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Dokuments 62022CO0574

Ordonnance de la Cour (septième chambre) du 1er décembre 2023.
Procédure pénale contre CI e.a.
Demande de décision préjudicielle, introduite par le Sofiyski gradski sad.
Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Précurseurs de drogues – Décision-cadre 2004/757/JAI – Article 2, paragraphe 1, sous d) – Personne impliquée dans le transport et la distribution de précurseurs utilisés pour la production ou la fabrication illicites de drogues – Règlement (CE) no 273/2004 – Substances classifiées – Article 2 – Notion d’“opérateur” – Article 8, paragraphe 1 – Éléments donnant à penser que des substances classifiées peuvent être détournées pour la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes – Obligation de notification de ces éléments – Notion d’“élément” – Portée.
Affaire C-574/22.

Eiropas judikatūras identifikators (ECLI): ECLI:EU:C:2023:946

ORDONNANCE DE LA COUR (septième chambre)

1er décembre 2023 (*) 

« Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Précurseurs de drogues – Décision-cadre 2004/757/JAI – Article 2, paragraphe 1, sous d) – Personne impliquée dans le transport et la distribution de précurseurs utilisés pour la production ou la fabrication illicites de drogues – Règlement (CE) no 273/2004 – Substances classifiées – Article 2 – Notion d’“opérateur” – Article 8, paragraphe 1 – Éléments donnant à penser que des substances classifiées peuvent être détournées pour la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes – Obligation de notification de ces éléments – Notion d’“élément” – Portée »

Dans l’affaire C‑574/22,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Sofiyski gradski sad (tribunal de la ville de Sofia, Bulgarie), par décision du 12 juillet 2022, parvenue à la Cour le 26 août 2022, dans la procédure pénale contre

CI,

VF,

DY,

en présence de :

Sofiyska gradska prokuratura,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. F. Biltgen (rapporteur), président de chambre, M. N. Wahl et Mme M. L. Arastey Sahún, juges,

avocat général : Mme L. Medina,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocate générale entendue, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du règlement (CE) no 273/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, relatif aux précurseurs de drogues (JO 2004, L 47, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) no 1258/2013, du Parlement européen et du Conseil, du 20 novembre 2013 (JO 2013, L 330, p. 21) (ci-après le « règlement no 273/2004 »).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure pénale engagée en Bulgarie contre CI, VF et DY pour détention de substances destinées à la production illicite de stupéfiants ou de produits analogues.

 Le cadre juridique

 Le droit international

3        L’article 3 de la convention des Nations unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, conclue à Vienne le 20 décembre 1988 (Recueil des traités des Nations unies, vol. 1582, p. 95), et approuvée par la Communauté économique européenne par la décision 90/611/CEE du Conseil, du 22 octobre 1990 (JO 1990, L 326, p. 56, ci-après la « convention de Vienne contre le trafic illicite »), intitulé « Infractions et sanctions », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Chaque Partie adopte les mesures nécessaires pour conférer le caractère d’infractions pénales conformément à son droit interne, lorsque l’acte a été commis intentionnellement :

a)      [...]

iv)      À la fabrication, au transport ou à la distribution d’équipements, de matériels ou de substances inscrites au Tableau I et au Tableau II, dont celui qui s’y livre sait qu’ils doivent être utilisés dans ou pour la culture, la production ou la fabrication illicites de stupéfiants ou de substances psychotropes ;

[...]

c)      Sous réserve de ses principes constitutionnels et des concepts fondamentaux de son système juridique,

[...]

ii)      À la détention d’équipements, de matériels ou de substances inscrites au Tableau I ou au Tableau II, dont celui qui les détient sait qu’ils sont ou doivent être utilisés dans ou pour la culture, la production ou la fabrication illicites de stupéfiants ou de substances psychotropes ;

[...] »

4        L’article 12 de cette convention, intitulé « Substances fréquemment utilisées dans la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes », stipule :

« 1.      Les Parties adoptent les mesures qu’elles jugent appropriées pour empêcher le détournement de substances inscrites au Tableau I et au Tableau II aux fins de la fabrication illicite de stupéfiants et de substances psychotropes et coopèrent entre elles à cette fin.

