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Dokumentum 62023CC0635
Opinion of Advocate General Rantos delivered on 13 February 2025.#WBS GmbH v Generalstaatsanwaltschaft Berlin.#Request for a preliminary ruling from the Kammergericht Berlin.#Reference for a preliminary ruling – Judicial cooperation in criminal matters – European Investigation Order (EIO) – Directive 2014/41/EU – Article 2(c)(ii) – Concept of ‘other competent authority acting in its capacity as an investigating authority in criminal proceedings’ – Competence to order the gathering of evidence in accordance with national law – Search measures requiring the authorisation of an investigating judge – Article 6(1) and (2) – Conditions for issuing an EIO.#Case C-635/23.
Conclusions de l'avocat général M. A. Rantos, présentées le 13 février 2025.
WBS GmbH.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Kammergericht.
Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière pénale – Décision d’enquête européenne – Directive 2014/41/UE – Article 2, sous c), ii) – Notion d’“autre autorité compétente agissant en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales” – Compétence pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national – Mesures de perquisition requérant l’autorisation d’un juge d’instruction – Article 6, paragraphes 1 et 2 – Conditions d’émission d’une décision d’enquête européenne.
Affaire C-635/23.
Conclusions de l'avocat général M. A. Rantos, présentées le 13 février 2025.
WBS GmbH.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Kammergericht.
Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière pénale – Décision d’enquête européenne – Directive 2014/41/UE – Article 2, sous c), ii) – Notion d’“autre autorité compétente agissant en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales” – Compétence pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national – Mesures de perquisition requérant l’autorisation d’un juge d’instruction – Article 6, paragraphes 1 et 2 – Conditions d’émission d’une décision d’enquête européenne.
Affaire C-635/23.
Európai esetjogi azonosító: ECLI:EU:C:2025:95
CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. ATHANASIOS RANTOS
présentées le 13 février 2025 ( 1 )
Affaire C‑635/23
WBS GmbH
Procédure pénale
en présence de
Generalstaatsanwaltschaft Berlin
[demande de décision préjudicielle formée par le Kammergericht Berlin (tribunal régional supérieur de Berlin, Allemagne)]
« Renvoi préjudiciel – Directive 2014/41/UE – Coopération judiciaire en matière pénale – Décision d’enquête européenne – Article 2, sous c), ii) – Notions d’“autorité d’émission” et d’“autre autorité compétente agissant en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales” – Compétence pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national – Mesures de perquisition requérant l’autorisation d’un juge d’instruction – Article 6, paragraphes 1 et 2 – Conditions d’émission d’une décision d’enquête européenne »
Introduction
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1. |
Une autorité administrative qui, en vertu du droit national, n’est pas compétente pour ordonner une mesure d’enquête dans le cadre d’une procédure pénale nationale, peut-elle ordonner une telle mesure à l’égard d’une entreprise établie dans un autre État membre en émettant une décision d’enquête européenne (ci-après la « DEE ») au titre de la directive 2014/41/UE relative à la DEE en matière pénale ( 2 ) et, dans l’affirmative, à quelles conditions une telle DEE peut-elle être émise ? Telle est, en substance, la question posée par le Kammergericht Berlin (tribunal régional supérieur de Berlin, Allemagne) dans le cadre de la présente demande de décision préjudicielle, qui porte sur l’interprétation de l’article 2, sous c), ii), de cette directive. |
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2. |
Pour rappel, l’article 2, sous c), de la directive 2014/41, qui définit la notion d’« autorité d’émission » d’une DEE, opère une distinction entre deux catégories d’autorités : d’une part, les autorités judiciaires, à savoir « un juge, une juridiction, un juge d’instruction ou un procureur compétent(e) dans l’affaire concernée », visées à l’article 2, sous c), i), de cette directive (ci-après une « autorité judiciaire ») et, d’autre part, les autorités non judiciaires, à savoir « toute autre autorité compétente définie par l’État d’émission qui [...] agit en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales, compétente pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national », visées à l’article 2, sous c), ii), de ladite directive (ci-après une « autorité non judiciaire »). |
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3. |
La demande de décision préjudicielle a été présentée dans le cadre d’une demande d’exécution, en Allemagne, d’une DEE émise par le Korupcijas novēršanas un apkarošanas birojs (bureau de prévention et de lutte contre la corruption, Lettonie, ci-après le « KNAB ») concernant l’entreprise WBS GmbH, établie en Allemagne (ci-après la « DEE en cause »). Ayant fait l’objet d’une perquisition au titre de cette DEE, cette entreprise a saisi la juridiction de renvoi en faisant valoir, en substance, que les éléments de preuve recueillis en exécution de ladite DEE ne sauraient être admis car celle-ci n’aurait pas été émise par une « autorité d’émission » au sens de la directive 2014/41. Plus précisément, le KNAB ne constituerait pas une autorité d’émission au motif, d’une part, qu’il n’agirait pas en tant qu’autorité judiciaire au sens de l’article 2, sous c), i), de cette directive et, d’autre part, qu’il ne remplirait pas les conditions prévues à l’article 2, sous c), ii), de ladite directive, permettant de le qualifier d’« autre autorité compétente », dès lors qu’il ne serait pas compétent « pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national », l’adoption de mesures de perquisition dans le cadre d’une procédure nationale étant, en droit letton, réservée aux seules autorités judiciaires. |
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4. |
Si la Cour a déjà eu l’occasion de préciser les contours de la notion d’« autorité d’émission » au sens de l’article 2, sous c), de la directive 2014/41, et de clarifier la distinction entre les « autorités judiciaires » et les « autres autorités compétentes » au sens de cette disposition ( 3 ), elle est, dans le cadre de la présente affaire, interrogée, de manière inédite, sur l’étendue de la seconde catégorie de ces autorités. |
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
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5. |
Aux termes des considérants 5, 7 et 11 de la directive 2014/41 :
[...]
[...]
