EUR-Lex Access to European Union law

Back to EUR-Lex homepage

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 52014DC0469

LIVRE VERT Tirer le meilleur parti des savoir-faire traditionnels européens: vers une extension possible de la protection des indications géographiques de l’Union européenne aux produits non agricoles

/* COM/2014/0469 final */

52014DC0469

LIVRE VERT Tirer le meilleur parti des savoir-faire traditionnels européens: vers une extension possible de la protection des indications géographiques de l’Union européenne aux produits non agricoles /* COM/2014/0469 final */


LIVRE VERT

Tirer le meilleur parti du savoir-faire traditionnel de l’Europe: une possible extension de la protection de l’indication géographique de l’Union européenne aux produits non agricoles

Table des matières

Introduction. 4

I — Tirer le meilleur parti des IG: avantages potentiels de l’extension de la protection des IG de l’UE aux produits non agricoles. 6

1. Les IG dans l’UE: situation actuelle. 6

1.1 Qu’est-ce qu’une IG?. 6

1.2 Le cadre juridique de la protection des IG.. 6

1.2.1 Le cadre juridique international 6

1.2.2 Le cadre juridique dans l’UE.. 7

1.2.2.1 Protection unitaire limitée aux produits agricoles et alimentaires au niveau de l’UE.. 7

1.2.2.2 Cadres juridiques nationaux différents pour des produits non agricoles. 8

2. Avantages économiques, sociaux et culturels potentiels de l’extension de la protection des IG aux produits non agricoles au niveau de l’UE.. 8

2.1 Le potentiel économique des IG non agricoles. 8

2.2 Avantages pour le consommateur 9

2.3 Soutenir les efforts internationaux de l’UE pour renforcer la protection des IG.. 10

2.4 Préserver et mettre en valeur les traditions, le savoir-faire, la diversité des expressions culturelles et le patrimoine culturel européens. 11

3. Problèmes et défis pour rendre des produits non agricoles potentiellement admissibles à la protection d'une IG   12

4. Autres solutions que la protection harmonisée de l’UE.. 13

II — Solutions de protection des IG au niveau de l’UE.. 15

1. Objectifs et critères de protection. 15

1.1 Quel label: noms et symboles. 15

1.2 Quelles indications doivent être exclues de la protection des IG?. 16

2. À quoi la protection des IG devrait-elle s’appliquer? Approche transversale ou approche sectorielle?  17

3. Le lien entre produit et territoire. 17

3.1 À quel point le lien avec le territoire doit-il être marqué?. 17

3.2 Qualité et spécification des produits. 18

3.3 Notoriété liée au produit 19

4. Comment renforcer la protection. 20

4.1 Harmonisation des lois nationales. 20

4.2 Création d’un système unique à l’échelle de l’Union. 20

5. Enregistrement 20

5.1 Rôle des administrations nationales dans un système d’enregistrement de l’UE.. 21

5.2 Administration d’un registre de l’UE.. 22

5.3 Contenu du processus. 22

5.3.1 Demandeurs. 22

5.3.2 Opposition à l’enregistrement d’une IG.. 23

5.3.3 Redevances. 23

6. Champ de protection. 23

6.1 Niveau de protection accordé. 23

6.2 Contrôle et application des droits des IG.. 24

6.3 Durée de la protection des IG non agricoles. 25

7. Après l’enregistrement 25

7.1 Annulation de la protection. 25

7.2 Conflits potentiels entre IG et marques. 26

Conclusion. 26

Introduction

À l'heure de la mondialisation, l’éventail des produits offerts au consommateur est presque illimité. Pour faire un choix en connaissance de cause, les consommateurs doivent recueillir et comparer les informations sur le prix et les caractéristiques d’un nombre croissant de produits. Le prix et les caractéristiques de base d’un produit peuvent ne pas être les seuls facteurs déterminants. Les consommateurs recherchent également des façons de déceler les produits authentiques, originaux et de qualité, et s’attendent à ce que la qualité et les caractéristiques spécifiques annoncées présentent les propriétés qu’ils apprécient, pour lesquelles ils sont souvent prêts à payer un supplément.

Pour obtenir ce résultat, la notoriété et/ou les caractéristiques qualitatives associées aux produits en raison de leur origine particulière peuvent être concrétisées dans ce que l’on nomme une «indication géographique» caractérisant le produit. Les indications géographiques (IG) sont des indications qui identifient les produits comme provenant d’un pays, d’une région ou d’une localité et dont la qualité, la notoriété ou d’autres caractéristiques particulières du produit sont essentiellement imputables à leur provenance géographique, par exemple le Bordeaux (vin), le Vetro di Murano (verre) ou le Prosciutto di Parma (jambon).

Les IG sont de toute évidence pertinentes pour les produits agricoles, les denrées alimentaires, les vins et autres boissons alcoolisées, lorsque leur provenance géographique est liée à des qualités provenant soit directement du sol ou du climat (par exemple le vin) ou d’une combinaison de facteurs naturels et de méthodes traditionnelles de transformation utilisées dans la région (par ex. la Bayerisches Bier - bière). Toutefois, l’utilisation des IG ne se limite pas aux produits agricoles. Une IG peut également mettre en exergue les qualités spécifiques d’un produit qui sont dues à des facteurs humains associés au lieu d’origine des produits, tels que certaines techniques de fabrication et la tradition. Tel est le cas, par exemple, des articles artisanaux, qui sont généralement faits main à l’aide des ressources locales naturelles et intégrés dans les traditions des communautés locales.

L’Union européenne (UE) est riche de ces produits non agricoles authentiques, basés sur des connaissances et des méthodes de production traditionnelles, qui trouvent souvent leur origine dans le patrimoine culturel et social d’un lieu géographique particulier, par exemple le Český křišťál (cristal de Bohême), les tartans écossais, le Marmo di Carrara (marbre de Carrare) ou la Meissner Porzellan (porcelaine de Meissen). Tous ces produits font partie des connaissances et du savoir-faire traditionnels de l’Europe; ils sont donc importants pour son patrimoine culturel et contribuent à l’économie culturelle et créative. Ils présentent également un potentiel économique considérable, étant donné que les conditions adéquates de leur exploitation sont remplies. L’innovation et le progrès technologique sont déterminants pour tirer le meilleur parti de l’expertise et du patrimoine locaux.

L’UE est liée par des règles concernant la protection des IG au titre de l’accord relatif aux aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC), qui s’applique aux 159 membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et couvre les produits tant agricoles que non agricoles. Dans tous les pays de l’OMC, les IG doivent être protégées afin d’éviter d’induire le public en erreur quant à la provenance des produits et d'empêcher une concurrence déloyale. Les membres de l’OMC sont autorisés à utiliser différents instruments juridiques pour y parvenir. Certains membres de l’OMC, dont 15 États membres de l’UE, disposent d'une législation sui generis relative à la protection des IG des produits non agricoles.

Au niveau de l’UE, la protection unitaire des IG est actuellement assurée pour les vins, les spiritueux, les vins aromatisés ainsi que pour les produits agricoles et les denrées alimentaires. Il n’existe pas, actuellement, d’harmonisation ou de protection unitaire des IG des produits non agricoles au niveau de l’UE. Chaque État membre dispose de ses instruments juridiques, ce qui crée des niveaux variables de protection juridique en Europe. Les producteurs non agricoles qui souhaitent protéger une IG dans l’UE doivent s’assurer qu’ils bénéficient d’une protection distincte dans chaque État membre, ce qui ne semble pas conforme aux objectifs du marché intérieur.

La Commission a cerné le problème dans sa communication de 2011, intitulée Vers un marché unique des droits de propriété intellectuelle[1], et a proposé une analyse approfondie du cadre juridique existant pour la protection des IG des produits non agricoles dans les États membres, et ses implications pour le marché intérieur.

L’étude sur la protection des indications géographiques des produits non agricoles dans le marché intérieur (ci-après l'«étude») a été commandée afin d’y donner suite en 2012[2]. Selon l’étude, publiée par la Commission en mars 2013, les instruments juridiques actuels à la disposition des producteurs aux niveaux national et européen sont insuffisants. Le 22 avril 2013, la Commission a organisé une audition publique afin de discuter des résultats de l’étude et d'offrir une plateforme à un large débat sur la nécessité d’une protection plus efficace des IG des produits non agricoles au niveau de l’UE. Bon nombre des parties prenantes présentes allaient dans le même sens que l’étude et étaient favorables à une meilleure protection des IG des produits non agricoles au niveau de l’UE.

À la lumière des résultats de l’étude et de l’audition publique, la Commission a décidé de poursuivre ses travaux d’analyse en publiant le présent livre vert. Celui-ci vise à consulter toutes les parties prenantes, de la manière la plus large possible, sur la nécessité, dans l’Union, de renforcer la protection des IG des produits non agricoles et, le cas échéant, sur l’approche qui devrait être adoptée. Toutes les parties intéressées sont invitées à commenter les questions soulevées dans le présent livre vert, en répondant aux questions spécifiques. La Commission prendra en compte les résultats de cette consultation pour décider s'il convient d'agir au niveau de l’UE.

