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Document 62012TJ0473

Arrêt du Tribunal (neuvième chambre) du 5 février 2015 (publication par extraits).
Aer Lingus Ltd contre Commission européenne.
Aide d’État – Taxe irlandaise sur les passagers aériens – Tarif réduit pour les destinations situées au maximum à 300 km de l’aéroport de Dublin – Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché intérieur et ordonnant sa récupération – Avantage – Caractère sélectif – Identification des bénéficiaires de l’aide – Article 14 du règlement (CE) nº 659/1999 – Obligation de motivation.
Affaire T-473/12.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2015:78

ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

5 février 2015 ( *1 )

«Aide d’État — Taxe irlandaise sur les passagers aériens — Tarif réduit pour les destinations situées au maximum à 300 km de l’aéroport de Dublin — Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché intérieur et ordonnant sa récupération — Avantage — Caractère sélectif — Identification des bénéficiaires de l’aide — Article 14 du règlement (CE) no 659/1999 — Obligation de motivation»

Dans l’affaire T‑473/12,

Aer Lingus Ltd, établie à Dublin (Irlande), représentée par Mme K. Bacon, MM. D. Scannell, D. Bailey, barristers, et A. Burnside, solicitor,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. L. Flynn, D. Grespan et T. Maxian Rusche, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Irlande, représentée par Mme E. Creedon, M. A. Joyce et Mme J. Quaney, en qualité d’agents, assistés de MM. E. Regan, SC, et B. Doherty, barrister,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2013/199/UE de la Commission, du 25 juillet 2012, concernant l’aide d’État SA.29064 (11/C, ex 11/NN) – Taux d’imposition différenciés appliqués par l’Irlande au transport aérien (JO 2013, L 119, p. 30),

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. G. Berardis (rapporteur), président, O. Czúcz et A. Popescu, juges,

greffier : M. J. Plingers, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 juin 2014,

rend le présent

Arrêt ( 1 )

Antécédents du litige

1

La requérante, Aer Lingus Ltd, est une compagnie aérienne établie en Irlande, ayant des établissements en Irlande (aux aéroports de Dublin, de Cork et de Shannon) et au Royaume-Uni (aux aéroports de Londres Gatwick, de Londres Heathrow et de Belfast). Elle exploite des liaisons internes en Irlande ainsi que des liaisons internationales entre l’Irlande ou le Royaume-Uni et 70 destinations en Irlande, au Royaume-Uni, en Europe continentale et aux États-Unis.

2

L’article 55 du Finance Act (no 2) 2008 (deuxième loi de finances de 2008, ci‑après la «loi de finances») institue un droit d’accise, appelé Air travel tax (taxe sur le transport aérien, ci-après la «TTA»), à compter du 30 mars 2009, date d’entrée en vigueur de la loi.

3

La loi de finances prévoit que la TTA est perçue directement auprès des exploitants de lignes aériennes, pour tout passager voyageant sur un avion au départ d’un aéroport situé en Irlande (à l’exception des aéroports transportant moins de 10 000 passagers par an, puis, à compter du 3 juin 2009, 50000 passagers par an), et est exigible au moment où un passager quitte un aéroport à bord d’un avion capable de transporter plus de 20 passagers et non utilisé pour les besoins de l’État ou à des fins militaires. Si, in fine, la taxe est censée être répercutée sur le prix du billet des passagers, ce sont les exploitants de lignes aériennes qui en sont redevables et qui doivent s’en acquitter.

4

Au moment de son introduction, la TTA était perçue sur la base de la distance entre l’aéroport de départ et l’aéroport d’arrivée, au taux de deux euros dans le cas d’un vol au départ d’un aéroport situé en Irlande vers une destination située au maximum à 300 km de l’aéroport de Dublin et de dix euros dans tous les autres cas.

5

Le 21 juillet 2009, la Commission européenne a enregistré deux plaintes séparées, déposées par un concurrent de la requérante, l’une au titre de l’article 20, paragraphe 2, du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO L 83, p. 1), l’autre au titre de l’article 56 TFUE et du règlement (CE) no 1008/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 24 septembre 2008, établissant des règles communes pour l’exploitation de services aériens dans la Communauté (refonte) (JO L 293, p. 3), concernant plusieurs aspects de la TTA introduite par l’Irlande.

6

Faisant suite à la seconde plainte, la Commission a d’abord ouvert une enquête concernant une possible infraction à l’article 56 TFUE, relatif à la libre prestation de services, et au règlement no 1008/2008. Une lettre de mise en demeure a été adressée par la Commission aux autorités irlandaises sur ce fondement le 18 mars 2010 (ci-après la «lettre de mise en demeure»). À la suite de la lettre de mise en demeure, les taux d’imposition ont été modifiés, afin qu’un taux unique de trois euros puisse être appliqué pour tous les départs, quelle que soit la distance parcourue, dès le 1er mars 2011. L’enquête de la Commission relative à une violation de l’article 56 TFUE et du règlement no 1008/2008 a dès lors été clôturée.

