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Document 52016DC0831

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPEEN, AU CONSEIL EUROPEEN ET AU CONSEIL Troisième rapport sur les progrès accomplis dans la mise en place d’une union de la sécurité réelle et effective

COM/2016/0831 final

Brussels, 21.12.2016

COM(2016) 831 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPEEN, AU CONSEIL EUROPEEN ET AU CONSEIL

Troisième rapport sur les progrès accomplis dans la mise en place d’une union de la sécurité réelle et effective


I.    INTRODUCTION

Le présent rapport est le troisième rapport mensuel sur les progrès accomplis dans la mise en place d’une union de la sécurité réelle et effective; il fait état de l’évolution de la situation en ce qui concerne deux principaux piliers qui consistent, d’une part, à lutter contre le terrorisme et la criminalité organisée et contre les moyens sur lesquels ils s’appuient, et, d’autre part, à renforcer nos défenses et notre résilience face à ces menaces. L’attentat lâche et méprisable qui a frappé Berlin le 19 décembre ainsi que les autres attentats perpétrés en 2016 nous rappellent de nouveau notre vulnérabilité et la nécessité de continuer à œuvrer ensemble au renforcement de notre sécurité collective afin de protéger nos libertés et notre mode de vie. Au cours de la période couverte par le présent rapport, des progrès concrets ont été accomplis concernant la restriction du champ d’action potentiel des terroristes et de leurs partisans. Le présent rapport décrit le nouveau train de mesures relatif au financement du terrorisme qui a été adopté aujourd’hui et qui constitue une étape importante pour mettre fin au financement du terrorisme. Afin de restreindre davantage le champ d’action des terroristes, la Commission améliore également l’échange d’informations en adoptant une série de propositions visant à renforcer l’efficacité et l’efficience du système d’information Schengen. Au cours de la période couverte par le présent rapport, des progrès importants ont également été accomplis en ce qui concerne des dossiers législatifs essentiels de l’Union européenne dans la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée et le renforcement de la sécurité à nos frontières. Le Parlement européen et le Conseil sont parvenus à un accord politique sur la directive relative à la lutte contre le terrorisme, la révision de la directive relative aux armes à feu et la révision du code frontières Schengen afin de permettre des vérifications systématiques pour les citoyens de l’Union.

Des avancées importantes ont également été réalisées dans la lutte contre la radicalisation en ligne. Lors de la deuxième réunion à haut niveau du Forum de l’UE sur l’internet, les grandes plateformes de l’internet ont annoncé le lancement d’une initiative d’échange de valeurs de hachage, qui permettra aux entreprises participantes d’utiliser ces valeurs pour détecter les contenus liés au terrorisme afin de s’assurer de leur suppression définitive. Ce nouvel outil devrait contribuer à restreindre l’accès des organisations terroristes à un moyen de communication essentiel utilisé pour la propagande, le recrutement et la radicalisation. Lors du Forum, la Commission a également lancé un programme de participation active de la société civile, doté d’un financement de 10 millions d’euros, afin d'aider les partenaires de la société civile à accroître le nombre de contre-discours efficaces en ligne.

Des évolutions fondamentales ont également eu lieu dans d’autres domaines. Compte tenu de l’importance capitale d’une transposition intégrale et en temps voulu de la directive de l'UE relative aux données des dossiers passagers (PNR), la Commission a présenté un plan de transposition de la directive PNR afin de fournir des orientations aux États membres. La Commission a également présenté un plan d’action visant à renforcer la réponse de l’UE aux fraudes liées aux documents de voyage. Ce plan d’action fournit des recommandations opérationnelles aux États membres afin de résoudre le problème croissant de la fraude liée aux documents de voyage, y compris concernant l’enregistrement de l’identité et la délivrance, la production et le contrôle de documents. Enfin, afin de renforcer la protection des citoyens et des infrastructures critiques, la Commission s'est penchée sur la question de la sécurité de nos réseaux d’énergie dans le train de mesures sur l’union de l’énergie qui a été adopté le 30 novembre. Ce train de mesures est destiné à aider les États membres à évaluer les risques, à s'y préparer et à gérer les situations de crise en ce qui concerne les réseaux d’électricité de l’Union.