I — Tirer le meilleur parti des IG: avantages potentiels de l’extension de la protection des IG de l’UE aux produits non agricoles

1. Les IG dans l’UE: situation actuelle

1.1 Qu’est-ce qu’une IG?

Une IG est un signe, généralement un nom, utilisé pour des produits qui ont une origine géographique précise et possèdent des qualités, des caractéristiques ou une notoriété essentiellement dues à ce lieu d’origine. En général, une indication géographique contient le nom du lieu d’origine des produits ou consiste en ce dernier. Ce nom peut être utilisé collectivement par toutes les entreprises de la région en question qui fabriquent un produit donné selon une méthode préconisée. Le champagne et le Prosciutto di Parma sont des exemples d'IG célèbres dans le monde entier.

L’objectif de la protection d’une IG en tant que droit de propriété intellectuelle est d’assurer une concurrence équitable pour les producteurs et de fournir au consommateur des informations fiables sur le lieu et/ou la méthode de production et la qualité du produit[3]. La protection accordée par les IG est déterminante pour la préservation de produits traditionnels et de haute qualité ainsi que pour le savoir-faire et les emplois dans ce secteur. La protection des IG offre donc un soutien aux petites et moyennes entreprises (PME) et aux fabricants. Les IG soulignent la relation entre l’activité humaine, la culture, la terre et les ressources, et contribuent à la protection des biens immatériels tels que la notoriété et les normes de qualité.

La protection des IG favorise également l’investissement dans de nouvelles technologies et dans l’innovation afin de protéger la haute qualité des produits tout en maintenant la compétitivité.

Les IG ont des caractéristiques spécifiques qui les distinguent des autres droits de propriété intellectuelle: elles ne sont généralement pas la propriété d’une seule organisation, comme c’est généralement le cas des marques ou des brevets. Les IG appartiennent à toute une communauté, à savoir, à tous les producteurs dont les produits proviennent de la zone géographique définie et qui satisfont aux spécifications énoncées pour l’IG.

1.2 Le cadre juridique de la protection des IG

1.2.1 Le cadre juridique international

Un certain nombre de traités administrés par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) prévoient la protection des IG, tout particulièrement la convention de Paris de 1883 pour la protection de la propriété industrielle[4] et l’arrangement de Lisbonne concernant la protection des appellations d’origine et leur enregistrement international[5]. En outre, les articles 22 à 24 de l’accord sur les ADPIC traitent de la protection internationale des indications géographiques au sein de l’OMC[6].

Ces accords internationaux permettent d’octroyer la protection des IG à tous les types de produits, tant agricoles que non agricoles. Cependant, ils diffèrent de manière significative quant à la définition, au champ, aux mesures de mise en œuvre qui y sont liées et à d’autres aspects de la protection des IG.

1.2.2 Le cadre juridique dans l’UE

En Europe, la protection des IG existe pour les produits tant agricoles que non agricoles. Les produits agricoles et les denrées alimentaires (vins, spiritueux) peuvent bénéficier d’une protection unitaire accordée exclusivement au niveau de l’UE. Les IG non agricoles sont uniquement protégées au niveau national ou régional, au moyen de différents cadres juridiques.

1.2.2.1 Protection unitaire limitée aux produits agricoles et alimentaires au niveau de l’UE

Au niveau de l’UE, la protection unitaire des IG a été établie pour les vins (1970), les spiritueux (1989), les vins aromatisés (1991) et d’autres produits agricoles et denrées alimentaires (1992). Le principal objectif de ces systèmes est de promouvoir la qualité, la variété et la valeur dans la chaîne alimentaire, de préserver le savoir-faire traditionnel du secteur et de stimuler la diversification et l’emploi dans les zones rurales. Dans le cadre de ces systèmes, les noms protégés des produits couverts bénéficient d’une protection unitaire étendue dans toute l’UE, et ce à travers une seule procédure de demande. À la fin avril 2014, 336 noms de spiritueux, 1 577 noms de vins et 1 184 noms de denrées alimentaires et de produits agricoles étaient enregistrés au niveau de l’UE. La valeur estimée des ventes pour les IG de l’UE, en 2010, s’élevait à 54,3 milliards d’EUR, dont 11,5 milliards d’EUR de ventes à l’exportation (15 % des exportations du secteur des aliments et des boissons de l’UE).

La Cour de justice de l’Union européenne a confirmé qu’une IG constitue un droit de propriété intellectuelle[7]. Le système de protection de l'UE est exclusif et empêche les États membres d’appliquer des régimes distincts, parallèles, nationaux ou régionaux (comme dans le cas des marques, par exemple)[8]. Par ailleurs, ce sont des systèmes nationaux qui réglementent la première étape du processus de demande d’enregistrement des IG dans l’UE et assurent leur mise en application administrative (en procédant à des vérifications officielles concernant la conformité aux spécifications du produit fixées par les producteurs et en contrôlant l’utilisation d’une IG sur le marché)[9].

Le système de l’UE de protection des IG des produits agricoles est généralement considéré comme une réussite, comme l’a illustré une récente étude commandée par la Commission européenne[10]. Il a apporté des avantages tangibles aux consommateurs et aux producteurs, tels que des informations détaillées et une garantie de qualité pour les consommateurs, des marges bénéficiaires plus stables pour les producteurs, une meilleure visibilité, résultant souvent de la participation aux foires commerciales, un accès à de nouveaux marchés nationaux et/ou d’exportation et un meilleur accès aux fonds de promotion et aux aides à l’investissement pour les producteurs. La protection des IG contribue également au maintien des infrastructures et des emplois locaux, notamment dans les zones plus défavorisées, ce qui profite à l’ensemble de la société.

1.2.2.2 Cadres juridiques nationaux différents pour les produits non agricoles

Les législations des États membres sur la protection des IG non agricoles n’ont pas encore été harmonisées. Dès lors, les cadres juridiques en la matière varient de manière significative d’un État membre à l’autre. Il existe des différences importantes dans les définitions, les procédures et le coût d’enregistrement, le champ de protection et les moyens d’exécution. Par conséquent, les IG non agricoles sont soumises à des niveaux de protection variables, en fonction du pays de production, s’appuyant sur la protection de base énoncée dans l’accord sur les ADPIC.

Dans tous les États membres, les produits non agricoles relèvent des lois sur la concurrence déloyale ou la tromperie des consommateurs. La législation sur les marques, qui peut également offrir un certain degré de protection, est aussi concernée. Actuellement, 15 États membres[11] disposent de systèmes spécifiques offrant une protection des IG des produits non agricoles. Ces législations revêtent des formes diverses, allant de dispositions régionales ou nationales relatives à un artisanat en particulier (par ex. la céramique) à des lois spécifiques concernant un certain produit (par ex. les couteaux de Solingen) ou des lois régionales ou nationales qui protègent tous les produits non agricoles portant une IG[12].

Question: 1. Voyez-vous des avantages ou des inconvénients aux différents niveaux et formes de protection des IG des produits non agricoles existant dans les différents États membres? Veuillez expliquer votre réponse.

2. Avantages économiques, sociaux et culturels potentiels de l’extension de la protection des IG aux produits non agricoles au niveau de l’UE

2.1 Le potentiel économique des IG non agricoles

Un système harmonisé des IG dans l’UE présenterait deux grands avantages potentiels pour les producteurs de produits non agricoles. Accroître le caractère distinctif et l’attrait de leurs produits grâce à la garantie de la qualité et de la provenance dans l’UE pourrait stimuler les ventes[13] et il y aurait une protection plus efficace et uniforme à l’échelle de l’UE contre les pertes engendrées par la contrefaçon et l’imitation.

La protection des IG peut s’appliquer à tous les types de produits non agricoles et méthodes de production, des produits de faible ou moyenne technologie, par exemple le Český křišťál (cristal de Bohême), à des produits de plus haute technologie. Récemment, l’étude a estimé que l’emploi direct et indirect dans le secteur des IG non agricoles en Europe s'élevait à 4,08 millions de postes[14]. Ceux-ci sont essentiellement situés dans des PME établies dans les régions les plus pauvres[15]. Deux tiers des régions d’où proviennent les produits non agricoles portant une IG présentent un taux de pauvreté ou un taux de chômage supérieur à 20 %.

Garantir la notoriété et/ou la qualité d’un produit non agricole bénéficiant de la protection d’une IG dans l’UE pourrait aider les producteurs à accéder aux fonds de promotion et à l’aide à l’investissement des autorités publiques et faciliter un meilleur accès aux foires commerciales. La possibilité d’adhérer à un régime harmonisé des IG à l’échelle de l’UE pourrait également améliorer l’organisation collective et la gestion du nom protégé par les associations de producteurs.

Une IG réputée pourrait également apporter davantage de publicité au lieu ou à la région d’origine et produire des effets multiplicateurs, par exemple en encourageant le tourisme[16], les foires commerciales et les activités culturelles et, en conséquence, créer davantage d’opportunités d’emploi[17].

L’emploi généré par un produit donné dans le cadre d’une IG ne peut généralement être transféré ailleurs, en raison de ses liens intrinsèques avec un territoire. De ce point de vue, améliorer la prospérité de certaines régions en accordant la protection d’une IG à des produits non agricoles pourrait contribuer au maintien des emplois et de la richesse dans certaines régions économiquement fragiles.

Questions: 2. Estimez-vous qu’une protection UE accrue et harmonisée des IG des produits non agricoles, au niveau de l’UE, puisse avoir des effets économiques positifs sur le marché intérieur comme exposé ci-dessus? 3. Estimez-vous qu’une telle protection pourrait avoir des répercussions négatives pour l’économie de l’UE?