7

La première plainte, fondée sur l’application des règles en matière d’aides d’État, dénonçait notamment le fait que le taux d’imposition plus faible (deux euros au lieu de dix euros) favorisait essentiellement les compagnies domestiques telles que Aer Arann, qui effectuaient l’essentiel de leurs vols vers des destinations situées à moins de 300 km de l’aéroport de Dublin. Dans cette même plainte, était également évoqué le fait que le caractère forfaitaire de la taxe serait discriminatoire dans la mesure où une telle taxe représentait une part plus importante du prix pour les compagnies à bas coûts que pour les compagnies aériennes traditionnelles. Enfin, la plainte dénonçait le fait que l’absence d’application de la TTA aux passagers en transit et en correspondance constituait une aide d’État illégale au profit des compagnies aériennes Aer Lingus et Aer Arann, étant donné que ces compagnies comptaient une part relativement élevée de passagers et de vols correspondant à ces catégories.

8

Par lettre du 13 juillet 2011, la Commission a informé l’Irlande de sa décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE à l’égard du taux national plus bas appliqué dans le cadre de la TTA pour la période comprise entre le 30 mars 2009 et le 1er mars 2011. La Commission a demandé aux autorités irlandaises de transmette une copie de la décision aux bénéficiaires.

9

Par une décision du 13 juillet 2011, dont un résumé est publié au Journal officiel de l’Union européenne du 18 octobre 2011 (JO C 306, p. 10), adoptée à l’issue de la phase préliminaire d’examen, la Commission a notamment constaté que l’absence d’application de la TTA aux passagers en correspondance ou en transit de même que l’utilisation d’une taxe à caractère forfaitaire ne constituaient pas une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. En revanche, elle a considéré que l’application d’un taux national plus bas entre le 30 mars 2009 et le 1er mars 2011 semblait constituer une aide d’État soulevant des questions quant à la compatibilité avec le marché intérieur, dans la mesure où elle favoriserait de manière illicite les vols nationaux par rapport aux vols transfrontaliers. Elle a, par conséquent, ouvert la procédure formelle d’examen concernant cette dernière mesure, invitant les parties intéressées à présenter leurs observations sur la mesure en cause.

10

Les autorités irlandaises ont fait parvenir leurs observations le 15 septembre 2011. La requérante n’a pas fait valoir d’observations à ce stade de la procédure.

11

Le 25 juillet 2012, la Commission a adopté la décision 2013/199/UE concernant l’aide d’État SA.29064 (11/C, ex 11/NN) – Taux d’imposition différenciés appliqués par l’Irlande au transport aérien (JO 2013, L 119, p. 30, ci-après la «décision attaquée»). Cette décision a par ailleurs été notifiée à la requérante par lettre du ministère des Finances irlandais du 23 août 2012 et reçue par celle-ci le 6 septembre 2012.

12

La Commission a conclu à l’article 1er de cette décision que l’aide d’État qui, en application de la loi de finances, revêtait en l’espèce la forme d’un taux d’imposition réduit sur le transport aérien applicable à tous les vols assurés par un avion capable de transporter plus de 20 passagers et non utilisé à des fins militaires ou pour les besoins de l’État, au départ d’un aéroport accueillant plus de 10 000 passagers par an vers une destination située au maximum à 300 km de l’aéroport de Dublin, illégalement appliquée par l’Irlande sur la période allant du 30 mars 2009 au 1er mars 2011 (ci-après la «période concernée»), en violation de l’article 108, paragraphe 3, TFUE, était incompatible avec le marché intérieur.

13

L’article 4 de cette décision prévoit que l’Irlande récupère auprès des bénéficiaires l’aide incompatible octroyée au titre du régime visé à l’article 1er. Ces bénéficiaires sont identifiés au considérant 70 de la décision attaquée comme étant Ryanair, la requérante, Aer Arann et d’autres transporteurs aériens qui doivent être identifiés par l’Irlande. Il est précisé au même point que le montant de l’aide d’État correspond à la différence entre le taux réduit de la TTA et le taux standard de dix euros, soit huit euros, prélevé sur chaque passager.

Procédure et conclusions des parties

14

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 1er novembre 2012, la requérante a introduit le présent recours.

15

Par acte déposé au greffe du Tribunal le 6 mars 2013, l’Irlande a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission. Le président de la sixième chambre du Tribunal a admis l’Irlande à intervenir par ordonnance du 17 avril 2013.

16

L’Irlande a déposé son mémoire en intervention le 4 juin 2013. Par lettre du 17 juin 2013, la Commission a communiqué au greffe qu’elle n’avait pas d’observations. La requérante a présenté ses observations sur ledit mémoire le 24 juillet 2013.

17

La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la neuvième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

18

La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler ou, à titre subsidiaire, annuler partiellement la décision attaquée ;

condamner la Commission aux dépens.

