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Document 52004DC0261

Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et Comité Économique et Social Européen - La gestion du droit d'auteur et des droits voisins au sein du marché intérieur (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

/* COM/2004/0261 final */

52004DC0261

Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen et Comité Économique et Social Européen - La gestion du droit d'auteur et des droits voisins au sein du marché intérieur (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) /* COM/2004/0261 final */


COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL, AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN - La gestion du droit d'auteur et des droits voisins au sein du marché intérieur (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

Résumé

La notion de "gestion des droits" se réfère à la façon dont le droit d'auteur et les droits voisins sont administrés, c'est-à-dire donnés en licence, cédés ou rémunérés pour tout type d'utilisation. La gestion individuelle des droits est la commercialisation des droits par les titulaires individuels auprès d'utilisateurs commerciaux. La gestion collective des droits est le système par lequel une société de gestion collective administre conjointement, en tant que mandataire, les droits et surveille, collecte et distribue le paiement de redevances au nom de plusieurs titulaires.

Depuis 1991, le cadre juridique communautaire du droit d'auteur et des droits voisins s'est développé par l'adoption de sept directives sur le droit matériel de la propriété intellectuelle et plus récemment, par la proposition d'une directive sur la mise en oeuvre des droits (sanctions et voies de recours) présentée par la Commission en janvier 2003. La gestion des droits n'a été traitée dans l'acquis communautaire que marginalement jusqu'à présent et a été en grande partie laissée à l'appréciation des pouvoirs législatifs des États membres. Entre 1995 et 2002, la Commission a procédé à une large consultation sur la question de la gestion des droits, à la fois individuelle et collective.

Concluant le processus de consultation, la communication traite de la gestion individuelle et collective et examine si les méthodes actuelles de gestion des droits entravent le fonctionnement du marché intérieur, compte tenu notamment de la montée en puissance de la société de l'information.

Au chapitre 1, la gestion du droit d'auteur et des droits voisins est présentée, y compris ses liens avec le marché intérieur et son impact sur ce dernier. Concernant la demande de développement des licences communautaires pour certains droits ayant un impact au-delà des frontières, plusieurs options possibles pour l'avenir ont été évaluées. La solution retenue devra être portée par le marché et viser la mise en place d'un cadre commun plus important sur les conditions de la gestion collective. Une autre question abordée au chapitre 1 est l'introduction de systèmes de gestion de droits numériques (systèmes DRM). Du point de vue de la Commission, le développement des systèmes de gestion des droits numériques (DRM) devrait en principe être lui aussi basé sur l'acceptation par toutes les parties intéressées, y compris les consommateurs et sur la politique du législateur en matière de droit d'auteur. Un préalable nécessaire permettant d'assurer pour les ayants droit et les utilisateurs (notamment les consommateurs) une accessibilité au niveau communautaire des systèmes DRMs et des services est que ces derniers soient interopérables.

Au chapitre 2, pour ce qui est de la "gestion individuelle des droits », la Commission a trouvé qu'il existe globalement des éléments communs suffisants dans tous les États membres. À ce jour, les différences existantes en droit national n'ont pas soulevé de problèmes particuliers par rapport au fonctionnement du marché intérieur. Les développements au niveau national continueront à être suivis avec attention.

Le chapitre 3 s'intéresse à la gestion collective, qui est déjà bien établie dans tous les États membres de la Communauté. Elle est devenue une nécessité économique, culturelle et sociale pour l'administration de certains droits, également dans les pays accédants. L'efficacité, la transparence et la responsabilité des sociétés de gestion collectives sont cruciales pour le fonctionnement du marché intérieur dans les échanges transfrontaliers de biens et de services fondés sur le droit d'auteur et les droits voisins. Un meilleur fonctionnement du marché intérieur de la gestion collective des droits ne peut être atteint que par un cadre commun qui inclut l'établissement et le statut des sociétés de gestion collective; leur fonctionnement et leur obligation de rendre des comptes selon les règles de bonne gouvernance ainsi que les mécanismes de contrôle interne et externe, y compris pour le règlement des litiges. La définition des conditions générales de ces caractéristiques au moyen de réglementations cadres communautaires permettrait de réaliser les objectifs décrits dans la présente communication.

Introduction

Le marché des biens et des services fondés sur le droit d'auteur et les droits voisins comprend une grande variété de produits et services. Les biens et services traditionnels hors ligne ont toujours joué un rôle important dans l'exploitation du droit d'auteur et des droits voisins, mais la société de l'information ouvre des nouveaux marchés dans lesquels les oeuvres protégées peuvent être exploitées par le biais de produits électroniques et de services interactifs.

La contribution économique des industries fondées sur le droit d'auteur dans l'Union européenne se chiffre au niveau communautaire à plus de 5% du PIB [1]. Pour la plupart des formes d'exploitation et afin de réaliser des économies d'échelle, le marché intérieur est devenu l'environnement approprié. Les frontières disparaissent progressivement dans les échanges de biens et de services fondés sur le droit d'auteur ou les droits voisins. Les biens et les services fondés sur le droit d'auteur sont aujourd'hui - et devraient être, chaque fois que c'est viable économiquement - disponibles et commercialisés au niveau communautaire.

[1] L'importance économique de la protection du droit d'auteur et des droits voisins dans l'Union européenne était l'objet d'une étude commandée par la Commission européenne. Les résultats de cette étude sont disponibles depuis novembre 2003.

Le cadre juridique de la protection du droit d'auteur et des droits voisins dans l'Union européenne doit tenir compte de ces réalités. Or, les structures nationales du droit de propriété intellectuelle sont fondées sur des traditions juridiques et culturelles différentes. En même temps, pour que le marché intérieur fonctionne correctement, sans entrave inutile à la libre circulation des biens et des services et sans distorsion de la concurrence, la nécessité d'harmoniser les législations nationales en matière de droits d'auteur est devenue apparente dès les années 70 et a été mise en lumière par plusieurs arrêts de la Cour [2].

[2] Affaire 158/86 Warner Brothers et Metronome Video v Christiansen (1988) REC 2605; EMI Electrola GmbH v Patricia affaire 341/87 (1989) REC 79.

Il y a eu une intensive période de consultation entre 1995 et 2002 ; les premiers efforts d'harmonisation se sont concentrés sur le droit matériel de la propriété intellectuelle. Sept directives ont été adoptées entre 1991 et 2001 [3], harmonisant les droits et les exceptions ainsi que certaines caractéristiques du droit matériel de la propriété intellectuelle.

