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Document 62017CJ0238

Arrêt de la Cour (troisième chambre) du 14 novembre 2018.
UAB « Renerga » contre AB « Energijos skirstymo operatorius » et AB « Lietuvos energijos gamyba ».
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Vilniaus miesto apylinkės teismas.
Renvoi préjudiciel – Directive 2009/72/CE – Article 3, paragraphes 2, 6 et 15, et article 36, sous f) – Marché intérieur de l’électricité – Caractère hypothétique des questions préjudicielles – Irrecevabilité de la demande de décision préjudicielle.
Affaire C-238/17.

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2018:905

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

14 novembre 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Directive 2009/72/CE – Article 3, paragraphes 2, 6 et 15, et article 36, sous f) – Marché intérieur de l’électricité – Caractère hypothétique des questions préjudicielles – Irrecevabilité de la demande de décision préjudicielle »

Dans l’affaire C‑238/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Vilniaus miesto apylinkės teismas (tribunal de district de la ville de Vilnius, Lituanie), par décision du 11 avril 2017, parvenue à la Cour le 9 mai 2017, dans la procédure

UAB « Renerga »

contre

AB« Energijos skirstymo operatorius »,

AB« Lietuvos energijos gamyba »,

en présence de :

UAB « BALTPOOL »,

Lietuvos Respublikos Vyriausybė,

Achema AB,

Achemos Grupė UAB,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. M. Vilaras, président de la quatrième chambre, faisant fonction de président de la troisième chambre, MM. J. Malenovský (rapporteur), L. Bay Larsen, M. Safjan et D. Šváby, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : M. M. Aleksejev, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 3 mai 2018,

considérant les observations présentées :

pour UAB « Renerga », initialement par Mes V. Radvila, K. Pabijanskas et G. Balčiūnas, advokatas, Me C. Malamataris, dikigoros, Me A. Wilhelm, Rechtsanwalt, Me E. Righini, avvocato, ainsi que par Me C. Cluzel, avocat, puis par Mes V. Radvila et K. Pabijanskas, advokatas, Me E. Righini, avvocato, ainsi que par Me C. Cluzel, avocat,

pour AB « Energijos skirstymo operatorius » et AB « Lietuvos energijos gamyba », par Me A. Žindul, advokatas,

pour UAB « BALTPOOL », par M. A. Smaliukas ainsi que par Mme E. Junčienė, en qualité d’agents,

pour Achemos Grupė UAB, par Me G. Balčiūnas, advokatas,

pour le gouvernement lituanien, par MM. D. Kriaučiūnas et R. Dzikovič, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mmes O. Beynet, Y. G. Marinova, A. Steiblytė et J. Jokubauskaitė, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 12 juillet 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 3, paragraphes 2, 6 et 15, et de l’article 36, sous f), de la directive 2009/72/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE (JO 2009, L 211, p. 55).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant UAB « Renerga » à AB « Energijos skirstymo operatorius » et AB « Lietuvos energijos gamyba » au sujet du versement d’intérêts moratoires pour le paiement tardif à Renerga de compensations de service public.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Les considérants 46 et 50 de la directive 2009/72 énoncent :

« (46)

Le respect des obligations de service public est un élément essentiel de la présente directive, et il est important que des normes minimales communes, respectées par tous les États membres, soient fixées dans la présente directive, en prenant en compte les objectifs de la protection des consommateurs, de la sécurité d’approvisionnement, de la protection de l’environnement et de l’égalité des niveaux de concurrence dans tous les États membres. Il est important que les exigences relatives au service public puissent être interprétées sur une base nationale, compte tenu des conditions nationales et dans le respect du droit communautaire.

[...]

