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Document 52010AE0098

Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE en ce qui concerne les exigences de fonds propres pour le portefeuille de négociation et pour les retitrisations, et la surveillance prudentielle des politiques de rémunération» COM(2009) 362 final – 2009/0099 (COD)

OJ C 339, 14.12.2010, p. 24–28 (BG, ES, CS, DA, DE, ET, EL, EN, FR, IT, LV, LT, HU, MT, NL, PL, PT, RO, SK, SL, FI, SV)

14.12.2010   

FR

Journal officiel de l’Union européenne

C 339/24


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE en ce qui concerne les exigences de fonds propres pour le portefeuille de négociation et pour les retitrisations, et la surveillance prudentielle des politiques de rémunération»

COM(2009) 362 final – 2009/0099 (COD)

(2010/C 339/06)

Rapporteur général: M. MORGAN

Le 10 septembre 2009, le Conseil a décidé, conformément à l'article 47, paragraphe 2, du traité instituant la Communauté européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE en ce qui concerne les exigences de fonds propres pour le portefeuille de négociation et pour les retitrisations, et la surveillance prudentielle des politiques de rémunération

COM(2009) 362 final – 2009/0099 (COD).

Le 29 septembre 2009, le Bureau du Comité a chargé la section spécialisée «Marché unique, production et consommation» de préparer les travaux du Comité en la matière.

Compte tenu de l'urgence des travaux, le Comité économique et social européen a décidé, conformément aux dispositions de l'article 57 du règlement intérieur, au cours de sa 459e session plénière des 20 et 21 janvier 2010 (séance du 20 janvier 2010) de nommer M. MORGAN rapporteur général, et a adopté le présent avis par 162 voix pour, 4 voix contre et 18 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1   La proposition de directive à l'examen, dénommée ci-après la directive, tire son origine des conclusions et recommandations figurant dans le rapport du Groupe de Larosière, auquel le CESE est largement favorable, comme il l'a indiqué dans l'un de ses avis (1). La préparation de la directive s'est effectuée dans le contexte du dispositif international de Bâle II relatif à l'adéquation des fonds propres des banques. Le Conseil ECOFIN a modifié le texte suite au sommet du G20 organisé à Pittsburgh. Le CESE appuie les grandes lignes de la directive, qui modifiera la directive 2006/48/CE concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice et la directive 2006/49/CE sur l'adéquation des fonds propres des entreprises d'investissement et des établissements de crédit.

1.2   Le présent avis explique le rôle important qu'ont joué les banques dans la crise financière et comment la réglementation et la surveillance ont échoué. Le CESE estime que la directive traitera bon nombre des défaillances réglementaires et aidera à corriger les déficiences majeures dans la gestion et la gouvernance des banques. En soi, ces règles n'amenderont pas le comportement égocentrique des banques, qui a été un facteur essentiel de la crise. Il reste nécessaire de reconnaître les intérêts des acteurs du secteur bancaire et de placer la responsabilité sociale des grands établissements bancaires au centre des préoccupations, au lieu de la reléguer à l'arrière-plan.

1.3   Les principaux ferments de la crise étaient les suivants:

L'octroi de crédits, par les établissements de crédit, à des clients insolvables.

Dans de nombreux cas, des dispositifs de rémunération et de motivation inappropriés pour le personnel des établissements de crédit chargé des contacts avec les particuliers.

La création de titres de crédit par les banques sans que ces dernières fassent preuve de la diligence requise.

L'acquisition de ces titres de crédit par les banques sans que ces dernières fassent preuve de la diligence requise.

Des réserves en capital inadéquates, en particulier dans le portefeuille de négociation des banques.

La création de véhicules hors bilan sans les doter de fonds propres suffisants.

Une motivation perverse et des structures de rémunération inadéquates qui ont conduit à privilégier les gains à court terme et à prendre des risques excessifs.

Le caractère procyclique de la réglementation.

Une débâcle systémique de la gestion des risques en ce qui concerne la qualité des titres de crédit détenus, l'adéquation des réserves en capital et l'impact de systèmes de rémunération variable sur l'agrégation des risques au niveau institutionnel.