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6. |
L’article 1er de cette directive, intitulé « Décision d’enquête européenne et obligation de l’exécuter », énonce : « 1. La [DEE] est une décision judiciaire qui a été émise ou validée par une autorité judiciaire d’un État membre (ci-après dénommé “État d’émission”) afin de faire exécuter une ou plusieurs mesures d’enquête spécifiques dans un autre État membre (ci-après dénommé “État d’exécution”) en vue d’obtenir des preuves conformément à la [directive 2014/41]. La [DEE] peut également être émise pour l’obtention de preuves qui sont déjà en possession des autorités compétentes de l’État d’exécution. 2. Les États membres exécutent une [DEE] sur la base du principe de reconnaissance mutuelle et conformément à la présente directive. [...] » |
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7. |
L’article 2 de ladite directive, intitulé « Définitions », prévoit, sous c) : « Aux fins de la présente directive, on entend par :
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8. |
Conformément à l’article 6 de la même directive, intitulé « Conditions d’émission et de transmission d’une [DEE] » : « 1. L’autorité d’émission ne peut émettre une [DEE] que si les conditions suivantes sont réunies :
2. Dans chaque cas, le respect des conditions visées au paragraphe 1 est vérifié par l’autorité d’émission. 3. Lorsque l’autorité d’exécution a des raisons de penser que les conditions visées au paragraphe 1 n’ont pas été respectées, elle peut consulter l’autorité d’émission sur l’importance d’exécuter la [DEE]. Après cette consultation, l’autorité d’émission peut décider de retirer la [DEE]. » |
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9. |
L’article 9 de la directive 2014/41, intitulé « Reconnaissance et exécution », dispose, à ses paragraphes 1 à 3 : « 1. L’autorité d’exécution reconnaît une [DEE], transmise conformément à la présente directive, sans qu’aucune autre formalité ne soit requise, et veille à ce qu’elle soit exécutée de la même manière et suivant les mêmes modalités que si la mesure d’enquête concernée avait été ordonnée par une autorité de l’État d’exécution, à moins que cette autorité ne décide de se prévaloir de l’un des motifs de non-reconnaissance ou de non-exécution ou de l’un des motifs de report prévus par la présente directive. 2. L’autorité d’exécution respecte les formalités et procédures expressément indiquées par l’autorité d’émission, sauf si la présente directive en dispose autrement et sous réserve que ces formalités et procédures ne soient pas contraires aux principes fondamentaux du droit de l’État d’exécution. 3. Lorsqu’une autorité d’exécution reçoit une [DEE] qui n’a pas été émise par une autorité d’émission telle qu’elle est définie à l’article 2, point c), l’autorité d’exécution renvoie la [DEE] à l’État d’émission. » |
Le droit letton
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10. |
Le cadre juridique letton pour l’adoption d’une DEE est régi par les articles 8871 à 8873 du Kriminālprocesa likums (code de procédure pénale), du 11 mai 2005 ( 6 ). Conformément à l’article 8871, paragraphe 1, de ce code, lorsqu’il est nécessaire, dans le cadre d’une procédure pénale, d’accomplir un acte de procédure sur le territoire d’un autre État membre de l’Union européenne avant d’engager des poursuites, le responsable de la procédure, lorsqu’il établit une DEE, évalue sa proportionnalité et sa nécessité par rapport à l’infraction faisant l’objet de l’enquête, après quoi le procureur en charge de la direction de l’enquête vérifie également la conformité de l’acte de procédure demandé à l’État membre de l’Union avec les exigences de la loi et évalue sa nécessité et sa proportionnalité par rapport à l’infraction faisant l’objet de l’enquête. Avant l’établissement d’une DEE, le responsable de la procédure prend toutes les mesures qui seraient nécessaires si l’acte de procédure était exécuté en Lettonie. |
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11. |
Les perquisitions sont régies par les articles 179 à 185 dudit code. L’article 179, paragraphe 1, de celui-ci définit la perquisition comme une mesure d’enquête ayant pour objet l’investigation forcée de locaux, d’un terrain, d’un véhicule ou d’un individu aux fins de localiser et de saisir l’objet recherché lorsqu’il existe des motifs raisonnables de penser que celui-ci se trouve sur les lieux de la perquisition. |
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12. |
L’article 180, paragraphe 1, du même code dispose que la perquisition est effectuée sur décision d’un juge d’instruction ou d’une juridiction. Le juge d’instruction fonde sa décision sur une proposition présentée par le responsable de la procédure et les pièces qui y sont annexées. |
Le litige au principal, la question préjudicielle et la procédure devant la Cour
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13. |
Le 5 avril 2019, le KNAB a engagé une procédure pénale pour escroquerie à grande échelle, dilapidation illégale de la chose d’autrui à grande échelle ainsi que pour faux et usage de faux à l’encontre de certains agents travaillant pour une fondation établie à Riga (Lettonie). Dans le cadre de son enquête, le KNAB a estimé nécessaire de procéder à une perquisition de locaux commerciaux, situés à Berlin (Allemagne), appartenant aux entreprises FF GmbH et WBS GmbH, et a demandé au juge d’instruction de la Rīgas pilsētas Vidzemes priekšpilsētas tiesa (tribunal de la ville de Riga, arrondissement suburbain de Vidzeme, Lettonie) d’autoriser ces mesures d’enquête, conformément aux articles 179 et 180 du code de procédure pénale letton. |
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14. |
Par ordonnances du 24 avril 2019, ce juge a fait droit à la demande du KNAB, au motif, d’une part, qu’il était raisonnable de penser que ces locaux abritaient des documents, des supports de données et des objets utiles à la procédure et, d’autre part, que les perquisitions, dont l’objet consistait en la localisation et le gel de ces documents, supports et objets, étaient nécessaires et proportionnées. |
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15. |
Le 25 avril 2019, le KNAB, en tant qu’« autorité compétente » au sens de l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41, a émis la DEE en cause, par laquelle il a demandé à la République fédérale d’Allemagne de procéder à l’audition de deux témoins ainsi qu’à l’exécution des ordonnances de perquisition susmentionnées. Le Latvijas Republikas Ģenerālprokuratūra (parquet général de la République de Lettonie, ci-après le « parquet général de la République de Lettonie ») a validé cette DEE et l’a ainsi transmise à la Staatsanwaltschaft Berlin (parquet de Berlin, Allemagne, ci-après le « parquet de Berlin »). |
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16. |
Saisi par le parquet de Berlin, l’Amtsgericht Berlin-Tiergarten (tribunal de district de Berlin-Tiergarten, Allemagne) a ordonné la perquisition des locaux commerciaux des entreprises FF et WBS. Ces perquisitions ont eu lieu le 13 mai 2019 et ont abouti au gel de nombreux éléments de preuve. |
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17. |
Dans le cadre de l’affaire au principal, WBS a saisi le Kammergericht Berlin (tribunal régional supérieur de Berlin), la juridiction de renvoi, d’une demande tendant, notamment, à ce que cette juridiction constate que le transfert à la République de Lettonie des éléments de preuve recueillis en exécution de la DEE en cause en Allemagne ne saurait être admis. |
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18. |
À l’appui de sa demande, WBS a invoqué, notamment, l’arrêt Spetsializirana prokuratura par lequel la Cour aurait jugé qu’une DEE portant sur une mesure d’enquête dont l’adoption est réservée aux seules juridictions en vertu du droit de l’État d’émission ne pourrait être émise que par une juridiction. Or, en l’espèce, la DEE en cause aurait été émise par le KNAB, qui ne constituerait pas une juridiction, alors que, en vertu du droit letton, l’adoption de mesures de perquisition ayant conduit au gel d’éléments de preuve dans le cadre d’une procédure nationale serait réservée aux seules juridictions. Dans ce cadre, la validation de cette DEE par le parquet général de la République de Lettonie aurait porté sur une DEE adoptée par une autorité incompétente. |
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19. |
Le parquet de Berlin a demandé au parquet général de la République de Lettonie si, le cas échéant, la DEE en cause pouvait être à nouveau émise, mais, cette fois-ci, par une juridiction. Ce dernier a répondu par la négative au motif qu’il n’existait, dans le droit letton, aucune base juridique à cet effet. Dans ce contexte, la juridiction de renvoi a ordonné la suspension du transfert des éléments de preuve recueillis. |
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20. |