II.    UNE NOUVELLE LÉGISLATION DE L’UE POUR COMBATTRE LE TERRORISME ET LA CRIMINALITÉ ORGANISÉE

Infractions terroristes

À la suite de négociations intenses, le Parlement européen et le Conseil sont parvenus à un accord politique le 17 novembre concernant la proposition de directive relative à la lutte contre le terrorisme 1 présentée par la Commission en décembre 2015. Il s’agit d’une étape cruciale dans notre lutte contre les terroristes et leurs partisans. La directive consolide la législation existante de l’UE et les normes internationales 2 sur l’incrimination des infractions terroristes et intègre de «nouvelles» infractions liées au terrorisme, dont le financement du terrorisme, le déplacement à l’étranger pour commettre une infraction terroriste ou participer à un camp d’entraînement, ainsi que le retour à la suite de telles activités et le fait de dispenser ou de recevoir un entraînement. Il s’agit d’un volet essentiel de la lutte contre les combattants terroristes étrangers. La directive inclut également des dispositions destinées à répondre aux besoins spécifiques des victimes du terrorisme en leur fournissant des informations, de l’aide et une protection. Le Parlement européen et le Conseil doivent désormais rapidement procéder à l'adoption formelle du texte; la période de transposition pour les États membres sera de 18 mois.

Contrôle des armes à feu

À la suite d’une proposition de la Commission datant de novembre 2015 et d’appels répétés au Parlement européen et au Conseil, un accord politique a été conclu le 13 décembre 2016 entre les colégislateurs sur la révision de la directive de l'UE relative aux armes à feu 3 . Il s’agit d’une étape cruciale pour mettre un terme à l’accès légal aux armes d’assaut à usage militaire. La directive révisée élargit la gamme des armes qui sont interdites et qui relèvent dès lors du contrôle le plus strict dont fait l'objet la catégorie A, y compris les armes automatiques converties en armes semi-automatiques et les armes semi-automatiques équipées de chargeurs de grande capacité et de dispositifs de chargement. À l’avenir, il ne sera plus possible d’acheter ces armes ni d’en faire le commerce et seul un groupe très limité de titulaires de licence – tels que les musées et les tireurs sportifs – qui sera soumis à des exigences strictes en matière de sécurité et de contrôle, sera habilité à le faire. Pour la première fois, des limites vont être imposées à la taille des chargeurs des armes semi-automatiques à canon long et court et tous les composants essentiels des armes à feu devront être marqués et enregistrés 4 .

Parallèlement au renforcement des contrôles des armes à feu détenues légalement, la Commission œuvre à l’intensification de la lutte contre le trafic illégal d’armes à feu, notamment dans les Balkans occidentaux, comme cela est prévu dans le plan d’action 2015-2019. La réunion ministérielle avec les Balkans occidentaux qui s'est tenue le 16 décembre a marqué une étape décisive à ce sujet et l’UE et les pays des Balkans occidentaux ont adopté une déclaration commune afin de mettre l’accent sur les mesures nécessaires pour lutter plus efficacement contre le trafic illégal d’armes à feu en Europe et dans les Balkans occidentaux.

La Commission a également renforcé les mesures relatives aux précurseurs d’explosifs pour rendre encore plus difficile l’accès des terroristes aux matières premières utilisées dans la fabrication illicite d’explosifs. Le règlement (UE) nº 98/2013 établit des règles harmonisées concernant la mise à disposition, l’introduction, la détention et l’utilisation de substances ou mélanges susceptibles d’être utilisés d’une manière détournée pour la fabrication illicite d’explosifs, afin d’en limiter la disponibilité pour le grand public et de garantir que les transactions suspectes, à quelque étape que ce soit de la chaîne d’approvisionnement, soient dûment signalées. Trois règlements délégués 5 ont été adoptés pour contrôler l’utilisation de précurseurs d’explosifs concernant la poudre d’aluminium, la poudre de magnésium et le nitrate de magnésium. Ces règlements imposent une obligation stricte de déclaration de la vente de précurseurs afin de prévenir leur détournement à des fins de fabrication illicite d’explosifs artisanaux.

Vérifications systématiques aux frontières

Alors que les ressortissants de pays tiers sont déjà soumis à des vérifications systématiques de sécurité et de documents dans les bases de données pertinentes à leur entrée, la réforme ciblée du code frontières Schengen 6 , adoptée par les colégislateurs le 5 décembre, instaure des vérifications systématiques obligatoires dans les bases de données pertinentes pour les citoyens de l'UE. De plus, les ressortissants de pays tiers devront désormais également faire l’objet, à leur sortie, d’une vérification systématique dans le système d’information Schengen (SIS) et dans la base de données d’Interpol sur les documents de voyage perdus ou volés. Cette modification facilitera l’identification de toutes les personnes recherchées qui font l'objet d'un signalement, y compris les combattants terroristes étrangers.