2.2 Avantages pour le consommateur

Les IG permettent aux consommateurs qui prêtent de l’attention à la provenance géographique des produits, qui sont sensibles à la culture ou aux traditions que ces produits représentent, ou qui se soucient des caractéristiques spécifiques ou de la qualité présentes dans les produits, de faire des choix sûrs et en connaissance de cause, fondés sur des informations fiables[18]. Les IG visent à fournir aux consommateurs la certitude qu’un produit possède une qualité, des caractéristiques et/ou une notoriété particulières en raison de son lieu d’origine spécifique, s’il s’agit d'un élément qu’ils apprécient.

Les vérifications officielles ou les mécanismes de contrôle visant à garantir que les produits utilisant une IG protégée respectent les spécifications sont un élément clé des systèmes actuels de l’UE des IG dans le secteur agricole. La protection des IG constitue un outil pour empêcher une utilisation frauduleuse du nom d’une IG sur le marché. Elle n’a pas pour but de limiter le choix des produits disponibles pour les consommateurs, mais elle réserve plutôt l'usage d'une dénomination spécifique à des produits qui respectent les spécifications et qui ont un lien géographique clair. Elle n’empêche pas d’autres producteurs de commercialiser le même type de produits sous un nom différent. En substance, les IG sont conçues pour éviter aux consommateurs de se retrouver avec des produits qui n’ont pas les qualités et les caractéristiques qu’ils attendent et pour lesquels ils pourraient être disposés à payer un supplément[19].

Questions: 4. Considérez-vous qu’une protection UE harmonisée des IG des produits non agricoles puisse bénéficier aux consommateurs? 5. Estimez-vous que cette protection a des conséquences négatives potentielles pour les consommateurs?

2.3 Soutenir les efforts internationaux de l’UE pour renforcer la protection des IG

La création d’une protection unitaire pour les IG des produits non agricoles dans l’UE peut également avoir un impact positif sur la négociation d’accords commerciaux avec des pays tiers qui souhaiteraient obtenir une meilleure protection pour leurs IG non agricoles dans l’UE. L’absence d’un système UE harmonisé et cohérent de protection des IG pour les IG non agricoles affecte la capacité de l’UE à négocier bilatéralement dans ce domaine et à obtenir une meilleure protection pour les IG agricoles de l’UE dans ces pays. La protection des IG non agricoles des pays tiers sur le marché de l’UE est devenue, de plus en plus, un facteur important dans un certain nombre de négociations bilatérales avec les partenaires commerciaux de l’UE. Ces derniers ont souvent une tradition remarquablement riche en produits artisanaux et produits non agricoles notoires: par exemple, l’Inde protège certaines IG non agricoles qui se rapportent aux saris, aux peintures sur soie et aux châles.

Au niveau multilatéral à l’OMC, les efforts de négociation de l’UE pour améliorer le niveau de protection des IG pourraient également bénéficier d’un système européen de protection unitaire des IG non agricoles. Lors des négociations de l’OMC du programme de Doha pour le développement, l’UE est intervenue afin d’étendre à tous les produits le niveau élevé de protection actuellement accordé aux seuls vins et spiritueux.

Question: 6. Voyez-vous des avantages ou des inconvénients potentiels à une protection UE harmonisée des IG des produits non agricoles en matière de relations commerciales de l’UE avec les pays tiers? Si oui, où se situent-ils?

2.4 Préserver et mettre en valeur les traditions, le savoir-faire, la diversité des expressions culturelles[20] et le patrimoine culturel européens

La meilleure façon pour des produits non agricoles typiques, admissibles à une IG, d'être concurrentiels passe par leur authenticité, leur qualité distinctive et d’autres caractéristiques appréciées par les consommateurs. Ces produits sont soumis à la pression constante de produits usurpant leur notoriété, qui sont souvent de moindre qualité et sont vendus à des prix moins élevés. Les produits admissibles à une IG peuvent faire recette si la concurrence est basée sur des pratiques loyales; toutefois, si des imitations bénéficient de la notoriété, des attentes en termes d’authenticité et de qualité des produits originaux en utilisant le nom géographique autour duquel la notoriété s’est forgée, les produits originaux risquent finalement de cesser d’être fabriqués et de disparaître, à l’instar de l’industrie lituanienne du lin. Les produits portant une IG maintiennent en vie un savoir-faire traditionnel et précieux, sont transmis de génération en génération. Leurs méthodes de production et les activités connexes offrent des repères à la société locale qui se sont établis au fil du temps. Les produits portant une IG soutiennent les réseaux de coopération parmi les producteurs et entre les producteurs et d’autres organismes locaux intéressés, par exemple des organismes publics et des organisations touristiques. Ils contribuent dès lors à la création d’un capital social dans une région. En définitive, une composante importante du patrimoine historique, culturel et social de l’Europe serait endommagée si les produits portant une IG disparaissaient à cause d’un manque de protection adéquate.

Questions: 7. Estimez-vous qu’une protection harmonisée des IG non agricoles au niveau de l’UE contribuerait à préserver le patrimoine culturel et artistique traditionnel reflété dans les produits admissibles? Veuillez expliquer votre réponse. 8. Une telle protection contribuerait-elle à renforcer le capital social dans les régions de production?

3. Problèmes et défis pour rendre des produits non agricoles potentiellement admissibles à la protection d'une IG

Plus la notoriété et la reconnaissance d’une IG sont fortes, plus il est probable que des concurrents tenteront d’en tirer profit et de faire une utilisation abusive du nom sur des produits qui ne proviennent pas de la zone géographique spécifique et/ou qui ne répondent pas aux spécifications du produit concerné ou aux caractéristiques de qualité que le nom implique. L’utilisation abusive d’une IG entraîne une perte de revenus et de part de marché pour les commerçants légitimes et peut porter une atteinte à la réputation et générer des frais de justice supplémentaires.

Selon l’étude, 57,4 % des produits examinés (n=94) indiquaient des problèmes et des pertes majeurs résultant d’une utilisation abusive de leur IG[21]. Il s’agit notamment:

de produits d’imitation provenant du même pays[22], d’autres pays de l’UE[23] ou de pays tiers, en particulier de l’Asie[24]; de l’évocation du nom protégé pour des produits sans aucun lien, par exemple la mention «pierre belge» pour une fausse Pierre bleue de Belgique, des marbres turcs commercialisés sous l’appellation «Botticino Royal» et «The New Botticino»[25]; ou de l’évocation du nom protégé pour des produits qui ne sont pas de même type, par exemple du granit chinois, de l’ardoise indienne et de la pierre calcaire d’autres pays qui se font appeler «pierre naturelle de Castille-León».[26]

Les frais d’une action en justice contre les contrevenants peuvent représenter une charge financière importante pour une entreprise. Par exemple, le coût estimé pour que Český granát (République tchèque) intente une action en justice ou saisisse les instances administratives s’élève à 200 000 CZK (environ 7 770 EUR) par an, et pour Solingen, il est d’environ 50 000 EUR par an[27]. En fonction de la situation, les frais pour assurer une protection efficace peuvent être nettement plus élevés.

L’étude montre que les producteurs adoptent de nombreuses stratégies pour se protéger des infractions, telles que des lettres de protestation (par exemple, Harris Tweed, Schwarzwälder Kuckucksuhr), des campagnes de lutte contre la contrefaçon (par exemple, Swiss Watches), l’enregistrement de marques (par exemple, la Ceramica Artistica e tradizionale di Vietri sul Mare) ou une action en justice (par exemple, Deruta ceramics, Murano).

Selon la conclusion de l’étude, le résultat de toutes ces actions est cependant souvent incertain, en raison de l’absence d’un cadre juridique unitaire dans l’UE pour la protection des IG non agricoles, donnant lieu à divers systèmes avec différents degrés de protection, d’application et sans cadre universel clair.

Questions: 9. Estimez-vous qu’une protection UE harmonisée des IG des produits non agricoles puisse aider les producteurs à se défendre contre les imitations et usages abusifs? Veuillez expliquer votre réponse. 10. Comment des producteurs concurrents pourraient-ils se protéger contre les excès des IG?

4. Autres solutions que la protection harmonisée de l’UE

Selon l'étude, les actuels instruments nationaux prévoient un certain degré de protection lorsqu'ils sont utilisés pour assurer la protection à l'échelle de l'UE des IG des produits non agricoles.

Les lois sur la concurrence déloyale[28] et la tromperie des consommateurs, qui existent dans tous les États membres de l’UE, prévoient une protection contre les pratiques commerciales déloyales, y compris les informations trompeuses quant aux principales caractéristiques d’un produit, telles que sa provenance géographique[29]. Cependant, dans la pratique, ces lois sont limitées quant à la mesure dans laquelle elles peuvent offrir une protection efficace contre l’utilisation abusive de dénominations non agricoles.

En outre, ces lois diffèrent encore de manière significative d’un État membre à l’autre. Par exemple, différentes instances nationales, régionales ou locales[30] (par ex. en Espagne) ou associations privées de consommateurs (par ex. en Allemagne) sont chargées de faire appliquer ces lois, ce qui génère de multiples coûts, procédures et exigences formelles. Selon l’étude[31], dans les pays où la mise en application passe par ce type d'organismes, aucun exemple d’action pour protéger les IG non agricoles n’a été répertorié.