[...]

8.      a)      Sans préjudice du caractère général des dispositions du paragraphe 1 du présent article et des dispositions de la Convention de 1961, de la Convention de 1961 telle que modifiée et de la Convention de 1971, les Parties prennent les mesures qu’elles jugent appropriées pour contrôler, sur leur territoire, la fabrication et la distribution des substances inscrites au Tableau I et au Tableau II ;

b)      À cette fin, les Parties peuvent :

i)      Exercer une surveillance sur toutes les personnes et entreprises se livrant à la fabrication et à la distribution desdites substances ;

[...]

iii)      Exiger que les titulaires d’une licence obtiennent une autorisation pour se livrer aux opérations susmentionnées ;

[...]

9.      En ce qui concerne les substances figurant dans les tableaux I et II, chaque Partie prend les mesures suivantes :

a)      Elle établit et maintient un système de surveillance du commerce international des substances inscrites au Tableau I et au Tableau II afin de faciliter la détection des opérations suspectes. Ces systèmes de surveillance doivent être mis en œuvre en étroite coopération avec les fabricants, importateurs, exportateurs, grossistes et détaillants, qui signalent aux autorités compétentes les commandes et opérations suspectes ;

b)      Elle prévoit la saisie de toute substance inscrite au Tableau I et au Tableau II s’il existe des preuves suffisantes qu’elle est destinée à servir à la fabrication illicite d’un stupéfiant ou d’une substance psychotrope ;

c)      Elle informe le plus rapidement possible les autorités et services compétents des Parties intéressées s’il y a des raisons de penser qu’une substance inscrite au Tableau I ou au Tableau II est importée, exportée ou acheminée en transit en vue de la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes, notamment en leur fournissant des informations sur les modes de paiement utilisés et tous autres éléments essentiels sur lesquels repose sa conviction ;

d)      Elle exige que les envois faisant l’objet d’importations et d’exportations soient correctement marqués et accompagnés des documents nécessaires. Les documents commerciaux tels que factures, manifestes, documents douaniers, de transports et autres documents d’expédition doivent indiquer les noms des substances faisant l’objet de l’importation ou de l’exportation tels qu’ils figurent au Tableau I ou au Tableau II, la quantité importée et exportée, ainsi que le nom et l’adresse de l’exportateur, de l’importateur et, lorsqu’il est connu, ceux du destinataire ;

[...]

[...] »

 Le droit de l’Union

 La décision-cadre 2004/757/JAI

5        Les considérants 1 à 3 de la décision-cadre 2004/757/JAI du Conseil, du 25 octobre 2004, concernant l’établissement des dispositions minimales relatives aux éléments constitutifs des infractions pénales et des sanctions applicables dans le domaine du trafic de drogue (JO 2004, L 335, p. 8), énoncent :

« (1)      Le trafic de drogue représente une menace pour la santé, la sécurité et la qualité de vie des citoyens de l’Union européenne, ainsi que pour l’économie légale, la stabilité et la sécurité des États membres.

(2)      La nécessité d’une action législative dans le domaine de la lutte contre le trafic de drogue a été reconnue notamment par le plan d’action du Conseil [de l’Union européenne] et de la Commission [européenne] concernant les modalités optimales de mise en œuvre des dispositions du traité d’Amsterdam relatives à l’établissement d’un espace de liberté, de sécurité et de justice [(JO 1999, C 19, p. 1)], adopté lors du Conseil “Justice et affaires intérieures” de Vienne, le 3 décembre 1998, les conclusions du Conseil européen de Tampere des 15 et 16 octobre 1999, et notamment la conclusion no 48, la stratégie antidrogue de l’Union européenne (2000-2004), approuvée lors du Conseil européen d’Helsinki du 10 au 12 décembre 1999 et le plan d’action de l’Union européenne en matière de lutte contre la drogue (2000–2004), entériné lors du Conseil européen de Santa Maria da Feira des 19 et 20 juin 2000.