Un manque de transparence dans les affaires bancaires empêchant les prêteurs, emprunteurs, contreparties, investisseurs, analystes et même les directeurs indépendants d'agir conformément aux attentes sur les marchés financiers.

L'insuffisance de la surveillance macroprudentielle et de la coordination internationale.

1.4   Le CESE se réjouit que la Commission s'emploie à affiner ses propositions concernant respectivement la rémunération et les exigences de fonds propres, suivant ainsi le Conseil de stabilité financière (Financial Stability Board - FSB) et le Comité de Bâle. Si le secteur bancaire revêt une importance économique fondamentale pour l'UE, c'est aussi une industrie potentiellement mobile. Pour éviter de porter atteinte à l'industrie financière de l'UE en procédant à un arbitrage réglementaire, il est essentiel de trouver des solutions à l'échelon mondial et il se pourrait bien que l'UE doive montrer l'exemple en les proposant. C'est dans l'ordre des choses. L'UE ne peut pas se permettre d'adopter une réglementation qui s'écarte sensiblement des pratiques en vigueur ailleurs.

1.5   Le CESE soutient les principes essentiels proposés en matière de définition et de mise en œuvre des politiques de rémunération. Si certains de ces principes avaient existé avant la crise, de nombreux versements scandaleux et embarrassants auraient été évités.

1.6   Dans la plupart des secteurs industriels, les montants en valeur absolue des primes octroyées aux dirigeants sont définis par un pourcentage maximal du salaire. Le CESE estime que le secteur bancaire devrait appliquer des formules similaires à ses systèmes de rémunération variable, car il n'y a rien dans le rôle des banquiers qui justifie un système débridé de rémunération. Dans ce contexte, le CESE accueille favorablement l'exigence imposée aux établissements de crédit et entreprises d'investissement importants (CIIF) d'établir des comités de rémunération.

1.7   Le CESE constate que la directive s'intéresse davantage à la structure de la rémunération qu'aux montants de celle-ci. Il se déclare toutefois préoccupé par ces montants. Le CESE attend des nouvelles exigences de fonds propres, conjuguées à l'analyse prudentielle des politiques et plans de rémunération proposés, qu'elles limitent la rémunération variable excessive versée par le passé. Le CESE reconnaît qu'en soi, l'UE ne dispose d'aucune compétence en matière de niveaux de salaire en tant que tels.

1.8   Le CESE relève avec satisfaction que les dispositions relatives aux rémunérations ne préjugent pas des dispositions de l'article 137 alinéa 5 du traité, des principes généraux du droit national des contrats et du travail ainsi que des droits, le cas échéant, des partenaires sociaux en matière de négociations collectives.

1.9   Le CESE soutient pleinement l'augmentation des exigences de fonds propres détaillées dans la directive à l'examen. Celles-ci impliquent en particulier:

Des dispositions visant à renforcer les exigences de fonds propres pour les actifs que les banques détiennent en portefeuille de négociation en vue d’une cession à court terme.

Des exigences de fonds propres renforcées pour les titrisations complexes, en ce qui concerne tant le portefeuille bancaire que le portefeuille de négociation.

1.10   Le Comité relève que la proposition ne prévoit plus de processus de surveillance renforcée des retitrisations qui sont particulièrement complexes. Cependant, le CESE attend de la part des organismes de surveillance toute la diligence voulue à cet égard et relève que ces organismes conservent toute leur panoplie de mesures correctives.

1.11   Le point de vue du CESE est influencé par les faits qu'a mis au jour (2) l'enquête de l'organisme américain de contrôle des opérations de bourse (SEC) sur l'effondrement de la valeur des titres garantis par des créances hypothécaires sur des biens immobiliers à usage dhabitation, des obligations garanties par des créances (obligations CDO) et d'autres actifs de ce type. Les agences de notation du crédit (ANC) ont contribué à la création irresponsable de ces actifs toxiques, qui ont coûté des centaines de milliards de dollars au monde développé. Les banques d'investissement sont coupables d'avoir aidé et encouragé les ANC, alors que la plupart des banques ne saisissaient pas les risques inhérents à la détention de ces titres. Comme l'a fait remarquer le groupe de Larosière, «Il est essentiel que ces changements réglementaires [concernant les ANC] aillent de pair avec une diligence et un jugement accrus de la part des investisseurs, et avec une amélioration de la surveillance». Dans son avis sur les ANC, le CESE souscrivait pleinement à cette recommandation et appuie aujourd'hui la proposition de directive parce qu'elle oblige les banques et les autorités de surveillance à agir dans le sens prescrit.

