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Document 62021TO0717(01)

Ordonnance du Tribunal (première chambre) du 14 décembre 2022.
ICA Traffic GmbH contre Commission européenne.
Recours en annulation – Marchés publics – Procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché – Fourniture de robots de désinfection aux hôpitaux européens dans le contexte de la crise de la COVID-19 – Quantité maximale des produits à fournir dans le cadre d’un contrat-cadre – Acte s’inscrivant dans un cadre purement contractuel – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité.
Affaire T-717/21.

ECLI identifier: ECLI:EU:T:2022:827

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (première chambre)

14 décembre 2022 (*)

« Recours en annulation – Marchés publics – Procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché – Fourniture de robots de désinfection aux hôpitaux européens dans le contexte de la crise de la COVID-19 – Quantité maximale des produits à fournir dans le cadre d’un contrat-cadre – Acte s’inscrivant dans un cadre purement contractuel – Acte non susceptible de recours – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑717/21,

ICA Traffic GmbH, établie à Dortmund (Allemagne), représentée par Mes S. Hertwig et C. Vogt, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. L. Mantl, B. Araujo Arce et Mme M. Ilkova, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé, lors des délibérations, de MM. D. Spielmann, président, R. Mastroianni et Mme M. Brkan (rapporteure), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la phase écrite de la procédure,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, ICA Traffic GmbH, demande l’annulation de la prétendue décision de la Commission, rendue publique dans un communiqué de presse du 21 septembre 2021, de commander 105 robots de désinfection utilisant la lumière ultraviolette supplémentaires pour les hôpitaux européens (Covid-19) (ci-après la « décision attaquée »).

 Antécédents du litige

2        La requérante est une société de droit allemand active, notamment, sur le marché des robots de désinfection autonomes.

3        Afin de garantir l’efficacité de la désinfection et la sécurité du personnel hospitalier dans le contexte de la pandémie de COVID-19, la Commission européenne a décidé d’acquérir des robots de désinfection (ci-après les « robots ») et d’en faire don à un certain nombre d’hôpitaux européens en vertu des dispositions de l’instrument d’aide d’urgence (ESI). Après analyse des techniques disponibles, le choix s’est porté sur la désinfection par des robots autonomes utilisant la lumière ultraviolette.

4        Compte tenu de l’urgence résultant de la crise de la COVID-19, la Commission a décidé de lancer la procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché, conformément au point 11.1, sous c), de l’annexe I du règlement (UE, Euratom) 2018/1046 du Parlement européen et du Conseil, du 18 juillet 2018, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union, modifiant les règlements (UE) no 1296/2013, (UE) no 1301/2013, (UE) no 1303/2013, (UE) no 1304/2013, (UE) no 1309/2013, (UE) no 1316/2013, (UE) no 223/2014, (UE) no 283/2014 et la décision no 541/2014/UE, et abrogeant le règlement (UE, Euratom) no 966/2012 (JO 2018, L 193, p. 1, ci-après le « règlement financier »).

5        Afin de préparer la procédure de passation de marché et d’obtenir des informations sur le marché des robots autonomes et les fournisseurs potentiels, la Commission a procédé à une consultation préliminaire du marché, en application de l’article 166 du règlement financier.

6        Sur la base de cette consultation du marché, la Commission a constitué une base de données de fournisseurs, lesquels ont ensuite été évalués sur la base de critères prédéfinis.

7        Six fournisseurs ayant satisfait à ces critères ont été invités à soumettre une offre dans le cadre d’une procédure négociée sans publication préalable (CNECT/LUX/2020/NP0084), mais seulement trois d’entre eux en ont soumis une.

8        Le 30 octobre 2020, un rapport d’évaluation a été établi, conformément au point 30.1 de l’annexe I du règlement financier, afin d’attribuer le marché public. Le 3 novembre 2020, l’ordonnateur compétent a attribué le marché à deux soumissionnaires, conformément à la recommandation figurant dans le rapport d’évaluation, alors que le troisième soumissionnaire a été écarté au motif que son offre ne répondait pas aux critères de sélection.