(3)      Il est nécessaire d’adopter des règles minimales relatives aux éléments constitutifs des infractions de trafic de drogue et de précurseurs, qui permettront de définir une approche commune au niveau de l’Union européenne dans la lutte contre le trafic de drogue. »

6        L’article 1er de cette décision-cadre, intitulé « Définitions », prévoit :

« Aux fins de la présente décision-cadre, on entend par :

[...]

2)      “précurseur” : toute substance classifiée dans la législation communautaire donnant effet aux obligations découlant de l’article 12 de la [convention de Vienne contre le trafic illicite] ;

[...] »

7        L’article 2 de ladite décision-cadre, intitulé « Infractions liées au trafic de drogue et de précurseurs », dispose, à son paragraphe 1 :

« Chaque État membre prend les mesures nécessaires pour que les comportements intentionnels suivants soient punis lorsqu’ils ne peuvent être légitimés :

[...]

d)      la fabrication, le transport, la distribution de précurseurs, dont celui qui s’y livre sait qu’ils doivent être utilisés dans ou pour la production ou la fabrication illicites de drogues. »

 Le règlement no 273/2004

8        Les considérants 2 à 6 du règlement no 273/2004 énoncent :

« (2)      Les exigences de l’article 12 de la [convention de Vienne contre le trafic illicite] relative[s] au commerce des précurseurs (c’est-à-dire des substances fréquemment utilisées dans la fabrication illicite de stupéfiants et de substances psychotropes) ont été satisfaites en ce qui concerne les échanges entre la Communauté et les pays tiers, par suite de l’adoption du règlement (CEE) no 3677/90 du Conseil du 13 décembre 1990 relatif aux mesures à prendre afin d’empêcher le détournement de certaines substances pour la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes [(JO 1990, L 357, p. 1)].

(3)      L’article 12 de la [convention de Vienne contre le trafic illicite] envisage l’adoption de mesures visant à surveiller la fabrication et la distribution des précurseurs. Il s’agit de prendre des dispositions pour régir le commerce des précurseurs entre les États membres. De telles mesures ont été instaurées par la directive 92/109/CEE du Conseil du 14 décembre 1992 relative à la fabrication et à la mise sur le marché de certaines substances utilisées pour la fabrication illicite de stupéfiants et de substances psychotropes [(JO 1992, L 370, p. 76)]. Pour mieux assurer l’application simultanée de règles harmonisées dans tous les États membres, un règlement paraît plus approprié que la directive actuelle.

(4)      Dans le cadre de l’élargissement de l’Union européenne, sachant que chaque modification de la directive 92/109/CEE et de ses annexes donnera lieu à des mesures de mise en œuvre dans 25 États membres, il importe de remplacer ladite directive par un règlement.

(5)      Par les décisions adoptées lors de sa trente-cinquième session en 1992, la commission des stupéfiants des Nations unies a complété la liste des substances prévues dans les tableaux de l’annexe à la [convention de Vienne contre le trafic illicite]. Il convient de prévoir des dispositions correspondantes dans le présent règlement afin de détecter d’éventuels détournements illicites de précurseurs de drogues dans la Communauté et de garantir l’application de règles communes de surveillance sur le marché communautaire.

(6)      Les dispositions de l’article 12 de la [convention de Vienne contre le trafic illicite] s’appuient sur un système de surveillance du commerce des substances en cause. La plus grande partie du commerce de ces substances est tout à fait licite. La documentation et le marquage des envois de ces substances devraient être suffisamment explicites. Il importe, en outre, tout en dotant les autorités compétentes des moyens nécessaires, de mettre au point, dans l’esprit de la [convention de Vienne contre le trafic illicite], des mécanismes basés sur une étroite coopération avec les opérateurs concernés et sur le développement de la collecte des renseignements. »