[3] Directive 91/250/CEE du Conseil, du 14 mai 1991, concernant la protection juridique des programmes d'ordinateurs (JO L 122 du 17.5.1991, p. 42); directive 92/100/CEE du Conseil, du 19 novembre 1992, relatif au droit de location et de prêt et à certains droits voisins du droit d'auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle (JO L 346 du 27.11.1992, p. 61); directive 93/83/CEE du Conseil, du 27 septembre 1993, relative à la coordination de certaines règles du droit d'auteur et des droits voisins du droit d'auteur applicables à la radiodiffusion par satellite et la retransmission par câble (JO L 248 du 6.10.1993, p. 15); directive 93/98/CEE du Conseil, du 29 octobre 1993, relative à l'harmonisation de la durée de protection du droit d'auteur et de certains droits voisins (JO L 290 du 24.11.1993, p. 9); directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 1996, concernant la protection juridique des bases de données (JO L 77 du 27.3.1996, p. 20); directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2001, sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société d'information (JO L 167 du 22.6.2001, p. 10); directive 2001/84/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 septembre 2001, relative au droit de suite au profit de l'auteur d'une oeuvre d'art originale (JO L 272 du 13.10.2001, p. 32).

Par ailleurs, un cadre commun est également nécessaire concernant les règles de mise en oeuvre des droits, pour que le marché intérieur des biens et des services fondés sur le droit d'auteur fonctionne correctement. En conséquence, une directive sur cette question devait actuellement être adoptée par le législateur communautaire. Le dernier élément de la propriété intellectuelle est la gestion des droits. Maintenant que de nombreux aspects du droit matériel de la propriété intellectuelle sont harmonisés, il faudra veiller à l'équité des règles et des conditions de gestion des droits au niveau communautaire.

La communication conclut la consultation qui a eu lieu et propose le suivi opérationnel requis.

1. Gestion des droits au sein du marché intérieur

1.1. Contexte et principales caractéristiques de la gestion des droits

1.1.1. Les catégories et méthodes de gestion des droits

Outre l'objectif économique plus général de stimuler l'investissement, la croissance et l'emploi, la protection du droit d'auteur sert des objectifs non économiques, en particulier la créativité ainsi que la diversité et l'identité culturelles. Les auteurs d'oeuvres littéraires ou artistiques ainsi que les titulaires de droits voisins bénéficient de droits exclusifs d'autoriser (contre paiement) ou d'interdire l'utilisation de leurs oeuvres ou autres objets protégés. Dans les cas où les droits ne peuvent être mis en oeuvre vis-à-vis de personnes individuelles ou si la gestion individuelle serait impossible compte tenu du nombre et de la nature des utilisations concernées, un droit à rémunération est octroyé à la place du droit exclusif.

La gestion des droits peut se faire de manière individuelle ou collective. Les droits exclusifs sont traditionnellement gérés individuellement par les titulaires eux-mêmes qui accordent une licence à des utilisateurs commerciaux (par exemple éditeurs ou producteurs) ou à des intermédiaires (par exemple éditeurs, producteurs ou distributeurs). Cette gestion individuelle se fait généralement au moyen d'une licence contractuelle qui peut être exclusive ou non exclusive et qui peut autoriser un seul type d'utilisation ou toutes les utilisations. Les droits à rémunération sont généralement gérés par des sociétés de gestion collective, qui agissent en tant que mandataires.

1.1.2. Cadre juridique existant

Au niveau international, l'article 11bis, paragraphe 2, l'article 13, paragraphe 1, de la convention de Berne [4] et l'article 12 de la convention de Rome [5], abordent la gestion collective et précisent que les Etats membres peuvent déterminer les conditions d'exercice de certains droits (voir les articles susmentionnés de la convention de Berne). L' article 2, paragraphe 6 de la convention de Berne concerne la gestion des droits et précise que "cette protection s'exerce au profit de l'auteur et de ses ayants droit". L'article 14bis, paragraphe 2, point b) de la convention de Berne stipule que certains auteurs d'oeuvres cinématographiques ne peuvent pas exercer leurs droits séparément.

[4] Convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques du 9 septembre 1886 (acte de Paris modifié le 28 septembre 1979).

[5] Convention internationale pour la protection des exécutants, des producteurs de phonogrammes et des organismes de radiodiffusion du 26 octobre 1961.

Au niveau national, il existe des différences importantes concernant à la fois la législation et la pratique du droit. En outre, les législations des États membres et pays accédants en matière de gestion collective évoluent et pas nécessairement dans le même sens.

Au niveau communautaire, cette question a été traitée dans plusieurs directives de l'acquis communautaire, bien que dans une mesure limitée. Pour ce qui est de la gestion individuelle des droits, les directives confirment généralement que les droits économiques exclusifs peuvent être transférés, cédés ou donnés en licence contractuelle, mais ne traitent pas des conditions de la gestion des droits en tant que telle. Concernant la gestion collective des droits, les directives de l'acquis contiennent à maintes reprises des références aux sociétés de gestion collective, mais ne règlent pas les conditions de gestion en tant que telle [6].

[6] Voir point 3.2.1.

1.2. Répercussions du marché intérieur sur la gestion des droits

1.2.1. Nature territoriale de la propriété intellectuelle

Traditionnellement, la législation applicable à l'acte d'exploitation d'un droit quelconque est celle du lieu d'exploitation. Ce principe est confirmé par l'article 5, paragraphe 2, de la convention de Berne et reconnu par les lois nationales.

Pour l'Union européenne, ceci implique que la protection du droit d'auteur est accordée par chaque État membre. Il n'existe pas de « code » communautaire du droit d'auteur. L'harmonisation du droit matériel de la propriété intellectuelle n'a pas cherché à éliminer ou à limiter la nature territoriale du droit d'auteur, ni la capacité des titulaires à exercer leurs droits de façon territoriale. Le principe de l'exploitation territoriale a été reconnu par le législateur communautaire et a été confirmé par la Cour de justice [7], qui en a toutefois limité l'impact. La cour ne l'a limité que pour l'épuisement du droit de distribution au niveau communautaire en cas de conflit avec la libre circulation des marchandises ainsi que dans les limites du respect des règles de concurrence lorsqu'il résulte d'accords restrictifs, de pratiques concertées ou d'abus de position dominante.

