EUR-Lex Access to European Union law

Back to EUR-Lex homepage

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 61997CJ0387

Arrêt de la Cour du 4 juillet 2000.
Commission des Communautés européennes contre République hellénique.
Manquement d'Etat - Arrêt de la Cour constatant un manquement - Inexécution - Article 171 du traité CE (devenu article 228 CE) - Sanctions pécuniaires - Astreinte - Déchets - Directives 75/442/CEE et 78/319/CEE.
Affaire C-387/97.

European Court Reports 2000 I-05047

ECLI identifier: ECLI:EU:C:2000:356

61997J0387

Arrêt de la Cour du 4 juillet 2000. - Commission des Communautés européennes contre République hellénique. - Manquement d'Etat - Arrêt de la Cour constatant un manquement - Inexécution - Article 171 du traité CE (devenu article 228 CE) - Sanctions pécuniaires - Astreinte - Déchets - Directives 75/442/CEE et 78/319/CEE. - Affaire C-387/97.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-05047


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


1 Recours en manquement - Arrêt de la Cour constatant le manquement - Manquement à l'obligation d'exécution de l'arrêt - Recours introduit au titre de l'article 171, paragraphe 2, du traité (devenu article 228, paragraphe 2, CE) - Recevabilité - Conditions

(Traité CE, art. 171, § 2 (devenu art. 228, § 2, CE))

2 Environnement - Élimination des déchets - Directives 75/442 et 78/319 - Respectivement articles 4 et 5 - Obligation des États membres d'assurer l'élimination des déchets et de prendre les mesures appropriées pour les déchets toxiques et dangereux - Portée - Nécessité des mesures à prendre - Marge d'appréciation - Limites

(Directives du Conseil 75/442, art. 4, et 78/319, art. 5)

3 Environnement - Élimination des déchets - Directives 75/445 et 78/315 - Respectivement articles 4 et 5 - Obligation des États membres d'assurer l'élimination des déchets et de prendre les mesures appropriées pour les déchets toxiques et dangereux - Portée identique dans les directives 75/442, modifiée, et 91/689

(Directives du Conseil 75/445, art. 4, et 78/319, art. 5, et 91/689)

4 États membres - Obligations - Manquement - Justification - Inadmissibilité

(Traité CE, art. 169 (devenu art. 226 CE))

5 Actes des institutions - Directives - Exécution par les États membres - Directive prévoyant l'obligation d'établir un programme donné en vue d'atteindre certains objectifs - Mise en oeuvre d'actions matérielles partielles ou de réglementations fragmentaires - Obligation non satisfaite - Plans et programmes prévus par les directives 75/442 et 78/319 relatives aux déchets

(Traité CE, art. 189, al. 3 (devenu art. 249, al. 3, CE); directives du Conseil 75/442, art. 6, et 78/319, art. 12)

6 Recours en manquement - Arrêt de la Cour constatant le manquement - Délai d'exécution

(Traité CE, art. 171 (devenu art. 228 CE))

7 Recours en manquement - Arrêt de la Cour constatant le manquement - Effets - Obligations de l'État membre défaillant - Exécution de l'arrêt - Manquement - Sanctions pécuniaires - Modalités de calcul - Faculté pour la Commission d'adopter des lignes directrices - Proposition soumise à la Cour - Incidence

(Traité CE, art. 171, § 2, al. 1 et 2 (devenu art. 228, § 2, al. 1 et 2, CE))

8 Recours en manquement - Arrêt de la Cour constatant le manquement - Manquement à l'obligation d'exécuter l'arrêt - Sanctions pécuniaires - Astreinte - Détermination du montant - Critères

(Traité CE, art. 171, § 2, al. 3 (devenu art. 228, § 2, al. 3, CE))

Sommaire


1 Le recours en manquement introduit par la Commission au titre de l'article 171, paragraphe 2, du traité (devenu article 228, paragraphe 2, CE), visant à faire constater qu'un État membre en n'ayant pas pris les mesures indispensables que comporte l'exécution de l'arrêt de la Cour constatant le manquement de cet État, a manqué aux obligations qui lui incombent et à voir condamné cet État au paiement d'une astreinte, est recevable dès lors que toutes les phases de la procédure précontentieuse, et notamment la lettre de mise en demeure, sont intervenues après l'entrée en vigueur du traité sur l'Union européenne. (voir point 42)

2 Si l'article 4 de la directive 75/442 relative aux déchets ne précisait pas le contenu concret des mesures qui doivent être prises par les États membres pour assurer que les déchets soient éliminés sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement, il n'en reste pas moins qu'il liait les États membres quant à l'objectif à atteindre, tout en leur laissant une marge d'appréciation dans l'évaluation de la nécessité de telles mesures. Une dégradation significative de l'environnement pendant une période prolongée sans intervention des autorités compétentes révèle en principe que l'État membre concerné a outrepassé la marge d'appréciation que lui confère cette disposition. La même analyse peut être effectuée s'agissant de l'article 5 de la directive 78/319, relative aux déchets toxiques et dangereux. (voir points 55-57)

3 Les obligations résultant des articles 4 de la directive 75/442, relative aux déchets, et 5 de la directive 78/319, relative aux déchets toxiques et dangereux, étaient autonomes par rapport aux obligations plus spécifiques que comportaient les dispositions des articles 5 à 11 de la directive 75/442 en matière de planification, d'organisation et de contrôle des opérations d'élimination des déchets et de l'article 12 de la directive 78/319 en matière d'élimination des déchets toxiques et dangereux. Il en est également ainsi des obligations correspondantes sous l'empire de la directive 75/442, modifiée, et de la directive 91/689, relative aux déchets dangereux. (voir points 48-49, 58)

4 Un État membre ne saurait exciper de situations internes, telles les difficultés d'application apparues au stade de l'exécution d'un acte communautaire, pour justifier le non-respect des obligations et délais résultant des normes du droit communautaire. (voir point 70)

5 S'agissant de l'obligation pour les États membres d'établir un programme global en vue d'atteindre certains objectifs, des actions matérielles partielles ou des réglementations fragmentaires ne peuvent satisfaire à cette obligation.

Ne sauraient être considérées comme des plans ou des programmes que les États membres sont tenus d'arrêter, en vertu de l'article 6 de la directive 75/442, relative aux déchets, et de l'article 12 de la directive 78/319, relative aux déchets toxiques et dangereux, une réglementation ou des mesures concrètes qui ne constituent qu'une série d'interventions normatives ponctuelles, non susceptibles de constituer un système organisé et articulé visant à l'élimination des déchets et des déchets toxiques et dangereux. (voir points 75-76)

6 Si l'article 171 du traité (devenu article 228 CE) ne précise pas le délai dans lequel l'exécution d'un arrêt constatant le manquement d'un État membre doit intervenir, l'intérêt qui s'attache à une application immédiate et uniforme du droit communautaire exige que cette exécution soit entamée immédiatement et aboutisse dans des délais aussi brefs que possible. (voir point 82)