1.12   Le point 4 de l'Annexe I de la directive à l'examen définit des exigences de publicité nouvelles et étendues, sur lesquelles le CESE marque son accord. Si ces exigences avaient existé avant la crise, un grand nombre de problèmes auraient pu être évités. Le CESE se félicite également que l'accent ait été mis, à l'Annexe II, sur la liquidité et le risque d'événement. En l'absence d'une analyse technique des dispositions, le CESE a reçu de la Commission l'assurance que ces mesures permettront de conjurer la crise de liquidité du marché qui est au cœur de la crise bancaire.

1.13   Le CESE comprend qu'on entend traiter des questions de liquidité à l'échelon de l'entreprise dans la prochaine directive sur les exigences de fonds propres (CRD4). Suite à la crise, il s'agit là d'une exigence fondamentale.

1.14   Le CESE relève que la proposition de directive n'aborde nulle part la question des structures de titrisation (SPV, correspondant en France aux fonds communs de créances) hors bilan, puisqu'en effet, cette dernière est couverte par la directive de la Commission 2009/83/CE publiée en juillet 2009. L'article 95 de la directive relative aux exigences en fonds propres prévoit déjà qu'une banque doit calculer les exigences de fonds propres pour les actifs qu'elle initie, sauf si elle obtient un «transfert significatif de risque». La directive de juillet restreint significativement l'interprétation de cette disposition de deux manières. Si cette clarification avait été d'application avant la crise, elle aurait considérablement réduit la contribution des structures de titrisation (SPV) à la crise.

1.15   Le CESE trouve préoccupant que la vente de crédits inadaptés aux consommateurs ait joué un rôle important dans la genèse de la crise. Il semble que la communication sur les «produits d’investissement de détail» (PRIP) (3) s'attaque bel et bien au problème, dans la mesure où elle a pour objectif de réglementer les conditions de vente et, en particulier, le contrôle des conflits d'intérêts survenant au cours de ce processus. Elle se fonde sur les conditions imposées par la directive 2004/39/CE sur les marchés d'instruments financiers.

1.16   La publicité est essentielle pour reconstruire le marché financier. Le CESE observe avec satisfaction que le degré de publicité proposé et l'accès dont disposent les parties prenantes concernées sont suffisants pour que celles-ci obtiennent les informations dont elles ont besoin pour pouvoir traiter avec un établissement. La publicité exigée par la proposition de directive doit être entendue à la lumière de l'article 147 de la directive 2006/48/CE sur les fonds propres réglementaires qui régit la publication des communications requises des établissements de crédit.

1.17   En novembre 2009, les dirigeants du groupe HSBC et de la Standard Chartered Bank ont exprimé leur préoccupation quant au caractère excessif et préjudiciable des exigences de fonds propres avancées par les organes de régulation, estimant qu'elles freineraient à la fois la relance et le développement. Certes, l'on peut s'attendre à pareille conception des choses de la part des banques, mais il ne s'agit pas là de banques ordinaires. Et l'appui qu'elles ont reçu du gouvernement n'est pas ordinaire non plus. À vrai dire, ce sont les dirigeants de la Standard Chartered qui ont contribué à la conception du dispositif britannique de soutien aux banques. Le CESE demande instamment à la Commission de veiller à ce que les exigences de fonds propres suggérées assorties de l'obligation de diligence et d'un contrôle adéquat des risques, soient proportionnées au risque.