19

La Commission, soutenue par l’Irlande, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner la requérante aux dépens.

En droit

[omissis]

Sur les troisième et quatrième moyens, tirés d’une erreur de droit et d’une erreur manifeste d’appréciation dans la qualification et la quantification de l’aide, résultant de l’absence de prise en compte de la répercussion de la TTA sur les passagers, et d’une violation de l’article 14 du règlement no 659/1999 et des principes de proportionnalité et d’égalité de traitement par l’ordre de récupération de l’aide

78

Par son troisième moyen, la requérante allègue que la Commission a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d’appréciation en identifiant les transporteurs aériens soumis au taux inférieur comme étant les bénéficiaires de la prétendue aide d’un montant de huit euros par passager et en ordonnant la récupération de l’aide sur cette base, alors que la Commission a reconnu que la charge de cette taxe aurait pu être répercutée sur les passagers, qui étaient donc les principaux bénéficiaires du taux réduit.

79

Selon la requérante, la Commission aurait dû prendre cet élément en considération dans la qualification et la quantification de l’aide, et aurait dû évaluer l’avantage réellement conservé par les compagnies aériennes qui se sont acquittées de la TTA au taux de deux euros, et qui l’ont, en grande partie, répercutée auprès de leurs passagers. Dans la mesure où une quelconque partie de l’économie de huit euros représentée par la taxe inférieure a été répercutée sur les passagers et non conservée par les compagnies aériennes, la décision de la Commission exigeant la récupération de huit euros par passager aurait pour effet d’obliger les compagnies aériennes soumises à ce taux inférieur de rembourser plus que ce qu’elles ont effectivement reçu et serait, de ce fait, illégale.

80

Par son quatrième moyen, la requérante avance, en outre, que, étant donné qu’il est impossible de récupérer les huit euros par passager a posteriori auprès des passagers qui ont bénéficié du taux inférieur, l’ordre de récupération opère comme une taxe supplémentaire pesant sur les compagnies aériennes concernées et, par conséquent, équivaut à une sanction illégale de ces compagnies plutôt qu’à un retour à la situation antérieure à l’octroi de la prétendue aide. Cela serait disproportionné et constituerait une violation du principe d’égalité de traitement et, par conséquent, une infraction à l’article 14 du règlement no 659/1999.

81

S’agissant du troisième moyen, la Commission conteste les arguments de la requérante. En premier lieu, elle constate qu’il n’existait aucune obligation de répercuter la taxe sur les passagers en vertu de la législation en cause. Au contraire, chaque compagnie était libre de décider si le coût de la taxe devait être intégralement ou partiellement répercuté sur les passagers. En second lieu, la Commission avance que, même si l’économie de la taxe avait été intégralement répercutée, cela se serait également traduit par un avantage pour les compagnies aériennes concernées, dans la mesure où elles ont pu offrir des prix plus attrayants à leurs clients que si elles avaient été imposées au taux normal de dix euros. Il importe peu, dès lors, de savoir si le bénéficiaire a choisi de répercuter l’avantage sur ses clients et de réaliser ainsi des volumes de ventes plus élevés, ou d’absorber directement l’avantage en facturant un prix plus élevé. La conséquence logique était donc de récupérer l’intégralité du montant de l’aide, c’est-à-dire huit euros par passager, pour les vols soumis au taux inférieur de deux euros.

82

S’agissant du quatrième moyen, la Commission répond que la récupération des aides, dès lors qu’elle vise à rétablir la situation antérieure, ne saurait, en principe, être considérée comme une mesure disproportionnée. Par ailleurs, du fait que la restitution ne vise qu’au rétablissement de la situation antérieure, elle ne saurait en principe être considérée comme une sanction. Il n’y aurait donc aucune violation du principe d’égalité de traitement, dans la mesure où tous les bénéficiaires de l’aide sont tenus de rembourser l’aide illégale et incompatible.

83

À titre liminaire, il convient de rappeler que l’obligation pour l’État de supprimer une aide considérée par la Commission comme étant incompatible avec le marché intérieur vise au rétablissement de la situation antérieure. Cet objectif est atteint lorsque les bénéficiaires ont restitué la somme versée au titre de l’aide illégale, perdant ainsi l’avantage dont ils avaient bénéficié sur le marché par rapport à leurs concurrents, et lorsque la situation antérieure au versement de l’aide est rétablie (voir arrêt du 17 juin 1999, Belgique/Commission, C‑75/97, Rec, EU:C:1999:311, points 64 et 65 et jurisprudence citée ; arrêt du 13 février 2012, Budapesti Erőmű/Commission, T‑80/06 et T‑182/09, EU:T:2012:65, point 107).

