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Document 52014DC0158
COMMUNICATION FROM THE COMMISSION TO THE EUROPEAN PARLIAMENT AND THE COUNCIL A new EU Framework to strengthen the Rule of Law
COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL Un nouveau cadre de l'UE pour renforcer l'état de droit
COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL Un nouveau cadre de l'UE pour renforcer l'état de droit
/* COM/2014/0158 final */
COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL Un nouveau cadre de l'UE pour renforcer l'état de droit /* COM/2014/0158 final */
TABLE DES MATIÈRES COMMUNICATION
DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL Un nouveau cadre de l'UE
pour renforcer l'état de droit 1............ Introduction. 2 2............ Pourquoi l’État de droit revêt-il une importance
fondamentale pour l’UE?. 4 3............ Pourquoi faut-il un nouveau cadre à l'UE pour renforcer
l'état de droit?. 5 4............ Fonctionnement du nouveau cadre de l’UE pour l’état de
droit 7 4.1......... Déclenchement des mécanismes prévus par le nouveau cadre. 7 4.2......... Un cadre conçu comme un processus en trois étapes. 8 5............ Conclusion. 10
1.
Introduction
L’état
de droit est la clé de voûte de toute démocratie constitutionnelle moderne. Il
s’agit de l’un des principes fondateurs découlant des traditions
constitutionnelles communes à tous les États membres de l’UE et, en tant que
tel, de l’une des valeurs premières sur lesquelles repose l’Union. Ce fait est
rappelé à l’article 2 du traité sur l’Union européenne (TUE), ainsi que
dans les préambules du traité et de la Charte des droits fondamentaux de
l’Union européenne. C’est également la raison pour laquelle, en vertu de
l’article 49 du TUE, le respect de l’état de droit est une condition
préalable à l’adhésion à l’UE. Avec la démocratie et les droits de l’homme,
l'état de droit forme l'un des trois piliers du Conseil de l'Europe et il est
consacré, sous la formulation alternative de «prééminence du droit», dans le
préambule de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et
des libertés fondamentales (CEDH)[1] . L’Union
est fondée sur une confiance mutuelle entre les États membres et entre leurs
systèmes juridiques respectifs. Le mode de mise en œuvre de l’état de droit au
niveau national joue un rôle déterminant à cet égard. La confiance de tous les
citoyens de l’Union et des autorités nationales dans le fonctionnement de
l’état de droit est capitale pour la poursuite de l'évolution de l’UE vers «un
espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures»[2].
Or cette confiance ne peut être gagnée et maintenue que si l’état de droit est
respecté dans tous les États membres. Les
constitutions et systèmes de justice respectifs des États membres de l’UE sont,
en principe, bien conçus et bien pourvus pour protéger les citoyens de toute
menace contre l’état de droit. Toutefois, des événements récemment survenus
dans certains États membres ont montré que le mépris de l’état de droit et, par
conséquent, des valeurs fondamentales qu'il a vocation à protéger, peut devenir
très préoccupant. Au cours de ces événements, les citoyens se sont clairement
exprimés en faveur d'une intervention de l’UE, et notamment de la Commission.
Des résultats ont été obtenus. Cependant, la Commission et l’UE se devaient de
trouver des solutions ad hoc, puisque les mécanismes et procédures actuellement
prévus par le droit de l’UE n’ont pas toujours été adaptés pour réagir efficacement
et au bon moment aux atteintes portées à l’état de droit. La
Commission étant gardienne des traités, il lui incombe de faire respecter les
valeurs sur lesquelles l’UE est fondée et de protéger l’intérêt général de
l’Union. Elle doit, dès lors, jouer un rôle actif à cet égard[3].
En septembre 2012, dans son discours annuel sur l’état de l’Union devant le
Parlement européen, le président Barroso avait déclaré: «Il importe que nous
nous dotions d’un arsenal mieux conçu qui ne se borne pas à l’alternative entre
le pouvoir d'influence de la persuasion politique et l'«option nucléaire» de
l'article 7 du TUE». Dans son discours de l’année suivante, il mentionnait que
«l’expérience a confirmé toute l’utilité de la Commission dans son rôle
d’arbitre indépendant et impartial. Nous devons consolider cette expérience en
adoptant un cadre plus général [...]. La Commission va présenter une
communication à ce sujet. Je pense qu'il s’agit d’un débat essentiel pour notre
vision de l’Europe.»[4] En
juin 2013, le Conseil Justice et affaires intérieures soulignait que «le
respect de l’état de droit est une condition préalable à la protection des
droits fondamentaux» et il invitait la Commission «à faire avancer le débat,
conformément aux traités, sur la nécessité éventuelle d’une méthode
systématique, fondée sur la collaboration, pour traiter ces questions, et sur
et la forme qu'elle pourrait prendre». En avril 2013, le Conseil «Affaires
générales» avait mené une discussion approfondie sur le sujet[5]. En
juillet 2013, le Parlement européen demandait que «les États membres soient
régulièrement évalués quant à la manière dont ils assurent le respect permanent
des valeurs fondamentales de l'Union et des critères de la démocratie et de
l'état de droit [...]»[6]. La
présente communication répond à ces demandes. Sur la base de l’expérience
acquise par la Commission, du débat interinstitutionnel qui a eu lieu et de
larges consultations menées[7], la communication définit un nouveau
cadre destiné à protéger l’état de droit, de manière efficace et cohérente,
dans tous les États membres. Ce cadre doit permettre de réagir lorsqu'une
menace systémique plane sur l’état de droit et de résoudre cette situation[8]. Ce
cadre vise à mettre fin aux menaces qui pèseraient à l'avenir sur l’état de
droit dans les États membres, avant que les conditions d’activation des
mécanismes prévus à l’article 7 du TUE ne soient réunies. Il vient donc
combler une lacune. Il n'a pas vocation à remplacer, mais plutôt à précéder et
à compléter lesdits mécanismes. Il ne remet pas non plus en cause le pouvoir de
la Commission de traiter des situations particulières relevant du droit de
l’Union par la procédure d’infraction prévue à l’article 258 du traité sur
le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). D’un
point de vue plus large à l'échelle européenne, ce cadre doit contribuer à la
réalisation des objectifs du Conseil de l’Europe, notamment grâce à l’expertise
de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de
Venise)[9].