1.18   Le CESE estime que la Commission devrait analyser, pour le comprendre, l'impact de la proposition de directive actuellement à l'étude, et ce non seulement sur les capitaux détenus par les banques, mais également sur la croissance économique, sur la création d'emplois et sur la sortie de crise en général.

2.   Introduction

2.1   Une brève explication de la crise du système bancaire permettra de replacer la directive dans son contexte. Le rapport de Lord Turner, le président de l'autorité des services financiers (Financial Services Authority) du Royaume-Uni, présente d'autres perspectives sur la crise (4).

2.2   Les activités des banques de détail impliquent l'octroi de prêts à long terme sur la base de dépôts à court terme. Cela s'appelle de la transformation de maturité et présente des risques. Si tous les déposants décidaient de retirer leur argent, la banque ne disposerait pas de liquidités en suffisance. De même, si les emprunteurs ne respectent pas leurs obligations de remboursement, le capital de la banque se trouverait réduit avec un risque d'insolvabilité. Pour se prémunir contre ce risque, les banques de détail conservent des réserves d'actifs liquides dans leur bilan et passent des accords de soutien avec d'autres banques, la banque centrale pouvant jouer le rôle de prêteur en dernier ressort. La réglementation bancaire définit le montant des fonds propres qu'une banque doit conserver pour faire face à ses obligations afin de se protéger contre les cas de défaillance des emprunteurs.

2.3   Les banques déploient également des activités de négociation pour compte propre. Pour ce faire, elles détiennent aussi des fonds propres, qui étaient habituellement modestes, dans la mesure où les banques se fondaient sur le fait que les pertes du portefeuille de négociation étaient censées être faibles, car ces actifs étaient considérés comme facilement négociables. Les fonds propres destinés à soutenir le portefeuille de négociation étaient calculés au moyen d'une méthode de «valeur à risque» (VAR). Les banques avaient également établi des structures de titrisation (SPV) hors bilan. Ces structures à fort effet de levier étaient potentiellement risquées mais étant donné qu'elles étaient considérées comme hors bilan, les organes de régulation les ont traitées comme des entités indépendantes. Or, quand la crise a éclaté, un grand nombre de SPV ont être réinscrites au bilan, pour une question de réputation, bien qu'aucune réserve en capital n'avait été prévue précédemment pour faire face à un tel cas.

2.4   Les autorités publiques ont joué un rôle dans le développement de la crise bancaire. Les organes de régulation ont approuvé les fonds propres détenus par les banques. Les autorités monétaires – à l'exception de la BCE – ont maintenu les taux d'intérêt à des niveaux trop faibles trop longtemps. Même au sein de l'euro-zone, les taux étaient beaucoup trop bas pour certaines économies. Au niveau politique, le gouvernement des États-Unis a obligé les banques à accorder des prêts hypothécaires imprudents à une clientèle mal notée (clientèle «subprime»). Les taux d'épargne diminuaient dans le monde occidental, conduisant ainsi l'Asie à financer la croissance du crédit. Ces facteurs ont encouragé les banques à prendre des risques.

2.5   Les banques ont accordé des crédits hypothécaires risqués et les ont regroupés dans des lots qu'elles ont ensuite vendus. Cette activité s'est étendue au-delà des frontières des États-Unis. Avec l'aide des agences de notation, ces lots ont été découpés en tranches assorties de différentes notations et rapportant un intérêt beaucoup plus élevé que les investissements sans risque. La retitrisation a ensuite reconditionné les créances qui avaient été coupées en tranches de sorte qu'il est devenu impossible de remonter jusqu'aux titres sous-jacents. Une multitude de titres de crédit aux acronymes divers est devenue une composante majeure de la négociation pour compte propre et des véhicules de titrisation. Le risque majeur que représentait cette concentration n'a pas été identifié.

2.6   La création et la distribution de titres de crédit se sont transformées en tsunami. Comme l'a montré Lord TURNER, l'ampleur et l'importance des transactions effectuées dans le cadre de l'économie casino dépassaient de très loin celles des activités économiques de l'économie réelle. Pour aller encore plus vite, les banques ont cessé de s'appuyer sur les dépôts et ont financé leurs prêts par des emprunts à très court terme sur les marchés financiers de gros. La transformation de la maturité avait «perdu le nord». Et lorsque la Fed a commencé à relever ses taux, le casino a fermé ses portes.