7 L'article 171, paragraphe 1, du traité (devenu article 228, paragraphe 1, CE) dispose que, si la Cour reconnaît qu'un État membre a manqué à l'une des obligations qui lui incombent en vertu du traité, cet État est tenu de prendre les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt de la Cour. Si l'État membre concerné n'a pas pris ces mesures dans le délai fixé par la Commission dans son avis motivé adopté sur le fondement de l'article 171, paragraphe 2, premier alinéa, du traité, la Commission peut saisir la Cour. Aux termes de l'article 171, paragraphe 2, deuxième alinéa, du traité, la Commission indique le montant de la somme forfaitaire ou de l'astreinte à payer par l'État membre concerné qu'elle estime adapté aux circonstances. À défaut de dispositions dans le traité à cet égard, il convient d'admettre que la Commission peut adopter des lignes directrices dont l'objectif est de fixer les modalités de calcul du montant des sommes forfaitaires ou des astreintes qu'elle entend proposer à la Cour, en particulier en vue d'assurer l'égalité de traitement entre les États membres. Si ces propositions de la Commission ne sauraient lier la Cour, elles constituent, toutefois, une base de référence utile. (voir points 81, 83-84, 89)

8 Aux termes de l'article 171, paragraphe 2, troisième alinéa, du traité (devenu article 228, paragraphe 2, troisième alinéa, CE), la Cour, si elle reconnaît que l'État membre concerné ne s'est pas conformé à son arrêt, peut lui infliger le paiement d'une somme forfaitaire ou d'une astreinte. D'une part, comme l'objectif principal de l'astreinte est que l'État membre mette fin au manquement dans les plus brefs délais, il convient de fixer le montant de l'astreinte de telle sorte que celui-ci soit adapté aux circonstances et proportionné tant au manquement constaté qu'à la capacité de paiement de l'État membre concerné. D'autre part, le degré d'urgence de l'exécution des obligations de l'État membre concerné peut varier selon les cas de manquement. À cet effet, les critères de base qui doivent être pris en considération pour assurer la nature coercitive de l'astreinte en vue de l'application uniforme et effective du droit communautaire sont, en principe, la durée de l'infraction, son degré de gravité et la capacité de payer de l'État membre en cause. Pour l'application de ces critères, il y a lieu de tenir compte en particulier des conséquences du défaut d'exécution sur les intérêts privés et publics et de l'urgence qu'il y a à amener l'État membre concerné à se conformer à ses obligations. (voir points 89-92)

Parties


Dans l'affaire C-387/97,

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme M. Condou-Durande, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. C. Gómez de la Cruz, membre du même service, Centre Wagner, Kirchberg,

partie requérante,

soutenue par

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, représenté par M. J. E. Collins, Assistant Treasury Solicitor, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l'ambassade du Royaume-Uni, 14, boulevard Roosevelt,

partie intervenante,

contre

République hellénique, représentée par Mmes A. Samoni-Rantou, conseiller juridique au service juridique spécial - section de droit européen du ministère des Affaires étrangères, et E.-M. Mamouna, auditeur au même service, et par M. G. Karipsiadis, collaborateur scientifique spécial au même service, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l'ambassade de Grèce, 117, Val Sainte-Croix,

partie défenderesse,

ayant pour objet de faire constater que, en n'ayant pas pris les mesures indispensables que comporte l'exécution de l'arrêt de la Cour du 7 avril 1992, Commission/Grèce (C-45/91, Rec. p. I-2509), et, en particulier, en n'ayant pas encore établi ni appliqué les plans et programmes nécessaires à l'élimination des déchets et des déchets toxiques et dangereux de la région concernée sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 171 du traité CE (devenu article 228 CE), et de voir cette dernière condamner à verser à la Commission, sur le compte «ressources propres de la CE», une astreinte d'un montant de 24 600 écus par jour, pour chaque jour de retard dans l'exécution des mesures nécessaires pour se conformer à l'arrêt Commission/Grèce, précité, à compter de la communication du présent arrêt,

LA COUR,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, J. C. Moitinho de Almeida, D. A. O. Edward, L. Sevón et R. Schintgen, présidents de chambre, P. J. G. Kapteyn, C. Gulmann, J.-P. Puissochet, G. Hirsch, P. Jann, H. Ragnemalm (rapporteur), M. Wathelet et V. Skouris, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l'audience du 29 juin 1999,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 28 septembre 1999,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 14 novembre 1997, la Commission des Communautés européennes a introduit, en vertu de l'article 171 du traité CE (devenu article 228 CE), un recours visant à faire constater que, en n'ayant pas pris les mesures indispensables que comporte l'exécution de l'arrêt de la Cour du 7 avril 1992, Commission/Grèce (C-45/91, Rec. p. I-2509), et, en particulier, en n'ayant pas encore établi ni appliqué les plans et programmes nécessaires à l'élimination des déchets et des déchets toxiques et dangereux de la région concernée sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 171 du traité CE (devenu article 228 CE), et à voir cette dernière condamner à verser à la Commission, sur le compte «ressources propres de la CE», une astreinte d'un montant de 24 600 écus par jour, pour chaque jour de retard dans l'exécution des mesures nécessaires pour se conformer à l'arrêt Commission/Grèce, précité, à compter de la communication du présent arrêt.

La réglementation communautaire

2 Dans leur version en vigueur à l'expiration du délai de deux mois fixé dans l'avis motivé ayant abouti au constat de manquement dans l'affaire Commission/Grèce, précitée, les directives 75/442/CEE du Conseil, du 15 juillet 1975, relative aux déchets (JO L 194, p. 39), et 78/319/CEE du Conseil, du 20 mars 1978, relative aux déchets toxiques et dangereux (JO L 84, p. 43), prescrivaient le rapprochement des législations nationales en matière d'élimination de certains déchets. Ainsi qu'il ressort, respectivement, du troisième considérant de la directive 75/442 et du quatrième considérant de la directive 78/319, ces directives visaient, notamment, à assurer la protection de la santé de l'homme et la sauvegarde de l'environnement contre les effets préjudiciables causés par le ramassage, le transport, le traitement, le stockage et le dépôt de ces déchets.

3 En vue d'assurer la réalisation de cet objectif, les directives 75/442 et 78/319 imposaient aux États membres d'adopter certaines dispositions et de prendre certaines autres mesures.

4 Tout d'abord, en vertu de l'article 4 de la directive 75/442, les États membres devaient prendre les mesures nécessaires pour assurer que les déchets soient éliminés sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement, et notamment sans créer de risque pour l'eau, l'air ou le sol ni pour la faune et la flore, sans provoquer d'incommodités par le bruit ou les odeurs et sans porter atteinte aux sites et aux paysages.

5 L'article 5, paragraphe 1, de la directive 78/319 prévoyait que les États membres devaient prendre les mesures nécessaires pour assurer que les déchets toxiques et dangereux soient éliminés sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement, et notamment sans créer de risque pour l'eau, l'air ou le sol, ni pour la faune et la flore, sans provoquer d'incommodités par le bruit ou les odeurs et sans porter atteinte aux sites et aux paysages. En vertu de l'article 5, paragraphe 2, de ladite directive, les États membres devaient prendre, notamment, les mesures nécessaires pour interdire l'abandon, le rejet, le dépôt et le transport incontrôlés de déchets toxiques et dangereux, ainsi que leur cession à des installations, établissements ou entreprises autres que ceux visés à l'article 9, paragraphe 1, de la même directive.