2.
Pourquoi l’État de droit revêt-il
une importance fondamentale pour l’UE?
Le
principe de l’état de droit est progressivement devenu un modèle d’organisation
dominant dans le droit constitutionnel moderne et dans les organisations
internationales (dont les Nations unies et le Conseil de l’Europe) pour
encadrer l’exercice de la puissance publique. Il garantit que toutes les
autorités publiques agissent dans les limites fixées par la loi, conformément
aux valeurs de la démocratie et des droits fondamentaux, et sous le contrôle de
juridictions indépendantes et impartiales. La
teneur précise des principes et des normes découlant de l'état de droit peut
varier d'un État membre à l'autre, en fonction de son système constitutionnel.
Néanmoins, la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne
(ci-après «la Cour de justice») et de la Cour européenne des droits de l’homme,
ainsi que des documents élaborés par le Conseil de l’Europe, qui reposent
notamment sur l’expertise de la Commission de Venise, fournissent une liste non
exhaustive de ces principes et définissent ainsi la substance de l’état de
droit, valeur commune de l’Union européenne au sens de l’article 2 du TUE. Parmi
ces principes figurent celui de la légalité, qui, pour l'essentiel,
suppose l'existence d'une procédure d'adoption des textes de loi transparente,
responsable, démocratique et pluraliste; la sécurité juridique; l'interdiction
de l'arbitraire du pouvoir exécutif; des juridictions indépendantes et
impartiales; un contrôle juridictionnel effectif, y compris le respect
des droits fondamentaux; et l'égalité devant la loi[10]. La
Cour de justice et la Cour européenne des droits de l’homme ont toutes deux
confirmé que ces principes ne constituaient pas des exigences purement
formelles et procédurales. Elles sont le moyen d’assurer la mise en œuvre et le
respect de la démocratie et des droits de l’homme. L’état de droit est donc un
principe constitutionnel doté d'un contenu à la fois formel et matériel[11]. Ainsi,
le respect de l'état de droit est intrinsèquement lié à celui de la démocratie
et des droits fondamentaux: les seconds ne sauraient exister sans le premier,
et vice-versa. Les droits fondamentaux ne sont effectifs que s'ils peuvent être
invoqués en justice (droits «justiciables»). La démocratie n'est protégée que
si le rôle fondamental du système judiciaire, notamment des juridictions
constitutionnelles, est de nature à garantir la liberté d’expression, la
liberté de réunion et le respect des règles régissant le processus politique et
électoral. Au
sein de l’UE, l’état de droit revêt une importance toute particulière. Son
respect est une condition indispensable non seulement à la protection de toutes
les valeurs fondamentales visées à l'article 2 du TUE, mais aussi au
respect de l'ensemble des droits et obligations découlant des traités et du
droit international. La confiance de tous les citoyens de l’Union et des
autorités nationales dans les systèmes juridiques de tous les autres États
membres est capitale pour que l’UE dans son ensemble fonctionne comme «un
espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures».
Aujourd’hui, une décision de justice nationale rendue en matière civile ou
commerciale doit être automatiquement reconnue et exécutée dans un autre État
membre, et un mandat d’arrêt européen délivré dans un État membre contre un
criminel présumé doit être exécuté tel quel dans un autre État membre[12].
Ces exemples expliquent clairement la raison pour laquelle tous les États
membres ont lieu de s'inquiéter si le principe de l'état de droit n’est pas pleinement
respecté dans l'un d'entre eux. C’est pourquoi l’Union a tout intérêt à
préserver et à renforcer l’état de droit sur l’ensemble de son territoire.
3.
Pourquoi faut-il un nouveau
cadre à l'UE pour renforcer l'état de droit?