84

Il convient de rappeler également qu’aucune disposition du droit de l’Union n’exige que la Commission, lorsqu’elle ordonne la restitution d’une aide déclarée incompatible avec le marché intérieur, fixe le montant exact de l’aide à restituer. Il suffit, en effet, que la décision de la Commission comporte des indications permettant à son destinataire de déterminer lui-même, sans difficultés excessives, ce montant (arrêts du 12 octobre 2000, Espagne/Commission, C‑480/98, Rec, EU:C:2000:559, point 25, et du 12 mai 2005, Commission/Grèce, C‑415/03, Rec, EU:C:2005:287, point 39). Par ailleurs, le dispositif d’un acte est indissociable de sa motivation et doit être interprété, si besoin est, en tenant compte des motifs qui ont conduit à son adoption (arrêts du 15 mai 1997, TWD/Commission, C‑355/95 P, Rec, EU:C:1997:241, point 21, et du 29 avril 2004, Italie/Commission, C‑298/00 P, Rec, EU:C:2004:240, point 97).

85

Cependant, si la Commission décide d’ordonner la récupération d’un montant déterminé, elle doit, conformément à son obligation d’examen diligent et impartial d’un dossier dans le cadre de l’article 108 TFUE, déterminer, d’une façon aussi précise que les circonstances de l’affaire le permettent, la valeur de l’aide dont l’entreprise a bénéficié (voir arrêt du 29 mars 2007, Scott/Commission, T‑366/00, Rec, EU:T:2007:99, point 95 et jurisprudence citée).

86

En rétablissant la situation antérieure au versement de l’aide, d’une part, la Commission est tenue de s’assurer que l’avantage réel de l’aide est éliminé et ainsi d’ordonner la récupération de la totalité de l’aide. Elle ne saurait, par souci de clémence pour le bénéficiaire, ordonner la récupération d’une somme inférieure à la valeur de l’aide reçue par ce dernier. D’autre part, la Commission n’est pas habilitée, pour marquer sa désapprobation en ce qui concerne la gravité de l’illégalité, à ordonner la récupération d’un montant supérieur à la valeur de l’aide reçue par le bénéficiaire (arrêt Scott/Commission, point 85 supra, EU:T:2007:99, point 95).

87

La requérante ne conteste pas que, même dans l’hypothèse où la TTA aurait été entièrement répercutée sur les passagers, l’application d’une taxe à taux réduit pourrait conférer un avantage à l’entreprise qui a l’obligation de s’acquitter de cette taxe. Elle conteste néanmoins l’étendue de cet avantage, qui a été évalué à huit euros par passager dans la décision attaquée.

88

À cet égard, tout d’abord, il convient de constater que l’article 55 de la loi de finances qualifie la TTA de «droit d’accise» (excise duty), en tant que taxe devant être imposée, perçue et payée pour chaque départ d’un passager à bord d’un avion depuis un aéroport situé en Irlande, ce que l’Irlande a d’ailleurs confirmé lors de l’audience.

89

Or, un droit d’accise est, par définition, une taxe indirecte perçue sur la consommation d’un bien ou d’un service particulier, à la différence des impôts directs tels que les impôts sur le revenu ou sur les bénéfices, qui sont directement supportés par les entreprises.

90

En l’espèce, il n’est pas contesté que les compagnies aériennes étaient tenues, en vertu de la loi de finances, d’appliquer la TTA au taux de deux euros pour tous les vols soumis à ce taux. Il est également constant entre les parties que, en vertu de l’article 23 du règlement no 1008/2008, les compagnies aériennes étaient tenues d’indiquer le montant de la TTA séparément dans le prix de chaque billet vendu à leurs passagers. En ce sens, la TTA était formellement destinée à être répercutée sur le prix du billet de vol payé par le passager, comme l’indique le considérant 8 de la décision attaquée.

91

Comme le fait valoir la requérante, il y a lieu de distinguer, dès lors, la notion de répercussion formelle ou légale, qui concerne la manière dont la taxe est légalement perçue et appliquée, de la notion de répercussion économique, qui consiste à déterminer dans quelle mesure les compagnies aériennes ont supporté le coût économique de la TTA, en adaptant éventuellement le prix du billet hors taxe en fonction du taux de la TTA effectivement applicable, ou, dans le cas de l’application de la TTA au taux réduit de deux euros, dans quelle mesure elles ont effectivement retenu l’avantage économique résultant de l’application de ce taux réduit.

92

La Commission a expliqué, au considérant 53 de la décision attaquée, que les compagnies qui s’acquittaient de la taxe au taux réduit de deux euros avaient un coût moins élevé à répercuter auprès de leurs clients ou à supporter elles-mêmes. Elle a assimilé ensuite ce coût réduit à des ressources économiques que les compagnies aériennes ont pu économiser et qui ont, de ce fait, amélioré leur situation économique par rapport aux autres compagnies aériennes.

