EUR-Lex Access to European Union law

Back to EUR-Lex homepage

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 62017CO0259

Ordonnance de la Cour (septième chambre) du 21 novembre 2017.
Zoltán Rózsavölgyi et Zoltánné Rózsavölgyi contre Unicredit Leasing Hungary Zrt. et Unicredit Leasing Immo Truck Zrt.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Budai Központi Kerületi Bíróság.
Renvoi préjudiciel – Article 53, paragraphe 2, et article 94 du règlement de procédure de la Cour – Protection des consommateurs – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Contrat de crédit libellé en devise étrangère – Absence de précisions suffisantes concernant le contexte factuel et réglementaire du litige au principal ainsi que les raisons justifiant la nécessité d’une réponse aux questions préjudicielles – Irrecevabilité manifeste.
Affaire C-259/17.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2017:905

ORDONNANCE DE LA COUR (septième chambre)

21 novembre 2017 (*)

« Renvoi préjudiciel – Article 53, paragraphe 2, et article 94 du règlement de procédure de la Cour – Protection des consommateurs – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Contrat de crédit libellé en devise étrangère – Absence de précisions suffisantes concernant le contexte factuel et réglementaire du litige au principal ainsi que les raisons justifiant la nécessité d’une réponse aux questions préjudicielles – Irrecevabilité manifeste »

Dans l’affaire C‑259/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Budai Központi Kerületi Bíróság (tribunal d’arrondissement central de Buda, Hongrie), par décision du 31 mars 2017, parvenue à la Cour le 16 mai 2017, dans la procédure

Zoltán Rózsavölgyi,

Zoltánné Rózsavölgyi

contre

Unicredit Leasing Hungary Zrt.,

Unicredit Leasing Immo Truck Zrt.,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. A. Rosas, président de chambre, Mmes C. Toader et A. Prechal (rapporteur), juges,

avocat général : M. N. Wahl,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 3, paragraphe 1, de l’article 4, paragraphe 2, de l’article 5 et de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Zoltán Rózsavölgyi et Mme Zoltánné Rózsavölgyi à Unicredit Leasing Hungary Zrt. et à Unicredit Leasing Immo Truck Zrt. au sujet des effets juridiques d’une clause contractuelle à caractère prétendument abusif relative au cours de change applicable aux remboursements d’un prêt libellé en devise étrangère.

 Le cadre juridique

3        Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 :

« Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat. »

4        L’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 énonce :

« L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

5        L’article 5 de cette directive prévoit :

« Dans le cas des contrats dont toutes ou certaines clauses proposées au consommateur sont rédigées par écrit, ces clauses doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible. En cas de doute sur le sens d’une clause, l’interprétation la plus favorable au consommateur prévaut. Cette règle d’interprétation n’est pas applicable dans le cadre des procédures prévues à l’article 7 paragraphe 2. »

6        Aux termes de l’article 6, paragraphe 1, de ladite directive :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

7        L’article 94 du règlement de procédure de la Cour dispose :

« Outre le texte des questions posées à la Cour à titre préjudiciel, la demande de décision préjudicielle contient :

a)      un exposé sommaire de l’objet du litige ainsi que des faits pertinents, tels qu’ils ont été constatés par la juridiction de renvoi ou, à tout le moins, un exposé des données factuelles sur lesquelles les questions sont fondées ;

b)      la teneur des dispositions nationales susceptibles de s’appliquer en l’espèce et, le cas échéant, la jurisprudence nationale pertinente ;

c)      l’exposé des raisons qui ont conduit la juridiction de renvoi à s’interroger sur l’interprétation ou la validité de certaines dispositions du droit de l’Union, ainsi que le lien qu’elle établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige au principal. »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

8        M. Rózsavölgyi a conclu, le 16 juin 2008, un contrat de crédit libellé en devise étrangère d’un montant de 5 092 000 forints hongrois (HUF) (environ 16 630 euros) aux fins de l’achat d’un véhicule de tourisme. Mme Rózsavölgyi s’est portée garante pour le crédit.

