32000D0012

2000/12/CE: Décision de la Commission, du 20 juillet 1999, relative à une procédure d'application de l'article 82 du traité CE et de l'article 54 de l'accord EEE (Affaire nº IV/36.888 - Coupe du monde de football 1998) [notifiée sous le numéro C(1999) 2295] (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (Le texte en langue française est le seul faisant foi.

Journal officiel n° L 005 du 08/01/2000 p. 0055 - 0074


DÉCISION DE LA COMMISSION

du 20 juillet 1999

relative à une procédure d'application de l'article 82 du traité CE et de l'article 54 de l'accord EEE

(Affaire n° IV/36.888 - Coupe du monde de football 1998)

[notifiée sous le numéro C(1999) 2295]

(Le texte en langue française est le seul faisant foi.)

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

(2000/12/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté européenne,

vu l'accord sur l'Espace économique européen,

vu le règlement n° 17 du Conseil du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité(1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1216/1999(2), et notamment son article 15, paragraphe 2,

vu la décision de la Commission du 25 août 1998 d'ouvrir une procédure dans cette affaire,

après avoir donné aux entreprises intéressées l'occasion de faire connaître leur point de vue au sujet des griefs retenus par la Commission, conformément à l'article 19, paragraphe 1, du règlement n° 17 et au règlement n° 99/63/CEE de la Commission du 25 juillet 1963 relatif aux auditions prévues à l'article 19, paragraphe 1, du règlement n° 17 du Conseil(3),

après consultation du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes,

considérant ce qui suit:

I. LES FAITS

A. OBJET DE LA DÉCISION

(1) La présente décision concerne les modalités de la vente au grand public en 1996 et en 1997, par le comité d'organisation local officiel des billets d'entrée pour les rencontres de la phase finale de la Coupe du monde de football 1998.

B. LE CFO

(2) Le Comité français d'organisation de la Coupe du monde de football 1998 (ci-après dénommé: "CFO") a été créé le 10 novembre 1992, avec le statut d'organisme sans but lucratif, par la Fédération française de football (ci-après dénommée: "FFF"), qui a obtenu à cet effet l'accord de la Fédération internationale de football association (ci-après dénommée: "FIFA"), en vue de prendre en charge toutes les activités relatives à l'organisation technique et logistique de la Coupe du monde 1998, dans le respect des différentes contraintes opérationnelles fixées par la FIFA.

C. LE TOURNOI

(3) Trente-deux équipes de football, représentant des pays du monde entier, ont participé à la phase finale de la Coupe du monde 1998. Ce tournoi a eu lieu après une phase qualificative préliminaire, qui s'est achevée en 1997, à laquelle 172 équipes représentatives ont participé. Le Brésil, en tant que vainqueur de l'édition précédente du tournoi en 1994, et la France, en tant que pays d'accueil, étaient qualifiés d'office et n'ont pas eu à disputer cette phase préliminaire.

(4) Pour la première phase du tournoi, qui a débuté le 10 juin 1998, les équipes ont été réparties en huit poules, de quatre équipes chacune. La composition de ces poules a été déterminée par un tirage au sort qui a eu lieu le 4 décembre 1997. Chaque équipe a disputé un total de trois matches contre les autres équipes de la même poule.

(5) Les équipes qui ont terminé première ou deuxième de chacune des huit poules de la première phase se sont qualifiées pour la seconde phase. Ce deuxième tour a donc vu, pour commencer, 16 équipes participer aux huitièmes de finale. Les huitièmes de finale ont été suivis de quatre matches de quarts de finale, de deux matches de demi-finales. d'un match décidant des équipes classées 3e et 4e (ou "petite finale") et, le 12 juillet 1998, de la finale de la Coupe du monde.

(6) Dix stades, tous situés en France, ont accueilli les matches de la phase finale de la Coupe du monde de football. Chaque match de la première phase d'une équipe a été disputé dans un stade différent. D'après le CFO, cela a permis de garantir que chaque stade accueillerait au moins deux équipes terminant en tête de leur poule, à l'issue de la première phase. En ce qui concerne les matches de la seconde phase du tournoi, chacun des dix stades de la Coupe du monde a accueilli au moins un match des huitièmes de finale ou un match des quarts de finale.

D. MODALITÉS DE BILLETTERIE

(7) En tant que détentrice de tous les droits relatifs aux tournois de la Coupe du monde, la FIFA fixe les règles de l'organisation générale des phases préliminaires et finales. En ce qui concerne l'organisation de la phase finale de la Coupe du monde de football 1998, la FIFA a adopté un règlement disposant que le CFO, sous réserve d'approbation par la FIFA des modalités générales(4), était responsable de toutes les questions relatives au prix, à la répartition et à la vente des billets d'entrée(5).

E. RÉPARTITION DES BILLETS - GÉNÉRALITÉS

(8) Le CFO a mis à disposition un total d'environ 2666500 billets d'entrée pour répartition ultérieure, par voie directe ou par l'intermédiaire des canaux de vente officiels. Ces billets ont été répartis de la manière suivante:

- 28,12 %: distribués par le CFO au grand public,

- 23,33 %: distribués par les fédérations nationales de football au grand public,

- 6,58 %: distribués par les tour-opérateurs autorisés au grand public dans le monde entier,

- 13,48 %: distribués par le CFO aux membres de la "famille du football français"(6),

- 13,15 %: distribués par le CFO aux associés commerciaux,

- 7,51 %: distribués par le CFO sous la forme de loges et sièges prestige, principalement à des entreprises,

- 4,07 %: distribués par le CFO à des fins diverses(7),

- 2,86 %: distribués par le CFO à des collectivités publiques,

- 0,70 %: distribués à des personnes handicapées,

- 0,20 %: invendus.

(9) Les revenus tirés de la vente de billets représentaient 60 % du total des recettes du CFO.

F. VENTE DE BILLETS AU GRAND PUBLIC

(10) Un total de 1547300 billets d'entrée, concernant toutes les rencontres de la phase finale, étaient destinés exclusivement à la vente au grand public et représentaient 58,03 % de tous les billets distribués. Ce pourcentage correspond aux billets vendus par le CFO (28,12 %), par les fédérations nationales de football affiliées à la FIFA (23,33 %) et par les tour-opérateurs autorisés, répartis dans le monde entier (6,58 %), y compris ceux d'entre eux qui ont vendu des billets en Europe.

(11) Le grand public a pu acheter des billets individuels ou un ensemble de cinq ou six billets d'entrée séparés, commercialisé sous le nom de "Pass France 98". La présente décision porte exclusivement sur les dispositions relatives à la vente par le CFO, en 1996 et en 1997, du Pass France 98 et de billets d'entrée individuels donnant accès aux matches de la phase finale de la Coupe du monde.

Ventilation des ventes

(12) La ventilation générale des ventes de billets au grand public, qui ont lieu à la fois avant et après le tirage au sort du 4 décembre 1997, peut se récapituler comme suit:

Tableau 1

Vente au grand public de billets d'entrée pour les matches de la Coupe du monde

>TABLE>

Calendrier de la vente des billets

(13) Les dates et les étapes successives de la vente des billets au grand public, par chacun des canaux de distribution officiels, se présentent comme suit:

27 novembre 1996-27 mai 1997: 393200 billets ont été vendus directement par le CFO, sous la forme du Pass France 98, au grand public pouvant indiquer une adresse en France. L'intégralité des Pass France 98 était écoulée le 27 mai 1997;

18 septembre-18 octobre 1997: pendant cette période, le grand public à même d'indiquer une adresse en France a pu introduire auprès du CFO des demandes représentant 181000 billets individuels, portant sur le match d'ouverture, les quarts de finale et demi-finales, la petite finale et la finale.

À partir du 4 décembre 1997 (date du tirage au sort ayant déterminé la composition des poules): à la suite de ce tirage au sort, des billets d'entrée individuels, donnant accès aux rencontres de la phase finale, ont été attribués aux fédérations nationales de football par la FIFA. La vente au grand public, par les fédérations nationales de football, de billets pour les matches de la première phase du tournoi a commencé peu après. La majorité des billets de la seconde phase vendus par les fédérations nationales l'ont été au cours du tournoi, lorsque l'on a commencé à connaître les équipes qualifiées pour cette phase. Un total de 622150 billets, portant sur la totalité des rencontres de la phase finale de la Coupe du monde, a été attribué, en quantités variables, à des fédérations nationales de football du monde entier.

À partir du 15 décembre 1997: des billets individuels, donnant accès aux rencontres de la phase finale, ont été attribués aux tour-opérateurs officiels, autorisés à vendre des billets dans la zone UEFA(8) (ci-après dénommés: "tour-opérateurs européens")(9). Sur le nombre total de billets d'entrée attribués, dans le monde entier, aux tour-opérateurs autorisés, une première série d'environ 79150 billets d'entrée a été mise, par le CFO, à la disposition des tour-opérateurs européens. Le CFO a mis d'autres billets à la disposition des tour-opérateurs européens à la suite du renvoi de billets invendus par les fédérations nationales de football. L'attribution de ces billets supplémentaires a augmenté le total des billets distribués aux tour-opérateurs européens d'environ 25 %.

À partir du 22 avril 1998: Le CFO a vendu directement au grand public capable de fournir une adresse dans l'EEE, 175500 billets d'entrée, portant sur la première phase et les huitièmes de finale.

Billets vendus "en aveugle" au grand public

(14) Avant le tirage au sort du 4 décembre 1997, il n'était pas possible de connaître la composition des huit poules de la première phase et, partant, de savoir quelles équipes se rencontreraient lors des divers matches de cette première phase. On ne connaissait donc, pour chaque match de la première phase, que la date de la rencontre et le stade où elle devait avoir lieu. En ce qui concerne les matches par élimination directe de la seconde phase, l'identité des équipes participantes n'était connue qu'à l'issue des rencontres concernées du tour précédent.

(15) Par conséquent, sauf dans le cas de la rencontre d'ouverture, à laquelle devait nécessairement participer le Brésil, en tant que vainqueur de la Coupe du monde 1994, ceux qui ont acheté des billets d'entrée avant le tirage au sort du 4 décembre 1997 pour les matches de la première phase les ont acquis "en aveugle", ce qui signifie qu'au moment de l'achat, ils ignoraient l'identité des équipes participant aux rencontres qui les intéressaient.

(16) Pour ce qui est de l'achat des billets donnant accès aux rencontres de la seconde phase, les consommateurs les acquérant avant que ne soit connu le résultat des matches concernés du tour précédent les ont également achetés "en aveugle".

Effet du tirage au sort des poules du 4 décembre 1997

(17) Le tirage au sort du 4 décembre 1997, qui a permis au grand public de s'assurer de l'identité des équipes amenées à s'affronter lors de chacune des rencontres de la première phase, a eu une incidence considérable, dans certains pays européens, sur l'intérêt porté au tournoi et, en particulier, sur la demande de billets pour certaines rencontres, demande que les quotas définis par la FIFA pour certaines fédérations nationales de football ne permettaient pas de satisfaire.