93

Au considérant 57 de la décision attaquée, la Commission a répondu aux arguments des autorités irlandaises, selon lesquelles il n’y aurait aucun avantage en faveur des compagnies aériennes, dès lors que la taxe était essentiellement une taxe à la consommation destinée à être répercutée sur les passagers. La Commission a considéré, en se fondant sur l’arrêt Adria-Wien Pipeline et Wietersdorfer & Peggauer Zementwerke, point 45 supra (EU:C:2001:598), que, même dans les cas où il y aurait une obligation légale de répercuter la taxe en question sur les consommateurs, une réduction par rapport au taux normal de taxation serait susceptible de conférer un avantage sélectif aux compagnies aériennes qui doivent s’acquitter de cette taxe au taux réduit.

94

La Commission a reconnu, au même considérant 57 de la décision attaquée, que, dans le cas d’espèce, la charge économique de la taxe (the cost of the tax) pouvait être répercutée sur les passagers, bien qu’il n’existe aucun mécanisme permettant d’assurer que tel était effectivement le cas, et qu’il s’agissait d’un choix laissé à l’appréciation de chaque compagnie aérienne.

95

Or, dans une situation similaire, la Cour a elle-même considéré que, les taxes aéroportuaires affectant directement et de manière mécanique le prix du trajet, une différenciation dans le montant des taxes supportées par les passagers est automatiquement répercutée sur le coût du transport (arrêt Stylianakis, point 59 supra, EU:C:2003:72, point 28).

96

La Commission estime néanmoins que, même dans les cas où la TTA a été répercutée, les compagnies ont également bénéficié d’un avantage, dès lors qu’elles pouvaient offrir des prix plus attractifs à leurs clients, ce qui se serait traduit par un chiffre d’affaires plus élevé.

97

Dès lors, il convient de constater que, dans une situation comme en l’espèce où la TTA était censée être répercutée sur les passagers et où l’avantage économique découlant de l’application du taux réduit a également pu être répercuté sur les passagers, la Commission ne saurait présumer que l’avantage effectivement obtenu et conservé par les compagnies aériennes s’élevait, dans tous les cas, à huit euros par passager.

98

En effet, dans un tel cas, l’avantage effectivement obtenu par les compagnies aériennes ne consiste pas nécessairement dans la différence entre les deux taux, mais bien dans la possibilité d’offrir des prix plus attractifs à leurs clients et donc d’augmenter, de ce fait, leur chiffre d’affaires, comme la Commission l’a elle-même reconnu au considérant 57 de la décision attaquée.

99

Partant, pour les compagnies aériennes telles que la requérante qui se sont acquittées de la TTA au taux inférieur de deux euros, la Commission aurait dû déterminer dans quelle mesure celles-ci avaient effectivement répercuté auprès de leurs passagers le bénéfice économique résultant de l’application de la TTA au taux réduit, afin de pouvoir quantifier avec précision l’avantage dont elles ont réellement bénéficié, à moins qu’elle ne décidât de confier cette tâche aux autorités nationales en fournissant les indications nécessaires à cet égard.

100

Ainsi, ce ne serait que dans l’hypothèse où la requérante aurait systématiquement augmenté le prix de ses billets hors taxe de huit euros par billet, pour les vols soumis à la TTA au taux de deux euros, qu’il eût été possible de considérer que l’avantage économique résultant de l’application des taux différenciés s’élevait à huit euros par passager pour la requérante, dès lors que cet avantage n’a pas pu être, ne fût-ce que partiellement, répercuté sur les passagers.

101

Il convient de constater cependant que la Commission n’a, à aucun endroit dans la décision attaquée, ni dans le cadre du présent contentieux, expliqué en quoi une telle hypothèse serait la situation normale, plutôt que l’hypothèse dans laquelle les compagnies aériennes répercutent l’avantage auprès de leurs passagers, conformément à l’objectif affiché de la TTA, et alors même qu’elle reconnaît, par ailleurs, qu’une telle répercussion était possible (voir point 95 ci-dessus).

102

En outre, la Commission n’a pas suffisamment tenu compte de la situation particulière du marché en l’espèce et de ses contraintes concurrentielles, dans la mesure où toutes les compagnies aériennes effectuant des vols de moins de 300 km (calculés depuis l’aéroport de Dublin) à partir d’un aéroport situé en Irlande étaient soumises à la TTA au taux de deux euros par passager. Ainsi, la Commission n’a pas établi en quoi, dans de telles circonstances, les compagnies aériennes dont les vols étaient soumis à la TTA au taux réduit de deux euros par passager ont bénéficié d’un avantage correspondant à la différence entre les deux taux de la TTA, c’est-à-dire de huit euros par passager.

103

Ce faisant, la Commission a commis une erreur d’appréciation et une erreur de droit.

104

En effet, comme le fait valoir à juste titre la requérante, le recouvrement d’une aide doit être limité aux avantages financiers découlant effectivement de la mise à disposition de l’aide au bénéficiaire et être proportionnel à ceux-ci (voir, en ce sens, arrêt du 22 janvier 2013, Salzgitter/Commission, T‑308/00 RENV, Rec, EU:T:2013:30, point 138).

