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Document 62011CJ0463

Arrêt de la Cour (quatrième chambre) du 18 avril 2013.
L contre M.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Verwaltungsgerichtshof Baden-Württemberg.
Directive 2001/42/CE – Évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement – Article 3, paragraphes 4 et 5 – Détermination du type de plans susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement – Plans de construction ‘de développement interne’ dispensés d’évaluation environnementale en vertu de la législation nationale – Appréciation erronée de la condition qualitative du ‘développement interne’ – Absence d’incidence sur la validité du plan de construction – Atteinte à l’effet utile de la directive.
Affaire C‑463/11.

Court reports – general

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2013:247

ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

18 avril 2013 ( *1 )

«Directive 2001/42/CE — Évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement — Article 3, paragraphes 4 et 5 — Détermination du type de plans susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement — Plans de construction ‘de développement interne’ dispensés d’évaluation environnementale en vertu de la législation nationale — Appréciation erronée de la condition qualitative du ‘développement interne’ — Absence d’incidence sur la validité du plan de construction — Atteinte à l’effet utile de la directive»

Dans l’affaire C‑463/11,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Verwaltungsgerichtshof Baden-Württemberg (Allemagne), par décision du 27 juillet 2011, parvenue à la Cour le 6 septembre 2011, dans la procédure

L

contre

M,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen (rapporteur), président de chambre, MM. J. Malenovský, U. Lõhmus, M. Safjan et Mme A. Prechal, juges,

avocat général: M. M. Wathelet,

greffier: Mme A. Impellizzeri, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 18 octobre 2012,

considérant les observations présentées:

pour L, par Me G. Rehmann, Rechtsanwalt,

pour M, par Me D. Weiblen, Rechtsanwalt,

pour le gouvernement allemand, par M. T. Henze et Mme K. Petersen, en qualité d’agents,

pour le gouvernement hellénique, par M. G. Karipsiades, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par MM. F. Bulst et P. Oliver, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 19 décembre 2012,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 3, paragraphes 4 et 5, de la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 juin 2001, relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement (JO L 197, p. 30, ci-après la «directive»).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant L à M, une commune, au sujet de la validité d’un plan de construction qui a été élaboré par celle-ci sans réalisation d’une évaluation environnementale au titre de la directive.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Aux termes de l’article 1er de la directive, celle-ci a pour objet d’assurer un niveau élevé de protection de l’environnement et de contribuer à l’intégration de considérations environnementales dans l’élaboration et l’adoption de plans et de programmes en vue de promouvoir un développement durable en prévoyant que, conformément à cette directive, certains plans et programmes susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement soient soumis à une évaluation environnementale.

4

L’article 3 de la directive, qui définit le champ d’application de celle-ci, dispose:

«1.   Une évaluation environnementale est effectuée, conformément aux articles 4 à 9, pour les plans et programmes visés aux paragraphes 2, 3 et 4 susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

2.   Sous réserve du paragraphe 3, une évaluation environnementale est effectuée pour tous les plans et programmes:

a)

qui sont élaborés pour les secteurs [...] de l’aménagement du territoire urbain et rural ou de l’affectation des sols et qui définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 85/337/CEE [du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement (JO L 175, p. 40, telle que modifiée par la directive 97/11/CE du Conseil, du 3 mars 1997 (JO L 73, p. 5)] pourra être autorisée à l’avenir; [...]

[...]

3.   Les plans et programmes visés au paragraphe 2 qui déterminent l’utilisation de petites zones au niveau local [...] ne sont obligatoirement soumis à une évaluation environnementale que lorsque les États membres établissent qu’ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

4.   Pour les plans et programmes, autres que ceux visés au paragraphe 2, qui définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets pourra être autorisée à l’avenir, les États membres déterminent s’ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

5.   Les États membres déterminent si les plans ou programmes visés aux paragraphes 3 et 4 sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, soit en procédant à un examen au cas par cas, soit en déterminant des types de plans et programmes ou en combinant ces deux approches. À cette fin, les États membres tiennent compte, en tout état de cause, des critères pertinents fixés à l’annexe II, afin de faire en sorte que les plans et programmes susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement soient couverts par la présente directive.

[...]»

5

L’annexe II de la directive énumère les critères permettant de déterminer l’ampleur probable des incidences visées à l’article 3, paragraphe 5, de cette directive.

Le droit allemand

6

Le code de l’urbanisme (Baugesetzbuch), dans sa version consolidée du 23 septembre 2004 (BGBl. 2004 I, p. 2414), telle que modifiée par la loi du 22 juillet 2011 (BGBl. 2011 I, p. 1509, ci-après le «BauGB»), régit la planification urbaine.