G. BILLETS VENDUS DIRECTEMENT AU GRAND PUBLIC PAR LE CFO

Vente des Pass France 98

(18) Le Pass France 98 consistait en un ensemble de cinq ou six billets d'entrée séparés. Exception faite des rencontres ayant lieu dans trois des dix stades de la Coupe du monde, le Pass France 98 donnait le droit à son détenteur d'assister à une série de rencontres se déroulant dans un stade précis, à savoir toutes les rencontres de la première phase et un match de huitièmes de finales(10). La première phase et les huitièmes de finale ont eu lieu, selon les stades, sur une période de 13 à 20 jours.

(19) En réalité, le Pass France 98 a été mis sur le marché et vendu exclusivement par le CFO au grand public en mesure de fournir une adresse en France, ces ventes ayant eu lieu bien avant le tirage au sort des poules du 4 décembre 1997, c'est-à-dire avant que l'on sache quelles équipes se rencontreraient lors des matches de la première phase. La vente du Pass France 98 avant le tirage au sort déterminant la composition des poules a été jugée nécessaire par le CFO, d'une part pour veiller, dans la mesure du possible, à ce que tous les matches de la première phase et des huitièmes de finale se jouent devant un public nombreux, indépendamment de l'identité des équipes participantes, et d'autre part pour fournir au CFO le financement nécessaire avant le début du tournoi.

(20) Le CFO a vendu "en aveugle", au grand public, un total de 393200 billets d'entrée - intégrés à des Pass France 98 - entre le 27 novembre 1996 et le 27 mai 1997, ce qui représente environ 15 % du nombre total de billets disponibles pour la phase finale et 6 % des revenus tirés par le CFO de la vente des billets. Les Pass France 98 vendus par le CFO ont été achetés, dans une proportion variant, selon les stades, de 71 % à 91 %, par le grand public résidant dans le département du stade ou dans les départements limitrophes.

Vente des billets d'entrée individuels

(21) Le CFO a vendu des billets individuels au grand public en deux tranches:

Première tranche (du l8 septembre au 18 octobre 1997)

(22) Pour la première tranche, le CFO a invité le grand public pouvant indiquer une adresse en France à introduire des demandes pour environ 181000 billets, portant sur le match d'ouverture, les quarts de finale, les demi-finales, la petite finale et la finale.

(23) Les demandes relatives à ces billets devaient être déposées auprès du CFO entre le 18 septembre et le 18 octobre 1997. Quelque 1,043 million de demandes ayant été reçues, un tirage au sort a été organisé le 19 décembre 1997, afin de déterminer les demandes retenues. La vente de billets d'entrée individuels en 1997 a représenté à peu près 7 % du nombre total de billets disponibles pour les rencontres de la phase finale, et une proportion identique de l'ensemble des revenus du CFO tirés de la billetterie.

Seconde tranche (à partir du 22 avril 1998)

(24) Lors d'une seconde étape, qui a commencé le 22 avril 1998, le CFO a vendu au grand public pouvant indiquer une adresse dans l'EEE environ 175500 billets d'entrée individuels, portant sur tous les matches de la première phase et des huitièmes de finale (à l'exception du match d'ouverture). À ce moment, l'identité des équipes appelées à s'opposer lors de toutes les rencontres de la première phase était connue, tandis que se limitait à huit le nombre des équipes participant à la première phase qui pouvaient prétendre participer à chacun des huitièmes de finale.

(25) Pour des raisons de sécurité, une proportion maximale d'environ 10 % des billets d'entrée vendus par le CFO dans le cadre de cette deuxième tranche pouvait être attribuée aux supporteurs des équipes disputant une rencontre donnée, en tenant compte du nombre limité de sièges alors encore disponibles pour la vente au public non neutre (voir considérant 57). Les billets d'entrée restants ont été vendus exclusivement aux spectateurs dits neutres, auxquels on pouvait attribuer des sièges réservés à cette catégorie du public.

(26) Environ 45 % des billets d'entrée mis à disposition dans le cadre de cette deuxième tranche ont été achetés par le grand public de l'EEE, à même de fournir une adresse hors de France, tandis qu'à peu près 38 % de tous les billets vendus ont été acquis par des consommateurs provenant des pays dont les équipes s'étaient qualifiées pour la phase finale(11).

H. VENTE DE BILLETS AU GRAND PUBLIC PAR D'AUTRES CANAUX DE DISTRIBUTION (TOUR-OPÉRATEURS EUROPÉENS ET FÉDÉRATIONS NATIONALES DE FOOTBALL)

(27) Les tour-opérateurs européens et les fédérations nationales de football ont vendu sous forme individuelle tous les billets d'entrée que le CFO leur a distribués, et cela après le tirage au sort du 4 décembre 1997, qui a permis de savoir quelles équipes s'affronteraient lors de chaque rencontre de la première phase. Aucun de ces deux canaux de distribution n'a vendu de Pass France 98 au grand public.

Vente de billets individuels au grand public par les tour-opérateurs européens

Sélection des tour-opérateurs européens

(28) À la suite de réunions tenues avec la Commission en mars 1997, le CFO a notifié, le 11 juin 1997, son projet de système de sélection des tour-opérateurs autorisés à vendre des billets d'entrée pour les rencontres de la phase finale dans la zone UEFA (y compris, entre autres, tous les pays de l'EEE). Compte tenu de l'urgence dont il était fait état dans la notification, et après une évaluation par la Commission des propositions du CFO, les dispositions en question ont été approuvées par une lettre de classement administratif datée du 30 juin 1997.

(29) En dépit de la description générale des modalités de la vente des billets d'entrée pour les matches de la phase finale, contenue dans la notification, le CFO n'a jamais informé la Commission de son intention de mettre en oeuvre les dispositions mises en question dans la présente décision.

(30) Le 24 novembre 1997, le CFO a annoncé dans un communiqué de presse que dix-sept tour-opérateurs avaient été désignés pour vendre des billets dans le monde entier et que cinq d'entre eux s'étaient vu accorder l'exclusivité de la vente de billets dans la zone UEFA.

Billets vendus par le CFO aux tour-opérateurs européens

(31) Les tour-opérateurs européens ont commandé le nombre maximal de billets initialement mis à leur disposition par le CFO, à savoir environ 79150. Le CFO a attribué ultérieurement des billets supplémentaires aux tour-opérateurs européens, augmentant ainsi leur nombre initial d'environ 25 %.

Commandes de Pass France 98

(32) En tant que distributeur de tous les billets d'entrée des rencontres de la phase finale, le CFO a offert aux tour-opérateurs européens la possibilité d'acheter 100 Pass France 98 portant sur des matches se déroulant dans chacun des dix stades de la Coupe du monde. Tous stades confondus, cette offre équivalait à un maximum d'environ 5500 billets d'entrée individuels pour chaque tour-opérateur européen. Il était loisible aux tour-opérateurs européens de décider s'ils commandaient ces Pass France 98 avant ou après le tirage au sort des poules du 4 décembre 1997.

(33) Au moment de leur désignation officielle. et bien après l'achèvement des ventes de Pass France 98 par le CFO, les tour-opérateurs européens avaient déjà confirmé au CFO leur intention de commander, après le tirage au sort du 4 décembre 1997, le nombre maximal de billets mis à leur disposition sous la forme de Pass France 98, ce qui représentait un total d'environ 27500 billets d'entrée. Dès lors, et malgré le fait que les tour-opérateurs européens auraient pu commander et vendre des billets pour les rencontres de la première phase avant le tirage au sort des poules, tous les billets concernés ont été mis à la disposition du grand public à un moment où l'on savait quelles équipes allaient se rencontrer lors des matches de la première phase.

(34) Chaque tour-opérateur européen a été autorisé à vendre séparément les billets composant les Pass France 98. Les tour-opérateurs européens ont, en l'occurrence, choisi de vendre de cette manière tous les billets d'entrée qui leur avaient été attribués sous la forme de Pass France 98.

Commandes de billets individuels

(35) Outre les commandes de Pass France 98, le CFO a donné l'occasion aux tour-opérateurs européens d'acheter des billets d'entrée individuels, donnant accès à des rencontres des première et seconde phases. Chacun des cinq tour-opérateurs européens a effectivement commandé le nombre maximal de billets individuels mis initialement à sa disposition par le CFO pour les matches des deux phases. Si l'on considère l'ensemble des tour-opérateurs européens, ceux-ci ont commandé un total de 33950 et de 17700 billets d'entrée individuels pour les matches des première et seconde phases.

Billets vendus par les tour-opérateurs européens

(36) La majorité des billets de première et de seconde phases proposés par les tour-opérateurs européens au grand public ont été commercialisés dans le cadre d'un forfait comprenant, en sus du billet proprement dit, la prestation d'autres services, comme l'accès aux espaces d'accueil et, pour certains matches particuliers, l'hébergement et le voyage. Le prix couvrait donc le billet ainsi que la prestation de services complémentaires, augmentant ainsi sensiblement le coût total pour les consommateurs souhaitant acheter des billets auprès des tour-opérateurs européens. La décision de lier la vente de billets à la prestation d'autres services a été prise indépendamment par chaque tour-opérateur européen, sans aucune intervention de la part du CFO.

Vente de billets individuels au grand public par les fédérations nationales de football

(37) Les billets individuels vendus au grand public par les fédérations nationales de football ont été distribués à celles-ci à la discrétion de la FIFA. La FIFA s'est réservé jusqu'à 20 % de tous les billets disponibles (à l'exclusion des loges et sièges prestige), en vue de les répartir ultérieurement entre les fédérations nationales de football. Le CFO a, en réalité, mis à cet effet environ 25,2 % des billets d'entrée à la disposition de la FIFA (soit un total de 622150 billets).

(38) L'écrasante majorité des billets attribués par la FIFA aux fédérations nationales de football a été vendue au grand public à un moment où l'on connaissait l'identité des équipes participantes.

(39) Sur les 622150 billets individuels attribués à la FIFA, ceux concernant les matches de la première phase ont été distribués aux fédérations nationales de football du monde entier après le tirage au sort des poules qui a eu lieu le 4 décembre 1997. Simultanément, la FIFA a distribué aux fédérations nationales une petite partie de son contingent de billets pour les matches de la seconde phase. La distribution par la FIFA, aux fédérations nationales de football, de la grande majorité des billets des matches de la seconde phase n'a toutefois commencé qu'après l'achèvement de la première phase, le 26 juin 1998, et cela à mesure que l'identité des équipes participant à chaque étape de la seconde phase était connue.