(50)

Il convient de renforcer encore les obligations de service public, y compris en matière de service universel, et les normes minimales communes qui en résultent, afin que tous les consommateurs, en particulier les consommateurs vulnérables, puissent profiter de la concurrence et bénéficier de prix équitables. Les obligations de service public devraient être définies au niveau national, en tenant compte du contexte national. Le droit communautaire devrait, cependant, être respecté par les États membres. [...] »

4

L’article 3, paragraphes 2, 6 et 15, de cette directive dispose :

« 2.   En tenant pleinement compte des dispositions pertinentes du traité [CE], en particulier de son article 86, les États membres peuvent imposer aux entreprises du secteur de l’électricité, dans l’intérêt économique général, des obligations de service public qui peuvent porter sur la sécurité, y compris la sécurité d’approvisionnement, la régularité, la qualité et le prix de la fourniture, ainsi que la protection de l’environnement, y compris l’efficacité énergétique, l’énergie produite à partir de sources d’énergie renouvelables et la protection du climat. Ces obligations sont clairement définies, transparentes, non discriminatoires et vérifiables et garantissent aux entreprises d’électricité de la Communauté un égal accès aux consommateurs nationaux. En matière de sécurité d’approvisionnement, d’efficacité énergétique/gestion de la demande et pour atteindre les objectifs environnementaux et les objectifs concernant l’énergie produite à partir de sources d’énergie renouvelables, visés au présent paragraphe, les États membres peuvent mettre en œuvre une planification à long terme, en tenant compte du fait que des tiers pourraient vouloir accéder au réseau.

[...]

6.   Lorsqu’une compensation financière, d’autres formes de compensation ou des droits exclusifs offerts par un État membre pour l’accomplissement des obligations visées aux paragraphes 2 et 3 sont octroyés, c’est d’une manière non discriminatoire et transparente.

[...]

15.   Les États membres informent la Commission, lors de la mise en œuvre de la présente directive, de toutes les mesures qu’ils ont prises pour remplir les obligations de service universel et de service public, y compris la protection des consommateurs et la protection de l’environnement, et de leurs effets éventuels sur la concurrence nationale et internationale, que ces mesures nécessitent ou non une dérogation à la présente directive. Ils notifient ensuite à la Commission, tous les deux ans, toute modification apportée à ces mesures, que celles-ci nécessitent ou non une dérogation à la présente directive. »

5

L’article 36, sous f), de ladite directive prévoit :

« Aux fins des tâches de régulation définies dans la présente directive, l’autorité de régulation prend toutes les mesures raisonnables pour atteindre les objectifs suivants dans le cadre de ses missions et compétences définies à l’article 37, en étroite concertation, le cas échéant, avec les autres autorités nationales concernées, y compris les autorités de concurrence, et sans préjudice de leurs compétences :

[...]

f)

faire en sorte que les gestionnaires de réseau et les utilisateurs du réseau reçoivent des incitations suffisantes, tant à court terme qu’à long terme, pour améliorer les performances des réseaux et favoriser l’intégration du marché ».

Le droit lituanien

6

La directive 2009/72 a été transposée dans l’ordre juridique lituanien par l’Energetikos įstatymas (loi sur l’énergie), par l’Elektros energetikos įstatymas (loi sur l’électricité) et par l’Atsinaujinančių išteklių energetikos įstatymas (loi sur l’énergie produite à partir de sources renouvelables).

7

Sur le fondement de la loi sur l’électricité, le gouvernement lituanien a adopté, le 18 juillet 2012, le Vyriausybės nutarimas no 916 Dėl Viešuosius interesus atitinkančių paslaugų elektros energetikos sektoriuje teikimo tvarkos aprašo patvirtinimo (décret du gouvernement no 916, portant cadre régissant la fourniture d’électricité en régime d’obligations de service public). En vertu du point 3 de ce décret, les « compensations de service public » sont gérées dans le respect du cadre de gestion des compensations de service public établi par le Vyriausybės nutarimas no 1157 Dėl Viešuosius interesus atitinkančių paslaugų elektros energetikos sektoriuje lėšų administravimo tvarkos aprašo patvirtinimo (décret du gouvernement no 1157, portant cadre régissant la gestion des compensations de service public dans le secteur de la fourniture d’électricité), adopté le 19 septembre 2012.

8

Le point 18.1 du décret du gouvernement no 916 prévoit la possibilité de suspendre temporairement la compensation de service public payée selon les modalités et les conditions prévues par le décret du gouvernement no 1157, si le prestataire de service public ou des personnes qui lui sont liées restent en défaut de payer tout ou partie des compensations de service public dues pour l’électricité effectivement consommée, conformément au point 16 de cet dernier décret.

