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Document 62007TJ0102

Arrêt du Tribunal (quatrième chambre) du 3 mars 2010.
Freistaat Sachsen (Allemagne) (T-102/07), MB Immobilien Verwaltungs GmbH et MB System GmbH & Co. KG (T-120/07) contre Commission européenne.
Aides d’État - Aide accordée par l’Allemagne sous forme d’une prise de participation et de garanties pour des prêts - Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché commun - Régime général d’aides approuvé par la Commission - Notion d’entreprise en difficulté - Lignes directrices pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté - Montant de l’aide - Obligation de motivation.
Affaires jointes T-102/07 et T-120/07.

European Court Reports 2010 II-00585

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2010:62

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

3 mars 2010 ( *1 )

«Aides d’État — Aide accordée par l’Allemagne sous forme d’une prise de participation et de garanties pour des prêts — Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché commun — Régime général d’aides approuvé par la Commission — Notion d’entreprise en difficulté — Lignes directrices pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté — Montant de l’aide — Obligation de motivation»

Dans les affaires jointes T-102/07 et T-120/07,

Freistaat Sachsen (Allemagne), représenté par M es  C. von Donat et G. Quardt, avocats,

partie requérante dans l’affaire T-102/07,

MB Immobilien Verwaltungs GmbH, établie à Neukirch (Allemagne), représentée initialement par M e  G. Brüggen, puis par M es  A. Seidl, K. Lengert et W. T. Sommer, avocats,

MB System GmbH & Co. KG, établie à Nordhausen (Allemagne), représentée par M e  G. Brüggen, avocat,

parties requérantes dans l’affaire T-120/07,

contre

Commission européenne, représentée par MM. K. Gross et T. Scharf, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet des demandes d’annulation de la décision 2007/492/CE de la Commission, du 24 janvier 2007 , concernant l’aide d’État C 38/2005 (ex NN 52/2004) accordée par l’Allemagne au groupe Biria ( JO L 183, p. 27 ),

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. O. Czúcz (rapporteur), président, M me  I. Labucka et M. K. O’Higgins, juges,

greffier: M me  T. Weiler, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 20 janvier 2009 ,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique et antécédents du litige

1. Réglementation communautaire

1

L’article 87 CE dispose:

« 1.    Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.

[…]

3.   Peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun:

a)

les aides destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi;

[…]

c)

les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun […] »

2

Les lignes directrices communautaires pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration d’entreprises en difficulté ( JO 1999, C 288, p. 2 , ci-après les « lignes directrices de 1999 » ) prévoient, en leur point 2, ce qui suit:

« 2.1.  Notion d’entreprise en difficulté

(4)

Il n’existe pas de définition communautaire de l’entreprise en difficulté. La Commission considère néanmoins qu’une entreprise est en difficulté au sens des présentes lignes directrices lorsqu’elle est incapable, avec ses propres ressources financières ou avec les ressources que sont prêts à lui apporter ses propriétaires/actionnaires et ses créanciers, d’enrayer des pertes qui la conduisent, en l’absence d’une intervention extérieure des pouvoirs publics, vers une mort économique quasi certaine à court ou moyen terme.

(5)

En particulier, une entreprise est en tous cas, et quelle que soit sa taille, considérée comme en difficulté aux fins des présentes lignes directrices:

a)

s’il s’agit d’une société dont les associés ont une responsabilité limitée, lorsque plus de la moitié de son capital souscrit a disparu et que plus du quart de ce capital a été perdu au cours des douze derniers mois

ou

b)

s’il s’agit d’une société à responsabilité illimitée, lorsque plus de la moitié de ses fonds propres, tels qu’indiqués dans les livres de la société, a disparu et plus d’un quart de ces fonds a été perdu au cours des douze derniers mois

ou

c)

pour toutes les formes d’entreprises, lorsqu’elle remplit selon son droit national les conditions pour être soumise à une procédure collective fondée sur son insolvabilité.

(6)

Les difficultés d’une entreprise se manifestent habituellement par le niveau croissant des pertes, la diminution du chiffre d’affaires, le gonflement des stocks, la surcapacité, la diminution de la marge brute d’autofinancement, l’endettement croissant, la progression des charges financières ainsi que l’affaiblissement ou la disparition de la valeur de l’actif net. Dans les cas les plus graves, l’entreprise peut même être devenue insolvable ou se trouver en procédure collective de droit national fondée sur son insolvabilité. Dans ce dernier cas, les présentes lignes directrices s’appliquent aux aides qui interviendraient à l’occasion d’une telle procédure aboutissant à une continuation de l’entreprise. Dans tous les cas, l’entreprise n’est éligible qu’après vérification de son incapacité à assurer son redressement avec ses ressources propres, ou avec des fonds obtenus auprès de ses propriétaires/actionnaires ou de ses créanciers.

[…] »

3

En ce qui concerne les régimes d’aides pour les petites et moyennes entreprises (PME), le point 4 des lignes directrices de 1999 prévoit:

« 4.1.  Principes généraux

(64)

La Commission n’autorisera de régimes d’aides au sauvetage et/ou à la restructuration des entreprises en difficulté qu’en faveur des [PME] au sens de la définition communautaire. Sous réserve des dispositions spécifiques suivantes, les [points] 2 et 3 s’appliquent pour l’appréciation de la compatibilité de tels régimes. Toute aide octroyée dans le cadre d’un régime et ne satisfaisant pas à l’une de ces conditions devra être notifiée individuellement et préalablement approuvée par la Commission.

4.2. Éligibilité

(65)

Dans le cadre des régimes qui seront désormais autorisés, et sauf disposition sectorielle contraire, ne pourront être exemptées de notification individuelle que les aides en faveur des PME qui satisfont au moins à l’un des trois critères énoncés au [paragraphe] 5. Les aides en faveur d’entreprises qui ne remplissent aucun de ces trois critères devront être notifiées individuellement à la Commission afin qu’elle puisse apprécier le caractère d’entreprise en difficulté du bénéficiaire.

[…] »

4

Le point 6 des lignes directrices de 1999 concerne les mesures utiles au sens de l’article 88, paragraphe 1, CE. Quant à l’adaptation des régimes d’aides au sauvetage ou à la restructuration, il prévoit ce qui suit:

« (94)

Les États membres doivent adapter leurs régimes existants d’aide au sauvetage et à la restructuration qui seront en vigueur après le 30 juin 2000 pour les rendre conformes aux présentes lignes directrices, et notamment aux dispositions du [point] 4, après cette date.

(95)

Pour permettre à la Commission de contrôler cette adaptation, les États membres lui transmettent, avant le 31 décembre 1999 , une liste de tous ces régimes. Ils doivent ensuite, et en tout cas avant le 30 juin 2000 , lui transmettre les informations suffisantes pour lui permettre de vérifier que les régimes ont été modifiés selon les présentes lignes directrices. »

2. Régime d’aides approuvé

5

Les Bürgschaftsrichtlinien des Freistaates Sachsen für die Wirtschaft und die freien Berufe sowie die Land- und die Forstwirtschaft (directives relatives aux garanties du Freistaat Sachsen pour l’économie et les professions libérales ainsi que pour l’agriculture et la sylviculture) prévoient deux variantes de garanties: d’une part, des garanties au titre d’aides au fonctionnement et à l’investissement à finalité régionale (ci-après la « variante des aides régionales » ) et, d’autre part, des garanties au titre d’aides au sauvetage et à la restructuration (ci-après la « variante des aides au sauvetage et à la restructuration » ). La Commission des Communautés européennes a approuvé lesdites directives du Freistaat Sachsen par décision SG (93) D/9273, du 7 juin 1993 , concernant l’aide d’État n o  73/93. Il s’agit donc d’un régime d’aides approuvé (ci-après le « régime d’aides approuvé » ). Dans ladite décision du 7 juin 1993 , la Commission indique que des garanties à des entreprises dont le garant sait ou devrait savoir, en opérateur diligent, qu’elles se trouvent en difficulté, représentent une aide qui n’est pas couverte par la décision en cause et devrait être notifiée individuellement à la Commission.

6

Le régime d’aides approuvé a été adapté aux lignes directrices communautaires pour les aides d’État au sauvetage et à la restructuration d’entreprises en difficulté, dans leur version de 1994 ( JO 1994, C 368, p. 12 , ci-après les « lignes directrices de 1994 » ). Ainsi, le 13 mars 1996 , la Commission a adopté la décision 96/475/CE sur la compatibilité avec le marché commun des garanties d’État en faveur de projets de restructuration (y compris des projets d’assainissement et de consolidation) en faveur de grandes entreprises en difficulté, octroyés dans le cadre des régimes de garantie des Länder de Saxe-Anhalt, Basse-Saxe, Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Rhénanie-Palatinat, Bavière, Brême, Mecklembourg-Poméranie occidentale, Schleswig-Holstein et Saxe ( JO L 194, p. 25 ) établissant que l’octroi de garanties destinées à la restructuration de grandes entreprises en difficulté, dans le cadre d’une directive sur les garanties comme celle du Freistaat Sachsen, devait être individuellement notifié à la Commission. S’agissant de la définition de la notion d’entreprise en difficulté, cette décision renvoie aux critères des lignes directrices de 1994. Par lettre du 19 décembre 1996 , la République fédérale d’Allemagne a confirmé que ladite décision avait été correctement transposée par le Freistaat Sachsen.

7

Considérant que la définition de la notion d’entreprise en difficulté était vague, les autorités allemandes et la Commission ont jugé nécessaire de rendre cette notion opérationnelle pour l’application des programmes de garanties des Länder allemands. Cela a fait l’objet d’une lettre de la Commission du 2 mars 1998 .

8

Dans ladite lettre, la Commission a proposé des mesures utiles pour l’application des directives de garanties des Länder allemands, dont le régime d’aides approuvé et notamment la définition suivante de la notion d’entreprise en difficulté (ci-après la « mesure utile E 16/94 » ):

« Aux fins d’application des règles précitées en matière de garanties, une entreprise est considérée comme se trouvant en difficulté lorsqu’un des critères suivants est rempli:

l’entreprise concernée est en état d’insolvabilité ou surendettée au sens [du Konkursordnung (règlement allemand sur les faillites)] ou [du Einführungsgesetz zur Insolvenzordnung (loi introductive allemande du code de l’insolvabilité)];

plus de la moitié des capitaux propres comptabilisés en ce qui concerne les sociétés de personnes ou, en ce qui concerne les sociétés de capitaux, plus de la moitié du capital social a été épuisée par des pertes au sens de l’article 92 [du Aktiengesetz (loi allemande sur les sociétés anonymes)] et de l’article 49 [du Gesetz betreffend die Gesellschaften mit beschränkter Haftung (loi allemande sur les sociétés à responsabilité limitée)] et que 25% de ce capital a été épuisé au cours des douze derniers mois précédents la demande d’octroi d’une garantie.

En outre, lors de l’application de cette notion, il faut prendre en compte au regard du droit budgétaire et le garant doit vérifier [les éléments suivants] dans chaque cas particulier:

Une garantie ne peut — en règle générale — pas être accordée lorsqu’il faut s’attendre avec une grande probabilité qu’il sera fait appel au garant (article 39 des instructions administratives provisoires relatives aux règles budgétaires du Bund et dispositions correspondantes dans les règles budgétaires des Länder); il en résulte qu’une garantie ne peut être accordée en faveur d’entreprises en difficulté, au sens des critères exposés ci-dessus, que lorsque le garant constate, sur la base d’une expertise établie par un expert comptable (indépendant) prenant en compte le prêt garanti, que les perspectives de continuation de l’entreprise bénéficiaire sont positives.

Lors de l’octroi de la garantie, il faut, dans chaque cas particulier, vérifier si un autre financement n’est pas possible sur le marché des capitaux. »

9

La République fédérale d’Allemagne a confirmé l’utilisation de cette définition de la notion d’entreprise en difficulté dans une lettre du 29 juin 1998 .

10

Par ailleurs, dans une lettre du 11 novembre 1998 de la Commission à la République fédérale d’Allemagne, il est précisé, en ce qui concerne la notion d’entreprise en difficulté, ce qui suit:

« S’agissant des points qui n’ont pas encore été définitivement éclaircis, et notamment de la question de la définition d’entreprise en difficulté et de l’application de la règle ‘ de minimis ’ aux garanties pour entreprises en difficulté, la Commission propose d’attendre l’adoption de la modification des lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration. Une fois la décision prise, les points en suspens seront adaptés aux lignes directrices, dans la mesure nécessaire. »

11

Le régime d’aides approuvé a ensuite été adapté aux lignes directrices de 1999. Conformément aux mesures utiles énoncées au point 6 des lignes directrices de 1999 (voir le point 4 ci-dessus), la République fédérale d’Allemagne a transmis à la Commission par lettre du 1 er  décembre 1999 une liste des régimes d’aides qui restaient en vigueur au-delà du 30 juin 2000 et qui devaient donc être adaptés auxdites mesures utiles (ci-après la « lettre du 1 er  décembre 1999 » ). Cette liste contenait le régime d’aides approuvé. Par lettre du 20 janvier 2000 (ci-après la « lettre du 20 janvier 2000» ), la République fédérale d’Allemagne a accepté lesdites mesures utiles. En outre, conformément au paragraphe 95 des lignes directrices de 1999, la République fédérale d’Allemagne a également transmis à ce sujet différents documents à la Commission (lettres des 30 juin et 11 décembre 2000 , et du 26 mars 2001 ) attestant de l’adaptation des régimes existants d’aide allemands auxdites mesures utiles.

12

Dans ce contexte, la République fédérale d’Allemagne a également transmis, par lettre du 30 juin 2000 (ci-après la « lettre du 30 juin 2000» ), un Prüfraster für staatliche Bürgschaften aus den Bürgschaftsrichtlinien des Bundes und der Länder (Grille de contrôle pour garanties de l’État contenues dans les directives de la Fédération et des Länder sur les garanties, ci-après la « grille de contrôle » ).

3. Entreprises en cause

13

Le groupe Biria exerçait des activités dans le secteur de la fabrication et de la distribution de bicyclettes.

14

La première requérante dans l’affaire T-120/07, MB Immobilien Verwaltungs GmbH (ci-après « MB Immobilien » ), vient aux droits de Biria AG (nouvelle), l’ancienne société mère du groupe Biria.

15

Biria AG (nouvelle) est née en 2003 de la fusion entre Biria AG (ancienne) et Sachsen Zweirad GmbH, l’entreprise ayant d’abord été renommée Biria GmbH, puis Biria AG (nouvelle). L’unique propriétaire de Biria AG (nouvelle) était M. Mehdi Biria.

16

La deuxième requérante dans l’affaire T-120/07, MB System GmbH & Co. KG, vient aux droits de Bike Systems GmbH & Co., Thüringer Zweiradwerk KG (ci-après « Bike Systems » ) qui était l’une des plus importantes entreprises du groupe Biria. MB System produisait exclusivement des bicyclettes alors qu’une autre entreprise du groupe était responsable de leur commercialisation.

4. Mesures en cause

17

Entre mars 2001 et décembre 2003, le groupe Biria a reçu trois contributions financières.

18

Premièrement, en mars 2001, gbb Beteiligungs AG (ci-après « gbb » ), une filiale de la Deutsche Ausgleichsbank, banque allemande de droit public ayant pour mission d’accorder des subventions d’intérêt public en faveur de l’économie allemande, a fait un apport tacite à hauteur d’environ 2070732  euros à Bike Systems, valable jusqu’à la fin de l’année 2010 (ci-après la « mesure 1 » ).

19

Deuxièmement, le 23 mars 2003 , le Freistaat Sachsen a accordé, en vertu du régime d’aides approuvé, une garantie de 80% pour un crédit d’exploitation de 5,6  millions d’euros en faveur de Sachsen Zweirad dont l’échéance avait, à l’origine, été fixée à la fin de l’année 2008 (ci-après la « mesure 2 » ). Cette garantie a été rendue le 5 janvier 2004 et remplacée par une garantie en faveur de Biria GmbH (voir le point 20 ci-après).

20

Troisièmement, le 9 décembre 2003 , le Freistaat Sachsen a accordé, avec effet à compter du 5 janvier 2004 , une garantie de 80% pour un crédit d’exploitation de 24875000  euros en faveur de Biria GmbH (ci-après la « mesure 3 » ), également en vertu du régime d’aides approuvé, moyennant la restitution de la garantie accordée à Sachsen Zweirad dans le cadre de la mesure 2.

5. Procédure administrative

21

Aux mois de juillet et d’août 2003, la Commission a été saisie de plaintes faisant état d’une garantie accordée au groupe Biria et de participations publiques dans des entreprises du groupe.

22

Par courrier du 9 septembre 2003 , la Commission a demandé des éclaircissements à la République fédérale d’Allemagne. Cette dernière a déféré à cette demande.

23

Le 18 octobre 2004 , la Commission a adressé à la République fédérale d’Allemagne une injonction de fournir des informations supplémentaires, dans la mesure où elle doutait du fait que les mesures d’aide accordées au groupe Biria fussent conformes aux régimes d’aides sur la base desquels elles avaient prétendument été octroyées. En réponse à cette injonction, la République fédérale d’Allemagne a communiqué des renseignements supplémentaires par lettre du 31 janvier 2005 (ci-après la « lettre du 31 janvier 2005» ). Par la lettre du 31 janvier 2005 , la République fédérale d’Allemagne a fait savoir à la Commission que la mesure 3 était également accordée sur la base du régime d’aides approuvé.

24

Le 20 octobre 2005 , la Commission a ouvert la procédure formelle d’examen concernant trois aides d’État présumées. Elle a constaté dans la même décision que plusieurs autres mesures présumées illégales ne constituaient pas des aides d’État ou avaient été octroyées dans le respect du régime d’aides approuvé. Cette décision a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne du 5 janvier 2006 ( JO C 2, p. 14 ). La Commission a invité toutes les parties intéressées à faire part de leurs observations sur les aides éventuelles. Différentes sociétés plaignantes ont fait part de leurs observations, qui ont été communiquées à la République fédérale d’Allemagne par courriers des 6 février et 2 mars 2006 , auxquels cette dernière a répondu par les lettres des 5 avril et 12 mai 2006 .

25

La République fédérale d’Allemagne a fait part de ses commentaires concernant l’ouverture de la procédure formelle d’examen par lettre du 23 janvier 2006 (ci-après la « lettre du 23 janvier 2006» ).

26

Dans un courrier du 6 février 2006 , la Commission a demandé des éclaircissements à la République fédérale d’Allemagne, qui les a transmis par courrier du 5 avril 2006 . La Commission lui a adressé une demande supplémentaire d’information le 19 juillet 2006 , à laquelle elle a répondu par courrier du 25 septembre 2006 .