(40) Les fédérations nationales de football ont donc vendu tous les billets concernant les rencontres de la première phase après le tirage au sort des poules, à un moment où l'on connaissait l'identité des équipes participant à ces matches. De même, pour les rencontres de la seconde phase, les fédérations nationales de football avant reçu un nombre important de billets d'entrée(12) n'ont pu vendre la plus grande partie de ceux-ci au grand public qu'à partir du moment où l'on a su quelles étaient les équipes participantes.

(41) Le tableau 2 fait notamment apparaître les contingents approximatifs de billets accordés par la FIFA aux fédérations nationales de football de l'EEE, avant le début de la phase finale, le 10 juin, pour l'ensemble des matches des première et seconde phases. Les chiffres relatifs aux billets de la seconde phase représentent le nombre maximal de billets qui auraient pu être vendus au grand public "en aveugle" par les fédérations concernées(13). À titre d'illustration, le tableau donne le détail des contingents de billets alloués aux fédérations française, anglaise, italienne et écossaise:

Tableau 2

Billets attribués par la FIFA aux fédérations nationales de football de l'EEE avant la phase finale de la Coupe du monde de football

>TABLE>

I. CONDITIONS APPLIQUÉES AU GRAND PUBLIC ACHETANT DES BILLETS DIRECTEMENT AUPRÈS DU CFO

Billets vendus par le CFO en 1996 et en 1997

(42) Avant le tirage au sort des poules, le CFO a vendu directement au grand public, en 1996 et 1997, 574200 billets, sous la forme de Pass France 98 (393200) et de billets individuels pour le match d'ouverture, les quarts de finale, les demi-finales, la petite finale et la finale (181000). Le CFO a écoulé tous ces billets "en aveugle", à l'exception des billets donnant accès au match d'ouverture.

(43) Le grand public pouvait alors se procurer des billets, à condition d'indiquer une adresse postale en France pour leur envoi.

(44) Le CFO a informé la Commission, en janvier 1998(14), qu'aucune obligation de nationalité française ni d'attestation de résidence en France n'avait été imposée au grand public pour l'achat des billets vendus directement par le CFO et que la condition précitée avait été définie pour favoriser la livraison des billets en toute sécurité. En juin 1998(15), le CFO a complété son raisonnement à cet égard en indiquant que ladite obligation avait également été imposée afin que les billets en question soient vendus exclusivement à des spectateurs dits neutres. Cela résultait de la décision du CFO de considérer comme neutres tous les membres du grand public indiquant une adresse en France(16).

(45) Le CFO n'a tiré aucun avantage commercial de la condition, imposée aux membres du grand public souhaitant acheter des billets d'entrée en 1996 et 1997, de fournir une adresse en France. Les recettes de la vente par le CFO de Pass France 98 et de billets individuels, en 1996 et 1997, ont représenté environ 8 % du chiffre d'affaires total du CFO.

Billets vendus par le CFO en 1998

(46) En ce qui concerne les ventes de billets individuels réalisées à partir du 22 avril 1998, le CFO avait initialement prévu d'écouler ces billets selon des modalités semblables à celles qui ont été décrites. Néanmoins, à la suite de l'intervention de la Commission, le CFO s'est engagé à vendre 175500 billets d'entrée au grand public, à condition que les acheteurs fournissent une adresse dans l'EEE(17).

J. CONDITIONS APPLIQUÉES AU GRAND PUBLIC ACHETANT DES BILLETS AUPRÈS DES FÉDÉRATIONS NATIONALES DE FOOTBALL ET DES TOUR-OPÉRATEURS EUROPÉENS

Fédérations nationales de football

(47) Bien que ce soit la FIFA qui ait réparti les billets entre les fédérations nationales de football, le CFO a imposé à celles-ci des conditions pour la vente de ces billets ("conditions générales de vente"). Ces conditions prévoyaient notamment l'obligation de proposer des billets à l'ensemble du grand public, sous réserve, uniquement, des restrictions imposées pour des raisons de sécurité. Le CFO n'a toutefois pas cherché à influencer les décisions commerciales prises par les fédérations nationales de football concernant les modalités de la vente de ces billets.

(48) À la connaissance du CFO, seule la fédération anglaise de football a imposé des limitations à la vente au grand public, en choisissant de ne proposer des billets qu'aux membres d'un club de supporteurs, afin d'empêcher leur achat par des hooligans.

Tour-opérateurs européens

(49) En ce qui concerne la vente de billets par les tour-opérateurs européens, le CFO, à la suite d'une demande de la Commission formulée après la notification du CFO de juin 1997(18), a mis en oeuvre des dispositions permettant à chaque tour-opérateur européen de vendre des billets d'entrée dans tout l'EEE. De plus, le CFO a autorisé les tour-opérateurs européens à vendre les billets selon les modalités de leur choix et n'ont pas, à ce titre, cherché à influencer leurs décisions commerciales. La Commission n'a pas connaissance de ce qu'un tour-opérateur européen ait limité la vente de billets au grand public sur la base d'un critère territorial ou autre.

K. MOYENS DE RÉSERVATION DES BILLETS VENDUS PAR LE CFO AU GRAND PUBLIC EN 1996 ET EN 1997

(50) Toujours sous réserve de l'obligation pour l'acheteur d'indiquer une adresse postale en France, les moyens par lesquels le grand public a pu acheter des Pass France 98 et des billets individuels directement auprès du CFO, en 1996 et en 1997, étaient les suivants:

a) réservation par correspondance (Pass France 98 et billets individuels): Pass France 98 et billets individuels pouvaient être réservés auprès du CFO par écrit. Pour les billets individuels vendus par le CFO par le biais du tirage au sort du 19 décembre 1997, il fallait obligatoirement renvoyer un formulaire de demande, qui pouvait être obtenu auprès des agences du Crédit agricole en France:

b) réservation par Minitel (Pass France 98 uniquement): le grand public a pu réserver des Pass France 98 par le système télématique Minitel, qui est largement accessible en France. Le grand public résidant à l'étranger ne pouvait bénéficier de ce moyen de réservation qu'en s'abonnant au service Minitel par Internet, moyennant un surcoût de 350 francs français;

c) réservation par téléphone (Pass France 98 uniquement): les consommateurs pouvaient réserver des Pass France 98 par téléphone. Le numéro de téléphone indiqué à cet effet n'était pas accessible au grand public ne résidant pas en France métropolitaine;

d) réservation auprès des agences du Crédit agricole (Pass France 98 uniquement): le grand public a pu utiliser le service Minitel assuré dans 2500 agences du Crédit agricole situées en France.

L. INFORMATIONS FOURNIES PAR LE CFO AU GRAND PUBLIC SUR LA TOILE (WORLD WIDE WEB)

(51) Le 6 mai 1997, le CFO a ouvert sur la Toile un site destiné à fournir au grand public résidant en France et à l'étranger des renseignements et des conseils sur différents aspects de l'événement. et notamment sur les moyens de se procurer des billets.

(52) Les informations mises à la disposition des consommateurs résidant hors de France indiquaient expressément qu'aucun billet ne serait vendu directement par le CFO aux membres du public non francais(19). Il était conseillé aux personnes désireuses d'acheter des billets pour les rencontres de la phase finale de prendre contact avec un tour-opérateur autorisé ou avec leur fédération nationale de football(20). Le 6 mai 1997, date de l'ouverture du site, la grande majorité des Pass France 98 avait déjà été vendue par le CFO au grand public en mesure de fournir une adresse en France(21).

M. SÉCURITÉ

La convention européenne sur la violence et les débordements de spectateurs lors de manifestations sportives, et notamment de matches de football (1985)

(53) L'organisation de la Coupe du monde soulève des problèmes de sécurité qui doivent impérativement être pris en compte.

(54) À cet égard, le CFO a cherché à mettre en oeuvre une politique de sécurité mettant en pratique les principes définis par la convention européenne sur la violence et les débordements de spectateurs lors de manifestations sportives, et notamment de matches de football (1985) (ci-après dénommée: "la convention de 1985"). La convention de 1985 exige que des mesures soient prises pour empêcher ou maîtriser la violence ou les débordements de spectateurs lors d'événements sportifs. Les mesures mentionnées dans la convention de 1985 comprennent la séparation, efficace des groupes rivaux de supporteurs et, afin d'assurer cette séparation, un contrôle rigoureux de la vente des billets(22). La convention de 1985 n'énonce cependant pas de mesures particulières à adopter afin de mener à bien cette séparation et ce contrôle.

(55) Le CFO a aussi pris note des lignes directrices définies en 1996 par le comité permanent de la convention de 1985, se rapportant précisément au contrôle de la vente des billets pour les rencontres de football à haut risque. Ces lignes directrices rappellent l'importance qu'il y a à exercer un contrôle rigoureux sur les ventes de billets, afin d'assurer, lors des matches, la séparation des groupes rivaux de supporteurs(23).

Considérations de sécurité concernant les acheteurs de billets "en aveugle"

(56) Le CFO a informé la Commission de l'avis formulé par des experts, selon lequel les achats de Pass France 98 et plus généralement de tous billets en aveugle sont effectués par des spectateurs paisibles, ne constituant pas un risque particulier pour la sécurité. En revanche, le CFO considère que les ventes de billets donnant accès à des rencontres dont on connaît l'identité des équipes qui vont s'opposer attirent des supporteurs présentant des risques nettement plus significatifs pour la sécurité(24).

Séparation des supporteurs par le CFO au moyen de la vente des billets

(57) Sur la base des dispositions de la convention de 1985, le CFO a cherché à mettre en oeuvre un système permettant de placer dans chaque stade les supporteurs des équipes rivales à des extrémités opposées. Le CFO a qualifié de places à "faible risque" les places situées dans ces zones. C'est pourquoi tous les billets attribués aux fédérations nationales de football dont les équipes participaient au tournoi, et qui étaient destinés à la revente au grand public, concernaient des places à faible risque. En règle générale, les places qui n'étaient pas classées comme étant à faible risque étaient réservées aux spectateurs dits neutres, qui étaient considérés comme ne soutenant aucune des équipes présentes sur le terrain. Pour des raisons de sécurité, et conformément aux dispositions adoptées précédemment par des organisateurs de tournois, le CFO a considéré le grand public du pays d'accueil (en l'occurrence la France) comme des spectateurs neutres aux fins de l'attribution des places pour l'ensemble des rencontres de la phase finale.

Billets vendus par le CFO en 1996 et en 1997

(58) En ce qui concerne la vente "en aveugle", par le CFO au grand public, de Pass France 98 et de billets individuels en 1996 et 1997, le CFO a considéré comme des spectateurs neutres tous les consommateurs en mesure d'indiquer une adresse en France(25).