III.    MISE EN ŒUVRE DU PLAN D’ACTION DESTINÉ À RENFORCER LA LUTTE CONTRE LE FINANCEMENT DU TERRORISME

Pour apporter une réponse à toute la panoplie de moyens utilisés par les terroristes afin de lever et de transférer des fonds, la Commission a proposé un plan d’action global destiné à renforcer la lutte contre le financement du terrorisme en février 2016 7 . Elle a aujourd’hui adopté un nouveau train de propositions destiné à mettre en œuvre les actions qu’elle s’était engagée à finaliser avant la fin de l'année 2016. Les instruments proposés rendront plus difficile le financement par les terroristes de leurs activités et faciliteront la surveillance de leurs transactions financières, leur arrestation et leur traduction en justice. Ces mesures visent à lutter contre le blanchiment de capitaux et les mouvements illicites d’argent liquide liés au terrorisme et à la criminalité, en améliorant le gel et la confiscation des avoirs et en examinant de quelle manière il est possible d’améliorer la détection et la surveillance du financement des mouvements terroristes.

1.Incrimination du blanchiment de capitaux et détection des mouvements illicites d’argent liquide

Pour que les autorités compétentes puissent poursuivre les criminels et les terroristes et les mettre derrière les barreaux, elles ont besoin de dispositions appropriées en matière de droit pénal. La proposition de directive visant à ériger en infraction le blanchiment de capitaux 8  fournira une définition détaillée des infractions et des sanctions relatives au blanchiment de capitaux dans l’UE. Cette directive consolidera le cadre existant en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux. Elle permettra aussi de garantir que l’UE remplit ses obligations internationales dans ce domaine, notamment la convention de Varsovie 9 , et respecte les recommandations pertinentes du Groupe d’action financière (GAFI); elle facilitera ainsi également l’élimination des obstacles existants à la coopération judiciaire et policière transfrontalière dans la lutte contre le blanchiment de capitaux, et améliorera l’application de la loi. Enfin, la proposition devrait empêcher les criminels de tirer profit des divergences entre les législations nationales et avoir un réel effet dissuasif.

Pour poursuivre de manière efficace les auteurs de ces crimes, les autorités compétentes ont besoin d’outils adéquats pour identifier les terroristes et leurs partisans. Le règlement existant sur le contrôle des mouvements d’argent liquide 10 oblige les personnes qui entrent ou sortent de l’UE avec au moins 10 000 EUR à effectuer une déclaration à cet égard. Cependant, il n’existe pas de disposition pour l’argent liquide qui est envoyé par voie postale, fret ou service de messagerie et les autorités compétentes ont signalé que des criminels ont envoyé ou reçu de l’argent liquide par ces moyens afin d’échapper à l’obligation de déclaration au titre du règlement.

En outre, le règlement sur le contrôle des mouvements d’argent liquide oblige uniquement les autorités compétentes à mettre les données relatives aux déclarations «à la disposition» de la cellule de renseignement financier (CRF) de l’État membre dans lequel ces données ont été recueillies. Il est possible de satisfaire à cette exigence quelque peu passive en se contentant de mettre à disposition les formulaires de déclaration remplis à des fins d’inspection par la CRF. Cependant, ce n’est pas suffisant puisque les informations devraient être transmises de manière active à la CRF afin qu’elle puisse les analyser. De plus, les données relatives aux déclarations peuvent être communiquées aux autorités compétentes d’autres États membres uniquement lorsqu’il existe des indices d’activités illégales, mais sans aucune obligation même dans ce cas. La mise en œuvre s’est par conséquent avérée incohérente et l’échange systématique de données est limité.

Le règlement actuel n’autorise pas non plus les autorités à retenir l’argent liquide de manière provisoire lorsqu’elles détectent des mouvements de montants inférieurs au seuil qui sont associés à des indices d’activité illégale. Des problèmes ont également été soulevés à propos de la définition imparfaite d’«argent liquide». Les niveaux de mise en œuvre des règles existantes varient de manière importante entre les différents États membres.