9        L’article 1er du règlement no 273/2004 prévoit :

« Le présent règlement établit des mesures harmonisées pour le contrôle et la surveillance, à l’intérieur de l’Union, de certaines substances fréquemment utilisées pour la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes, en vue d’éviter leur détournement. »

10      L’article 2 de ce règlement dispose :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

a)      “substance classifiée” : toute substance figurant à l’annexe I qui peut être utilisée pour la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes, y compris les mélanges et les produits naturels contenant de telles substances, mais à l’exclusion des mélanges et des produits naturels contenant des substances classifiées qui sont composées de manière telle que les substances classifiées ne peuvent pas être facilement utilisées ni extraites par des moyens aisés à mettre en œuvre ou économiquement viables, des médicaments au sens de l’article 1er, point 2, de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil[, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (JO 2001, L 311, p. 67),] et des médicaments vétérinaires au sens de l’article 1er, point 2), de la directive 2001/82/CE du Parlement européen et du Conseil[, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments vétérinaires (JO 2001, L 311, p. 1)] ;

b)      “substance non classifiée” : toute substance qui, bien que non comprise dans l’annexe I, est identifiée comme ayant été utilisée dans le cadre d’une fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes ;

c)      “mise sur le marché” : toute mise à disposition, à titre onéreux ou gratuit, de substances classifiées dans l’Union ; ou le stockage, la fabrication, la production, la transformation, le commerce, la distribution ou le courtage de ces substances à des fins de mise à disposition dans l’Union ;

d)      “opérateur” : toute personne physique ou morale concernée par la mise sur le marché de substances classifiées ;

[...]

f)      “agrément spécial” : un agrément délivré à un type particulier d’opérateur ;

g)      “enregistrement spécial” : un enregistrement effectué pour un type particulier d’opérateur ;

[...] »

11      L’annexe I dudit règlement dresse la liste des « substances classifiées » au sens de l’article 2, sous a), de celui-ci. L’acide chlorhydrique figure dans cette liste en tant que substance classifiée de catégorie 3.

 Le règlement (CE) no 111/2005

12      L’article 1er du règlement (CE) no 111/2005 du Conseil, du 22 décembre 2004, fixant des règles pour la surveillance du commerce des précurseurs des drogues entre l’Union et les pays tiers (JO 2005, L 22, p. 1), tel que modifié par le règlement (UE) no 1259/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 20 novembre 2013 (JO 2013, L 330, p. 30) (ci-après le « règlement no 111/2005 »), est libellé comme suit :

« Le présent règlement fixe des règles pour la surveillance du commerce entre l’Union et les pays tiers de certaines substances fréquemment utilisées dans la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes (ci-après dénommées “précurseurs de drogues”), afin d’empêcher le détournement de ces substances. Il s’applique aux importations, aux exportations et aux activités intermédiaires. »

 Le droit bulgare

 Le NK

13      Aux termes de l’article 354a, paragraphe 1, du Nakazatelen kodeks (code pénal, ci-après le « NK ») :

« Toute personne qui, sans autorisation appropriée, fabrique, transforme, acquiert ou détient des stupéfiants ou des produits analogues en vue de leur distribution, ou distribue des stupéfiants ou leurs analogues, est punie, pour les drogues à haut risque ou leurs analogues, d’une peine privative de liberté de deux à huit ans et d’une amende de 5 000 à 20 000 [leva bulgares (BGN)] et, pour les drogues dangereuses ou leurs analogues, d’une peine privative de liberté comprise entre un et six ans et d’une amende de 2 000 à 10 000 BGN. Lorsque l’infraction concerne des précurseurs, des équipements ou des matériaux destinés à la production de stupéfiants ou de produits analogues, la peine privative de liberté est de trois à douze ans et d’une amende de 20 000 à 100 000 BGN. »

 Le ZKNVP

14      L’article 1er du Zakon za kontrol varhu narkotitchnite veshtestva i prekursorite (loi relative au contrôle des substances stupéfiantes et des précurseurs, DV no 30, du 2 avril 1999), dans sa version applicable aux faits au principal (ci-après le « ZKNVP »), prévoit :

« La présente loi régit :

1.      [...] l’organisation, les prérogatives et les obligations des organes de l’État exerçant un contrôle sur la production, la transformation, le commerce, l’utilisation, le stockage, l’importation, l’exportation, le transit, le déplacement, le transport et la responsabilité des produits stupéfiants, ainsi que sur la mise sur le marché, l’importation et l’exportation de précurseurs ;

[...]