Lorsque
les mécanismes mis en place à l'échelle nationale pour garantir l’état de droit
cessent de fonctionner correctement, une menace systémique plane sur l’état de
droit et, partant, sur le fonctionnement de l’Union européenne en tant
qu’espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures. En
pareille situation, l’UE doit agir pour protéger la valeur commune de l’Union
qu'est l’état de droit. Or
l’expérience a montré que les instruments existant actuellement au niveau de
l’Union ne peuvent pas, en toutes circonstances, mettre fin à une telle menace
dans les États membres. L'initiative
prise par la Commission d'engager des procédures d'infraction, en vertu
de l'article 258 du TFUE, a certes prouvé son utilité pour résoudre
certains problèmes liés à l'état de droit[13]. Mais la Commission ne peut engager
la procédure d’infraction que lorsque ces problèmes constituent, simultanément,
une violation d’une disposition du droit de l’UE[14]. Or il
existe des situations préoccupantes qui ne relèvent pas du champ d’application
du droit de l’UE et ne peuvent donc pas être considérées comme une violation
des obligations prévues par les traités, mais qui n'en représentent pas moins
une menace systémique pour l’état de droit. Les mécanismes de prévention et
de sanction prévus à l’article 7 du TUE peuvent s’appliquer à de
telles situations. La Commission compte parmi les acteurs que le traité
habilite à émettre une proposition motivée pour activer ces mécanismes.
L'article 7 du TUE vise à assurer que tous les États membres respectent
les valeurs communes de l’UE, y compris l’état de droit. Son champ
d’application ne se borne pas à celui du droit de l’Union, mais autorise cette
dernière à intervenir, pour protéger l’état de droit, également dans des
domaines relevant de l'action autonome des États membres. Ainsi que l'explique
la communication de la Commission sur l’article 7 du TUE, cela se justifie
par le fait que «des violations par un État membre des valeurs fondamentales
qui atteignent la gravité requise pour l'article 7 TUE risquent de
miner les fondements même de l'Union et de la confiance entre ses membres, quel
que soit le domaine dans lequel ces violations surviennent»[15]. Néanmoins,
le mécanisme de prévention prévu à l'article 7, paragraphe 1, du TUE
ne peut être activé qu'en cas de «risque clair de violation grave», et le
mécanisme de sanction décrit à l'article 7, paragraphe 2, seulement
si l'on constate une «violation grave et persistante par un État membre des
valeurs visées à l'article 2» du TUE. Les seuils d’activation des deux
mécanismes prévus par l'article 7 sont très élevés et soulignent qu'il
s'agit de mesures de dernier ressort. Des
événements survenus récemment dans certains États membres ont montré que ces
mécanismes ne sont pas toujours appropriés pour réagir rapidement aux menaces
qui pèsent sur l’état de droit dans un État membre. Il y a
donc des situations dans lesquelles les menaces visant l'état de droit ne
peuvent être combattues efficacement par les instruments existants[16].
Un nouveau cadre de l’UE pour renforcer l’état de droit, valeur commune
essentielle de l’UE, est dès lors nécessaire en plus des procédures
d’infraction et des mécanismes de l’article 7 du TUE. Il complètera tous
les mécanismes déjà en vigueur au niveau du Conseil de l’Europe pour protéger l’état
de droit[17]. Il témoigne de la volonté de l’UE
de protéger ses valeurs fondatrices, d'une part, et d'atteindre un degré plus
élevé de confiance mutuelle et d’intégration dans l'espace de liberté, de
sécurité et de justice sans frontières intérieures, d'autre part. En
instituant un nouveau cadre pour renforcer l’état de droit, la Commission
cherche à rendre plus claires et plus prévisibles les mesures qu’elle pourrait
être appelée à prendre à l’avenir, tout en veillant à ce que les États membres
soient tous traités sur un pied d’égalité. Sur la base de la présente
communication, la Commission est disposée à poursuivre les discussions avec les
États membres, le Conseil et le Parlement européen sur ces questions.
4.
Fonctionnement du nouveau cadre
de l’UE pour l’état de droit
Le
cadre a pour objectif de permettre à la Commission de trouver une solution avec
l'État membre concerné, afin d'y empêcher l'apparition d'une menace systémique
envers l'état de droit qui pourrait se transformer en un «risque clair de violation
grave» au sens de l'article 7 du TUE, nécessitant le déclenchement des
mécanismes prévus audit article. Afin
de garantir l’égalité entre les États membres, le cadre s’appliquera de la même
manière à tous et fonctionnera selon les mêmes critères pour déterminer ce
qu'il convient de considérer comme une menace systémique envers l'état de
droit.
4.1.
Déclenchement des mécanismes
prévus par le nouveau cadre
Le
cadre sera activé lorsque les autorités d’un État membre prendront des mesures,
ou toléreront des situations, qui sont susceptibles de porter atteinte de
manière systématique à l'intégrité, à la stabilité ou au bon fonctionnement des
institutions et aux mécanismes de protection prévus au niveau national pour
garantir l'état de droit. Le
nouveau cadre de l’UE pour l’état de droit n’est pas censé être déclenché par
des cas isolés de violation des droits fondamentaux ni par une erreur
judiciaire. Ces cas peuvent et doivent être traités par les systèmes
judiciaires nationaux, ainsi que dans le contexte des mécanismes de contrôle
créés par la convention européenne des droits de l’homme, à laquelle tous les
États membres de l'UE sont parties. L'objectif
principal du cadre est de faire face aux menaces envers l'état de droit
(telles que définies au point 2) qui sont de nature systémique[18].