Billets vendus par le CFO en 1998

(59) Pour la vente au grand public, après le 22 avril 1998, de billets individuels concernant les rencontres de la première phase (à un moment où l'on savait quelles équipes elles opposeraient), le CFO opérait une distinction entre les demandes portant une adresse située dans l'un des deux pays dont l'équipe représentative participait à la rencontre pour laquelle le billet était demandé, et celles qui portaient une adresse située dans un autre pays de l'EEE. Les acheteurs potentiels de la première catégorie étaient considérés comme des supporteurs de l'une des deux équipes participantes et se voyaient donc attribuer des sièges réservés à ces groupes de supporteurs. Les acheteurs potentiels de la seconde catégorie étaient considérés comme des spectateurs neutres et se voyaient par conséquent attribuer des sièges réservés à ce type de spectateurs.

Billets vendus par les tour-opérateurs européens et les fédérations nationales de football

(60) En ce qui concerne la vente de billets par les tour-opérateurs européens, le CFO a demandé à chacun d'entre eux de lui communiquer des renseignements relatifs à la nationalité des clients auxquels des billets ont été vendus, ainsi qu'à l'équipe soutenue par les clients en question. En ce qui concerne la vente de billets par les fédérations nationales de football, le CFO a demandé à chacune d'elles de conserver les renseignements relatifs à l'identité de chaque acheteur, notamment son nom et son adresse, ainsi qu'à l'équipe soutenue.

Autres mesures de sécurité

(61) Outre les dispositions susmentionnées, le CFO a pris d'autres mesures visant, autant que possible, à assurer la sécurité lors des matches. Le CFO a délibérément renoncé à vendre environ 35500 billets afin d'assurer, le cas échéant, une séparation stricte des supporteurs des équipes participantes. Le CFO a aussi pris des mesures en vue d'empêcher la vente de billets au marché noir et d'éviter la contrefaçon.

N. ARGUMENTS AVANCÉS PAR LE CFO EN RAPPORT AVEC LES FAITS

(62) Au cours de l'audition, le CFO a indiqué que le nombre total de billets attribués au grand public comprenait les 359500 billets vendus aux membres de la "famille du football français" sous la forme de Pass France 98 ainsi que les 18550 billets d'entrée vendus à des spectateurs handicapés.

(63) La Commission rejette ce point de vue. Les consommateurs individuels résidant dans l'ensemble de l'EEE avaient à remplir, afin d'être reconnus membres de ces groupes, des conditions particulières, différentes de celles imposées aux consommateurs qui sont visées par la présente décision. Dès lors, on ne saurait inclure dans les billets mis à la disposition du grand public les Pass France 98 destinés exclusivement à la vente aux membres de la "famille du football français" et les billets d'entrée individuels réservés à la vente aux spectateurs handicapés. La Commission fait observer que le CFO lui-même, lors de ses contacts précédents avec la Commission, a toujours opéré une distinction entre les billets vendus au grand public et ceux écoulés auprès de la "famille du football français" et des spectateurs handicapés.

II. APPRÉCIATION JURIDIQUE

A. ARTICLE 82 DU TRAITÉ CE ET ARTICLE 54 DE L'ACCORD SUR L'EEE

(64) Aux termes de l'article 82 du traité CE et de l'article 54 de l'accord EEE, est incompatible avec le marché commun et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d'en être affecté, le fait pour une entreprise d'exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché commun ou dans une partie substantielle de celui-ci. Ces pratiques abusives peuvent notamment consister à imposer directement ou indirectement des conditions de transaction non équitables ou à limiter les débouchés au préjudice des consommateurs.

B. ENTREPRISE

(65) Toute entité exerçant des activités de nature économique, quelle que soit sa forme juridique, constitue une entreprise au sens de l'article 82 du traité CE et de l'article 54 de l'accord l'EEE. Une activité de nature économique est une activité, à but lucratif ou non, qui implique des échanges économiques. Étant donné qu'il était responsable de la répartition de plus de 2,6 millions de billets d'entrée aux matches, dont environ 1,55 million ont été vendus au grand public, le CFO exerçait des activités à caractère économique et est, à ce titre, une entreprise au sens de l'article 82 du traité CE et de l'article 54 de l'accord l'EEE.

C. MARCHÉS DES PRODUITS EN CAUSE

(66) Le marché des produits en cause peut être délimité en évaluant la mesure dans laquelle les concurrents éventuels d'une entreprise sont capables d'influencer son comportement et de l'empêcher d'agir indépendamment des contraintes concurrentielles. Pour déterminer l'ampleur du marché des produits en cause et dans quelle mesure les entreprises sont capables d'y agir en toute indépendance, il convient d'examiner, entre autres, la façon dont les consommateurs sont susceptibles de réagir à des modifications du prix du produit ou du service en question. Le marché des produits en cause sera habituellement limité à un seul produit ou service si une augmentation faible mais significative du prix dudit produit ou service (par exemple de 10 %) ne se traduit pas par un changement mesurable de la demande du consommateur en faveur de produits ou de services de substitution.

(67) En ce qui concerne les ventes de billets réalisées par le CFO en 1996 et en 1997, il est donc nécessaire d'établir s'il existait: a) des solutions de remplacement suffisantes pour la vente de billets de la Coupe du monde de football; b) des solutions de remplacement suffisantes pour la vente par le CFO au grand public de Pass France 98 et c) des solutions de remplacement suffisantes pour la vente en 1997 par le CFO de billets individuels en aveugle au grand public.

Produits de remplacement des billets pour la phase finale de la Coupe du monde

(68) La nature de la phase finale de la Coupe du monde est telle qu'une augmentation d'au moins 10 % du prix des billets n'aurait entraîné aucun déplacement significatif de la demande du grand public vers d'autres produits concurrents. Cela s'explique principalement par:

a) l'ampleur de la popularité du football en Europe et dans le monde, qui dépasse celle de tous les autres sports

Si d'autres sports suscitent un vif intérêt régional de la part du grand public, seul le football est capable de soulever, à l'échelle européenne ou mondiale, un intérêt général, durable et fidèle. Par ailleurs, les sports sont différents et le grand public qui s'intéresse à l'un d'entre eux n'est pas nécessairement amateur des autres. Dès lors, il est peu probable que les membres du grand public souhaitant assister à la phase finale de la Coupe du monde aient considéré le fait de participer à des événements internationaux organisés dans d'autres sports que le football comme une solution de remplacement suffisante, que le prix des billets pour les matches de la Coupe du monde ait été augmenté de 10 % (au moins) ou non;

b) l'importance de la phase finale de la Coupe du monde de football, qui dépasse celle de toutes les autres compétitions de football

Le football est pratiqué dans de nombreux pays d'Europe, sinon tous, tant sur le plan national que sur le plan international. À l'échelle nationale, les équipes locales se rencontrent généralement une fois par semaine, d'une année à l'autre. Au niveau international, les meilleurs joueurs de chaque pays qualifié disputent le Championnat d'Europe de football, dont la phase finale a lieu tous les quatre ans. Si les compétitions nationales et européennes attirent souvent de nombreux spectateurs, seule la phase finale de la Coupe du monde de football offre au grand public la possibilité de voir et d'évaluer les meilleurs joueurs et les meilleures équipes du monde au cours d'un même tournoi;

c) le calendrier de la phase finale de la Coupe du monde de football par rapport à d'autres compétitions de football en Europe

Même si, dans l'esprit du grand public, les billets pour les rencontres du Championnat d'Europe de football représentaient des produits identiques à ceux de la phase finale de la Coupe du monde de football, la participation à l'un de ces tournois ne peut être considérée comme un substitut de la participation à l'autre étant donné qu'ils ont lieu à deux ans d'intervalle;

d) les indices concernant la demande de billets pour la phase finale de la Coupe du monde de football par rapport à l'offre

Dès lors que la demande de billets dépasse largement l'offre, il est peu probable que les consommateurs modifient leur comportement en cas d'augmentation, faible mais significative, du prix de ces billets. Étant donné qu'environ 1,043 million de demandes ont été introduites par le grand public en mesure de fournir une adresse en France pour les 181000 billets individuels vendus par le CFO en 1997, on peut supposer que la demande de billets serait généralement restée inchangée malgré une augmentation du prix d'au moins 10 %.

Produits de remplacement des Pass France 98 vendus en aveugle par le CFO au grand public en 1996 et en 1997

(69) Les Pass France 98 vendus par le CFO en 1996 et 1997 concernaient des matches pour lesquels on ignorait l'identité des équipes participantes. Par conséquent, la demande de Pass France 98 se limitait aux spectateurs qui ne se préoccupaient pas de voir une ou plusieurs équipes en particulier, mais qui voulaient cependant assister à une série de matches de la phase finale devant se dérouler dans un même stade. Ces ventes se distinguaient nettement de celles réalisées par les fédérations nationales de football et les tour-opérateurs européens qui ont vendu des billets individuels, après le tirage au sort des poules, à un moment où les billets pour les rencontres de la phase finale étaient l'objet d'un intérêt et d'une demande sensiblement accrus.

(70) En raison du nombre limité de billets d'entrée distribués à titre individuel à une date bien ultérieure par chaque fédération nationale de football, il est peu probable que les membres du grand public souhaitant acheter le Pass France 98 en aveugle aient considéré les billets vendus par ces fédérations comme des produits de remplacement du Pass France 98 vendu en aveugle directement par le CFO en 1996 et 1997.

(71) Des considérations similaires s'appliquent aux ventes effectuées par les tour-opérateurs européens. En outre, même si les tour-opérateurs européens avaient choisi de vendre une partie ou l'ensemble de leur lot limité de billets sous la forme de Pass France 98, ils auraient probablement vendu la majorité, sinon la totalité de ces produits avec d'autres services, augmentant ainsi sensiblement le prix auquel le Pass France 98 pouvait être obtenu. Par conséquent, lors des ventes par le CFO du Pass France 98 en 1996 et 1997, le grand public n'aurait, en aucune façon, considéré la perspective incertaine des ventes futures par les tour-opérateurs européens comme un substitut des Pass France 98 vendus auparavant par le CFO(26).

Produits de remplacement des billets individuels vendus en aveugle par le CFO au grand public en 1997

(72) En ce qui concerne les 181000 billets individuels vendus par le CFO au grand public en 1997 pour le match d'ouverture, les quarts de finale, les demi-finales, la petite finale et la finale, l'ensemble des fédérations nationales de football n'ont reçu qu'un nombre très limité de billets pour ces matches phares. Seules les fédérations dont les équipes ont franchi les différentes étapes de la seconde phase se sont vu attribuer d'importants lots de billets supplémentaires, dont la majorité a été vendue au grand public désireux de soutenir les équipes participantes. Compte tenu de cette offre limitée, il est peu probable que les consommateurs souhaitant acheter des billets pour ces matches en 1997 aient considéré les fédérations nationales de football comme des sources d'approvisionnement satisfaisantes par rapport au CFO.