9        Le 19 novembre 2020, deux contrats-cadres ont été conclus pour une durée de douze mois avec les soumissionnaires retenus, dont le contrat-cadre FW-00103506 avec la société UVD Robots APS (ci-après le « contrat-cadre en cause »). Leur signature a été annoncée au Journal officiel de l’Union européenne, le 9 décembre 2020, par l’avis d’attribution de marché 2020/S 240-592299.

10      Cet avis d’attribution de marché, dont l’objet porte sur des « robots de désinfection pour les hôpitaux européens (COVID-19) », mentionnait que la valeur totale du marché (hors TVA) était de 15 millions d’euros et que la Commission avait décidé d’acheter jusqu’à 200 robots.

11      Par courriel du 24 novembre 2020, la requérante a demandé à la Commission des informations au sujet du marché public en cause, dont elle a affirmé avoir pris connaissance, notamment, par le communiqué de presse de la Commission du 23 novembre 2020. Des échanges entre la requérante et la Commission s’en sont suivis au sujet des activités de la requérante ainsi que sur le robot proposé par celle-ci.

12      Le 24 décembre 2020, un corrigendum à l’avis d’attribution de marché du 9 décembre 2020 a été publié sous le numéro 2020/S 251-626998 (ci-après l’« avis d’attribution de marché »).

13      Par courriel du 5 août 2021, la Commission a indiqué à la requérante que l’appel d’offres en cause était terminé, mais que si elle organisait à l’avenir une opération analogue et si la solution proposée par la requérante était conforme aux exigences d’une telle procédure, elle la prendrait en considération.

14      Le 21 septembre 2021, la Commission a annoncé dans un communiqué de presse que le 200e robot visé dans l’avis d’attribution de marché avait été livré et qu’elle avait décidé d’acquérir 100 robots supplémentaires auprès de UVD Robots (ci-après le « communiqué de presse du 21 septembre 2021 »).

15      En l’espèce, le contrat-cadre en cause a été exécuté au moyen de dix bons de commande signés par UVD Robots et la Commission que cette dernière a produits au titre de mesure d’organisation de la procédure et dont il ressort que 305 robots ont été commandés au total.

16      Par courriel du 24 septembre 2021, la requérante, considérant que l’avis d’attribution de marché faisait état d’un nombre maximal de 200 robots à acquérir, a demandé à la Commission quelle avait été la procédure suivie pour l’acquisition des robots supplémentaires.

17      Par courriels des 7 et 27 octobre 2021, la Commission a répondu qu’elle avait commandé les robots supplémentaires sur la base du contrat-cadre en cause et qu’elle n’avait dès lors pas procédé à une nouvelle attribution de marché. Elle a ajouté que, dans la mesure où, d’une part, la valeur maximale du contrat-cadre n’avait pas encore été atteinte et, d’autre part, que la quantité de 200 robots à acquérir, mentionnée uniquement sous le point « Description » de l’avis d’attribution de marché, n’était qu’une estimation, elle avait considéré qu’elle pouvait acquérir autant de robots que nécessaire jusqu’à concurrence de la valeur maximale du contrat-cadre, à savoir 15 millions d’euros.

18      Par courriel du 28 octobre 2021, la requérante a contesté les explications de la Commission, en indiquant que le nombre maximal de robots à acquérir ne pouvait pas être considéré comme étant estimatif, à la différence de la valeur totale du marché.

19      Par courriel du 29 octobre 2021, la Commission a informé la requérante qu’elle avait spécifiquement opté pour la conclusion de contrats-cadres, étant donné qu’elle ne pouvait qu’estimer la quantité de robots nécessaires, mais pouvait fixer le plafond des contrats-cadres en fonction du budget disponible. La Commission a ajouté ne pas avoir l’intention d’acheter plus des 305 robots acquis pour un montant total inférieur à 12 millions d’euros et que les derniers contrats seront signés avant le 18 novembre 2021, date d’expiration des contrats-cadres.

 Conclusions des parties

20      La requérante conclut, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

21      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours irrecevable ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

22      En vertu de l’article 130, paragraphes 1 et 7, du règlement de procédure du Tribunal, si la partie défenderesse le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité ou l’incompétence sans engager le débat au fond.

23      En l’espèce, la Commission ayant demandé qu’il soit statué sur l’irrecevabilité, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier, décide de statuer sur cette demande sans poursuivre la procédure.