Il faut que l'ordre politique, institutionnel et/ou juridique d'un État membre
en tant que tel, sa structure constitutionnelle, la séparation des pouvoirs,
l'indépendance ou l'impartialité du pouvoir judiciaire ou le système de contrôle
juridictionnel, y compris la justice constitutionnelle lorsqu'elle existe, soit
menacé(e), par exemple en raison de l'adoption de nouvelles mesures ou de
l'existence de pratiques répandues dans les autorités publiques, et de
l'absence de voies de recours à l'échelon national. Le cadre sera activé
lorsque les «mécanismes de protection de l'état de droit» nationaux ne
sembleront pas en mesure de mettre fin à ces menaces. Le
cadre n’empêcherait pas la Commission de faire usage de ses pouvoirs au titre
de l’article 258 du TFUE dans les situations relevant du champ
d’application du droit de l’Union. Il n'interdirait pas non plus d'activer
directement les mécanismes prévus à l'article 7 du TUE si une
détérioration soudaine survenant dans un État membre nécessitait une réaction
plus ferme de l'UE[19].
4.2.
Un cadre conçu comme un
processus en trois étapes
S’il
existe des indices clairs d’une menace systémique envers l’état de droit dans
un État membre, la Commission engagera un échange structuré avec cet État. Ce processus
repose sur les principes suivants: – chercher avant tout à trouver une solution par un dialogue
avec l’État membre concerné; – réaliser une évaluation objective et complète de
la situation en cause; – respecter le principe de l'égalité de
traitement entre les États membres; – indiquer des mesures rapides et concrètes
qui pourraient être prises pour mettre fin à la menace systémique et éviter le
recours aux mécanismes de l'article 7 du TUE. Le
processus se compose, en principe, de trois étapes: une évaluation par la
Commission, une recommandation de cette dernière et un suivi de la
recommandation. Évaluation
par la Commission La
Commission rassemblera et examinera toutes les informations utiles et elle
appréciera s'il existe des indices clairs d'une menace systémique envers l'état
de droit, ainsi qu'il est décrit ci‑dessus. Cette évaluation peut être fondée
sur des indications provenant des sources disponibles et d'institutions
reconnues, dont notamment les instances du Conseil de l’Europe et l’Agence des
droits fondamentaux de l’Union européenne[20]. Si, à
la suite de cette évaluation préliminaire, la Commission est d’avis qu’il
existe en effet une situation de menace systémique envers l’état de droit, elle
engage un dialogue avec l’État membre concerné en lui adressant un «avis sur
l'état de droit» motivant ses préoccupations, et en lui donnant la possibilité
de répondre. L’avis pourrait être le résultat d’un échange de correspondance et
de réunions avec les autorités compétentes et, s'il y a lieu, être suivi
d’autres échanges. La
Commission attend de l’État membre concerné qu'il coopère tout au long du
processus et s’abstienne d'adopter une quelconque mesure irréversible en
rapport avec les questions soulevées par la Commission, dans l'attente de leur
évaluation, conformément au principe de coopération loyale prévu à
l'article 4, paragraphe 3, du TUE. Si un État membre ne coopère pas
ou fait obstruction au processus, ce fait sera pris en considération lors de
l'évaluation de la gravité de la menace. À ce premier
stade, la Commission rendra public le fait qu'elle a engagé une évaluation et a
envoyé un avis, mais le contenu des échanges avec l'État membre concerné sera,
en principe, maintenu confidentiel, afin de faciliter une solution rapide. Recommandation
de la Commission Dans
un deuxième temps, si le problème n'a pas trouvé de solution satisfaisante
entretemps, la Commission adressera à l'État membre concerné une
«recommandation sur l'état de droit» , si elle constate qu'il existe des
éléments objectifs indiquant l'existence d'une menace systémique et que les
autorités de l'État membre ne prennent pas les mesures appropriées pour y
remédier. Dans
sa recommandation, la Commission indiquera clairement les motifs de ses
inquiétudes et elle recommandera à l’État membre de résoudre les problèmes
recensés dans un certain délai et de l'informer des mesures prises à cet effet.
Si nécessaire, la recommandation peut préconiser des moyens et des mesures pour
remédier à la situation. L’évaluation
et les conclusions de la Commission s'appuieront sur les résultats du dialogue
avec l'État membre concerné ainsi que sur tout élément supplémentaire, à propos
duquel l'État membre devrait aussi être entendu au préalable. La
Commission rendra publics le fait d'avoir envoyé une recommandation et les
principaux éléments de celle-ci. Suivi
de la recommandation de la Commission: Dans
un troisième temps, la Commission contrôlera le suivi donné à sa recommandation
par l'État membre concerné. Ce suivi peut reposer sur de nouveaux échanges avec
l’État membre et pourrait, par exemple, porter sur la persistance ou non de
certaines pratiques préoccupantes, ou sur la manière dont l'État membre
applique les engagements qu'il a pris entretemps pour remédier à la situation. Faute
de suite satisfaisante donnée à la recommandation dans le délai imparti, la
Commission envisagera de recourir à l'un des mécanismes prévus à
l'article 7 du TUE[21]. Interaction
entre les institutions Le
Parlement européen et le Conseil seront informés régulièrement et en détail des
progrès accomplis à chacune des trois étapes. Mise
à profit de l'expérience de tiers Afin
d’acquérir des connaissances spécialisées sur des questions particulières liées
à l'état de droit dans les États membres, la Commission peut, notamment durant
la phase d'évaluation, demander conseil à des experts extérieurs, y compris
auprès de l’Agence des droits fondamentaux de l’UE[22].