Avant de statuer sur l’admissibilité de la mesure de coopération judiciaire, cette juridiction souhaite savoir si, comme le soutient WBS, les principes découlant de l’arrêt Spetsializirana prokuratura doivent s’appliquer dans l’affaire au principal, ce qui pourrait la conduire à conclure que le transfert des preuves en exécution de la DEE en cause ne devrait pas être admis ( 7 ), ou bien si, comme le fait valoir le KNAB, la validation préalable des mesures d’enquête par une juridiction de l’État d’émission, conformément aux obligations de vérification et de justification prévues par la directive 2014/41, est suffisante aux fins du transfert de ces preuves. |
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21. |
C’est dans ces conditions que le Kammergericht Berlin (tribunal régional supérieur de Berlin) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante : « Une [DEE] portant sur une mesure d’enquête dont l’adoption est réservée aux seules juridictions en vertu du droit de l’État d’émission, peut-elle être émise par une autre autorité compétente au sens de l’article 2, sous c), ii), de la directive [2014/41], en collaboration avec une autorité (non judiciaire) de validation, lorsque cette mesure a été autorisée au préalable par une juridiction de l’État d’émission qui a ainsi satisfait aux obligations de vérification et de justification prévues dans cette directive ? » |
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22. |
Des observations écrites ont été déposées devant la Cour par WBS, les gouvernements allemand, estonien, letton, polonais et portugais, ainsi que par la Commission européenne. À l’exception des gouvernements estonien et portugais, ces parties ainsi que le gouvernement suédois se sont, en outre, exprimés lors de l’audience de plaidoiries qui s’est tenue le 13 novembre 2024. |
Analyse
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23. |
Par sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41 doit être interprété en ce sens qu’une autorité non judiciaire qui adopte, conformément à son droit national, des mesures d’enquête spécifiques, lesquelles, avant d’être exécutées dans un autre État membre, sont validées par une autorité judiciaire, peut être qualifiée d’« autorité d’émission », au sens de cette disposition, alors que l’adoption de telles mesures d’enquête dans le cadre d’une procédure purement interne relève de la seule compétence des autorités judiciaires. |
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24. |
À mon sens, cette question appelle une réponse affirmative pour les raisons que j’exposerai ci-après. |
Observations liminaires
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25. |
D’emblée, il convient de rappeler que la directive 2014/41 a remplacé le cadre fragmentaire et complexe antérieur en matière d’obtention de preuves dans les affaires revêtant une dimension transfrontalière par l’instauration d’un système simplifié et plus efficace fondé sur un instrument unique, à savoir la DEE. Ce système vise à faciliter et à accélérer la coopération judiciaire en vue de contribuer à réaliser l’objectif assigné à l’Union de devenir un espace de liberté, de sécurité et de justice, en se fondant sur le degré de confiance élevé qui doit exister entre les États membres ( 8 ). Ainsi, la DEE est un instrument relevant de la coopération judiciaire en matière pénale visée à l’article 82, paragraphe 1, TFUE, laquelle est fondée sur le principe de reconnaissance mutuelle des jugements et des décisions judiciaires. Ce principe, qui constitue la « pierre angulaire » de la coopération judiciaire en matière pénale, est lui-même fondé sur la confiance mutuelle et sur la présomption réfragable que les autres États membres respectent le droit de l’Union, notamment, les droits fondamentaux ( 9 ). |
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26. |
Dans ce contexte, l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 2014/41 définit la « décision d’enquête européenne » comme une « décision judiciaire » qui a été émise ou validée par une autorité judiciaire de l’État d’émission afin de faire exécuter une ou plusieurs mesures d’enquête spécifiques dans l’État d’exécution en vue d’obtenir des preuves, y compris celles qui sont déjà en la possession des autorités compétentes de cet État membre ( 10 ). |
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27. |
Aux termes de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2014/41, les États membres exécutent une DEE sur la base du principe de reconnaissance mutuelle et conformément aux dispositions de cette directive. En vertu de l’article 9, paragraphe 1, de ladite directive, l’autorité d’exécution reconnaît une DEE, sans qu’aucune autre formalité soit requise, et veille à ce qu’elle soit exécutée de la même manière et suivant les mêmes modalités que si la mesure d’enquête concernée avait été ordonnée par une autorité de l’État d’exécution. En vertu de cette même disposition, cette autorité peut décider de ne pas exécuter une DEE en se prévalant de l’un des motifs de non-reconnaissance ou de non-exécution ou de l’un des motifs de report prévus par la même directive. En outre, l’article 9, paragraphe 3, de la directive 2014/41 prévoit que, lorsqu’une autorité d’exécution reçoit une DEE qui n’a pas été émise par une autorité d’émission, au sens de l’article 2, sous c), de cette directive, l’autorité d’exécution renvoie cette décision à l’État d’émission ( 11 ). |
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28. |
À cet égard, l’article 2, sous c), de la directive 2014/41 définit, aux fins de cette directive, la notion d’« autorité d’émission ». Ainsi, cette disposition énonce qu’une telle autorité peut être soit, aux termes de son point i), « un juge, une juridiction, un juge d’instruction ou un procureur compétent(e) dans l’affaire concernée » ( 12 ), soit, aux termes de son point ii), première phrase, dont l’interprétation fait l’objet du présent renvoi préjudiciel, « toute autre autorité compétente définie par l’État d’émission qui, dans le cas d’espèce, agit en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales, compétente pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national » ( 13 ). |
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29. |
Il ressort, en outre, de l’article 2, sous c), ii), deuxième phrase, de ladite directive que, lorsqu’une DEE est émise par une autorité non judiciaire, avant d’être transmise à l’autorité d’exécution, cette décision doit être validée par une autorité judiciaire au sens de l’article 2, sous c), i), de la même directive, qui est tenue d’examiner la conformité de ladite décision aux conditions d’émission prévues par la directive 2014/41, en particulier les conditions prévues à l’article 6, paragraphe 1, de celle-ci ( 14 ). Enfin, la même disposition, troisième phrase, prévoit que l’autorité judiciaire ayant validé une telle DEE « peut également » être considérée comme une autorité d’émission aux fins de la transmission de la DEE. |
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30. |
Il découle de ce qui précède qu’une autorité non judiciaire, telle qu’une autorité administrative, est, en principe, susceptible de relever de la notion d’« autorité d’émission » au sens de l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41, dans les conditions rappelées au point précédent des présentes conclusions, à savoir, d’une part, qu’elle soit compétente pour agir en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales ( 15 ) et, d’autre part, que sa DEE soit validée par une autorité judiciaire avant qu’elle ne soit transmise à l’État d’exécution ( 16 ). |
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31. |
En l’occurrence, il est constant que le KNAB, qui n’est pas une autorité judiciaire, a agi, en vertu du droit letton, en tant qu’autorité chargée de l’enquête dans le cadre de la procédure pénale ( 17 ). De la même manière, avant sa transmission à l’État d’exécution, la DEE en cause a été validée par le parquet général de la République de Lettonie, dont la qualité d’« autorité judiciaire » au sens de l’article 2, sous c), i), de cette directive ne fait aucun doute ( 18 ). |
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32. |
En revanche, les doutes exprimés par la juridiction de renvoi portent, en substance, sur le point de savoir si le KNAB répond à la condition, prévue à l’article 2, sous c), ii), de ladite directive, et mentionnée au point 28 des présentes conclusions, d’être une autorité « compétente pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national », dans la mesure où, en vertu du droit letton ( 19 ), dans le cadre d’une procédure pénale nationale, les mesures d’enquête en cause au principal, à savoir les perquisitions, bien qu’elle soient fondées sur une proposition de l’autorité d’enquête compétente, telle que le KNAB, doivent être exécutées sur décision d’un juge d’instruction ou d’une juridiction, et relèvent donc de la compétence exclusive des autorités judiciaires. |