24      À titre liminaire, il y a lieu de constater que la requérante fonde ses arguments sur les dispositions de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE (JO 2014, L 94, p. 65), au lieu du règlement financier, qui constitue la législation applicable en matière de passation de marchés publics pour le compte des institutions de l’Union européenne.

25      À cet égard, la requérante reconnaît au point 17 de ses observations sur l’exception d’irrecevabilité que les dispositions pertinentes du règlement financier s’appliquent, la Commission étant une institution de l’Union. En effet, il ressort en substance de l’article 161 du règlement financier que les institutions de l’Union sont soumises aux mêmes normes que celles imposées aux pouvoirs adjudicateurs en vertu de la directive 2014/24 précitée. Partant, les dispositions dont se prévaut la requérante doivent être comprises comme faisant référence aux dispositions analogues du règlement financier.

26      En l’espèce, il ressort des écritures et des documents produits par la Commission le 24 juin 2022, au titre de mesure d’organisation de la procédure, que celle-ci a acquis, sur la base du contrat-cadre en cause exécuté par des contrats spécifiques et des bons de commande, un ensemble de 305 robots, répartis en dix bons de commande, pour un montant total de 10 931 225 euros. Sept bons de commande, portant sur 203 robots, ont été émis avant le communiqué de presse du 21 septembre 2021 visé au point 14 ci-dessus, et trois bons de commande, portant sur 102 robots, ont été émis après ledit communiqué.

27      Au soutien de son exception d’irrecevabilité, la Commission fait valoir plusieurs arguments. Premièrement, à titre principal, elle soutient qu’il n’existe pas d’acte attaquable au titre de l’article 263 TFUE. Deuxièmement, à titre subsidiaire, elle considère que la requérante n’a pas de qualité pour agir. Troisièmement, à titre infiniment subsidiaire, la Commission estime également que la requérante n’a pas d’intérêt à agir.

28      S’agissant du défaut d’acte attaquable, la Commission rappelle, tout d’abord, que le droit budgétaire de l’Union n’exige pas de procédure de passation de marché ou d’attribution de marché supplémentaire avant la conclusion de contrats spécifiques sur la base d’un contrat-cadre. Elle indique, à cet égard, que les contrats-cadres de livraison en cascade, comme celui en cause, sont exécutés au moyen de contrats spécifiques et de bons de commande signés par les parties, de sorte que les quantités exactes et le calendrier des livraisons ne sont précisés que lors de la conclusion de ces contrats spécifiques. Par conséquent, la conclusion desdits contrats spécifiques, y compris des bons de commande des 105 robots supplémentaires, sur la base du contrat-cadre, ne constituait qu’une forme d’exécution dudit contrat-cadre. Dans la mesure où un communiqué de presse portant sur l’exécution du contrat-cadre ne constituerait pas un acte attaquable et qu’elle aurait agi exclusivement en tant que partie au contrat-cadre, la Commission estime que la décision attaquée n’a pas produit d’effets juridiques contraignants en dehors de cette relation contractuelle, ni entraîné l’exercice de prérogatives de puissance publique dont elle disposerait en sa qualité d’autorité administrative.

29      La requérante conteste les arguments de la Commission.

30      Tout d’abord, il convient de relever que la requérante n’est pas partie au contrat-cadre en cause, de sorte qu’il n’existe aucun lien contractuel entre elle et la Commission dans le cadre du présent litige. Par conséquent, le rapport juridique entre les parties, s’il existe, ne peut être que de nature non contractuelle, de sorte que le présent recours en annulation dirigé contre la décision attaquée de la Commission n’est ouvert à la requérante qu’à la condition que cette décision constitue un acte attaquable et que, en même temps, celle-ci dispose de la qualité pour agir (voir, par analogie, ordonnances du 29 juin 2010, Mauerhofer/Commission, T‑515/08, non publiée, EU:T:2010:260, point 65, et du 25 mars 2015, Borde et Carbonium/Commission, T‑314/14, non publiée, EU:T:2015:197, point 26).

31      S’agissant de la question de savoir si la décision attaquée constitue un acte attaquable, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 263 TFUE, le juge de l’Union ne contrôle que la légalité des actes adoptés par les institutions et les organes ou organismes de l’Union destinés à produire des effets juridiques obligatoires à l’égard des tiers.