6 L'article 5 de la directive 75/442 disposait que les États membres avaient l'obligation d'établir ou de désigner la ou les autorités compétentes chargées, dans une zone déterminée, de planifier, d'organiser, d'autoriser et de superviser les opérations d'élimination des déchets.

7 Aux termes de l'article 6, premier alinéa, de la directive 75/442, la ou les autorités compétentes ainsi désignées étaient tenues d'établir aussitôt que possible un ou plusieurs plans portant notamment sur les types et les quantités de déchets à éliminer, les prescriptions techniques générales, les sites appropriés pour l'élimination ainsi que toutes les dispositions spéciales concernant des déchets particuliers. L'article 6, second alinéa, de ladite directive prévoyait que ce ou ces plans pouvaient inclure, par exemple, les personnes physiques ou morales habilitées à procéder à l'élimination des déchets, l'estimation des coûts des opérations d'élimination et les mesures susceptibles d'encourager la rationalisation de la collecte, du tri et du traitement des déchets.

8 Aux termes de l'article 6 de la directive 78/319, les États membres devaient désigner ou établir la ou les autorités compétentes chargées, dans une zone déterminée, de planifier, d'organiser, d'autoriser et de superviser les opérations d'élimination des déchets toxiques et dangereux.

9 L'article 12, paragraphe 1, premier alinéa, de la directive 78/319 disposait que les autorités compétentes devaient établir et tenir à jour des programmes pour l'élimination des déchets toxiques et dangereux. Ces programmes devaient notamment porter sur les types et les quantités de déchets à éliminer, les méthodes d'élimination, les centres de traitement spécialisés, si nécessaire, et les sites de dépôt appropriés.

10 Conformément à l'article 145 de l'acte relatif aux conditions d'adhésion de la République hellénique et aux adaptations des traités (JO 1979, L 291, p. 17, ci-après l'«acte d'adhésion»), la République hellénique avait jusqu'au 1er janvier 1981 pour mettre en vigueur les mesures nécessaires pour se conformer aux dispositions des directives 75/442 et 78/319.

L'arrêt Commission/Grèce

11 Par l'arrêt Commission/Grèce, précité, la Cour a constaté que la République hellénique avait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 4 et 6 de la directive 75/442, et 5 et 12 de la directive 78/319.

12 Il ressort de cet arrêt que, ayant eu connaissance de certains problèmes posés par l'élimination des déchets dans le département de La Canée, en Crète (Grèce), la Commission a invité le gouvernement hellénique à s'expliquer sur cette situation. Elle lui a demandé principalement des informations sur l'existence d'une décharge publique à l'embouchure du torrent Kouroupitos.

13 Le gouvernement hellénique a répondu qu'il allait mettre un terme au fonctionnement de cette décharge et créer de nouveaux sites de dépôt. Toutefois, il a signalé que, dans l'attente de l'achèvement des travaux d'infrastructure nécessaires sur ces nouveaux sites, les déchets du département de La Canée continueraient à être déposés dans la décharge du Kouroupitos jusqu'au mois d'août 1988.

14 Estimant cette réponse insatisfaisante, la Commission a adressé à la République hellénique une lettre de mise en demeure. Elle y considérait que, en violation des articles 4 de la directive 75/442 et 5 de la directive 78/319, la République hellénique n'avait pris aucune mesure afin que les déchets incriminés soient éliminés sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement. Elle y relevait, en outre, que cet État membre n'avait encore élaboré ni le plan d'élimination des déchets prescrit à l'article 6 de la directive 75/442 ni le programme pour l'élimination des déchets toxiques et dangereux prévu à l'article 12 de la directive 78/319. Elle ajoutait qu'il n'avait pris aucune des dispositions relatives à l'élimination imposées par l'article 7 de la directive 75/442. Elle concluait que la République hellénique avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu des articles 4, 5, 6, 7 et 13 de la directive 75/442, et 5, 6, 12 et 21 de la directive 78/319.

15 Dans leur réponse à cette lettre, les autorités helléniques ont fait état de l'opposition de la population de La Canée au projet de création de nouveaux sites d'enfouissement des déchets et de ce que les autorités envisageaient donc à moyen terme la création de sites d'enfouissement des déchets dans de plus petites localités et à long terme l'incinération et le recyclage des immondices.

16 Le 5 mars 1990, la Commission a émis un avis motivé qu'elle a notifié à la République hellénique. Elle y estimait que les autorités helléniques n'avaient pas respecté leurs obligations découlant du traité, puisqu'elles se trouvaient encore au stade de la préparation des mesures nécessaires pour se conformer aux directives 75/442 et 78/319 dans la région de La Canée.

17 Dans le recours en manquement qu'elle a introduit à l'encontre de la République hellénique, la Commission a fait valoir que les autorités helléniques n'avaient pris aucune mesure afin que les déchets de la région de La Canée soient éliminés sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement. Elle a ajouté que les autorités compétentes n'avaient pris aucune disposition en vue de la mise en oeuvre d'un véritable plan, qui conduirait, sur la base d'un calendrier, à une bonne gestion des déchets de cette région. Elle a repris les mêmes critiques en ce qui concerne les déchets toxiques et dangereux de la région, pour lesquels les autorités helléniques n'avaient pas pris davantage de mesures appropriées ni prévu de programme relatif à leur élimination.

18 La République hellénique a répliqué que plusieurs études avaient été entreprises entre 1989 et 1991 au sujet de la gestion et du recyclage des déchets de la région de La Canée. Toutefois, la mise en oeuvre du programme projeté aurait été suspendue en raison de l'opposition de la population locale.

19 Au point 21 de l'arrêt Commission/Grèce, précité, la Cour a constaté que, aux termes de l'article 145 de l'acte d'adhésion, les directives 75/442 et 78/319 auraient dû être mises en oeuvre en Grèce au plus tard le 1er janvier 1981. En outre, elle a rappelé qu'il résulte d'une jurisprudence constante qu'un État membre ne saurait exciper de situations internes, telles les difficultés d'application apparues au stade de l'exécution d'un acte communautaire, pour justifier le non-respect des obligations et délais résultant des normes du droit communautaire.

20 En conséquence, la Cour a dit pour droit:

«En n'ayant pas pris les mesures nécessaires pour assurer que dans la région de La Canée les déchets et les déchets toxiques et dangereux seront éliminés sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement et en n'établissant pas pour cette région des plans ou des programmes pour l'élimination des déchets et des déchets toxiques et dangereux, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 4 et 6 de la directive 75/442/CEE du Conseil, du 15 juillet 1975, relative aux déchets, et des articles 5 et 12 de la directive 78/319/CEE du Conseil, du 20 mars 1978, relative aux déchets toxiques et dangereux.»

La procédure précontentieuse

21 En l'absence de communication des mesures d'exécution de l'arrêt Commission/Grèce, précité, la Commission a, par lettre du 11 octobre 1993 adressée aux autorités helléniques, rappelé que la République hellénique avait été condamnée par cet arrêt et souligné qu'aucune mesure afin de s'y conformer ne lui avait été communiquée.