9

Le décret du gouvernement no 1157 définit les « personnes liées » (point 3, cinquième alinéa). Au point 26.1, ce décret prévoit que le gestionnaire de réseaux de distribution, l’entreprise acheteuse et l’administrateur suspendent le paiement si le prestataire de service public ou des personnes qui lui sont liées restent en défaut de payer des compensations de service public dues pour l’électricité effectivement consommée. La même disposition précise les conditions dans lesquelles ce paiement peut reprendre. Le point 26.2 du même décret prévoit que, si le prestataire de service public se retire d’un groupe de personnes liées dont un membre au moins reste en défaut de payer tout ou partie des compensations de service public dues pour l’électricité effectivement consommée, les compensations de service public impayées ne sont payées à ce prestataire que lorsque la personne à laquelle il était lié paye l’intégralité des compensations dues pour l’électricité effectivement consommée jusqu’au moment du retrait.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

10

Renerga exploite cinq centrales électriques qui produisent de l’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables. Elle fournit au réseau de distribution l’électricité qu’elle produit. Avec Achema AB et d’autres sociétés, Renerga fait partie d’UAB Achemos Grupė.

11

En vertu de contrats conclus les 7 janvier et 19 juin 2013 entre Renerga et les défenderesses au principal, Renerga s’engage à vendre à ces défenderesses, qui s’obligent en contrepartie à acheter et à payer, toute l’électricité qu’elle produit et fournit au réseau de distribution. Aux termes de ces contrats, le prix que les défenderesses au principal doivent payer à Renerga pour cette électricité est composé du prix de marché de l’électricité et de compensations de service public, qui correspondent à la différence entre, d’une part, le tarif fixe applicable à l’électricité produite par Renerga selon les modalités et les conditions prévues par la réglementation et, d’autre part, le prix du marché.

12

Le 25 février 2016, l’administrateur des compensations de service public, UAB « BALTPOOL », a informé les défenderesses au principal que, conformément aux décrets du gouvernement nos 916 et 1157, le paiement des compensations de service public à Renerga devait être intégralement suspendu jusqu’au paiement complet, par Achema ou d’autres personnes liées à celle-ci, des compensations de service public dues pour l’électricité effectivement consommée. Selon BALTPOOL, d’une part, Achema n’avait pas parfaitement exécuté son obligation de paiement des compensations de service public pour l’électricité effectivement consommée et, d’autre part, étant donné que le capital d’Achema ainsi que la participation de contrôle dans le capital de Renerga étaient détenus par Achemos Grupė, Achema et Renerga devaient être considérées comme des personnes liées.

13

Le 26 février 2016, Energijos skirstymo operatorius a informé Renerga que le paiement des compensations de service public dues à celle-ci était suspendu. Le 8 mars 2016, Lietuvos energijos gamyba a adressé à Renerga une communication analogue, dans laquelle elle indiquait que le paiement des compensations de service public était suspendu pour une durée indéterminée et que l’électricité vendue lui serait payée au seul prix du marché.

14

Par lettre du 10 mars 2016, adressée à Renerga, BALTPOOL a précisé que, le 31 janvier 2016, une facture avait été adressée à Achema pour un montant total de 629794,15 euros, incluant la taxe sur la valeur ajoutée, laquelle fixait la date d’échéance au 24 février 2016. Il ressort de la décision de renvoi que, à la date du 25 février 2016, Achema restant en défaut d’acquitter cette facture, le paiement des compensations de service public à Achema et à toutes les personnes qui lui étaient liées devait donc être suspendu.

15

Du fait de l’inexécution par les défenderesses au principal de leur obligation de payer à Renerga la totalité du prix dû pour l’électricité qu’elles avaient achetée, en particulier les compensations de service public constitutives d’un élément du prix de l’électricité achetée, celles-ci ont accumulé envers Renerga une dette d’un montant de 1248199,81 euros.

16

Cette dette a été acquittée le 21 avril 2016, date à laquelle BALTPOOL a adopté des décisions relatives au versement des compensations de service public suspendues, destinées aux défenderesses au principal.