En outre, il ressort de l’étude que les producteurs n’entament pas souvent de procédure civile contre les pratiques déloyales car les frais peuvent être importants et les éléments de preuve sont souvent difficiles à établir[32].

La protection des marques a également ses limites. Elle donne le droit au titulaire d’empêcher quiconque d’utiliser la marque. La marque (nom, logo, etc.) choisie ne doit pas présenter de lien avec les produits ou leur origine. En revanche, une IG protégée vise à garantir aux consommateurs que les produits sont fabriqués dans un certain lieu et présentent en conséquence des qualités spécifiques. Dès lors, une marque ne peut généralement pas fournir les mêmes informations et garanties qu’une IG.

Dans certains cas, une IG peut bénéficier d’une certaine protection au titre de la législation sur les marques, plus spécifiquement par l’intermédiaire de marques collectives ou de certification. Les marques collectives sont détenues collectivement par un groupe de producteurs (par exemple, une association) et peuvent être utilisées par plus d’une personne, tant que l’utilisateur est un membre du groupe et respecte les règles que le groupe a fixées. Une marque de certification est détenue par une entité juridique de certification qui vérifie que la marque est utilisée conformément aux normes de certification. Le certificateur contrôle l’utilisation de la marque et a le droit exclusif d’empêcher une utilisation non autorisée. Le certificateur ne peut généralement utiliser la marque lui-même et l’utilisation est ouverte à toute personne qui satisfait aux normes de certification. Ces types de protection présentent certaines des caractéristiques de la protection des IG. Toutefois, la législation générale sur les marques ne prévoit pas de normes prédéfinies, notamment un lien avec une zone géographique spécifique, et laisse le titulaire entièrement libre de définir ses propres règles d’utilisation. En conséquence, les marques collectives et de certification sont dépourvues des caractéristiques fondamentales d’un régime d’IG[33]. Le système actuel des marques de l’UE ne couvre pas les marques de certification mais permet aux producteurs des IG d’enregistrer leur nom en tant que marque communautaire collective.

Dans la majorité des cas, les réglementations régionales ou nationales sur des artisanats spécifiques traitent uniquement des stratégies collectives pour promouvoir ou protéger des artisanats individuels et locaux. Les lois spécifiques sur les produits fixent en réalité les spécifications relatives aux produits (par exemple, les couteaux de Solingen, le Tweed Harris, le Bordado da Madeira). Les législations régionales et nationales existantes sur la protection à l’échelle du secteur ne sont pas harmonisées, et diffèrent considérablement sur des aspects essentiels, tels que la définition d’une IG, le champ de protection, les procédures d’enregistrement, les redevances, les contrôles et la mise en application. En outre, une protection par des législations nationales ne peut que garantir le respect de l’IG dans l’État membre concerné. Celles-ci n’offrent pas de protection dans l'ensemble de l’UE ni ne garantissent des conditions équitables pour la protection sur le marché unique.

Question: 11. Que pensez-vous de ces options à une protection harmonisée des IG non agricoles?

II — Solutions de protection des IG au niveau de l’UE

Une réponse à l’échelle de l’UE aux défis exposés ci-dessus pourrait revêtir diverses formes. Une meilleure protection des IG devrait être compatible avec le cadre juridique européen et international existant et devrait répondre aux besoins tant économiques que des parties concernées. Le système existant des IG agricoles constitue un point de comparaison clair. Dans la section suivante, la Commission recueille les avis des parties intéressées sur plusieurs paramètres jugés essentiels pour concevoir une éventuelle initiative de l’UE sur la protection des IG des produits non agricoles.

1. Objectifs et critères de protection

Les éventuels objectifs pour tout nouvel ensemble de mesures vont du respect des exigences minimales concernant la protection des IG fixées par les ADPIC, à la définition de critères supplémentaires, tels que ceux figurant dans la législation de l’UE sur les IG agricoles.

1.1 Quel label: noms et symboles

Le label le plus fréquemment utilisé pour faire référence à un produit admissible à la protection d'une IG est son nom. Ce dernier comprend très souvent le nom d’une zone géographique (lieu, région ou pays spécifique, par ex. Herend[34]), éventuellement associé au nom des produits eux-mêmes, par exemple le tartan écossais[35] ou la tapisserie d’Aubusson[36].

Toutefois, un nom non géographique peut également constituer une dénomination d’IG, à condition qu’elle soit associée sans équivoque avec le lieu d’origine. L’extension de la définition d’une IG à ce type de nom permettrait de couvrir un plus grand nombre de produits. Cette solution a également été adoptée par le système de l’UE relatif aux IG agricoles, en vertu duquel, par exemple, le fromage feta[37] et le vin mousseux espagnol Cava[38] sont protégés en tant qu’IG.

Une autre option, qui permettrait une couverture encore plus large, serait la protection d’une IG constituée par des signes ou symboles non textuels qui sont associés sans équivoque à une certaine région, un lieu ou un pays spécifique, par exemple les contours d’une zone géographique[39].

Questions: 12. Si un nouveau système était élaboré au niveau de l’UE, devrait-il protéger les IG qui couvrent des noms non géographiques qui sont associés, sans ambigüité, à un lieu déterminé? 13. Le cas échéant, comment le système pourrait-il veiller à ce que cette protection n’affecte pas les droits d’autres producteurs? 14. Une protection similaire devrait-elle également couvrir des symboles tels que les contours d’une région géographique? Si oui, dans quelles conditions?

1.2 Quelles indications doivent être exclues de la protection des IG?

L’accord sur les ADPIC prévoit plusieurs exemptions possibles de l’obligation d’assurer la protection d’une IG. Il s’agit notamment des termes génériques[40], des cas où il existe une marque antérieure litigieuse[41] et, dans une certaine mesure, des cas impliquant des indications géographiques homonymes[42]. Un terme est considéré générique s’il s’agit du nom commun pour le type de produit ou de service (plutôt qu’un exemple spécifique de produit ou de service) dans le territoire concerné du pays où la protection est demandée. Par exemple, le terme «eau de Cologne» désigne à présent un certain type de parfum, indépendamment du fait qu’il soit ou non produit dans la région de Cologne, en Allemagne. Des IG homonymes sont celles qui sont orthographiées ou prononcées de manière similaire, mais qui identifient des produits provenant de lieux différents, en général dans des pays différents. Il n’y a pas de raison, en principe, pour que ces produits ne puissent être autorisés à coexister. Toutefois, des conditions peuvent être posées à cette coexistence afin d’éviter que les consommateurs soient induits en erreur.

Ces exceptions sont reflétées dans les règlements de l’UE relatifs aux IG des produits agricoles[43]. Les règlements ajoutent d’autres exemptions d’enregistrement, lorsque les dénominations entrent en conflit avec le nom d’une variété végétale ou d’une race animale[44] et sont susceptibles d’induire le consommateur en erreur quant à la véritable origine du produit. Si ces cas spécifiques ne sont pas susceptibles d’être pertinents dans le contexte de produits non agricoles, il est nécessaire de déterminer si les spécificités des produits non agricoles justifieraient d’ajouter d’autres exceptions à celles exposées dans l’accord sur les ADPIC.

Question: 15. Estimez-vous qu'il est nécessaire d’ajouter d’autres exceptions à la protection des IG que celles déjà prévues dans les ADPIC? Veuillez expliquer votre réponse.

2. À quoi la protection des IG devrait-elle s’appliquer? Approche transversale ou approche sectorielle?

Une approche sectorielle établirait des règles spécifiques pour différentes catégories de produits, par exemple ceux pour lesquels la présence de matières premières est particulièrement importante (par ex. la pierre). C'est actuellement la structure au niveau européen dans le domaine agricole (où il existe des règlements distincts en matière d’IG pour le vin, les spiritueux, les vins aromatisés ainsi que les produits agricoles et des denrées alimentaires), mais cette scission semble essentiellement due à des raisons historiques. Par ailleurs, une approche transversale énoncerait les éléments fondamentaux du système de manière générale, à appliquer à toutes les catégories de produits.

Questions: 16. Estimez-vous qu'il est nécessaire d’établir une différence entre les régimes de protection en fonction des catégories de produits non agricoles concernés (approche sectorielle)? Le cas échéant, veuillez expliquer pourquoi. 17. Estimez-vous que certains produits doivent être exclus de la protection des IG au niveau de l’UE? Le cas échéant, veuillez spécifier.

3. Le lien entre produit et territoire

3.1 À quel point le lien avec le territoire doit-il être marqué?

Une IG doit identifier un produit comme provenant d’un territoire, d’une région ou d’une localité spécifique, lorsqu'une certaine qualité, notoriété ou caractéristique des produits est le résultat de sa provenance géographique. Une IG est utilisée en commerce pour établir un lien entre la qualité, la notoriété ou d’autres caractéristiques du produit et le lieu d’origine. Un «lien de causalité» spécifique entre la qualité, la notoriété ou d’autres caractéristiques du produit et sa provenance géographique définie est requis, étant donné que ces propriétés dépendent des conditions naturelles (caractéristiques spécifiques géologiques, hydrologiques, du sol et du climat) du lieu de production et/ou des façons dont les sociétés humaines les travaillent (à savoir, le savoir-faire élaboré dans cette région/les compétences particulières développées au fil des ans par les experts locaux).