22 Par lettre du 24 août 1994, le gouvernement hellénique a informé la Commission que l'organisme compétent pour la gestion des déchets au plan local avait obtenu l'«agrément préliminaire» pour deux sites d'enfouissement des déchets à Kopinadi et à Vardia. Des études d'évaluation des incidences de ces sites sur l'environnement étaient en cours d'élaboration, conformément à la législation nationale transposant la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement (JO L 175, p. 40), et devaient s'achever avant la fin de l'année 1994. À l'issue de cette procédure, l'organisme compétent pourrait procéder à l'élaboration de l'étude finale relative à la construction, à la mise en service, à la surveillance et à la réhabilitation de celui des deux sites qui apparaîtrait le plus adapté.

23 N'ayant reçu aucun renseignement nouveau du gouvernement hellénique, la Commission a décidé d'engager la procédure prévue à l'article 171, paragraphe 2, du traité. Le 21 septembre 1995, elle a mis le gouvernement hellénique en demeure de présenter ses observations dans un délai de deux mois concernant la non-exécution de l'arrêt Commission/Grèce, précité.

24 Par lettre du 14 décembre 1995, le gouvernement hellénique a informé la Commission que le conseil préfectoral de la région de La Canée avait choisi un site de dépôt des déchets et que, par conséquent, le programme d'élimination des déchets serait mis en oeuvre.

25 La Commission a considéré qu'il ressortait clairement de cette réponse que les autorité helléniques, quatre ans après l'arrêt Commission/Grèce, précité, n'avaient toujours pas pris les mesures que comporte son exécution, que l'adoption des mesures d'exécution n'en était qu'au stade préliminaire et que les plans ou les programmes d'élimination des déchets ne pouvaient pas encore être mis en oeuvre. Ainsi, selon la Commission, les déchets continuaient d'être déposés dans la décharge du Kouroupitos, mettant en danger la santé publique et portant préjudice à l'environnement.

26 Par avis motivé du 6 août 1996, la Commission a constaté que, en n'ayant pas pris les mesures indispensables que comporte l'exécution de l'arrêt Commission/Grèce, précité, et, en particulier, en n'ayant pas encore établi ni appliqué les plans ou les programmes nécessaires à l'élimination des déchets et des déchets toxiques et dangereux de la région concernée sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité.

27 La Commission a invité la République hellénique, en application de l'article 171, paragraphe 2, du traité, à prendre les mesures nécessaires pour se conformer à l'avis motivé dans un délai de deux mois à compter de sa notification. En outre, la Commission a attiré l'attention des autorités helléniques sur l'éventuelle imposition d'une astreinte pour défaut d'exécution de l'arrêt Commission/Grèce, précité, par la République hellénique, dont le montant réclamé devant la Cour en vertu de l'article 171, paragraphe 2, du traité serait déterminé par la Commission en fonction des circonstances au moment de l'introduction de son recours.

28 Dans leur réponse du 11 novembre 1996, les autorités helléniques ont mentionné un plan national de gestion des déchets, garanti et mis en oeuvre aux niveaux préfectoral et régional, pour lequel les crédits nécessaires étaient disponibles et engagés. S'agissant du plan régional de gestion des déchets dans le département de La Canée, les autorités helléniques ont indiqué qu'il consistait à mettre en oeuvre un programme global de gestion comprenant:

- le tri des déchets à la source;

- la construction et la mise en service d'une usine de recyclage mécanique;

- l'aménagement et la mise en service d'un site d'enfouissement des déchets;

- un programme de réaménagement et de réhabilitation de la région en raison de l'élimination incontrôlée des déchets dans la décharge du Kouroupitos.

29 S'agissant des déchets déposés dans la décharge du Kouroupitos, les autorités helléniques ont indiqué avoir entrepris des actions et des interventions concrètes pour régler les problèmes locaux afin de résoudre définitivement la question de ce site, pour lequel elles élaboraient des programmes particuliers de gestion.

30 Quant à la gestion des déchets toxiques et dangereux et, en particulier, des déchets d'hôpitaux, les autorités helléniques ont déclaré qu'elles poursuivaient l'application d'une série d'actions et d'interventions portant sur le financement d'études et de la réalisation de travaux sur la gestion des déchets et, notamment, que l'administration préfectorale du département de La Canée avait entrepris les démarches nécessaires pour l'installation d'une usine de recyclage mécanique et d'un site d'enfouissement des déchets. Selon les autorités compétentes, l'aboutissement de ce programme résoudrait le problème du Kouroupitos et réglerait la gestion des déchets dans la région de La Canée.

31 Par lettre du 28 août 1997, les autorités helléniques ont fourni des renseignements complémentaires relatifs à l'avancement de la procédure de gestion des déchets dans le département de La Canée. Elles ont notamment indiqué que l'agrément préliminaire du lieu retenu pour l'implantation du site d'enfouissement des déchets avait été accordé et que l'étude relative aux incidences sur l'environnement de l'usine de recyclage et de compostage des déchets était terminée ainsi que la première phase d'une procédure d'adjudication internationale restreinte.

32 Ces réponses n'ayant pas été considérées comme satisfaisantes par la Commission, celle-ci a considéré que les mesures d'exécution de l'arrêt Commission/Grèce, précité, n'étaient pas encore mises en oeuvre et a décidé, par conséquent, d'introduire le présent recours.

Les conclusions des parties

33 La Commission demande à la Cour de constater que la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 171 du traité, de lui infliger une astreinte d'un montant de 24 600 euros par jour de retard dans l'exécution des mesures nécessaires pour se conformer à l'arrêt Commission/Grèce, précité, et de la condamner aux dépens.

34 Par ordonnance du président de la Cour du 29 septembre 1998, le Royaume-Uni a été admis à intervenir à l'appui des conclusions de la Commission. Il n'a toutefois pas déposé de conclusions.

35 Le gouvernement hellénique demande à la Cour, à titre principal, de déclarer le recours irrecevable ou de le rejeter comme non fondé et de condamner la Commission aux dépens. À titre subsidiaire, ce gouvernement demande à la Cour de fixer l'astreinte sur la base de coefficients de gravité et de durée plus favorables à la République hellénique que ceux retenus par la Commission et en tenant compte du degré élevé de conformité avec l'arrêt Commission/Grèce, précité, auquel la République hellénique serait parvenue.

Sur la recevabilité

36 Se fondant sur les arrêts du 3 mars 1982, Alpha Steel/Commission, 14/81, Rec. p. 749, point 28, et du 13 novembre 1990, Fedesa e.a., C-331/88, Rec. p. I-4023, point 42, sur les conclusions de l'avocat général Fennelly dans l'affaire Commission/France (arrêt du 7 mars 1996, C-334/94, Rec. p. I-1307), ainsi que sur une partie de la doctrine, le gouvernement hellénique soutient que le recours est irrecevable au motif que l'article 171, paragraphe 2, du traité, qui résulte du traité sur l'Union européenne, est entré en vigueur le 1er novembre 1993, postérieurement à l'introduction de la procédure en manquement pour inexécution de l'arrêt Commission/Grèce, précité, fondée sur l'article 171 du traité.

37 En effet, l'article 171, paragraphe 2, du traité prévoirait l'imposition aux États membres de sanctions très lourdes et constituerait par conséquent une règle plus stricte et plus sévère qui ne pourrait pas, en principe, faire l'objet d'une application rétroactive.