[7] Voir affaire 62/79, Coditel v. Ciné-Vog Films (1980) REC 881; affaire 262/81, Coditel v. Ciné-Vog Films (1982) REC 3381. Dans "Coditel II", point n° 14, la Cour a précisé que : "Pas plus qu'il ne saurait être exclu que certaines modalités de cet exercice se révèlent incompatibles avec les dispositions des articles 59 et 60, pas plus il ne saurait être exclu que des modalités d'exercice puissent se révéler incompatibles avec les dispositions de l'article 85, dès lors que celles-ci constituerait le moyen d'une entente susceptible d'avoir pour objet, ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun".

1.2.2. Exploitation transfrontalière du droit d'auteur et des droits voisins

Pour la plupart des formes d'exploitation et dans l'optique de réaliser des économies d'échelle, le marché intérieur s'est imposé comme l'environnement économique approprié.

Avec l'essor de l'environnement numérique, le commerce transfrontalier de marchandises et de services fondés sur le droit d'auteur et les droits voisins est devenu la règle, surtout pour les droits de reproduction, de communication au public et de mise à disposition. Ces droits sont impliqués dans toute transmission numérique et ont été harmonisés à cet effet dans le cadre de la directive 2001/29/CE.

1.2.3. Obstacles à un marché intérieur de la gestion des droits

En conséquence, l'octroi de licences hors ligne prend de plus en plus une dimension transfrontalière et celui de licences en ligne permet une activité transfrontalière par définition. Toutefois, étant donné que la législation du pays d'exploitation s'applique à l'octroi de licences, différentes règles doivent être respectées dans le cas d'une exploitation dans plusieurs États membres.

En ce qui concerne la gestion individuelle des droits, différentes règles existent et concernent la propriété et la titularité de l'oeuvre, les conditions applicables aux contrats de droits d'auteur, les points de rattachement (critères d'éligibilité pour la protection).

Les conditions de gestion collective des droits varient également d'un État membre à l'autre. L'absence d'un cadre commun concernant la gouvernance des sociétés de gestion collective peut porter préjudice à la fois aux utilisateurs et aux titulaires des droits. En effet, compte tenu de la variété des conditions applicables dans les États membres, ceux-ci sont confrontés à un manque de transparence et de sécurité juridique. Plus il existe des divergences concernant ces règles, plus il est en principe difficile d'octroyer des licences transfrontières couvrant plusieurs Etats membres.

1.2.4. La demande de licences communautaires

Un thème récurent tout au long de la procédure de consultation est la demande de licences communautaires, en particulier parmi les utilisateurs commerciaux et spécialement pour le marché grandissant de l'environnement en ligne [8]. Dans ce contexte, les autorisations communautaires s'appliquent de façon générique à l'octroi de licences par une seule société de gestion, en une transaction unique, pour une exploitation dans toute la Communauté.

[8] Dans un contexte similaire, la Commission note une demande croissante pour l'accès aux programmes satellites protégés TV radiodiffusés originaires d'un Etat membre au que celui dans lequel le téléspectateur réside. Alors que les technologies actuelles sur l'accès conditionnel rendent tout à fait possible de déterminer exactement l'audience payante comprise dans l'empreinte satellitaire, les modèles économiques et les arrangements contractuels offrent souvent un service basé sur un seul territoire. Alors que cette question est liée à la demande de licences communautaires, elle est davantage basée sur l'accès conditionnel que sur le droit d'auteur et son commerce. A cet égard, voir le rapport de la Commission sur la protection juridique des services électroniques de paiement, COM(2003)198 final, 24.04.2003 point 4.4.

Les opérateurs recherchent déjà des solutions contractuelles et technologiques garantissant un accès approprié aux oeuvres et autres objets protégés à l'échelle européenne, voire mondiale.

L'octroi direct de licences communautaires était prévu dans l'accord cadre entre les sociétés de gestion collective des auteurs et l'association des producteurs de phonogrammes (accord BIEM/IFPI) concernant les droits de reproduction mécanique. Plus récemment, en ce qui concerne la transmission par voie électronique, y compris la diffusion sur le Web et la transmission à la demande d'oeuvres musicales par des opérations de streaming ou de téléchargement, les sociétés d'auteurs ont notifié à la Commission un ensemble d'accords, en vue d'une attestation négative ou d'une exemption sous l'article 81CE. L'intention des parties est d'accorder la licence communautaire par la société du pays dans lequel opère le fournisseur de contenu. Dans le domaine des droits d'exécution musicale, presque toutes les grandes sociétés de gestion collective représentant les auteurs ont conclu un accord réciproque à l'essai (l'accord de Santiago) qui permet à chacune d'entre elles de délivrer des licences multi-territoriales de droits d'exécution publique à utiliser en ligne. Un autre modèle concerne les droits à rémunération des producteurs de phonogrammes pour la transmission simultanée à la radio et à la télévision, via Internet, d'enregistrements sonores compris dans les émissions de signaux radio et/ou TV (accord "simulcast"). Les utilisateurs (en l'occurrence, les radiodiffuseurs dont les signaux sont émis à partir de l'EEE) peuvent obtenir une licence européenne auprès de toute société établie dans l'EEE. Dans le cadre d'un autre modèle, une licence communautaire pour des utilisations en ligne d'oeuvres d'art et de photographies peut être obtenue auprès de l'une ou l'autre société de gestion collective participante et dans les mêmes conditions (« OnLineArt »).

Le premier point à examiner dans ce contexte est de savoir s'il convient de laisser au marché le soin de développer l'octroi de licences communautaires tout en respectant les règles de base de la propriété intellectuelle, y compris la nature territoriale des droits ou s'il serait préférable que le législateur communautaire s'attache à promouvoir l'octroi de licences.

Il convient de noter d'emblée qu'une mesure législative obligeant les titulaires à octroyer une licence communautaire pourrait aboutir à une licence obligatoire. Une évaluation attentive serait nécessaire afin de vérifier la compatibilité d'une telle mesure avec les obligations internationales de la Communauté en vertu des conventions de Berne et de Rome et des accords plus récents de l'OMPI, les traités WCT et WPPT. Un examen de ce type serait nécessaire eu égard à l'article 295 du traité. A cet égard, ces considérations sont naturellement sans préjudice des compétences de la Commission découlant de l'article 82 du Traité CE, en accord avec les pratiques établies de la Commission, des juridictions communautaires et dans le respect des obligations internationales de la Communauté.