105

Dès lors, si l’avantage résultant de l’application d’un taux réduit pouvait consister dans l’amélioration de la position concurrentielle des compagnies aériennes, du fait d’avoir pu offrir des prix plus compétitifs, la Commission aurait dû se limiter à ordonner la récupération des montants correspondant effectivement à cet avantage ou, s’il s’avérait impossible de déterminer ces montants avec exactitude dans la décision, à confier cette tâche aux autorités nationales, en fournissant les indications nécessaires à cet effet, conformément à la jurisprudence mentionnée au point 85 ci-dessus.

106

Selon la Commission, si la thèse de la requérante devait être suivie, cela conduirait à obliger la Commission ou les autorités nationales à évaluer, dans chaque cas concret, les effets de l’aide sur les bénéficiaires en fonction des choix subjectifs effectués par ceux-ci, ce qui irait à l’encontre de la jurisprudence mentionnée au point 44 ci-dessus et de l’arrêt du 15 décembre 2005, Unicredito Italiano (C‑148/04, Rec, EU:C:2005:774).

107

Dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, la Cour a rappelé, en effet, que la suppression d’une aide illégale par voie de récupération est la conséquence logique de la constatation de son illégalité. Cette récupération en vue du rétablissement de la situation antérieure ne saurait, en principe, être considérée comme une mesure disproportionnée par rapport aux objectifs des dispositions du traité en matière d’aides d’État. Par la restitution, le bénéficiaire perd l’avantage dont il avait bénéficié sur le marché par rapport à ses concurrents et la situation antérieure à l’octroi de l’aide est rétablie (voir arrêt Unicredito Italiano, point 106 supra, EU:C:2005:774, point 113 et jurisprudence citée).

108

La Cour a considéré, dès lors, que les montants à restituer ne sauraient être déterminés en considération d’opérations différentes qui auraient pu être mises en œuvre par les entreprises si elles n’avaient pas opté pour la forme d’opération assortie de l’aide. En effet, ce choix a été effectué en connaissance du risque de récupération d’aides accordées sans respect de la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 3, TFUE. Lesdites entreprises auraient pu éviter ce risque en optant immédiatement pour des opérations structurées différemment. De surcroît, le rétablissement de la situation antérieure signifie le retour, autant que possible, à la situation qui aurait prévalu si les opérations en cause avaient été réalisées sans octroi de la réduction d’impôt (voir, en ce sens, arrêt Unicredito Italiano, point 106 supra, EU:C:2005:774, points 114 à 117).

109

Selon la Cour, ce rétablissement n’implique pas une reconstitution différente du passé en fonction d’éléments hypothétiques tels que les choix, souvent multiples, qui auraient pu être faits par les opérateurs intéressés, d’autant que les choix effectivement opérés avec le bénéfice de l’aide peuvent s’avérer irréversibles. Le rétablissement de la situation antérieure permet uniquement la prise en compte, au stade de la récupération de l’aide par les autorités nationales, du traitement fiscal le cas échéant plus favorable que celui de droit commun qui, en l’absence de l’aide illégale et en vertu de règles internes compatibles avec le droit de l’Union, aurait été accordé au titre de l’opération effectivement réalisée (arrêt Unicredito Italiano, point 106 supra, EU:C:2005:774, points 118 à 119).

110

Il convient de relever toutefois que, contrairement à l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Unicredito Italiano, point 106 supra (EU:C:2005:774), invoqué par la Commission, les entreprises bénéficiaires, en l’espèce, n’auraient pas pu opter pour une opération différente que celle qui était assortie d’une aide. En effet, elles étaient tenues, en vertu de la législation nationale applicable pendant la période concernée, d’appliquer la TTA au taux de deux euros par passager pour tous les vols de moins de 300 km, calculés à partir de l’aéroport de Dublin, au départ d’un aéroport situé en Irlande. Pour les mêmes raisons, il leur était légalement impossible de percevoir la TTA au taux de dix euros auprès des passagers pour ces vols.

111

Il leur était, certes, possible d’augmenter le prix du billet hors taxe afin d’absorber l’avantage résultant de l’application de la TTA au taux réduit de deux euros. Toutefois, la Commission ne pouvait pas déterminer l’avantage effectivement obtenu par les compagnies aériennes sans tenir compte des circonstances de l’espèce. Or, eu égard au fonctionnement de la TTA et aux contraintes concurrentielles auxquelles les compagnies aériennes étaient exposées pour les vols auxquels la TTA au taux de deux euros était applicable (voir point 103 ci-dessus), la Commission ne pouvait pas présumer que l’avantage économique résultant de l’application du taux réduit de la TTA n’avait aucunement été répercuté sur les passagers.