17

Le 12 décembre 2016, Renerga a saisi le Vilniaus miesto apylinkės teismas (tribunal de district de la ville de Vilnius, Lituanie) d’une demande tendant à faire condamner Lietuvos energijos gamyba et Energijos skirstymo operatorius à lui payer, respectivement, 9172,84 euros et 572,82 euros à titre de dommages et intérêts moratoires pour le paiement tardif des compensations de service public au titre des contrats de vente d’électricité conclus les 7 janvier et 19 juin 2013. Renerga a, en outre, demandé que les défenderesses au principal soient condamnées à lui payer, sur ces montants, des intérêts au taux annuel de 8,05 %.

18

Estimant que le litige appelle des clarifications concernant la directive 2009/72, le Vilniaus miesto apylinkės teismas (tribunal de district de la ville de Vilnius) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

L’objectif que l’article 36, sous f), de la directive 2009/72 assigne à l’autorité de régulation aux fins des tâches de régulation définies dans ladite directive, à savoir “faire en sorte que les gestionnaires de réseau et les utilisateurs du réseau reçoivent des incitations suffisantes, tant à court terme qu’à long terme, pour améliorer les performances des réseaux et favoriser l’intégration du marché”, doit-il être compris et interprété en ce sens qu’il interdit de n’octroyer aucune incitation (compensations de service public) ou de les limiter ?

2)

Compte tenu de ce que, en vertu de l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2009/72, les obligations de service public doivent être clairement définies, transparentes, non discriminatoires et vérifiables et que l’article 3, paragraphe 6, de la même directive prévoit que la compensation financière pour l’accomplissement d’obligations de service public est octroyée d’une manière non discriminatoire et transparente :

L’article 3, paragraphe 2, et l’article 3, paragraphe 6, de la directive 2009/72 doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une limitation de la mesure de soutien octroyée aux [prestataires de service public] si ceux-ci exécutent parfaitement les obligations de service public qui leur incombent ?

Au sens de l’article 3, paragraphe 2, et de l’article 3, paragraphe 6, de la directive 2009/72, l’obligation prévue en droit national de suspendre le paiement des compensations de service public aux prestataires de service public indépendamment de l’exécution de leurs activités ou de leurs obligations, cette règle faisant dépendre le motif de la limitation (suspension) du paiement des compensations de service public de l’exécution des activités et des obligations incombant à une personne liée audit prestataire (en ce que la même entreprise détient une participation de contrôle dans cette personne et dans le prestataire) de payer les compensations de service public calculées sur sa propre consommation, est-elle considérée comme une obligation discriminatoire, obscure et restreignant la concurrence loyale ?

Au sens de l’article 3, paragraphe 2, et de l’article 3, paragraphe 6, de la directive 2009/72, l’obligation prévue en droit national de suspendre le paiement des compensations aux prestataires de service public alors que ceux-ci restent intégralement tenus d’exécuter leurs obligations de service public et leurs obligations contractuelles corrélatives envers les entreprises acheteuses d’électricité est-elle considérée comme une obligation discriminatoire, obscure et restreignant la concurrence loyale ?

3)

Au sens de l’article 3, paragraphe 15, de la directive 2009/72, qui impose aux États membres de notifier à la Commission, tous les deux ans, toute modification apportée aux mesures qu’ils ont prises pour remplir les obligations de service universel et de service public, un État membre doit-il notifier à la Commission une nouvelle réglementation qui établit des motifs, des règles et un mécanisme de limitation du paiement des compensations de service public aux prestataires de service public ?

4)

En introduisant dans sa législation nationale des motifs, des règles et un mécanisme de limitation des compensations payées aux prestataires de service public, un État membre enfreint-il les objectifs de mise en œuvre de la directive 2009/72 et les principes généraux du droit de l’Union (principes de sécurité juridique, de protection de la confiance légitime, de proportionnalité, de transparence et de non-discrimination) ? »

Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle

19

La Commission conteste la recevabilité de la demande de décision préjudicielle au motif que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’est pas utile pour la solution du litige au principal. En effet, Renerga ne serait pas tenue par des obligations de service public, au sens de l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2009/72, étant donné que ni les dispositions des décrets du gouvernement nos 916 et 1157 ni les contrats conclus avec les défenderesses au principal n’imposeraient d’obligations de service public aux producteurs d’électricité utilisant des sources d’énergie renouvelables, tels que Renerga.