38 Or, la procédure en manquement pour inexécution de l'arrêt Commission/Grèce, précité, aurait débuté le 11 octobre 1993 lorsque, n'ayant reçu aucune information concernant l'exécution de cet arrêt, la Commission s'est adressée aux autorités helléniques afin de leur rappeler la condamnation de la République hellénique par ledit arrêt et leur fixer un délai pour communiquer les mesures prises afin de se conformer à cette condamnation.

39 Le gouvernement hellénique soutient que, bien que l'amende porte sur l'avenir et non sur le passé et ne s'applique pas rétroactivement, elle comporte des éléments de rétroactivité. La procédure de l'article 171, paragraphe 2, du traité supposerait, par essence, la prise en compte du passé et le calcul de l'amende s'effectuerait sur le fondement d'éléments et de critères faisant référence aux actes commis dans le passé. La Commission chercherait à faire sanctionner un comportement passé tout en poursuivant un objectif plus éloigné, consistant à éviter pour l'avenir une «récidive» de l'État membre «indiscipliné».

40 La Commission réplique qu'aucune application rétroactive de l'article 171, paragraphe 2, du traité ne peut être relevée. Le présent recours se distinguerait de l'affaire Commission/France, précitée, dans la mesure où, en l'espèce, toutes les phases de la procédure en manquement seraient intervenues après l'entrée en vigueur du traité sur l'Union européenne.

41 En outre, il n'existerait pas non plus d'application rétroactive des sanctions. L'astreinte proposée par la Commission ne saurait être considérée comme une sanction pénale, en raison du fait qu'elle est infligée pour peser sur un comportement futur.

42 À cet égard, il suffit, d'une part, de constater que toutes les phases de la procédure précontentieuse, et notamment la lettre de mise en demeure, qui date du 21 septembre 1995, sont intervenues après l'entrée en vigueur du traité sur l'Union européenne. En effet, la lettre du 11 octobre 1993, à laquelle se réfère le gouvernement hellénique, ne fait pas partie de cette procédure. D'autre part, quant à l'argument soulevé par le gouvernement hellénique relatif à la prise en compte, aux fins de la fixation de l'astreinte, d'éléments et de critères faisant référence au passé, celui-ci se confond en substance avec l'examen de l'affaire sur le fond et notamment de l'objet de l'astreinte visée à l'article 171, paragraphe 2, du traité.

43 Dans ces conditions, il convient de rejeter l'exception d'irrecevabilité soulevée par le gouvernement hellénique.

Sur le fond

44 À titre liminaire, il convient d'examiner si les obligations qui incombaient à la République hellénique en vertu des articles 4 et 6 de la directive 75/442 et des articles 5 et 12 de la directive 78/319 subsistent en l'état actuel du droit communautaire.

45 À cet égard, il y a lieu de rappeler que la directive 75/442 a été considérablement modifiée par la directive 91/156/CEE du Conseil, du 18 mars 1991 (JO L 78, p. 32). Il résulte en effet de l'article 1er de la directive 91/156 que les articles 1er à 12 de la directive 75/442 ont été remplacés par les articles 1er à 18 et que trois annexes ont été ajoutées.

46 La directive 78/319 a été abrogée avec effet au 12 décembre 1993 et remplacée par la directive 91/689/CEE du Conseil, du 12 décembre 1991, relative aux déchets dangereux (JO L 377, p. 20). La directive 94/31/CE du Conseil, du 27 juin 1994, modifiant la directive 91/689 (JO L 168, p. 28), a reporté au 27 juin 1995 l'abrogation de la directive 78/319.

47 Il ressort d'un examen comparatif de ces dispositions que la directive 75/442, modifiée, a renforcé certaines dispositions de la directive 75/442 (arrêt du 9 novembre 1999, Commission/Italie, C-365/97, non encore publié au Recueil, point 37). Ainsi, les obligations imposées aux États membres par l'article 4 de la directive 75/442 restent applicables en vertu de l'article 4, premier alinéa, de la directive 75/442, modifiée (arrêt du 9 novembre 1999, Commission/Italie, précité, point 61). S'agissant de l'obligation d'établir des plans d'élimination des déchets prévue à l'article 6 de la directive 75/442, cette obligation correspond désormais à l'obligation, prévue à l'article 7 de la directive 75/442, modifiée, d'établir des plans de gestion de déchets.

48 De même, les obligations imposées aux États membres par l'article 5 de la directive 78/319 subsistent en vertu de l'article 4 de la directive 75/442, modifiée. En effet, d'une part, l'obligation d'éliminer les déchets toxiques et dangereux sans mettre en danger la santé de l'homme ni porter préjudice à l'environnement, résultant de l'article 5, paragraphe 1, de la directive 78/319, figure désormais à l'article 4, premier alinéa, de la directive 75/442, modifiée, laquelle a été rendue applicable aux déchets dangereux par l'article 1er, paragraphe 2, de la directive 91/689.

49 D'autre part, l'article 5, paragraphe 2, de la directive 78/319 prévoyait une obligation précise pour les États membres de prendre les mesures nécessaires pour interdire l'abandon, le rejet, le dépôt et le transport incontrôlés de déchets toxiques et dangereux, ainsi que leur cession à des installations, établissements ou entreprises autres que ceux visés à l'article 9, paragraphe 1, de la même directive. Cette obligation figure désormais à l'article 4, second alinéa, de la directive 75/442, modifiée.

50 S'agissant de l'obligation d'établir et de tenir à jour des programmes pour l'élimination des déchets toxiques et dangereux, prévue à l'article 12 de la directive 78/319, cette obligation correspond à celle d'établir des plans de gestion de déchets dangereux prescrite par l'article 6, paragraphe 1, de la directive 91/689.

51 Il résulte de ce qui précède que les obligations qui incombent à la République hellénique en vertu des articles 4 et 6 de la directive 75/442 et des articles 5 et 12 de la directive 78/319 subsistent en l'état actuel du droit communautaire.

Sur l'étendue des obligations au sujet desquelles l'arrêt Commission/Grèce, précité, a constaté le manquement

52 La Commission fait valoir que la République hellénique aurait satisfait à l'obligation d'exécuter l'arrêt Commission/Grèce, précité, qui lui incombe en vertu de l'article 171 du traité, si elle avait élaboré et mis en oeuvre les plans et les programmes prévus aux articles 6 de la directive 75/442 et 12 de la directive 78/319. Selon elle, les obligations qui résultent des articles 4 et 6 de la directive 75/442 et 5 et 12 de la directive 78/319 ne sont remplies que par l'adoption et la mise en oeuvre concrète des plans et des programmes prévus par ces directives.

53 Or, il ressortirait des indications fournies par le gouvernement hellénique que le plan d'élimination des déchets exigé par l'article 6 de la directive 75/442 et le programme d'élimination des déchets toxiques et dangereux exigé par l'article 12 de la directive 78/319 en étaient encore au stade préliminaire et que le Kouroupitos continuait de servir de site d'élimination incontrôlée des déchets de la région de La Canée.