(73) En ce qui concerne les billets vendus pour la seconde phase par les tour-opérateurs européens, des considérations similaires s'appliquent étant donné le nombre limité de billets mis à leur disposition. En outre, les tour-opérateurs européens ont vendu la majorité, sinon la totalité de ces billets avec d'autres services, augmentant ainsi sensiblement le prix auquel ils pouvaient être obtenus. Par conséquent, lors des ventes par le CFO de 181000 billets en aveugle pour la seconde phase en 1997, le grand public n'aurait, en aucune façon, considéré la perspective des ventes futures par les tour-opérateurs européens comme solution de remplacement à la distribution des billets assurée par le CFO(27).

Conclusion relative aux marchés des produits en cause

(74) Eu égard à l'analyse qui précède, les marchés des produits en cause sont constitués, aux fins de la présente décision, par:

a) la vente en aveugle au grand public par le CFO de 393200 Pass France 98 en 1996 et en 1997; et

b) la vente en aveugle au grand public par le CFO, en 1997, de 181000 billets individuels pour le match d'ouverture, les quarts de finale et demi-finales, la petite finale et la finale.

Arguments du CFO relatifs aux marchés des produits en cause

(75) Le CFO estime que les marchés des produits en cause sont constitués, dans le cadre de la vente de billets au grand public pour la phase finale de la Coupe du monde, par: i) la vente de Pass France 98 et ii) la vente de billets individuels par le CFO, les fédérations nationales de football et les tour-opérateurs pour tous les matches de la phase finale, qu'ils aient été vendus en aveugle ou à un moment où on savait quelles équipes se rencontreraient. Cela diffère de la conclusion de la Commission dans la mesure où aucune distinction n'est établie entre les ventes de billets individuels par le CFO en 1997 et celles qui ont été réalisées en 1998 par chacun des trois canaux officiels de distribution.

(76) Les marchés en cause visés dans la présente décision tiennent explicitement compte des différentes caractéristiques du Pass France 98 par rapport aux billets individuels. Néanmoins, l'argument du CFO selon lequel les ventes de billets individuels qu'il a réalisées en aveugle en 1997 sont interchangeables avec celles réalisées ultérieurement par lui-même et par d'autres canaux de distribution doit être rejeté. La définition des marchés des produits en cause a pour objet d'identifier les concurrents réels d'une entreprise susceptibles d'influencer son comportement et de l'empêcher d'agir indépendamment de contraintes concurrentielles effectives. Une analyse des conditions dans lesquelles le CFO a vendu, en 1997, les billets individuels pour les matches de la seconde phase confirme que le CFO a pu agir, à ce moment-là, dans un environnement exempt d'une telle pression concurrentielle. Ces billets concernaient des matches prestigieux pour lesquels le nombre de demandes émanant de consommateurs en mesure de fournir une adresse en France a dépassé presque six fois l'offre disponible, malgré le fait qu'on ignorait au moment de la vente quelles équipes s'opposeraient lors de ces rencontres(28). Vu le niveau élevé de la demande et le fait qu'il est peu probable que les consommateurs aient, en 1997, considéré les fédérations nationales de football et les tour-opérateurs européens comme d'autres sources d'approvisionnement réalistes, le CFO était manifestement en mesure de se comporter, en ce qui concerne la vente de ces billets, comme un monopoleur de fait exempt de toute pression concurrentielle d'autres entreprises.

D. MARCHÉ GÉOGRAPHIQUE EN CAUSE

(77) Compte tenu de la demande généralisée de billets dans tout l'EEE(29), la dimension géographique du marché pour la vente par le CFO au grand public de Pass France 98 et de billets individuels en 1996 et 1997 englobe au minimum tous les pays de l'EEE. En dépit de la demande généralisée de ces billets, les conditions de vente du CFO ont artificiellement limité la vente aux membres du grand public domiciliés en France ou en mesure d'indiquer une adresse en France.

Arguments du CFO concernant l'ampleur des ventes de Pass France 98

(78) Dans sa réponse à la communication des griefs de la Commission et pendant l'audition, le CFO a fait valoir que, en ce qui concerne les ventes de Pass France 98 réalisées en 1996 et en 1997, l'exigence de fournir une adresse postale en France n'a eu aucune incidence sur les consommateurs non établis en France et que le marché géographique ne s'étendait donc pas au-delà de la France. Selon le CFO, seul le grand public résidant près des stades de la Coupe du monde aurait souhaité acheter le Pass France 98 étant donné que l'on ignorait quelles équipes participeraient aux matches auxquels ces billets donnaient accès et compte tenu des contraintes imposées par ce produit à l'acheteur (notamment la nécessité de trouver un logement près d'un stade pour une période significative ou de faire autant d'allers et retours que nécessaire entre son domicile et le stade afin d'assister à toutes les rencontres).

(79) À l'appui de cet argument, le CFO a invité la Commission à se reporter à des éléments de preuve indiquant que 71 à 91 % des Pass France 98 avaient été achetés par le grand public résidant dans un département abritant un stade ou dans les départements limitrophes. Le CFO a également invoqué la décision des tour-opérateurs européens de ne pas proposer le Pass France 98 au grand public, ainsi que celle des fédérations nationales de football de ne pas vendre les billets sous la forme de produits du type Pass France 98, comme preuves que la demande de Pass France 98 émanant de l'extérieur de la France était inexistante et que le marché géographique se limitait donc aux riverains des stades français de la Coupe du monde.

(80) La Commission rejette ces arguments. Dans le cas des ventes de Pass France 98, nul ne peut nier qu'un nombre important de consommateurs non domiciliés en France auraient souhaité acheter ces billets, étant donné l'intérêt suscité à l'échelle européenne par la phase finale. Cette affirmation est étayée en partie par une étude des habitudes d'achat des consommateurs non établis en France à l'égard des ventes de billets individuels pour les matches de la première phase et des huitièmes de finale réalisées par le CFO à compter du 22 avril 1998, qui démontre que les consommateurs ne résidant pas en France n'étaient pas exclusivement intéressés par les rencontres auxquelles devait participer leur équipe nationale(30).

(81) Si les consommateurs résidant hors de France avaient eu l'occasion d'acheter le Pass France 98 auprès du CFO, un nombre important d'entre eux auraient vraisemblablement choisi de faire autant d'allers et retours que nécessaire pour pouvoir assister à toutes les rencontres auxquelles le Pass France 98 donnait accès. Si cela est vrai pour les Pass France 98 vendus pour les matches organisés à Lens en raison de la proximité de cette ville avec la frontière belge, on peut aussi raisonnablement supposer que les consommateurs d'autres pays auraient été disposés à se rendre dans d'autres lieux, vu leur facilité d'accès (les stades situés à Bordeaux et à Toulouse, par exemple, étaient facilement accessibles aux consommateurs espagnols tandis que le stade de Marseille l'était aux consommateurs italiens).

(82) En outre et en dépit des statistiques invoquées par le CFO, on peut parfaitement présumer qu'un nombre important de consommateurs résidant hors de France auraient souhaité séjourner dans une ville ou à proximité d'une ville abritant un stade pour la durée de la première phase et (le cas échéant) les huitièmes de finale, combinant ainsi une participation garantie à une série de matches de la phase finale avec un séjour prolongé dans un pays connu pour être une destination populaire auprès des touristes étrangers.

(83) La décision des tour-opérateurs européens de vendre séparément les billets qui leur avaient été distribués sous forme de Pass France 98 ne saurait être interprétée comme une preuve de l'absence de demande de Pass France 98 en dehors de la France. Il est probable que cette pratique, consistant à vendre des billets individuels associés à d'autres services, a davantage été motivée par la volonté de maximiser des recettes que les ventes du Pass France 98 n'auraient pas atteintes. Quant aux ventes réalisées par les fédérations nationales de football, la Commission estime que le fait qu'elles n'aient pas vendu de produits du type Pass France 98 est dénué de pertinence, étant donné la nature des billets qui leur avaient été attribués(31) et l'absence pour elles d'intérêt économique à commercialiser ce genre de billets.

E. POSITION DOMINANTE

(84) Le CFO constituait le seul canal de distribution pour les ventes en aveugle au grand public du Pass France 98 et des billets d'entrée individuels en 1996 et en 1997. De ce fait, le CFO détenait une position dominante sur les marchés en cause, compte tenu de sa faculté d'agir de manière autonome et donc sans restrictions de concurrence.

Responsabilités du CFO en tant qu'entreprise dominante sur les marchés en cause

(85) Conformément à la jurisprudence de la Cour de justice et du Tribunal de première instance des Communautés europénnes, une entreprise qui se trouve en position dominante a la responsabilité particulière de ne pas porter atteinte par son comportement à une concurrence effective et non faussée dans le marché commun. Le champ d'application matériel de cette responsabilité particulière doit être apprécié au regard des circonstances spécifiques de chaque espèce, traduisant une situation concurrentielle affaiblie(32).

(86) En conséquence, la portée de la responsabilité des parties doit être appréciée par rapport au degré de dominance exercé par les parties et aux éventuelles spécificités du marché susceptibles d'influer sur la situation concurrentielle.

(87) En ce qui concerne plus particulièrement la différence significative entre la demande et l'offre de Pass France 98 et de billets individuels vendus par le CFO au grand public en 1996 et en 1997, le CFO était à première vue, en sa qualité de monopoleur de fait, tenu de veiller à ce que les billets d'entrée vendus en 1996 et en 1997 pour les matches de la phase finale soient mis à la disposition du grand public selon des modalités non discriminatoires dans tout l'EEE, bien que la demande de certains billets exprimée par les consommateurs ne résidant pas en France ait été relativement limitée par rapport à la demande du grand public en France. S'il existe des exceptions à ce principe général, chacune doit être examinée au fond et selon une appréciation objective des exigences minimales pour atteindre les buts énoncés.

F. ABUS

(88) Vu: a) les conditions de vente appliquées aux ventes de billets en aveugle réalisées par le CFO en 1996 et 1997; b) les informations y afférentes fournies par le CFO sur son site officiel de la Coupe du monde de la Toile et sur lesquelles le grand public hors de France pouvait raisonnablement s'appuyer et c) les moyens restrictifs mis à la disposition du grand public non établi en France pour réserver des billets d'entrée, le CFO a abusé de sa position dominante sur les marchés en cause parce que son comportement a imposé des conditions de transaction non équitables aux consommateurs résidant hors de France, ce qui a eu pour effet de limiter les débouchés au préjudice de ces consommateurs.

Obligation de communiquer une adresse postale en France

(89) Le grand public ne résidant pas en France avait la possibilité d'acheter des billets directement auprès du CFO à la condition d'indiquer une adresse postale en France à laquelle les billets pouvaient être livrés(33).