Pour toutes ces raisons, la proposition de règlement visant à lutter contre les mouvements illicites d’argent liquide 11 élargit le champ d’application du règlement existant sur le contrôle des mouvements d’argent liquide afin d’y inclure l’argent liquide envoyé par fret ou par courrier et permettra aux autorités d’agir sur des montants plus faibles d’argent liquide en cas de soupçons d’activité illicite. Cette proposition étend également l’obligation de déclaration à l’or (sous des formes qui peuvent servir de réserves de valeur très liquides) et prévoit un système de déclaration à la demande (système dit de «divulgation») des mouvements d’argent liquide par courrier ou par fret.

2.Gel d’avoirs

Le gel d’avoirs est un outil efficace pour empêcher les terroristes d’utiliser et de recevoir des fonds et pour entraver leur capacité d’action. Une confiscation effective désorganise à long terme les sources de revenus des organisations terroristes et empêche les criminels de tirer profit d’avoirs obtenus de manière illégale.

Mesures de gel et de confiscation dans les procédures judiciaires

L’un des moyens d’y parvenir consiste à geler et à confisquer les avoirs d’origine criminelle dans le cadre de procédures judiciaires. Cela désorganise à long terme les sources de revenus des organisations terroristes et empêche les criminels d’utiliser les avoirs obtenus de manière illégale.

Pour compléter la directive de 2014 concernant le gel et la confiscation 12 (qui établit des règles minimales sur le gel et la confiscation des avoirs d’origine criminelle) ainsi que la directive récemment adoptée sur la lutte contre le terrorisme (qui prévoit une infraction pénale distincte pour le financement du terrorisme), la Commission a proposé un règlement sur la reconnaissance mutuelle des décisions de gel et de confiscation des avoirs d’origine criminelle 13 . Cette proposition renforcera l’efficacité des mesures transfrontalières de gel et de confiscation d'avoirs d’origine criminelle qui sont émises dans le cadre de procédures pénales, sans formalités intermédiaires. Ensemble, ces instruments accroîtront les possibilités de gel et de confiscation des avoirs liés au terrorisme et à la criminalité par décision judiciaire. Il s’agit de mesures particulièrement importantes puisque le gel judiciaire d’avoirs dans le cadre de procédures pénales offre davantage de garanties que le gel administratif d’avoirs.

Gel administratif d’avoirs

Lorsque des transactions financières liées au terrorisme et à la criminalité sont détectées, les autorités publiques peuvent en retrouver l'origine et, si nécessaire, les bloquer et geler les avoirs correspondants. Le gel administratif d’avoirs est un outil temporaire de nature préventive qui peut être utilisé en l’absence de procédure pénale afin d’empêcher les personnes soupçonnées de terrorisme d’utiliser et de recevoir des fonds.

Le Groupe d’action financière (GAFI) fait obligation aux États membres d'établir des dispositions permettant de geler au plus vite les avoirs de personnes ou d’entités ayant des liens avec le terrorisme. L’absence de régime de gel des avoirs dans un petit nombre d’États membres ainsi que le fait que certains régimes nationaux existants ne soient pas complets ou soient inefficaces ont soulevé des questions relatives à l’entière conformité aux exigences internationales. Le GAFI indique, dans une analyse récente 14 , que 14 États membres de l’UE ne sont pas capables d’appliquer des mesures de gel des avoirs à ce qu'il appelle les «terroristes internes à l’Union européenne 15 ». À la suite de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, l’article 75 du TFUE a conféré à l’Union européenne une compétence explicite pour adopter des mesures administratives à l’égard de personnes physiques et morales, de groupes et d’entités non étatiques lorsque cela est nécessaire pour atteindre les objectifs définis dans le domaine de la liberté, de la sécurité et de la justice. La Commission s’est engagée dans le plan d’action de février à évaluer la nécessité d’établir un système administratif complémentaire pour geler les avoirs de terroristes au sein de l’UE.

Concernant la menace qui pèse actuellement sur la sécurité en Europe, la plus grave reste aujourd’hui le terrorisme inspiré du djihad 16 , tandis que la menace globale que représentent les autres groupes terroristes – à quelques rares exceptions – est toujours jugée faible 17 . Par conséquent, la valeur ajoutée en matière de répression et de lutte contre le terrorisme d’un système relevant de l’article 75 du TFUE est actuellement considérée comme faible.