2.7   Les détenteurs de crédits hypothécaires de type subprime ont commencé à ne plus pouvoir rembourser. Les agences de notation ont revu massivement à la baisse la notation des titres de crédit. Partout, les banques ont essayé de vendre ces actifs, ce qui a conduit à une débâcle systémique. Les prix ont plongé. La négociabilité a cessé d'être synonyme de liquidité. Les institutions bancaires ne connaissaient plus la situation financière de leurs homologues. La confiance s’est donc évanouie et les opérations interbancaires sur les marchés de gros ont été paralysées. Le manque de liquidité a mis tous les types de banques en difficulté. On a laissé Lehman Brothers faire faillite, tandis que de nombreuses autres banques établies aux États-Unis ou ailleurs ont eu besoin d'un soutien massif de leur gouvernement pour survivre.

2.8   Les systèmes de rémunération avaient tendance à renforcer la prise de risques dans les établissements de crédit. Les incitations ont amené à se focaliser à tous les niveaux sur les profits à court terme, en négligeant les risques à long terme. La spirale des opérations interbancaires a engendré une économie artificielle sans aucun rapport avec l'économie réelle, au sein de laquelle les récompenses s'éloignaient des normes en vigueur dans le monde réel. La qualité des portefeuilles de prêts s'est gravement détériorée. Les opérateurs économiques et autres agissaient sous le coup de pressions à court terme similaires. Dans certains cas, même le personnel chargé des contacts avec les particuliers était poussé, à grand renfort d'incitations, à étendre les facilités en matière de cartes de crédit et d'hypothèque en faveur de clients à la solvabilité douteuse.

2.9   Les réformes du système de régulation doivent être fondées sur les enseignements tirés de la crise. La quantité et la qualité des fonds propres des banques doivent être améliorées de façon radicale. Il conviendrait également d'accroître de manière substantielle les fonds propres détenus au regard des portefeuilles de négociation et de revoir la formule de la valeur à risque. Les calculs des fonds propres doivent devenir anticycliques et l'évaluation des risques beaucoup plus prudente. Les risques de liquidité inhérents à la transformation de la maturité doivent être reconsidérés, car, durant la crise, ni la négociabilité propre des actifs ni les marchés de gros n'ont offert suffisamment de liquidité.

2.10   Les réformes du système de régulation ne suffiront pas. Les mécanismes du marché et un engagement plus important des actionnaires sont essentiels. Le principal problème est le manque de transparence. La vraie nature des prêts bancaires, des actifs, des réserves et des profils de risque des banques doivent être publics. Cette transparence permettra aux prêteurs, aux emprunteurs, aux actionnaires, aux conseils d'administration et aux analystes de se comporter sur le marché comme ils le doivent.

2.11   Il convient de remédier à la défaillance des autorités – politiques, monétaires et de régulation – de manière à ce que les banques reviennent à la prudence et exigent la même attitude de la part de leurs clients. Dans certains États membres, il est nécessaire de protéger les clients de détail contre un octroi de prêts trop facile par les établissements de crédit.

2.12   Il convient d'améliorer la gouvernance des entreprises. La gestion et la surveillance générale des risques doivent être repensées de fond en comble. Il y a lieu d'envisager les rémunérations dans une perspective à plus long terme. Elles doivent étayer et non compromettre la gestion des risques et devraient être en adéquation avec les intérêts à long terme des actionnaires et des parties prenantes. La rémunération de toutes les catégories de personnel dont les activités professionnelles sont susceptibles d'avoir une incidence significative sur le profil de risque d'une banque devrait être déterminée à l'aune de ce profil.