Le lien naturel peut revêtir différentes formes. Le règlement (UE) n° 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires[45], par exemple, prévoit deux types de labels d’IG pour les produits agricoles et les denrées alimentaires: les «indications géographiques protégées» (IGP) et les «appellations d’origine protégées» (AOP). La différence est fondée sur la solidité du lien avec la zone géographique. Pour une IGP, une des étapes de production, de traitement ou de préparation doit avoir lieu dans la zone, tandis que les matières premières peuvent provenir d’une autre région. Pour une AOP, tout le processus de production doit avoir lieu dans la zone géographique définie et les matières premières doivent également provenir de la même zone. Les liens naturels basés sur le concept strictement défini de «terroir»[46] sont encore plus forts dans le secteur vitivinicole où, pour les deux types d’IG, toutes les étapes de la production doivent avoir lieu dans la zone géographique. Dans le cas d’une AOP, 100 % des raisins doivent provenir exclusivement de cette zone; ce chiffre est fixé à 85 % minimum pour une IGP.

Ce lien avec un lieu géographique peut également s’appliquer à des produits non agricoles. Pour certains produits comme le marbre et la pierre, la force du lien est comparable à celle relative aux produits agricoles. Les mêmes variables énoncées ci-dessus s’appliqueraient. En principe, plus le lien est fort, plus un produit sera crédible et authentique aux yeux du consommateur. Toutefois, certaines IG peuvent être entièrement basées sur des intrants humains plutôt que naturels ou sur la notoriété. L’étude suggère que quelques produits non agricoles, identifiés en tant que candidats à la protection d'une IG, répondraient aux critères stricts de l’AOP[47].

Questions: 18. À quel point le lien entre des produits non agricoles et leur lieu d’origine doit-il être marqué afin de bénéficier de la protection d'une IG dans un nouveau système? 19. Un nouveau système devrait-il permettre deux types de lien (l’un plus marqué que l’autre) entre des produits non agricoles et leur lieu d’origine? 20. Devrait-il y avoir des différences en fonction des différents types de produits? Veuillez expliquer.

3.2 Qualité et spécification des produits

Une IG consiste essentiellement en un engagement de qualité envers les consommateurs et en une garantie de conditions équitables pour les producteurs. Dès lors, un système accordant une protection des IG requiert que les caractéristiques fondamentales spécifiques du produit et son processus de production soient énoncés. Dans la législation de l’UE relative aux IG agricoles, toutes les informations techniques nécessaires pour décrire le produit, sa méthode de production et sa zone géographique doivent être communiquées par les producteurs lorsqu’ils demandent l’enregistrement. La spécification du produit est un facteur déterminant lors de l’enregistrement pour la protection d’une IG.

Exiger la description des caractéristiques du produit garantit une qualité stable du produit mais ne requiert pas un niveau de qualité particulier. Pour cela, il convient de fixer un niveau de qualité minimum. Toutefois, la définition d’une référence de qualité significative peut ne pas fonctionner pour tous les produits, et fixer un certain niveau de qualité requiert une marge discrétionnaire.

La valeur ajoutée que les IG apportent est fondée sur la confiance du consommateur. Un système d’IG doit garantir au consommateur que les caractéristiques spécifiques, une qualité donnée ou la notoriété des IG sont maintenues pendant toute la durée de la protection. Pour atteindre cet objectif, le système de l'UE des IG agricoles a mis en place de nombreuses exigences pour les vérifications après enregistrement, afin de s’assurer que les produits répondent aux spécifications et que la dénomination soit correctement utilisée sur le marché. Ces vérifications sont normalement réalisées par une autorité publique désignée ou par un organisme privé sélectionné et certifié. Les caractéristiques et la qualité spécifiques ne doivent toutefois pas être énoncées de manière exagérément restrictive. Une description exagérément détaillée pourrait ralentir l’innovation des produits et, si les produits traditionnels ne changent pas très fréquemment, ils évoluent cependant et reflètent le développement des processus et des technologies. L’accent doit être placé sur la qualité, en permettant à la créativité d’interagir avec le savoir-faire traditionnel. À titre d’exemple, le concepteur Carlo Scarpa a collaboré étroitement dans les années 40 avec des maîtres souffleurs de verre sur des techniques de pointe qui font à présent partie intégrante de la tradition du Vetro di Murano (verre).

Questions: 21. Une référence en termes de qualité serait-elle logique pour des produits non agricoles? 22. Comment une telle référence pourrait-elle être définie? 23. Convenez-vous qu’il serait nécessaire de vérifier si les caractéristiques spécifiques, la qualité et l’origine d’une IG sont maintenues pendant toute la durée de protection? Veuillez expliquer. 24. Comment estimez-vous que les caractéristiques spécifiques du produit devraient être définies pour veiller à ce que la qualité et l’origine géographique répondent aux normes requises, tout en ne limitant pas l’innovation?

3.3 Notoriété liée au produit

La notoriété imputable à la provenance géographique pourrait servir de critère supplémentaire ou alternatif à une qualité particulière ou une caractéristique intrinsèque du produit. Cela permettrait à la protection des IG de ne porter que sur les produits ayant déjà développé une notoriété reconnue parmi les consommateurs. Toutefois, ce type de solution désavantagerait les produits nouveaux ou en développement qui, par définition, n’ont pas encore de notoriété.

Questions: 25. «La qualité, la notoriété et d’autres caractéristiques» devraient-elles être requises pour obtenir la protection d'une IG pour un produit non agricole? Si tous ces éléments ne sont pas nécessaires, quel est celui qui, selon vous, devrait être requis? Veuillez expliquer votre choix. 26. Que devrait comprendre la spécification d’un produit? Des exigences minimales devraient-elles être fixées? (Par exemple, concernant la fréquence, la méthode de sélection des produits et les parties concernées lors des différentes étapes de la production et de la distribution).

4. Comment renforcer la protection

4.1 Harmonisation des législations nationales

L’harmonisation des législations nationales concernant les IG signifierait qu’un système de protection des IG devrait être créé dans certains États membres qui ne disposent actuellement pas d’un tel système. Pour que les IG soient effectivement protégées, une indication particulière devrait être protégée dans tout le marché intérieur, faute de quoi, les consommateurs risqueraient d’être victimes de confusion en raison d’IG identiques pour des produits différents provenant de différents États membres.

Sur cette base, une harmonisation nécessiterait une reconnaissance mutuelle et une protection des IG, excluant les redondances. Pour éviter ces redondances, les États membres devraient pouvoir détecter les IG potentiellement conflictuelles, y compris dans les langues étrangères. Cette option pourrait être complexe, surtout s’il n’existe pas de procédure d’opposition au niveau supranational. Il conviendrait également d'établir un mécanisme de résolution des conflits entre indications similaires de différents États membres.

Pour garantir une approche uniforme de la mise en œuvre et de l’application d’une protection des IG, un degré relativement élevé d’harmonisation procédurale serait nécessaire, y compris concernant les dispositions d’exécution. Cette option a été prise en considération, mais a été écartée, dans le domaine de la politique agricole, où la protection des IG a exclusivement été mise en place au niveau de l’UE au moyen de règlements.

4.2 Création d’un système unique à l’échelle de l’Union

Au lieu d’harmoniser les législations nationales des États membres de l’UE, un système unique à l’échelle de l’UE pourrait être instauré. Le résultat serait un système cohérent pour l'ensemble du marché intérieur et un service plus efficace basé sur des guichets uniques, créant une protection applicable à travers toute l’UE.

Reste à savoir, si ce système est introduit, si des systèmes nationaux existants protégeant les IG devraient coexister avec le nouveau système au niveau de l’UE. Des systèmes parallèles de ce type existent déjà, par exemple pour les marques, et existeront à l’avenir pour les brevets. Ils adoptent une approche de boîte à outils, permettant aux utilisateurs de choisir le niveau et le champ de la protection adéquats en fonction de leurs besoins.

Un système exclusif de l’UE serait plus simple, mais il signifierait également que la protection pour les dénominations qui ne sont commercialement pertinentes que dans un seul État membre ou une région d'un État membre, devrait néanmoins être étendue aussi à tous les autres États membres.

Si des systèmes parallèles sont utilisés, plusieurs garanties seraient nécessaires pour en assurer le bon fonctionnement, y compris un niveau minimum d’harmonisation des législations nationales en ce qui concerne leur interaction avec le droit de l’UE.

Les éventuelles frictions seraient évitées si un système exclusif et exhaustif au niveau de l’UE était introduit, sur le modèle du système actuellement en place dans le secteur agricole. Étant donné qu’il n’y aurait pas de protection à l’échelle de l’UE accordée au niveau national, des arrangements transitoires devraient être convenus pour les IG nationales préexistantes.

Questions: 27. L’harmonisation des législations nationales serait-elle suffisante pour protéger efficacement les IG des produits non agricoles sur le marché intérieur, ou considérez-vous qu’un système de protection unique à l’échelle de l’UE est requis? 28. Si vous êtes favorable à un système unique de l’UE, les systèmes nationaux de protection (par exemple, les législations nationales actuelles sui generis) devraient-ils continuer de coexister? Veuillez expliquer.

5. Enregistrement

En principe, les IG pourraient être protégées sans qu’un enregistrement soit nécessaire. Sans enregistrement, il n’est pas nécessaire de mettre en place des procédures administratives pour accorder une protection. Il existe des systèmes qui protègent les IG sans enregistrement dans un État membre (Lettonie) ainsi qu’en Suisse, où la législation prévoit des mesures et des pénalités spécifiques pour protéger les consommateurs d’une utilisation trompeuse d’IG non enregistrées.