De plus, la menace actuelle qui résulte du terrorisme international est couverte par les dispositions existantes du droit de l’Union. Les régimes de gel des avoirs de l’UE qui ont été adoptés au titre de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) permettent de geler les fonds et les autres avoirs liés au terrorisme. Ces régimes ont été récemment renforcés et autorisent pour la première fois l'adoption indépendante d'un certain nombre de mesures, y compris le gel d’avoirs de personnes liées à l’EIIL (Daech) et à Al-Qaida 18 . Ce nouveau système permet de bloquer les fonds de personnes et d’entités associées à ces organisations ou participant à des activités telles que le financement, l’entraînement, le recrutement, l’incitation à commettre un acte terroriste ainsi que le déplacement en dehors de l'UE ou vers l’UE afin de participer aux activités de l’EIIL (Daech) ou d’Al-Qaida. Ces régimes s’appliquent aux ressortissants de pays tiers ainsi qu’aux citoyens de l’UE dans la mesure où ils ont un lien avec le terrorisme international. Cela signifie que l’UE peut bloquer les avoirs de tout terroriste exerçant des activités en Europe dans la mesure où il a des liens avec ces groupes.

Pour les autres groupes exerçant des activités dans l’UE, le cadre législatif pénal renforcé fournit davantage d’options pour bloquer les fonds liés au terrorisme qu'auparavant, puisqu’il offre plus de garanties que le gel administratif d’avoirs, tout en restant assorti de moyens d’action rapides et efficaces.

La Commission considère qu’il n’est pas nécessaire de prendre d’autres mesures pour le moment, compte tenu de la valeur ajoutée limitée en matière de répression d’un nouveau régime adopté en vertu de l’article 75 du TFUE, du fait que les instruments existants couvrent déjà les besoins résultant des menaces existantes, et des possibilités accrues de geler les avoirs liés au terrorisme dans le cadre du droit pénal de l'UE. Cependant, la Commission continuera de surveiller très attentivement l’évolution de la menace terroriste au sein de l’Union européenne et examinera régulièrement la nécessité d’introduire des mesures sur la base de l’article 75 du TFUE.

3.Surveillance du financement du terrorisme

Le plan d’action sur le financement du terrorisme souligne que les cellules de renseignement financier (CRF) et les systèmes de surveillance tels que le programme UE-États-Unis de surveillance du financement du terrorisme (TFTP) constituent des instruments essentiels pour la détection de mouvements de fonds par des transactions financières ou l’identification de réseaux terroristes et de leurs complices. Toutefois, les capacités existantes devraient être renforcées et concentrées à la fois sur les opérations de financement complexes et de grande envergure et sur les opérations terroristes à faible coût qui recourent à de nouveaux modes de paiement dont il est difficile de suivre la trace. La vitesse de réaction est également déterminante, car les services financiers actuels permettent aux terroristes de transférer très rapidement des fonds d’un endroit à un autre, ce qui montre clairement qu’il est nécessaire d’améliorer la coopération et les échanges de renseignements en matière financière et répressive. Le suivi des transactions internationales en application de l’accord entre l’Union européenne et les États-Unis concernant le programme de surveillance du financement du terrorisme (TFTP) semble fonctionner de manière efficace. À la suite d’une analyse d’impact, la Commission a conclu, dans une communication de novembre 2013, que la mise en place dans l'UE d’un système (dénommé «système de surveillance du financement du terrorisme» ou SSFT) conçu sur le modèle du TFTP ne serait ni proportionnée ni porteuse de valeur ajoutée.

Toutefois, compte tenu de l’évolution rapide du modèle de financement du terrorisme, il serait malgré tout utile d’analyser la nécessité de mécanismes complémentaires du programme UE-États-Unis de surveillance du financement du terrorisme pour combler de possibles lacunes (à savoir les transactions auxquelles l’accord entre l’UE et les États-Unis sur le TFTP ne s’applique pas – notamment les paiements en euros à l’intérieur de l’Union – et qu’il pourrait être impossible de surveiller autrement).

Tout d’abord, depuis 2013, la situation a évolué: la menace terroriste a changé et les ressources financières utilisées par les terroristes sont souvent plus faibles et ne transitent plus nécessairement par des systèmes de transfert tels que ceux qui sont couverts par le programme UE-États-Unis de surveillance du financement du terrorisme. Beaucoup de nouveaux moyens de paiement sont également apparus, qui offrent de nouvelles méthodes d'autofinancement aux terroristes.