112

Dès lors, la nécessité, découlant de la jurisprudence mentionnée au point 86 ci-dessus, de quantifier de manière aussi précise que les circonstances le permettent l’avantage dont ont effectivement bénéficié les compagnies aériennes en l’espèce, du fait de l’application du taux réduit de la TTA, n’équivaut pas à reconstituer le passé en fonction d’éléments hypothétiques tels que les choix, souvent multiples, qui auraient pu être faits par les opérateurs intéressés, comme le fait valoir la Commission, mais vise au contraire à assurer que le bénéficiaire perde l’avantage dont il avait bénéficié sur le marché par rapport à ses concurrents, ni plus ni moins, et à rétablir la situation antérieure à l’octroi de l’aide.

113

En outre, l’aide dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Unicredito Italiano, point 106 supra (EU:C:2005:774), consistait en un avantage fiscal sous la forme d’une réduction à 12,5 % du taux d’impôt sur le revenu pour les banques qui entreprenaient une fusion ou une restructuration semblable, pendant cinq périodes d’imposition consécutives, à certaines conditions. Il n’est pas contesté que l’impôt sur le revenu constitue une charge qui est effectivement et exclusivement supportée par les entreprises qui y sont assujetties, contrairement à la TTA en l’espèce qui, en tant que droit d’accise, était uniquement perçue et collectée par les compagnies aériennes, mais qui était, in fine, effectivement payée et, au moins partiellement sinon totalement, supportée par les passagers.

114

Enfin, la Commission n’a pas établi à suffisance de droit, dans sa décision, que la récupération de huit euros par passager était nécessaire afin d’assurer le rétablissement de la situation antérieure, c’est-à-dire le retour, autant que possible, à la situation qui aurait prévalu si les opérations en cause avaient été réalisées sans octroi de la réduction d’impôt ou, en d’autres termes, si les vols assujettis au taux de deux euros par passager avaient été soumis à une taxe de dix euros par passager.

115

En effet, la récupération d’un montant de huit euros par passager auprès des compagnies aériennes ne permettrait pas d’assurer le rétablissement d’une situation qui aurait prévalu si les opérations en cause avaient été réalisées sans l’octroi de l’aide en cause, puisqu’il n’est pas possible, pour les compagnies aériennes, de récupérer rétroactivement auprès de leurs clients les huit euros par passager qui auraient dû être perçus. La récupération d’un montant de huit euros par passager auprès des compagnies n’est pas nécessaire, dès lors, afin d’éliminer la distorsion de concurrence causée par l’avantage concurrentiel procuré par une telle aide (voir, en ce sens, arrêt du 8 décembre 2011, Residex Capital IV, C‑275/10, Rec, EU:C:2011:814, point 34 et jurisprudence citée). Au contraire, la récupération d’un tel montant risquerait de générer des distorsions de concurrence supplémentaires, comme le fait valoir à juste titre la requérante, puisqu’elle pourrait conduire à récupérer plus auprès des compagnies aériennes que l’avantage dont elles ont réellement bénéficié.

116

La Commission aurait dû, dès lors, tenir compte des particularités de la TTA en tant que droit d’accise destiné à être répercuté auprès des passagers par les compagnies aériennes pour tous les vols soumis au taux de deux euros pendant la période concernée. Dans la mesure où l’avantage économique résultant de l’application de ce taux réduit a pu être, ne fût-ce que partiellement, répercuté sur les passagers, la Commission n’était pas en droit de considérer que l’avantage dont ont bénéficié les compagnies aériennes s’élevait automatiquement, dans tous les cas, à huit euros par passager.

117

À cet égard, la Commission invoque sa pratique décisionnelle constante en matière d’aides fiscales impliquant des droits d’accises, selon laquelle des exonérations de telles charges octroient un avantage aux entreprises chargées de payer la taxe, même si celle-ci a pu être répercutée sur les consommateurs.

118

Il convient de rappeler, toutefois, que c’est dans le seul cadre des dispositions pertinentes du traité ainsi que des mesures prises pour sa mise en œuvre que doit être apprécié le caractère d’aide d’État d’une certaine mesure, et non au regard d’une éventuelle pratique décisionnelle antérieure de la Commission (arrêts du 30 septembre 2003, Freistaat Sachsen e.a./Commission, C‑57/00 P et C‑61/00 P, Rec, EU:C:2003:510, points 52 et 53, et du 15 juin 2005, Regione autonoma della Sardegna/Commission, T‑171/02, Rec, EU:T:2005:219, point 177).

119

En tout état de cause, les décisions invoquées par la Commission, qui figurent également en note de bas de page au considérant 57 de la décision attaquée, ne concernaient pas des taxes qui étaient supportées par les compagnies aériennes, comme l’indique la Commission, mais des taxes sur l’énergie, prévoyant un taux réduit ou des exonérations pour certaines catégories d’entreprises. Dans toutes ces affaires, les taxes n’étaient pas destinées à être répercutées par les entreprises bénéficiaires auprès de leurs clients. En effet, les droits d’accise portaient sur des intrants (en l’occurrence, l’énergie) qu’elles consommaient elles-mêmes, et non sur des produits ou services destinés à être vendus à leurs clients, comme en l’espèce. Enfin, il convient de noter que dans aucune de ces affaires la Commission n’a ordonné la récupération des aides auprès des bénéficiaires, mais qu’elle a, au contraire, déclaré ces aides compatibles avec le marché intérieur sur la base de l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE.