20

À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, dans le cadre de la coopération entre cette dernière et les juridictions nationales instituée à l’article 267 TFUE, il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation ou la validité d’une règle de droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer (arrêt du 12 novembre 2015, Hewlett-Packard Belgium, C‑572/13, EU:C:2015:750, point 24 et jurisprudence citée).

21

Cependant, il résulte d’une jurisprudence constante que le rejet d’une demande de décision préjudicielle formée par une juridiction nationale peut se justifier si le droit de l’Union ne trouve à s’appliquer, ni directement ni indirectement, aux circonstances de l’espèce (voir, en ce sens, arrêt du 7 juillet 2011, Agafiţei e.a., C‑310/10, EU:C:2011:467, point 28).

22

En l’occurrence, par l’ensemble de ses questions préjudicielles, la juridiction de renvoi cherche, en substance, à savoir si la directive 2009/72, et plus précisément son article 3, paragraphes 2, 6 et 15, et son article 36, sous f), ainsi que les principes généraux du droit de l’Union s’opposent à l’application de dispositions nationales qui prévoient la possibilité de suspendre, au profit des producteurs d’électricité, le paiement de compensations de service public, visant à promouvoir la production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables, jusqu’au moment où les personnes liées à ces producteurs versent les compensations de service public dues pour l’électricité qu’ils ont effectivement consommée.

23

À cet égard, l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2009/72 prévoit que, en tenant pleinement compte des dispositions pertinentes du traité CE, en particulier de son article 86, les États membres peuvent imposer aux entreprises du secteur de l’électricité, dans l’intérêt économique général, des obligations de service public qui peuvent porter sur la sécurité, y compris la sécurité d’approvisionnement, la régularité, la qualité et le prix de la fourniture, ainsi que la protection de l’environnement, y compris l’efficacité énergétique, l’énergie produite à partir de sources d’énergie renouvelables et la protection du climat.

24

Or, il ne ressort pas clairement de la décision de renvoi si, dans les circonstances propres au litige au principal, Renerga était soumise à des obligations de service public imposées, en vertu de cette directive, par l’État membre concerné.

25

À cet effet, la Cour a, en application de l’article 101 de son règlement de procédure, adressé à la juridiction de renvoi une demande d’éclaircissement, laquelle a répondu par courrier du 26 mars 2018.

26

Dans sa réponse, la juridiction de renvoi a précisé que la législation lituanienne ne prévoyait pas, à la charge de Renerga, d’obligation impérative de produire et de fournir de l’électricité, à partir de sources d’énergie renouvelables. Selon cette même juridiction, Renerga n’était pas inscrite sur la liste des fournisseurs de services publics adoptée par le gouvernement lituanien, mais se serait engagée volontairement à produire de l’électricité et à la vendre aux défenderesses au principal. La juridiction de renvoi a également fait valoir que les relations juridiques liant Renerga aux défenderesses au principal étaient définies par les contrats qu’elles ont conclus les 7 janvier et 19 juin 2013 et régies par le droit civil et que ces contrats pouvaient être rompus, de telle sorte qu’il n’y aurait pas lieu d’affirmer que Renerga était tenue de fournir des services publics.

27

Ainsi, la réponse donnée par la juridiction de renvoi doit être comprise en ce sens que l’État membre concerné n’a pas imposé à Renerga d’obligation de service public, au sens de l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2009/72.

28

Il s’ensuit que les dispositions du droit de l’Union dont l’interprétation est demandée ne sauraient trouver à s’appliquer, ni directement ni indirectement, aux circonstances de l’affaire au principal et que, partant, l’ensemble des questions posées dans le cadre de cette affaire revêt un caractère hypothétique.

29

Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent que la demande de décision préjudicielle est irrecevable.

Sur les dépens

30

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) déclare et arrête :

 

La demande de décision préjudicielle introduite par le Vilniaus miesto apylinkės teismas (tribunal de district de la ville de Vilnius, Lituanie), par décision du 11 avril 2017, est irrecevable.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le lituanien.

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