3.      [...] les mesures de mise en œuvre du règlement [no 273/2004], ainsi que du règlement [no 111/2005] [...] ;

[...] »

15      L’article 3, paragraphe 4, du ZKNVP énonce :

« [...] Les précurseurs dont la mise sur le marché fait l’objet d’un contrôle sont énumérés dans l’annexe I du règlement no 273/2004. »

16      L’article 18a, paragraphes 1 et 2, du ZKNVP prévoit :

« 1.      [...] Sur proposition de la Commission interministérielle de contrôle des précurseurs, le ministre de l’Économie ou le ministre délégué habilité par ce dernier octroie ou refuse d’octroyer des agréments et élargissements d’agréments et il révoque ou suspend temporairement les agréments au sens de l’article 3, paragraphe 2, du règlement no 273/2004, de l’article 6 du règlement no 111/2005, [...].

2.      [...] Le ministre de l’Économie procède à l’enregistrement au sens de l’article 3, paragraphe 6, du règlement no 273/2004 et de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 111/2004. Lorsqu’un enregistrement est effectué ou que des modifications sont apportées aux informations enregistrées, le ministre de l’Économie ou le ministre délégué habilité par ce dernier délivre dans un délai de dix jours ouvrables une attestation concernant l’enregistrement ou les ajouts qui y ont été apportés. »

17      Les dispositions complémentaires du ZKNVP prévoient que, au sens de celui-ci, le terme « précurseur » s’entend de « toute substance classifiée » au sens de l’article 2, sous a), du règlement no 273/2004 et de l’article 2, sous a), du règlement no 111/2005.

 La Naredba 1

18      L’article 1er de la Naredba no 1 za kontrol na prekursorite na narkotichni veshtestva (arrêté no 1 relatif au contrôle des précurseurs de substances stupéfiantes), du 18 avril 2008 (DV no 45, du 13 mai 2008), dans sa version applicable aux faits au principal (ci-après la « Naredba 1 »), est libellé comme suit :

« Le présent arrêté régit :

[...]

2.      les conditions et modalités d’octroi d’agréments aux opérateurs qui mettent sur le marché, exportent, importent et réexportent des précurseurs de première catégorie de l’annexe 1 ;

3.      les conditions et modalités d’enregistrement des opérateurs qui mettent sur le marché, exportent, importent et réexportent des précurseurs de deuxième catégorie de l’annexe 1, et qui exportent et réexportent des précurseurs de troisième catégorie de l’annexe 1 ;

4.      les mesures de contrôle des activités visées aux points 2 et 3 ;

5.      les conditions et modalités de délivrance d’autorisations d’exporter, importer et réexporter des précurseurs figurant à l’annexe 1 ;

[...] »

19      L’article 11 de la Naredba 1 prévoit :

« [...] La mise sur le marché, l’exportation, l’importation et la réexportation de précurseurs de première catégorie de l’annexe 1 sont effectuées avec un agrément octroyé, sur proposition de la commission, par le ministre de l’Économie ou par le ministre délégué habilité par ce dernier. »

20      L’article 18 de la Naredba 1 énonce :

« [...] La mise sur le marché, l’exportation et la réexportation de précurseurs de deuxième catégorie de l’annexe 1, ainsi que l’exportation et la réexportation de précurseurs de troisième catégorie de l’annexe 1, sont effectuées avec une attestation d’enregistrement délivrée, sur proposition de la commission, par le ministre de l’Économie ou par le ministre délégué habilité par ce dernier. »

21      L’annexe 1 de la Naredba 1 mentionne l’acide chlorydrique (chlorure d’hydrogène) parmi les substances de troisième catégorie.