Cette expertise externe pourrait notamment aider à établir une analyse
comparative des règles et pratiques existant dans d'autres États membres, afin
d'assurer l'égalité de traitement entre ces derniers, sur la base d'une
conception commune de l'état de droit dans l'UE. En
fonction de la situation, la Commission peut décider de demander aide et
conseil aux membres des réseaux judiciaires existant dans l'UE, tels que le
Réseau des présidents des Cours suprêmes de l'UE[23],
l'Association des Conseils d'État et des Juridictions administratives suprêmes
de l'UE[24] ou encore les conseils de la justice[25].
La Commission examinera avec ces réseaux comment ils peuvent apporter cette
aide rapidement, lorsque c'est approprié, et si des dispositions particulières
sont nécessaires à cette fin. En
règle générale et lorsque cela est approprié, la Commission demandera l'avis du
Conseil de l'Europe et/ou de sa Commission de Venise et elle effectuera son
analyse en coordination avec ces instances dans tous les cas où la question est
également en cours d’examen et d’analyse auprès d'elles.
5.
Conclusion
La
présente communication définit un nouveau cadre de l’UE pour l’état de droit,
la Commission venant ainsi renforcer la capacité de l'Union d'assurer une
protection effective et égale de l'état de droit dans tous les États membres.
Elle répond en cela aux demandes du Parlement européen et du Conseil. Elle est basée
sur les compétences de la Commission telles qu'elles sont prévues par les
traités existants, sans pour autant exclure de futures évolutions des traités
en la matière, qui devront être débattues dans le cadre de la réflexion plus
large sur l'avenir de l'Europe. Outre l’action de la Commission, le rôle du
Parlement européen et du Conseil sera essentiel pour renforcer la détermination
de l'Union à défendre l’état de droit. [1] Voir le préambule de la CEDH et l'article 3 du
statut du Conseil de l'Europe (http://conventions.coe.int/Treaty/FR/Treaties/Html/001.htm). [2] Voir l'article 3, paragraphe 2, du TUE et
l'article 67 du TFUE. [3] Voir le discours de Mme Reding,
vice-présidente et commissaire à la justice, «The EU and the Rule of Law – What
next?»(http://europa.eu/rapid/press-release_SPEECH-13-677_en.htm). [4] Voir http://europa.eu/rapid/press-release_SPEECH-12-596_fr.htm
et http://europa.eu/rapid/press-release_SPEECH-13-684_fr.htm [5] En mars 2013, les ministres des affaires étrangères du
Danemark, de la Finlande, de l’Allemagne et des Pays-Bas avaient demandé
davantage de garanties européennes pour que soit assuré le respect des valeurs
fondamentales de l’Union dans les États membres. Pour la discussion au sein du
Conseil «Affaires générales», voir http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_Data/docs/pressdata/EN/genaff/136915.pdf.
Pour les conclusions du Conseil «Justice et affaires intérieures» voir http://www.consilium.europa.eu/uedocs/cms_data/docs/pressdata/fr/jha/137405.pdf [6] Voir les résolutions du Parlement européen formulant
différentes recommandations à l’intention des institutions de l'UE sur la
manière de renforcer la protection de l’article 2 du TUE (rapport de Rui
Tavares de 2013, rapports de Louis Michel et de Kinga Göncz de 2014 - http://www.europarl.europa.eu/committees/fr/libe/reports.html). [7] Aux Assises de la Justice,
conférence de haut niveau sur l'avenir de la justice dans l'UE, qui s'est tenue
en novembre 2013 et à laquelle ont assisté plus de 600 acteurs et
parties prenantes, une séance était spécifiquement consacrée au thème «Vers un
nouveau mécanisme pour l'État de droit». Un appel aux contributions a été lancé
avant et après la conférence, et a suscité de nombreuses réponses écrites (voir
http://ec.europa.eu/justice/events/assises-justice-2013/contributions_en.htm). [8] Comme le président Barroso le
soulignait dans son discours sur l’état de l’Union de septembre 2013, le cadre
devrait être «fondé sur le principe d’égalité entre États membres, et [...] ne
serait activé, en fonction de critères prédéfinis, que dans les situations où
une menace grave et systémique planerait sur l’[é]tat de droit» (voir http://europa.eu/rapid/press-release_SPEECH-13-684_fr.htm). [9] La Commission de Venise, dont l'appellation officielle
est la Commission européenne pour la démocratie par le droit, est l'organe
consultatif du Conseil de l’Europe sur les questions constitutionnelles (voir http://www.venice.coe.int/WebForms/pages/default.aspx?p=01_Presentation). [10] Pour un aperçu de la jurisprudence pertinente sur l’état
de droit et les principes qu'il recouvre, voir l’annexe I. [11] La Cour de justice ne considère pas l’état de droit comme
une simple exigence formelle et procédurale, elle met également en évidence sa
valeur intrinsèque en précisant qu’une «Union de droit» signifie que ses