6. Décision attaquée

27

Le 24 janvier 2007 , la Commission a adopté la décision 2007/492/CE concernant l’aide d’État C 38/2005 (ex NN 52/2004) accordée par l’Allemagne au groupe Biria ( JO L 183, p. 27 , ci-après la « décision attaquée » ). Le dispositif de la décision attaquée énonce ce qui suit:

«Article premier

L’aide d’État accordée par [la République fédérale d’Allemagne] à [Bike Systems], [Sachsen Zweirad] et Biria GmbH (devenue Biria AG) est incompatible avec le marché commun. L’aide comportait les mesures suivantes:

a)

mesure 1: une participation tacite dans [Bike Systems] d’un montant de 2070732  euros. L’élément d’aide correspond à la différence entre le taux de référence majoré de 1000 points de base et la rémunération de la participation tacite (taux fixe majoré de 50% de la rémunération variable);

b)

mesure 2: une garantie d’un montant de 4480000  euros accordée à [Sachsen Zweirad]. L’élément d’aide correspond à la différence entre le taux de référence majoré de 800 points de base et le taux effectif appliqué au prêt garanti;

c)

mesure 3: une garantie d’un montant de 19900000  euros accordée à Biria GmbH (devenue Biria AG). L’élément d’aide correspond à la différence entre le taux de référence majoré de 700 points de base et le taux effectif appliqué au prêt garanti.

Article 2

1.    [La République fédérale d’Allemagne] prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer l’aide illégale visée à l’article 1 er auprès de la bénéficiaire.

2.   La participation tacite et la garantie accordée à Biria GmbH (devenue Biria AG) prennent fin dans les deux mois à compter de la date de publication de la présente décision.

[…] »

28

Les motifs énoncés au soutien de la décision attaquée sont, en substance, les suivants. Concernant la mesure 1, la Commission a considéré que la prise de participation par gbb était imputable à l’État et qu’elle favorisait Bike Systems, car celle-ci n’aurait pas pu l’obtenir sur le marché aux mêmes conditions. Se fondant sur le point 3.2 de sa communication sur l’application des articles 87 [CE] et 88 [CE] aux aides d’État sous forme de garanties ( JO 2000, C 71, p. 14 ), elle a considéré que l’intégralité de cette participation devait être considérée comme un élément d’aide, car Bike Systems se trouvait en difficulté lors de la prise de participation et le risque associé était tel qu’aucun investisseur, dans une économie de marché, n’aurait pris cette participation. En ce qui concerne les mesures 2 et 3, la Commission a considéré que les bénéficiaires étaient des grandes entreprises qui étaient, au moment où les garanties respectives ont été accordées, en difficulté selon les critères des lignes directrices de 1999, et notamment ceux de son paragraphe 6. Lesdites garanties n’auraient donc pas été couvertes par le régime d’aides approuvé, mais auraient dû lui être individuellement notifiées. Elle a, en outre, constaté, pour les mesures 1, 2 et 3, que les dérogations prévues à l’article 87, paragraphes 2 et 3, CE n’étaient pas applicables et que, notamment, aucune information ne lui avait été fournie, s’agissant en particulier de la mise en œuvre d’un plan de restructuration tel qu’exigé par les lignes directrices de 1999. Concernant les mesures 2 et 3, la Commission indique par ailleurs dans la décision attaquée que, Sachsen Zweirad ayant bénéficié d’une aide à la restructuration en avril 1996 et en mars 1998, l’octroi des deux garanties en cause ne respecte pas le principe de l’aide unique, car moins de 10 ans s’étaient écoulés depuis la fin de la restructuration et qu’il n’existait aucune circonstance exceptionnelle en l’espèce. Selon la Commission, les lignes directrices de 1999 n’ont donc pas été respectées.

Procédure et conclusions des parties

29

Par requêtes déposées au greffe du Tribunal les 5 et 16 avril 2007 , enregistrées respectivement sous les numéros d’affaire T-102/07 et T-120/07, le Freistaat Sachsen, d’une part, et MB Immobilien et MB System, d’autre part, ont introduit les présents recours.

30

Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 13 août 2007 , MB Immobilien a introduit une demande en référé ayant pour objet le sursis à exécution de la décision attaquée. Cette demande a été rejetée par ordonnance du président du Tribunal du 11 octobre 2007 et les dépens ont été réservés.

31

Par ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 24 novembre 2008 , les parties entendues, les affaires T-102/07 et T-120/07 ont été jointes aux fins de la procédure orale et de l’arrêt, conformément à l’article 50 du règlement de procédure du Tribunal.

32

Dans l’affaire T-102/07, le Freistaat Sachsen conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

annuler la décision attaquée en ce qui concerne les mesures 2 et 3;

condamner la Commission aux dépens.

33

Dans l’affaire T-120/07, MB Immobilien et MB System concluent à ce qu’il plaise au Tribunal:

annuler la décision attaquée;

condamner la Commission aux dépens.

34

Dans l’affaire T-102/07, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

rejeter le recours;

condamner le Freistaat Sachsen aux dépens.

35

Dans l’affaire T-120/07, la Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

rejeter le recours;

condamner MB Immobilien et MB System aux dépens.

En droit

36

Le recours dans l’affaire T-102/07 comporte trois moyens. Le premier moyen est tiré de la violation du droit communautaire fondée sur une interprétation incorrecte du régime d’aides approuvé. Il comporte trois branches. Dans une première branche, le Freistaat Sachsen conteste la non-application de la mesure utile E 16/94. Dans une deuxième branche, il allègue un défaut de motifs. Dans une troisième branche, il fait valoir que les entreprises concernées ne sont pas des entreprises en difficulté au sens du régime d’aides approuvé. Le deuxième moyen est tiré d’une appréciation incorrecte des faits quant aux difficultés des entreprises en cause. Il comporte deux branches. Dans une première branche, le Freistaat Sachsen allègue que la décision attaquée est contraire à la pratique de la Commission. Dans une seconde branche, il invoque une appréciation incorrecte des critères du paragraphe 6 des lignes directrices de 1999. Le troisième moyen est tiré d’un défaut de motivation en ce qui concerne le montant de l’élément d’aide.

37

Le recours dans l’affaire T-120/07 comporte également trois moyens. Le premier moyen est tiré d’une violation du droit communautaire en raison d’une interprétation erronée du régime d’aides approuvé. Le deuxième moyen est tiré d’une appréciation erronée des faits quant aux difficultés des entreprises bénéficiaires. Le troisième moyen est tiré d’une violation de l’obligation de motivation. Il comporte quatre branches. Dans une première branche, MB Immobilien et MB System allèguent que la Commission s’est écartée des lignes directrices de 1999 sans motiver ce fait. Dans une deuxième branche, elles allèguent un défaut de motivation sur le fondement de la mesure utile E 16/94. Dans une troisième branche, elles contestent le fait que la Commission n’aurait pas motivé sa décision de s’écarter de la mesure utile E 16/94. Dans une quatrième branche, elles dénoncent une grave erreur de motivation lors de la détermination de la valeur des aides à récupérer.

38

Il y a lieu de constater que les arguments avancés par le Freistaat Sachsen dans le cadre du recours dans l’affaire T-102/07 et ceux de MB Immobilien et de MB System dans le cadre du recours dans l’affaire T-120/07 se recoupent dans une large mesure, même si les griefs du Freistaat Sachsen ne concernent que les mesures 2 et 3 tandis que ceux de MB Immobilien et MB System ont également trait à la mesure 1. Leurs griefs visent, en substance, premièrement, en ce qui concerne les mesures 2 et 3, une violation du régime d’aides approuvé fondée sur le prétendu défaut d’application de la définition étroite de la notion d’entreprise en difficulté figurant dans la mesure utile E 16/94 au profit de celle contenue dans les lignes directrices de 1999, et notamment des indices énoncés en leur paragraphe 6. Deuxièmement, les requérants soutiennent que la Commission a commis des erreurs manifestes d’appréciation dans la caractérisation des entreprises bénéficiaires en tant qu’entreprises en difficulté. Troisièmement, il y aurait une violation de l’obligation de motivation. C’est dans cet ordre que leurs griefs sont analysés ci-après.

1. Sur les griefs tirés du défaut d’application de la définition de la notion d’entreprise en difficulté figurant dans la mesure utile E 16/94

Arguments des parties

39

Les requérants ne contestent pas que les entreprises en difficulté soient exclues de la variante des aides régionales du régime d’aides approuvé. Ils allèguent toutefois, en substance, que la Commission aurait dû fonder son analyse selon laquelle les entreprises bénéficiaires des mesures 2 et 3 étaient en difficulté sur les critères de la mesure utile E 16/94 et non sur ceux des paragraphes 4 à 6 des lignes directrices de 1999, prétendument plus larges.

40

Selon le Freistaat Sachsen, la Commission était tenue, au regard de la jurisprudence, d’examiner les mesures 2 et 3 sur le fondement des conditions du régime d’aides approuvé (arrêt de la Cour du 5 octobre 1994 , Italie/Commission, C-47/91, Rec. p. I-4635 ). Or, dans la décision attaquée, la Commission a conclu à l’incompatibilité des mesures 2 et 3 avec le régime d’aides approuvé non pas sur le fondement de la définition de la notion d’entreprise en difficulté découlant de la mesure utile E 16/94, mais sur les critères énoncés au paragraphe 6 des lignes directrices de 1999. La Commission aurait ainsi surestimé l’étendue de son pouvoir d’appréciation dans le cadre de l’application concrète d’un régime d’aides qu’elle avait pourtant préalablement approuvé.

41

Le Freistaat Sachsen rappelle que le régime d’aides approuvé comporte deux variantes: d’une part, la variante des aides régionales et, d’autre part, la variante des aides au sauvetage et à la restructuration. Les mesures 2 et 3 auraient été accordées dans le cadre de la variante des aides régionales de sorte que la définition de la notion d’entreprise en difficulté résultant de la mesure utile E 16/94 aurait dû s’appliquer.

42

En premier lieu, le Freistaat Sachsen se fonde sur l’interprétation de faits existants et de la correspondance échangée avant les lignes directrices de 1999.

43

Ainsi, il fait valoir que la notion d’entreprise en difficulté aurait été définie, dans un premier temps, dans la décision SG (93) D/9273, comme toute entreprise dont le garant sait ou devrait savoir, en opérateur diligent, qu’elle se trouve en difficulté.

44

Selon le Freistaat Sachsen, la Commission a décidé dans la décision 96/475, concernant des garanties pour des projets de restructuration en faveur de grandes entreprises en difficulté, octroyées dans le cadre des régimes de garantie de plusieurs Länder allemands, dont le Freistaat Sachsen, que l’octroi de garanties à des grandes entreprises en difficulté devait faire l’objet d’une notification individuelle. Il en résulterait que, dans le cadre de la variante des aides au sauvetage et à la restructuration du régime d’aides approuvé, des garanties ne pouvaient plus être accordées qu’aux PME en difficulté. Selon le Freistaat Sachsen, la variante des aides régionales du régime d’aides approuvé n’a pas été visée, ce qui serait confirmé par la lettre du 19 décembre 1996 (voir le point 6 ci-dessus).

45

Par ailleurs, le Freistaat Sachsen soutient qu’il ressort de la lecture de la correspondance entre la République fédérale d’Allemagne et la Commission, telle que la lettre du 2 mars 1998 (voir le point 7 ci-dessus), que des programmes de garantie semblables existaient dans plusieurs Länder ainsi qu’au niveau fédéral. En raison de l’importance de l’instrument de soutien régional, il aurait fallu trouver une délimitation opérationnelle pour la notion d’ « entreprises saines » . Selon le Freistaat Sachsen, cette recherche a fait l’objet de plusieurs discussions et d’un long échange de correspondance entre la Commission et la République fédérale d’Allemagne qui n’a pu être clos que par la proposition, par la Commission, d’une définition de la notion d’entreprise en difficulté dans la mesure utile E 16/94.

46

La mesure utile E 16/94 aurait redéfini l’exclusion des entreprises en difficulté des aides régionales. Seraient désormais exclues du bénéfice des aides régionales, d’une part, les entreprises qui satisfont à des critères clairs, repris par la suite au paragraphe 5 des lignes directrices de 1999, et, d’autre part, les entreprises pour lesquelles il y a un risque qu’il soit fait appel à la garantie. Cette définition n’aurait plus été modifiée depuis.

47

Le Freistaat Sachsen relève encore que, dans la lettre du 11 novembre 1998 (voir le point 10 ci-dessus), la Commission a indiqué que la question de la définition de la notion d’entreprise en difficulté n’était pas encore définitivement éclaircie, mais que, dans l’intérêt de la sécurité juridique, les critères de la mesure utile E 16/94 devaient être appliqués.

48

En deuxième lieu, le Freistaat Sachsen fait valoir que la correspondance entre la République fédérale d’Allemagne et la Commission, intervenue après les lignes directrices de 1999, ne révèle aucun changement quant à l’application de la définition de la notion d’entreprise en difficulté figurant dans la mesure utile E 16/94 à la variante des aides régionales du régime d’aides approuvé.

49

Selon le Freistaat Sachsen, la lettre du 1 er  décembre 1999 se rapporte exclusivement à des aides au sauvetage et à la restructuration d’entreprises en difficulté. Il en serait également ainsi de la lettre du 20 janvier 2000 dans laquelle la République fédérale d’Allemagne a accepté les mesures utiles prévues au point 6 des lignes directrices de 1999, car lesdites mesures utiles ne concerneraient, elles aussi, que des régimes d’aides relatifs à des aides au sauvetage et à la restructuration. Il ressortirait également de cette lettre que, pour les PME en difficulté, la définition figurant au paragraphe 5 des lignes directrices de 1999 devrait être appliquée.

50

Les documents transmis par la lettre du 30 juin 2000 concerneraient aussi exclusivement les régimes d’aides au sauvetage et à la restructuration. La grille de contrôle résumerait en son point 3.5 les programmes ou variantes de programmes à finalité régionale. En revanche, le point 4 régirait exclusivement les aides au sauvetage et à la restructuration. Cela vaudrait également pour les modifications ultérieures du point 4, qui feraient l’objet de la correspondance échangée par la suite entre la Commission et le gouvernement allemand.

51

En troisième lieu, le Freistaat Sachsen estime que l’application de deux définitions légèrement différentes de la notion d’entreprise en difficulté dans le cadre de la variante des aides régionales et de la variante des aides au sauvetage et à la restructuration du régime d’aides approuvé découle des objectifs différents desdites variantes.

52

La variante des aides au sauvetage et à la restructuration viserait à faire en sorte que seules les PME qui satisfont aux critères du paragraphe 5 des lignes directrices de 1999 puissent bénéficier d’aides au sauvetage et à la restructuration. Le Freistaat Sachsen indique que, dans le cas de la variante des aides régionales, des entreprises pouvaient bénéficier d’aides à finalité régionale si elles n’étaient pas en difficulté selon la mesure utile E 16/94, c’est-à-dire selon des critères clairement définis correspondant à ceux du paragraphe 5 des lignes directrices de 1999 ou s’il était improbable qu’il eût été fait appel à la garantie.

53

Enfin, le Freistaat Sachsen soutient que les indices des difficultés d’une entreprise énoncés au paragraphe 6 des lignes directrices de 1999 sont trop vagues pour constituer des critères d’appréciation, par les États membres, de la compatibilité d’une mesure d’aide projetée avec un régime existant.

54

MB Immobilien et MB System soutiennent, quant à elles, que la Commission aurait dû examiner les mesures 2 et 3 au regard des conditions du régime d’aides approuvé et invoquent également à cet égard la mesure utile E 16/94. Elles relèvent que les conditions de la mesure utile E 16/94 sont rédigées de manière plus étroite que celles des lignes directrices de 1999. En lieu et place des indices au sens desdites lignes directrices, ce serait le critère tiré du droit budgétaire de la mesure utile E 16/94 qui serait applicable en l’espèce. Selon ce critère, des garanties ne devraient pas être accordées lorsqu’il faut s’attendre, avec une grande probabilité, à ce qu’il soit fait appel au garant. La République fédérale d’Allemagne aurait accepté cette définition et tant le Freistaat Sachsen que les bénéficiaires auraient dû pouvoir compter sur le fait que le régime d’aides approuvé s’appliquait en tant que régime spécial.

55

MB Immobilien et MB System soutiennent que l’adaptation du régime d’aides approuvé aux lignes directrices de 1999 ne concerne que la variante des aides au sauvetage et à la restructuration. La Commission aurait proposé de notifier toutes les garanties au bénéfice de grandes entreprises indépendamment de leur finalité, mais passerait sous silence le fait que la République fédérale d’Allemagne a rejeté cette proposition. Cette question n’aurait pas encore été éclaircie de manière définitive.

56

Selon MB Immobilien et MB System, les garanties soutenant des mesures de restructuration et de sauvetage en faveur d’entreprises en difficulté au sens du régime d’aides approuvé ont été limitées aux PME. Pour les aides régionales au fonctionnement et à l’investissement, tel qu’énoncé dans la mesure utile E 16/94, l’application des critères stricts du paragraphe 5 des lignes directrices de 1999 devrait être complétée par une double condition budgétaire, selon laquelle une garantie ne peut être accordée s’il est hautement probable qu’elle soit mise en œuvre et que, dès lors, des garanties ne peuvent être constituées en faveur d’entreprises en difficulté que lorsque le garant constate, sur la base de l’expertise rendue par un auditeur indépendant, que l’entreprise bénéficiaire, compte tenu de l’emprunt garanti, a de bonnes chances de poursuivre son activité. Par ailleurs, en ce qui concerne l’obligation de notification pour les aides au sauvetage et à la restructuration de grandes entreprises en difficulté qui résulte de la décision 96/475, MB Immobilien et MB System font valoir que la République fédérale d’Allemagne l’a acceptée pour les deux variantes seulement pour le Bade-Wurtemberg (Allemagne) et Hambourg (Allemagne). En ce qui concerne la variante des aides régionales, le régime d’aides approuvé n’aurait pas été affecté par la décision 96/475. Par conséquent, le critère permettant de vérifier l’admissibilité de telles garanties serait resté le critère budgétaire précité et n’aurait pas été remplacé par les indices mentionnés dans les lignes directrices de 1999.

57

La Commission conclut au rejet de ces griefs. Elle conteste l’applicabilité de la mesure utile E 16/94 et allègue que, dans la décision attaquée, elle a appliqué à bon droit les critères des paragraphes 4 à 6 des lignes directrices de 1999.

Appréciation du Tribunal

58

Il y a lieu de constater que les requérants ne contestent pas que les entreprises en difficulté sont exclues de la variante des aides régionales du régime d’aides approuvé. Ils soutiennent toutefois que la Commission ne pouvait pas, à l’égard des mesures 2 et 3, fonder la décision attaquée sur la définition de la notion d’entreprise en difficulté qui résulte des paragraphes 4 à 6 des lignes directrices de 1999 pour ainsi exclure les entreprises en cause de l’application de la variante des aides régionales, mais aurait dû appliquer celle de la mesure utile E 16/94 qui est plus restrictive. En effet, la République fédérale d’Allemagne n’aurait pas accepté cette définition prétendument plus large des lignes directrices de 1999 pour la variante des aides régionales du régime d’aides approuvé. Par ailleurs, les indices figurant au paragraphe 6 des lignes directrices de 1999 seraient trop imprécis pour que les États membres puissent apprécier la compatibilité de mesures financières avec un régime d’aides approuvé.