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33. |
Cette question se pose, selon la juridiction de renvoi, d’autant plus que, dans l’arrêt Spetsializirana prokuratura, la Cour a dit pour droit que l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un procureur soit compétent pour émettre une DEE visant à obtenir des données relatives au trafic et des données de localisation liées aux télécommunications lorsque, dans le cadre d’une procédure nationale, l’adoption d’une mesure d’enquête visant à accéder à de telles données relève de la compétence du juge. |
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34. |
Conformément à une jurisprudence constante de la Cour, aux fins de l’interprétation de cette disposition, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle-ci, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie, et, notamment de la genèse de cette réglementation ( 20 ). |
Sur l’interprétation littérale
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35. |
S’agissant, en premier lieu, du libellé de l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41, visé au point 28 des présentes conclusions, il convient d’observer que cette disposition ne prévoit pas que, pour relever de la notion d’« autorité d’émission », une autorité administrative doit nécessairement être l’autorité compétente pour l’adoption de ces mêmes mesures dans le cadre d’une procédure interne. |
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36. |
En effet, ladite disposition n’exige pas que l’émission d’une DEE soit forcément prise par l’autorité qui aurait effectivement été compétente pour ordonner l’obtention des preuves « dans le cadre d’une procédure nationale similaire », comme l’affirment en substance WBS et la Commission, mais se borne à préciser que cette autorité doit être compétente pour ordonner l’obtention de ces preuves « conformément au droit national ». En effet, ces deux expressions ne sauraient être considérées comme synonymes, les termes « compétente pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national » ne faisant aucune référence à une éventuelle équivalence avec une procédure nationale similaire. De surcroît, la même disposition ne s’oppose pas non plus à l’émission d’une DEE par une autorité qui, selon le droit de l’État d’émission, est compétente pour agir en qualité d’autorité chargée des enquêtes, mais ne serait pas l’autorité qui aurait ordonné cette même mesure dans le cadre d’une situation interne. |
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37. |
À cet égard, ainsi qu’il a été rappelé au point 25 des présentes conclusions, le système instauré par la directive 2014/41 repose sur la confiance mutuelle ainsi que sur la présomption réfragable que les autres États membres respectent le droit de l’Union. C’est la raison pour laquelle l’article 2, sous c), ii), de cette directive laisse au seul État d’émission la faculté de « définir » les autorités non judiciaires compétentes et renvoie expressément au droit national à cet effet, tout en précisant les différentes conditions de fond que celui-ci doit prévoir. Partant, il incombe exclusivement à l’État d’émission de définir les autorités non judiciaires qui seraient compétentes pour émettre une DEE, pour autant que les critères énoncés à l’article 2, sous c), ii), de ladite directive soient remplis. Une interprétation contraire ne saurait être retenue, sous peine de priver cette disposition et, notamment, le principe de la reconnaissance mutuelle, de tout effet utile ( 21 ). |
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38. |
C’est donc exclusivement à la lumière des critères énoncés à l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41, lesquels ont été rappelés au point 30 des présentes conclusions, qu’il convient d’apprécier si une autorité administrative, telle que le KNAB, peut être qualifiée d’« autorité d’émission » au sens de cette directive. Or, tel semble être effectivement le cas en l’espèce. |
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39. |
En effet, d’une part, le KNAB est incontestablement investi de responsabilités lui permettant d’agir en « qualité d’autorité chargée des enquêtes » au sens de l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41, dès lors que, en vertu du droit national, il agit en tant que « responsable de la procédure » lors de la phase préliminaire de la procédure pénale en matière de lutte contre la corruption, que ce soit dans le cadre d’une procédure pénale revêtant une dimension nationale ou transfrontalière. À cet égard, il ressort des observations tant écrites qu’orales du gouvernement letton, que, en vertu de l’article 27 du code de procédure pénale, en tant que « responsable de la procédure », le KNAB : « 1) organise le déroulement de la procédure pénale et la gestion des documents y afférents ; 2) prend des décisions sur l’orientation de la procédure pénale ; 3) exerce lui-même ou par l’intermédiaire d’autres fonctionnaires la puissance publique au stade pertinent de la procédure pénale ; 4) exige de toute personne le respect de ses obligations en matière de procédure pénale et des règles de procédure ; 5) veille à ce que les personnes impliquées dans la procédure pénale soient en mesure d’exercer les droits prévus par la loi ». |
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40. |
Cette constatation ne saurait être remise en cause par la circonstance que, en vertu du droit letton, dans le cadre de mesures d’enquête qui sont susceptibles d’entraîner une ingérence dans la vie d’un individu, telles que des perquisitions, le KNAB ne peut pas adopter de telles mesures mais peut seulement les proposer au juge d’instruction, qui est le seul compétent pour les adopter. En effet, ainsi que l’a exposé le gouvernement letton, la décision du juge d’instruction consiste en une « autorisation » de la perquisition proposée par le KNAB, plutôt qu’en une décision indépendante fondée sur des appréciations autonomes des éléments factuels de l’enquête en cause par le juge d’instruction. Plus précisément, il découle des observations du gouvernement letton que, dans le système de procédure pénale letton, le juge d’instruction procède à un contrôle principalement du respect des droits de l’homme dans les procédures pénales et non pas de l’opportunité des différentes mesures d’enquêtes. Partant, toujours selon ce gouvernement, le fait que le juge d’instruction soit l’autorité ordonnant la perquisition ne signifie pas pour autant que la loi nationale lui confie la responsabilité de mener l’enquête dans le cadre des procédures pénales à la place du « responsable de la procédure ». Le KNAB demeurerait ainsi le « responsable de la procédure » auquel incombe la tâche de proposer les mesures d’enquêtes et d’apprécier leur nécessité pour atteindre l’objectif de cette enquête. |
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41. |
D’autre part, il est également incontestable que la condition, exigée à l’article 2, sous c), ii), deuxième phrase, de la directive 2014/41, selon laquelle une DEE doit être validée par une autorité judiciaire, est également remplie. Ainsi qu’il ressort du sens habituel du terme « validation », ce processus exige de la part de l’autorité judiciaire de confirmer la régularité juridique d’une DEE. En effet, conformément au droit letton, la DEE en cause a été validée par le parquet général de la République de Lettonie qui, après avoir vérifié que les preuves recherchées et les mesures d’enquête choisies étaient nécessaires et proportionnées aux fins de l’enquête, l’a transmise au parquet de Berlin aux fins de son exécution en Allemagne. C’est cet acte de validation qui constitue le fondement de cette DEE et qui confère à celle-ci la qualification de « décision judiciaire », exigée par l’article 1er, paragraphe 1), de cette directive. Ainsi, il me semble qu’est dénué de pertinence le fait que, dans le cadre d’une procédure nationale similaire, ces mesures d’enquête auraient dû être adoptées par une autorité judiciaire, dans la mesure où la validation de la DEE en cause par le parquet général permet d’assimiler le ministère public à l’auteur de cette décision ( 22 ). C’est précisément la raison pour laquelle l’article 2, sous c), ii), troisième phrase, de ladite directive prévoit que, dès lors que la décision d’enquête est validée par une autorité judiciaire, cette dernière « peut » également être considérée comme une « autorité d’émission » aux fins de la transmission de la DEE, le législateur de l’Union ayant laissé cette faculté à la discrétion des États membres. |
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42. |