institutions sont soumises au contrôle de la conformité de leurs actes avec,
non seulement, le traité, mais aussi avec «les principes généraux du droit dont
font partie les droits fondamentaux» (voir, entre autres,
l’affaire C-50/00 P, Unión de Pequeños Agricultores/Conseil,
Rec. 2002, p. I-6677, points 38 et 39; les affaires jointes
C-402/05 P et C-415/05 P, Kadi, Rec. 2008, p. I-6351, point
316).Ce point de vue a également été confirmé par la Cour européenne des droits
de l’homme, laquelle confère à l’état de droit un caractère matériel en le
qualifiant de notion inhérente à l'ensemble des articles de la CEDH (voir, par
exemple, l'arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du
28 mai 2002, Stafford/Royaume-Uni, point 63). Il y a lieu de
souligner que, dans la version française, la Cour n’utilise pas uniquement les
termes «prééminence du droit», mais également «État de droit». [12] Voir l’affaire C-168/13, Jeremy F/Premier ministre, non
encore publiée au Recueil, points 35 et 36. [13] Voir, par exemple, l'affaire C-286/12, Commission/Hongrie,
non encore publiée au Recueil (égalité de traitement en ce qui concerne la mise
à la retraite obligatoire des juges et des procureurs); C-518/07,
Commission/Allemagne, Rec. 2010, p. I-1885, et C-614/10,
Commission/Autriche, non encore publiée (indépendance des autorités de
protection des données). [14] L’action menée par la Commission pour faire respecter la
Charte des droits fondamentaux illustre cette limite juridique posée par le
traité lui-même. Ainsi qu'elle l'expliquait dans sa
communication intitulée «Stratégie pour la mise en œuvre effective de la Charte
des droits fondamentaux de l’Union européenne» du 19 octobre 2010
(COM(2010) 573 final), la Commission est déterminée à utiliser tous les moyens
à sa disposition pour assurer le respect intégral de la Charte par les États
membres. Il s’agit, en particulier, de l’article 47 de la Charte, qui
prévoit que toute personne dont les droits garantis par le droit de l’Union ont
été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal indépendant.
Toutefois, la Commission a le pouvoir d'agir de la sorte vis-à-vis des États
membres «uniquement lorsqu'ils mettent en œuvre le droit de l'Union», ainsi que
le mentionne explicitement l'article 51 de la Charte. Voir, par
exemple, l’affaire C-87/12, Kreshnik Ymeraga et autres/Ministre du travail, de
l’emploi et de l’immigration, non encore publiée au Recueil; l'affaire C-370/12,
Thomas Pringle/Governement of Ireland, Ireland and The Attorney General, non
encore publiée au Recueil, et l’affaire C-617/10, Åklagaren/Hans Åkerberg
Fransson, non encore publiée au Recueil. [15] Communication de la Commission du
15 octobre 2003 intitulée: «Respect et promotion des valeurs sur
lesquelles l’Union est fondée», COM(2003) 606 final. [16] Dans certains cas, il peut être
remédié à des défaillances systémiques de l’état de droit en recourant aux
mécanismes de coopération et de vérification (MCV) qui procèdent des actes
d’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie. Toutefois, ces mécanismes, qui
trouvent leur base juridique directement dans le droit primaire de l’UE, sont
destinés à des situations antérieures à l'adhésion et, par conséquent, des situations
de transition. Ils ne sont donc pas adaptés pour répondre à une menace pesant
sur l’état de droit dans tous les États membres de l’UE. [17] L'article 8 du statut du Conseil de l’Europe prévoit
qu'un État membre qui a «enfreint gravement» le principe de [l’état de] droit
et les droits de l’homme peut être suspendu de son droit de représentation,
voire être expulsé du Conseil de l’Europe. Tout comme les mécanismes prévus à
l’article 7 du TUE, celui-ci n’a jamais été activé. [18] En ce qui concerne la notion de «défaillances systémiques»
dans le respect des droits fondamentaux lorsque les États membres agissent dans
le champ d'application du droit de l'Union, voir, par exemple, les affaires
jointes C-411/10 et C-493/10, N.S., non encore publiées au Recueil, points 94
et 106, et l'affaire C-4/11, Allemagne/Kaveh Puid, non encore publiée au
Recueil, point 36. Quant à la notion de «systémique», ou «structurel», dans le
contexte de la CEDH, voir aussi le rôle joué par la Cour européenne des droits
de l'homme pour identifier les problèmes structurels sous-jacents, tels que
définis dans la résolution Res(2004)3 du Comité des Ministres du
12 mai 2004, sur les arrêts qui révèlent un problème structurel
sous-jacent (https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?id=743257&Lang=fr). [19] Voir également la communication de la Commission du
15 octobre 2003 (voir note en bas de page nº 15). [20] Voir, en particulier, l’article 4, paragraphe 1,
point a), du règlement (CE) nº 168/2007 du Conseil portant
création d’une Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO
L 53, p. 1). [21] Voir également la communication de la Commission du
15 octobre 2003 (voir note en bas de page nº 15). [22] L'Agence des droits fondamentaux peut donner des conseils
dans le cadre de ses missions définies par le règlement (CE)
nº 168/2007 du Conseil (voir note en bas de page nº 20). [23] Réseau des présidents des Cours suprêmes judiciaires de
l'Union européenne (voir http://www.networkpresidents.eu/). [24] Association des Conseils d'État et des Juridictions
administratives suprêmes de l'Union européenne (voir http://www.aca-europe.eu/index.php/fr/). [25] Réseau européen des Conseils de la Justice (voir http://www.encj.eu). Annexe I: L'état de droit, principe fondateur de l'Union L'état
de droit et l'ordre juridique de l'Union L'état
de droit est un principe constitutionnel juridiquement contraignant. Il est
unanimement reconnu comme l'un des principes fondateurs inhérents à tous les
systèmes constitutionnels des États membres de l'UE et du Conseil de l'Europe. Bien
avant que ce principe ne soit expressément mentionné dans les traités de l'UE[1], la Cour de
justice avait souligné, dans son arrêt «Les Verts» de 1986, que l'UE est une
«[Union] de droit en ce que ni ses États membres ni ses institutions
n'échappent au contrôle de la conformité de leurs actes à la charte
constitutionnelle de base qu'est le traité»[2]. Dans
sa jurisprudence, la Cour déclare que l'état de droit est la source de
principes pleinement «justiciables» (c'est-à-dire de principes qui peuvent être
invoqués comme tels devant un juge), qui sont applicables dans l'ordre
juridique de l'UE. Elle souligne, en outre, qu'il s'agit là de principes
généraux du droit qui découlent des traditions constitutionnelles communes aux
États membres. On peut notamment citer: (a)
le principe de légalité,
qui, pour l'essentiel, suppose
l'existence d'une procédure d'adoption des textes de loi transparente,
responsable, démocratique et pluraliste. La Cour confirme que le principe de
légalité constitue un principe fondamental de l'Union, en déclarant que «[...]
dans une communauté de droit, le respect de la légalité doit être dûment
assuré»[3];
(b)
la sécurité
juridique, qui exige,
entre autres, que les règles soient claires et prévisibles et qu'elles ne
puissent être modifiées rétroactivement. La Cour a mis en avant l'importance
que revêt cette sécurité juridique, en déclarant qu'en vertu de ce principe et
de celui de confiance légitime, «[…] la législation [de l'Union] doit être
claire et prévisible pour les justiciables […]». Elle a ajouté que «[…] le
principe de la sécurité des situations juridiques s'oppose à ce que la portée
dans le temps d'un acte [de l'Union] voie son point de départ fixé à une date
antérieure à sa publication et qu'il ne peut en être autrement qu'à titre
exceptionnel, lorsque le but à atteindre l'exige et lorsque la confiance
légitime des intéressés est dûment respectée»[4]; (c)
l'interdiction
de l'arbitraire du pouvoir exécutif. La Cour de justice a jugé: «[i]l n'en demeure pas moins que,
dans tous les systèmes juridiques des États membres, les interventions de la
puissance publique dans la sphère d'activité privée de toute personne, qu'elle
soit physique ou morale, doivent avoir un fondement légal et être justifiées
par les raisons prévues par la loi et que ces systèmes prévoient, en
conséquence, bien qu'avec des modalités différentes, une protection face à des
interventions qui seraient arbitraires ou disproportionnées. L'exigence d'une
telle protection doit donc être reconnue comme un principe général du droit [de
l'Union]. […]»[5]; (d)
l'indépendance
et l'effectivité du contrôle juridictionnel, y compris le respect des droits
fondamentaux. La Cour
a rappelé que l'Union est une Union «de droit dans laquelle ses institutions
sont soumises au contrôle de la conformité de leurs actes, notamment, avec les
traités, les principes généraux du droit ainsi que les droits fondamentaux».
Elle a précisé que cela implique, notamment, que «les particuliers doivent
pouvoir bénéficier d'une protection juridictionnelle effective des droits
qu'ils tirent de l'ordre juridique [de l'Union]». Elle expliquait que le droit
à une telle protection faisait «partie des principes généraux de droit qui découlent
des traditions constitutionnelles communes aux États membres» et qu'il avait
été «consacré par les articles 6 et 13 de la convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales»[6].
(e)
En outre, en ce qui
concerne le lien entre le droit à un procès équitable et la séparation des
pouvoirs, la Cour a expressément déclaré que «[...] le principe général de
droit [de l'Union] selon lequel toute personne a droit à un procès équitable,
qui s'inspire de l'article 6 de la CEDH [...] comporte le droit à un tribunal
indépendant, notamment du pouvoir exécutif [...]»[7].