59

S’agissant de la marge d’appréciation de la Commission, il y a lieu de rappeler que, lorsque la Commission est confrontée à une aide individuelle dont il est soutenu qu’elle a été octroyée en application d’un régime préalablement autorisé, elle ne peut d’emblée l’examiner directement par rapport au traité CE. Elle doit se borner d’abord, avant l’ouverture de toute procédure, à contrôler si l’aide est couverte par le régime général et satisfait aux conditions fixées dans la décision d’approbation de celui-ci. Si elle ne procédait pas de la sorte, la Commission pourrait, lors de l’examen de chaque aide individuelle, revenir sur sa décision d’approbation du régime d’aides, laquelle présupposait déjà un examen au regard de l’article 87 CE (voir, en ce sens, arrêt Italie/Commission, point 40 supra, point 24).

60

Une aide constituant une application rigoureuse et prévisible des conditions fixées dans la décision d’approbation du régime général approuvé est donc considérée comme une aide existante qui n’a pas à être notifiée à la Commission ni à être examinée au regard de l’article 87 CE (arrêt de la Cour du 16 mai 2002 , ARAP e.a./Commission, C-321/99 P, Rec. p. I-4287 , point 83, et arrêt du Tribunal du 18 novembre 2004 , Ferriere Nord/Commission, T-176/01, Rec. p. II-3931 , point 51).

61

En revanche, des mesures qui ne sont pas couvertes par les régimes généraux invoqués constituent des aides nouvelles dont la compatibilité avec le marché commun doit être soumise à l’examen de la Commission. En effet, il ressort de l’article 2 du règlement (CE) n o  659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999 , portant modalités d’application de l’article [88] CE ( JO L 83, p. 1 ), que « tout projet d’octroi d’une aide nouvelle est notifié en temps utile à la Commission par l’État membre » .

62

En outre, il convient de relever qu’une décision de la Commission statuant sur la conformité d’une aide avec le régime concerné relève de l’exercice de son obligation de veiller à l’application des articles 87 CE et 88 CE. De ce fait, l’examen fait par la Commission de la conformité d’une aide avec ce régime ne constitue pas une initiative dépassant le cadre de ses compétences. Dès lors, l’appréciation de la Commission ne saurait être limitée par celle des autorités nationales qui ont octroyé l’aide.

63

En ce qui concerne l’argument selon lequel la République fédérale d’Allemagne n’aurait pas accepté la définition des entreprises en difficulté telle qu’elle résulte des paragraphes 4 à 6 des lignes directrices de 1999 pour la variante des aides régionales du régime d’aides approuvé, il ressort de l’article 17, paragraphe 1, du règlement n o  659/1999 que la Commission obtient tous les renseignements nécessaires de l’État membre concerné pour l’examen des régimes d’aides existants auquel elle procède, en coopération avec l’État membre, en application de l’article 88, paragraphe 1, CE. Si, à la lumière des informations transmises, la Commission parvient à la conclusion qu’un régime d’aides existant n’est pas, ou n’est plus, compatible avec le marché commun, elle adresse à l’État membre concerné une recommandation proposant l’adoption de mesures utiles afin de modifier ou de supprimer le régime d’aides existant, conformément à l’article 18 du règlement n o  659/1999.

64

À cet égard, il ressort de l’article 19 du règlement n o  659/1999 que, « [s]i l’État membre concerné accepte les mesures proposées et en informe la Commission, cette dernière en prend acte et en informe l’État membre » . Ledit article indique également que « [l]’État membre est tenu, par cette acceptation, de mettre en œuvre les mesures utiles » .

65

En l’espèce, conformément aux mesures utiles des lignes directrices de 1999 (voir le point 4 ci-dessus), la République fédérale d’Allemagne a transmis à la Commission par la lettre du 1 er  décembre 1999 une liste des régimes d’aides restants en vigueur au-delà du 30 juin 2000 et devant, selon ladite lettre, être adaptés aux mesures utiles. Le régime d’aides approuvé figure sur cette liste. Par lettre du 20 janvier 2000 , la République fédérale d’Allemagne a accepté les mesures utiles proposées au point 6 des lignes directrices de 1999.

66

Toutefois, selon les requérants, la République fédérale d’Allemagne aurait seulement accepté les mesures utiles pour des régimes d’aides au sauvetage et à la restructuration et, par conséquent, seulement pour la variante des aides au sauvetage et à la restructuration du régime d’aides approuvé. Ils en déduisent que c’est la définition de la notion d’entreprise en difficulté figurant dans la mesure utile E 16/94 qui continue de s’appliquer à la variante des aides régionales du régime d’aides approuvé.

67

Ce raisonnement doit être rejeté.

68

En effet, la Commission relève à juste titre que la correspondance de la République fédérale d’Allemagne dans le dossier ne fait pas de distinction entre les différentes variantes du régime d’aides approuvé. Ce dernier est notamment mentionné sans plus de précisions dans la lettre du 1 er  décembre 1999 . La lettre du 20 janvier 2000 est aussi de nature générale. Il n’a donc pas été établi qu’il existerait une quelconque exclusion expresse de l’application des lignes directrices de 1999 pour la variante des aides régionales du régime d’aides approuvé.

69

Par ailleurs, la grille de contrôle qui fait, ainsi que cela ressort de la lettre du 30 juin 2000 , partie intégrante des régimes de garantie allemands et transpose pour ce domaine les mesures utiles, et notamment son point 4.1, renvoie explicitement à l’obligation de notification individuelle en cas d’aides au sauvetage et à la restructuration destinées à de grandes entreprises en difficulté au sens des lignes directrices de 1999. Il résulte donc du point 4.1 de la grille de contrôle que la République fédérale d’Allemagne a accepté que toute garantie qui peut être qualifiée d’aide au sauvetage et à la restructuration (à l’exception des garanties octroyées dans le cadre d’un régime d’aides aux PME qui satisfont au moins à l’un des trois critères énoncés au paragraphe 5 des lignes directrices de 1999, voir le point 78 ci-après) doit faire l’objet d’une notification individuelle à la Commission, conformément aux lignes directrices de 1999.

70

Certes, comme le relève le Freistaat Sachsen, la correspondance en cause fait, à certains égards, explicitement référence aux « régimes d’aides au sauvetage et à la restructuration » . Par exemple, dans la lettre du 1 er  décembre 1999 , il est fait mention d’une adaptation aux lignes directrices de 1999 de tous les « régimes d’aides au sauvetage et à la restructuration existants » en vigueur après le 30 juin 2000 . Il en va de même pour la grille de contrôle. Cela est tout à fait conforme aux termes du point 6.3 des lignes directrices de 1999 qui requiert l’adaptation des « régimes existants d’aides au sauvetage ou à la restructuration à la lumière des présentes lignes directrices » .

71

Contrairement à ce que soutient le Freistaat Sachsen, cependant, il ne découle pas pour autant de ces références aux « régimes d’aides au sauvetage et à la restructuration » que l’acceptation des mesures utiles par la République fédérale d’Allemagne était limitée à la variante des aides au sauvetage et à la restructuration du régime d’aides approuvé.

72

En effet, même si ladite acceptation des mesures utiles des lignes directrices de 1999 se rapportait uniquement aux régimes d’aides au sauvetage et à la restructuration existants, cela n’impliquerait pas pour autant que le Freistaat Sachsen pouvait faire abstraction des lignes directrices de 1999 quand il a accordé, après leur entrée en vigueur le 9 octobre 1999 et après l’acceptation par la République fédérale d’Allemagne des mesures utiles qui y sont afférentes, des avantages financiers à des entreprises potentiellement en difficulté. Cela est vrai même si lesdits avantages rentraient a priori dans les conditions d’un régime existant d’aides à finalité régionale pour une région qui est, tel qu’il est relevé au considérant 10 de la décision attaquée, une zone assistée au sens de l’article 87, paragraphe 3, sous a), CE.

73

À cet égard, il doit être rappelé que la réserve visée à l’article 87, paragraphe 3, sous a) et c), CE concernant les aides à finalité régionale suppose, quand des aides de sauvetage sont en cause, l’existence d’un vrai plan de restructuration, pour que les effets positifs de l’aide sur le développement régional puissent être durables (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 21 mars 1991 , Italie/Commission, C-305/89, Rec. p. I-1603 , point 36) et compenser les effets de distorsion de la concurrence.

74

De même, il ressort du paragraphe 3 des lignes directrices de 1999, dont la Commission a pu se doter aux fins de l’exercice du large pouvoir d’appréciation dont elle bénéficie dans le cadre de l’application de l’article 87, paragraphe 3, CE et qui s’imposent à elles (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 15 juin 2005 , Regione autonoma della Sardegna/Commission, T-171/02, Rec. p. II-2123 , points 94 et 95, et la jurisprudence citée), que « [l]es aides d’État destinées à sauver des entreprises en difficulté de la faillite et à encourager leur restructuration ne peuvent être considérées comme légitimes que sous certaines conditions » . C’est pour cette raison que les lignes directrices de 1999 prévoient, notamment en leur paragraphe 17, un devoir de notification préalable à la Commission de tout financement apporté ou garanti par l’État à une entreprise en difficulté financière, et que c’est dans le cadre de l’examen de cette notification que la Commission tiendra compte des considérations d’ordre régional mentionnées à l’article 87, paragraphe 3, sous a) et c), CE, ainsi qu’il découle des paragraphes 19 et 20 desdites lignes directrices.

75

Il résulte de ce qui précède que, à l’époque des faits, avant d’accorder une aide à une grande entreprise qui se trouvait dans une situation économique à tout le moins problématique, dont il ne saurait être nié que cela était le cas du groupe Biria, la République fédérale d’Allemagne aurait d’abord dû déterminer s’il s’agissait d’une entreprise en difficulté selon les critères des paragraphes 4 à 6 des lignes directrices de 1999. Si tel était le cas, l’aide en cause était soumise à une obligation de notification individuelle.

76

Il s’ensuit également que l’argument des requérants quant à l’existence d’une définition spécifique de la notion d’entreprise en difficulté dans le cadre de la variante des aides régionales du régime d’aides approuvé doit être rejeté. L’acceptation de l’existence parallèle de différentes définitions de la notion d’entreprise en difficulté pourrait, en effet, mener à une situation dans laquelle une entreprise qui est en difficulté selon les lignes directrices de 1999 pouvait néanmoins bénéficier d’une aide d’État sans qu’il y ait obligation de notification et sans que les lignes directrices de 1999 soient respectées. Or, une telle situation serait contraire à l’économie de l’article 87, paragraphes 1 et 3, CE et de l’article 88, paragraphe, 3, CE, tel qu’explicité dans les lignes directrices de 1999 (voir le point 74 ci-dessus).

77

Concernant ensuite les arguments des requérants selon lesquels les indices énoncés au paragraphe 6 des lignes directrices de 1999 seraient trop vagues pour pouvoir être utilisés par un État membre dans le cadre de l’appréciation de la compatibilité d’une mesure d’aide projetée avec un régime existant, il convient de rappeler, comme la Commission le relève à juste titre, que, en cas de doute sur la qualification de la situation d’une entreprise bénéficiaire, l’État membre doit notifier la mesure en cause.

78

Par ailleurs, en ce qui concerne les arguments des requérants tirés d’une comparaison entre les critères de la mesure utile E 16/94 et ceux du paragraphe 5 des lignes directrices de 1999 ainsi que du fait qu’une certaine correspondance entre la Commission et la République fédérale d’Allemagne, intervenue après les lignes directrices de 1999, aurait uniquement fait référence aux critères dudit paragraphe 5, il doit être relevé qu’il résulte clairement du libellé des lignes directrices de 1999, et notamment de leur point 4 (voir le point 3 ci-dessus), que les seuls régimes d’aides à des entreprises en difficulté encore autorisés sont ceux qui concernent les PME. Il en résulte également que, pour apprécier si ces dernières sont en difficulté, seuls les critères stricts du paragraphe 5 des lignes directrices de 1999 sont a priori pertinents. En dehors de l’applicabilité desdits critères stricts, la notification individuelle s’impose. Si la correspondance entre la Commission et la République fédérale d’Allemagne, postérieure à l’adoption des lignes directrices de 1999, a donc pu contenir une discussion portant sur la définition de la notion d’entreprise en difficulté telle qu’elle ressort du paragraphe 5 des lignes directrices de 1999 afin de définir le cadre d’appréciation des régimes d’aides encore autorisés, il ne saurait en être déduit, comme semble le soutenir les requérants, que la République fédérale d’Allemagne n’a accepté que cette définition-là ni qu’elle a refusé la possibilité d’utiliser la définition d’entreprise figurant au paragraphe 6 des lignes directrices de 1999 en dehors du contexte spécifique de régimes d’aides au sauvetage et à la restructuration aux PME.

79

Enfin, il y a encore lieu de préciser que, ainsi que l’affirme la Commission et comme cela ressort de la lettre du 23 janvier 2006 , la République fédérale d’Allemagne a défendu l’appréciation des mesures 2 et 3 par rapport au paragraphe 6 des lignes directrices de 1999. Par ailleurs, il ne ressort ni de la décision attaquée ni du dossier que la République fédérale d’Allemagne aurait invoqué la mesure utile E 16/94 dans le cadre de la procédure administrative et les requérants n’affirment d’ailleurs pas le contraire.

80

Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de faire abstraction de toute la correspondance entre la Commission et la République fédérale d’Allemagne intervenue avant 1999. Il convient également d’écarter la définition prétendument plus étroite de la notion d’entreprise en difficulté figurant dans la mesure utile E 16/94 au motif qu’elle est dénuée de pertinence pour la solution du présent litige.

81

Par conséquent, la Commission n’a pas violé le droit communautaire ni le régime d’aides approuvé en appréciant la situation des entreprises en cause dans la décision attaquée à la lumière des critères des lignes directrices de 1999, y inclus en ce qui concerne leur paragraphe 6, et non de ceux de la mesure utile E 16/94.

82

Les griefs avancés dans le cadre des recours dans les affaires T-102/07 et T-120/07, tirés d’une violation du régime d’aides approuvé à cet égard, doivent donc être rejetés.

2. Sur les griefs concernant la caractérisation des entreprises bénéficiaires comme entreprises en difficulté

83

Premièrement, MB Immobilien et MB System soutiennent que l’entreprise bénéficiaire de la mesure 1, Bike Systems, n’était pas en difficulté en mars 2001. Étant donné que le régime d’aides approuvé concerne des garanties d’État et que la mesure 1 est une participation tacite ayant été accordée en dehors de ce cadre, MB Immobilien et MB System ne contestent pas à son égard l’applicabilité de la définition de la notion d’entreprise en difficulté contenue dans les lignes directrices de 1999.

84

Deuxièmement, le Freistaat Sachsen et MB Immobilien soutiennent tous les deux que les entreprises bénéficiaires des mesures 2 et 3, respectivement Sachsen Zweirad et Biria GmbH, n’étaient pas en difficulté au sens de la mesure utile E 16/94 au moment de l’octroi des garanties. À cet égard, il ressort de l’analyse qui précède que la Commission était en droit de fonder la décision attaquée sur la définition de la notion d’entreprise en difficulté figurant dans les lignes directrices de 1999. Il s’ensuit que les griefs tirés du fait que les entreprises bénéficiaires ne seraient pas en difficulté selon les critères de la mesure utile E 16/94 doivent être rejetés comme inopérants.

85

Troisièmement, le Freistaat Sachsen soutient que Sachsen Zweirad et Biria GmbH n’étaient pas non plus des entreprises en difficulté au sens des critères des lignes directrices de 1999, respectivement en mars 2003 et en décembre 2003.

86

Par ailleurs, dans leur réplique, MB Immobilien et MB System soutiennent également, à titre subsidiaire, que, même si les lignes directrices de 1999 étaient appliquées, il convenait de considérer que Sachsen Zweirad et Biria GmbH n’étaient pas en difficulté. Ce grief doit toutefois être déclaré irrecevable pour cause de violation de l’article 21 du statut de la Cour de justice et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, selon lequel toute requête doit indiquer l’objet du litige et l’exposé sommaire des moyens invoqués. En effet, cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un recours se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (ordonnance du Tribunal du 11 juillet 2005 , Internationaler Hilfsfonds/Commission, T-294/04, Rec. p. II-2719 , point 23).

87

Il s’ensuit que l’examen d’éventuelles erreurs d’appréciation de la Commission dans l’application des critères des lignes directrices de 1999 à la situation de Sachsen Zweirad et de Biria GmbH se limitera à l’examen des arguments avancés par le Freistaat Sachsen à cet égard.

88

Il sera donc examiné ci-après, sur la base des lignes directrices de 1999, si la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en caractérisant, d’une part, Bike Systems comme ayant été en difficulté en mars 2001 et, d’autre part, Sachsen Zweirad et Biria GmbH comme ayant été en difficulté, respectivement, en mars 2003 et en décembre 2003.

Sur la question de savoir si Bike Systems était une entreprise en difficulté en mars 2001

Arguments des parties

89

En premier lieu, MB Immobilien et MB System soutiennent que les motifs évoqués au considérant 61 de la décision attaquée pour considérer que Bike Systems était une entreprise en difficulté ne correspondent pas à des critères ou symptômes pertinents au sens des lignes directrices de 1999 et sont lacunaires. La Commission aurait elle-même constaté que Bike Systems n’était pas en faillite, mais n’aurait procédé à aucune constatation concernant le bilan des entreprises bénéficiaires et, donc, concernant les critères desdites lignes directrices. En outre, il ne pourrait pas être automatiquement déduit d’une restructuration limitée que les perspectives d’avenir d’une entreprise sont incertaines, mais il aurait fallu pour cela des constatations plus exhaustives. Par ailleurs, la Commission n’aurait pas suffisamment pris en compte le fait que Bike Systems a été reprise par une entreprise saine. En effet, dès lors que, du fait du plan de redressement, est intervenu un changement de propriétaire, la Commission aurait dû examiner le poids économique du repreneur pour pouvoir émettre une opinion valable sur les perspectives d’avenir de l’entreprise. De plus, les pertes ou les capitaux propres négatifs pourraient, mais ne devraient pas nécessairement, constituer un indice qu’une entreprise est en difficulté ainsi que l’attesteraient les critères des lignes directrices de 1999.

90

En deuxième lieu, MB Immobilien et MB System soutiennent que la Commission n’a pas analysé une lettre de confort contraignante (harte Patronatserklärung) de Biria GmbH du 6 mars 2001 (ci-après la « lettre de confort » ) malgré le fait que l’existence de ce document avait été invoquée par la République fédérale d’Allemagne dans la lettre du 31 janvier 2005 . La Commission aurait dû prendre en compte le fait que gbb disposait, en ce qui concerne les obligations nées du contrat de participation tacite, de la garantie de Biria GmbH et que, par conséquent, elle pouvait en cas de défaillance se retourner contre une entreprise qui n’était pas une entreprise en difficulté. La Commission reconnaîtrait d’ailleurs ne pas avoir examiné la lettre de confort que Biria GmbH avait établie au bénéfice de Bike Systems, alors même que ce fait lui était connu. Il conviendrait de distinguer les lettres de confort contraignantes (harte Patronatserklärungen) et les lettres de confort non contraignantes (weiche Patronatserklärungen). Dans le cadre d’une lettre de confort contraignante, le garant ne serait pas un débiteur dont la responsabilité n’intervient qu’après celle du débiteur principal, mais son codébiteur solidaire.