Il découle de ce qui précède que, eu égard à son libellé, l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41 ne s’oppose pas à ce qu’une autorité non judiciaire qui adopte, conformément à son droit national, des mesures d’enquête spécifiques, qui, avant d’être exécutées dans un autre État membre, sont validées par une autorité judiciaire, puisse être qualifiée d’« autorité d’émission », au sens de cette disposition, même lorsque l’adoption de telles mesures d’enquête dans le cadre d’une procédure purement interne aurait relevé de la seule compétence des autorités judiciaires. |
Sur l’interprétation contextuelle
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43. |
En deuxième lieu, cette interprétation n’est nullement infirmée par le contexte dans lequel s’inscrit l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41. À cet égard, il convient de rappeler que la seconde phrase de cette disposition prévoit expressément que, dans le cadre de son exercice de validation de la DEE, l’autorité judiciaire est tenue d’examiner la conformité de cette décision aux conditions d’émission prévues par cette directive, en particulier celles prévues à l’article 6, paragraphe 1, de celle-ci. Or, aucune de ces conditions d’émission ne semble s’opposer à ce qu’une autorité non judiciaire, telle que le KNAB, qui adopte des mesures d’enquête validées par une autorité judiciaire, puisse être qualifiée d’« autorité d’émission », lorsque l’adoption de telles mesures dans le cadre d’une procédure interne aurait relevé de la compétence des autorités judiciaires. |
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44. |
En effet, premièrement, conformément à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2014/41, lu en combinaison avec l’article 2, sous c), et le considérant 11 de cette directive, la validation d’une DEE, tout comme son émission, est subordonnée à la réunion de deux conditions cumulatives, à savoir, d’une part, en vertu de cet article 6, paragraphe 1, sous a), que l’émission de la DEE soit nécessaire et proportionnée aux finalités des procédures, notamment pénales, visées à l’article 4 de ladite directive, compte tenu des droits du suspect ou de la personne poursuivie ( 23 ) et, d’autre part, en vertu dudit article 6, paragraphe 1, sous b), que les mesures d’enquête indiquées dans la DEE auraient pu être ordonnées dans les mêmes conditions dans le cadre d’une procédure nationale similaire ( 24 ). En vertu de l’article 6, paragraphe 2, de la même directive, dans chaque cas, le respect de ces deux conditions est vérifié par l’autorité d’émission. |
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45. |
Si ces dispositions ne précisent pas comment et à quel stade de la procédure pénale les conditions prévues à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2014/41 doivent être réunies, ces règles relevant nécessairement de l’autonomie procédurale de l’État d’émission, il ressort d’une lecture combinée de l’article 2, sous c), ii), de l’article 6, paragraphes 1 et 2, et du considérant 11 de cette directive que le respect de ces conditions doit être vérifié tant par l’autorité non judiciaire, au stade de l’élaboration de la DEE et notamment de la proposition des mesures d’enquête spécifiques, que par l’autorité judiciaire, au stade de la validation de la DEE. Ce constat est, par ailleurs, corroboré par le fait que la DEE doit être « validée » par une autorité judiciaire, le terme « validation » impliquant nécessairement la confirmation d’une première vérification effectuée de la part de l’autorité non judiciaire. Or, ce constat plaide en faveur d’une interprétation selon laquelle, lorsqu’il existe une telle validation, ladite directive n’exige pas que l’autorité d’émission soit également compétente pour ordonner les mesures concernées dans le cadre d’une procédure nationale. En effet, la DEE doit être comprise comme visant l’acte sous la forme qu’il revêt lors de son exécution, à savoir après sa validation par l’autorité judiciaire, car avant cette étape, elle ne produit pas d’effets juridiques et ne peut pas être transmise ( 25 ). |
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46. |
En l’occurrence, rien ne permet de considérer que ces conditions posées à l’article 6 de la directive 2014/41 ne seraient pas respectées dans l’affaire au principal. |
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47. |
En effet, s’agissant de la première condition, visée à l’article 6, paragraphe 1, sous a), de cette directive, qui porte, d’une part, sur la nécessité et la proportionnalité aux finalités des procédures, il convient de constater, ainsi qu’il ressort des observations présentées par le gouvernement letton, que le KNAB a recueilli préalablement à l’émission de la DEE en cause les autorisations judiciaires nécessaires auprès de la juridiction lettonne pour les mesures de perquisition visées par la décision d’enquête. D’autre part, concernant la prise en compte des droits du suspect ou de la personne poursuivie, aucun élément du dossier soumis à la Cour ne permet de considérer que le contrôle judiciaire de la DEE en cause n’était pas apte à assurer un tel respect des droits fondamentaux. Au contraire, il semblerait que, dans le cadre de la procédure nationale équivalente, cette DEE ait fait l’objet d’un double contrôle judiciaire, dans un premier temps, par le juge d’instruction, et, dans un second temps, par le parquet général de la République de Lettonie, et que ce contrôle était fondé sur l’ensemble des éléments fournis par l’autorité non judiciaire. |
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48. |
S’agissant de la seconde condition, visée à l’article 6, paragraphe 1, sous b), de la directive 2014/41, il ressort également des éléments du dossier dont dispose la Cour que les mêmes mesures d’enquête indiquées dans la DEE en cause auraient pu être ordonnées dans le cadre d’une procédure nationale similaire, en ce que le KNAB aurait pu proposer ces mêmes mesures afin que celles-ci soient adoptées par le juge d’instruction. Par ailleurs, la Cour a déjà jugé que, en employant les termes « dans les mêmes conditions » et « dans le cadre d’une procédure nationale similaire », l’article 6, paragraphe 1, sous b), de cette directive fait dépendre du seul droit de l’État d’émission la détermination des conditions précises requises pour l’émission d’une DEE ( 26 ). Cette disposition vise à éviter un contournement des règles et des garanties prévues par le droit de l’État d’émission ( 27 ). Or, aucun risque d’un tel contournement ne saurait résulter du fait que l’adoption de la DEE est prise par une autorité non judiciaire, lorsque celle-ci est par la suite validée par une autorité judiciaire. |
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49. |
Deuxièmement, au-delà des conditions prévues à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2014/41, l’autorité d’émission doit fournir des justifications supplémentaires dans le cadre de certaines mesures d’enquête spécifiques. Ainsi, l’article 26, paragraphe 5, de cette directive exige, s’agissant des informations relatives aux comptes bancaires et aux autres comptes financiers, que l’autorité d’émission indique les raisons pour lesquelles elle considère que les informations demandées sont susceptibles d’être importantes aux fins de la procédure pénale concernée. En outre, l’article 27, paragraphe 4, et l’article 28, paragraphe 3, de ladite directive prévoient également, s’agissant, respectivement, des informations relatives aux opérations bancaires et aux autres opérations financières, et des mesures d’enquête impliquant l’obtention de preuves en temps réel, de manière continue et au cours d’une période déterminée, que cette autorité indique les raisons pour lesquelles elle considère que les informations demandées sont pertinentes aux fins de la procédure pénale concernée ( 28 ). Or, ces justifications supplémentaires peuvent être fournies par une autorité non judiciaire, indépendamment du fait que, le cas échéant, dans le cadre d’une procédure interne, les décisions ordonnant la production de ces informations relèveraient d’une autorité judiciaire. |
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50. |
Troisièmement, l’article 14, paragraphe 1, de la directive 2014/41, lu à la lumière du considérant 22 de cette dernière, prévoit une obligation générale pour les États membres de veiller à ce que des voies de recours au moins équivalentes à celles ouvertes dans le cadre d’une procédure nationale similaire soient applicables aux mesures d’enquête indiquées dans une DEE. En outre, conformément à l’article 14, paragraphe 3, de cette directive, l’autorité d’émission doit veiller à ce que les personnes concernées par une telle décision disposent d’une information suffisante quant aux voies et aux délais de recours prévus par le droit national, afin de garantir l’exercice effectif de leur droit de recours ( 29 ). Enfin, aux termes de l’article 14, paragraphe 7, de ladite directive, l’État d’émission doit tenir compte du fait que la reconnaissance ou l’exécution d’une DEE a été contestée avec succès conformément à son droit national. Ainsi, sans préjudice des règles de procédure nationales, les États membres doivent veiller à ce que, au cours de la procédure pénale dans l’État d’émission, les droits de la défense et l’équité de la procédure soient respectés lors de l’évaluation des éléments de preuve obtenus au moyen d’une DEE ( 30 ). Or, à mon sens, ces obligations d’information et le respect des droits de la défense peuvent tout aussi bien être assurés par une autorité non judiciaire, sous le contrôle d’une autorité judiciaire, indépendamment du fait de savoir si la première peut ordonner des mesures d’enquête équivalentes dans le cadre d’une procédure nationale similaire. |