Une option très efficace consisterait à disposer, au moyen d'actes législatifs communautaires, que toute licence concernant les droits de communication au public ou de mise à disposition, du moins pour des activités transfrontières, autorise par définition les actes d'utilisation dans l'ensemble de la Communauté. Selon cette option, tout acte de communication au public ou de mise à disposition déjà autorisé dans un État membre quelconque de la Communauté pourrait également être exécuté légalement dans tout autre État membre. Cette option reviendrait à éliminer partiellement le principe de territorialité.

Une option moins radicale serait d'adopter le modèle choisi pour la radiodiffusion par satellite en vertu de la directive 93/83/CEE pour les droits de communication au public et de mise à disposition. En vertu de ce modèle, l'acte d'exploitation de communication au public pertinent a lieu uniquement dans l'État membre, dans lequel, sous le contrôle et la responsabilité de l'organisme de radiodiffusion, de signaux porteurs de programmes sont introduits dans une chaîne ininterrompue de communication conduisant au satellite et revenant vers la terre (article 1(2)b de la directive). Cependant, s'il est appliqué au droit d'auteur et aux droits voisins sans limitation de la liberté contractuelle des parties, comme prévu dans la directive 93/83/CEE, ce modèle ne produit pas nécessairement le résultat visé par l'octroi de licences multi-territoriales [9].

[9] Voir le rapport de la Commission européenne sur l'application de la directive 93/83/CEE du Conseil relative à la coordination de certaines règles du droit d'auteur et des droits voisins du droit d'auteur applicables à la radiodiffusion par satellite et à la retransmission par câble, COM(2002) 430 final du 26.07.2002.

Une autre possibilité serait de réduire les droits exclusifs de communication au public et de mise à disposition en un droit à rémunération sujet à gestion collective obligatoire (ce qui présuppose un fonctionnement efficient des sociétés de gestion collective). Toutefois, étant donné qu'à la fois la directive 2001/29/CE et les traités Internet WCT et WPPT de l'OMPI établissent et harmonisent ces droits pour les auteurs et le droit de mise à disposition également pour les titulaires de droits voisins en tant que droits exclusifs, on pourrait arguer que cette option est exclue. Une autre option pourrait donner la liberté aux utilisateurs commerciaux de choisir la société de gestion collective au sein de l'EEE, qui donnera la licence d'exploitation demandée. Un tel modèle a été mis en place par l'accord de "Simulcasting", établi pour l'environnement numérique par des sociétés de gestion collective représentant certains ayants droit. Ce modèle combine la liberté de choix avec une transparence accrue en ce qui concerne les obligations des sociétés de gestion collective [10].

[10] Voir infra le point 3.4.

Afin d'améliorer encore l'accès aux droits en question, les sociétés de gestion collective pourraient être mandatées, dans certaines conditions, pour proposer des licences communautaires. Cette solution exigerait, elle aussi, une gestion efficace et responsable des droits collectifs dans toute la Communauté, y compris l'existence d'accords réciproques entre les sociétés de gestion collective, qui leur permettent d'autoriser des droits également dans des territoires autres que les leurs.

Une autre option plus flexible et moins interventionniste serait de se concentrer exclusivement sur les modalités de gestion collective par des sociétés de gestion, puisqu'elles sont la plupart en charge de la gestion des droits pour lesquels la demande de licence communautaire a été la plus forte. Les sociétés de gestion collective proposent déjà des guichets uniques pour l'octroi de licences pour leur territoire respectif et comprenant leur répertoire mondial d'ayants droit. Ceci constitue un avantage significatif pour les ayants droit et les utilisateurs et ne devrait pas être compromis. En même temps, les accords de licences centralisées, tels que ceux décrits ci-dessus, pourraient être renforcés en éliminant les disparités des lois des Etats membres relatives aux conditions de la gestion collective par l'introduction de règles communautaires sur la bonne gouvernance portant sur le fonctionnement des sociétés de gestion."

1.2.5. Systèmes de gestion des droits numérique (systèmes DRM)

Dans le débat sur la gestion du droit d'auteur et des droits voisins dans le nouvel environnement numérique, la gestion des droits numériques est devenue une question centrale. La disponibilité des services de DRM par une infrastructure technologique de gestion du droit d'auteur et des droits voisins revêt de l'importance pour la gestion à la fois individuelle et collective.

Les systèmes DRM peuvent servir à autoriser des droits, sécuriser les paiements, suivre des comportements et appliquer les droits. Les systèmes DRM jouent donc un rôle crucial pour le développement de nouveaux modèles commerciaux de volume important et de faible valeur transactionnelle, comme la tarification de l'accès, de l'utilisation et du service lui-même, les modèles d'abonnement, le recours aux revenus de la publicité, les systèmes de ventes à crédit ou de facturation. Les systèmes DRM sont un moyen pour parvenir à une fin et constituent à ce titre un outil important, voire le plus important de la gestion des droits au sein du marché intérieur des nouveaux systèmes numériques.

Le cadre juridique de l'administration des systèmes DRM est défini dans la directive 2001/29/CE. En protégeant juridiquement les mesures techniques et l'information sur les régimes des droits, que les titulaires peuvent appliquer à leur contenu protégé, le législateur communautaire a fixé les paramètres juridiques des systèmes DRM et a jeté les bases de leur développement. Les articles 6 et 7 et les considérants concernés traitent respectivement de la protection des mesures techniques et de l'information sur le régime des droits.

Les Etats membres doivent aussi prendre en compte l'application ou la non application, i.e, le degré d'utilisation (considérant n°35) des mesures techniques, lorsqu'ils prévoient une compensation équitable dans le cadre de l'exception pour usagé privé, telle qu'elle est permise par l'article 5(2)b. La directive prévoit que les Etats membres doivent arriver à une application cohérente de ces exceptions. La manière dont cet objectif a été atteint, en relation avec l'application de la disposition sur la compensation équitable, sera évaluée en même temps que la législation sur la transposition. Une telle évaluation va inclure en particulier les critères que les Etats membres utilisent ou utiliseront afin de prendre en compte une telle application ou non application des mesures techniques, lorsque les systèmes de rémunération, dans le contexte de l'exception pour copie privée, seront déterminés. La Commission a reçu un mandat spécifique pour procéder à cette évaluation, spécialement dans le cadre du comité de contact établi par l'article 12 de la directive. Une plus grande disponibilité des systèmes DRM et des services peut constituer une valeur ajoutée à la fois pour les ayants droit et les utilisateurs commerciaux, si cela contribue à la disponibilité des contenus protégés et facilite leur accès pour les utilisateurs finaux. En conséquence, la transparence et une clarification concernant les critères et les éléments retenus par les Etats membres pour prendre en compte l'application ou la non application des mesures techniques doivent être assurées au travers des mesures requises de transposition.