32      Cette compétence ne concerne que les actes visés par l’article 288 TFUE que les institutions et les organes ou organismes de l’Union sont amenés à prendre dans les conditions prévues par le traité FUE (ordonnance du 10 mai 2004, Musée Grévin/Commission, T‑314/03 et T‑378/03, EU:T:2004:139, point 63).

33      Constituent ainsi des actes susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation au sens de l’article 263 TFUE les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la partie requérante, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celle-ci (voir arrêt du 12 septembre 2006, Reynolds Tobacco e.a./Commission, C‑131/03 P, EU:C:2006:541, point 54 et jurisprudence citée).

34      En revanche, les actes adoptés par les institutions et les organes ou organismes de l’Union qui s’inscrivent dans un cadre purement contractuel dont ils sont indissociables ne figurent pas, en raison de leur nature même, au nombre des actes visés à l’article 288 TFUE, dont l’annulation peut être demandée en vertu de l’article 263 TFUE (ordonnance du 10 mai 2004, Musée Grévin/Commission, T‑314/03 et T‑378/03, EU:T:2004:139, point 64. Voir également, ordonnance du 27 juin 2022, Equinoccio-Compañía de Comercio Exterior/Commission, C‑3/22 P, non publiée, EU:C:2022:504, point 21).

35      Pour déterminer si des mesures constituent des actes susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation au sens de l’article 263 TFUE, c’est à leur substance qu’il y a lieu de s’attacher, la forme dans laquelle elles sont prises étant, en principe, indifférente à cet égard (voir, en ce sens, arrêt du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, EU:C:1981:264, point 9).

36      Il en découle que, en présence d’un cadre purement contractuel, les juridictions de l’Union ne peuvent être saisies d’un recours sur le fondement de l’article 263 TFUE que si l’acte attaqué vise à produire des effets juridiques contraignants qui se situent en dehors de la relation contractuelle et qui impliquent l’exercice de prérogatives de puissance publique conférées à l’institution contractante en sa qualité d’autorité administrative (voir ordonnance du 14 novembre 2018, Spinoit/Commission e.a., T‑711/17, non publiée, EU:T:2018:803, point 36 et jurisprudence citée).

37      En l’espèce, la requérante conteste le fait que, en achetant les 105 robots supplémentaires, la Commission aurait agi dans le cadre du contrat-cadre, car celui-ci aurait épuisé ses effets après la livraison des 200 robots initiaux annoncés. Il y a donc lieu d’examiner si la décision attaquée s’inscrit ou non dans l’exécution du contrat-cadre en cause et si elle est susceptible de modifier de façon caractérisée la situation juridique de la requérante.

38      Premièrement, ainsi qu’il ressort du point 4 ci-dessus, la passation du marché public en cause a été effectuée dans le cadre de la procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché pour cause d’urgence impérieuse résultant d’événements imprévisibles, au sens de l’annexe I, point 11.1, sous c), du règlement financier. Dans cette procédure, le contrat-cadre en cause a été signé avant la publication de l’avis d’attribution de marché, en vertu de l’annexe I, point 2.4, sous b), dudit règlement.

39      Deuxièmement, il convient de constater que l’avis d’attribution de marché indique sous la section II.1.4), intitulée « Description succincte » :

« Afin de garantir l’efficacité de la désinfection et la sécurité du personnel hospitalier dans le contexte de la pandémie de COVID-19, la Commission va se procurer des robots de désinfection et en faire don à un certain nombre d’hôpitaux en vertu des dispositions de l’[ESI]. La désinfection au rayonnement UV a été identifiée comme une méthode efficace de désinfection, et les robots-désinfecteurs par rayonnement UV ont déjà été utilisés avec succès dans les hôpitaux. La Commission achètera jusqu’à 200 robots-désinfecteurs par rayonnement UV faciles à utiliser, capables de détruire des bactéries, des virus et d’autres microbes nuisibles, afin qu’ils soient déployés dans les hôpitaux et utilisés pendant au moins douze mois. »

40      En outre, la section II.1.7), de cet avis, intitulée « Valeur totale du marché (hors TVA) », précise que la valeur du marché s’élève à 15 000 000 d’euros. Cette information est également reprise sous la section V, intitulée « Attribution de marché », au point V.2.4), en indiquant la valeur de 15 000 000 d’euros tant pour l’estimation initiale du montant total du marché que pour la valeur totale du marché.