L’absence d’un système d’enregistrement signifie qu’il n’y aurait pas de registre public susceptible d’être consulté pour retrouver des dénominations d’IG préexistantes et identifier les titulaires concernés. Cela pourrait engendrer une insécurité quant à l’existence ou au champ de la protection. Cette absence rendrait également plus difficile la mise en application de la protection accordée. Un processus d’enregistrement au niveau de l’UE pourrait suivre le modèle des systèmes des IG agricoles (pour lesquels un système d’enregistrement au niveau de l’UE existe déjà). Il offrirait une plus grande sécurité, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre des droits, en cas de litige. Un système avec un processus d’enregistrement exigerait évidemment que les entreprises effectuent des tâches administratives (dépôt de demandes, oppositions, taxes éventuelles, etc.) liées à ce processus. Il générerait certains frais administratifs. Des frais supplémentaires résulteraient également de la gestion ultérieure (par ex. mise en application, litige) de l’IG accordée.

5.1 Rôle des administrations nationales dans un système d’enregistrement de l’UE

Si un système d’enregistrement est convenu, la question de la mise en place d’un processus d’enregistrement se posera. Les demandes d’enregistrement des IG devront être analysées par rapport au contexte local pertinent (y compris la connaissance des caractéristiques des matières premières locales, des traditions locales, etc.). Il pourrait s’avérer difficile d’abandonner ces tâches exclusivement à un organisme central unique de l’UE. Toutefois, si le soin de décider de l'examen des conditions pour l’octroi d’une protection est laissé à des experts locaux, il existera un risque que des pratiques locales divergentes se développent. La cohésion globale et la crédibilité du système pourraient en être affectées.

Pour les produits agricoles, cette difficulté a été résolue au moyen d’un système en deux étapes, dans lequel l’autorité centrale confie cet aspect de l’analyse aux autorités nationales les plus proches de l’environnement géographique et des facteurs humains. Dans ce modèle, une distinction claire serait établie entre les critères communs à l’échelle de l’UE à vérifier par l’autorité centrale et les spécificités locales que les organismes locaux vérifieraient.

5.2 Administration d’un registre de l’UE

Pour les produits agricoles, un registre des IG à l’échelle de l’UE est actuellement géré par la Commission européenne. Ce type de registre pour les IG non agricoles pourrait être géré de façon similaire ou être délégué à une agence de l’UE, nouvelle ou existante.

Questions: 29. Si un nouveau système devait être élaboré, estimez-vous qu’il devrait y avoir un processus d’enregistrement pour protéger les IG non agricoles? 30. Estimez-vous que les coûts potentiels d’un système d’enregistrement des IG l’emportent sur les coûts d’un système sans enregistrement? 31. Estimez-vous que le processus d’enregistrement devrait impliquer un élément national, par exemple, dans la vérification de la conformité aux spécifications des produits, la zone géographique indiquée, la qualité, la notoriété, etc.?

5.3 Contenu du processus

5.3.1 Demandeurs

Si un processus pour l’enregistrement des IG au niveau de l’UE devait être mis en place, il conviendrait en premier lieu de définir qui serait habilité à demander une protection.

Dans le système de l'UE actuel pour les IG agricoles, en général, un groupe de producteurs (ou, à titre exceptionnel, un producteur unique) peut déposer une demande pour enregistrer un nom d’IG se rapportant à des zones dans l’UE ou en dehors. Il n’y a pas de raison qui justifierait une approche différente pour les produits non agricoles.

Toutefois, les résultats de l’étude ont mis en évidence que, dans certains États membres, des chambres de commerce, des communautés locales, des organismes d’État ou des associations de consommateurs sont en mesure de demander la protection d'une IG[48]. Le fait de permettre à des associations de consommateurs et à des organismes d’État de demander la protection d'une IG pourrait renforcer l’aspect qualitatif des spécifications des produits. Les producteurs doivent cependant garder un rôle direct dans l’établissement des règles qui vont être appliquées à leur processus de production[49].

Questions: 32. Si un nouveau système est créé, les producteurs et leurs associations devraient-ils être les seules personnes autorisées à demander l’enregistrement des IG non agricoles ou d’autres organismes devraient-ils être autorisés à demander cet enregistrement? Le cas échéant, lesquels? 33. Les producteurs individuels devraient-ils être autorisés à demander l’enregistrement?

5.3.2 Opposition à l’enregistrement d’une IG

Pour la crédibilité et la sécurité juridique du système, il semblerait important de permettre aux parties intéressées de s’opposer à l’enregistrement d’un label en tant qu’IG. La procédure d’opposition pourrait d’abord viser à garantir que le label de l’IG répond aux conditions requises (par exemple, qu’il ne s’agit pas d’un nom générique) et que la protection accordée ne compromettrait pas des droits préexistants (par ex. des IG homonymes, des marques). La législation de l’UE sur les produits agricoles permet actuellement aux autorités d’un État membre ou d’un pays tiers, ou à une personne physique ou morale ayant un intérêt légitime et étant établie dans un pays tiers, ou étant établie ou résidant dans un autre État membre que celui à partir duquel la demande d’IG a été soumise, de déposer un acte d’opposition[50].

Question: 34. Si un nouveau système devait être créé, accepteriez-vous qu’une procédure d’opposition y soit intégrée et soit ouverte au même type de parties intéressées que dans le cadre des règles relatives aux IG agricoles?

5.3.3 Redevances

Dans le monde entier, il existe généralement une redevance pour l’enregistrement des marques et des brevets et, ainsi qu’il est signalé dans l’étude, neuf autorités nationales perçoivent des redevances pour l’enregistrement d’IG[51], ce nombre passant à dix avec l'adhésion de la Croatie. Les redevances peuvent aider à couvrir les frais de gestion de l’enregistrement des IG et elles peuvent contribuer à limiter les demandes d’enregistrement à des projets commerciaux sérieux et solides. Par ailleurs, les redevances pourraient notamment décourager de petits groupes de producteurs d’utiliser le système. L’enregistrement des IG agricoles au niveau de l’UE est actuellement gratuit[52].

Questions: 35. La protection des IG non agricoles au niveau de l’UE par un enregistrement devrait-elle nécessiter le paiement d’une redevance? 36. Quel niveau de redevance d’enregistrement considéreriez-vous équitable?

6. Champ de protection

6.1 Niveau de protection accordé

Afin d'obtenir les résultats visés, la protection juridique accordée doit offrir une protection adéquate contre toute une série de comportements et de pratiques qui pourraient être préjudiciables pour le titulaire de l’IG ou le consommateur. Toutefois, une telle protection ne doit pas constituer un obstacle injustifié à la concurrence sur le marché intérieur.

L’accord sur les ADPIC prévoit deux types de protection: un système général, fixant des normes de protection minimales pour tous les types de produits (article 22) et un système spécifique, établissant un niveau de protection plus élevé, pour les seuls vins et spiritueux (article 23).

L’article 22 de l’accord sur les ADPIC contient une obligation générale pour les membres de l’OMC d’assurer une protection contre l’utilisation trompeuse d’une IG et contre toute utilisation qui constitue un acte de concurrence déloyale. L’UE a déjà accordé un niveau de protection beaucoup plus élevé aux IG agricoles. En conséquence, il pourrait s’avérer difficile de justifier un traitement différent pour les produits non agricoles si nous devions développer un nouveau système. Agir de la sorte pourrait également avoir une incidence négative sur la stratégie de l’UE visant à obtenir des niveaux de protection plus élevés pour les IG de l’UE dans les pays tiers.

Par ailleurs, l’article 23 de l’accord sur les ADPIC prévoit un niveau de protection beaucoup plus élevé, exigeant des membres de l’OMC qu’ils empêchent toute utilisation d’une IG identifiant des vins ou des spiritueux qui ne sont pas originaires du lieu indiqué par l’IG, même dans les cas où la véritable origine du produit est indiquée ou dans ceux où l’indication géographique est employée en traduction ou accompagnée d’expressions telles que «genre», «type», «style», «imitation». Les IG des vins et des spiritueux doivent être protégées même si une utilisation abusive n’aurait pas pour effet d’induire le public en erreur.

Cette protection accrue entraînerait des avantages considérables pour les producteurs d’IG non agricoles. Ils bénéficieraient également de la protection accordée à la dénomination utilisée dans la traduction dans toutes les langues officielles de l’UE ou accompagnée d’expressions telles que «type» et «genre». Toutefois, le risque de litiges entre les producteurs augmenterait, étant donné qu’il pourrait y avoir un conflit non seulement concernant l’utilisation d’une dénomination d’IG, mais aussi concernant son utilisation dans une traduction et dans certaines expressions.

Questions: 37. Quel champ de protection devrait être accordé aux IG non agricoles dans l’UE? 38. La protection accordée aux IG non agricoles devrait-elle correspondre aux garanties déjà fournies aux IG agricoles au niveau de l’UE? Le cas échéant, à quel point?