On peut estimer qu'un large déploiement des DRMs comme outil pour la compensation équitable pourrait éventuellement rendre redondants les systèmes de rémunération actuels (telles les redevances pour compenser la copie privée), justifiant ainsi leur diminution ou élimination progressive. En même temps, vu leur état présent de mise en application, les DRMs ne présentent pas une solution politique assurant l'équilibre approprié entre les intérêts en présence, que ce soit ceux des auteurs et autres ayants droit et ceux des utilisateurs légitimes, des consommateurs ou des tiers intéressés (bibliothèques, fournisseurs de services, créateurs de contenus...). Les DRMs ne sont pas en eux-mêmes une alternative à la politique du droit d'auteur, qui met en place les paramètres destinés à assurer la protection du droit d'auteur, de ses exceptions et limitations, telles qu'appliquées traditionnellement par les législateurs. Dans ce contexte, la Commission a également le devoir d'examiner, dans le cadre du comité de contact de l'article 12, si les actes permis par la loi sont affectés défavorablement par l'utilisation effective des mesures techniques (appelées « verrous technologiques »).

S'agissant de la technologie appliquée aux systèmes DRM, la directive 2001/29/CE reconnaît que les développements technologiques faciliteront la distribution du contenu protégé, notamment sur les réseaux. Toutefois, elle reconnaît aussi que les différences entre les mesures techniques pourraient entraîner une incompatibilité des systèmes au sein de la Communauté.

Alors que le choix du modèle commercial approprié reste l'apanage des ayants droit et des utilisateurs commerciaux et que l'utilisation des systèmes DRM et des services reste volontaire et laissée à l'appréciation du marché, la mise en place d'une infrastructure technique mondiale et interopérable sur la base d'un consensus entre les parties prenantes semble être un corollaire nécessaire du cadre juridique existant. Elle constitue aussi un préalable nécessaire pour la distribution et l'accès des contenus protégés au sein du marché intérieur.

L'achèvement d'un marché intérieur servira davantage l'intérêt général. A cette fin, les projets de recherche et les efforts de standardisation pour des normes volontaires ont été encouragés au niveau communautaire et leur résultat ont contribué à démontrer d'une infrastructure interopérable peut être établie. Ainsi que l'a démontré le rapport CEN/ISSS sur la standardisation des DRMs et sur l'interopérabilité, il existe des solutions commerciales qui ont été envisagées par le marché, même si leur interopérabilité reste une question en suspend. En l'absence de progrès substantiels à court terme, en ce qui concerne la mise en application des services et systèmes DRMs interopérables, une recommandation renforçant l'exigence d'avoir de telles solutions sera envisagée. Une telle recommandation pourrait comprendre la publication des normes volontaires disponibles, sur la base desquels des systèmes DRM mondiaux et interopérables ainsi que des services peuvent être offerts avec pour perspective d'éviter que le début de fragmentation du marché ne se renforce.

Des doutes sur la viabilité de la technologie disponible ont été émis par plusieurs opérateurs et ont pu décourager l'utilisation de systèmes DRM. Comme c'est le cas pour tous les systèmes et techniques de protection, le risque que les DRMs soient contournés ne peut être complètement éliminé. La protection des systèmes DRM contre le contournement, contre la production et la commercialisation de dispositifs de contournement et la protection du droit d'auteur et des droits voisins contre toute forme de piratage sont donc une condition préalable pour réduire le risque au minimum et assurer l'utilisation légitime du contenu protégé ainsi que leur acceptation parmi les titulaires de droits, les utilisateurs commerciaux et les consommateurs.

En effet, l'acceptation parmi les consommateurs est vitale pour le succès des systèmes DRM, mais une plus large acceptation doit encore être atteinte. Les titulaires de droits, les utilisateurs commerciaux et les gouvernements ont commencé et devraient continuer à informer le public sur la façon dont le mode de livraison se répercute sur les prix et à favoriser une culture de l'octroi de licences de contenus protégés à contre-pied de la perception selon laquelle si un contenu protégé est disponible sur internet, il l'est nécessairement gratuitement. En faisant cela, la liberté de choix (pour l'équipement, le réseau, les services et le contenu) et la préservation de la vie privée (y compris l'assurance de la sécurité) devraient être maintenues et vues comme des éléments essentiels contribuant à la confiance du consommateur.

Bien que les systèmes DRM et les systèmes de rémunération aient pour objet commun de gérer et de faciliter l'accès aux contenus protégés, ils ont une fonction différente et permettent de suivre un raisonnement différent. Les systèmes de rémunération, gérés par des sociétés de gestion collective efficaces agissant en tant que mandataires, devraient fournir l'accès aux utilisateurs finaux potentiels tout en sauvegardant l'intérêt économique de tous les ayants droit, y compris des petits ayants droit et des ayants droit individuels. Les systèmes DRM utilisés par les ayants droit individuels permettent l'accès à la seule discrétion de ces derniers (ou de ceux à qui ils ont octroyé une licence), dans la mesure où ces systèmes opèrent sur la base de l'exercice direct des droits exclusifs (d'autoriser ou d'interdire).

La décision quant au choix du système de gestion des droits devrait en principe être laissée à l'appréciation des parties intéressées et être fonction du développement du marché et devra, le cas échéant, être basée sur la politique du droit d'auteur. Dans cette perspective, une observation minutieuse des développements du marché est essentielle afin que l'intérêt général soit sauvegardé.

1.3. Conclusions

La réflexion sur la gestion des droits dans le marché intérieur devrait reposer sur les principes intrinsèques de la protection de la propriété intellectuelle. Un cadre opérationnel pour la gestion et la commercialisation du droit d'auteur et des droits voisins, à la fois au niveau individuel et collectif, est une condition préalable pour la sauvegarde et le plein développement du potentiel que représente la propriété intellectuelle pour la créativité, l'économie, le fonctionnement du marché intérieur et les sociétés dans leur ensemble.