Le principe de séparation des pouvoirs est, de toute évidence, un élément
indispensable au respect du principe de l'état de droit. Il peut néanmoins
prendre des formes diverses, eu égard aux différents modèles parlementaires et
au degré variable de son application dans les États membres. À cet égard, la
Cour évoquait la séparation fonctionnelle des pouvoirs impliquant un contrôle
juridictionnel indépendant et effectif, en relevant que «[...] le droit de
l’Union ne s’oppose pas à ce qu’un État membre soit à la fois législateur,
administrateur et juge, pour autant que ces fonctions sont exercées dans le
respect du principe de la séparation des pouvoirs qui caractérise le fonctionnement
d’un État de droit»[8]; (f)
l'égalité devant
la loi. La Cour a mis
en avant le rôle que joue l'égalité de traitement en tant que principe général
du droit de l'Union, en déclarant «[i]l y a lieu de rappeler que le principe
d’égalité de traitement constitue un principe général du droit de l’Union,
consacré par les articles 20 et 21 de la charte des droits fondamentaux de
l’Union européenne»[9]. L'état
de droit et le Conseil de l'Europe Les
aspects de l'état de droit qui constituent le dénominateur commun de l'Union se
retrouvent pleinement au niveau du Conseil de l'Europe. Bien qu'aucune
définition ne figure dans le statut de ce dernier ni dans la CEDH[10], et que la
liste précise des principes, normes et valeurs découlant de l'état de droit
soit susceptible de varier d'un État à l'autre, la Commission de Venise, dans
un rapport publié en 2011, évoque cette notion (par la formulation alternative
«prééminence du droit») en la qualifiant de «norme européenne fondamentale et
commune, capable d'orienter et d'encadrer l'exercice du pouvoir démocratique»,
qui «fait partie intégrante de la société démocratique» et «impose aux
décideurs de traiter toute personne de manière digne, égale et rationnelle,
dans le respect du droit et en mettant à sa disposition des voies de recours
pour contester la légalité d'une décision devant des juridictions indépendantes
et impartiales»[11].
Plus concrètement, compte tenu également de la jurisprudence en la matière de
la Cour européenne des droits de l'homme, la Commission de Venise recensait,
dans son rapport, les caractéristiques communes et généralement admises de
l'état de droit, qui sont importantes sans toutefois être exhaustives: (a)
la légalité (qui suppose
l'existence d'une procédure d'adoption des textes de loi transparente, responsable
et démocratique); (b)
la sécurité
juridique; (c)
l'interdiction de
l'arbitraire; (d)
l'accès à la
justice devant des juridictions indépendantes et impartiales; (e)
le respect des
droits de l'homme, la non-discrimination et l'égalité devant la loi. L'état
de droit au niveau national Même
s'il n'a pas de définition précise ni exhaustive dans les constitutions et la
jurisprudence nationales, et s'il n'est pas toujours clairement et uniformément
codifié dans les constitutions écrites, l'état de droit constitue un
dénominateur commun dans les traditions constitutionnelles modernes des pays
européens. Les juridictions nationales s'y réfèrent abondamment pour guider
leur interprétation du droit interne ou elles en font le fondement de nouveaux
principes invocables en justice. Annexe II [1] La première mention de l'état de droit figurait dans le
préambule du traité de Maastricht de 1992. Le traité d'Amsterdam faisait
référence à l'état de droit, en son article 6, paragraphe 1, en des
termes quasi identiques à ceux de l'actuel article 2 du TUE. [2] Affaire 294/83, «Les Verts»/Parlement européen,
Rec. 1986, p. 1339, point 23. [3] Affaire C-496/99 P, Commission/CAS Succhi di
Frutta, Rec. 2004, p. I-3801, point 63. [4] Affaires jointes 212 à 217/80, Amministrazione
delle finanze dello Stato/Salumi, Rec. 1981, p. 2735, point 10. [5] Affaires jointes 46/87 et 227/88,
Hoechst/Commission, Rec. 1989, p. 2859, point 19. [6] Affaire C-583/11 P Inuit Tapiriit Kanatami et
autres/Parlement et Conseil, non encore publiée, point 91; affaire C-550/09
E et F, Rec. 2010, p. I-6213, point 44; affaire C-50/00 P
Unión de Pequeños Agricultores, Rec. 2002, p. I-6677, points 38
et 39. [7] Affaires jointes C-174/98 P et C-189/98 P,
Pays-Bas et Van der Wal/Commission, Rec. 2000, p. I-1, point 17. [8] Affaire C-279/09 DEB, Rec. 2010, p. I-13849,
point 58. [9] Affaire C-550/07 P Akzo Nobel Chemicals et
Akcros Chemicals/Commission, Rec. 2010, p. I-8301, point 54. [10] Le préambule de la déclaration universelle des droits de
l'homme des Nations unies (1948) évoque également cette notion, sous la
formulation alternative «régime de droit», sans toutefois la définir. [11] Rapport de la Commission de Venise du 4 avril 2011,
étude n° 512/2009 (CDL-AD(2011)003rev).