54 Le gouvernement hellénique relève qu'un État membre pourrait très bien avoir élaboré et communiqué à la Commission les plans et les programmes prévus aux articles 6 de la directive 75/442 et 12 de la directive 78/319, sans toutefois avoir pris les mesures indispensables exigées par les articles 4 de la directive 75/442 et 5 de la directive 78/319. Inversement, un État membre pourrait avoir pris les mesures indispensables exigées par les articles 4 de la directive 75/442 et 5 de la directive 78/319, sans pour autant avoir élaboré et communiqué les plans et les programmes prévus aux articles 6 de la directive 75/442 et 12 de la directive 78/319, auquel cas le manquement porterait seulement sur ces dernières dispositions.

55 Il convient de souligner que, si l'article 4 de la directive 75/442 ne précisait pas le contenu concret des mesures qui doivent être prises pour assurer que les déchets soient éliminés sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement, il n'en reste pas moins qu'il liait les États membres quant à l'objectif à atteindre, tout en leur laissant une marge d'appréciation dans l'évaluation de la nécessité de telles mesures (arrêt du 9 novembre 1999, Commission/Italie, précité, point 67).

56 Ainsi, la Cour a jugé qu'une dégradation significative de l'environnement pendant une période prolongée sans intervention des autorités compétentes révèle en principe que l'État membre concerné a outrepassé la marge d'appréciation que lui confère cette disposition (arrêt du 9 novembre 1999, Commission/Italie, précité, point 68).

57 La même analyse peut être effectuée s'agissant de l'article 5 de la directive 78/319.

58 De plus, il y a lieu de constater que les obligations résultant des articles 4 de la directive 75/442 et 5 de la directive 78/319 étaient autonomes par rapport aux obligations plus spécifiques que comportaient les dispositions des articles 5 à 11 de la directive 75/442 en matière de planification, d'organisation et de contrôle des opérations d'élimination des déchets et de l'article 12 de la directive 78/319 en matière d'élimination des déchets toxiques et dangereux. Il en est également ainsi des obligations correspondantes sous l'empire de la directive 75/442, modifiée, et de la directive 91/689.

59 Dès lors, afin de déterminer si la République hellénique s'est conformée à l'obligation d'exécuter l'arrêt Commission/Grèce, précité, il convient de vérifier successivement si chacune des obligations au sujet desquelles ledit arrêt a constaté un manquement a depuis été remplie, dans la mesure où ces obligations présentent un caractère indépendant les unes par rapport aux autres.

Sur le respect des obligations résultant de l'article 171, paragraphe 1, du traité

60 Pour sa défense, le gouvernement hellénique fait valoir que le volume des déchets qui continuent d'être déversés dans le ravin du Kouroupitos a diminué de manière significative puisque, d'une part, une partie d'entre eux serait enfouie dans des sites appropriés situés dans quatre sous-préfectures du département de La Canée (Sfakia, Kalyves, Selino et Kissamo) et que, d'autre part, un système de tri et de recyclage du papier a été mis en place.

61 Les déchets toxiques et dangereux de la base militaire américaine de Souda ne seraient plus déposés dans le ravin du Kouroupitos depuis 1996, mais seraient confiés à une entreprise privée, qui les transférerait à l'étranger en vue d'être traités. Tel serait également le cas pour les déchets des hôpitaux, qui seraient chargés dans un véhicule spécial et conservés en chambre froide jusqu'à leur incinération par pyrolyse. S'agissant des sédiments d'hydrocarbures, le gouvernement hellénique assure qu'ils sont stockés dans un lieu approprié jusqu'à ce qu'ils soient envoyés à l'étranger. Les huiles minérales usagées seraient remises à l'administration départementale de La Canée pour être transportées vers une usine de régénération, tandis que les citernes ne déposeraient plus le contenu des fosses septiques dans le Kouroupitos, une installation d'épuration biologique ayant été construite dans la région de La Canée.

62 À cet égard, il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, que, à l'origine, la Commission a été saisie, le 22 septembre 1987, d'une plainte dénonçant des rejets incontrôlés de déchets par la majorité des communes du département de La Canée, dans l'embouchure du torrent Kouroupitos, dans la péninsule d'Akrotiri. Figuraient, parmi ces détritus, ceux des bases militaires de la région, des hôpitaux et des cliniques, ainsi que les résidus des fabriques de sel, des centres d'aviculture, d'abattoirs et de toutes les installations industrielles de la région.

63 Il résulte de l'étude «Environmental impact of uncontrolled solid waste combustion in the Kouroupitos' Ravine, Crete» (Impact sur l'environnement de la combustion incontrôlée de déchets solides dans le ravin du Kouroupitos, Crète), réalisée en juin 1996 par l'Atelier de technologie et de gestion de l'environnement de l'École polytechnique de Crète, en collaboration avec l'Institut de chimie écologique de Munich, produite par le gouvernement hellénique, que:

«... Les déchets solides sont éliminés dans le ravin du Kouroupitos, situé à 30 km environ à l'est de La Canée, dans la péninsule d'Akrotiri. Les déchets sont, sans autre précaution, déversés dans le ravin depuis le sommet, à une distance de 200 m de la mer. Les déchets brûlent depuis au moins 10 ans, sans que l'on puisse maîtriser le feu, parce que la combustion est autoalimentée en raison du taux élevé de matière organique. De ce mode inapproprié d'élimination des déchets, combiné avec la combustion incontrôlée des déchets solides, a résulté une situation dangereuse pour l'environnement, étant donné que les eaux d'infiltration de la décharge s'écoulent dans la mer et que les résidus du processus de combustion se répandent à la fois sur terre et dans la mer.»

64 S'agissant, en premier lieu, de l'exécution de l'obligation d'éliminer les déchets sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement, prévue à l'article 4 de la directive 75/442, le gouvernement hellénique ne conteste pas que les déchets solides, notamment les ordures ménagères, sont toujours déversés dans le Kouroupitos.

65 En effet, il ressort des courriers de la préfecture de la Canée au ministère de l'Environnement des 7 mai et 18 août 1998, communiqués par le gouvernement hellénique, que la plupart des déchets aboutissent toujours de manière incontrôlée et illégale dans le ravin du Kouroupitos, qui reçoit aujourd'hui l'ensemble des déchets ménagers de l'agglomération de La Canée.

66 Le gouvernement hellénique admet dans sa duplique que, «en tout état de cause, seule une solution définitive du problème, consistant à arrêter le fonctionnement du Kouroupitos et à mettre en oeuvre un système moderne, régulier et efficace, pourrait être considérée comme pleinement satisfaisante».

67 D'ailleurs, il ressort du point 10 de l'arrêt Commission/Grèce, précité, que le gouvernement hellénique avait déjà répondu à la Commission, le 15 mars 1988, qu'il allait mettre un terme au fonctionnement de cette décharge après le mois d'août 1988 et créer de nouveaux sites de dépôt.

68 Force est de constater que tel n'est toujours pas le cas.

69 Certes, selon le gouvernement hellénique, les autorités compétentes, qui ont projeté d'installer et de faire fonctionner, au lieu-dit «Strongylo Kefali», sur la commune de Chordakios, une usine de recyclage mécanique et de compostage ainsi qu'un site d'enfouissement sanitaire de déchets, se heurtent à la résistance des particuliers concernés, qui s'est traduite par l'introduction de réclamations et de recours auprès des autorités administratives et judiciaires compétentes contre les décisions administratives concernant l'emplacement des deux installations.