9        Le contrat en cause comporte une clause prétendument abusive qui aurait pour effet que le risque de change serait supporté par M. Rózsavölgyi.

10      Ledit contrat a été résilié le 10 avril 2014. Par la suite, Unicredit Leasing Hungary a envoyé à M. et Mme Rózsavölgyi une mise en demeure de remboursement des échéances restant dues. Ces derniers ont saisi la juridiction de renvoi et lui demandent de prononcer l’invalidité de ladite résiliation.

11      La juridiction de renvoi s’intérroge, notamment, sur les effets juridiques qui découlent de la présence de ladite clause prétendument abusive au sujet du risque de change.

12      Dans ces conditions, le Budai Központi Kerületi Bíróság (tribunal d’arrondissement central de Buda, Hongrie) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Compte tenu en particulier de ce que, lorsque la définition de l’objet principal du contrat présente un caractère abusif, il en résulte l’invalidité de l’ensemble du contrat (et non une invalidité partielle), la déclaration de la nullité de la clause définissant l’objet principal d’un contrat de prêt en raison de son caractère abusif (impliquant que la clause ne puisse lier le consommateur) peut-elle avoir pour conséquence (par exemple, en raison de l’application d’une décision de justice, d’une conséquence juridique particulière prévue par une disposition de droit national, d’une disposition normative ou d’une décision d’uniformisation du droit) que, ainsi, la qualification juridique du contrat, ou ses effets, changent de telle sorte que, en particulier, un contrat de prêt libellé en devise (dans lequel les créances résultant dudit contrat de prêt sont déterminées et libellées dans une devise étrangère – ci-après la “devise de la créance” – et dans lequel ces créances sont à régler en devise nationale – ci-après la “devise de paiement”), soit à considérer comme un contrat de prêt en forint hongrois ?

Dans l’hypothèse où l’application de la nullité découlant du caractère abusif de la clause définissant l’objet principal d’un contrat de prêt peut avoir pour conséquence que, ainsi, la qualification juridique du contrat, ou ses effets, changent, la modification de ladite qualification juridique qui en résulte peut-elle avoir pour conséquence (par exemple, en raison de l’application d’une décision de justice, d’une conséquence juridique particulière prévue par une disposition de droit national, d’une disposition normative ou d’une décision d’uniformisation du droit) que certains paramètres de la relation juridique qui ont une incidence financière puissent eux aussi varier au détriment du consommateur (par exemple l’application rétroactive du taux d’intérêt du marché pour les prêts en forint hongrois ou du taux de base de la banque centrale au lieu du taux d’intérêt plus faible prévu dans le contrat) ?

2)      Les conséquences juridiques attachées au caractère abusif [d’une clause] sont-elles une question de pur droit, à caractère absolu, ou bien, lors de l’appréciation desdites conséquences, est-il possible d’attacher de l’importance

a)      à la pratique contractuelle portant sur d’autres types de contrats que ceux concernés par le caractère abusif,

b)      à la vulnérabilité supposée d’opérateurs déterminés directement concernés au plan économique (en en ce qui concerne les prêts libellés en devise, par exemple, le collectif des emprunteurs en devise et le système bancaire), ou

c)      aux intérêts de personnes tierces ou de groupes déterminés non directement concernés au plan économique, par exemple au fait que, consécutivement à la nullité, les membres du collectif des emprunteurs en devise sont susceptibles de se trouver, pour la plupart, en définitive, du point de vue du décompte chiffré, dans une situation plus favorable que ceux du collectif des emprunteurs en forint hongrois ?

3)      Aux fins de l’article 3, paragraphe 1, de l’article 4, paragraphe 2, de l’article 5 et de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 [...] (c’est-à-dire aux fins de l’appréciation du caractère abusif et de sa conséquence juridique), la clause mettant à la charge du consommateur le risque de change [à savoir la ou les stipulation(s) du contrat régissant la charge du risque] constitue-t-elle un ensemble de clauses ?