(90) Au moment de la vente par le CFO de Pass France 98 et de billets individuels, le grand public résidant en France n'a guère eu de difficultés à fournir une adresse pour l'envoi des billets. En revanche, la majorité du grand public résidant hors de France n'aurait pu obtenir de billets directement auprès du CFO en 1996 et 1997(34) qu'en se conformant à des dispositions totalement arbitraires, impraticables et exceptionnelles(35). Alors qu'il n'est pas certain que le grand public non domicilié en France ait jamais été convenablement informé du fait que les billets pouvaient être achetés directement auprès du CFO, l'obligation d'indiquer une adresse postale en France a eu un effet discriminatoire à l'égard des consommateurs résidant hors de France, car les personnes domiciliées en France étaient nettement mieux placées pour répondre à cette exigence.

(91) Dans les faits, cette discrimination a consisté pour le CFO à imposer aux personnes résidant hors de France des conditions de transaction non équitables et s'est traduite, en ce qui concerne la vente de 393200 billets sous forme de Pass France 98 et de 181000 billets individuels pour le match d'ouverture, les quarts de finale et demi-finales, la petite finale et la finale, par une limitation des débouchés au préjudice des consommateurs résidant hors de France, en violation de l'article 82 du traité CE et de l'article 54 de l'accord sur l'EEE.

Information commerciale fournie par le CFO

(92) À compter du 6 mai 1997, le CFO a fourni sur son site officiel de la Toile des informations sur les moyens permettant au grand public résidant en France et à l'étranger de se procurer des billets pour la phase finale. Le grand public ne résidant pas en France était invité à se procurer des billets auprès des tour-opérateurs autorisés ou des fédérations nationales de football. Il n'était nullement mentionné que les billets d'entrée pouvaient être obtenus directement auprès du CFO. En outre, le CFO a expressément indiqué qu'il ne vendrait pas de billets directement au public non français et que, dès lors, les ressortissants étrangers séjournant en France seraient obligés de prendre contact avec une fédération de football ou un tour-opérateur européen pour acheter des billets.

(93) Cette indication a eu pour effet de limiter exclusivement aux citoyens français ou au grand public domicilié en France la demande de billets individuels vendus en aveugle par le CFO en 1997. À l'inverse, elle a sans doute dissuadé le public non français ou, en tout cas, les personnes non domiciliées en France, de chercher à acheter des billets individuels directement auprès du CFO. De ce fait, en ce qui concerne la vente par ses soins de 181000 billets pour le match d'ouverture, les quarts de finale et demi-finales, la petite finale et la finale, le CFO a gravement limité les débouchés au préjudice du grand public résidant hors de France, en violation de l'article 82 du traité CE et de l'article 54 de l'accord sur l'EEE.

Moyens disponibles pour réserver des billets d'entrée directement auprès du CFO

(94) Parmi les différents moyens permettant au grand public de réserver des billets auprès du CFO, seule la réservation par correspondance était accessible aux consommateurs résidant hors de France. La réservation par téléphone n'était possible qu'à partir du territoire métropolitain français, tandis que la réservation par Minitel (un service télématique utilisé par les personnes résidant en France et spécialement conçu pour elles) n'était accessible au public domicilié hors de France que par une connexion Internet, et encore, moyennant un surcoût de 350 francs français. De même. les billets ne pouvaient être réservés qu'auprès d'agences du Crédit Agricole établies en France.

(95) Compte tenu de la forte demande de Pass France 98 escomptée par rapport à l'offre limitée, la nécessité de réserver des billets rapidement aurait été extrêmement importante pour le grand public. Dès lors, les consommateurs dont le seul moyen d'obtenir des billets était la réservation par correspondance ont été désavantagés vis-à-vis de ceux qui ont eu la possibilité de recourir à d'autres moyens, plus rapides, de réservation de billets.

(96) En ce qui concerne les billets individuels vendus directement par le CFO en 1997, les demandes devaient être déposées entre le 18 septembre et le 18 octobre 1997. Bien que ces billets n'aient pas été attribués selon la règle du "premier arrivé, premier servi", étant donné que les formulaires de demande n'étaient disponibles que dans les agences du Crédit agricole établies en France, les membres du grand public domiciliés en France ont été favorisés par rapport à ceux résidant dans d'autres pays de l'EEE.

(97) Par conséquent, les moyens par lesquels les Pass France 98 et les billets individuels pouvaient être obtenus directement auprès du CFO en 1996 et en 1997 étaient discriminatoires à l'égard du grand public ne résidant pas en France.

Arguments du CFO en ce qui concerne l'abus

(98) Dans sa réponse à la communication des griefs de la Commission, le CFO a fait valoir que, en vertu des pratiques antérieures de la Commission et de la jurisprudence de la Cour de justice, il n'a pas pu abuser d'une position dominante étant donné que certaines des conditions requises pour l'application de l'article 82 du traité CE(36) n'étaient pas remplies.

Comportement ayant un effet sur la structure de la concurrence

(99) Le CFO a fait valoir qu'un comportement constitutif d'une infraction à l'article 82 du traité CE doit affecter la structure de la concurrence dans un marché donné au détriment des concurrents d'une entreprise dominante, étant donné que cette disposition n'est pas destinée à protéger, d'une façon directe, les intérêts des consommateurs(37). Le CFO maintient donc que sa conduite ne relève pas du champ d'application de l'article 82 étant donné que l'exigence de fournir une adresse en France dans le cadre des ventes de billets en 1996 et en 1997 n'a pas altéré la structure de la concurrence dans les marchés en cause.

(100) La Commission ne saurait accepter cette interprétation de l'article 82. Si l'application de l'article 82 exige souvent d'évaluer l'incidence du comportement d'une entreprise sur la structure de la concurrence dans un marché donné, on ne saurait exclure de l'appliquer en l'absence d'une telle incidence. En effet, les intérêts des consommateurs sont protégés par l'article 82, cette protection consistant à interdire aux entreprises dominantes tout comportement susceptible de fausser le libre jeu de la concurrence ou d'être directement préjudiciable aux consommateurs. En conséquence et ainsi que la Cour de justice l'a expressément admis(38), l'article 82 peut être correctement appliqué, s'il y a lieu, aux situations dans lesquelles le comportement d'une entreprise dominante cause un préjudice immédiat aux intérêts des consommateurs malgré l'absence de tout effet sur la structure de la concurrence.

Avantage commercial

(101) Le CFO soutient qu'une entreprise n'abuse de sa position dominante que si elle fait usage des possibilités que lui offrent sa position dominante de façon à profiter d'avantages commerciaux dont elle n'aurait pas bénéficié s'il y avait eu une concurrence normale et suffisamment effective. Le CFO n'a tiré aucun avantage financier ni concurrentiel en exigeant des consommateurs qu'ils indiquent une adresse en France pour acquérir des billets en 1996 et en 1997 et n'a, par conséquent, bénéficié d'aucun avantage commercial par suite de ses activités.

(102) La Commission n'accepte pas cet argument. Si les preuves qu'une entreprise dominante s'est procuré un avantage financier ou concurrentiel par suite de ses activités peuvent établir l'existence d'un abus, elles ne sont pas essentielles pour en faire le constat(39). En l'espèce, le comportement du CFO a eu un effet discriminatoire à l'égard des personnes domiciliées hors de France, qui s'est indirectement traduit par une discrimination fondée sur la nationalité envers ces consommateurs, en violation des principes fondamentaux du droit communautaire. En l'espèce, on ne saurait considérer que ce comportement ne relève pas du champ d'application de l'article 82 du traité CE au motif que le CFO, en sa qualité d'entreprise dominante, n'a tiré aucun avantage commercial ou autre de ses activités.

Limitation des débouchés

(103) Le CFO conteste le point de vue de la Commission selon lequel il a abusé de sa position dominante au sens de l'article 82, point b), du traité CE en limitant les débouchés pour les Pass France 98 et les billets individuels au préjudice des consommateurs résidant hors de France, pour les raisons suivantes:

a) Si les tour-opérateurs européens avaient décidé de vendre le Pass France 98 comme prévu par le CFO, aucune limitation des débouchés ne se serait produite, car les consommateurs résidant hors de France auraient pu l'obtenir sans être tenus d'indiquer une adresse en France. Dans le cas des ventes de billets individuels, le comportement du CFO n'a pas limité les débouchés, car chacun des trois canaux de distribution a proposé des billets au grand public dans tout l'EEE à différentes périodes;

b) Selon la jurisprudence de la Cour de justice(40), une entreprise n'abuse de sa position dominante en limitant les débouchés au sens de l'article 82, point b), du traité CE que si elle profite de l'absence de pression concurrentielle en n'améliorant pas ses performances comme elle y aurait été contrainte dans d'autres circonstances. Étant donné que le nombre de billets était nécessairement limité et que les modalités de vente du CFO n'ont eu aucune incidence sur la qualité du produit consommé, le CFO fait valoir que l'existence d'une pression concurrentielle dans le marché n'aurait pas abouti à une amélioration des performances du CFO et que son comportement ne peut donc être qualifié d'abusif au sens de l'article 82, point b).

(104) La Commission rejette chacun de ces arguments. En tant qu'entreprise dominante sur les marchés des produits en cause, le CFO était tenu de ne pas limiter artificiellement les ventes de billets, que d'autres opérateurs économiques aient ou non vendu ou pu vendre ces billets. En ce qui concerne les arguments du CFO relatifs au champ d'application de l'article 82, point b), du traité CE la nécessité d'indiquer une adresse en France a eu l'effet indéniable de limiter le marché géographique pour la vente des billets d'entrée par le CFO en 1996 et en 1997, au préjudice des consommateurs résidant hors de France. L'application de ces modalités de vente représente un abus de position dominante de la part du CFO au sens des dispositions expresses de l'article 82, point b), une conclusion qui n'est en aucune façon contradictoire avec la jurisprudence de la Cour de justice invoquée par le CFO(41). L'argument du CFO selon lequel il n'aurait pas pu améliorer ses performances dans des conditions de concurrence est donc dénué de pertinence.

G. SÉCURITÉ

(105) Assurer une sécurité effective lors des rencontres de football est essentiel et peut, dans certaines circonstances, justifier la mise en oeuvre de dispositions spéciales pour la vente de billets par les organisateurs de tournois. Néanmoins, afin de déterminer si des considérations de sécurité peuvent justifier des modalités de billetterie qui seraient autrement considérées comme une infraction au droit communautaire, ces dispositions doivent toutes être examinées au fond à la lumière d'une évaluation impartiale des exigences minimales pour atteindre des objectifs raisonnables de sécurité.

Sécurité pendant les matches de football

(106) La principale préoccupation du CFO était de veiller à ce que, conformément aux dispositions de la convention de 1985 précitée, les groupes rivaux de supporteurs des équipes participant à une rencontre donnée soient séparés les uns des autres dans chacun des stades de la Coupe du monde.

(107) Le CFO s'est attaché à opérer cette séparation en attribuant aux fédérations nationales de football dont les équipes participaient à une rencontre donnée des billets pour des sièges situés aux extrémités opposées du stade. Par conséquent, les billets réservés aux groupes rivaux de supporteurs n'ont pas été vendus en aveugle par le CFO, mais ont été proposés à un moment où les identités des équipes participantes étaient connues.