91

Ce raisonnement ne serait pas contredit par le fait que le gouvernement allemand aurait exposé, dans la lettre du 23 janvier 2006 qu’il était d’accord avec les explications de la Commission selon lesquelles une participation tacite est comparable à un prêt subordonné dont le risque, en raison de l’absence de sûretés, est supérieur à celui d’un prêt bancaire classique destiné à financer un investissement, de sorte que la rémunération d’une telle participation tacite doit être nettement supérieure au taux de référence de l’Union européenne en vigueur à la date de l’octroi. Lorsque la Commission indique que, compte tenu de cette déclaration abstraite, elle n’avait aucune raison d’examiner plus en détail la qualification de la lettre de confort et de poser des questions à son égard, elle oublierait qu’elle en a eu connaissance et avait donc une obligation d’instruire ou au moins l’obligation de poser des questions à l’État membre.

92

En troisième lieu, MB Immobilien et MB System soutiennent que la Commission n’a pas pris en compte le rapport d’audit relatif aux comptes annuels arrêtés au 31 décembre 2002 et au rapport de gestion de l’exercice 2002 de Bike Systems (ci-après le « rapport sur les comptes 2002 de Bike Systems » ), dont elle avait connaissance et dans lequel il était indiqué que la présentation et l’appréciation des actifs dans le bilan au 31 décembre 2002 permettaient de partir du principe que les perspectives d’avenir étaient positives. La Commission n’évoquerait à aucun moment la solvabilité du repreneur. MB Immobilien et MB System contestent l’affirmation de la Commission selon laquelle le rapport sur les comptes 2002 de Bike Systems n’aurait aucune valeur pour apprécier des décisions relevant de l’exercice 2001. Elle utiliserait d’ailleurs elle-même ce type de justification a posteriori.

93

En quatrième lieu, elles font valoir que les arguments que la Commission avance concernant des périodes postérieures à la décision attaquée ne sauraient servir à justifier cette dernière.

94

La Commission conteste les arguments de MB Immobilien et de MB System.

Appréciation du Tribunal

95

À titre liminaire, il y a lieu de préciser qu’il ressort de la requête dans l’affaire T-120/07 que les griefs de MB Immobilien et de MB System, avancés dans le cadre de leur deuxième moyen, concernent, d’une part, la caractérisation de Bike Systems en tant qu’entreprise en difficulté et, d’autre part, la détermination de l’élément d’aide, en particulier l’étendue de la majoration appliquée par la Commission.

96

Quant à la détermination de l’élément d’aide de la mesure 1, force est de constater que le deuxième moyen ne contient aucun développement par rapport au grief de MB Immobilien et de MB System formulé au sein de ce moyen de la requête dans l’affaire T-120/07 selon lequel la Commission n’a pas suffisamment tenu compte du fait qu’une rémunération se situant au-delà de 600 points de base au-dessus du taux d’intérêt de référence prend suffisamment en compte le risque accru de défaillance d’une entreprise en difficulté. Il doit donc être déclaré irrecevable conformément à la jurisprudence citée au point 86 ci-dessus. Les arguments à l’encontre de la détermination de l’élément d’aide par rapport au taux de référence du marché se trouvant dans le troisième moyen de la requête dans l’affaire T-120/07 concernant les défauts de motivation seront examinés ci-après dans le cadre de l’examen des griefs tirés de défauts de motivation de la décision attaquée.

97

Le deuxième moyen du recours dans l’affaire T-120/07 et l’examen d’éventuelles erreurs d’appréciation se limitent donc à la question de savoir si la Commission a commis une erreur d’appréciation en estimant que Bike Systems était une entreprise en difficulté au moment de l’octroi de la mesure 1, sur la base des critères des lignes directrices de 1999.

98

Il convient de rappeler, d’emblée, que l’examen auquel doit se livrer la Commission implique la prise en considération et l’appréciation de faits et de circonstances économiques complexes. Le juge ne pouvant substituer son appréciation des faits et des circonstances économiques complexes à celle de la Commission, le contrôle du Tribunal doit, par conséquent, se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (voir arrêt du Tribunal du 11 mai 2005 , Saxonia Edelmetalle et ZEMAG/Commission, T-111/01 et T-133/01, Rec. p. II-1579 , point 91, et la jurisprudence citée).

99

Concernant la situation de Bike Systems en mars 2001, il y a lieu de rappeler que la Commission indique au considérant 61 de la décision attaquée ce qui suit:

« […] du fait même que Bike Systems a adopté un plan d’insolvabilité, elle faisait l’objet d’une assistance pour insolvabilité. Ses perspectives d’avenir étaient donc incertaines, car sa restructuration était limitée. Selon le bilan 2001, l’entreprise a continué à enregistrer des pertes cette année-là. Son capital propre est resté négatif, sans pour autant entraîner son insolvabilité, grâce à ses réserves tacites. Il faut par conséquent considérer que Bike Systems était en difficulté à cette époque. »

100

L’analyse de la situation de Bike Systems se fonde donc sur l’existence d’un plan d’insolvabilité, le caractère limité de sa restructuration dont il résulterait que ses perspectives d’avenir étaient incertaines, les pertes dont fait état le bilan de 2001 et le capital propre négatif.

101

En premier lieu, MB Immobilien et MB System font valoir que lesdits facteurs ne se retrouvent pas dans les lignes directrices de 1999 et n’étayent pas à suffisance de droit la conclusion de la Commission selon laquelle Bike Systems était en difficulté.

102

Cet argument ne saurait prospérer.

103

En effet, en ce qui concerne le cadre d’analyse des lignes directrices de 1999, il y a lieu de rappeler que leur paragraphe 4 se limite à énoncer de manière générale qu’une entreprise est considérée comme étant en difficulté lorsqu’elle est incapable, avec ses propres ressources financières ou avec les ressources que sont prêts à lui apporter ses propriétaires/actionnaires et ses créanciers, d’enrayer des pertes qui la conduiraient à une mort économique certaine à court ou à moyen terme en l’absence d’une intervention publique.

104

Par ailleurs, il ressort du libellé des paragraphes 5 et 6 des lignes directrices de 1999 que, si une entreprise est « en tout cas » considérée comme en difficulté lorsqu’une partie substantielle de son capital social a disparu, il peut aussi être démontré par d’autres indices, tels que ceux énumérés au paragraphe 6, qu’elle est en difficulté financière au sens des lignes directrices de 1999, même si elle n’a pas perdu une partie importante de son capital social (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du Tribunal du 15 juin 2005 , Corsica Ferries France/Commission, T-349/03, Rec. p. II-2197 , point 185).

105

Il peut être déduit de cette jurisprudence, d’une part, que la réduction significative du capital social est un facteur très grave indiquant qu’une entreprise se trouve en difficulté et, d’autre part, qu’il existe un certain nombre de facteurs économiques, dont le paragraphe 6 des lignes directrices de 1999 contient une liste non exhaustive (voir l’utilisation des mots « tels que » dans l’arrêt Corsica Ferries France/Commission, point 104 supra, point 185), qui peuvent également démontrer l’existence d’un tel état, même en l’absence de la perte d’une partie importante du capital social ou d’un état d’insolvabilité au sens du paragraphe 5 des lignes directrices de 1999.

106

En l’espèce, la décision attaquée évoque l’existence d’un capital propre négatif qui, contrairement à ce qu’allèguent MB Immobilien et MB System, peut être considéré comme un indicateur important d’une situation de difficulté financière d’une entreprise, même en dehors des circonstances spécifiques énoncées au paragraphe 5 des lignes directrices de 1999.

107

Elle mentionne également d’autres indices, notamment la continuation des pertes dans l’année de la mesure 1. Même si ce dernier facteur n’est pas mentionné dans la liste non exhaustive d’indices du paragraphe 6, qui mentionne un niveau croissant des pertes, sa pertinence dans le cadre de l’analyse de la situation financière d’une entreprise ne saurait être niée pour autant qu’il se rapporte à la situation existante avant ou au moment de l’octroi de l’aide, ce que MB Immobilien et MB System ne contestent pas.

108

Quant à l’existence d’un plan d’insolvabilité, il ressort des explications fournies par MB System et la Commission en réponse à des questions écrites du Tribunal dans l’affaire T-120/07 que la procédure du plan d’insolvabilité en droit allemand vise le redressement d’une entreprise insolvable à un moment où une faillite peut encore être évitée et suppose la présentation d’un plan d’insolvabilité.

109

À cet égard, il doit être rappelé que le paragraphe 5, sous c), des lignes directrices de 1999 fait référence à la circonstance d’une entreprise remplissant « selon son droit national les conditions pour être soumise à une procédure collective fondée sur son insolvabilité » comme facteur indiquant qu’elle est en tout cas à considérer comme étant en difficulté. Certes, la situation de Bike Systems en mars 2001 ne correspondait pas à la situation décrite audit paragraphe 5, sous c), car elle était sortie de la procédure d’insolvabilité. Toutefois, ainsi que la Commission l’a confirmé en réponse aux questions écrites du Tribunal et à l’audience, elle a considéré, dans la décision attaquée, que le plan d’insolvabilité avait permis à Bike Systems de sortir d’une situation d’insolvabilité, mais que sa situation restait fragile, notamment parce que sa restructuration était limitée, facteur qui était pris en compte comme un indice de difficulté au titre du paragraphe 6 des lignes directrices de 1999.

110

Concernant ensuite l’étendue de cette restructuration, tout en concédant que la restructuration initiale de Bike Systems avait un caractère limité dans le sens où il fallait ressortir la société au plus vite de la procédure d’insolvabilité pour permettre la continuité de ses activités et qu’il s’agissait donc essentiellement d’un apurement de dettes, MB System fait valoir que la Commission aurait dû prendre en compte le fait que la situation d’une entreprise qui est sortie d’une procédure d’insolvabilité est semblable à celle d’une nouvelle société, car elle n’a plus de dettes. De plus, selon MB System, les créanciers croyaient au redressement de Bike Systems dès lors qu’ils ont accepté le plan d’insolvabilité. Selon elle, le groupe Biria étant le deuxième sur le marché, après son acquisition par ce dernier, Bike Systems avait des perspectives économiques tout à fait différentes.

111

En dépit des facteurs mentionnés par MB Immobilien et MB System, il doit être constaté que la procédure d’insolvabilité concernant Bike Systems n’a été close qu’en décembre 2000, c’est-à-dire seulement trois mois avant l’octroi de la mesure 1. Dans ces circonstances et en tenant compte du fait qu’il s’agissait essentiellement d’une restructuration de dettes sans changements opérationnels majeurs, le Tribunal estime que la Commission a pu conclure sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la situation de Bike Systems en mars 2001 restait fragile et que ses perspectives d’avenir étaient incertaines, et ce en dépit de la confiance que des banques ont pu manifester concernant lesdites perspectives d’avenir.

112

Quant à la prétendue absence de prise en compte de la situation du repreneur sain de Bike Systems, grief qui, ainsi qu’il ressort d’une réponse aux questions écrites du Tribunal, fait référence à l’intégration de Bike Systems dans le groupe Biria pendant la période de restructuration, force est de constater que l’argument de MB Immobilien et de MB System est très peu étayé et qu’elles n’expliquent pas, notamment, quels éléments spécifiques avancés durant la procédure administrative n’auraient pas été pris en compte par la Commission. La référence faite lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, à la position sur le marché du groupe Biria ne saurait suffire à cet égard et il y a donc lieu de déclarer le grief irrecevable conformément à la jurisprudence citée au point 86 ci-dessus. En tout état de cause, ainsi que l’affirme la Commission, c’est Bike Systems qui était débitrice de la rémunération de la mesure 1 et non l’acquéreur et il ne saurait être tenu pour acquis qu’un repreneur soutiendra sa filiale pour le règlement d’une telle dette.

113

En deuxième lieu, MB Immobilien et MB System soutiennent que la Commission aurait dû analyser la lettre de confort.

114

À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il incombe à l’État membre concerné, pour s’acquitter de son devoir de coopération envers la Commission, de fournir tous les éléments de nature à permettre à cette institution de vérifier que les conditions de la dérogation dont il demande à bénéficier sont réunies (voir arrêt du Tribunal du 6 avril 2006 , Schmitz-Gotha Fahrzeugwerke/Commission, T-17/03, Rec. p. II-1139 , point 48, et la jurisprudence citée).

115

Par ailleurs, il est de jurisprudence constante que la légalité d’un acte communautaire doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date à laquelle l’acte a été adopté et que les appréciations portées par la Commission ne doivent être examinées qu’en fonction des seuls éléments dont celle-ci disposait au moment où elle les a effectuées (voir arrêt Schmitz-Gotha Fahrzeugwerke/Commission, point 114 supra, point 54, et la jurisprudence citée).

116

Lorsque la Commission a mis les intéressés en mesure de présenter utilement leurs observations, il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir tenu compte d’éventuels éléments de fait qui auraient pu lui être présentés pendant la procédure administrative, mais qui ne l’ont pas été, la Commission n’étant pas dans l’obligation d’examiner d’office et par supputation quels sont les éléments qui auraient pu lui être soumis (voir arrêt Schmitz-Gotha Fahrzeugwerke/Commission, point 114 supra, point 54, et la jurisprudence citée).

117

En l’espèce, force est de constater que la lettre de confort n’a pas été communiquée à la Commission pendant la procédure administrative. Il est toutefois vrai que son existence a été mentionnée par la République fédérale d’Allemagne dans la lettre du 31 janvier 2005 dans les termes suivants:

« L’alliance stratégique constituée par le groupe Biria (notamment groupement d’achat et livraison de matériaux) a permis de considérer que les perspectives d’avenir de Bike Systems étaient positives et que sa restructuration serait réussie. Une lettre de confort exigée de [Sachsen Zweirad] et de Biria GmbH dans le cadre du versement [de la participation tacite] devait garantir que ces entreprises soutiendraient activement le devenir de Bike Systems. »

118

À cet égard, il y a lieu de relever que, comme le fait valoir la Commission, le fait que la République fédérale d’Allemagne ait dans une seule phrase fait savoir que, dans le cadre du refinancement de la société en cause, il y avait une garantie d’assistance continue de la part de la société mère, ne saurait vouloir nécessairement dire, sans autres preuves à l’appui, par exemple par rapport à la situation financière de l’auteur de la lettre de confort à la date de la mesure 1, que Bike Systems devait être évaluée différemment à l’avenir ni que ses perspectives d’avenir en étaient modifiées. En tout état de cause, pour pouvoir évaluer le caractère contraignant de la lettre de confort, la Commission aurait dû disposer du document original.

119

En résumé, dans les circonstances de l’espèce telles que décrites et conformément à la jurisprudence citée aux points 114 à 116 ci-dessus, il n’incombait pas à la Commission de demander à la République fédérale d’Allemagne des explications sur l’impact de la lettre de confort sur la situation financière de Bike Systems. Il y a donc lieu de conclure que la Commission n’a pas commis d’illégalité en ne procédant pas à un examen ultérieur de la référence à la lettre de confort contenue dans la lettre du 31 janvier 2005 .

120

En troisième lieu, concernant le défaut de prise en compte du rapport sur les comptes 2002 de Bike Systems dans la décision attaquée, il est évident que la situation financière de Bike Systems en 2002 n’est pas pertinente pour apprécier la légalité de la mesure 1 prise en mars 2001. La jurisprudence précise clairement à cet égard que la question de savoir si une mesure constitue une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE doit être résolue à la lumière de la situation existant au moment où cette mesure a été prise. Si la Commission tenait compte d’éléments postérieurs, elle avantagerait, en effet, les États membres qui manquent à leur obligation de notifier les aides à l’état de projet qu’ils envisagent d’octroyer (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 11 juillet 2002 , HAMSA/Commission, T-152/99, Rec. p. II-3049 , point 53).

121

En quatrième lieu, quant aux références faites par la Commission à la situation de Bike Systems en 2002 et en 2003 et les circonstances dans lesquelles la mesure 1 aurait pris fin en 2005, celles-ci ne sont pas pertinentes pour juger de la légalité de la décision attaquée pour les mêmes raisons qu’évoquées au point 120 ci-dessus.

122

Il résulte de ce qui précède que les facteurs mentionnés au considérant 61 de la décision attaquée sont conformes aux lignes directrices de 1999 et que la Commission n’a pas commis d’erreurs manifestes d’appréciation en concluant que Bike Systems était en difficulté en mars 2001.

Sur la question de savoir si Sachsen Zweirad et Biria GmbH étaient des entreprises en difficulté, respectivement, en mars et en décembre 2003

123

Le Freistaat Sachsen avance, d’une part, des arguments de portée générale liés au cadre d’appréciation de la situation des entreprises bénéficiaires des mesures 2 et 3 et, d’autre part, des erreurs manifestes dans l’application dudit cadre à ces entreprises.

Sur le cadre d’appréciation de la situation des entreprises bénéficiaires des mesures 2 et 3

— Arguments des parties

124

Le Freistaat Sachsen fait valoir que, aux considérants 66 à 78 de la décision attaquée, la Commission se contenterait d’énumérer quelques « symptômes » typiques d’entreprises en difficulté en se référant au paragraphe 6 des lignes directrices de 1999, dans lequel la catégorie des entreprises susceptibles d’être soutenues par des aides de sauvetage et de restructuration serait étendue à des entreprises qui ne remplissent pas les critères dudit paragraphe 5. Les entreprises en difficulté qui seraient insolvables sans une intervention de l’État présenteraient généralement les « symptômes » énumérés au paragraphe 6 des lignes directrices, ou à tout le moins certains d’entre eux. Or, la présence de certains de ces « symptômes » ne suffirait pas pour constater qu’une entreprise se trouve dans des difficultés telles que, en l’absence d’une aide d’État, elle serait écartée du marché.

125

Par ailleurs, selon le Freistaat Sachsen, la pratique de la Commission irait dans le sens inverse. Pour les entreprises qui ne remplissent pas les critères du paragraphe 5 des lignes directrices de 1999, elle ne se contenterait pas, dans ses décisions les plus récentes, de la constatation de quelques « symptômes » .

126

De plus, la Commission surestimerait l’étendue de son pouvoir d’appréciation. Elle ne saurait substituer son appréciation à celle de l’autorité ayant octroyé l’aide, car, en approuvant le régime d’aides, la Commission aurait conféré à l’État membre une certaine marge de manœuvre. Dès lors, la seule tâche qui lui incomberait encore en vertu de l’article 88, paragraphe 1, CE serait le contrôle permanent de l’application du régime d’aides approuvé. Par conséquent, le Freistaat Sachsen estime que l’appréciation d’une autorité ou d’un organe de l’État membre lors de l’octroi de l’aide devrait être manifestement erronée au moment de la prise de décision (et non sur la base des informations dont la Commission disposerait ultérieurement lors dudit contrôle) pour que le régime d’aides approuvé ne produise pas son effet.