Selon des discussions avec Europol et les États membres, un système européen complétant le programme UE-États-Unis de surveillance du financement du terrorisme pourrait fournir aux autorités compétentes un panorama plus complet des transactions financières pertinentes actuellement tenues à l'écart, sans qu'il soit nécessaire de consulter plusieurs bases de données (pour la plupart limitées aux informations détenues à l’échelle nationale) et sans courir le risque connexe de négliger certaines informations cruciales. Un tel système permettrait aussi de recouper ces informations avec les autorités d’autres États membres. Associé à d’autres renseignements, il pourrait contribuer à identifier de manière plus précoce les suspects au cours des enquêtes menées en vue d’empêcher les attaques, à fournir des renseignements utiles juste après une attaque, à identifier plus rapidement les auteurs et leurs partisans, et à fournir des informations importantes pour la traduction en justice des terroristes.

Cependant, il convient d'évaluer la valeur ajoutée d’un système européen complémentaire en tenant compte d’autres aspects, notamment: i) une évaluation des risques relatifs à un canal particulier utilisé pour le financement du terrorisme, et la proportionnalité de la mesure envisagée; ii) la complexité technique, la faisabilité et les coûts de la collecte et du traitement de volumes importants de données issues d’une grande variété d’entités et les répercussions économiques sur ces entités; et iii) les incidences sur les droits fondamentaux, notamment sur la protection de la vie privée et le droit à la protection des données à caractère personnel.

Le champ d’application d’un tel système constitue une question essentielle; il conviendrait en particulier de définir quels services de paiement et de transfert d’argent pourraient être inclus et quelles entités détentrices d’informations de financement pourraient être tenues de fournir des informations à ce système.

La restriction du champ d'application aux virements électroniques SEPA (espace unique de paiements en euros) pourrait déjà apporter une certaine valeur ajoutée en matière répressive: la majorité des cellules terroristes situées en Europe ont tiré des revenus de sources légales – généralement reçus par l'intermédiaire du système bancaire officiel – et utilisent des comptes bancaires et des cartes de crédit pour leurs activités économiques quotidiennes et les dépenses liées aux attaques. Les prestataires de services de messagerie financière et les chambres de compensation informatisées, mais aussi les établissements de crédit, pourraient constituer des fournisseurs potentiels de données. Cependant, même si un système couvrant les virements SEPA devrait bénéficier d’un cadre réglementaire existant et de normes communes, il exclurait les transactions effectuées dans l’Union européenne dans des devises autres que l’euro et avec d’autres moyens de paiement.

L’élargissement du champ d’application aux virements effectués dans d’autres devises ainsi qu'aux paiements réalisés avec des cartes de crédit, de débit et de prépaiement, aux fournisseurs de portefeuille électronique, aux transmissions de fonds et aux devises virtuelles pourrait accroître encore la valeur ajoutée en matière répressive. Parallèlement, cela impliquerait un accroissement important du volume de données et du nombre de fournisseurs, ce qui aurait des effets encore plus importants sur les coûts du système et sur sa proportionnalité.

Compte tenu de ces éléments, la Commission va poursuivre son évaluation et examinera les options relatives à la création d’un système européen de surveillance du financement du terrorisme qui compléterait le TFTP actuel, sans omettre d'étudier l’incidence de ces options sur les droits fondamentaux. Il sera nécessaire de mener des consultations approfondies avec les prestataires de services financiers en raison de la complexité technique et juridique des questions en jeu. La Commission rendra compte de ses conclusions à l’été 2017.

Les travaux menés en vue de mettre pleinement en œuvre le plan d’action destiné à renforcer la lutte contre le financement du terrorisme seront poursuivis en 2017, notamment en étudiant la possibilité de renforcer les pouvoirs des autorités douanières dans ce domaine, en présentant une proposition visant à lutter contre le financement du terrorisme par le commerce de marchandises et le commerce illicite de biens culturels et en examinant les possibilités de renforcer l’accès des autorités répressives et d’autres autorités publiques aux registres des comptes bancaires. La Commission encourage les colégislateurs à accorder la priorité aux dossiers législatifs qui ont déjà été présentés et à parvenir sans tarder à un accord sur la quatrième directive révisée relative au blanchiment des capitaux 19 .