(108) Les billets vendus en aveugle par le CFO en 1996 et en 1997 concernaient des sièges réservés à des spectateurs neutres. Le CFO a vendu ces billets exclusivement aux membres du grand public en mesure d'indiquer une adresse en France et considérés pour toutes les rencontres comme des spectateurs neutres. Le CFO a toutefois précédemment informé la Commission de l'avis formulé par des experts estimant que les consommateurs qui achètent des billets en aveugle sont généralement des spectateurs paisibles qui ne constituent pas un risque particulier pour la sécurité. Cette analyse apparaît raisonnable étant donné que les consommateurs qui achètent ces billets le font manifestement parce qu'ils souhaitent assister à un match de football, quelles que soient les équipes en présence, et ne sont donc pas motivés par un engouement pour une équipe particulière.

(109) Il s'ensuit donc que tout consommateur, indépendamment de sa nationalité, qui achète des billets d'entrée en aveugle ne devrait, en principe, pas être considéré comme le supporteur d'une équipe particulière aux fins de la sécurité. En conséquence, ces consommateurs ne devraient, en principe, pas être soumis aux dispositions relatives à la séparation des groupes rivaux de supporteurs prévues par la convention de 1985. L'obligation d'indiquer une adresse postale en France, imposée aux consommateurs souhaitant acheter des billets en aveugle auprès du CFO en 1996 et en 1997, était donc excessive et n'a contribué d'aucune manière concrète à maintenir ou à renforcer la sécurité pendant les matches de football.

Arguments du CFO relatifs à la sécurité

(110) Dans sa réponse à la communication des griefs de la Commission et pendant l'audition, le CFO s'est efforcé de justifier ses modalités de vente discriminatoires par des motifs de sécurité. Selon le CFO, s'il avait vendu des billets en 1996 et en 1997 au grand public dans tout l'EEE, les supporteurs des équipes participantes se seraient probablement retrouvés dans les parties du stade réservées aux spectateurs neutres. Par conséquent, le CFO estime que, dans le cadre de la vente de billets en 1996 et en 1997, il n'était pas en mesure de considérer comme neutres tous les spectateurs de l'EEE sans enfreindre en même temps la convention de 1985 ainsi que les lignes directrices y afférentes, qui exigeaient une séparation efficace des groupes rivaux de supporteurs des équipes participantes.

(111) Le CFO a également fait valoir: a) qu'il n'était pas possible, en 1996 et en 1997, de vendre des billets en aveugle et de déterminer la localisation des détenteurs de billets ultérieurement lorsque les identités des équipes participantes seraient connues et b) qu'aucune comparaison ne pouvait être réalisée entre les ventes du CFO en 1996 et en 1997 au grand public en mesure d'indiquer une adresse en France et les ventes du CFO en 1998 au grand public en mesure de fournir une adresse dans l'EEE, étant donné que les ventes de 1998 ont eu lieu après le tirage au sort des poules, alors que les identités des équipes participant aux rencontres de la première phase étaient connues.

(112) L'argument du CFO selon lequel il n'aurait pas pu considérer comme neutres tous les membres du grand public de l'EEE en 1996 et 1997 doit être rejeté. La convention de 1985 mentionne en particulier la nécessité d'assurer une séparation efficace des groupes rivaux de supporteurs au moyen (notamment) d'un contrôle strict des ventes de billets. Si le CFO estimait nécessaire en 1996 et en 1997 de traiter tous les membres du grand public, exception faite de ceux capables de fournir une adresse en France, comme des supporteurs rivaux potentiels aux fins de la vente de billets, cette politique était excessive parce qu'elle ne prenait pas en considération la nature généralement paisible des consommateurs achetant des billets lorsque les identités des équipes participantes ne sont pas encore connues. Ainsi que le CFO l'a lui-même précédemment confirmé(42), les consommateurs achetant des billets en aveugle n'auraient pas présenté de risque particulier pour la sécurité. Par conséquent, le CFO a eu tort de considérer comme des supporteurs rivaux potentiels, aux fins de la sécurité, les membres du grand public qui n'étaient pas en mesure d'indiquer une adresse en France, mais qui souhaitaient lui acheter des billets en 1996 et en 1997.

(113) En tout état de cause, même si l'on avait pu à juste titre considérer que les consommateurs achetant des billets en aveugle présentaient un risque particulier pour la sécurité (hypothèse rejetée par la Commission), il est hautement improbable qu'une personne ayant acheté un billet en aveugle (lui donnant accès à la partie du stade spécifiquement réservée au public neutre) et assistant par hasard à un match auquel participe son équipe nationale se retrouve à côté ou à proximité de supporteurs de l'équipe adverse, étant donné que ces derniers devraient également avoir eu la chance, après avoir acheté des billets en aveugle, d'assister à un match de leur équipe nationale dans la partie du stade réservée au public neutre. C'est pourquoi, en termes statistiques, le risque que le CFO enfreigne les dispositions de la convention de 1985 en appliquant des modalités de vente non discriminatoires en 1996 et 1997 n'était pas significatif.

(114) Eu égard aux considérations qui précèdent, l'incapacité avouée du CFO de déterminer la localisation des détenteurs de billets en aveugle à compter du moment où les identités des équipes participantes ont été connues, ainsi que son moyen selon lequel les modalités de vente mises en oeuvre en 1998 ne peuvent être comparées à celles adoptées précédemment, sont dénués de pertinence aux fins de la présente décision (considérant 111).

H. PARTIE SUBSTANTIELLE DU MARCHÉ COMMUN

(115) Étant donné que le CFO exploitait une position dominante sur les marchés en cause et qu'il a déterminé les conditions dans lesquelles les consommateurs de l'ensemble de l'EEE pouvaient acheter des Pass France 98 et des billets individuels en 1996 et 1997, sa position dominante s'étendait au moins à l'ensemble de l'EEE, et donc à une partie substantielle du marché commun au sens de l'article 82 du traité CE.

I. INCIDENCE SUR LE COMMERCE ENTRE ÉTATS MEMBRES

(116) En ce qui concerne la vente de billets sur les marchés des produits en cause, le CFO a imposé au grand public des conditions de vente qui ont eu pour effet de refuser l'accès à ces marchés à l'écrasante majorité des personnes domiciliées hors de France. De ce fait, l'obligation d'indiquer une adresse en France dans le cadre des ventes de Pass France 98 et de billets individuels en 1996 et 1997 a sensiblement affecté le commerce entre États membres.

Arguments du CFO relatifs à l'incidence sur le commerce

(117) Les arguments avancés par CFO en ce qui concerne l'incidence de son comportement sur le commerce entre les États membres sont examinés aux considérants 78 à 83.

J. NOTIFICATION DU 11 JUIN 1997

(118) Dans sa réponse à la communication des griefs, le CFO a fait valoir que puisque les modalités générales pour la répartition des billets avaient été expliquées à la Commission lors de la notification de juin 1997, toute objection y afférente devrait avoir été formulée à cette époque. Le CFO estime en outre que puisqu'aucun grief de cette nature n'a été exprimé par la Commission, il était en droit de supposer que ses modalités générales de billetterie étaient conformes au droit communautaire. Le CFO considère donc que la décision de la Commission d'engager une procédure contre le CFO constitue une violation du principe de confiance légitime tel que défini par la Cour de justice.

(119) La Commission ne peut souscrire aux déclarations du CFO à cet égard. Si elle admet que dans sa notification, le CFO expliquait les moyens par lesquels les billets seraient vendus par chacun des canaux de distribution officiellement désignés, la Commission n'a pas été informée alors de l'obligation faite aux consommateurs d'indiquer une adresse postale en France dans le cadre des ventes du CFO en 1996 et en 1997(43). En effet, le CFO a expressément indiqué à la Commission que les Pass France 98, bien que devant être principalement vendus aux supporteurs et au public local et régional, seraient en réalité accessibles à tous(44).

(120) En outre, une entreprise qui notifie des accords ou des dispositions spécifiques ne peut, par principe, être autorisée à faire valoir ultérieurement qu'elle était légitimement en droit de supposer que les accords ou les dispositions qui ne figuraient pas dans la notification, mais qui auraient pu être communiqués à la Commission lors de la notification, étaient conformes aux règles de concurrence du traité. Puisque la notification du CFO concernait exclusivement des modalités relatives au système proposé pour la sélection des tour-opérateurs autorisés à vendre des billets d'entrée aux matches de la phase finale en Europe, la Commission était légalement tenue de n'examiner que ces dispositions et il ne peut donc lui être reproché ultérieurement d'avoir décidé d'engager une procédure à l'égard d'autres dispositions sur lesquelles elle n'a pas été formellement invitée à se prononcer.

K. AMENDES

(121) Aux termes de l'article 15 du règlement n° 17, la Commission peut, par voie de décision, infliger à une entreprise une amende de mille euros au moins et de un million d'euros au plus, ce dernier montant pouvant être porté à 10 % du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice précédent par l'entreprise, lorsque, de propos délibéré ou par négligence, celle-ci commet une infraction aux dispositions de l'article 82 du traité CE et de l'article 54 de l'accord EEE.

(122) Le comportement abusif visé par la présente décision, qui a eu pour effet d'établir une discrimination en faveur des consommateurs à même d'indiquer une adresse en France, se traduit indirectement par une discrimination fondée sur la nationalité, étant donné que le CFO a artificiellement et principalement limité la vente des billets aux personnes domiciliées dans un seul État membre. Un tel comportement constitue une violation des principes fondamentaux du droit communautaire.

(123) La Commission constate que les modalités de billetterie mises en oeuvre par le CFO étaient semblables à celles adoptées pour des éditions antérieures de la phase finale de la Coupe du monde, et que les problèmes liés à l'application des règles communautaires de concurrence revêtent un caractère suffisamment particulier pour empêcher de tirer aisément des conclusions sur la base de décisions antérieures de la Commission ou de la jurisprudence de la Cour de justice. La Commission a par conséquent conclu que le CFO ignorait à l'époque que les dispositions mises en oeuvre pour la vente des billets en 1996 et en 1997 violaient le droit communautaire.

(124) La Commission reconnaît aussi que le CFO a pris des mesures positives pour faire en sorte, dans la mesure où il l'a jugé nécessaire, que les modalités de billetterie de la Coupe du monde de football 1998 soient conformes au droit communautaire et national, et cela en prenant contact, de manière formelle et informelle, avec la Commission et les autorités françaises responsables de la concurrence. La Commission relève également la décision prise par le CFO, à la demande de la Commission, de modifier ses dispositions commerciales, afin de donner aux consommateurs de l'ensemble de l'EEE la possibilité de réserver en 1998, directement auprès du CFO, 175500 billets d'entrée individuels.