4)      L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 (selon lequel les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs) peut-il être interprété en ce sens que la clause en question (non pas un passage déterminé de celle-ci, mais la clause considérée dans son ensemble) peut être abusive dans son intégralité ou qu’elle est pour partie non abusive et pour partie abusive, de telle sorte qu’elle demeure pour partie applicable (par exemple, en fonction de l’appréciation par le juge du cas d’espèce) et qu’elle est susceptible de lier le consommateur (c’est‑à‑dire que, du point de vue de ses effets, elle n’est abusive que dans une certaine mesure dans l’un et l’autre cas), par exemple, en raison de l’application d’une décision de justice, d’une conséquence juridique particulière prévue par une disposition de droit national, d’une disposition normative ou d’une décision d’uniformisation du droit ?

À supposer qu’il convienne d’interpréter l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 en ce sens qu’une clause déterminée peut être abusive dans son intégralité ou qu’elle est pour partie non abusive et pour partie abusive, de telle sorte qu’elle demeure pour partie applicable et qu’elle est susceptible de lier le consommateur (c’est-à-dire que, du point de vue de ses effets, elle n’est abusive que dans une certaine mesure dans l’un et l’autre cas), le fait que la clause litigieuse, qui définit l’objet principal du contrat, entraîne l’invalidité de l’intégralité du contrat de prêt, en raison de son caractère abusif, peut-il avoir pour conséquence que le consommateur se trouve, du point de vue du décompte chiffré, dans une situation en définitive plus défavorable et que le professionnel se trouve dans une situation plus favorable que si la clause litigieuse, qui définit l’objet principal du contrat, ne conférait, en raison de son caractère abusif, que pour partie un caractère abusif au contrat de prêt (de telle sorte que les autres clauses du contrat continueraient à lier les parties avec un contenu inchangé) ?

5)      a)      Eu égard à ses conséquences économiques, peut-on ne pas qualifier d’abusive, en ce qu’elle est rédigée de façon claire et compréhensible, une clause contractuelle qui fait peser sur le consommateur la charge du risque de change (clause utilisée à titre de condition générale contractuelle par le cocontractant professionnel et n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle) et qui a été rédigée au titre d’une obligation d’information d’origine légale à caractère nécessairement général, lorsque ladite clause ne comporte pas de mise en garde expresse quant au fait que le montant des échéances de remboursement à verser en vertu du contrat de prêt est susceptible de dépasser le montant des revenus du consommateur retenu par le cocontractant professionnel dans le cadre de l’examen de solvabilité ; compte tenu également du fait que la législation nationale pertinente prévoit une présentation détaillée du risque par écrit et non une simple déclaration de l’existence du risque ainsi que son attribution ; dès lors que, par ailleurs, selon le point 74 [de l’arrêt du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C-26/13, EU:C:2014:282)], il peut être exigé du cocontractant professionnel non seulement qu’il rende le risque identifiable pour le consommateur, mais aussi que ce dernier soit également en mesure d’évaluer les conséquences économiques, potentiellement significatives, pour lui de la mise à sa charge du risque de change et, partant, le coût total de son emprunt ?

b)      Eu égard à ses conséquences économiques, peut-on ne pas qualifier d’abusive, en ce qu’elle est rédigée de façon claire et compréhensible, une clause contractuelle qui fait peser sur le consommateur la charge du risque de change (clause utilisée à titre de condition générale contractuelle par le cocontractant professionnel et n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle) et qui a été rédigée au titre d’une obligation d’information d’origine légale à caractère nécessairement général, lorsque ladite clause ne comporte pas de mise en garde expresse quant au fait que le montant du capital restant dû à tout moment en vertu du contrat de prêt est susceptible de dépasser la valeur du patrimoine du débiteur retenue par le cocontractant professionnel dans le cadre de l’examen de solvabilité ; compte tenu également du fait que la législation nationale pertinente prévoit une présentation détaillée du risque par écrit et non une simple déclaration de l’existence du risque ainsi que son attribution ; dès lors que, par ailleurs, selon le point 74 [de l’arrêt du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C-26/13, EU:C:2014:282)], il peut être exigé du cocontractant professionnel non seulement qu’il rende le risque identifiable pour le consommateur, mais aussi que ce dernier soit également en mesure d’évaluer les conséquences économiques, potentiellement significatives, pour lui de la mise à sa charge du risque de change et, partant, le coût total de son emprunt ?