7

Il ressort de l’article 1er, paragraphe 6, point 7, du BauGB que, lors de l’élaboration des plans directeurs d’urbanisme («Bauleitpläne»), les communes tiennent compte notamment des intérêts de la protection de l’environnement, y compris de la protection de la nature et de la conservation des paysages.

8

Lesdits plans directeurs d’urbanisme, qui prennent la forme d’un plan d’utilisation des surfaces («Flächennutzungsplan») ou d’un plan de construction («Bebauungsplan»), sont élaborés, complétés ou modifiés selon une procédure standard (articles 2 et suivants du BauGB), à moins qu’il soit possible de recourir à la procédure simplifiée (article 13 du BauGB) ou, dans le cas des plans de construction de développement interne, à une procédure accélérée (article 13 bis du BauGB).

9

La loi portant adaptation au droit européen de la législation sur l’urbanisme (Europarechtsanpassungsgesetz Bau), du 24 juin 2004 (BGBl. 2004 I, p. 1359), vise à transposer la directive en droit allemand. Cette loi a intégré l’évaluation environnementale dans la procédure standard d’élaboration des plans directeurs d’urbanisme.

10

En ce qui concerne cette procédure standard, l’article 2, paragraphes 3 et 4, du BauGB, dispose:

«(3)   Lors de l’élaboration des plans directeurs d’urbanisme, il convient de rechercher et d’évaluer les intérêts qui présentent une importance aux fins de la mise en balance [notamment des intérêts publics et privés].

(4)   Une évaluation environnementale est réalisée pour les intérêts de l’environnement visés à l’article 1er, paragraphe 6, point 7 [...]; celle-ci consiste à rechercher les incidences environnementales notables probables, puis à les décrire et à les évaluer dans un rapport sur l’environnement [...]»

11

En ce qui concerne la procédure simplifiée, l’article 13, paragraphe 3, première phrase, du BauGB prévoit que «[celle-ci] est réalisée sans évaluation environnementale au sens de l’article 2, paragraphe 4 [...]».

12

En ce qui concerne la procédure accélérée, l’article 13 bis du BauGB précise:

«(1)   Un plan de construction visant à la remise en état de surfaces, à la densification ou à d’autres mesures de développement interne (‘plan de construction de développement interne’ [‘Bebauungsplan der Innenentwicklung’]) peut être élaboré selon une procédure accélérée. Le plan de construction ne peut être élaboré selon une procédure accélérée que si celui-ci fixe [...] une superficie de surface au sol constructible comprenant au total

1.

moins de 20000 m2 [...]

[...]

[…] La procédure accélérée est exclue lorsque le plan de construction crée les conditions de la licéité de projets qui doivent eux-mêmes obligatoirement faire l’objet d’une évaluation environnementale en application de la loi sur l’évaluation des incidences sur l’environnement ou du droit du Land. La procédure accélérée est également exclue lorsqu’il existe des raisons de penser que des intérêts protégés en vertu de l’article 1er, paragraphe 6, point 7, sous b), sont lésés.

(2)   Dans le cadre de la procédure accélérée

1.

les dispositions relatives à la procédure simplifiée prévues à l’article 13, paragraphes 2 et 3, première phrase, sont applicables par analogie;

[...]»

13

L’article 214 du BauGB, qui fait partie de la section intitulée «Maintien en vigueur des plans», est libellé en ces termes:

«(1)   La violation de dispositions de forme et de procédure prévues par le présent code n’a une incidence sur la validité du plan d’utilisation des surfaces et sur les règlements municipaux pris en application de ce même code que lorsque:

1.

En violation de l’article 2, paragraphe 3, des aspects essentiels des intérêts affectés par la planification, que la commune connaissait ou aurait dû connaître, n’ont pas été recherchés ou évalués correctement, que ce vice est évident et qu’il a eu une incidence sur l’issue de la procédure;

[...]

(2 bis)   Pour les plans de construction qui ont été établis selon une procédure accélérée en application de l’article 13 bis, les dispositions suivantes s’ajoutent à celles des paragraphes 1 et 2 ci-dessus:

1.

La violation de dispositions de forme et de procédure et de dispositions relatives au rapport qu’entretient le plan de construction avec le plan d’utilisation des surfaces est sans incidence sur la validité du plan de construction, y compris dans le cas où elle a son origine dans le fait que la condition [qualitative] visée à l’article 13 bis, paragraphe 1, première phrase, a été appréciée de manière erronée.

[...]»