70 Mais, ainsi qu'il a déjà été rappelé au point 21 de l'arrêt Commission/Grèce, précité, il résulte d'une jurisprudence constante qu'un État membre ne saurait exciper de situations internes, telles les difficultés d'application apparues au stade de l'exécution d'un acte communautaire, pour justifier le non-respect des obligations et délais résultant des normes du droit communautaire.

71 Par conséquent, il y a lieu de constater que la République hellénique n'a pas exécuté l'arrêt Commission/Grèce, précité, dans la mesure où elle persiste à manquer aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 4 de la directive 75/442, en ce qui concerne l'adoption des mesures nécessaires pour assurer que les déchets seront éliminés dans la région de La Canée sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement.

72 S'agissant, en deuxième lieu, de l'exécution de l'obligation d'éliminer les déchets toxiques et dangereux sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement, prévue à l'article 5 de la directive 78/319, il convient de constater que l'affirmation du gouvernement hellénique selon laquelle les déchets toxiques et dangereux ne sont plus déversés dans le Kouroupitos depuis 1996 est étayée par l'étude du dossier. Cette affirmation n'est que partiellement contestée par la Commission, qui concède que les quantités de déchets toxiques et dangereux ont été réduites.

73 Dans de telles conditions, il convient de relever qu'il incombe à la Commission, dans le cadre de la présente procédure, de fournir à la Cour les éléments nécessaires pour déterminer l'état d'exécution par un État membre d'un arrêt en manquement.

74 À défaut de disposer de tels éléments, il convient de constater qu'il n'a pas été prouvé que la République hellénique ne s'est pas intégralement conformée à l'obligation d'éliminer les déchets toxiques et dangereux de la région de La Canée en conformité avec les dispositions de l'article 5 de la directive 78/319.

75 S'agissant, en troisième lieu, de l'exécution des obligations d'établir des plans d'élimination des déchets et d'établir et de tenir à jour des programmes pour l'élimination des déchets toxiques et dangereux, prévues respectivement à l'article 6 de la directive 75/442 et à l'article 12 de la directive 78/319, il importe de constater que, conformément à la jurisprudence de la Cour, des actions matérielles partielles ou des réglementations fragmentaires ne peuvent satisfaire à l'obligation incombant à un État membre d'établir un programme global en vue d'atteindre certains objectifs (arrêt du 28 mai 1998, Commission/Espagne, C-298/97, Rec. p. I-3301, point 16).

76 Or, contrairement à ce que prétend le gouvernement hellénique, ne sauraient être considérées comme des plans ou des programmes que les États membres sont tenus d'arrêter, en vertu des articles 6 de la directive 75/442 et 12 de la directive 78/319, une réglementation ou des mesures concrètes qui ne constituent qu'une série d'interventions normatives ponctuelles, non susceptibles de constituer un système organisé et articulé visant à l'élimination des déchets et des déchets toxiques et dangereux (voir, par analogie, arrêt du 25 novembre 1998, Commission/Espagne, C-214/96, Rec. p. I-7661, point 30).

77 Par conséquent, il y a lieu de constater que la République hellénique n'a pas non plus exécuté l'arrêt Commission/Grèce, précité, dans la mesure où elle persiste à manquer aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 6 de la directive 75/442 et 12 de la directive 78/319, en ce qui concerne l'établissement de plans d'élimination des déchets et de programmes d'élimination des déchets toxiques et dangereux.

78 En raison de l'ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de constater que, en n'ayant pas pris les mesures nécessaires pour assurer que les déchets seront éliminés dans la région de La Canée sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement, conformément à l'article 4 de la directive 75/442, et en n'ayant pas établi pour cette région des plans pour l'élimination des déchets, conformément à l'article 6 de la directive 75/442, et des programmes pour l'élimination des déchets toxiques et dangereux, conformément à l'article 12 de la directive 78/319, la République hellénique n'a pas mis en oeuvre toutes les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt Commission/Grèce, précité, et a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 171 du traité.

Sur la fixation de l'astreinte

79 Se fondant sur la méthode de calcul telle qu'elle l'a définie dans ses communications 96/C 242/07, du 21 août 1996, concernant la mise en oeuvre de l'article 171 du traité (JO C 242, p. 6), et 97/C 63/02, du 28 février 1997, concernant la méthode de calcul de l'astreinte prévue à l'article 171 du traité CE (JO C 63, p. 2), la Commission a proposé à la Cour d'infliger une astreinte d'un montant de 24 600 écus par jour de retard pour sanctionner l'inexécution de l'arrêt Commission/Grèce, précité, à compter de la date de communication du présent arrêt et jusqu'au jour où il sera mis fin au manquement. La Commission considère qu'une sanction pécuniaire sous la forme d'une astreinte constitue le moyen le plus approprié permettant d'atteindre l'objectif de mise en conformité avec l'arrêt Commission/Grèce, précité, dans les plus brefs délais.

80 Le gouvernement hellénique demande à la Cour de fixer l'astreinte sur la base de coefficients de gravité et de durée plus favorables à la République hellénique que ceux retenus par la Commission. Il fait valoir que le coefficient relatif à la durée de l'infraction, fixé unilatéralement par la Commission sans qu'elle examine le degré d'exécution de l'arrêt, ne reflète pas la situation existante et qu'il serait injuste pour la République hellénique. Si, selon ce gouvernement, la Commission dispose d'un pouvoir discrétionnaire permettant de fixer des coefficients de gravité, de durée et de capacité de paiement des États membres, sans leur assentiment, il appartiendrait exclusivement à la Cour d'apprécier ce qui est juste, proportionné et équitable.

81 À cet égard, il y a lieu de rappeler que l'article 171, paragraphe 1, du traité dispose que, si la Cour reconnaît qu'un État membre a manqué à l'une des obligations qui lui incombent en vertu du traité, cet État est tenu de prendre les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt de la Cour.

82 L'article 171 du traité ne précise pas le délai dans lequel l'exécution d'un arrêt doit intervenir. Toutefois, selon une jurisprudence constante, l'intérêt qui s'attache à une application immédiate et uniforme du droit communautaire exige que cette exécution soit entamée immédiatement et aboutisse dans des délais aussi brefs que possible (arrêts du 6 novembre 1985, Commission/Italie, 131/84, Rec. p. 3531, point 7; du 13 juillet 1988, Commission/France, 169/87, Rec. p. 4093, point 14, et du 7 mars 1996, Commission/France, précité, point 31).

83 Si l'État membre concerné n'a pas pris les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt de la Cour dans le délai fixé par la Commission dans son avis motivé adopté sur le fondement de l'article 171, paragraphe 2, premier alinéa, du traité, la Commission peut saisir la Cour. Aux termes de l'article 171, paragraphe 2, deuxième alinéa, du traité, la Commission indique le montant de la somme forfaitaire ou de l'astreinte à payer par l'État membre concerné, qu'elle estime adapté aux circonstances.

84 À défaut de dispositions dans le traité à cet égard, il convient d'admettre que la Commission peut adopter des lignes directrices dont l'objectif est de fixer les modalités de calcul du montant des sommes forfaitaires ou des astreintes qu'elle entend proposer à la Cour, en particulier en vue d'assurer l'égalité de traitement entre les États membres.