127

Le Freistaat Sachsen soutient, en outre, que la marge d’appréciation pour décider si une entreprise peut être considérée comme une entreprise en difficulté est plus étroite dans le cadre de régimes d’aides régionales que dans le cadre d’aides au sauvetage et à la restructuration. Dans le cas de ces dernières, l’effet anticoncurrentiel résulterait du fait que l’entreprise en difficulté est favorisée par rapport aux autres entreprises. En revanche, dans le cas d’aides régionales, l’entreprise en difficulté serait défavorisée par rapport aux autres entreprises qui bénéficieraient d’aides régionales pour le même projet.

128

Dans ce contexte, le Freistaat Sachsen estime qu’il y a également lieu de considérer différemment les critères du paragraphe 5 et du paragraphe 6 des lignes directrices de 1999. Tandis que les critères dudit paragraphe 5 pourraient faire l’objet d’un contrôle, les « symptômes » énumérés audit paragraphe 6 pourraient apparaître tant dans le cas d’entreprises en difficulté que dans le cas d’entreprises qui ne sont pas en difficulté. Dès lors, si une entreprise ne présente que certains de ces « symptômes » , il ne pourrait être tenu pour établi que l’appréciation de l’autorité octroyant l’aide, selon laquelle l’entreprise n’est pas une entreprise en difficulté, est manifestement erronée. Toutefois, étant donné que les critères du paragraphe 5 et la plupart des « symptômes » du paragraphe 6 n’étaient pas réunis pour les deux entreprises à l’époque en cause, la constatation dans la décision attaquée selon laquelle certains « symptômes » étaient réunis ne suffirait pas pour justifier a posteriori la non-application d’un régime d’aides approuvé.

129

Selon le Freistaat Sachsen, l’affirmation de la Commission selon laquelle le Tribunal a estimé dans son arrêt Corsica Ferries France/Commission, point 104 supra, que la présence de deux indices, à savoir le niveau croissant des pertes et des dettes, suffisait pour présumer le caractère d’entreprise en difficulté serait trompeuse, car ce litige portait sur une décision dans laquelle la Commission avait également constaté la présence d’un des critères prévus au paragraphe 5 des lignes directrices de 1999. Par ailleurs, les deux indices susmentionnés n’auraient précisément pas été présents dans le cas de Sachsen Zweirad en mars 2003 et de Biria GmbH en décembre 2003.

130

En outre, la Commission n’aurait pas correctement apprécié les critères énoncés au paragraphe 6 des lignes directrices de 1999. En effet, dans ses observations sur l’ouverture de la procédure formelle d’examen, la République fédérale d’Allemagne aurait transmis à la Commission un tableau dont il apparaîtrait que lesdits critères n’étaient pas remplis. Ce tableau porterait tout d’abord sur la situation de Sachsen Zweirad étant donné que, en 2001 et en 2002, cette entreprise aurait subi des pertes alors que, après la reprise de Biria AG (ancienne dénomination), elle aurait à nouveau réalisé des bénéfices en 2003 (en tant que Biria GmbH). Les critères du paragraphe 6 des lignes directrices seraient fondés sur une évolution négative (pertes croissantes, stocks en augmentation, cash-flow en diminution, endettement et charges d’intérêts croissants, diminution ou perte des fonds propres). Or, le tableau soumis par la République fédérale d’Allemagne montrerait que, en 2003, la situation s’est améliorée et qu’aucun des indices n’était encore présent. La question de la tendance du développement économique serait décisive pour examiner l’entreprise au regard des critères du paragraphe 6 des lignes directrices de 1999. Une entreprise solvable qui dispose encore de plus de la moitié de ses fonds propres ou qui a perdu moins du quart de ceux-ci au cours des douze derniers mois ne remplirait pas les critères d’une entreprise en difficulté au sens du paragraphe 5 desdites lignes directrices. Les pertes de fonds propres ne pourraient, par conséquent, suffire pour satisfaire au critère lié aux pertes prévu au paragraphe 6 des lignes directrices de 1999 et qualifier l’entreprise comme étant en difficulté lorsque les seuils fixés au paragraphe 5 ne sont pas atteints. Au contraire, il devrait également y avoir une dégradation manifeste de la situation économique. La Commission n’aurait pas reconnu, dans la décision attaquée, que la situation économique des entreprises concernées s’était en réalité améliorée depuis 2001.

131

Quant à l’affirmation de la Commission selon laquelle la définition proprement dite d’une entreprise en difficulté au sens des lignes directrices de 1999 serait énoncée en leur paragraphe 4, il suffirait de constater qu’elle n’a pas appliqué cette définition dans la décision attaquée. Il y aurait lieu de relever, en outre, qu’il ne découle pas de ce critère qu’une entreprise est à considérer comme étant en difficulté dès qu’elle est incapable de réunir des fonds propres ou des fonds d’emprunt pour financer les projets nécessaires pour améliorer sa situation économique. Cela ressortirait notamment du document SEC(2005) 795 de la Commission intitulé « Plan d’action dans le domaine des aides d’État — Des aides d’État moins nombreuses et mieux ciblées: une feuille de route pour la réforme des aides d’État 2005-2009 de la Commission » (ci-après le « plan d’action » ) selon lequel une telle situation peut également s’expliquer par les défaillances du marché. La variante des aides régionales du régime d’aides approuvé pourrait seulement être appliquée lorsqu’aucun autre financement ne peut être trouvé pour le projet, et ce également pour des entreprises qui ne sont pas en difficulté. L’expérience acquise dans le cadre de l’application de cet instrument de soutien régional depuis 1993 aurait montré que les entreprises qui ne connaissent pas de difficultés économiques ont néanmoins besoin de la garantie du Land pour réaliser leurs projets. Il en serait par exemple ainsi lorsque leur banque habituelle restructure son portefeuille et se retire du financement.

132

La Commission conteste les arguments du Freistaat Sachsen.

— Appréciation du Tribunal

133

Il ressort de l’analyse aux points 103 à 105 ci-dessus que le paragraphe 6 des lignes directrices de 1999 contient une liste non exhaustive de facteurs qui peuvent servir à démontrer qu’une entreprise se trouve en difficulté, même en l’absence d’une forte réduction du capital social ou de procédure d’insolvabilité telles que prévues en leur paragraphe 5, circonstances qui, selon ledit paragraphe 5, mènent en tout cas à considérer que l’entreprise se trouve en difficulté. Contrairement à ce que soutient le Freistaat Sachsen, il est donc possible, dans le cadre des lignes directrices de 1999, de trouver sur la base de certains des indices énoncés au paragraphe 6 ou même sur la base d’autres indices, qu’une entreprise se trouve dans des difficultés telles que, en l’absence d’une intervention publique, sa survie est compromise.

134

Par ailleurs, quant aux parallèles que le Freistaat Sachsen entend établir avec d’autres procédures d’aides d’État, il y a lieu de rappeler que c’est dans le seul cadre de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE que doit être appréciée la légalité d’une décision de la Commission constatant qu’une aide nouvelle ne répond pas aux conditions d’application de cette dérogation, et non au regard d’une pratique décisionnelle antérieure de la Commission, à supposer celle-ci établie (arrêt Regione autonoma della Sardegna/Commission, point 74 supra, point 177). Des comparaisons avec d’autres procédures d’aides d’État sont donc dénuées de pertinence pour établir s’il y a un nombre minimal de critères à remplir au sens du paragraphe 6 des lignes directrices de 1999, compte tenu de la présence ou non d’un capital propre affecté au sens de leur paragraphe 5.

135

Concernant la référence faite par le Freistaat Sachsen à l’arrêt Corsica Ferries France/Commission, point 104 supra, il y a lieu de relever que le Tribunal a retenu au point 191 dudit arrêt que le niveau des pertes et celui des dettes financières de l’entreprise en cause étaient des critères qui étaient à eux seuls susceptibles d’établir le caractère d’entreprise en difficulté. Or, il ne saurait en être déduit qu’il existerait un nombre minimal de critères à remplir pour qualifier une entreprise comme étant en difficulté, car l’appréciation du Tribunal à cet égard était spécifique aux faits et aux éléments de l’espèce. Il en découle toutefois qu’il n’est pas nécessaire que tous les critères énumérés au paragraphe 6 des lignes directrices de 1999 soient remplis pour qu’une entreprise puisse être considérée comme étant en difficulté au sens des lignes directrices de 1999.

136

De plus, en ce qui concerne l’argument du Freistaat Sachsen selon lequel la marge d’appréciation de la Commission serait différente dans le contexte d’un régime d’aides approuvé, il a été rappelé au point 62 ci-dessus que l’examen fait par la Commission de la conformité d’une aide avec un régime d’aides ne constitue pas une initiative dépassant le cadre de ses compétences. Les entreprises en difficulté étant exclues de la variante des aides régionales du régime d’aides approuvé et leur définition étant régie par les lignes directrices de 1999, ainsi que cela ressort de l’analyse du cadre juridique s’appliquant au cas d’espèce aux points 58 à 81 ci-dessus, la Commission était en droit de vérifier si les lignes directrices de 1999 avaient été correctement appliquées en l’espèce. Les arguments tirés d’une éventuelle marge d’appréciation plus réduite de la Commission en ce qui concerne les aides régionales par rapport à des aides à la restructuration doivent être rejetés pour les mêmes raisons.

137

Ensuite, concernant l’argument du Freistaat Sachsen selon lequel, en l’absence d’une situation de perte de fonds propres telle que décrite au paragraphe 5 des lignes directrices de 1999, il faudrait démontrer, par le biais des critères de leur paragraphe 6, l’existence d’une tendance négative, il ressort de la jurisprudence que l’importance accordée dans les lignes directrices aux indicateurs de tendance ne prive pas nécessairement de pertinence d’autres types d’indicateurs. Toutefois, de tels indicateurs ne pourraient apparaître pertinents que s’ils permettent de constater l’existence de difficultés véritables et démontrées (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Regione autonoma della Sardegna/Commission, point 74 supra, point 111). Il s’ensuit que, si des indicateurs de tendance négative sont, certes, particulièrement pertinents pour établir si une entreprise est en difficulté, il ne saurait être déduit de la formulation des critères au paragraphe 6 des lignes directrices de 1999 une quelconque obligation pour la Commission de prouver l’existence d’une tendance négative pourvu qu’elle établisse à suffisance de droit qu’il s’agit d’une société dont la survie serait compromise en l’absence d’une intervention publique.

138

Enfin, concernant la référence au plan d’action faite par le Freistaat Sachsen, ledit document prône un recours plus fréquent à une approche économique dans le domaine des aides d’État et indique que l’un des éléments principaux à cet égard est l’analyse des défaillances du marché qui peuvent être les raisons pour lesquelles les marchés ne permettent pas d’atteindre les objectifs d’intérêt commun souhaités (points 22 et 23 du plan d’action). Force est toutefois de constater que ces affirmations sont de nature très générale et sans aucun rapport avec la définition de la notion d’entreprise en difficulté. Elles ne confirment aucunement la thèse du Freistaat Sachsen selon laquelle la Commission aurait dû prendre en compte le fait que des problèmes de liquidité d’une entreprise peuvent être liés à certains facteurs économiques non persistants, telle une phase de croissance. Il y a donc lieu de rejeter cet argument.

139

Il s’ensuit que tous les arguments soulevés par le Freistaat Sachsen quant au cadre général d’analyse appliqué par la Commission pour apprécier si les entreprises bénéficiaires en cause étaient en difficulté doivent être rejetés.

Sur l’appréciation de la situation de Sachsen Zweirad

— Arguments des parties

140

Le Freistaat Sachsen soutient que Sachsen Zweirad n’avait pas accusé de pertes croissantes en mars 2003. Il admet qu’elle avait subi des pertes en 2001 et en 2002, mais celles-ci auraient déjà été réduites de 2001 à 2002, passant de 1,274  million d’euros à 733000  euros. Au moment de l’octroi de la mesure 2, un résultat annuel positif aurait été attendu pour 2003. De surcroît, les bénéfices des années précédentes n’auraient pas été absorbés par les pertes. Sachsen Zweirad aurait conservé un capital propre positif inchangé. Par ailleurs, de 2001 à 2002, son chiffre d’affaires aurait été réduit de 13,8 % à 51 millions d’euros, parce que les acheteurs potentiels étaient extrêmement réservés en Allemagne, en raison de la persistance de la mauvaise conjoncture. Pour l’exercice 2003, la société aurait compté redresser le chiffre d’affaires et ce plan aurait été jugé réaliste, parce que, d’une part, la retenue des acheteurs au cours de la période antérieure aurait entraîné un besoin de rattrapage et, d’autre part, les dix plus gros clients de Sachsen Zweirad auraient déjà passé des commandes fermes avant le début de l’année pour un volume de chiffre d’affaires excédant 30 millions d’euros. La baisse de chiffre d’affaires n’aurait donc pas été de longue durée. Le Freistaat Sachsen soutient que, bien que la Commission ait constaté la présence des deux indices susmentionnés, elle n’a cependant pas abordé leurs causes ni examiné leurs effets sur l’évolution de l’entreprise. Sans un tel examen, ces indices ne permettraient pas de tirer de conclusion quant à la question de savoir si une entreprise se trouve ou non en difficulté.

141

La Commission évoquerait en outre des problèmes de liquidités, mais ceux-ci ne pourraient pas être assimilés à des difficultés de paiement. Elle expliquerait elle-même qu’il est nécessaire de recourir à un financement extérieur pour assurer la croissance de l’entreprise et la constitution d’un fond de roulement qui lui est liée. Or, la difficulté d’obtenir un financement de croissance sur le marché ne permettrait pas de qualifier une entreprise comme étant en difficulté. Cela vaudrait également pour la nécessité évoquée dans le rapport d’audit relatif aux comptes annuels arrêtés au 31 décembre 2002 et au rapport de gestion de l’exercice 2002 de Sachsen Zweirad (ci-après le « rapport sur les comptes 2002 de Sachsen Zweirad » ) de restructurer globalement le financement pour diminuer les coûts de l’entreprise et de lui permettre de planifier à plus long terme en toute sécurité. Les brèves durées résiduelles des crédits seraient avant tout un risque en matière de coûts et non directement une preuve de difficultés substantielles. Par ailleurs, les charges d’intérêts supportées par Sachsen Zweirad auraient diminué (passant de 2 millions d’euros en 2001 à 1,8  million d’euros en 2002), de sorte qu’aucune difficulté de paiement n’était à attendre en raison de cette charge d’intérêts en cas d’octroi d’une garantie.

142

La Commission conteste les arguments du Freistaat Sachsen.

— Appréciation du Tribunal

143

Il convient de rappeler, à titre liminaire, que, selon une jurisprudence constante, la Commission jouit d’un large pouvoir d’appréciation dans l’application de l’article 87, paragraphe 3, CE. Le juge ne pouvant substituer son appréciation des faits et des circonstances économiques complexes à celle de la Commission, le contrôle du Tribunal doit, par conséquent, se limiter à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (voir arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007 , Olympiaki Aeroporia Ypiresies/Commission, T-68/03, Rec. p. II-2911 , point 150, et la jurisprudence citée).

144

En l’espèce, en ce qui concerne la mesure 2 et la situation de Sachsen Zweirad en mars 2003, la décision attaquée indique ce qui suit:

« (66)

D’après [la République fédérale d’Allemagne], [Sachsen Zweirad] ne remplit aucun des critères définissant une entreprise en difficulté au sens des lignes directrices [de 1999]. La Commission rappelle que les symptômes caractéristiques des difficultés d’une entreprise, décrits au [paragraphe] 6 des lignes directrices [de 1999], servent uniquement de points de référence pour déterminer quand une entreprise doit être considérée comme étant en difficulté et ne sont pas des critères à respecter stricto sensu dans leur intégralité. En 2001, [Sachsen Zweirad] a enregistré des pertes de 1274000 [euros] et, en 2002, de 733000 [euros], que la société mère Biria a prises à son compte en vertu du contrat de transfert des résultats. Le chiffre d’affaires a baissé en 2002 par rapport à 2001.

(67)

D’après [le rapport sur les comptes 2002 de Sachsen Zweirad], [elle] était également en proie à des problèmes de liquidités. Ce rapport indique explicitement que les grosses dépenses dans le cadre du préfinancement du stock de marchandises et de la croissance du groupe ont fortement entamé les liquidités de [Sachsen Zweirad] et que l’entreprise n’a pu survivre que parce que les banques ont été disposées à maintenir ou à restructurer les crédits en cours.

(68)

[La République fédérale d’Allemagne] prétend qu’il n’y a jamais eu de risque que les institutions bancaires privées ne prolongent pas leurs crédits. Il n’en reste pas moins vrai que les liquidités de l’entreprise étaient fortement entamées. D’après [le rapport sur les comptes 2002 de Sachsen Zweirad], la durée résiduelle de la plupart des crédits était inférieure à cinq ans, ce qui n’est aucunement propice au financement des activités et augmente les risques pour l’entreprise. La courte échéance des crédits impliquait en outre le versement d’intérêts élevés (même s’ils étaient légèrement inférieurs en 2002 par rapport à 2001), ce qui a entamé davantage les liquidités de l’entreprise. »

145

Il ressort de ce passage de la décision attaquée que la Commission a fondé sa conclusion selon laquelle Sachsen Zweirad était en difficulté en mars 2003 sur les facteurs suivants: premièrement, l’existence de pertes, bien que décroissantes, dans les années 2001 et 2002, deuxièmement, un chiffre d’affaires en baisse en 2002 par rapport à 2001, et, troisièmement, l’existence de sérieux problèmes de liquidités dont il est fait acte dans le rapport sur les comptes 2002 de Sachsen Zweirad qui seraient encore aggravés par une prépondérance des crédits à court terme à intérêt élevé.

146

Tout d’abord, concernant le chiffre d’affaires décroissant, il y a lieu de constater que ce critère est mentionné au paragraphe 6 des lignes directrices de 1999. Même si ce critère à lui seul n’est pas un indice fort de l’existence de difficultés substantielles d’une entreprise lorsque seulement deux années consécutives sont prises en compte, la Commission a également examiné d’autres critères pour évaluer la situation financière de Sachsen Zweirad.

147

Quant aux pertes, force est de constater que le paragraphe 6 des lignes directrices de 1999 fait référence à un niveau croissant des pertes. Néanmoins, le Tribunal estime que cela ne saurait empêcher la Commission de prendre en compte la subsistance de pertes sur plusieurs années consécutives comme un indicateur de difficulté financière, même si elles ne sont pas croissantes. Par ailleurs, il semble tout à fait pertinent dans le cas d’une mesure d’aide octroyée au courant du premier trimestre de l’année 2003 de prendre en compte à cet égard les résultats financiers de l’entreprise bénéficiaire durant les deux années précédentes.