Le litige au principal et la question préjudicielle

14

Le 14 septembre 2005, M a décidé d’élaborer un plan de construction selon la procédure standard prévue à l’article 2, paragraphe 4, du BauGB pour une zone d’une superficie de 37806 m2 afin d’opérer une planification à partir de l’urbanisation existante et de la compléter par de nouvelles zones résidentielles en périphérie.

15

Dans le cadre de l’enquête publique organisée à la suite de cette décision, L et d’autres personnes ont soulevé des objections à l’encontre de ce plan, notamment pour des raisons de protection de l’environnement.

16

Le 23 avril 2008, M a arrêté un projet portant sur une zone plus petite. Elle a décidé d’élaborer le plan de construction y afférent selon la procédure accélérée prévue à l’article 13 bis du BauGB.

17

Il ressort de la motivation de la décision de M que ledit plan n’est pas susceptible de produire des effets négatifs durables sur l’environnement et qu’il prévoit au total une surface au sol constructible de 11800 m2 environ, ce qui est en dessous du seuil fixé à l’article 13 bis, paragraphe 1, deuxième phrase, point 1, du BauGB.

18

Le 26 avril 2008, M a mis le plan de construction à la disposition du public pendant un mois, avec la possibilité de présenter des observations. À cette occasion, L et d’autres personnes ont réitéré leurs objections et ont réclamé une évaluation environnementale au titre de la directive.

19

Sans procéder à une telle évaluation, M a, le 23 juillet 2008, adopté le plan de construction faisant l’objet du litige au principal en tant que «plan de construction de développement interne», sous la forme d’un règlement municipal.

20

Le 31 juillet 2009, L a introduit un recours contestant la légalité de ce plan auprès de la juridiction de renvoi. Il soutient notamment que M n’a pas tenu compte du fait qu’elle urbanisait des zones du secteur extérieur à l’agglomération, raison pour laquelle il ne saurait s’agir d’un plan «de développement interne» au sens de l’article 13 bis du BauGB. M soutient en revanche que le recours à la procédure accélérée instaurée par ledit article 13 bis était licite.

21

La juridiction de renvoi considère que le plan en cause n’est pas un plan de construction «de développement interne» au sens de l’article 13 bis, paragraphe 1, du BauGB et qu’il ne pouvait donc pas être adopté par le biais de la procédure accélérée sans évaluation environnementale, en raison du fait qu’une partie de la surface incluse dans le plan dépasse la zone déjà bâtie.

22

Cette juridiction estime donc que ce plan a été adopté à la suite d’une appréciation erronée de la condition qualitative de l’article 13 bis, paragraphe 1, première phrase, du BauGB, aux termes de laquelle un plan de construction visant à la remise en état de surfaces, à la densification ou à d’autres mesures de développement interne peut être élaboré selon une procédure accélérée. Cette appréciation serait toutefois, en vertu de l’article 214, paragraphe 2 bis, point 1, du même code, sans incidence sur la validité dudit plan.

23

À cet égard, la juridiction de renvoi précise, d’une part, que, en dispensant d’une évaluation environnementale les plans de construction «de développement interne» au sens de l’article 13 bis, paragraphe 1, du BauGB, le législateur national a fait usage de l’habilitation prévue à l’article 3, paragraphe 5, de la directive et a établi cette exception en déterminant un type particulier de plan, tout en tenant compte des critères pertinents fixés à l’annexe II de cette même directive. D’autre part, le législateur a prévu à l’article 214, paragraphe 2 bis, point 1, du BauGB qu’une violation de dispositions de procédure qui trouve son origine dans le fait qu’une commune a apprécié erronément la condition qualitative est sans incidence sur la validité du plan concerné.

24

Sur la base de ces considérations, la juridiction de renvoi se demande si le législateur national, en combinant la procédure accélérée de l’article 13 bis du BauGB avec la disposition relative au maintien en vigueur des plans de l’article 214, paragraphe 2 bis, point 1, du même code, a excédé les limites de la marge d’appréciation que lui accorde l’article 3, paragraphe 5, de la directive.

25

Dans ces conditions, le Verwaltungsgerichtshof Baden-Württemberg a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Un État membre excède-t-il les limites de sa marge d’appréciation en application de l’article 3, paragraphes 4 et 5, de la [directive] lorsque, dans le cadre de la législation sur les plans de construction des communes, lesquels déterminent l’utilisation de petites zones au niveau local et définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets pourra être autorisée à l’avenir mais ne relèvent pas de l’article 3, paragraphe 2, de la [directive], il détermine, en tenant compte des critères pertinents de l’annexe II de la directive, un type particulier de plan de construction caractérisé à la fois par un seuil supérieur de superficie et par une condition qualitative, en prévoyant, d’une part, que l’élaboration d’un tel plan n’est pas soumise aux dispositions de procédure relatives à l’évaluation environnementale normalement applicables aux plans de construction et, d’autre part, qu’une violation de ces dispositions de procédure qui a son origine dans le fait que la commune a apprécié de manière erronée la condition qualitative est sans incidence sur la validité de ce plan de construction d’un type particulier?»