IV.    RENFORCEMENT DES SYSTÈMES D’INFORMATION ET ÉLIMINATION DES LACUNES

L'échange d’informations systématique et efficace entre les États membres et des systèmes d’information solides et interconnectés sont des mécanismes essentiels pour renforcer nos moyens de défense contre le terrorisme et la criminalité organisée. La Commission soutient les efforts en ce sens en veillant à une meilleure transposition des instruments existants par les États membres et en accélérant les travaux commencés en avril 2016 sur des systèmes d’information plus robustes et plus intelligents au service des frontières et de la sécurité 20 . L’objectif est de s’assurer que les autorités compétentes disposent systématiquement des informations nécessaires issues de différents systèmes d’information afin de relever les défis actuels en matière de sécurité.

L’un des aspects essentiels de l’amélioration de la gestion des informations au niveau de l’UE consiste à remédier aux défaillances des systèmes existants et à optimiser leurs performances. À cette fin, la Commission a présenté une série de propositions destinées à renforcer l’efficacité et l’efficience du système d’information Schengen (SIS), qui est l’instrument d’échange d’informations le plus important et le plus couramment utilisé actuellement 21 . Les nouvelles propositions de la Commission 22 , qui reposent sur une évaluation complète, visent à améliorer les fonctionnalités du système pour répondre aux nouveaux besoins opérationnels.

La proposition améliorera et amplifiera l’utilisation du SIS ainsi que sa valeur ajoutée à des fins répressives et renforcera les droits d’accès des agences de l'UE compétentes, telles qu’Europol et Eurojust. Elle élargira certaines des catégories de signalement existantes et certains des types de vérification existants, en introduisant une nouvelle catégorie de signalement pour les «personnes recherchées inconnues» ainsi qu’un signalement préventif pour les enfants en cas de risque élevé d’enlèvement. Elle introduira également l'obligation de créer un signalement SIS lorsqu’une personne est recherchée dans le cadre d'une infraction terroriste. La proposition améliorera aussi l’application des décisions de retour émises à l'égard de ressortissants de pays tiers en séjour illégal en introduisant une nouvelle catégorie de signalement pour les décisions de retour. De plus, elle contribuera à l’application effective des interdictions d’entrée applicables à des ressortissants de pays tiers aux frontières extérieures en rendant obligatoire leur enregistrement dans le SIS. La proposition introduira de nouvelles fonctionnalités dans le système, notamment une utilisation plus efficace des données telles que l’imagerie faciale et les empreintes digitales. Elle renforcera également la sécurité des données et la qualité des données enregistrées dans le SIS, en prévoyant par exemple des exigences uniformes concernant les modalités de traitement sécurisé des données du SIS à l'intention des agents déployés sur le terrain.

La proposition renforcera la protection des données, en instaurant des garanties supplémentaires pour veiller à ce que la collecte et le traitement des données ainsi que l'accès à celles-ci soient limités au strict nécessaire, dans le respect absolu de la législation de l’Union et des droits fondamentaux, y compris du droit à un recours effectif.

Outre l’amélioration du fonctionnement des systèmes existants, les travaux se poursuivront également concernant les modalités d’interaction entre les systèmes d’information. Dans le discours sur l’état de l’Union prononcé en septembre 2016 par le président Juncker et dans les conclusions du Conseil européen de décembre 2016, il est fait état de l’importance de surmonter les obstacles actuels en matière de gestion de l’information et d’améliorer l’interopérabilité et l’interconnexion des systèmes d’information existants. Le groupe d’experts à haut niveau sur les systèmes d’information et l’interopérabilité de la Commission évalue les options envisageables pour y parvenir. L’approche du groupe d’experts à haut niveau, fondée sur une coopération pluridisciplinaire et interagences telle qu’elle est décrite dans le programme européen en matière de sécurité, inclut des synergies potentielles avec les systèmes d’information pour les autorités chargées de la gestion des frontières, les autorités répressives et les autorités douanières telles qu’elles sont exposées dans la gouvernance de l’union douanière de l’Union européenne.

Pour accélérer la mise en œuvre, le groupe d’experts à haut niveau sur les systèmes d’information et l’interopérabilité a présenté, le 21 décembre, un rapport intermédiaire de son président assorti d’une proposition de création d’un portail de recherche unique permettant aux autorités répressives et aux autorités chargées de la gestion des frontières sur le terrain d'effectuer des recherches simultanées dans les bases de données et les systèmes d’information existants de l’Union européenne. Les autorités compétentes des États membres pourront aussi effectuer de telles recherches simultanées dans les bases de données d’Europol, grâce à une interface système qu'Europol développe actuellement en coopération avec les États membres. Le rapport souligne également l’importance de la qualité des données et formule des recommandations pour améliorer cette qualité dans les systèmes de l’UE.