c)      Eu égard à ses conséquences économiques, peut-on ne pas qualifier d’abusive, en ce qu’elle est rédigée de façon claire et compréhensible, une clause contractuelle qui fait peser sur le consommateur la charge du risque de change (clause utilisée à titre de condition générale contractuelle par le cocontractant professionnel et n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle) et qui a été rédigée au titre d’une obligation d’information d’origine légale à caractère nécessairement général, lorsque ladite clause ne comporte pas de mise en garde expresse quant au fait que (1) la variation du taux de change ne comporte aucun plafond, (2) l’éventualité d’une variation du taux de change est réelle, celle-ci pouvant intervenir durant toute la durée de la période de remboursement, (3) le montant des échéances de remboursement peut augmenter de manière illimitée à la suite d’une telle variation, (4) en relation avec une variation du taux de change, non seulement le montant des échéances de remboursement, mais également celui du capital restant dû peuvent augmenter de manière illimitée, (5) la perte encourue est illimitée, (6) l’effet des mesures préventives nécessaires est limité et exige une attention constante, (7) que le cocontractant professionnel ne peut assurer ; compte tenu également du fait que la législation nationale pertinente prévoit une présentation détaillée du risque par écrit et non une simple déclaration de l’existence du risque ainsi que son attribution ; dès lors que, par ailleurs, selon le point 74 [de l’arrêt du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C-26/13, EU:C:2014:282)], il peut être exigé du cocontractant professionnel non seulement qu’il rende le risque identifiable pour le consommateur, mais aussi que ce dernier soit également en mesure d’évaluer les conséquences économiques, potentiellement significatives, pour lui de la mise à sa charge du risque de change et, partant, le coût total de son emprunt ?

d)      Compte tenu notamment du fait qu’il peut advenir ou qu’il est même déjà advenu que la jurisprudence ou la législation nationale parvienne à la conclusion que, en présence de contrats de prêt libellés en devise, le consommateur s’endette en devise en raison du taux d’intérêt plus favorable au cours de la période considérée que dans les prêts en forint hongrois, en contrepartie de quoi lui seul supporte les effets d’une variation du taux de change ; compte tenu aussi du fait qu’il peut également advenir et qu’il est même déjà advenu que la jurisprudence ou la législation nationale parvienne à la conclusion que le caractère abusif du transfert unilatéral, et imprévisible, des charges contractuelles postérieurement à la conclusion du contrat de prêt ne puisse pas être apprécié, étant donné que les motifs de nullité doivent exister au moment de la conclusion du contrat ; compte tenu, en outre, du fait que la législation nationale pertinente prévoit une présentation détaillée du risque par écrit et non une simple déclaration de l’existence du risque ainsi que son attribution ; dès lors que, par ailleurs, selon le point 74 [de l’arrêt du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C-26/13, EU:C:2014:282)], il peut être exigé du cocontractant professionnel non seulement qu’il rende le risque identifiable pour le consommateur, mais aussi que ce dernier soit également en mesure d’évaluer le risque, peut-on ne pas qualifier d’abusive, en ce qu’elle est rédigée de façon claire et compréhensible, eu égard à ses conséquences économiques, une clause contractuelle qui fait peser sur le consommateur la charge du risque de change (clause utilisée à titre de condition générale contractuelle par le cocontractant professionnel et n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle) et qui a été rédigée au titre d’une obligation d’information d’origine légale à caractère nécessairement général, lorsque ladite clause ne comporte pas de mise en garde expresse quant au sens prévisible de la variation du taux de change au cours de la période de validité du contrat (à tout le moins durant la période initiale) et les valeurs minimales et/ou maximales de ce taux (par exemple en se fondant sur la méthode de calcul d’un taux d’intérêt forward et/ou sur le principe de la parité des taux d’intérêts – selon lesquels, en matière de prêts libellés en devise, il est possible de pronostiquer avec un degré élevé de certitude qu’un avantage en matière d’intérêts, à savoir le fait que le taux LIBOR [London Interbank Offered Rate] ou Euribor [Euro Interbank Offered Rate] soit inférieur au taux BUBOR [Budapest Interbank Offered Rate], implique que le consommateur subisse une perte de change, dans la mesure où le cours de la devise de paiement se dégradera par rapport au cours de la devise de la créance) ?