148

Par ailleurs, quant au tableau fourni en annexe à la requête, qui fait état d’un profit de 1,7  million d’euros au moment d’un bilan intermédiaire en date du 31 mai 2003 , que le Freistaat Sachsen reproche à la Commission de ne pas avoir pris en compte, il y a lieu de relever que, comme l’indique la Commission, une amélioration de la situation de l’entreprise bénéficiaire au courant de l’année pendant laquelle la mesure 2 a été accordée ne saurait influencer l’appréciation de sa situation au moment de l’octroi, notamment parce qu’il ne saurait être exclu que l’existence de ladite garantie ait pu influencer cette évolution. Comme il a été rappelé ci-dessus, la jurisprudence indique que la question de savoir si une mesure constitue une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE doit être résolue à la lumière de la situation existant au moment où cette mesure a été prise. Si la Commission tenait compte d’éléments postérieurs, elle avantagerait les États membres qui manquent à leur obligation de notifier les aides à l’état de projet qu’ils envisagent d’octroyer (arrêt HAMSA/Commission, point 120 supra, point 53).

149

Concernant ensuite les problèmes de liquidités, le paragraphe 6 des lignes directrices de 1999 ne les mentionne pas explicitement, même s’il fait référence à la diminution de la marge d’autofinancement brute comme un indicateur de difficulté financière.

150

Force est toutefois de constater que la situation des liquidités était clairement décrite comme préoccupante dans le rapport sur les comptes 2002 de Sachsen Zweirad sur lequel la Commission a fondé son analyse. Ledit rapport indiquait notamment ce qui suit:

« La société a tenté de contrecarrer la dégradation des résultats qui s’est encore accentuée par rapport à 2001 en procédant à des économies de coûts qui, considérées dans l’absolu, ont pu être concrétisées notamment dans le domaine des charges pour salaires et au niveau des autres coûts d’exploitation. Ces mesures se sont toutefois avérées insuffisantes pour éviter un résultat négatif à la fin de cette année […]

Comme au cours de l’exercice 2001 précédent, la direction de [Sachsen Zweirad] estime que l’élargissement du groupe d’entreprises liées à la société mère Biria AG, qui en 2002 également a engendré un important besoin de financement, constitue la source principale de risque. La caution du Bund et du Land qui avait tout d’abord été acceptée sous réserve de la présentation d’une déclaration de non-opposition de la part de la [Commission] ayant été refusée, la crise de liquidités qui sévit actuellement n’a pu être surmontée, notamment au cours des mois d’hiver, que grâce à un plan de financement élaboré avec les banques. À ce jour, l’existence de [Sachsen Zweirad] dépend ainsi du maintien des crédits actuellement octroyés par les banques, et ce d’autant plus que [Sachsen Zweirad] a constitué d’importantes sûretés pour les prêts de l’ensemble du groupe Biria. En raison de la hauteur des lignes de financement à court terme, il existe un risque de fluctuations du taux d’intérêt qui sont susceptibles de menacer la société dans son existence.

[…]

Les grosses dépenses dans le cadre du préfinancement du stock de marchandises et la croissance du groupe ont fortement entamé les liquidités de l’entreprise dont la situation continue à être tendue à tel point que son existence ne peut être assurée qu’à condition que les banques maintiennent les lignes de crédit actuellement octroyées, ou les restructurent et les élargissent eu égard à l’annulation de la caution de bonne fin du Bund/Länder.

[…] S’agissant de lignes de financement à court terme, il existe en outre un risque de fluctuations du taux d’intérêt qui sont susceptibles de menacer l’existence de l’entreprise […] »

151

Il ressort de cette citation que Sachsen Zweirad se trouvait dans une situation financière difficile et se restructurait. Le Tribunal considère que, notamment au vu de la hauteur des crédits à court terme soumis à des fluctuations du taux d’intérêt, la Commission était en droit de considérer la situation de liquidités décrite dans le rapport sur les comptes 2002 de Sachsen Zweirad comme un indice d’une situation financière difficile qui pourrait compromettre la capacité de survie de l’entreprise sans intervention étatique, car une entreprise en manque de liquidités ne pourra assurer le règlement de ses dettes à court ou moyen terme.

152

Par ailleurs, concernant l’argument selon lequel la Commission aurait dû prendre en compte le fait que la situation des liquidités tendue était causée par le financement de la croissance de Sachsen Zweirad et que ladite situation n’était donc pas nécessairement un indicateur de difficulté, il y a lieu de remarquer que le rapport sur les comptes 2002 de Sachsen Zweirad fait effectivement état d’un préfinancement du stock de marchandises et de la croissance du groupe. Il y a toutefois lieu de considérer que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en se fondant sur le ton très préoccupant dudit rapport sur ce point, car ce dernier a manifestement pris en compte le contexte de croissance, mais évoque néanmoins une situation qui continue à être tendue.

153

En outre, quant à l’argument du Freistaat Sachsen selon lequel la Commission aurait dû prendre en compte la situation conjoncturelle et l’existence de commandes fermes importantes à la fin de l’année 2002, la Commission a indiqué, en réponse à une question écrite du Tribunal, que ces informations n’avaient pas été communiquées pendant la procédure administrative, mais étaient mentionnées pour la première fois dans la requête. Interrogé sur ce point lors de l’audience, le Freistaat Sachsen n’a pas pu contredire ces affirmations ni indiquer par le biais de quels documents ces informations auraient été communiquées durant la procédure administrative, mais a seulement indiqué que l’affaiblissement de la conjoncture en 2002 était un problème connu de manière générale.

154

Dans ces circonstances, le Tribunal considère que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en n’ayant pas pris en compte ces facteurs pour conclure à l’existence d’une situation économique et financière précaire pour Sachsen Zweirad. Il ressort, en effet, de la jurisprudence citée au point 115 ci-dessus que les appréciations portées par la Commission ne doivent être examinées qu’en fonction des seuls éléments dont celle-ci disposait au moment où elle les a effectuées.

155

Concernant, enfin, la prétendue absence de prise en compte de la légère diminution des charges d’intérêts de 2 millions d’euros en 2001 à 1,8  million d’euros en 2002, la Commission a indiqué en réponse à une question écrite du Tribunal qu’il ressortait du considérant 68 de la décision attaquée qu’elle a tenu compte de cette circonstance, mais que, pour apprécier si une entreprise se trouve en difficulté, elle devait prendre en compte sa situation dans sa globalité. Même en tenant compte de la légère diminution des charges financières, la Commission est d’avis que Sachsen Zweirad était en difficulté en raison des pertes considérables passées et de ses problèmes de trésorerie.

156

À cet égard, le Tribunal constate que le considérant 68 de la décision attaquée fait effectivement état de la diminution des charges financières de 2001 à 2002. Au vu de l’analyse clairement négative de la situation de liquidités de Sachsen Zweirad telle qu’elle ressort du rapport sur les comptes 2002 de Sachsen Zweirad mentionné ci-dessus, le Tribunal considère que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant que ce facteur particulier n’était pas en mesure d’avoir une influence déterminante dans son appréciation globale de la situation de ladite entreprise au moment de l’octroi de la mesure 2.

157

En conclusion, le Freistaat Sachsen n’a pas démontré que la Commission avait commis une erreur manifeste d’appréciation en se fondant sur les facteurs précités pour conclure que Sachsen Zweirad était en difficulté en mars 2003.

Sur l’appréciation de la situation de Biria GmbH

— Arguments des parties

158

Le Freistaat Sachsen relève que la Commission constate, au considérant 72 de la décision attaquée, que Biria GmbH (nouvelle) aurait hérité des difficultés de Biria AG (ancienne) et de Sachsen Zweirad, mais soutient qu’une telle affirmation ne permet pas de tirer de conclusion concernant la question de savoir si l’entreprise restructurée se trouvait en difficulté. Sachsen Zweirad n’aurait pas été une entreprise en difficulté auparavant, de sorte que la reprise des valeurs d’actifs et du passif de Biria AG par Biria GmbH ne ferait pas forcément de cette dernière une entreprise en difficulté, comme le démontrerait clairement le fait que le total du bilan serait passé de 24 millions d’euros le 31 décembre 2002 à plus de 34 millions d’euros le 31 décembre 2003 alors que le passif n’aurait augmenté que de 4 millions, passant de 22 à 26 millions d’euros. Il faudrait se fonder exclusivement sur les ratios financiers de l’entreprise restructurée, qui démontreraient qu’elle ne se trouvait pas en difficulté.

159

Par ailleurs, la Commission invoquerait de graves problèmes de liquidités chez Biria GmbH, mais passerait sous silence le fait que ceux-ci n’ont pas entraîné l’insolvabilité de l’entreprise ni même de simples interruptions provisoires de paiement. Elle aurait également fait l’impasse sur le fait qu’il s’agit de problèmes que ladite entreprise a rencontrés dans le financement de sa croissance et non de difficultés de paiement résultant d’un rapport problématique entre recettes et dépenses.

160

Le Freistaat Sachsen estime aussi que la conclusion que la Commission tire, au considérant 77 de la décision attaquée, du retrait du consortium de banques, ne s’impose pas forcément. Le consortium de banques en cause aurait été dirigé par la banque D., qui n’aurait été créée qu’en 2001 par la fusion de deux autres banques et dont, selon la presse, l’orientation fait encore toujours l’objet de discussions. Ce serait d’ailleurs la raison pour laquelle la fusion, prévue depuis plusieurs années, avec la banque W. n’aurait toujours pas pu être menée à bien. À la demande du mandataire de la caution, la banque D. aurait expliqué que le consortium des banques s’était retiré en novembre 2003 pour des raisons stratégiques, ainsi que cela ressortirait d’une lettre fournie en annexe à la requête. Le Freistaat Sachsen soutient que cette explication n’est pas improbable lorsqu’elle est replacée dans le contexte de la discussion interne continue concernant la question de savoir si la banque D. doit ou non s’occuper de clients d’affaires à orientation nationale en concurrence avec les banques coopératives populaires et les caisses d’épargnes qui lui sont alliées. La valeur des créances aurait été corrigée dans le cadre d’une restructuration interne de la banque et le produit du prix de rachat pourrait être optimisé à l’aide d’un plan fiscal de manière à éviter toute, ou pratiquement toute, perte. Les deux autres banques se seraient associées au retrait de la banque D., parce qu’elles ne souhaiteraient ni l’une ni l’autre reprendre la direction du consortium, une décision qui ne serait pas inhabituelle non plus et ne pourrait être utilisée comme preuve d’un risque particulièrement élevé de défaillance. Rien ne permettrait dès lors de conclure que l’entreprise en cause devait être qualifiée d’entreprise en difficulté.

161

Selon le Freistaat Sachsen, il s’ensuit que, même si les entreprises ont incontestablement poursuivi une stratégie d’affaires qui comportait de nombreux risques et qu’elles étaient sous-capitalisées à cet effet, un examen approfondi des critères énumérés par la Commission aurait néanmoins dû l’amener à la conclusion que, au moment où la mesure 3 a été octroyée, lesdites entreprises n’étaient pas confrontées à des difficultés qui compromettaient la poursuite de leurs activités si l’État ne leur accordait pas d’aide. La société d’audit mandatée par le Freistaat Sachsen aurait notamment conclu pour les deux entreprises que le risque d’un appel à la garantie était à ce point réduit que l’octroi d’une garantie était défendable.

162

Enfin, le Freistaat Sachsen soutient qu’il y aurait lieu de rejeter l’argument de la Commission selon lequel l’origine de problèmes de liquidités est sans incidence sur le fait de savoir si une entreprise est à considérer comme une entreprise en difficulté. L’arrêt Corsica Ferries France/Commission, point 104 supra, invoqué par la Commission pour démontrer que la pratique d’une guerre tarifaire n’est absolument pas incompatible avec l’existence de difficultés, ne serait pas transposable au cas d’espèce, car des problèmes de liquidités ne sauraient être assimilés à des pertes. Ce serait précisément dans le cadre du financement de la croissance que des problèmes de liquidités apparaissent régulièrement, car la constitution du capital fixe et du capital d’exploitation doit être financée, mais cette constitution ne se traduirait pas par des pertes. Une situation de liquidités tendue ne signifierait donc pas qu’une entreprise doit être considérée comme étant en difficulté.

163

La Commission conteste les arguments du Freistaat Sachsen.

— Appréciation du Tribunal

164

En ce qui concerne la mesure 3 et la situation de Biria GmbH au moment de l’octroi de ladite mesure en décembre 2003, la décision attaquée indique ce qui suit:

« (70)

Biria GmbH (devenue Biria AG) a été créée par la fusion de l’ancienne Biria AG avec sa filiale [Sachsen Zweirad], qui a pris effet le 1 er  octobre 2003 .

(71)

Selon [la République fédérale d’Allemagne], il faut clairement faire la distinction entre Biria GmbH (devenue Biria AG) et l’ancienne Biria AG et [Sachsen Zweirad], car la fusion a donné naissance à une nouvelle entreprise. La question est donc de savoir si cette entreprise était en difficulté au moment de l’octroi de la garantie, à savoir le 9 décembre [2003], en se référant au bilan d’ouverture de la nouvelle entreprise née de la fusion. L’Allemagne déduit de ce bilan que Biria GmbH ne peut être considérée comme une entreprise en difficulté.

(72)

La Commission réfute cette argumentation. La nouvelle entreprise née de la fusion, Biria GmbH, ne peut être distinguée de l’ancienne Biria AG et de [Sachsen Zweirad], précisément parce qu’elle est le produit de leur fusion. Autrement, on pourrait facilement éviter qu’une entreprise soit considérée comme étant en difficulté en fusionnant des unités économiques ou en créant de nouvelles entreprises. L’ancienne Biria AG a également enregistré des pertes en 2002 et connaissait aussi des problèmes de liquidités, comme [Sachsen Zweirad]. Biria GmbH a pris à son compte toutes les dettes et tous les engagements de l’ancienne Biria AG et de [Sachsen Zweirad] et possède les mêmes éléments d’actifs et mène les mêmes activités qu’elles. La Commission estime par conséquent que Biria GmbH a hérité des difficultés de l’ancienne Biria AG et de [Sachsen Zweirad].

(73)

D’après [la République fédérale d’Allemagne], [Sachsen Zweirad] était la plus robuste économiquement au moment de la fusion et n’était pas en difficulté. On ne peut donc pas en déduire automatiquement que la nouvelle Biria AG ait été en difficulté. Contrairement à l’Allemagne, la Commission estime que [Sachsen Zweirad] se trouvait bel et bien en difficulté et que la nouvelle Biria GmbH a ‘ hérité ’ de ses difficultés.

(74)

D’après son rapport d’activité de 2003, le groupe Biria a poursuivi la restructuration et la réorganisation entamée en 2002 et, à cette occasion, a réorganisé son financement. Sur la base de la garantie accordée par le Land de Saxe pour le prêt de 24,875  millions [d’euros], le groupe Biria a imaginé une nouvelle stratégie de financement à moyen terme de ses activités, qui prévoyait un réajustement important des taux d’intérêt et une diminution de la charge d’intérêts.

(75)

Parallèlement, le pool bancaire a été réorganisé: trois banques se sont dites prêtes à renoncer à des créances d’un montant de 8567000  euros — qui paraît nettement supérieur à 50% de leurs créances — en échange de la récupération immédiate du reste des créances. Par conséquent, le crédit, dont 80% est couvert par la garantie de la mesure 3, comprend un prêt remboursable de 8 millions [d’euros], un crédit sur compte courant de 7,45  millions [d’euros] et un montant de 9,425  millions [d’euros] pour les besoins financiers saisonniers.

(76)

Biria GmbH (devenue Biria AG) avait donc de graves problèmes de liquidités au moment de l’octroi de la garantie et était par conséquent en difficulté, un constat étayé par le fait que trois banques se sont retirées du financement de ses activités et se sont même déclarées prêtes à renoncer à une grande partie de leurs créances si le reste de celles-ci leur était remboursé sans délai. Cette situation démontre que les banques doutaient fortement de la capacité de Biria de rembourser ses dettes et de sa rentabilité.

(77)

[La République fédérale d’Allemagne] affirme quant à elle que les banques ne se sont retirées du financement qu’en raison d’une réorientation de leur stratégie. La Commission constate qu’elles ont renoncé vraisemblablement à environ 50% de leurs créances, ce qui, même si cette démarche résulte d’une réorientation stratégique, laisse supposer qu’elles considéraient le recouvrement de l’intégralité du prêt comme très improbable. »

165

Il ressort de ce passage de la décision attaquée que la Commission a fondé sa conclusion selon laquelle Biria GmbH était en difficulté en décembre 2003 sur les facteurs suivants: premièrement, le fait qu’elle ait hérité des difficultés financières de ses deux sociétés constituantes, deuxièmement, de graves problèmes de liquidités au moment de l’octroi de la mesure 3 et, troisièmement, le retrait de trois banques et leur renonciation, à cette occasion, à une grande partie de leurs créances.

166

Tout d’abord, concernant l’ « héritage » de Biria GmbH, le Freistaat Sachsen conteste que Sachsen Zweirad se trouvait en difficulté. Il découle toutefois de l’analyse qui précède (voir les points 144 à 157 ci-dessus) qu’il n’a pas été démontré que la Commission aurait commis des erreurs manifestes d’appréciation en concluant le contraire. De plus, il ressort du considérant 72 de la décision attaquée que l’ancienne Biria AG avait également enregistré des pertes en 2002 et connaissait aussi des problèmes de liquidités, sans que cela soit contesté par le Freistaat Sachsen.

167

Ce dernier fait toutefois valoir que la Commission aurait dû se fonder exclusivement sur le bilan de la nouvelle société Biria GmbH et analyser ses ratios financiers au lieu de faire des déductions abstraites selon lesquelles la combinaison de deux sociétés en difficulté mène automatiquement à une nouvelle entreprise également en difficulté.

168

À cet égard, le Tribunal considère que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en prenant en compte, outre des facteurs liés à la situation économique et financière de la nouvelle société Biria GmbH, également la situation des deux entreprises fusionnées en elle. En effet, comme indiqué au considérant 72 de la décision attaquée et comme l’a fait remarquer la Commission devant le Tribunal, il ne saurait être permis que des sociétés échappent à une obligation de notification et à la présentation d’un plan de restructuration par le simple biais d’une fusion d’unités économiques ou par la création de nouvelles entreprises.

169

Par ailleurs, concernant d’abord les références faites par le Freistaat Sachsen à certaines données financières pour l’exercice 2003, notamment au total du bilan et au résultat d’exploitation de Biria GmbH au 31 décembre 2003 , il y a lieu de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 120 ci-dessus que la question de savoir si une mesure constitue une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE doit être résolue à la lumière de la situation existant au moment où cette mesure a été prise. Il ne saurait donc être reproché à la Commission de ne pas avoir tenu compte de données relatives à la situation de la société en cause au 31 décembre 2003 , cette date étant postérieure à la date d’octroi de l’aide. En effet, ainsi que l’indique la Commission, ces données n’étaient pas disponibles au moment de l’octroi de l’aide. La Commission était donc en droit de se référer à cet égard aux données de l’exercice 2002. Il s’ensuit que les arguments présentés par le Freistaat Sachsen concernant notamment le bilan au 31 décembre 2003 et le résultat de l’exploitation habituelle positif de Biria GmbH pour l’exercice 2003 sont inopérants.