Sur la question préjudicielle

Sur la recevabilité

26

Le gouvernement allemand, sans soulever expressément d’exception d’irrecevabilité, a exprimé des doutes quant à la pertinence de la question préjudicielle pour la solution du litige au principal.

27

Dans ses observations, ledit gouvernement soutient, en substance, que l’article 214, paragraphe 2 bis, point 1, du BauGB est d’interprétation stricte et que, dans des circonstances telles que celles caractérisant l’adoption du plan de construction en cause au principal, cette disposition ne trouve probablement pas à s’appliquer.

28

À cet égard, il suffit de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, les questions relatives à l’interprétation du droit de l’Union posées par le juge national dans le cadre réglementaire et factuel qu’il définit sous sa responsabilité, et dont il n’appartient pas à la Cour de vérifier l’exactitude, bénéficient d’une présomption de pertinence. Le refus de la Cour de statuer sur une demande de décision préjudicielle formée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée du droit de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (arrêt du 12 octobre 2010, Rosenbladt, C-45/09, Rec. p. I-9391, point 33 et jurisprudence citée).

29

Or, en l’occurrence, la question posée vise l’interprétation de l’article 3, paragraphes 4 et 5, de la directive. Il n’appartient pas à la Cour, mais exclusivement à la juridiction de renvoi de se prononcer sur l’interprétation du droit national (arrêt du 28 juin 2012, Caronna, C‑7/11, point 54) et de déterminer dans quelle mesure l’article 214, paragraphe 2 bis, point 1, du BauGB est susceptible de s’appliquer dans l’affaire au principal. Par ailleurs, rien de ce qui ressort de la décision de renvoi n’indique que ladite disposition nationale pourrait ne pas trouver à s’appliquer dans cette affaire.

30

Dans ces conditions, la demande de décision préjudicielle doit être considérée comme recevable.

Sur le fond

31

À titre liminaire, il convient de rappeler que l’objectif essentiel de la directive, ainsi qu’il ressort de son article 1er, consiste à soumettre les plans et les programmes susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, lors de leur élaboration et avant leur adoption, à une évaluation environnementale (arrêts du 22 septembre 2011, Valčiukienė e.a., C-295/10, Rec. p. I-8819, point 37, ainsi que du 28 février 2012, Inter-Environnement Wallonie et Terre wallonne, C‑41/11, point 40).

32

Ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, le plan de construction en cause au principal relève de l’article 3, paragraphe 4, de la directive ou, éventuellement, de l’article 3, paragraphe 3, de cette directive. Selon ces dispositions, les États membres déterminent, pour les plans y visés, s’ils sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

33

Aux termes de l’article 3, paragraphe 5, de ladite directive, cette détermination des plans susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, et nécessitant, de ce fait, une évaluation au titre de la même directive, s’opère soit en procédant à un examen au cas par cas, soit en déterminant des types de plans ou en combinant ces deux approches.

34

En ce qui concerne les plans de construction, le législateur allemand a procédé à cette détermination en établissant que l’élaboration de tels plans est en principe soumise à une évaluation environnementale, mais que le type particulier de plans de construction de développement interne satisfaisant aux conditions fixées à l’article 13 bis, paragraphe 1, du BauGB est dispensé de cette obligation.

35

À cet égard, il importe de préciser que la question posée se rapporte, comme l’a relevé M. l’avocat général au point 45 de ses conclusions, à la conséquence que pourrait avoir, pour l’effet utile de la directive, une application conjuguée de deux dispositions nationales telles que celles figurant aux articles 13 bis et 214, paragraphe 2 bis, point 1, du BauGB.

36

En effet, par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 3, paragraphe 5, de la directive, lu en combinaison avec le paragraphe 4 de ce même article, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale telle que celle en cause au principal, aux termes de laquelle la violation d’une condition qualitative, imposée par la norme de transposition de cette directive pour dispenser l’adoption d’un plan de construction d’un type particulier d’une évaluation environnementale au titre de ladite directive, est sans incidence sur la validité de ce plan.