La législation des États membres actuels et des pays accédants de l'UE dans ce domaine évolue au fil des développements dans les technologies et sur les nouveaux marchés. Le cadre juridique communautaire sur le droit d'auteur et les droits voisins, l'acquis communautaire, fait certes référence à la gestion des droits mais ne comprend aucune réglementation spécifique à ce sujet. En l'absence d'un code communautaire de la propriété intellectuelle, la protection du droit d'auteur est revendiquée et appliquée sur une base territoriale nationale dans chaque État membre; or, la gestion des droits devient de plus en plus une activité transfrontalière.

Le développement des systèmes de gestion des droits numériques (DRM) devrait en principe être lui aussi basé sur l'acceptation par toutes les parties intéressées, y compris les consommateurs et sur la politique du législateur en matière de droit d'auteur. Un préalable nécessaire permettant d'assurer pour les ayants droit et les utilisateurs (notamment les consommateurs) une accessibilité au niveau communautaire des systèmes DRMs et des services est que ces derniers soient interopérables.

Une observation minutieuse des développements du marché, notamment par le biais de consultation des parties intéressées, demeure essentielle.

2. Gestion individuelle des droits

2.1. Principales caractéristiques

La gestion individuelle des droits a également été abordée, dans une certaine mesure, dans les directives de l'acquis communautaire. La directive 2001/29/CE confirme au considérant 30 que les droits exclusifs de reproduction, de communication au public, y compris la mise à disposition, et de distribution (pour les auteurs) peuvent être transférés, cédés ou donnés en licence contractuelle, sans préjudice des dispositions législatives nationales pertinentes sur le droit d'auteur et les droits voisins. Des dispositions similaires sont visées à l'article 2, paragraphe 4, à l'article 7, paragraphe 2 et à l'article 9, paragraphe 4, de la directive 92/100/CEE concernant les droits exclusifs de prêt et de location et de reproduction et de distribution. En outre, l'article 2, paragraphe 5, et l'article 6 de la directive 92/100/CEE contiennent des dispositions particulières sur les présomptions concernant le transfert de droits.

2.2. Questions soulevées

2.2.1. Propriété des droits

La gestion individuelle des droits repose sur l'allocation initiale de la propriété des droits : en principe, le propriétaire initial du droit d'auteur est la personne physique qui a créé l'oeuvre.

Concernant la question spécifique de la propriété d'oeuvres audiovisuelles, un certain degré d'harmonisation a été atteint au niveau communautaire. Par exemple, tous les États membres désignent au minimum le réalisateur principal d'une oeuvre audiovisuelle comme l'un des auteurs de l'oeuvre. Cette question a été abordée plus en détail dans le rapport de la Commission du 6 décembre 2002 [11].

[11] Rapport de la Commission au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social sur la question de la titularité des oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles dans la Communauté, COM (2002) 691 final du 6.12.2002.

2.2.2. Conditions statutaires pour le transfert de droits

Le transfert de droits couvre le transfert de droits économiques par l'auteur ou l'artiste interprète ou exécutant (en tant que titulaire initial de l'oeuvre) à un tiers par cession ou par octroi de licence [12]. La législation sur le droit d'auteur de la plupart des Etats membres impose certaines obligations pour les parties contractantes concernant l'étendue du transfert des droits (par exemple, sur la limitation du transfert des droits relatif aux formes d'exploitation connues ou prévisibles au moment de la conclusion du contrat de droit d'auteur ou sur les règles régissant la fin de la relation contractuelle). De telles conditions varient d'un Etat membre à l'autre.

[12] La cession est le transfert de droits d'une manière exclusive et définitive. Une licence est la permission de produire un acte, qui sans cette permission, serait une infraction au droit d'auteur ou aux droits voisins. Une licence peut être exclusive ou non.

La plupart des États membres exigent aussi des formalités spécifiques (généralement un document sous forme écrite) pour que les cessions ou licences soient valides ou validement prouvées.

2.2.3. Contenu et Interprétation des contrats

Beaucoup d'Etats membres appliquent une interprétation restrictive des contrats en matière de droit d'auteur. En vertu de ces dispositions, tout transfert de droits sera interprété au sens strict, en conformité avec l'objectif du transfert et, dans certains États membres, au bénéfice de l'auteur ou de l'artiste interprète ou exécutant en cas de doute.

Concernant le montant à payer, en règle générale, la majorité des États membres laissent aux parties contractantes le soin de fixer le montant des paiements à l'auteur ou à l'artiste interprète ou exécutant. Cependant, certains États membres précisent que le paiement doit être calculé de façon proportionnelle ou doit représenter une part équitable. Le contrat peut faire l'objet d'une modification si la rémunération prévue est disproportionnée par rapport aux revenus générés pour l'utilisation de cette oeuvre (par exemple, clause du « best seller » ou application du principe d'équité).

2.3. Conclusions

Il semble exister une grande identité de vues entre les États membres - ainsi qu'entre ceux-ci et les pays accédants - sur un certain nombre de questions liées à la gestion individuelle des droits.

À ce stade, le degré de convergence des règles des divers États membres sur les contrats relatifs au droit d'auteur semble suffisant pour rendre inutile une action immédiate au niveau communautaire. Si, à l'heure actuelle, les évolutions nationales n'ont donné lieu à aucune inquiétude particulière du point de vue du fonctionnement du marché intérieur, la Commission devra continuer néanmoins à suivre cette question.

3. La gestion collective des droits

3.1. Fonctions de la gestion collective

3.1.1. Évolution de la gestion conjointe des droits

Vu le nombre d'utilisations, d'utilisateurs et de titulaires de droits concernés, il n'était pas possible d'accorder individuellement des licences pour certains droits, comme il a été vu précédemment. C'est pourquoi les titulaires de droits ont confié à des agents la concession conjointe de licences pour leurs oeuvres. De même, les utilisateurs préféraient n'avoir affaire qu'à un seul interlocuteur lorsqu'ils souhaitaient obtenir une licence, pour l'autorisation comme pour le paiement.

En raison des avantages que la gestion collective présente à leurs yeux pour ce qui est des droits à rémunération, plusieurs législateurs l'ont même rendue obligatoire, en décidant que ces droits seraient administrés par des sociétés de gestion collective.

3.1.2. Principales caractéristiques de la gestion collective

Généralement, le mandataire (une société de gestion collective), administre, supervise, collecte et répartit les redevances versées pour tout un groupe de détenteurs de droits en vertu de la législation nationale en vigueur sur son territoire, pour ce territoire particulier.