170

Concernant ensuite l’argument du Freistaat Sachsen selon lequel, abstraction faite du bilan de la nouvelle société au 31 décembre 2003 et du résultat d’exploitation pour l’exercice 2003, il aurait dû être tenu compte des résultats intermédiaires ainsi que du bilan provisoire en date du 31 mai 2003 , la Commission relève à juste titre qu’il ne peut pas être déterminé dans quelle mesure le développement positif du résultat d’exploitation au cours de l’année 2003 a pu bénéficier de l’octroi de la mesure 2 à Sachsen Zweirad en mars 2003, société qui a été fusionnée dans Biria GmbH. Dans ces circonstances, les quelques références abstraites faites par le Freistaat Sachsen aux résultats intermédiaires de l’année 2003 ne suffisent pas pour établir que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en ne fondant pas son analyse de la situation financière de Biria GmbH sur lesdits résultats intermédiaires.

171

Par ailleurs, concernant la situation des liquidités réduites de Biria GmbH, la Commission fait référence au rapport d’audit relatif aux comptes annuels arrêtés au 31 décembre 2002 et au rapport de gestion de l’exercice 2002 de cette société qui indique ce qui suit:

« Les problèmes de liquidités de l’entreprise se sont encore accentués en 2002 et la situation continue à être tendue, à un tel point que la survie de Biria AG ne peut être assurée qu’à la condition que les banques maintiennent les lignes de crédit actuelles, ou qu’elles les restructurent et les élargissent eu égard à l’annulation des cautions de bonne fin du Bund/Länder […]

Du point de vue comptable, la société est surendettée. La direction commerciale estime cependant qu’une situation de surendettement au sens du droit régissant l’insolvabilité n’existe pas, étant donné que le capital négatif au bilan est compensé par des réserves tacites de la participation à [Sachsen Zweirad], par une déclaration de subordination de l’associé et par un good-will de Biria AG. »

172

À cet égard, il a déjà été conclu qu’une situation de liquidités tendue peut constituer un indicateur pertinent d’une situation de difficulté au sens des lignes directrices de 1999. Il y a d’ailleurs lieu de noter à cet égard que la Commission relève, sans être contestée par le Freistaat Sachsen, que les crédits couverts par la mesure 3 n’étaient pas destinés à l’investissement, mais qu’il s’agissait, notamment, d’un crédit sur compte courant et d’un autre pour des besoins financiers saisonniers, ce qui ressort également du considérant 75 de la décision attaquée. L’argument du Freistaat Sachsen selon lequel la situation des liquidités n’aurait pas entraîné l’insolvabilité est donc dénué de pertinence, car les lignes directrices acceptent une situation de difficulté en dehors de ce contexte juridique précis. Quant aux arguments du Freistaat Sachsen tirés du fait que la situation des liquidités de Biria GmbH aurait dû être mise en rapport avec un contexte de croissance de la société, le Tribunal estime que cette circonstance ne suffit pas à elle seule pour permettre à la Commission de ne pas prendre en compte les difficultés de liquidités d’une société, mais qu’il s’agit d’une appréciation globale de sa situation.

173

Enfin, quant au retrait des banques, il y a lieu de relever que la lettre de la banque D. en annexe à la requête dans l’affaire T-102/07 ne constitue pas une preuve concluante de ce que l’arrangement en cause était entièrement dû à des considérations de stratégie interne des banques. En effet, même si ladite lettre indique que des raisons stratégiques ont été à la base du début de la négociation d’une restructuration des crédits en février 2003, elle ne remet pas en cause l’analyse dans la décision attaquée selon laquelle la renonciation à 50% des crédits en échange d’un remboursement du reste sans délai a un caractère extraordinaire. La Commission n’a donc pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en interprétant le retrait et la renonciation des banques comme un indice d’un manque de confiance en les capacités de Biria GmbH de rembourser la totalité de ses prêts.

174

Il résulte de ce qui précède qu’il ne ressort d’aucun des arguments du Freistaat Sachsen que la Commission aurait commis des erreurs manifestes d’appréciation en concluant que Biria GmbH était également une entreprise en difficulté à l’époque des faits.

175

Par conséquent, il y a lieu de rejeter tous les griefs des requérants ayant trait à des prétendues erreurs manifestes d’appréciation dans la caractérisation des entreprises bénéficiaires comme étant des entreprises en difficulté.

3. Sur les griefs tirés des défauts de motivation

176

D’une part, les arguments des requérants concernent l’insuffisance de la motivation de la décision attaquée en ce que la Commission n’indique pas la raison pour laquelle il n’y est pas fait application de la définition de la notion d’entreprise en difficulté de la mesure utile E 16/94 et n’explique pas non plus la raison pour laquelle elle s’est écartée de la définition de ladite notion dans les lignes directrices de 1999. D’autre part, les requérants soutiennent que la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation concernant la détermination des éléments d’aide s’agissant des mesures 1 à 3.

Sur le défaut de motivation concernant la non-application de la mesure utile E 16/94 et l’écart pris par rapport aux lignes directrices de 1999

Arguments des parties

177

Le Freistaat Sachsen soutient que, s’il fallait considérer que les entreprises concernées étaient des entreprises en difficulté conformément aux critères prévus par le régime d’aides approuvé, la Commission n’a pas exprimé les motifs d’une telle décision. Elle n’aurait d’ailleurs pas davantage exposé les raisons pour lesquelles elle s’est écartée des critères fixés dans le régime d’aides approuvé. Par ailleurs, selon lui, la Commission n’explique pas dans la décision attaquée la raison pour laquelle elle n’applique pas les critères du paragraphe 5 des lignes directrices de 1999 là où elle douterait fréquemment, dans d’autres procédures, du fait qu’une entreprise concernée puisse se trouver en difficulté lorsque ces critères ne sont pas réunis. Étant donné le fait que le paragraphe 5 des lignes directrices de 1999 contient une règle générale et leur paragraphe 6 une exception, la Commission aurait dû motiver la non-application dudit paragraphe 5.

178

MB Immobilien et MB System soutiennent que, en ce qui concerne l’application des lignes directrices de 1999, la décision attaquée est entachée d’un triple défaut de motivation. Premièrement, elle n’indiquerait pas les raisons pour lesquelles elle s’est écartée de l’examen des critères des lignes directrices de 1999. Deuxièmement, dans l’hypothèse où ce serait sur le fondement de la délimitation entre entreprises saines et entreprises en difficulté, que la Commission aurait elle-même fixée, qu’elle serait arrivée à la conclusion que les bénéficiaires des aides devaient être qualifiées d’entreprises en difficulté, rien n’aurait été indiqué dans la décision attaquée à ce sujet. Troisièmement, la Commission aurait dû motiver la raison pour laquelle elle s’est écartée des conditions du régime d’aides approuvé en ce qui concerne les mesures 2 et 3.

179

La Commission conteste les arguments des requérants.

Appréciation du Tribunal

180

Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la portée de l’obligation de motivation dépend de la nature de l’acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté. La motivation doit faire apparaître de manière claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, de façon, d’une part, à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de pouvoir défendre leurs droits et de vérifier si la décision est ou non bien fondée et, d’autre part, à permettre au juge d’exercer son contrôle de légalité. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 253 CE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, la Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés, mais il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (voir arrêt Corsica Ferries France/Commission, point 104 supra, points 62 à 64, et la jurisprudence citée).

181

En l’espèce, il ne ressort pas de la décision attaquée que la République fédérale d’Allemagne se soit référée à la mesure utile E 16/94 dans le cadre de la procédure administrative. La Commission a confirmé devant le Tribunal que la mesure utile E 16/94 n’avait pas été invoquée durant la procédure administrative sans être contestée sur ce point par les requérants. Par ailleurs, il ressort de l’analyse qui précède que la définition de la notion d’entreprise en difficulté de la mesure utile E 16/94 n’était pas applicable en l’espèce et que la Commission était en droit de se fonder sur les lignes directrices de 1999 à cet égard. Dans ces circonstances, les griefs tirés d’un défaut de motivation de la décision attaquée quant à la non-application de la mesure utile E 16/94 doivent être déclarés non fondés, car il ne saurait être retenu que la Commission doive expliquer la raison pour laquelle elle ne s’est pas fondée sur des règles non applicables et non invoquées.

182

Il y a également lieu de rejeter comme non fondés les griefs tirés d’un défaut de motivation par rapport à la prise en compte ou l’absence de prise en compte de critères des lignes directrices de 1999. En effet, la Commission indique au considérant 66 de la décision attaquée qu’elle est d’avis que « les symptômes caractéristiques des difficultés d’une entreprise, décrits au [paragraphe] 6 des lignes directrices [de 1999], servent uniquement de points de référence pour déterminer quand une entreprise doit être considérée comme étant en difficulté et ne sont pas des critères à respecter stricto sensu dans leur intégralité » . Sa position à cet égard est donc claire. Pour le reste, ainsi que cela ressort de l’analyse qui précède, la décision attaquée indique quels sont les critères économiques que la Commission a pris en compte pour apprécier la situation financière des entreprises bénéficiaires en cause. Cette motivation est suffisante pour permettre aux parties de connaître les justifications de la décision attaquée et pour le Tribunal de juger de sa légalité.

Sur le défaut de motivation en ce qui concerne la détermination de l’élément d’aide

Arguments des parties

183

Le Freistaat Sachsen indique qu’il ne comprend pas la manière dont la Commission a calculé le taux d’intérêt auquel, selon elle, les crédits auraient dû être consentis pour être conformes aux conditions du marché et ainsi pouvoir être considérés comme exempts d’aide. La Commission se serait contentée de renvoyer à sa communication 97/C 273/03 concernant la méthode de fixation des taux de référence et d’actualisation ( JO 1997, C 273, p. 3 , ci-après la « communication sur les taux de référence » ). Or, un simple renvoi à une communication antérieure ne suffirait pas à démontrer qu’un supplément de 400 points de base est habituel sur le marché. Il affirme ne pas comprendre non plus la raison pour laquelle la Commission applique, en ce qui concerne les mesures 2 et 3, deux majorations (considérant 93 de la décision attaquée). Les deux exemples énoncés dans la communication sur les taux de référence (entreprise en difficulté et absence de sûretés) auraient trait au risque de défaillance, de sorte qu’un cumul ne semblerait pas justifié.

184

La Commission n’aurait en tout état de cause établi aucun rapport intelligible avec les conditions usuelles du marché. Il semblerait d’ailleurs peu probable que le marché réagisse à l’absence alléguée de sûretés au moyen de majorations fixes des taux d’intérêts totalement disproportionnées par rapport au niveau des taux en vigueur. Il conviendrait d’envisager que le secteur du crédit appliquerait une majoration relativement faible lorsque le taux d’intérêt est faible et une majoration relativement élevée lorsque le taux d’intérêt l’est aussi.

185

Le Freistaat Sachsen estime encore que, au considérant 92 de la décision attaquée, la Commission présume que les sûretés accordées n’avaient guère de valeur économique, mais n’en a apporté aucune preuve. Or, il ressortirait des bilans annuels de l’exercice 2003 que les crédits consentis par les banques ne seraient pas seulement garantis au moyen d’hypothèques, mais également par la cession d’équipements et du fond de roulement, lesquels seraient inscrits au bilan pour des valeurs respectives de 5,8  millions d’euros et de 28,3  millions d’euros. La Commission n’aurait donc pas pu se fonder sur une valeur économique négligeable des sûretés en tant que point de départ, ou aurait dû, à tout le moins, s’en expliquer.

186

Enfin, le Freistaat Sachsen fait valoir, par rapport à la référence faite par la Commission au cours de la procédure devant le Tribunal à une étude d’un cabinet d’audit du 26 octobre 2004 concernant la mise à jour des taux de référence appliqués aux aides d’État dans l’Union européenne (ci-après l’ « étude » ), que ladite étude ne figure pas dans le dossier et n’est pas non plus invoquée dans la décision attaquée, les exigences de motivation de cette dernière n’étant donc pas respectées sur ce point. En amont de la décision attaquée, la Commission n’aurait d’ailleurs pas non plus rédigé de communication de laquelle il ressortirait qu’elle fait sienne les conclusions de l’étude dans l’optique de décisions futures.

187

MB Immobilien et MB System soutiennent, en ce qui concerne la mesure 1, que la Commission ne justifie pas en quoi la rémunération d’un apport tacite qui est déjà supérieure de 600 points de base au taux de référence applicable à l’époque ne tiendrait pas compte des risques accrus liés à une entreprise en difficulté. La Commission aurait d’ailleurs renvoyé à la communication sur les taux de référence, parce qu’elle n’aurait pas constaté les conditions du marché.

188

Elle ne motiverait pas de manière concluante la manière d’évaluer les éléments constituant une aide dans la mesure 1, mais rechercherait l’élément d’aide dans la différence entre la rémunération qu’aurait dû payer Bike Systems sur le marché et celle effectivement payée. Pour déterminer le montant des intérêts, une simple référence à la communication sur les taux de référence et la réitération d’une supposition — entreprise en difficulté — ne pourraient remplacer la motivation nécessaire. Cela s’appliquerait non seulement sur le fond, mais avant tout en ce qui concerne le montant de l’aide, d’autant plus que, en ce qui concerne le nombre de points de base, la Commission se serait accordé dans la communication sur les taux de référence une marge de manœuvre.

189

Il serait arbitraire d’appliquer aux différents risques 400 points de base et de les additionner sans motiver cette décision ni sur le fond ni au regard du montant. En effet, il ne résulterait pas du libellé de la communication sur les taux de référence que la Commission se serait réservé le droit, en présence de plusieurs risques, d’appliquer pour chacun d’eux une majoration de 400 points de base. Pour cette raison en particulier, il aurait été nécessaire que la Commission motive plus amplement la majoration de 1000 points de base qu’elle avait fixée, et ce tant sur le fond qu’au regard du montant.

190

En ce qui concerne l’allégation selon laquelle la mesure 1 aurait constitué un prêt particulièrement risqué, MB Immobilien et MB System font valoir que le cumul de différents risques que la Commission en déduit ne concerne en réalité que le même risque, à savoir celui de défaillance. Cela apparaîtrait de manière particulièrement nette dans le contexte suivant. Lorsqu’une entreprise a offert suffisamment de sûretés, il importerait peu que le prêt ait un rang prioritaire ou non. Rien de moins ne pourrait s’appliquer lorsque les sûretés prétendument insuffisantes ont elles-mêmes déjà fait l’objet d’une majoration. Or, la Commission entendrait dans ce cas majorer de 400 et de 200 points, donc d’un total de 600 points de base, la même situation de fait, à savoir l’insuffisance des sûretés. Cette manière de procéder serait totalement contradictoire.

191

MB Immobilien et MB System précisent encore que ni la communication sur les taux de référence ni la décision attaquée n’apportent de justification sur le point de savoir quels risques doivent être pris en compte par une prime de 400 points de base et pour quelle raison il s’agit de 400 points de base.

192

Par ailleurs, quant aux différentes sûretés, bien que la Commission tente de décrire le risque concret, le rapport en termes de valeur entre, d’une part, les sûretés citées et, d’autre part, leur évaluation en points de base resterait inconnu.

193

En outre, dans la décision attaquée, la Commission aurait omis, lors de l’examen des risques, d’apprécier des aspects autres que les sûretés données, par exemple les capacités de l’entreprise et sa position sur le marché. Une analyse des risques qui se limite aux sûretés et ignore de plus amples facteurs économiques ne répondrait pas à l’obligation de prudence et d’exhaustivité.

194

De plus, la Commission aurait omis de porter une appréciation sur la lettre de confort (voir le point 90 ci-dessus). Si elle avait procédé à cette appréciation, elle n’aurait pas pu supposer que le risque était accru.

195

Quant à la mesure 2, MB Immobilien et MB System soutiennent que la décision attaquée est également entachée d’un grave défaut de motivation en ce qui concerne la détermination des éléments constituant une aide et de leur valeur. Aux considérants 88 à 91 de la décision attaquée, la Commission renverrait à nouveau à la communication sur les taux de référence sans pour autant donner les raisons pour lesquelles elle estime justifié d’appliquer une prime de 400 points de base en raison de la qualification en tant qu’entreprise en difficulté et une prime de 400 points de base au motif que les sûretés sont insuffisantes. Pour les mêmes raisons que celles évoquées pour la mesure 1, le simple renvoi à la communication sur les taux de référence ne suffirait pas.

196

Par ailleurs, dans la mesure où la Commission s’appuie sur les pertes de Sachsen Zweirad pour décider qu’il s’agit d’une entreprise en difficulté et qu’il y a des risques particuliers dont il faut tenir compte par une majoration, il conviendrait de retenir que ces pertes ne sont pas déterminantes. La Commission n’aurait pas examiné à suffisance le contrat de cession des bénéfices et les modalités de compensation des liquidités au sein du groupe (cash pool) convenus entre Sachsen Zweirad et sa société mère. Elle aurait tout au plus pu examiner si la société mère était en difficulté. La majoration de 400 points de base serait donc illégale.

197

Concernant ensuite la mesure 3, MB Immobilien et MB System estiment que la décision attaquée est également entachée d’un grave défaut de motivation au regard des éléments constituant une aide (considérant 93 de la décision attaquée). La Commission déterminerait l’élément constituant une aide en fonction de la différence entre le taux d’intérêt concrètement appliqué et le taux d’intérêt majoré de 700 points de base fixé par elle et il ne serait pas possible de comprendre la raison pour laquelle, d’une part, elle a décidé de procéder à une majoration de précisément 400 points de base du fait qu’il s’agit d’une entreprise en difficulté et non d’un autre chiffre, ni, d’autre part, elle applique une autre majoration de 300 points de base au motif que les sûretés sont insuffisantes. Certes, la Commission admettrait que les sûretés données ont une certaine valeur économique, mais ne justifierait pas en quoi cela aboutit à appliquer une majoration de 100 et non de 200 points de base sur les 400 points dont elle a apparemment tenu compte. Il ne serait pas possible de comprendre pour quels motifs la Commission estime ensuite qu’une majoration de 300 points de base est justifiée, ne serait-ce que parce que, selon la communication sur les taux de référence, en cas de risques spéciaux, il conviendrait d’appliquer une majoration de 400 points de base.

198

Concernant la référence faite par la Commission à l’étude, MB Immobilien et MB System partagent les critiques du Freistaat Sachsen.

199

La Commission rappelle que la communication sur les taux de référence prévoit un taux de référence uniforme calculé sur la base du taux dit « swap interbancaire à cinq ans » . Dans des situations de risque particulier (par exemple, une entreprise en difficulté, l’absence des sûretés normalement exigées par les banques), la méthode prévoirait une majoration du taux de référence de 400 points de base, voire davantage.