37

À cet égard, il importe de constater qu’une disposition telle que l’article 214, paragraphe 2 bis, point 1, du BauGB a pour effet que les plans de construction pour l’élaboration desquels une évaluation environnementale aurait dû être effectuée en vertu de la réglementation nationale ayant transposé l’article 3, paragraphe 5, de la directive restent valides même s’ils ont été élaborés sans évaluation environnementale au titre de celle-ci.

38

Un tel système revient à priver de tout effet utile l’article 3, paragraphe 1, de la directive, qui impose qu’une évaluation environnementale soit effectuée pour les plans qui sont visés à l’article 3, paragraphes 3 et 4, de celle-ci et qui sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

39

En effet, s’il est possible de concevoir qu’un type particulier de plan qui remplit la condition qualitative prévue à l’article 13 bis, paragraphe 1, du BauGB ne soit a priori pas susceptible d’entraîner des incidences notables sur l’environnement dans la mesure où cette condition est de nature à garantir qu’un tel plan correspond aux critères pertinents fixés à l’annexe II de la directive, auxquels se réfère l’article 3, paragraphe 5, seconde phrase, de celle-ci, il apparaît cependant qu’une telle condition se voit privée d’effet utile lorsqu’elle est combinée avec une disposition telle que l’article 214, paragraphe 2 bis, point 1, du BauGB.

40

En maintenant en vigueur des plans de construction qui, aux fins de la directive telle que transposée en droit national, sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, ladite disposition du BauGB revient en définitive à permettre aux communes d’élaborer de tels plans sans procéder à une évaluation environnementale, dès lors que ceux-ci respectent la condition quantitative fixée à l’article 13 bis, paragraphe 1, deuxième phrase, du BauGB et qu’ils ne se heurtent pas aux motifs d’exclusion fixés dans les quatrième et cinquième phrases du même article.

41

Dans ces conditions, il n’est pas garanti à suffisance de droit que la commune se conforme en toute hypothèse aux critères pertinents fixés à l’annexe II de la directive, critères dont le législateur national a pourtant eu l’intention d’assurer le respect, comme en témoigne l’introduction de la notion de développement interne dans la réglementation visant à faire usage de la marge d’appréciation que lui accorde l’article 3, paragraphe 5, de la directive.

42

Force est dès lors de constater qu’une disposition nationale telle que l’article 214, paragraphe 2 bis, point 1, du BauGB, adoptée dans le cadre de la mise en œuvre de l’article 3, paragraphe 5, de la directive, a pour effet de dispenser d’une évaluation environnementale des plans de construction qui n’auraient pas dû l’être, ce qui est contraire à l’objectif poursuivi par la directive et, plus particulièrement, par l’article 3, paragraphes 1, 4 et 5, de celle-ci.

43

Au demeurant, il ressort de la jurisprudence de la Cour que, dès lors qu’un plan, au sens de la directive, aurait dû, préalablement à son adoption, être soumis à une évaluation de ses incidences sur l’environnement conformément aux exigences de la directive, les juridictions nationales saisies d’un recours visant à faire annuler un tel plan sont tenues de prendre toutes les mesures générales ou particulières afin de remédier à l’omission d’une telle évaluation (voir, en ce sens, arrêt Inter-Environnement Wallonie et Terre wallonne, précité, points 44 à 46).

44

En conséquence, dans l’affaire au principal, il appartiendra à la juridiction de renvoi d’appliquer, dans le cadre de sa compétence, les dispositions du droit de l’Union et d’en assurer le plein effet en laissant inappliquée toute disposition du BauGB, notamment l’article 214, paragraphe 2 bis, point 1, de ce code, qui amènerait cette juridiction à rendre une décision contraire à la directive (voir, en ce sens, arrêts du 9 mars 1978, Simmenthal, 106/77, Rec. p. 629, point 24, et du 26 février 2013, Åkerberg Fransson, C‑617/10, point 45).

45

Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que l’article 3, paragraphe 5, de la directive, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 4, de celle-ci, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale telle que celle en cause au principal, aux termes de laquelle la violation d’une condition qualitative, imposée par la norme de transposition de cette directive pour dispenser l’adoption d’un plan de construction d’un type particulier d’une évaluation environnementale au titre de ladite directive, est sans incidence sur la validité de ce plan.

Sur les dépens

46

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit:

 

L’article 3, paragraphe 5, de la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 juin 2001, relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement, lu en combinaison avec l’article 3, paragraphe 4, de celle-ci, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale telle que celle en cause au principal, aux termes de laquelle la violation d’une condition qualitative, imposée par la norme de transposition de cette directive pour dispenser l’adoption d’un plan de construction d’un type particulier d’une évaluation environnementale au titre de ladite directive, est sans incidence sur la validité de ce plan.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: l’allemand.

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