6.2 Contrôle et application des droits des IG

Les IG sont des droits de propriété intellectuelle spéciaux dans leur nature juridique, en ce sens qu’il ne s’agit pas essentiellement de propriété privée individuelle. Une IG appartient à toute une communauté de producteurs qui satisfont à un ensemble prédéfini de spécifications du produit et qui ont un lien avec un lieu géographique. Les IG peuvent également incorporer certaines valeurs qui sont vitales pour l’ensemble de la communauté, par exemple, des traditions locales et un patrimoine culturel. C'est pourquoi les autorités publiques soutiennent souvent des producteurs d’IG locaux dans le contrôle et l’application de leurs droits. L’UE, par exemple, a établi une protection d’office des IG agricoles, selon laquelle les autorités publiques sont chargées de la mise en place d’un système pour vérifier la conformité aux exigences juridiques et assurer le bon fonctionnement du système. Cependant, l’introduction d’un tel système pour des IG non agricoles imposerait des obligations supplémentaires et générerait des frais pour les autorités publiques.

Question: 39. Préféreriez-vous, pour contrôler et faire appliquer les droits des IG non agricoles, un système qui soit privé, public ou une combinaison de système public et privé? Veuillez expliquer en tenant compte, si possible, de l’efficacité et des coûts de l’action pour faire respecter les droits.

6.3 Durée de la protection des IG non agricoles

Dans le cas de certains droits de propriété intellectuelle, par exemple les brevets et les dessins ou modèles, le maintien d’un monopole pendant une très longue période ne serait pas bénéfique pour la société. En conséquence, leur protection juridique a une durée limitée. Tel ne semble pas être le cas pour les marques et les IG qui protègent certains noms. Une marque communautaire enregistrée, par exemple, est valide pendant dix ans à compter de la date à laquelle la demande a été déposée, et elle peut être renouvelée indéfiniment pour de nouvelles périodes de dix ans. Une IG unitaire de produits agricoles — ayant pour justification de préserver le patrimoine, les traditions et le savoir-faire régionaux/locaux — est protégée indéfiniment, sans exigence de renouvellement. La majorité des États membres ayant établi un système sui generis pour protéger les IG des produits non agricoles prévoient également une protection indéfinie, sans nécessité de renouvellement.

Question: 40. Selon vous, la protection des IG des produits non agricoles devrait-elle être à durée illimitée, ou limitée avec la possibilité d’un renouvellement? Si vous optez pour une protection à durée limitée, quelle en serait la longueur?

7. Après l’enregistrement

7.1 Annulation de la protection

Il pourrait y avoir des circonstances dans lesquelles la protection accordée doit prendre fin, même si la protection des IG est accordée pour une durée indéterminée ou si le délai prescrit n’a pas encore expiré. Ce pourrait être le cas, comme dans le domaine des IG agricoles, lorsque le respect du cahier des charges n’est pas assuré ou lorsqu’aucun produit n’a été mis sur le marché, sous l’IG, pendant une période importante[53]. Une procédure d’annulation pourrait être administrée par l’organisme chargé de l’enregistrement ou directement par une juridiction. Cette procédure offrirait un niveau de contrôle supplémentaire et contribuerait à la crédibilité globale du système potentiel. Toutefois, elle pourrait créer une insécurité pour les détenteurs de droits et augmenter les coûts pour l’organisme chargé du processus.

Questions: 41. Convenez-vous qu’il devrait être possible d’annuler une IG après enregistrement? 42. Qui devrait être autorisé à demander l’annulation de l’IG? 43. Si un nouveau système devait être établi, seriez-vous d’avis qu’un processus d’annulation devrait être introduit, avec les mêmes conditions que pour les IG agricoles?

7.2 Conflits potentiels entre IG et marques

Une relation claire entre un système potentiel d’IG des produits non agricoles et la législation sur les marques devrait être définie, afin d’éviter insécurité juridique et confusion en ce qui concerne des dénominations conflictuelles.

Le principe général du droit de la propriété intellectuelle, applicable aux marques, dessins ou modèles, brevets, etc., est que le droit le plus ancien dans le temps l'emporte (à savoir, prior in tempore, potior in jure). L’application de ce principe à la relation entre les marques et les IG non agricoles pourrait contribuer à simplifier l’ensemble du système.

Le système unitaire des IG des produits agricoles contient des dispositions spécifiques concernant la relation entre les IG et les marques. Ces dispositions sont les suivantes:

a) une notoriété de la marque préexistante peut empêcher l’enregistrement d’une IG, si cet enregistrement peut induire les consommateurs en erreur quant à la véritable identité du produit;

b) toute marque qui ne se trouve pas dans cette situation et qui a été demandée, enregistrée ou établie par l’usage, de bonne foi, avant la date de la demande d’enregistrement d’une IG au niveau de l’UE devrait coexister avec l’IG enregistrée;

c) l’enregistrement d’une IG devrait empêcher l’enregistrement d’une marque qui a été demandée après l’IG, si l’octroi de cette marque entre en conflit avec la protection accordée à l’IG. Le cas échéant, les offices nationaux ou européens des marques doivent refuser d’office l’enregistrement de la marque.

Afin d’assurer la clarté et la cohérence au niveau de l’UE, il pourrait être argumenté que les mêmes règles devraient s’appliquer à la protection des IG des produits non agricoles.

Questions: 44. Estimez-vous que les IG et les marques doivent être soumises au principe pur et simple , prior in tempore, potior in jure (à savoir que le droit le plus ancien dans le temps l'emporte toujours)? 45. Les IG doivent-elles prévaloir, dans certaines circonstances, sur les marques? Veuillez expliquer.

Conclusion

Toutes les parties intéressées sont invitées à formuler des commentaires sur les questions soulevées dans le présent livre vert en répondant aux questions spécifiques qui y sont énoncées. Les réponses doivent être envoyées par courriel à l’adresse suivante afin de parvenir à la Commission pour le 28 octobre 2014: MARKT-CONSULTATION-GIs@ec.europa.eu.

Sauf opposition expresse de votre part, les réponses reçues seront publiées sur le site internet de la DG Marché intérieur et services. Veuillez lire attentivement la déclaration spécifique de confidentialité jointe à cette consultation pour en savoir plus sur le traitement de vos données à caractère personnel et de votre contribution.

[1] http://ec.europa.eu/internal_market/copyright/docs/ipr_strategy/COM_2011_287_fr.pdf.

[2] Cette étude a été réalisée avant l'adhésion de la Croatie à l'Union et ne couvre donc pas ce pays.

[3] Comme pour n’importe quel autre produit, ceux portant le nom d’une IG doivent être conformes au système existant des «exigences essentielles» de l’UE et aux prescriptions en matière de sécurité des produits qui garantissent le bon fonctionnement du marché intérieur, la sécurité des produits pour les particuliers et la protection d'autres intérêts publics, par exemple, la protection de l’environnement ou l’efficacité énergétique.

[4] La convention de Paris mentionne généralement les «indications de provenance» et les «appellations d’origine» en tant qu’objets de propriété industrielle, mais ne définit pas ces concepts. Tous les États membres de l’UE sont parties à cette convention.

[5] Dix États membres de l’UE sont parties à l’arrangement de Lisbonne. Sept États membres de l’UE l’ont ratifié: la Bulgarie, la République tchèque, la France, la Hongrie, l’Italie, le Portugal et la Slovaquie. Trois États membres l’ont signé mais ne l’ont jamais ratifié: l’Espagne, la Grèce et la Roumanie.

[6] L’article 22 des ADPIC définit une IG et contient une obligation générale pour les membres de l’OMC d’assurer une protection contre l’utilisation fallacieuse d’une IG et contre une utilisation qui constitue un acte de concurrence déloyale. Il exige également des parties qu’elles refusent ou invalident l’enregistrement de marques qui contiennent une IG ou qui sont constituées par une telle indication, pour des produits qui ne sont pas originaires du territoire indiqué, si l’utilisation de cette indication dans la marque pour de tels produits est de nature à induire le public en erreur quant au véritable lieu d’origine. L’article 23 des ADPIC prévoit une protection additionnelle des IG pour les vins et les spiritueux. L’article 23, paragraphe 1, fixe une norme de protection absolue qui exige des parties qu’elles empêchent l’enregistrement d’une IG identifiant des vins/spiritueux pour des vins ou des spiritueux qui ne sont pas originaires du lieu indiqué par l’indication géographique en question, même dans les cas où la véritable origine du produit est indiquée ou dans ceux où l’indication géographique est employée en traduction ou accompagnée d’expressions telles que «genre», «type», «style», «imitation» ou autres. Les IG pour les vins et les spiritueux doivent être protégées même si une utilisation abusive du nom d’une IG n’induirait pas les consommateurs en erreur.

[7] Voir l’arrêt C-3/91 dans l’affaire Turrón de Jijona, point 37, ou l’arrêt C-108/01 dans l’affaire Prosciutto di Parma, point 64.

[8] Voir l’arrêt C-478/07 dans l’affaire Budĕjovický Budvar, point 114.

[9] Voir l’arrêt C-35/13 dans l’affaire Felino, point 28.

[10] Étude intitulée Valeur de la production des produits agricoles et des denrées alimentaires, des vins, des vins aromatisés et des spiritueux protégés par une indication géographique (IG) [Value of production of agricultural products and foodstuffs, wines, aromatised wines and spirits protected by a geographical indication (GI)], http://ec.europa.eu/agriculture/external-studies/value-gi_en.htm.