(125) Tout abus de position dominante devrait normalement être sanctionné par une amende dont le montant serait modulé en fonction de la gravité et de la durée de l'infraction. Toutefois. vu les arguments qui précèdent, la Commission estime qu'il y a lieu de n'infliger au CFO qu'une amende symbolique de 1000 euros. Il ne faudrait cependant y voir aucune ligne de conduite que la Commission entendrait suivre, à l'avenir, dans toutes les affaires similaires,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Le Comité français d'organisation de la Coupe du monde de football 1998 (CFO) a enfreint l'article 82 du traité CE et l'article 54 de l'accord EEE en mettant en oeuvre des dispositions discriminatoires, en 1996 et en 1997, pour la vente au grand public des billets d'entrée pour les rencontres de la phase finale de la Coupe du monde. Ces dispositions ont abouti à imposer aux consommateurs résidant hors de France des conditions de transaction non équitables et se sont traduites, pour la vente par le CFO de 393200 billets sous forme de Pass France 98 et de 181000 billets individuels pour le match d'ouverture, les quarts de finale et demi-finales, la petite finale et la finale, par une limitation des débouchés au préjudice de ces consommateurs.

Article 2

Une amende de 1000 euros est infligée au CFO pour l'infraction visée à l'article 1er.

Article 3

L'amende est payable en euros, dans un délai de trois mois à compter de la date de notification de la présente décision, au compte suivant:

Compte n° 310-0933000-43

Commission européenne

Banque Bruxelles Lambert

Agence européenne

Rond-point Schuman 5 B - 1040 Bruxelles

À l'issue du délai de trois mois, des intérêts sont automatiquement dus au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à ses opérations de prise en pension, au premier jour ouvrable du mois au cours duquel la présente décision a été arrêtée, majoré de 3,5 points de pourcentage.

Article 4

L'entreprise suivante est destinataire de la présente décision: Comité français d'organisation de la Coupe du monde de football 1998 (CFO) 23-25, rue de Berri F - 75008 Paris

La présente décision forme titre exécutoire conformément à l'article 256 du traité CE.

Fait à Bruxelles, le 20 juillet 1999.

Par la Commission

Karel VAN MIERT

Membre de la Commission

(1) JO 13 du 21.2.1962, p. 204/62.

(2) JO L 148 du 15.6.1999, p. 5.

(3) JO 127 du 20.8.1963, p. 2268/63.

(4) Cette approbation ne concernait cependant pas les dispositions mises en question dans la présente décision.

(5) Voir l'article 34 du règlement de la FIFA "Coupe du monde de la FIFA 1998", du 31 mai 1995.

(6) À savoir les licenciés et les membres des clubs français.

(7) Notamment en guise de soutien à des programmes en faveur de la jeunesse.

(8) L'UEFA (Union des associations européennes de football) organise différentes compétitions de football en Europe. Elle compte parmi ses membres toutes les fédérations nationales de football des pays de l'EEE.

(9) Cela concernait exclusivement les rencontres auxquelles participait au moins une équipe représentative d'un pays de la zone UEFA.

(10) Le Pass France 98 portant sur les rencontres devant se jouer au stade de Saint-Denis ne donnait pas à son détenteur le droit d'assister au match d'ouverture de la Coupe du monde. Les Pass France 98 relatifs aux rencontres ayant lieu dans les stades de Lyon et de Nantes permettaient uniquement d'accéder aux rencontres de la première phase, étant donné qu'aucun huitième de finale ne s'y déroulait.

(11) Comme le confirme le CFO dans sa lettre du 4 juin 1998 (annexe 3), en réponse à la demande officielle de renseignements que lui a adressée la Commission le 15 mai 1998.

(12) Seules les fédérations dont les équipes se sont qualifiées pour la seconde phase ont obtenu un nombre important de billets. L'attribution de ces billets n'a pu intervenir qu'après que l'identité des équipes participant aux matches de la seconde phase a été connue.

(13) Ces chiffres ne tiennent par conséquent pas compte des billets attribués par la FIFA après l'achèvement de la première phase du tournoi, le 26 juin 1998.

(14) Voir la réponse du CFO du 27 janvier 1998 à la demande de renseignements de la Commission du 15 janvier 1998.

(15) Voir la réponse du CFO du 4 juin 1998 à la demande de renseignements de la Commission du 15 mai 1998.

(16) Voir le point b) à la page 3 de la lettre adressée par le CFO à la Commission le 11 juin 1998.

(17) Voir la lettre adressée par la Commission au CFO, le 20 février 1998, lui demandant de mettre fin à ce que la Commission considérait comme des pratiques abusives en vertu de l'article 82 du traité.

(18) Voir le considérant 28 ci-dessus.

(19) Voir le document Internet du 13 août 1998 (http://www.france98.com/english/tickets/faq.html), dixième question. Ces dispositions ont été rappelées dans divers communiqués de presse du CFO, qui indiquaient que les billets mis en vente par lui en 1996 et 1997 étaient expressément destinés au grand public résidant en France.

(20) Voir le document Internet du 31 août 1998 (http://www.france98.com/english/tickets/out_france.html).

(21) Dès le 1er avril 1997, tous les Pass France 98 portant sur les rencontres ayant lieu dans huit des dix stades de la Coupe du monde étaient vendus. Seul un nombre limité de Pass France 98 de la catégorie 1, concernant des rencontres devant se jouer aux stades de Montpellier et de Saint-Étienne, restait disponible à la vente. Le 27 mai 1997, tous ces billets avaient également été vendus.

(22) Voir article 3, paragraphe 4, points b) et c), de la convention de 1985.

(23) "Recommandations relatives à des lignes directrices pour le contrôle de la vente des billets lors de rencontres à haut risque (adoptées lors de la 5e réunion du comité permanent de la convention européenne sur la violence et les débordements de spectateurs lors de manifestations sportives, et notamment de matches de football - 1985)" - Groupe de travail ad hoc sur les problèmes pratiques (Strasbourg, le 14 novembre 1996).

(24) Voir la lettre du CFO datée du 4 juin 1998 (point 24), en réponse à la demande officielle de renseignements qui lui a adressée la Commission le 15 mai 1998.

(25) Voir la lettre du CFO à la Commission, datée du 11 juin 1998 (page 3, point b).

(26) Bien qu'aucune explication ne soit donnée, le CFO a tiré une conclusion semblable, en ce qui concerne les ventes de billets réalisées par les tour-opérateurs européens, dans sa notification à la Commission du 11 juin: "[Les tour-opérateurs] forment un marché spécifique... Le marché peut donc, selon le CFO, être défini comme le marché de la vente de billets pour la Coupe du Monde 1998 par les professionnels du tourisme" (point 6.1).

(27) Voir également note 26 de bas de page.

(28) Les ventes en aveugle de ces billets peuvent être opposées à celles de billets concernant les rencontres de la première phase qui, afin de maximiser la participation des supporteurs, ont été commercialisés sous la forme de Pass France 98.

(29) Démontrée par les résultats des ventes du CFO dans les pays de l'EEE à compter du 22 avril 1998, époque à laquelle 45 % des billets ont été vendus à des consommateurs ne résidant pas en France.

(30) points 25 et 26 - Tandis qu'environ 38 % des billets individuels vendus par le CFO après le 22 avril 1998 ont été achetés par le grand public indiquant une adresse en dehors de la France, mais dans des pays dont les équipes s'étaient qualifiées pour la phase finale, seuls 10 % des billets vendus après cette date ont pu être acquis par les supporteurs des équipes participantes, quelle que soit la rencontre. Par conséquent, une forte proportion de membres du grand public résidant hors de France envisageaient d'assister à des matches auxquels ne participait pas leur équipe nationale.

(31) Ce qui n'aurait permis d'intégrer que très peu de billets dans des produits du type Pass France 98.

(32) Voir l'arrêt du Tribunal du 6 octobre 1994 dans l'affaire T-83/91: Tetra Pak II, Rec. 1994, p. II-755, points 114 et 115 des motifs. Dans son arrêt du 2 mars 1983 dans l'affaire 7/82, GVL, Rec. 1983, p. 483, la Cour de justice avait auparavant établi la portée de la responsabilité particulière d'un monopoleur à l'égard d'une conduite discriminatoire fondée sur la nationalité ou le domicile. La Cour avait notamment déclaré: "Un tel refus, par une entreprise ayant un monopole de fait, de prêter ses services à tous ceux qui peuvent en avoir besoin, mais qui ne relèvent pas d'une certaine catégorie que cette entreprise a circonscrite en se basant sur la nationalité ou sur le domicile, doit être considéré comme l'exploitation abusive d'une position dominante au sens de l'article 86, premier alinéa, du traité" (point 56 des motifs).

(33) Réponse à la demande officielle de renseignements de la Commission, du 15 janvier 1998.

(34) Étant donné l'importance accordée par le CFO dans ses informations commerciales à la nécessité d'être domicilié en France et l'annonce faite au grand public qu'il ne répondrait pas aux demandes émanant du public non français, il est permis de douter que le CFO aurait autorisé les personnes résidant à l'étranger à recourir à ces solutions de rechange dans la pratique.

(35) Par exemple, le recours à la poste restante ou aux services d'une ambassade.

(36) Toutes les observations du CFO à cet égard valent également pour l'application de l'article 54 de l'accord EEE.

(37) À ce propos, le CFO soutient que l'article 82 doit être interprété au regard de l'article 3, point g), du traité, qui exige que la concurrence ne soit pas faussée dans le marché intérieur.

(38) Selon l'arrêt de la Cour de justice du 21 février 1973 dans l'affaire 6/72, Continental Can, Rec. 1973, p. 215, point 26 des motifs, l'article 82 ne vise pas seulement les pratiques susceptibles de causer un préjudice immédiat aux consommateurs, mais également celles qui leur causent un préjudice en portant atteinte à une structure de concurrence effective.

(39) Par exemple, les cas de tarification excessive exigent que soit évaluée la mesure dans laquelle (s'il y a lieu) une entreprise dominante a pratiqué des prix excessifs par rapport à la valeur économique du produit ou du service. Par conséquent, avant de pouvoir tirer quelque conclusion en matière de tarification excessive, il convient généralement de déterminer dans quelle mesure ladite entreprise a pu obtenir un avantage commercial dont elle n'aurait pu bénéficier autrement dans des conditions de concurrence normales.

(40) Affaires citées par le CFO: affaire 41/90 Höfner, Rec. 1991, p. I-1979 et affaire 179/90 Merci, Rec. 1991, p. I-5889.

(41) Voir note 40 de bas de page.

(42) Lettre du CFO du 4 juin 1998 (point 24) répondant à la demande officielle de renseignements de la Commission du 15 mai 1998.

(43) Il convient en outre de souligner que lors de la notification, le CFO avait déjà vendu tous les Pass France 98 au grand public selon les modalités abusives en question.

(44) Au point 4.1 ii) de la notification du CFO du 11. juin 1997.