 Le litige au principal et la question préjudicielle

22      Le 23 avril 2016, les prévenus au principal ont été interpellés sur la voie publique à Sofia (Bulgarie) par des agents de police pour des soupçons de détention de produits stupéfiants, à savoir d’amphétamine, en vue de leur distribution. La perquisition effectuée le jour suivant au domicile de CI a conduit à la saisie non seulement d’amphétamine mais aussi d’acide chlorhydrique, d’acide phosphorique, d’iode et de phosphore rouge, produits pouvant servir à la production de méthamphétamine de synthèse.

23      Les prévenus au principal ont été renvoyés devant le Sofiyski gradski sad (tribunal de la ville de Sofia, Bulgarie), la juridiction de renvoi, pour les délits prévus à l’article 354a, paragraphe 1, première et seconde phrases, du NK.

24      La juridiction de renvoi relève, à cet égard, que, en exécution des exigences de l’article 3, paragraphe 1, sous a), iv), et sous c), ii), de la convention de Vienne contre le trafic illicite, diverses activités en relation avec des substances pouvant servir de précurseurs dans le processus de fabrication de stupéfiants ont été incriminées dans le NK, notamment à l’article 354a de celui-ci, lequel doit être lu en combinaison avec les dispositions du ZKNVP, qui a transposé en droit bulgare les exigences du règlement no 273/2004, ainsi qu’avec l’annexe 1 de la Naredba 1, qui dresse la liste des substances susceptibles d’être utilisées comme précurseurs selon trois catégories, reprenant à cet égard la classification opérée par le règlement no 273/2004.

25      Cette juridiction souligne que, pour que l’infraction visée à l’article 354a, paragraphe 1, seconde phrase, du NK soit constituée, les actes de production, de transformation, d’acquisition, de détention ou de distribution de précurseurs doivent avoir été effectués « sans autorisation appropriée ». L’autorisation ainsi visée s’entend d’une décision d’une autorité étatique autorisant son destinataire à accomplir légalement de tels actes lorsque ceux-ci sont liés à des fins médicales, scientifiques ou de recherche. L’absence d’une telle autorisation caractérise l’existence de l’élément objectif de l’infraction visée.

26      Or, en l’occurrence, la juridiction de renvoi émet des doutes quant au fait qu’une autorisation soit requise pour une partie des substances en cause au principal, à savoir l’acide chlorhydrique. En effet, alors que cette substance relève de la catégorie 3 de l’annexe 1 de la Naredba 1 et de l’annexe I du règlement no 273/2004, l’accomplissement d’actes en relation avec des substances relevant de cette catégorie ne serait pas subordonné à l’obtention d’un agrément ou d’un enregistrement.

27      Enfin, la juridiction de renvoi ajoute que la jurisprudence nationale bulgare considère que, si les substances relevant de ladite catégorie sont soumises à un contrôle en vertu du règlement no 273/2004, aucun acte spécifique d’une autorité étatique n’est exigé pour leur acquisition, leur détention et leur utilisation.

28      Dans ces conditions, le Sofiyski gradski sad (tribunal de la ville de Sofia, Bulgarie) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Les dispositions du règlement [no 273/2004], qui complètent la disposition générale de l’article 354a, du [NK], en combinaison avec l’article 3, paragraphe 4, du [ZKNVP], permettent-elles qu’une personne puisse être reconnue coupable d’avoir détenu une substance de la catégorie 3 de l’annexe I, à savoir de l’acide chlorhydrique (chlorure d’hydrogène) dans une quantité de 585 millilitres (0,585 litre) ? »

 La procédure devant la Cour

29      À la suite de la signification, à la juridiction de renvoi, de l’arrêt du 2 février 2023, TF (Précurseurs de drogues) (C‑806/21, EU:C:2023:61), dans lequel la Cour a interprété le règlement no 273/2004, cette juridiction a informé la Cour, par lettre du 1er mars 2023, qu’elle maintenait sa question préjudicielle.