[11] L'Allemagne, la Belgique (Wallonie), la Bulgarie, la Croatie, l'Espagne (région de Murcie), l'Estonie, la France, la Hongrie, la Lettonie, la Pologne, le Portugal, la République tchèque, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie, voir l’étude, p. 30.

[12] Étude sur la protection des indications géographiques des produits non agricoles dans le marché intérieur, p. 29-73, http://ec.europa.eu/internal_market/indprop/docs/geo-indications/130322_geo-indications-non-agri-study_en.pdf

[13] En outre, le statut d’une IG joue un rôle important en permettant aux producteurs de commencer à fournir des détaillants à grande échelle et de trouver de nouveaux clients hors des régions où les produits sont traditionnellement connus et appréciés par les consommateurs. De plus, étant donné que les consommateurs sur les marchés étrangers voient les IG comme une garantie supplémentaire de la qualité d’un produit, vérifiée par un organisme externe, le titre d’une IG aide les producteurs à obtenir un accès à de nouveaux marchés d’exportation.

[14] L’étude, p. 133.

[15] Source: Statistiques européennes concernant la pauvreté et le chômage pour la région NUTS 2. C'est le cas, par exemple, des dentelles de Binche (Belgique) ou de la louça de barro preto de Olho Marinho(argile noire d’Olho Marinho, au Portugal).

[16] Par exemple, la Route européenne de la céramique (certifiée en tant que «Route culturelle» du Conseil de l’Europe depuis mai 2012) qui vise à améliorer l’attrait des territoires céramiques en tant que destinations du tourisme durable.

[17]Voir: Indications géographiques, Introduction, OMPI, http://www.wipo.int/export/sites/www/freepublications/fr/geographical/952/wipo_pub_952.pdf.

[18] Selon une étude menée par Eurobaromètre (298) en 2008, 26 % des consommateurs ont déclaré qu’ils étaient intéressés par le pays de provenance de produits non alimentaires (pas les IG en tant que telles), un critère classé en 4e position après le prix, la sécurité et la marque.

[19] Ce n’est que lorsque les consommateurs sont informés de la qualité des produits qu’il est utile pour les producteurs d’investir dans la fabrication de produits de haute qualité. Si une entreprise décide de produire des produits de haute qualité, les bénéfices de cette décision seront récoltés par après, en tant que résultat d’un investissement à long terme de la part du producteur qui crée une notoriété bien établie. Pour cette raison, ce n’est que lorsque les consommateurs connaissent la qualité que l’entreprise est incitée à investir dans sa notoriété et, en conséquence, à percevoir un prix majoré. Le consommateur, en échange, bénéficie d’un large choix de produits de haute qualité et sûrs.

[20] L’Union européenne, depuis 2006, est partie à la convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles et, conformément à l’article 167 du traité UE, l'Union tient compte des aspects culturels dans son action au titre d'autres dispositions des traités, afin notamment de respecter et de promouvoir la diversité de ses cultures.

[21] L’étude, p. 97.

[22] La tapisserie d’Aubusson, la faïence de Moustiers, la Pierre de Bourgogne, etc.

[23] Par exemple, les imitations italiennes de la Pierre de Bourgogne, les imitations roumaines du Vetro di Murano (verre).

[24] Par exemple, les dentelles de Binche, le Marmo di Carrara (marbre), le Vetro di Murano (verre), les céramiques d’Horezu, la pierre naturelle de Castille-León.

[25] Botticino est une ville de la province de Brescia, en Italie.

[26] L’étude, p. 99.

[27] Ibidem, p. 109.

[28] La concurrence déloyale peut être définie comme «tout acte de concurrence contraire aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale».

[29] La directive 2005/29/CE définit les pratiques commerciales déloyales qui sont interdites dans l’UE et dans les trois autres pays de l’EEE. L’article 6 souligne qu’une pratique commerciale est réputée trompeuse si elle contient des informations fausses et qu’elle est donc mensongère ou si elle induit ou est susceptible d’induire en erreur le consommateur moyen, notamment en ce qui concerne les caractéristiques principales du produit, telles que son origine géographique ou commerciale. L’article 11 prévoit des voies de recours spécifiques, étant donné que les États membres et les autres pays de l’EEE doivent veiller à ce qu’il existe des moyens adéquats et efficaces pour lutter contre ces pratiques. Ces moyens doivent inclure des dispositions juridiques aux termes desquelles les personnes ou organisations ayant un intérêt légitime (consommateurs et concurrents) peuvent intenter une action en justice contre ces pratiques déloyales et/ou porter ces pratiques devant une autorité administrative.

[30] Les autorités administratives en Allemagne, en Bulgarie, à Chypre, en Estonie, en Finlande, en Grèce, en Italie, en Lettonie, au Luxembourg, en Pologne, au Portugal, en Roumanie et en Slovénie ont pour obligation d’examiner les plaintes qu’elles reçoivent. La plupart des autorités compétentes sont en mesure de rejeter des plaintes pour des motifs divers; par exemple, en Belgique, pour des motifs de rationalisation, 40 % des plaintes sont rejetées et seules celles impliquant des pertes financières significatives sont traitées.

[31] L’étude, p. 35.

[32] L’étude, p. 34-35.

[33] Voir «Guide to geographical indicators linking products and their origins» de Daniele Giovannucci, Tim Josling, William Kerr, Bernard O’Connor, May T. Yeung (Centre du commerce international).

[34] Nom connu, utilisé pour désigner de la vaisselle en porcelaine et des objets décoratifs, du nom de la ville de Herend en Hongrie.

[35] Les tartans écossais sont des étoffes écossaises avec des lignes horizontales de couleurs et de largeurs différentes qui se croisent et forment des carreaux (http://www.merriam-webster.com/dictionary/tartan). La Scottish Tartan Society (fondée en 1963) tient un registre de tous les tartans connus (soit environ 1 300).

[36] Les tapis d’Aubusson sont des revêtements de sol, tissés à la main, dans les villages d’Aubusson et de Felletin, dans le département de la Creuse, dans le centre de la France.

[37] Il n’existe pas de région dénommée «Feta» en Grèce, mais l’indication «Feta», de par une utilisation de longue durée et constante, a tissé un lien solide avec la région géographique où ce fromage est fabriqué.

[38] Le cava est produit en Catalogne, en Castille-León, en Aragon, en Navarre, dans La Rioja, en Estrémadure et dans la communauté de Valence.

[39] Un exemple typique serait le contour cartographique de l’État de Floride (aux États-Unis) pour des oranges.

[40]Article 24, paragraphe 6, de l’accord sur les ADPIC: «Aucune disposition de la présente section n'exigera d'un Membre qu'il applique les dispositions de la présente section en ce qui concerne une indication géographique de tout autre Membre pour les produits ou services dont l'indication pertinente est identique au terme usuel employé dans le langage courant comme nom commun de ces produits ou services sur le territoire de ce Membre. (…)».

[41]L’article 24, paragraphe 5, de l’accord sur les ADPIC dispose que «[d]ans les cas où une marque de fabrique ou de commerce a été déposée ou enregistrée de bonne foi, ou dans les cas où les droits à une marque de fabrique ou de commerce ont été acquis par un usage de bonne foi avant la date d'application des présentes dispositions dans ce Membre telle qu'elle est définie dans la Partie VI, ou avant que l'indication géographique ne soit protégée dans son pays d'origine, les mesures adoptées pour mettre en œuvre la présente section ne préjugeront pas la recevabilité ou la validité de l'enregistrement d'une marque de fabrique ou de commerce, ou le droit de faire usage d'une marque de fabrique ou de commerce, au motif que cette marque est identique ou similaire à une indication géographique».

[42] L’article 23, paragraphe 3, de l’accord sur les ADPIC dispose: «En cas d'homonymie d'indications géographiques pour les vins, la protection sera accordée à chaque indication, sous réserve des dispositions du paragraphe 4 de l'article 22. Chaque Membre fixera les conditions pratiques dans lesquelles les indications homonymes en question seront différenciées les unes des autres, compte tenu de la nécessité d'assurer un traitement équitable des producteurs concernés et de faire en sorte que les consommateurs ne soient pas induits en erreur».

  L’article 22, paragraphe 4, de l’accord sur les ADPIC établit que «La protection visée aux paragraphes 1, 2 et 3 sera applicable contre une indication géographique qui, bien qu'elle soit littéralement exacte pour ce qui est du territoire, de la région ou de la localité dont les produits sont originaires, donne à penser à tort au public que les produits sont originaires d'un autre territoire».

[43] Par exemple, l’article 6, paragraphes 1, 3 et 4, du règlement (UE) n° 1151/2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires.

[44] Article 6, paragraphe 2, du règlement (UE) n° 1151/2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires.

[45] JO L 343 du 14.12.2012, p. 1.

[46]Terroir est un concept en viticulture qui relie les attributs d’un vin aux conditions environnementales dans lesquels le raisin est cultivé.

[47] L’étude, p. 298.

[48] L’étude, p. 302.

[49] Ibidem, p. 303.

[50] Article 51, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 1151/2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires.

[51] Voir l’annexe I de l’étude.

[52] Dans le cas des produits agricoles et des denrées alimentaires, la possibilité est offerte aux États membres d’exiger le paiement d’une redevance destinée à couvrir les frais encourus pour la gestion du système à leur niveau [article 47 du règlement (UE) n° 1151/2012].

[53] Article 54 du règlement (UE) n° 1151/2012.

Top