2.13   La crise bancaire a mis en lumière les problèmes que pose la combinaison des activités de banque de détail et de banque d'investissement au sein d'une même institution qui peut sembler trop énorme pour faire faillite. À maints égards, cette combinaison est judicieuse, dans la mesure où de nombreuses activités de banque d'investissement procurent les facilités requises aux clients de détail comme aux entreprises. La question centrale est celle de la nécessaire garantie implicite et souvent explicite que l'État offre aux particuliers qui déposent de l'argent dans une banque. Cela introduit un risque moral dans les services bancaires d'investissement et peut encourager une prise de risque excessive. Après le crash de 1929, la loi américaine Glass-Steagall a consacré la séparation institutionnelle entre banque de détail et banque d'investissement. Elle a été abrogée en 1999, en raison de l'ampleur des chevauchements apparus au fil du temps entre les deux activités. Si l'on veut éviter de séparer ces dernières, par exemple au moyen d'une nouvelle loi Glass-Steagall, il est essentiel que les exigences de fonds propres soient suffisamment strictes pour empêcher la banque d'investissement de causer la perte de la banque de détail.

3.   Contenu essentiel de la directive de la Commission

Les modifications apportées au texte de la directive suite au sommet de Pittsburgh, s'avérant pertinentes pour la position du CESE, sont ajoutées en italique.

3.1   Les prises de risques excessives et imprudentes du secteur bancaire ont conduit des établissements financiers à la faillite et provoqué des problèmes systémiques dans les États membres et dans le monde. Les autorités de surveillance et de réglementation, dont le G20 et le comité européen des contrôleurs bancaires, s'accordent à considérer que les structures de rémunération inadéquates ont contribué à cette crise. À cet égard, les principes et les normes établis par le Conseil de stabilité financière (CSF) et approuvés et adoptés au niveau international revêtent une importance particulière.

3.2   Afin d'empêcher que des structures de rémunération mal conçues aient un effet néfaste, il convient de prévoir une obligation expresse faite aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement de mettre en place et de maintenir des politiques et des pratiques de rémunération compatibles avec une gestion efficace des risques.

3.3   Il importe que la nouvelle obligation relative aux politiques et aux pratiques de rémunération soit mise en œuvre d'une manière cohérente. Il convient, par conséquent, de définir des principes de base afin que la structure de rémunération n'encourage pas les prises de risques excessives et soit compatible avec la propension au risque, les valeurs et les intérêts à long terme de l'établissement.

3.4   Parmi les principes fondamentaux figurent notamment les points suivants:

La politique de rémunération permet et promeut une gestion du risque saine et effective et n'encourage pas une prise de risque excédant le niveau de risque toléré de l'établissement de crédit.

La politique de rémunération est conforme à la stratégie économique, aux objectifs, aux valeurs et aux intérêts à long terme de l'établissement de crédit.

La mesure des performances s'effectue dans un cadre pluriannuel afin de garantir qu'elle se fonde sur des performances à plus long terme et que le paiement effectif de la rémunération liée aux performances est étalé sur une période qui tienne compte du contexte cyclique des affaires de l'entreprise et de ses risques économiques.

Les paiements liés à la résiliation anticipée d'un contrat correspondent à des performances effectives et ne doivent pas être conçus pour récompenser l'échec.

La rémunération variable garantie est exceptionnelle et survient uniquement dans le contexte de l'embauche de nouveau personnel. Dans ce cas, la garantie est limitée à la première année de travail.

Au moins 50 % de la rémunération variable devrait être versée sous forme d'actions ou d'instruments adéquats autres que monétaires, soumis à une politique de rétention appropriée.

Le paiement d'une partie importante des primes significatives est reporté pendant une durée appropriée et lié aux performances futures de l'établissement. 40 %, voire 60 % dans le cas des cadres dirigeants, au moins de ce paiement devraient être reportés pendant une durée qui ne peut être inférieure à trois ans, assortie d'une acquisition progressive des droits.

La rémunération variable, y compris la partie différée, n'est versée ou acquise que si son montant est compatible avec la situation financière de l'établissement.

3.5.   Les établissements de crédit et entreprises d'investissement «importants» sont tenus d'établir un comité de rémunération. «L'importance» d'un établissement de crédit ou d'une entreprise d'investissement se définit par sa taille, son organisation interne, ainsi que la nature, la portée et la complexité de ses activités.