Le groupe d’experts à haut niveau présentera son rapport final au cours du premier semestre de 2017. En se fondant sur ces conclusions et sur des discussions avec le Parlement européen et le Conseil, la Commission envisagera des mesures pour améliorer encore davantage l’interopérabilité des systèmes d’information de l’UE et accroître leur efficacité en ce qui concerne la réponse à apporter aux menaces actuelles en matière de sécurité.

IV.    CONCLUSION

La Commission continuera de faire avancer les travaux sur la mise en œuvre du programme européen en matière de sécurité, afin de progresser vers une union de la sécurité réelle et effective, et rendra compte des nouveaux progrès en janvier. Le rapport de janvier portera sur le renforcement de nos moyens de défense, y compris sur la base du rapport intermédiaire du groupe d’experts à haut niveau sur les systèmes d’information et l’interopérabilité.

(1)  COM(2015) 625 final.
(2)  Y compris le protocole additionnel à la convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme et les normes du Groupe d’action financière (GAFI).
(3)  COM(2006) 93 final.
(4)  Lors de la réunion du COREPER du 20 décembre 2016 consacrée au texte de la directive relative aux armes à feu ayant fait l’objet de l’accord des colégislateurs, la Commission a publié une déclaration dans laquelle elle a regretté que certaines parties plus ambitieuses de la proposition initiale, en particulier la proposition d'interdiction complète des armes à feu semi-automatiques les plus dangereuses, n’aient pas suscité l’adhésion du Parlement et du Conseil.
(5)  C(2016) 7647 final, C(2016) 7650 final et C(2016) 7657 final.
(6)  COM (2015) 670 final.
(7)  COM(2016) 050 final.
(8)  COM(2016) xxx.
(9)  Convention du Conseil de l’Europe de 2005 relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime et au financement du terrorisme, STCE nº 198, [qui demande aux pays d’ériger en infraction le blanchiment des produits issus d’une grande variété d’infractions principales (en fournissant une liste de catégories d’infractions principales) ainsi que les activités accessoires, sans qu’il soit nécessaire de déterminer si l’infraction principale relève de la compétence des juridictions pénales du pays où a eu lieu l’infraction liée au blanchiment de capitaux, et obligeant les pays à s’assurer qu’une condamnation pour blanchiment est possible en l’absence de condamnation préalable ou concomitante au titre de l’infraction principale et sans qu'il soit nécessaire de prouver de quelle infraction principale précise il s'agit].
(10)  http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2005:309:0009:0012:FR:PDF.
(11) COM(2016) xxx.
(12)  Directive 2014/42/UE concernant le gel et la confiscation des instruments et des produits du crime dans l’Union européenne.
(13)  COM(2016) 826.
(14)  Résultats de l’enquête sur le financement du terrorisme, FATF/PLEN(2015)36.
(15)  Cependant, la Commission estime qu’aucun fondement de droit national ou international ne permet d'établir une distinction entre le terrorisme international et le terrorisme intérieur.
(16)  «Changes in Modus Operandi of IS revisited»; Europol, 2 décembre 2016.
(17)  Rapport sur la situation et les tendances du terrorisme dans l’Union européenne (TE-SAT) 2016, Europol.
(18)  Décision (PESC) 2016/1693 du Conseil concernant des mesures restrictives à l’encontre de l’EIIL (Daech) et d’Al-Qaida et de personnes, groupes, entreprises et entités associés, et abrogeant la position commune 2002/402/PESC, et règlement (UE) 2016/1686 du Conseil du 20 septembre 2016 instituant des mesures restrictives supplémentaires à l’encontre de l’EIIL (Daech) et d’Al-Qaida ainsi que des personnes physiques et morales, des entités ou des organismes qui leur sont liés.
(19)  https://ec.europa.eu/priorities/sites/beta-political/files/joint-declaration-legislative-priorities-2017_en.pdf.
(20)  Voir la communication intitulée «Des systèmes d’information plus robustes et plus intelligents au service des frontières et de la sécurité», COM(2016) 205 final du 6.4.2016.
(21)  En 2015, les autorités nationales compétentes ont réalisé près de 2,9 milliards de vérifications portant sur des personnes et des objets à partir de données figurant dans le SIS et ont échangé plus de 1,8 million d’éléments d’information supplémentaires.
(22)  COM(2016) 883.
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