85 À cet égard, la communication 96/C 242/07, précitée, prévoit notamment que la détermination du montant de l'amende ou de l'astreinte doit être guidée par l'objectif même de cet instrument, à savoir assurer l'application effective du droit communautaire. La Commission estime ainsi que le montant doit être calculé en fonction de trois critères fondamentaux, à savoir la gravité de l'infraction, la durée de celle-ci et la nécessité d'assurer l'effet dissuasif de la sanction elle-même pour faire cesser l'infraction et éviter les récidives.

86 La communication 97/C 63/02, précitée, identifie les variables mathématiques utilisées pour calculer le montant d'une astreinte, à savoir un forfait de base uniforme, un coefficient de gravité, un coefficient de durée, ainsi qu'un facteur destiné à refléter la capacité de paiement de l'État membre, tout en visant le caractère à la fois proportionné et dissuasif de l'astreinte, calculé à partir du produit intérieur brut des États membres et de la pondération de leurs voix au Conseil.

87 Ces règles indicatives, définissant les lignes de conduite que la Commission entend suivre, contribuent à garantir la transparence, la prévisibilité et la sécurité juridique de son action, tout en visant la proportionnalité des montants des astreintes qu'elle entend proposer.

88 À cet égard, la proposition de la Commission consistant à tenir compte à la fois du produit intérieur brut de l'État membre concerné et du nombre de voix dont il dispose au Conseil apparaît pertinente dans la mesure où elle permet de refléter la capacité de paiement de cet État membre tout en maintenant un écart raisonnable entre les divers États membres.

89 Il convient de souligner que ces propositions de la Commission ne sauraient lier la Cour. En effet, aux termes mêmes de l'article 171, paragraphe 2, troisième alinéa, du traité, la Cour, si elle «reconnaît que l'État membre concerné ne s'est pas conformé à son arrêt ... peut lui infliger le paiement d'une somme forfaitaire ou d'une astreinte». Toutefois, ces propositions constituent une base de référence utile.

90 En effet, d'une part, comme l'objectif principal de l'astreinte est que l'État membre mette fin au manquement dans les plus brefs délais, il convient de fixer le montant de l'astreinte de telle sorte que celui-ci soit adapté aux circonstances et proportionné tant au manquement constaté qu'à la capacité de paiement de l'État membre concerné.

91 D'autre part, le degré d'urgence de l'exécution des obligations de l'État membre concerné peut varier selon les cas de manquement.

92 Dans cette perspective et ainsi que l'a suggéré la Commission, les critères de base qui doivent être pris en considération pour assurer la nature coercitive de l'astreinte en vue de l'application uniforme et effective du droit communautaire sont, en principe, la durée de l'infraction, son degré de gravité et la capacité de payer de l'État membre en cause. Pour l'application de ces critères, il y a lieu de tenir compte en particulier des conséquences du défaut d'exécution sur les intérêts privés et publics et de l'urgence qu'il y a à amener l'État membre concerné à se conformer à ses obligations.

93 En l'espèce, il y a lieu de relever que, au regard de la nature des manquements en cause, qui perdurent jusqu'à ce jour, le paiement d'une astreinte constitue effectivement le moyen le plus adapté aux circonstances de l'espèce.

94 S'agissant de la gravité des infractions et en particulier des conséquences du défaut d'exécution sur les intérêts privés et publics, il y a lieu de constater que l'obligation d'éliminer les déchets sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement fait partie des objectifs mêmes de la politique de la Communauté dans le domaine de l'environnement, tel qu'il résulte de l'article 130 R du traité CE (devenu, après modification, article 174 CE). L'absence de respect de l'obligation résultant de l'article 4 de la directive 75/442 risque, par la nature même de cette obligation, de mettre directement en danger la santé de l'homme et de porter préjudice à l'environnement et doit, au regard des autres obligations, être considérée comme particulièrement grave.

95 Le manquement aux obligations plus spécifiques d'établir un plan d'élimination des déchets et d'établir et de tenir à jour des programmes pour l'élimination des déchets toxiques et dangereux, prévues respectivement à l'article 6 de la directive 75/442 et à l'article 12 de la directive 78/319, doit être considéré comme grave dans la mesure où le respect de ces obligations spécifiques constituait une condition nécessaire afin de réaliser pleinement les objectifs visés aux articles 4 de la directive 75/442 et 5 de la directive 78/319.

96 Ainsi, contrairement à ce que fait valoir la Commission, le fait que des mesures concrètes ont été prises afin de réduire les quantités de déchets toxiques et dangereux, au titre de l'article 5 de la directive 78/319, ne saurait avoir une incidence sur la gravité du non-respect de l'obligation d'établir et de tenir à jour des programmes pour l'élimination des déchets toxiques et dangereux en vertu de l'article 12 de la directive 78/319.

97 De plus, il y a lieu de tenir compte du fait qu'il n'a pas été prouvé que la République hellénique ne s'est pas intégralement conformée à l'obligation d'éliminer les déchets toxiques et dangereux de la région de La Canée en conformité avec les dispositions de l'article 5 de la directive 78/319.

98 S'agissant de la durée de l'infraction, il suffit de constater que celle-ci est considérable, même à compter de la date d'entrée en vigueur du traité sur l'Union européenne et non pas de la date du prononcé de l'arrêt Commission/Grèce, précité.

99 Compte tenu de l'ensemble des éléments qui précèdent, il y a lieu de condamner la République hellénique à payer à la Commission, sur le compte «ressources propres de la CE», une astreinte de 20 000 euros par jour de retard dans la mise en oeuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l'arrêt Commission/Grèce, précité, à compter du prononcé du présent arrêt et jusqu'à exécution de l'arrêt Commission/Grèce, précité.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

100 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République hellénique aux dépens et cette dernière ayant, pour l'essentiel, succombé en sa défense, il y a lieu de la condamner aux dépens. Le Royaume-Uni supportera ses propres dépens, en application de l'article 69, paragraphe 4, du règlement de procédure.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

déclare et arrête:

101 En n'ayant pas pris les mesures nécessaires pour assurer que les déchets seront éliminés dans la région de La Canée sans mettre en danger la santé de l'homme et sans porter préjudice à l'environnement, conformément à l'article 4 de la directive 75/442/CEE du Conseil, du 15 juillet 1975, relative aux déchets, et en n'ayant pas établi pour cette région des plans pour l'élimination des déchets, conformément à l'article 6 de la directive 75/442, et des programmes pour l'élimination des déchets toxiques et dangereux, conformément à l'article 12 de la directive 78/319/CEE du Conseil, du 20 mars 1978, relative aux déchets toxiques et dangereux, la République hellénique n'a pas mis en oeuvre toutes les mesures que comporte l'exécution de l'arrêt du 7 avril 1992, Commission/Grèce (C-45/91), et a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 171 du traité CE.

102 La République hellénique est condamnée à payer à la Commission des Communautés européennes, sur le compte «ressources propres de la CE», une astreinte de 20 000 euros par jour de retard dans la mise en oeuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l'arrêt Commission/Grèce, précité, à compter du prononcé du présent arrêt et jusqu'à exécution de l'arrêt Commission/Grèce, précité.

103 La République hellénique est condamnée aux dépens.

104 Le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord supportera ses propres dépens.

Top