120

Il convient de noter, en outre, que l’arrêt Adria-Wien Pipeline et Wietersdorfer & Peggauer Zementwerke, point 45 supra (EU:C:2001:598), mentionné par la Commission sous le considérant 57 de la décision attaquée, permet, certes, de soutenir la thèse selon laquelle l’application d’une taxe à taux réduit peut conférer un avantage sélectif aux entreprises soumises à cette taxe, même si elles sont soumises à l’obligation légale de répercuter cette taxe sur leurs clients, mais il n’établit pas que, en cas de pluralité de bénéficiaires, le montant de l’aide doive être imputé dans son intégralité aux entreprises qui répercutent cette taxe auprès de leurs clients.

121

Par ailleurs, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, la Cour n’a pas constaté que l’aide devait être récupérée auprès des fournisseurs d’énergie, qui étaient directement chargés de payer la taxe et de la répercuter auprès de leurs clients, comme les compagnies aériennes en l’espèce, mais bien auprès des entreprises clientes de ceux-ci, dont il était prouvé qu’elles avaient pour activité principale la fabrication de biens corporels et qui avaient droit au remboursement des taxes sur l’énergie.

122

La circonstance qu’en l’espèce les clients des compagnies aériennes assujetties à la TTA ne sont pas des entreprises, au sens du droit de l’Union, de sorte qu’aucune aide ne pouvait être récupérée à leur égard, ne saurait remettre en cause l’obligation, pour la Commission, d’identifier avec précision les bénéficiaires d’une aide, c’est-à-dire les entreprises qui ont eu la jouissance effective de celle-ci (arrêt du 3 juillet 2003, Belgique/Commission, C‑457/00, Rec, EU:C:2003:387, point 55), et de limiter le recouvrement de l’aide aux avantages financiers découlant effectivement de la mise à disposition de l’aide auprès de ceux-ci (voir, en ce sens, arrêt Salzgitter/Commission, point 104 supra, EU:T:2013:30, point 138).

123

Il y a lieu de constater, dès lors, que la Commission a commis une erreur d’appréciation et une erreur de droit en fixant le montant de l’aide à récupérer auprès des compagnies aériennes à huit euros par passager, d’une part, et a violé l’article 14 du règlement no 659/1999 en ordonnant la récupération d’un tel montant auprès de celles-ci, d’autre part.

124

Partant, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur une éventuelle violation des principes de proportionnalité et d’égalité de traitement invoquée par la requérante, il convient de faire droit aux troisième et quatrième moyens de la requérante et d’annuler la décision attaquée dans la mesure où l’aide à récupérer auprès des compagnies aériennes y est évaluée à huit euros par passager et où l’ordre de récupération est, de ce fait, également entaché d’une illégalité.

125

À cet égard, il convient de noter que l’article 4 de la décision attaquée prévoit la récupération des aides auprès des bénéficiaires, qui sont identifiés au considérant 70 de la même décision, pour un montant de huit euros par passager, montant qui est également fixé au même considérant.

126

Or, selon une jurisprudence constante, les motifs d’une décision en matière d’aides d’État doivent être pris en considération pour l’interprétation de son dispositif (voir arrêt du 20 mars 2014, Rousse Industry/Commission, C‑271/13 P, EU:C:2014:175, point 69 et jurisprudence citée).

127

Il y a lieu, dès lors, d’annuler l’article 4 de la décision attaquée, lu à la lumière du considérant 70 de ladite décision, dans la mesure où celui-ci ordonne la récupération de l’aide, évaluée à huit euros par passager, auprès des compagnies aériennes qui ont effectué des vols assujettis à la TTA au taux inférieur de deux euros pendant la période concernée, et de rejeter le recours pour le surplus.

[omissis]

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

 

1)

L’article 4 de la décision 2013/199/UE de la Commission, du 25 juillet 2012, concernant l’aide d’État SA.29064 (11/C, ex 11/NN) – Taux d’imposition différenciés appliqués par l’Irlande au transport aérien, est annulé, en ce qu’il ordonne la récupération de l’aide auprès des bénéficiaires, pour un montant qui est fixé à huit euros par passager au considérant 70 de ladite décision.

 

2)

Le recours est rejeté pour le surplus.

 

3)

La Commission européenne est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, la moitié des dépens exposés par Aer Lingus Ltd.

 

4)

Aer Lingus supportera la moitié de ses propres dépens.

 

5)

L’Irlande supportera ses propres dépens.

 

Berardis

Czúcz

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 5 février 2015.

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.

( 1 ) Ne sont reproduits que les points du présent arrêt dont le Tribunal estime la publication utile.

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