200

Concernant tout d’abord la mesure 1, pour déterminer le taux normal du marché, la Commission aurait utilisé, dans la décision attaquée, trois majorations, qui ne s’appliqueraient toutefois nullement au même risque, mais à trois risques distincts dans le calcul. Le premier risque couvert aurait eu trait à la circonstance selon laquelle Bike Systems se trouvait en difficulté. La probabilité que l’entreprise ne soit pas en mesure de rembourser la mesure 1 ou de verser la rémunération convenue pour celle-ci s’en serait donc trouvée accrue. La situation économique du bénéficiaire de l’aide aurait été analysée en profondeur. Ne serait-ce que pour cette raison, l’argument selon lequel la Commission n’aurait apprécié que les sûretés accordées devrait être rejeté. Le deuxième risque aurait concerné le manque de sûretés, qui aurait encore accru le risque de défaillance en cas d’insolvabilité. Le troisième risque aurait été constitué par le fait que la mesure 1 était subordonnée à d’autres prêts en cas d’insolvabilité, d’où une augmentation supplémentaire du risque de défaillance. Il s’agirait, en l’occurrence, d’un risque distinct. Les trois risques seraient décrits avec précision et motivés dans la décision attaquée.

201

L’argument selon lequel tous ces risques ne concernent, en définitive, que le risque de défaillance et ne doivent donc pas être envisagés de manière cumulée serait dénué de pertinence, car il reviendrait à considérer que, en toute hypothèse, dès qu’une entreprise a constitué des sûretés suffisantes, la question de savoir si un prêt est ou non subordonné ne serait pas déterminante. Or, il s’agirait en l’espèce d’une entreprise qui n’a pas constitué de sûretés suffisantes et il serait donc parfaitement déterminant de savoir si le prêt est subordonné ou non. Il serait, par ailleurs, tout à fait possible d’envisager qu’une entreprise puisse être en difficulté, mais dispose néanmoins d’importantes sûretés permettant de couvrir le crédit ou la garantie. Le taux d’intérêt à considérer comme conforme au marché qui est appliqué à un crédit pour une telle entreprise serait alors inférieur à celui se rapportant à un crédit pour une entreprise en difficulté n’offrant pas de sûretés comparables.

202

C’est à une conclusion similaire que parviendrait l’étude qui serait consacrée, notamment, à la fixation de majorations appropriées du taux plancher dans certaines situations. Elle appliquerait deux critères pour une telle majoration, à savoir la notation de l’entreprise et les sûretés offertes par cette entreprise, cumulant ainsi les deux risques. L’étude proposerait, par exemple, d’appliquer à une entreprise de la catégorie C qui, en dépit de ses difficultés, offre de bonnes sûretés, une majoration de 360 points de base (soit 3,6 points de pourcentage). En revanche, l’étude considérerait que la majoration appropriée pour une entreprise de la même catégorie, mais n’offrant que peu de sûretés, est de 1650 points de base (soit 16,50 points de pourcentage). La majoration en cause en l’espèce ne serait donc nullement appliquée trois fois pour le même risque. Par ailleurs, la référence faite par la Commission à l’étude dans le mémoire en défense aurait pour unique but d’attester que le résultat obtenu et motivé en ce qui concerne le montant de l’élément d’aide représentait bien la réalité économique, mais n’était en aucun cas conçue comme une motivation supplémentaire, qui aurait d’ailleurs été superflue.

203

Quant à la question du caractère approprié des majorations fixées au total à 1000 points de base, la Commission tient à souligner que, dans la communication sur les taux de référence, elle considère qu’une majoration de 400 points de base constitue un minimum. La majoration effectivement appliquée pourrait parfaitement être supérieure à 400 points de base. Le caractère approprié des majorations serait corroboré par l’étude qui jugerait approprié, dans le cas d’une entreprise de catégorie C, c’est-à-dire en situation économique défavorable, d’appliquer une majoration de 1000 points de base lorsque les sûretés offertes sont normales, voire de 1650 points si les sûretés disponibles sont faibles. La majoration de 1000 points de base appliquée par la Commission devrait donc être considérée plutôt comme trop faible que comme trop élevée.

204

Concernant, enfin, la prétendue absence de prise en compte de la lettre de confort, la Commission se borne à indiquer que ladite lettre n’a pas été produite utilement pendant la procédure formelle d’examen, de sorte qu’elle n’a pas pu l’examiner de manière plus approfondie et, le cas échéant, l’intégrer davantage dans son analyse.

205

Ensuite, concernant la mesure 2, le grief selon lequel la Commission aurait insuffisamment motivé la majoration totale de 800 points de base par rapport au taux de référence devrait être rejeté par référence aux considérants 88 à 91 de la décision attaquée. Une analyse séparée des différents risques aurait été nécessaire pour déterminer l’écart exact entre les intérêts qui auraient été dus aux conditions du marché en l’absence de la mesure 2 et les intérêts effectivement versés. La majoration qu’elle a appliquée demeurerait inférieure à celle préconisée dans des situations analogues par l’étude.

206

Au grief selon lequel la Commission aurait insuffisamment tenu compte du contrat de cession de bénéfices et des modalités de compensation des liquidités au sein du groupe, il y aurait lieu de répondre de nouveau qu’elle adopte sa décision sur la base des données qui sont à sa disposition lorsqu’elle clôt la procédure formelle d’examen. Pendant la procédure administrative, la République fédérale d’Allemagne n’aurait cependant pas invoqué ledit « cash pool » .

207

Enfin, concernant la mesure 3, la Commission renvoie à ses observations relatives au calcul de l’élément d’aide des mesures 1 et 2.

208

En réponse au grief de MB Immobilien et de MB System relatif au montant de la majoration de 300 points de base pour insuffisance de sûretés, la Commission relève qu’elle a énuméré et examiné dans la décision attaquée chacune des sûretés constituées pour la garantie (dettes hypothécaires, cession de créances, transfert de sûretés des marchandises que les entreprises du groupe avaient en leur possession et une caution solidaire du propriétaire de Biria GmbH). Or, après les avoir examinées, elle serait parvenue à la conclusion que les sûretés de Biria GmbH étaient de meilleure qualité que celles de Sachsen Zweirad, raison pour laquelle elle n’aurait appliqué qu’une majoration de 300 points de base pour insuffisance de sûretés (contre 400 points de base dans le cas de la mesure 2).

Appréciation du Tribunal

209

La portée de l’examen par le Tribunal de la légalité de la décision attaquée s’agissant de l’obligation de motivation a été rappelée au point 180 ci-dessus.

210

Il y a également lieu de relever, à titre liminaire, que l’argument des requérants confond les questions de motivation formelle et l’appréciation quant au fond. À cet égard, il y a lieu de rappeler la jurisprudence selon laquelle l’obligation de motivation constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé de la motivation, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. Les griefs et arguments visant à contester le bien-fondé de cet acte sont dès lors inopérants dans le cadre d’un moyen tiré du défaut ou de l’insuffisance de la motivation (arrêt Olympiaki Aeroporia Ypiresies/Commission, point 143 supra, point 79).

211

À la lumière de cette jurisprudence, il y a lieu d’examiner si la Commission a motivé à suffisance de droit la façon dont elle a calculé les éléments d’aide.

212

Concernant, tout d’abord, l’argument de MB Immobilien et de MB System selon lequel la communication sur les taux de référence n’apporte aucune justification de la majoration de 400 points de base qu’elle propose pour la prime de risque, il y a lieu de relever que celle-ci se limite effectivement à stipuler que le taux de référence est un taux plancher « qui peut être augmenté dans des situations de risque particulier (par exemple: entreprise en difficulté, absence des sûretés normalement exigées par les banques, etc.) » et que, dans de tels cas, « la prime pourra atteindre 400 points de base et même davantage si aucune banque privée n’aurait accepté d’accorder le prêt en question » . Il y a donc lieu de constater que le contenu de la communication sur les taux de référence sur ce point est peu développé et ne saurait en aucun cas suffire à lui seul comme motivation d’un calcul de prime de risque dans un cas d’espèce. Il y a donc lieu d’examiner la façon dont la Commission a expliqué son application dans la décision attaquée.

213

Quant à la détermination des éléments d’aide en l’espèce, et notamment du niveau de la prime de risque, la Commission indique au considérant 86 de la décision attaquée, pour la mesure 1, après un rappel des principes énoncés dans la communication sur les taux de référence et de la situation de difficulté financière de Bike Systems, ce qui suit:

« […] la Commission estime en l’espèce que Bike Systems aurait dû verser un intérêt correspondant au moins au taux de référence majoré d’une prime de 400 points de base, car c’était une entreprise en difficulté, ainsi qu’une prime supplémentaire de 400 points de base en raison de l’absence de sûretés, de même qu’un supplément de 200 points de base parce que la participation tacite prend rang derrière les autres créances en cas d’insolvabilité. Cet avis est conforme à la [communication sur les taux de référence], qui prévoit qu’en cas de situations de risque particulier, par exemple si l’entreprise est en difficulté ou s’il n’existe pas de sûretés normalement exigées par les banques, la prime peut atteindre 400 points de base, voire davantage. L’élément d’aide correspond par conséquent à la différence entre le taux de référence majoré de 1000 points de base et la rémunération effective de la participation tacite. »

214

Concernant les mesures 2 et 3, la Commission indique, aux considérants 90 à 93 de la décision attaquée, ce qui suit:

« (90)

[… Sachsen Zweirad] et Biria GmbH étaient en difficulté au moment de l’octroi des garanties. Le prêt et la garantie accordés à [Sachsen Zweirad] ont entraîné un risque supplémentaire en raison des faibles sûretés dont ils étaient assortis. La garantie du prêt dont a bénéficié [Sachsen Zweirad] n’était assortie que d’une caution solidaire, dont la valeur économique est d’ordinaire très faible.

(91)

Par conséquent, la Commission est d’avis que, sans la garantie, [Sachsen Zweirad] aurait dû verser un intérêt correspondant au moins au taux de référence majoré d’une prime de 400 points de base, car c’était une entreprise en difficulté, et d’une prime supplémentaire de 400 points de base en raison du caractère très insignifiant des sûretés. L’élément d’aide de la garantie correspond à la différence entre le taux de référence majoré de 800 points de base et le taux effectif appliqué au prêt garanti.

(92)

En ce qui concerne le prêt et la garantie accordés à Biria GmbH, les sûretés accordées avaient une valeur économique plus élevée que pour la garantie accordée à [Sachsen Zweirad], mais néanmoins plus faible que les sûretés exigées habituellement. La garantie accordée à Biria GmbH repose sur une dette hypothécaire de premier rang sur le patrimoine de Bike Systems, d’un montant de 15 millions [d’euros]. Cette dette prend toutefois rang derrière un autre prêt de 2 millions [d’euros]. Par conséquent, cette dette hypothécaire prioritaire ne couvrait qu’à peine plus de 50% de la totalité du prêt. Les autres sûretés avaient une valeur économique faible: dettes hypothécaires, cession de créances, transfert de sûretés des marchandises que les entreprises du groupe avaient en leur possession et une caution solidaire du propriétaire de Biria GmbH.

(93)

La Commission estime par conséquent qu’en l’espèce Biria GmbH aurait dû verser un intérêt correspondant au moins au taux de référence majoré d’une prime de 400 points de base, car c’était une entreprise en difficulté, et d’une prime supplémentaire de 300 points de base en raison du caractère insignifiant des sûretés (comparée à une prime de 400 points de base pour la garantie accordée à [Sachsen Zweirad] en raison du caractère très insignifiant des sûretés). L’élément d’aide de la garantie correspond à la différence entre le taux de référence majoré de 700 points de base et le taux effectif appliqué au prêt garanti. »

215

Il est vrai que ces explications de la Commission contiennent à chaque fois une description de la méthode de calcul choisie, c’est-à-dire l’utilisation d’un taux de référence associé à des majorations forfaitaires en raison de la situation difficile de l’entreprise en cause et de l’absence de sûretés ou de leur faiblesse. Ladite méthode de calcul est conforme à la communication sur les taux de référence, qui est un document publié et dont les requérants ne contestent pas la pertinence, ainsi que, selon la Commission, à sa pratique constante, sans être contestée sur ce point par les requérants.

216

Contrairement à ce qu’allèguent les requérants, la décision attaquée n’est pas entachée d’un défaut de motivation en ce qui concerne les conclusions de la Commission concernant l’absence de sûretés ou leur faiblesse. En effet, la Commission a analysé de manière approfondie la situation financière des entreprises bénéficiaires en cause aux considérants 59 à 78 de la décision attaquée. Par ailleurs, concernant la mesure 1, il ressort des points 113 à 119 ci-dessus que la Commission n’a pas commis d’illégalité en n’incluant pas la lettre de confort dans son analyse. Quant à la mesure 2, le considérant 90 de la décision attaquée indique quelle sûreté était disponible et la raison pour laquelle elle était considérée comme faible. Enfin, le considérant 92 de la décision attaquée mentionne, quant à la mesure 3, l’existence d’une dette hypothécaire prioritaire ne couvrant qu’à peine plus de 50% de la totalité du prêt et qualifie les autres sûretés disponibles comme étant de valeur économique faible. Ainsi, au vu du rapport entre la sûreté principale prise en compte par la Commission et la qualification de la faible valeur économique des autres sûretés, au regard du pourcentage du prêt garanti par la sûreté principale, mentionnées à la fin du considérant 92 de la décision attaquée, il convient de considérer que la conclusion de la Commission quant au faible niveau de sûreté pour la mesure 3 n’est pas entachée d’un défaut de motivation.

217

Force est toutefois de constater que les requérants relèvent à juste titre que la communication sur les taux de référence ne contient aucune indication sur le cumul des risques, même si elle ne l’exclut pas. De plus, l’analyse de la Commission ne contient aucune référence à la pratique des marchés financiers sur ce point, de telle sorte que le rapport entre les majorations retenues par la Commission et la situation spécifique des trois sociétés en cause n’apparaît pas clairement et que le choix des majorations retenues a, à tout le moins en apparence, un caractère aléatoire.

218

Le Tribunal considère donc que la Commission aurait dû expliquer le recours à des primes supplémentaires ainsi que leur niveau par le biais d’une analyse de la pratique sur le marché afin de permettre aux requérants de remettre en cause le caractère approprié des majorations en l’espèce et au Tribunal de contrôler leur légalité.

219

Dans la procédure devant le Tribunal, la Commission s’est référée pour plus de précisions à cet égard à l’étude sans pour autant vouloir fournir par ce biais une motivation supplémentaire. Ladite étude propose pour des situations analogues à celles du cas d’espèce une majoration conformément à la notation de l’entreprise en cause eu égard à sa solidité financière et une majoration supplémentaire conformément au niveau de sûretés offertes. Elle arrive à des niveaux de majoration allant jusqu’à 1650 points pour des entreprises avec un mauvais profil de risque et qui n’offrent qu’un faible niveau de sûretés.

220

Force est de constater que ces explications supplémentaires de la Commission faisant référence à différents profils de risque de sociétés et les sûretés dont elles disposent mises en rapport avec des taux de majorations qui, typiquement, y correspondent, mettent effectivement en perspective les niveaux des primes retenus en l’espèce en les insérant dans un cadre de comparaison plus large et en les rendant objectifs.

221

Les requérants relèvent toutefois à juste titre que l’étude ne saurait être prise en considération comme motivation de la décision attaquée, car cette dernière n’y fait pas référence et l’étude n’était pas connue d’eux. Or, il y a lieu de rappeler que la motivation doit, en principe, être communiquée à l’intéressé en même temps que la décision lui faisant grief. L’absence de motivation ne saurait être régularisée par le fait que l’intéressé apprend les motifs de la décision au cours de la procédure devant les juridictions de l’Union européenne (arrêt de la Cour du 28 juin 2005 , Dansk Rørindustri e.a./Commission, C-189/02 P, C-202/02 P, C-205/02 P à C-208/02 P et C-213/02 P, Rec. p. I-5425 , point 463; arrêts du Tribunal du 12 décembre 1996 , Rendo e.a./Commission, T-16/91, Rec. p. II-1827 , point 45, et Corsica Ferries France/Commission, point 104 supra, point 287).

222

Dans ces circonstances, le Tribunal estime que la décision attaquée est affectée d’un défaut de motivation concernant les considérations essentielles qui ont amené la Commission à choisir le niveau des primes de risque s’appliquant aux mesures 1, 2 et 3, de sorte qu’elle ne satisfait pas aux exigences de l’article 253 CE.

223

Les griefs des requérants tirés d’un défaut de motivation à cet égard doivent donc être accueillis. Par conséquent, le Tribunal n’est pas en mesure de se prononcer sur les arguments relatifs au bien-fondé de la décision attaquée concernant le niveau des primes de risque s’appliquant aux mesures 1, 2 et 3.

224

Par ailleurs, le Tribunal estime que le calcul des éléments d’aide en cause est d’une importance essentielle dans l’économie générale de la décision attaquée et que, par conséquent, elle doit être annulée dans son entièreté.

225

Il résulte de tout ce qui précède que la décision attaquée doit être annulée.

Sur les dépens

226

Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé en ses conclusions dans les affaires T-102/07 et T-120/07, il y a lieu de la condamner aux dépens, y compris ceux relatifs à la procédure en référé dans l’affaire T-120/07, conformément aux conclusions des requérants.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête:

 

1)

La décision 2007/492/CE de la Commission, du 24 janvier 2007 , concernant l’aide d’État C 38/2005 (ex NN 52/2004) accordée par l’Allemagne au groupe Biria est annulée.

 

2)

La Commission européenne est condamnée aux dépens, y compris ceux relatifs à la procédure en référé dans l’affaire T-120/07.

 

Czúcz

Labucka

O’Higgins

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 mars 2010 .

Signatures

Table des matières

 

Cadre juridique et antécédents du litige

 

1. Réglementation communautaire

 

2. Régime d’aides approuvé

 

3. Entreprises en cause

 

4. Mesures en cause

 

5. Procédure administrative

 

6. Décision attaquée

 

Procédure et conclusions des parties

 

En droit

 

1. Sur les griefs tirés du défaut d’application de la définition de la notion d’entreprise en difficulté figurant dans la mesure utile E 16/94

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

2. Sur les griefs concernant la caractérisation des entreprises bénéficiaires comme entreprises en difficulté

 

Sur la question de savoir si Bike Systems était une entreprise en difficulté en mars 2001

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur la question de savoir si Sachsen Zweirad et Biria GmbH étaient des entreprises en difficulté, respectivement, en mars et en décembre 2003

 

Sur le cadre d’appréciation de la situation des entreprises bénéficiaires des mesures 2 et 3

 

— Arguments des parties

 

— Appréciation du Tribunal

 

Sur l’appréciation de la situation de Sachsen Zweirad

 

— Arguments des parties

 

— Appréciation du Tribunal

 

Sur l’appréciation de la situation de Biria GmbH

 

— Arguments des parties

 

— Appréciation du Tribunal

 

3. Sur les griefs tirés des défauts de motivation

 

Sur le défaut de motivation concernant la non-application de la mesure utile E 16/94 et l’écart pris par rapport aux lignes directrices de 1999

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur le défaut de motivation en ce qui concerne la détermination de l’élément d’aide

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur les dépens


( *1 ) Langue de procédure: l’allemand.

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