondu positivement était extrêmement élevé, se situant à 17 206
en 2011 (91 %), 19 641 en 2012 (96 %) et 3 079
en 2013 (90 %). Ø le nombre de
ressortissants de pays tiers, en provenance directe du territoire de la
Turquie, qui tentent de franchir illégalement les frontières extérieures de
l'UE ou de séjourner illégalement sur le territoire de l'UE; Le nombre des ressortissants de pays tiers arrivant
directement du territoire turc dans l’UE s’élevait à 56 201 en 2011, 36 307
en 2012, et 24 262 en 2013. Ces chiffres sont relativement
élevés, mais une tendance à la baisse se dessine. Ø le nombre de
ressortissants de pays tiers, arrivés dans l'UE ou essayant de franchir les
frontières extérieures de l'UE, qui viennent directement du territoire de la
Turquie, et qui sont en possession de documents de voyage illégaux; Le nombre de personnes (y compris les ressortissants
turcs et de pays tiers) en provenance directe du territoire turc qui ont été
interceptées à un point de passage de la frontière avec l’UE en possession de
documents illégaux s’élevait à 629 en 2011, 927 en 2012 et 1 693
en 2013. Ce nombre est en augmentation. La majorité de ces personnes (84 %
du total en 2013) est arrivée par avion en provenance de Turquie. Ø le nombre
d'opérations menées par les services répressifs turcs contre des organisations
criminelles se livrant à la traite des êtres humains et au trafic de migrants,
ainsi que le nombre de trafiquants et passeurs appréhendés. Il n’a pas été possible d’obtenir des statistiques
claires sur les résultats globaux obtenus par l'ensemble des autorités turques
en ce qui concerne ces questions, mais uniquement des statistiques distinctes
relatives aux résultats obtenus par quelques-uns des services répressifs. Le
rapport 2013 sur la lutte contre les trafics illicites et le crime
organisé publié par les services de police turcs faisait mention de 312
et 335 opérations menées respectivement en 2012 et en 2013 dans
le domaine de la lutte contre le trafic de migrants, ainsi que de 24
et 17 menées dans le cadre de la lutte contre la traite des êtres humains.
Ces opérations ont abouti à la poursuite, respectivement, de 1036 et 918
passeurs de migrants, et de 140 et 89 trafiquants d'êtres humains. 8. CONCLUSION Le dialogue sur la libéralisation du régime des
visas entre l’UE et la Turquie a effectivement débuté avec la présentation par
la Commission de la «Feuille de route pour l’instauration d’un régime
d’exemption de visa avec la Turquie» le 16 décembre 2013. Le présent premier rapport sur la mise en œuvre de
cette feuille de route, fruit de la première année de discussions, montre que
la Turquie a déjà bien progressé dans l'application de plusieurs des critères
énoncés dans la feuille de route et est capable de progresser encore pour
satisfaire à l'ensemble des critères, à condition que les autorités turques
renforcent leur coopération avec l’UE et tous ses États membres dans les
domaines concernés, et qu'elles lancent et mettent en œuvre plusieurs réformes
législatives et administratives essentielles. Cependant, la situation juridique
et administrative et les évolutions observées en Turquie, ainsi que la
coopération générale de ce pays avec l’UE, n’ont pas encore atteint un stade
qui permettrait à la Commission de proposer au Conseil et au Parlement européen
de lever l’obligation de visa Schengen pour les ressortissants turcs. Le présent rapport contient des informations
détaillées sur les domaines dans lesquels des réformes et une plus grande
coopération sont nécessaires. La liste suivante fait la synthèse des points les
plus importants.
En ce qui concerne la sécurité des
documents, la Turquie devra commencer à délivrer des nouveaux passeports
contenant des données biométriques, conformément à l’acquis de l’UE, et à
instaurer un partage effectif d’informations et une véritable coopération
avec les États membres de l’UE en matière de détection des documents de
voyage faux et falsifiés.
En ce qui concerne la gestion des
migrations, la Turquie devra veiller à assurer la mise en œuvre effective
et intégrale de la nouvelle loi sur les étrangers et la protection
internationale, notamment en adoptant des dispositions de droit dérivé
appropriées, et elle devra achever la mise en place de la direction
générale de la gestion des migrations.
La Turquie devrait prendre des
mesures pour progresser vers la mise en place d'un système de gestion des
frontières plus moderne, efficace et intégré, et pour garantir le
renforcement du système de visas, ainsi que le développement d’une
coopération frontalière plus approfondie avec les États membres de l’UE.
L’accord de réadmission UE-Turquie
est entré en vigueur le 1er octobre 2014. L’UE attend
désormais qu'il soit mis en œuvre de manière intégrale et effective à
l'égard de tous les États membres. Dans l'intervalle, les obligations de
réadmission bilatérales déjà en place entre la Turquie et les États
membres de l’UE devraient être mieux respectées.
En ce qui concerne l’ordre public
et la sécurité, les autorités turques doivent signer, ratifier et
commencer à mettre en œuvre plusieurs conventions internationales, les
appliquer selon une approche coopérative, adopter une législation
nationale qui soit conforme aux normes européennes et internationales, et
poursuivre la réforme du système judiciaire turc, dans le but de préserver
son indépendance et son efficacité. Cela permettra de soutenir les
services répressifs turcs dans la lutte contre la criminalité organisée,
et contribuera à développer la coopération policière et judiciaire avec
leurs homologues dans les États membres de l’UE.
En particulier, les progrès
réalisés en matière de protection des données permettront, entre autres,
d'améliorer les relations avec Europol et Eurojust.
Dans le domaine des
droits fondamentaux, la Turquie devrait continuer à réviser la législation
antiterroriste et s'efforcer de garantir la mise en œuvre de cette
législation, conformément aux dispositions de la CEDH et à la
jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.
La Turquie devra également adopter
et mettre en œuvre une stratégie globale et un plan d’action pour
améliorer la situation des Roms vivant sur son territoire et elle devra
adopter une législation visant à prévenir les discriminations à leur égard
et à faciliter leur insertion sociale.
La Commission est convaincue que les
autorités turques feront de leur mieux pour concevoir et mettre en œuvre ces
réformes et activités de coopération, et les invite à la tenir informée de tout
élément nouveau en rapport avec le respect des exigences fixées pour les
critères. Pour soutenir la Turquie dans cette
démarche, la Commission est résolue à faire usage de toutes les ressources
financières et techniques dont l’UE dispose, notamment celles qui sont
disponibles au titre de l'instrument d'aide de préadhésion. La Commission procède de la sorte en raison de sa
volonté d'établir un partenariat et de répartir les charges, mais aussi parce
qu'elle a conscience du fait que la plupart des mesures propres à favoriser les
progrès de la Turquie vers la libéralisation du régime des visas, comme indiqué
dans la feuille de route et recommandé dans le présent rapport, permettront
également (si elles sont correctement mises en œuvre) de poursuivre
l'alignement de la législation, des capacités administratives et des pratiques
turques sur les normes de l’UE. La
Commission continuera à suivre les progrès accomplis par la Turquie dans
l'application des critères énoncés dans la «Feuille de route pour
l’instauration d’un régime d’exemption de visa avec la Turquie» et des
recommandations concrètes qui figurent dans le présent rapport. Elle publiera
un deuxième rapport dans les douze mois à venir. [1]
Rapport 2014
de la Commission sur les progrès accomplis par la Turquie [SWD(2014) 307]
accompagnant la communication de la Commission du 8 octobre 2014 intitulée
«Stratégie d'élargissement et principaux défis 2014-2015» [COM(2014) 700].