Les sociétés de gestion collective administrent des droits dans le secteur de la musique, des oeuvres littéraires, artistiques et audiovisuelles, ainsi que pour les productions et interprétations liées à des activités telles que la communication au public et la transmission par câble pour les programmes radiodiffusés, les reproductions mécaniques, la reprographie, le droit de prêt, le droit de suite, la copie privée et certaines utilisation éducatives. Les plupart des sociétés sont membres de réseaux d'accords de représentations réciproques, par lesquels les droits sont octroyés entre les sociétés pour être utilisés dans les différents Etats membres.

Du point de vue des utilisateurs, donc, les sociétés de gestion collective occupent une position clé dans le processus d'octroi de licences pour certains droits, dans la mesure où elles donnent accès habituellement, à un catalogue mondial de droits. Elles sont de la sorte des guichets uniques pour l'octroi de licences. Grâce à la gestion collective, certains titulaires de droits (entreprises ou particuliers) qui exploitent un marché peu lucratif ou peu étendu, ou n'ont pas suffisamment de puissance de négociation, sont à même de gérer leurs droits de manière efficace. Dans cette optique, les sociétés de gestion collective assument la responsabilité sociale conjointe des titulaires de droits, qui est de s'assurer qu'ils bénéficient tous de leurs droits de propriété intellectuelle à un coût raisonnable.

3.2. Le cadre juridique

3.2.1. La gestion collective dans l'acquis communautaire

Les directives de l'acquis communautaire sur le droit d'auteur et les droits voisins font souvent référence à la gestion des droits par des sociétés de gestion collective. La directive 92/100/CEE, lorsqu'elle harmonise le droit à une rémunération équitable, cite la gestion collective comme modèle de gestion de ce droit dans son article 4, paragraphes 3 et 4. L'article 9 de la directive 93/83/CEE, précisé par l'article 10, qui rend obligatoire la gestion collective des droits de retransmission par câble. L'article 1er, paragraphe 4, de cette directive contient par ailleurs une définition du terme "société de gestion collective" [13].

[13] Le texte de l'article 1er, paragraphe 4, de la directive "satellite-câble" est le suivant: "Aux fins de la présente directive, on entend par "société de gestion collective" tout organisme dont le seul but ou l'un des buts principaux consiste à gérer ou à administrer des droits d'auteur ou des droits voisins du droit d'auteur."

La gestion collective n'est pas mentionnée dans les articles de la directive 2001/29/CE sur le droit d'auteur dans la société de l'information. Toutefois, pour ce qui est du droit de mise à disposition, le considérant 26 indique qu'il est souhaitable d'encourager la conclusion de contrats de licence collectifs, afin de faciliter le recouvrement des droits liés à l'offre, par les radiodiffuseurs, dans le cadre de services à la demande, de leur production radiodiffusée ou télévisuelle comportant de la musique sur phonogrammes commerciaux en tant que partie intégrante de cette production. Enfin, le fait que la gestion collective soit pertinente pour le fonctionnement de la directive apparaît également dans les considérants 17 et 18 [14].

[14] Considérant 17: "Il est nécessaire, surtout à la lumière des exigences résultant du numérique, de garantir que les sociétés de gestion collective des droits atteignent un niveau de rationalisation et de transparence plus élevé s'agissant du respect des règles de la concurrence." Considérant 18: "La présente directive ne porte pas atteinte aux modalités qui existent dans les États membres en matière de gestion des droits, telles que les licences collectives étendues."

Même si elle n'est pas obligatoire, la gestion collective semble également être, de fait, le fondement de l'exercice du droit de suite des artistes au titre de la directive 2001/84/CE. Les directives de l'acquis communautaire ont laissé aux États membres le soin de réglementer les activités des sociétés de gestion collective, et seules les deux directives les plus récentes (2001/29/CE et 2001/84/CE) invitent à assurer une transparence et une efficacité accrues pour ce qui est de ces activités.

3.2.2. La gestion collective en droit national

Dans la plupart des États membres, la gestion collective des droits par des sociétés de gestion collective est régie par la loi dans une plus ou moins grande mesure. Des différences importantes existent toutefois sur le plan de la législation comme sur celui de la pratique.

Par ailleurs, la législation des États membres et des pays accédants sur la gestion collective continue à évoluer. Ainsi, en France, en Belgique, au Luxembourg, aux Pays-Bas et au Portugal, de nouveaux textes ont été adoptés ou proposés afin de rendre plus transparente l'activité des sociétés de gestion collective et d'accroître leur obligation de rendre compte. Il semble que ces textes n'ont pas nécessairement la même structure ni les mêmes objectifs.

3.3. Consultations concernant la gestion collective dans le marché intérieur

Depuis le début des discussions au niveau communautaire qui ont démarré dans les années 1990 et qui sont relatives au droit d'auteur au sein de la société de l'information, la gestion des droits en général et la gestion collective en particulier ont été au centre des attentions et ont fait l'objet de discussions lors des conférences organisées par la Commission [15]. En 1996, la Commission a présenté ses vues préliminaires faisant suite au Livre Vert de 1995. De plus, la Commission a organisé en Novembre 2000 une audition de deux jours portant uniquement sur la gestion collective.

[15] Florence (1996), Vienne (1998), Strasbourg (2000) et Saint-Jacques de Compostelle (2002).

Les conclusions générales de ces consultations étaient de trois ordres : d'abord, un consensus général sur le fait que le marché intérieur des droits et exceptions ne pouvait être une réalité sans un cadre commun suffisant relatif à l'exercice des droits. Deuxièmement, la gestion collective est dans l'intérêt des ayants droit et des utilisateurs, et ce, pour bon nombre de secteurs d'exploitation. La plupart des opérateurs se sont accordés sur les fonctions économiques, sociales et culturelles des sociétés de gestion collective. Troisièmement, il y a eu un large appel pour un plus grand degré de convergence relatif aux conditions d'opération des sociétés de gestion collective, afin d'accroître leur efficacité et de parvenir à un système de licences plus accessibles, spécialement au niveau communautaire. Cependant, la Commission note que les utilisateurs commerciaux, les consommateurs et même les titulaires de droits ont des perceptions de la gestion collective qui varient sensiblement. Il en résulte des positions relativement éloignées, dans les États membres comme à l'échelon communautaire.