 Sur la question préjudicielle

30      En vertu de l’article 99 de son règlement de procédure, lorsqu’une réponse à une question posée à titre préjudiciel peut être clairement déduite de la jurisprudence, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée.

31      Il y a lieu de faire application de cette disposition dans le cadre de la présente affaire.

32      Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si le règlement no 273/2004 doit être interprété en ce sens qu’il s’applique à une situation dans laquelle une personne détient, dans le cadre d’une activité illicite, des substances classifiées relevant de la catégorie 3 de l’annexe I de ce règlement, et, dans l’affirmative, si cette personne peut être condamnée pour avoir détenu de telles substances sans autorisation ou enregistrement.

33      À cet égard, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il ressort de son article 1er, le règlement no 273/2004 établit des mesures harmonisées pour le contrôle et la surveillance, à l’intérieur de l’Union, de certaines substances fréquemment utilisées pour la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes, en vue d’éviter leur détournement.

34      Comme la Cour l’a déjà relevé, ce règlement a été adopté en vue de lutter contre le détournement de substances couramment utilisées dans la fabrication illicite de stupéfiants ou de substances psychotropes en mettant en place un système de surveillance du commerce de ces substances assorti de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives [arrêt du 2 février 2023, TF (Précurseurs de drogues), C‑806/21, EU:C:2023:61, point 48 et jurisprudence citée].

35      Il découle des considérants 1 à 6 du règlement no 273/2004 que celui-ci constitue la mise en œuvre dans l’ordre juridique de l’Union de l’article 12 de la convention de Vienne contre le trafic illicite, qui prévoit que les États membres qui y sont parties adoptent les mesures qu’ils jugent appropriées pour empêcher le détournement des substances énumérées aux fins de la fabrication illicite de stupéfiants et de substances psychotropes et coopèrent entre eux à cette fin. Lesdits États doivent, notamment, prendre les mesures nécessaires pour établir et maintenir un système de surveillance du commerce international des substances afin de faciliter la détection des opérations suspectes [arrêt du 2 février 2023, TF (Précurseurs de drogues), C‑806/21, EU:C:2023:61, point 49 et jurisprudence citée].

36      Il convient, par ailleurs, d’ajouter que, selon la jurisprudence de la Cour, par les règlements nos 273/2004 et 111/2005, qui poursuivent la même finalité, le législateur de l’Union a défini de manière détaillée le régime applicable aux précurseurs de drogue. Ainsi, d’une part, le règlement no 273/2004 établit des mesures harmonisées pour le contrôle et la surveillance, à l’intérieur de l’Union, des précurseurs de drogue en vue d’éviter leur détournement et, d’autre part, le règlement no 111/2005 fixe, conformément à son article 1er, des règles pour la surveillance du commerce, entre l’Union et les pays tiers, des précurseurs de drogue [arrêt du 2 février 2023, TF (Précurseurs de drogues), C‑806/21, EU:C:2023:61, point 50 et jurisprudence citée].

37      Le règlement no 273/2004 s’inscrit donc dans le cadre d’une réglementation plus large, dont fait également partie la décision-cadre 2004/757 [arrêt du 2 février 2023, TF (Précurseurs de drogues), C‑806/21, EU:C:2023:61, point 51].

38      Or, il convient de souligner que la décision-cadre 2004/757 établit des dispositions minimales relatives aux éléments constitutifs des infractions pénales et des sanctions applicables dans le domaine du trafic de drogue, permettant de définir une approche commune au niveau de l’Union dans la lutte contre le trafic de drogue. À cette fin, son article 2 prévoit que chaque État membre prend les mesures nécessaires pour que les comportements intentionnels qu’il énumère soient punis lorsqu’ils ne peuvent être légitimés, notamment la fabrication, le transport, la distribution de précurseurs, dont celui qui s’y livre sait qu’ils doivent être utilisés dans ou pour la production ou la fabrication illicites de drogues. Par ailleurs, l’article 1er, point 2, de cette décision-cadre définit le terme « précurseur » comme toute substance classifiée dans la législation communautaire donnant effet aux obligations découlant de l’article 12 de la convention de Vienne contre le trafic illicite [arrêt du 2 février 2023, TF (Précurseurs de drogues), C‑806/21, EU:C:2023:61, point 52].