Sur l’interprétation téléologique
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51. |
En ce qui concerne, en troisième lieu, l’objectif poursuivi par la directive 2014/41, il me semble que l’interprétation proposée au point 42 des présentes conclusions est, en outre, de nature à assurer la pleine réalisation de ce dernier, tel que rappelé au point 25 des présentes conclusions, consistant à instaurer un système simplifié et plus efficace fondé sur la DEE, afin de faciliter et d’accélérer la coopération judiciaire, et ainsi contribuer à la réalisation de l’objectif de devenir un espace de liberté, de sécurité et de justice sur la base des principes de confiance et de reconnaissance mutuelles ( 31 ). |
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52. |
À cet égard, l’objectif tenant à une coopération simplifiée et efficace entre les États membres suppose que l’on puisse identifier de façon simple et non équivoque l’autorité qui a émis une DEE afin de déterminer si une telle décision doit, ou non, faire l’objet d’une validation par une autorité judiciaire en application de l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41. Une interprétation qui se fonde sur la seule constatation qu’une autorité non judiciaire a été « définie » par l’État d’émission comme compétente pour agir en qualité d’autorité chargée des enquêtes, au sens de l’article 2, sous c), ii), de cette directive, est de nature à permettre de déterminer, sans équivoque, si une autorité relève du point ii) de cette disposition, sur le seul fondement du choix opéré par l’État d’émission et non pas de la nature des preuves concernées. En effet, une interprétation contraire, d’une part, mènerait à une « fragmentation » du système, en ce que différentes « autorités d’émission » pourraient être compétentes dans le cadre d’une seule et même enquête, en fonction de la nature des différentes mesures d’enquête et du droit procédural applicable à celles-ci dans le cadre d’une procédure interne, et d’autre part, constituerait une source d’insécurité juridique et risquerait de complexifier le système de mise en œuvre de la DEE, ainsi que, ce faisant, de compromettre l’instauration d’un système simplifié et efficace de coopération entre les États membres en matière pénale ( 32 ). |
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53. |
Ensuite, à cet effet, il convient de rappeler que le considérant 10 de la directive 2014/41 identifie l’autorité d’émission comme étant « la mieux placée pour décider, en fonction de sa connaissance des éléments de l’enquête concernée, des mesures d’enquête auxquelles il y a lieu à recourir » ( 33 ). Ainsi, il ne fait pas de doute que, lorsqu’un État membre fait le choix d’attribuer des compétences à une autorité non judiciaire pour qu’elle puisse agir en qualité d’autorité chargée des enquêtes, cette autorité est la « mieux placée », dans le contexte particulier de l’organisation interne de la procédure pénale, pour avoir une meilleure connaissance des différents éléments de l’enquête lui permettant d’adopter les mesures d’enquête les mieux adaptées aux fins de cette enquête et de réagir rapidement aux différentes situations procédurales pouvant survenir. Dans cette configuration, il ne saurait être soutenu, comme le fait WBS, que l’adoption de la DEE serait beaucoup plus efficace ou plus simple si le juge d’instruction, en tant qu’autorité d’émission, avait adopté lui-même la DEE en cause, conformément à l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41. À titre d’exemple, lorsque une DEE est contestée par une partie intéressée dans l’État d’exécution en ce qui concerne les motifs de fond sous-tendant l’émission de cette DEE, l’autorité non judiciaire qui est en charge de l’enquête doit pouvoir recevoir les informations relatives à la contestation, et cela sera plus efficace, par rapport à une situation où cette transmission est réalisée par le biais d’une autre autorité qui n’est pas celle menant l’enquête ( 34 ). De même, lorsque l’exécution d’une DEE entraîne des coûts exceptionnellement élevés pour l’État d’exécution, notamment occasionnés par des avis complexes émis par des experts, par de vastes opérations policières ou par des activités de surveillance menées durant une longue période, la question des coûts pourrait faire l’objet de consultations entre l’État d’émission et l’État d’exécution. Dans le cadre de ce type de consultations, l’autorité non judiciaire qui est chargée de l’enquête est certainement la mieux à même d’apprécier l’utilité du maintien et l’étendue d’une DEE, notamment en fonction des progrès réalisés dans le cadre de l’enquête ( 35 ). |
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54. |
Enfin, à cet égard, il convient d’observer que, dans certains États membres, le juge d’instruction ne joue pas un rôle central dans la procédure d’enquête, celui-ci n’intervenant que de manière ponctuelle notamment pour autoriser certaines mesures d’enquête sollicitées par le parquet ( 36 ). De ce fait, cette juridiction ne disposerait du dossier de la procédure qu’au moment où elle rend sa décision et n’aurait dès lors qu’une connaissance limitée de l’enquête. En effet, cette juridiction ne pourrait se familiariser ni avec les domaines de l’enquête qui ne sont pas concernés par sa décision ni avec les développements qui surviendraient postérieurement à l’adoption de cette dernière. Exiger que cette juridiction soit l’autorité d’émission de la DEE conduirait à un ralentissement du processus de l’entraide judiciaire, notamment, en cas de demande de l’autorité d’exécution formulée au titre de l’article 6, paragraphe 3, première phrase, de la directive 2014/41. Ainsi que le relève à juste titre la juridiction de renvoi, si seule la juridiction d’instruction est considérée comme une « autorité d’émission » et que l’autorité d’exécution revient vers elle avec une demande de précisions au titre de l’article 6, paragraphe 3, première phrase, de cette directive, la juridiction d’instruction sera contrainte de demander à l’autorité non judiciaire menant l’enquête la communication du dossier et devra également se familiariser (à nouveau) avec l’enquête ainsi que son état d’avancement. Une complexification pourrait également émerger dans les situations où, comme en l’espèce, les mesures d’enquête ne relèvent pas exclusivement de la compétence des juridictions et peuvent être adoptées par d’autres autorités, de sorte que l’autorité d’exécution se rapportant à une même affaire pourrait se voir saisie de deux décisions d’enquête européennes émises par deux interlocuteurs différents. |
Sur la genèse de la directive 2014/41
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55. |
En quatrième lieu, l’interprétation littérale, contextuelle et téléologique est corroborée par la genèse de la directive 2014/41. Pour rappel, dans le cadre de l’élaboration du projet législatif à la suite de la proposition initiale de la directive présentée par sept États membres ( 37 ), le Conseil avait constaté que plusieurs États membres s’étaient opposés à la disposition introduisant l’obligation de reconnaître les décisions d’enquête européennes émises par des autorités non judicaires, mais que, « compte tenu de la base juridique choisie pour cette proposition », un compromis a été trouvé sur le fondement de l’introduction d’une procédure de validation obligatoire en ce qui concerne la conformité de la DEE avec les conditions d’émission d’une DEE, lorsque celle-ci est émise par une autorité compétente autre qu’un juge, un procureur ou un magistrat instructeur ( 38 ). Il s’ensuit que ce choix a été fait dans le souci du respect de l’autonomie procédurale des États membres et de la diversité des systèmes nationaux, et notamment du fait que, dans certains États membres, la procédure d’instruction est menée non par les juridictions mais par le parquet ou des autorités administratives ( 39 ). |
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56. |