3.6   Les autorités compétentes doivent également être habilitées à imposer des mesures ou des sanctions, financières ou non, en cas de violation de l'exigence relative à l'obligation de mettre en œuvre des politiques de rémunération compatibles avec une gestion saine et efficace des risques. Ces mesures et ces sanctions doivent être efficaces, proportionnées et dissuasives.

3.7   Afin de favoriser la convergence des modalités de surveillance dans le domaine de l'évaluation des politiques et des pratiques de rémunération, le comité européen des contrôleurs bancaires doit veiller à l'existence de lignes directrices en matière de bonnes politiques de rémunération dans le secteur bancaire.

3.8   Dans la mesure où des politiques de rémunération et des mécanismes incitatifs mal conçus peuvent porter à un niveau inacceptable les risques auxquels sont exposés les établissements de crédit et les entreprises d'investissement, il convient que les autorités compétentes imposent aux entités concernées des mesures qualitatives ou quantitatives, selon les besoins. Parmi les mesures qualitatives, figure la possibilité d'exiger des établissements de crédit ou des entreprises d'investissement qu'elles réduisent le risque inhérent à leurs activités, y compris les structures de rémunération. Les mesures quantitatives comprennent l'exigence de détenir des fonds propres supplémentaires.

3.9   Afin d'assurer, vis-à-vis du marché, une transparence suffisante de leurs structures de rémunération et du risque qui y est associé, les établissements de crédit et les entreprises d'investissement doivent publier des informations sur leurs politiques et pratiques de rémunération à l'égard du personnel dont les activités ont une incidence non négligeable sur le profil de risque de l'établissement.

3.10   Un régime de fonds propres distinct doit être prévu pour les titrisations qui reconditionnent d'autres titrisations et comportent un risque de crédit plus élevé que les titrisations normales, de manière à dissuader clairement les établissements de crédit et les entreprises d'investissement d'investir dans des titrisations présentant un degré de complexité et de risque particulièrement élevé.

3.11   Une retitrisation reconditionne des expositions de titrisation à risque moyen en de nouveaux titres de créance. Généralement, les agences de notation et les acteurs de marché ont attribué un faible risque de crédit à ce type de produit. Toutefois, compte tenu de leur complexité et de leur sensibilité aux pertes corrélées, ces retitrisations comportent un risque supérieur à celui des titrisations classiques. Par conséquent, la proposition dont il s'agit ici prévoit un ensemble d’exigences de fonds propres supérieures à celles qui s’appliquent aux positions de titrisation simple de même notation.

3.12   Compte tenu des déficiences récemment observées, il convient de renforcer les critères applicables aux modèles internes servant à calculer les exigences de fonds propres relatives au risque de marché. Il y a lieu notamment de veiller à ce qu'ils assurent une couverture plus complète des risques en ce qui concerne les risques du crédit dans le portefeuille de négociation. Par ailleurs, les exigences de fonds propres doivent comprendre un élément adapté aux situations de crise afin de renforcer les exigences de fonds propres en cas de détérioration du marché et afin de réduire les risques de procyclicité.

3.13   Sans préjudice des informations expressément requises par la directive, les exigences de publicité doivent avoir pour objet de fournir aux acteurs du marché des informations précises et complètes sur le profil de risque des établissements. Par conséquent, les établissements doivent être tenus de communiquer des informations supplémentaires qui ne sont pas expressément prévues par la directive dans la mesure où elles sont nécessaires pour réaliser cet objectif.

3.14   Dans le domaine de la titrisation, il convient de renforcer considérablement les exigences de publicité applicables aux établissements. Ces exigences doivent également tenir compte, par exemple, des risques associés aux positions de titrisation dans le portefeuille de négociation.

Bruxelles, le 20 janvier 2010.

Le Président du Comité économique et social européen

Mario SEPI


(1)  JO C 318 du 23.12.2009, p. 57.

(2)  JO C 277 du 17.11.2009, p. 117.

(3)  COM(2009) 204 final.

(4)  Le Rapport Turner, UK Financial Services Authority, mars 2009.


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