39      Il en découle que, bien que la décision-cadre 2004/757, le règlement no 273/2004 et le règlement no 111/2005 poursuivent le même objectif, ces textes, tout en étant complémentaires, ont une portée différente. La décision-cadre 2004/757 fixe les éléments constitutifs des infractions pénales dans le domaine du trafic de drogue, qui concerne de ce fait les précurseurs de drogues et donc les substances classifiées, alors que le champ d’application des règlements nos 273/2004 et 111/2005 est circonscrit au commerce légal de telles substances [arrêt du 2 février 2023, TF (Précurseurs de drogues), C‑806/21, EU:C:2023:61, point 53].

40      Cette distinction résulte d’ailleurs des bases juridiques de ces différents actes. En effet, la décision-cadre 2004/757 est fondée sur l’article 31, sous e), et l’article 34, paragraphe 2, sous b), TUE, remplacés par les articles 82, 83 et 85 TFUE, qui relèvent du titre V dudit traité, intitulé « Espace de liberté, de sécurité et de justice », et, plus particulièrement, de son chapitre 4, relatif à la coopération judiciaire en matière pénale. En revanche, le règlement no 273/2004 a pour base juridique l’article 95 CE, remplacé par l’article 114 TFUE, qui relève du titre VII dudit traité, intitulé « Les règles communes sur la concurrence, la fiscalité et le rapprochement des législations ». De même, le règlement no 111/2005 est fondé sur l’article 133 CE, remplacé par l’article 207 TFUE. Or, ce dernier article relève de la cinquième partie du traité FUE, intitulée « Action extérieure de l’Union », et, plus particulièrement, de son titre II, intitulé « La politique commerciale commune » [arrêt du 2 février 2023, TF (Précurseurs de drogues), C‑806/21, EU:C:2023:61, point 54].

41      Partant, une situation dans laquelle une personne participe, dans le cadre d’une activité illégale, à la mise sur le marché de substances classifiées dans l’Union ne relève pas du champ d’application du règlement no 273/2004 [arrêt du 2 février 2023, TF (Précurseurs de drogues), C‑806/21, EU:C:2023:61, point 55].

42      Il s’ensuit qu’une situation, telle que celle en cause au principal, dans laquelle une personne détient, dans le cadre d’une activité illicite, des substances classifiées relevant de la catégorie 3 de l’annexe I du règlement no 273/2004 échappe au champ d’application de celui-ci. N’est pas pertinente à cet égard la circonstance que cette personne ait détenu de telles substances sans autorisation ou enregistrement.

43      Par conséquent, il convient de répondre à la question posée par la juridiction de renvoi que le règlement no 273/2004 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas à une situation dans laquelle une personne détient, dans le cadre d’une activité illicite, des substances classifiées relevant de la catégorie 3 de l’annexe I de ce règlement. N’est pas pertinente à cet égard la circonstance que cette personne ait détenu de telles substances sans autorisation ou enregistrement.

 Sur les dépens

44      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) dit pour droit :

Le règlement (CE) no 273/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 11 février 2004, relatif aux précurseurs de drogues, tel que modifié par le règlement (UE) no 1258/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 20 novembre 2013,

doit être interprété en ce sens que :

il ne s’applique pas à une situation dans laquelle une personne détient, dans le cadre d’une activité illicite, des substances classifiées relevant de la catégorie 3 de l’annexe I de ce règlement. N’est pas pertinente à cet égard la circonstance que cette personne ait détenu de telles substances sans autorisation ou enregistrement.

 Signatures


*      Langue de procédure : le bulgare.

Augša