e)      Eu égard à ses conséquences économiques, peut-on ne pas qualifier d’abusive, en ce qu’elle est rédigée de façon claire et compréhensible, une clause contractuelle qui fait peser sur le consommateur la charge du risque de change (clause utilisée à titre de condition générale contractuelle par le cocontractant professionnel et n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle) et qui a été rédigée au titre d’une obligation d’information d’origine légale à caractère nécessairement général, lorsque ladite clause ne comporte pas de mise en garde expresse indiquant de manière précise (par exemple en quantifiant par une série de données ou par un graphique l’évolution comparée des cours de change de la devise de la créance et de la devise de paiement au cours d’une période au moins aussi longue que celle de l’engagement du consommateur) le risque véritablement encouru par le débiteur du fait de la mise à la charge du consommateur du risque de change ; compte tenu, en outre, du fait que la législation nationale pertinente prévoit une présentation détaillée du risque par écrit et non une simple déclaration de l’existence du risque ainsi que son attribution ; dès lors que, par ailleurs, selon le point 74 [de l’arrêt du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C-26/13, EU:C:2014:282)], il peut être exigé du cocontractant professionnel non seulement qu’il rende le risque identifiable pour le consommateur, mais aussi que ce dernier soit également en mesure d’évaluer les conséquences économiques, potentiellement significatives, pour lui de la mise à sa charge du risque de change et, partant, le coût total de son emprunt ?

f)      Compte tenu notamment du fait qu’il peut advenir que, en présence de contrats de prêt libellés en devise, sous l’effet de la jurisprudence ou de la législation nationale, le consommateur puisse s’endetter en devise en raison du taux d’intérêt plus favorable au cours de la période considérée que dans les prêts en forint hongrois, en contrepartie de quoi lui seul supporte les effets d’une variation du taux de change ; compte tenu, en outre, du fait que la législation nationale pertinente prévoit une présentation détaillée du risque par écrit et non une simple déclaration de l’existence du risque ainsi que son attribution ; dès lors que, par ailleurs, selon le point 74 [de l’arrêt du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C-26/13, EU:C:2014:282)], il peut être exigé du cocontractant professionnel non seulement qu’il rende le risque identifiable pour le consommateur, mais aussi que ce dernier soit également en mesure d’évaluer le risque, peut-on ne pas qualifier d’abusive, en ce qu’elle est rédigée de façon claire et compréhensible, eu égard à ses conséquences économiques, une clause contractuelle qui fait peser sur le consommateur la charge du risque de change (clause utilisée à titre de condition générale contractuelle par le cocontractant professionnel et n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle) et qui a été rédigée au titre d’une obligation d’information d’origine légale à caractère nécessairement général, lorsque ladite clause ne comporte pas de mise en garde expresse indiquant de manière précise (par exemple de manière expresse et quantifiée par une série de données afférentes à une période passée au moins aussi longue que celle de l’engagement du consommateur) le montant des bénéfices prévisibles en matière d’intérêts, en cas d’application du taux BUBOR dans le cas de prêts en forint hongrois et du taux LIBOR ou Euribor en cas de prêts libellés en devise ?