Eu égard à l’ensemble des motifs qui précèdent, j’estime qu’il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41 ne s’oppose pas à ce qu’une autorité non judiciaire qui adopte, conformément à son droit national, des mesures d’enquête spécifiques puisse être qualifiée d’« autorité d’émission » d’une DEE, au sens de cette disposition, même lorsque l’adoption de telles mesures d’enquête dans le cadre d’une procédure interne relèverait de la seule compétence des autorités judiciaires, pour autant que ces mesures d’enquêtes soient validées avant l’émission de la DEE par une autorité judiciaire ayant vérifié que l’ensemble des conditions d’émission et de transmission prévues par cette directive sont réunies. |
Sur la portée de l’arrêt Spetsializirana prokuratura
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57. |
En cinquième et dernier lieu, je relève que, contrairement à ce que font valoir, en substance, WBS et la Commission, cette conclusion ne saurait être infirmée par l’arrêt Spetsializirana prokuratura, par lequel la Cour a jugé que l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un procureur soit compétent pour émettre une DEE visant à obtenir des données relatives au trafic et des données de localisation liées aux télécommunications, lorsque, dans le cadre d’une procédure nationale similaire, l’adoption d’une mesure d’enquête visant à accéder à de telles données relève de la compétence exclusive du juge. |
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58. |
Tout d’abord, comme le fait observer à juste titre la juridiction de renvoi, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, l’autorité ayant émis la DEE était une « autorité d’émission », au sens de l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41, à savoir le ministère public bulgare, alors que, dans la présente affaire, l’autorité d’émission est une « autre autorité compétente », au sens de l’article 2, sous c), ii), de cette directive. Cette distinction implique que l’étendue des principes énoncés par la Cour, notamment aux points 29 et 30 dudit arrêt, par lesquels la Cour a analysé le libellé de l’article 2, sous c), i), de ladite directive, est logiquement limitée aux autorités judiciaires et que ces principes ne sauraient être transposés aux autorités non judiciaires. En d’autres termes, le même arrêt exige un « parallélisme », en termes de rang hiérarchique, entre l’autorité compétente pour l’adoption de la DEE et l’autorité compétente pour l’adoption des mêmes mesures d’enquête dans le cadre de la procédure nationale, mais uniquement lorsque ces deux autorités sont des autorités judiciaires. |
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59. |
Ensuite, à l’instar de la juridiction de renvoi, j’observe que la présente affaire se distingue de celle ayant donné lieu à l’arrêt Spetsializirana prokuratura en ce que la mesure de perquisition en cause, dont l’adoption est réservée aux seules juridictions en vertu du droit letton, a été, préalablement à son émission, autorisée par un juge d’instruction et, par la suite, validée par le parquet général de cet État membre, qui l’a jugée nécessaire et proportionnée. En revanche, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Spetsializirana prokuratura, le ministère public bulgare avait émis, en tant qu’autorité d’émission, au sens de l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41, quatre décisions d’enquête européennes portant sur la collecte de données relatives au trafic et de données de localisation liées aux télécommunications, sans solliciter au préalable l’intervention d’une juridiction bulgare, alors que, dans le cadre d’une procédure nationale similaire, le ministère public bulgare n’aurait pu ordonner de telles mesures qu’avec l’autorisation d’une telle juridiction. Partant, cette circonstance conduit à ce que les motifs retenus par la Cour, aux points 32 à 38 de cet arrêt, dédiés à l’analyse du contexte et des objectifs poursuivis par cette directive, ne sont pas applicables, ni pertinents en ce qui concerne la présente affaire. |
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60. |
En effet, s’agissant, d’une part, de l’analyse contextuelle opérée par la Cour, aux points 32 à 35 de l’arrêt Spetsializirana prokuratura, relative à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2014/41, il convient de relever, ainsi qu’il a été fait aux points 44 à 48 des présentes conclusions, que les conditions visées par cette disposition n’apparaissent pas pertinentes dans la présente affaire. En effet, en l’occurrence, le KNAB, agissant en tant que « responsable de la procédure d’enquête » et étant donc l’autorité compétente pour ordonner la mesure d’enquête en vertu du droit national, a satisfait aux obligations de vérification, relatives à la nécessité et à la proportionnalité de cette mesure, prévues à l’article 6, paragraphe 1, sous a), de cette directive, dans la mesure où le juge d’instruction compétent a précisé dans sa décision que les perquisitions devant être effectuées à Berlin étaient nécessaires et proportionnées. Ainsi, à la différence de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Spetsializirana prokuratura, il n’y a pas eu lieu, en l’espèce, de satisfaire à des exigences particulières en matière de justification de la mesure par l’autorité même. En outre, le KNAB a émis la DEE en cause dans des conditions dans lesquelles une mesure d’enquête aurait pu être ordonnée dans le cadre d’une procédure nationale similaire, puisque le juge d’instruction est intervenu pour autoriser la mesure de perquisition préalablement à l’émission de cette DEE. |
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61. |
D’autre part, ne sauraient non plus être pertinents les enseignements tirés de l’analyse des objectifs de la directive 2014/41, aux points 36 à 38 de l’arrêt Spetsializirana prokuratura, ayant conduit la Cour à conclure, dans le cadre de l’interprétation de l’article 2, sous c), i), de cette directive, qu’une éventuelle distinction entre l’autorité d’émission de la DEE et l’autorité qui est compétente pour ordonner des mesures d’enquête dans le cadre de cette procédure pénale risquerait de complexifier le système de coopération et, ce faisant, de compromettre l’instauration d’un système simplifié et efficace. Au contraire, ainsi qu’il a été relevé aux points 52 à 54 des présentes conclusions, dans le cadre de l’interprétation de l’article 2, sous c), ii), de ladite directive, exiger que l’autorité d’émission de la DEE soit nécessairement l’autorité compétente pour ordonner la mesure d’enquête en cause en vertu du droit national est susceptible, lorsque cette autorité est une autorité non judiciaire, d’entraîner une complexification de ce système de coopération. |
Conclusion
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62. |
Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre à la question préjudicielle posée par le Kammergericht Berlin (tribunal régional supérieur de Berlin, Allemagne) de la manière suivante : L’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41/UE du Parlement européen et du Conseil, du 3 avril 2014, concernant la décision d’enquête européenne en matière pénal, doit être interprété en ce sens que : il ne s’oppose pas à ce qu’une autorité non judiciaire qui adopte, conformément à son droit national, des mesures d’enquête spécifiques puisse être qualifiée d’« autorité d’émission » d’une décision d’enquête européenne, au sens de cette disposition, même lorsque l’adoption de telles mesures d’enquête dans le cadre d’une procédure interne relèverait de la seule compétence des autorités judiciaires, pour autant que ces mesures d’enquêtes soient validées avant l’émission de la décision d’enquête européenne par une autorité judiciaire ayant vérifié que l’ensemble des conditions d’émission et de transmission prévues par cette directive sont réunies. |
( 1 ) Langue originale : le français.
( 2 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 concernant la décision d’enquête européenne en matière pénale (JO 2014, L 130, p. 1).
( 3 ) Voir, à cet égard, arrêts du 8 décembre 2020, Staatsanwaltschaft Wien (Ordres de virement falsifiés) (C‑584/19, ci-après l’arrêt « Staatsanwaltschaft Wien », EU:C:2020:1002) ; du 16 décembre 2021, Spetsializirana prokuratura (Données relatives au trafic et à la localisation) (C‑724/19, ci-après l’arrêt « Spetsializirana prokuratura », EU:C:2021:1020), du 2 mars 2023, Staatsanwaltschaft Graz (Service des affaires fiscales pénales de Düsseldorf) (C‑16/22, ci-après l’arrêt « Staatsanwaltschaft Graz », EU:C:2023:148) et du 30 avril 2024, M.N. (EncroChat) (C‑670/22, ci-après l’arrêt « EncroChat », EU:C:2024:372).
( 4 ) Décision-cadre du Conseil du 22 juillet 2003 relative à l’exécution dans l’Union européenne des décisions de gel de biens ou d’éléments de preuve (JO 2003, L 196, p. 45).
( 5 ) Décision-cadre du Conseil du 18 décembre 2008 relative au mandat européen d’obtention de preuves visant à recueillir des objets, des documents et des données en vue de leur utilisation dans le cadre de procédures pénales (JO 2008, L 350, p. 72).
( 6 ) Latvijas Vēstnesis, 2005, no 74.