41      Troisièmement, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 2, point 31, du règlement financier, un contrat-cadre est défini comme « un marché public conclu entre un ou plusieurs opérateurs économiques et un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs aux fins d’établir les conditions régissant les marchés spécifiques qui en découlent et pouvant être attribués au cours d’une période donnée, notamment en ce qui concerne les prix et, le cas échéant, les quantités envisagées ».

42      En l’espèce, le point I.5.1 du contrat-cadre en cause prévoit que « le montant maximum couvrant l’ensemble des achats dans le cadre de ce contrat-cadre est de 15 000 000 d’euros, sans que cela oblige le pouvoir adjudicateur d’acheter pour le montant maximum ». Toutefois, ledit contrat-cadre ne fait référence à aucune quantité maximale de robots à acquérir. Il convient d’en déduire que la Commission n’entendait pas limiter l’étendue du marché à une quantité maximale de robots à acquérir, mais seulement limiter la valeur maximale du marché à un montant de 15 000 000 d’euros.

43      Dès lors, compte tenu de ces éléments, la seule affirmation dans la description de l’avis d’attribution de marché, publié postérieurement à la conclusion du contrat-cadre (voir point 38 ci-dessus), selon laquelle « la Commission achètera jusqu’à 200 robots-désinfecteurs », ne saurait être comprise, comme le prétend la requérante, comme étant une condition essentielle limitant le marché à une quantité maximale, mais plutôt comme l’estimation d’une quantité que la Commission pouvait au besoin dépasser, sous réserve de la limitation de la valeur du marché à 15 000 000 euros.

44      Dans la mesure où la Commission a indiqué avoir acquis l’ensemble des robots pour un montant de 10 931 225 euros (voir point 26 ci-dessus), qui est inférieur à la valeur totale du marché, ce que la requérante ne conteste pas, l’acquisition des 105 robots supplémentaires n’excédait pas les limites prévues dans le contrat-cadre en cause.

45      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante tiré de l’arrêt du 17 juin 2021, Simonsen & Weel (C‑23/20, EU:C:2021:490), selon lequel un accord-cadre épuise ses effets une fois que la quantité qui y est indiquée a été atteinte. En effet, le pouvoir adjudicateur n’avait indiqué dans l’avis de marché ni la quantité ni la valeur maximales des produits à acquérir, ce qui avait conduit la Cour à juger que l’avis de marché devait indiquer la quantité et/ou la valeur estimée ainsi qu’une quantité et/ou une valeur maximale des produits à fournir en vertu d’un accord-cadre et qu’une fois que cette limite était atteinte, ledit accord-cadre épuiserait ses effets. Toutefois, comme cela a déjà été constaté au point 42 ci-dessus, dans la mesure où le contrat-cadre en cause n’a pas prévu une quantité maximale de robots à acquérir, celui-ci ne pourrait pas épuiser ses effets sur cette base.

46      Dès lors que la décision attaquée a exclusivement été prise dans le cadre d’une relation contractuelle entre UVD Robots et la Commission, cette dernière a agi, dans le cadre des droits et des obligations nés du contrat-cadre en cause, prévoyant la possibilité de conclure des contrats spécifiques, y compris des bons de commande, sur la base dudit contrat-cadre, en tant que partie contractante, sans avoir exercé de prérogatives de puissance publique en sa qualité d’autorité administrative, au sens de la jurisprudence citée au point 36 ci-dessus.

47      Il s’ensuit que la décision attaquée a produit et épuisé tous ses effets dans le cadre de l’exécution du contrat-cadre en cause, duquel la requérante est un tiers. Partant, cette décision n’est pas susceptible de modifier de façon caractérisée la situation juridique de la requérante, au sens de la jurisprudence citée au point 33 ci-dessus, et, par conséquent, ne constitue pas, à son égard, un acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE.

48      Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le recours comme étant irrecevable pour défaut d’acte attaquable.

 Sur les dépens

49      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

50      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme étant irrecevable.

2)      ICA Traffic GmbH est condamnée aux dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé.

Fait à Luxembourg, le 14 décembre 2022.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

D. Spielmann


*      Langue de procédure : l’allemand.

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