6)      Aux fins de l’appréciation du caractère abusif d’une clause contractuelle qui fait peser sur le consommateur la charge du risque de change (clause utilisée à titre de condition générale contractuelle par le cocontractant professionnel et n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle) et qui a été rédigée au titre d’une obligation d’information d’origine légale à caractère nécessairement général, comment faut-il répartir la charge de la preuve entre le consommateur et le cocontractant professionnel afin d’évaluer si le consommateur a eu, effectivement, l’occasion de prendre connaissance de la clause litigieuse à laquelle il a adhéré de manière irréfragable avant la conclusion du contrat de prêt [article 3, paragraphe 3, de la directive 93/13 et point 1, sous i), de l’annexe de cette directive] ?

7)      Faut-il considérer que, dans les contrats de prêt libellés en devise, c’est‑à‑dire aux fins de transactions relatives à des services dont le prix est lié aux variations d’un taux de change sur les marchés monétaires, les établissements de crédit qui concluent un contrat avec un consommateur en utilisant leur propre taux de change sont des professionnels qui ne contrôlent pas les fluctuations du cours au sens du point 2, sous c), de l’annexe de la directive 93/13 ? »

 Sur les questions préjudicielles

13      En vertu de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsqu’une demande préjudicielle est manifestement irrecevable, la Cour, l’avocat général entendu, peut à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

14      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans la présente affaire.

15      Selon une jurisprudence constante, dans le cadre de la coopération entre la Cour et les juridictions nationales instaurée à l’article 267 TFUE, la nécessité de parvenir à une interprétation du droit de l’Union qui soit utile pour le juge national exige que celui-ci définisse le cadre factuel et réglementaire dans lequel s’insèrent les questions qu’il pose ou que, à tout le moins, il explique les hypothèses factuelles sur lesquelles ces questions sont fondées (voir, notamment, arrêts du 10 mai 2017, de Lobkowicz, C-690/15, EU:C:2017:355, point 28 et jurisprudence citée, ainsi que du 27 juin 2017, Congregación de Escuelas Pías Provincia Betania, C-74/16, EU:C:2017:496, point 26). En effet, la Cour est uniquement habilitée à se prononcer sur l’interprétation d’un texte de l’Union à partir des faits qui lui sont indiqués par la juridiction nationale (voir, notamment, arrêts du 13 juillet 2017, Túrkevei Tejtermelő Kft., C-129/16, EU:C:2017:547, point 43, et du 26 juillet 2017, Superfoz - Supermercados, C-519/16, EU:C:2017:601, point 44).

16      Les exigences concernant le contenu d’une demande de décision préjudicielle figurent de manière explicite à l’article 94 du règlement de procédure ainsi qu’au point 15 des recommandations de la Cour de justice de l’Union européenne à l’attention des juridictions nationales, relatives à l’introduction de procédures préjudicielles (JO 2016, C 439, p. 1), selon lesquels toute demande de décision préjudicielle contient « un exposé sommaire de l’objet du litige ainsi que des faits pertinents, tels qu’ils ont été constatés par la juridiction de renvoi ou, à tout le moins, un exposé des données factuelles sur lesquelles les questions sont fondées », « la teneur des dispositions nationales susceptibles de s’appliquer en l’espèce et, le cas échéant, la jurisprudence nationale pertinente », ainsi que « l’exposé des raisons qui ont conduit la juridiction de renvoi à s’interroger sur l’interprétation ou la validité de certaines dispositions du droit de l’Union, ainsi que le lien qu’elle établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige au principal » (arrêt du 13 juillet 2017, Ingsteel et Metrostav, C-76/16, EU:C:2017:549, point 51 ainsi que jurisprudence citée).