( 7 ) Le parquet de Berlin serait alors tenu de renvoyer la DEE à la République de Lettonie, conformément à l’article 9, paragraphe 3, de la directive 2014/41.
( 8 ) Voir, notamment, considérants 5 à 8, 21 et 38 de la directive 2014/41, ainsi que arrêts Staatsanwaltschaft Wien (point 39), Spetsializirana prokuratura (point 36), Staatsanwaltschaft Graz (point 42) et EncroChat (point 86).
( 9 ) Voir, notamment, considérants 2, 6 et 19 de la directive 2014/41, ainsi que arrêts Staatsanwaltschaft Wien (point 40), du 11 novembre 2021, Gavanozov II (C‑852/19, ci-après l’arrêt « Gavanozov II », EU:C:2021:902, point 54) et EncroChat (point 99).
( 10 ) Voir arrêts Staatsanwaltschaft Wien (point 41), du 2 septembre 2021, Finanzamt für Steuerstrafsachen und Steuerfahndung Münster (C‑66/20, EU:C:2021:670, point 39), et EncroChat (point 71).
( 11 ) Voir arrêt du 2 septembre 2021, Finanzamt für Steuerstrafsachen und Steuerfahndung Münster (C‑66/20, EU:C:2021:670, point 40).
( 12 ) Ces quatre autorités, qui sont énumérées de manière exhaustive, sont qualifiées d’« autorités judiciaires », au sens de la directive 2014/41, dès lors qu’elle sont susceptibles de participer à l’administration de la justice [voir arrêt Staatsanwaltschaft Graz (points 30 à 32 et 37)].
( 13 ) La référence à « toute autre autorité », effectuée à l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41, indique que toute autorité autre que les autorités judiciaires visées à l’article 2, sous c), i), de cette directive doit être examinée au regard de l’article 2, sous c), ii), de ladite directive. Ainsi, cette expression doit être comprise comme désignant toute autorité relevant du pouvoir exécutif [voir article 4, sous b), de la même directive et arrêt Staatsanwaltschaft Graz (points 34 et 35)].
( 14 ) Voir, en ce sens, arrêt Staatsanwaltschaft Graz (points 27 et 28).
( 15 ) Voir arrêts Spetsializirana prokuratura (point 29) et Staatsanwaltschaft Graz (points 33 et 34, ainsi que jurisprudence citée).
( 16 ) Voir, à titre d’exemple, arrêt Staatsanwaltschaft Wien (point 46). Sur la base du rapport du 20 septembre 2021, du Réseau judiciaire européen (RJE), disponible sur son site Internet (à l’adresse suivante : https://www.ejn-crimjust.europa.eu/ejn/EJN_RegistryDoc/EN/3115/0/0), nombreux sont les États membres, outre la République de Lettonie, qui ont désigné des autorités administratives en tant qu’« autorités d’émission », notamment, le Royaume de Belgique, la République fédérale d’Allemagne, la République hellénique, la Hongrie, la République d’Autriche et la République de Pologne.
( 17 ) En vertu de l’article 386, paragraphe 6, du code de procédure pénale, le KNAB est une autorité d’enquête, qui, conformément à l’article 27 de ce code, peut agir en tant que « responsable de la procédure » qui dirige une procédure pénale.
( 18 ) Voir article 1er, paragraphe 1, du Prokuratūras likums (loi sur le ministère public), du 19 mai 1994 (Latvijas Vēstnesis, 2004, no 65). Le « procureur » figure parmi les « autorités judiciaires » visées à l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41 qui sont habilitées à valider une DEE [voir arrêt Staatsanwaltschaft Wien (point 53)].
( 19 ) Voir article 180, paragraphe 1, du code de procédure pénale.
( 20 ) Voir, en ce sens, notamment, arrêts du 17 avril 2018, Egenberger (C‑414/16, EU:C:2018:257, point 44), Staatsanwaltschaft Wien (point 49), du 28 octobre 2022, Generalstaatsanwaltschaft München (Extradition et ne bis in idem) (C‑435/22 PPU, EU:C:2022:852, point 67) et Staatsanwaltschaft Graz (point 25).
( 21 ) À titre d’exemple, la Cour a déjà jugé que l’administration fiscale d’un État membre qui, tout en relevant du pouvoir exécutif de ce dernier, mène, en vertu du droit national, des enquêtes fiscales pénales à la place du parquet, est susceptible de relever de la notion d’« autorité d’émission », au sens de l’article 2, sous c), ii), de la même directive [voir arrêt Staatsanwaltschaft Graz (point 46)].
( 22 ) Voir, par analogie, arrêts du 10 novembre 2016, Özçelik (C‑453/16 PPU, EU:C:2016:860, point 30), qui concernait la procédure de validation par le ministère public d’un mandat d’arrêt national émis par le service de police, ainsi que du 9 octobre 2019, NJ (Parquet de Vienne) (C‑489/19 PPU, EU:C:2019:849, point 46), relatif à la procédure d’homologation d’un ordre d’arrestation par voie de mandat d’arrêt émis par le parquet de la République d’Autriche.
( 23 ) Voir arrêts Spetsializirana prokuratura (point 32) et EncroChat (point 88).
( 24 ) Voir arrêts Staatsanwaltschaft Wien (point 57) et EncroChat (point 87).
( 25 ) Voir, par analogie, arrêt du 9 octobre 2019, NJ (Parquet de Vienne) (C‑489/19 PPU, EU:C:2019:849, points 42 et 43).
( 26 ) Voir arrêt EncroChat (points 90 à 93).
( 27 ) Voir arrêt EncroChat (point 97).
( 28 ) Voir arrêt Spetsializirana prokuratura (point 33).
( 29 ) Voir arrêt Staatsanwaltschaft Wien (points 60 et 61).
( 30 ) Voir arrêt Staatsanwaltschaft Wien (point 62).
( 31 ) Voir arrêt du 24 octobre 2019, Gavanozov (C‑324/17, EU:C:2019:892, point 35). Voir, également, point 25 des présentes conclusions.
( 32 ) Voir, par analogie, arrêt Staatsanwaltschaft Graz (points 43 et 45).
( 33 ) Voir, en ce sens, arrêt Spetsializirana prokuratura (point 37).
( 34 ) Voir, à cet égard, considérant 22 de la directive 2014/41.
( 35 ) Voir, à cet égard, considérant 23 de la directive 2014/41.
( 36 ) Voir, notamment, la République fédérale d’Allemagne, et contrairement à d’autres traditions juridiques, telles qu’en France, où le juge d’instruction est globalement responsable de l’instruction.
( 37 ) Voir, notamment, article 2, sous a), ii), de l’initiative du Royaume de Belgique, de la République de Bulgarie, de la République d’Estonie, du Royaume d’Espagne, de la République d’Autriche, de la République de Slovénie et du Royaume de Suède en vue d’une directive du Parlement européen et du Conseil du … concernant la [DEE] en matière pénale (JO 2010, C 165, p. 22).
( 38 ) Voir rapport d’avancement du Conseil du 26 novembre 2010 (16868/10 COPEN 266 EUROJUST 135 EJN 68 CODEC 1369), p. 5.
( 39 ) Voir, à cet égard, note en bas de page 16 des présentes conclusions, ainsi que Bachmaier Winter, L. « Further Mutual Assistance : The European Investigation Order », dans Ambos, K. et Rackow, P. (éd.) The Cambridge Companion to European Criminal Law, Cambridge University Press, 2023, p. 292 et 293, ainsi que Gogorza, A. « Décision d’enquête européenne – La relativité de la notion européenne d’autorité judiciaire », Droit pénal – Lexis Nexis, no 2, 2021, p. 44.