17      Il est important de souligner, à cet égard, que les informations contenues dans les décisions de renvoi servent non seulement à permettre à la Cour de fournir des réponses utiles, mais également à donner aux gouvernements des États membres ainsi qu’aux autres intéressés la possibilité de présenter des observations conformément à l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. Il incombe à la Cour de veiller à ce que cette possibilité soit sauvegardée, compte tenu du fait que, en vertu de cette disposition, seules les décisions de renvoi sont notifiées aux intéressés (arrêt du 13 juillet 2017, Szoja, C-89/16, EU:C:2017:538, point 49 et jurisprudence citée).

18      En l’occurrence, force est de constater que la décision de renvoi ne répond manifestement pas aux exigences rappelées aux points 15 et 16 de la présente ordonnance.

19      S’il ressort de la décision de renvoi que M. Rózsavölgyi a conclu un contrat de crédit libellé en devise étrangère, la juridiction de renvoi ne précise pas les modalités concrètes de la conclusion et de l’exécution du contrat de crédit en cause, et notamment les clauses contractuelles relatives à l’objet de celui-ci, telles que visées dans la première question préjudicielle.

20      Ladite juridiction n’indique pas non plus de quelle manière et dans quelle mesure M. et Mme Rózsavölgyi devaient supporter les risques de variation des taux de change. Elle ne précise pas, par ailleurs, dans quelle mesure les clauses en cause sont compréhensibles pour le consommateur et lui permettent d’apprécier les risques auxquels il s’expose.

21      La juridiction de renvoi n’explique pas, dans le cadre de sa quatrième question, de quelle manière les conséquences de la constatation de l’invalidité du contrat, dans l’hypothèse où le caractère prétendument abusif de la clause visée entacherait de nullité ce contrat dans son intégralité, seraient défavorables aux requérants au principal.

22      Outre l’absence des éléments factuels de l’affaire au principal qui sont indispensables en vue de répondre aux questions préjudicielles, la juridiction de renvoi n’expose pas avec la précision et la clarté requises les raisons pour lesquelles elle considère que l’interprétation demandée lui semble nécessaire ou utile aux fins de la résolution de l’affaire au principal, ni le lien concret entre le litige au principal et les questions formulées.

23      Or, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, la justification d’une demande de décision préjudicielle est non pas la formulation d’opinions consultatives sur des questions générales ou hypothétiques, mais le besoin inhérent à la solution effective d’un litige portant sur le droit de l’Union (voir, notamment, arrêt du 27 septembre 2017, Puškár, C-73/16, EU:C:2017:725, point 123).

24      Il ressort de ce qui précède, d’une part, que la décision de renvoi ne permet pas à la Cour de fournir une réponse utile à la juridiction de renvoi afin de trancher le litige au principal ni ne donne aux gouvernements des États membres ainsi qu’aux autres parties intéressées la possibilité de présenter des observations conformément à l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et, d’autre part, que la décision de renvoi ne permet pas de s’assurer qu’une réponse de la Cour aux questions posées n’équivaudrait pas à statuer sur un problème de nature hypothétique.

25      Il convient cependant de relever que la juridiction de renvoi conserve la faculté de soumettre une nouvelle demande de décision préjudicielle lorsqu’elle sera en mesure de fournir à la Cour l’ensemble des éléments permettant à celle-ci de statuer (ordonnance du 12 mai 2016, Security Service e.a., C-692/15 à C-694/15, EU:C:2016:344, point 30 ainsi que jurisprudence citée).

26      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de constater que, en application de l’article 53, paragraphe 2, du règlement de procédure, la présente demande de décision préjudicielle est manifestement irrecevable.

 Sur les dépens

27      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) ordonne :

La demande de décision préjudicielle introduite par le Budai Központi Kerületi Bíróság (tribunal d’arrondissement du centre de Buda, Hongrie), par décision du 31 mars 2017, est manifestement irrecevable.

Signatures



*      Langue de procédure : le hongrois.

Top