Des critiques émanant des utilisateurs ont porté sur les tarifs, la supervision des sociétés de gestion collective, l'accès aux tribunaux et à l'arbitrage. Plus récemment, les critiques se sont aussi portées sur frais administratifs exigés par les sociétés de gestion collective, sur la durée des négociations et ont fait état de déficiences dans leurs processus de décision ainsi que d'un manque apparent de transparence.

La gestion collective essuie également les critiques de certains titulaires de droits. Ceux qui disposent d'un pouvoir de négociation suffisant, par exemple les principaux producteurs de phonogrammes, peuvent de plus en plus se passer des sociétés de gestion collective pour gérer leurs droits. Selon leur point de vue, en facilitant le filigranage, l'identification et le suivi de l'utilisation des oeuvres, la numérisation a, en principe, donné aux titulaires de droits les moyens de contrôler individuellement le processus de concession des licences et de paiement des redevances, de sorte que le rôle de la gestion collective des droits est remis en question.

Cet avis n'est pas nécessairement partagé par des titulaires de droits dont les capacités de négociation sont moins importantes, dans la mesure où ils ne peuvent gérer certains droits qu'à travers des sociétés de gestion collective. Cependant, la plupart des ayants droit souhaiteraient plus de flexibilité de la part des sociétés de gestion collective en ce qui concerne l'acquisition des droits ; ils souhaiteraient aussi une plus grande influence sur la distribution des sommes collectées. De plus, concernant les accords de représentation réciproque entre les sociétés qui gèrent les droits voisins, certains titulaires droits se sont inquiétés des dysfonctionnements du système des contrats de type « B », qui n'opèrent pas de transferts des sommes collectées ; chaque société collecte et distribue à ses propres ayants droit les droits utilisés sur son territoire [16].

[16] NB : un contrat de type « A » prévoit le transfert réciproque des droits collectés sans limitations s'appliquant à la revendication ou au transferts de ces droits.

3.4. Gestion collective des droits et concurrence

Concernant l'application du droit communautaire de la concurrence aux sociétés de gestion collective, l'intervention de la Commission et de la Cour de Justice a traditionnellement concerné trois grandes questions: (i) les relations entre les sociétés de gestion et leurs membres, (ii) entre les sociétés de gestion et les utilisateurs et enfin, (iii) les accords de représentation réciproques entre les différentes sociétés de gestion collective. Les développements technologiques récents, comme internet, ont nécessité de la part de la Commission qu'elle réévalue certains principes antérieurs, établis pour l'environnement analogique.

(i) Du point de vue des ayants droit, les sociétés de gestion collective agissent comme mandataires et doivent gérer leurs droits et intérêts. Le cadre de base des relations entre les sociétés de gestion collective et leurs membres reste celui mis en place par les trois décisions GEMA [17], particulièrement en ce qui concerne la compatibilité avec les articles 81 et 82 du Traité CE de l'obligation faite pour les membres de transférer à leur société leurs droits pour toutes les formes d'utilisation d'une oeuvre musicale. D'ailleurs, La Commission est d'avis qu'il peut s'avérer nécessaire, au regard des évolutions technologiques récentes (comme les services en ligne) de reconsidérer les "catégories" GEMA établies dans les années 70. Dans une décision plus récente, la Commission a considéré que l'obligation pour un auteur de donner en gestion à sa société d'auteur tous ses droits, y compris pour une exploitation en ligne de son oeuvre, comme cela était prévu par les statuts de cette société de gestion, constitue un abus de position dominante au sens de l'article 82(a) du Traité CE, dans la mesure où une telle pratique correspond à l'imposition d'une condition de transaction non équitable [18]. Pour ce qui est de l'appartenance à une société de gestion collective, la Commission a également considéré qu'une telle société en position dominante ne peut pas refuser la qualité de membre aux ayants droit des autres Etats membre [19].

[17] GEMA I, décision du 20.06.1971, JOCE L134/15; GEMA II, décision du 06.07.1972, JOCE L 166/22; GEMA III, décision du 04.12.1981, JOCE L 94/12.

[18] Banghalter et Homem Christo c/ SACEM (ou "décision Daftpunk"), affaire COMP/C2/37.219, décision du 06.08.2002, disponible sur http://europa.eu.int/comm/competition/ antitrust/cases/decisions/37219/fr.pdf

[19] GEMA I, décision du 20.06.1971, JOCE L134/15; GVL, décision du 29.10.1981, JOCE L370/49.

(ii) Les relations entre les sociétés de gestion collectives et les utilisateurs ont soulevé trois questions principales: les effets au commerce entre Etats membres, le champ d'application des licences octroyées aux utilisateurs et le niveau de leurs tarifs. Par exemple, en tant qu'entreprise dominante (et même souvent en situation monopolistique), une société de gestion ne peut refuser -en vertu de l'article 82CE- une licence à un utilisateur situé sur son territoire, sans motif légitime. La Cour a clairement établi qu'une société de gestion ne peut s'engager dans une pratique concertée ayant pour effet de systématiquement refuser l'accès direct à son répertoire aux utilisateurs situés sur un autre territoire, à moins qu'un motif acceptable pour un tel refus consiste en une impossibilité pratique de mettre en place un système de surveillance d'utilisation de la licence dans le territoire de ce pays [20]. En ce qui concerne les tarifs, la Cour a fait observer que le niveau des dépenses opérationnelles est l'une des différences les plus marquantes parmi les sociétés de gestion collective situées dans les différents Etats membres. La Cour a aussi estimé qu'on ne peut pas écarter que le manque de concurrence entre les sociétés de gestion ait pour conséquence des frais administratifs et des droits élevés [21]. La Cour a dit pour droit que l'article 82 du Traité CE doit être interprété en ce sens qu'une société de gestion collective située dans un Etat membre abuse de sa position dominante si elle impose des conditions inéquitables à ses interlocuteurs commerciaux en ayant des conditions tarifaires nettement plus élevées que celles applicables dans d'autres Etats membres, à moins que les différences soit justifiées par des facteurs objectifs et pertinents [22].

[20] Affaire 395/87 Ministère public c/ Tournier (1989), 13.7.1989, REC 2521.

[21] Voir note infrapaginale précédente.

[22] Affaire 110/88, 241/88 et 242/88 Lucazeau c/ SACEM (1989), 13.7.1989, REC 2811.

(iii) Concernant les accords de représentation réciproque entre sociétés de gestion collective, la Cour de Justice, dans ses décisions Tournier et Lucazeau de 1989 [23], a conclu que de tels accords ne tombent pas en tant que tels sous l'interdiction de l'article 81(1) du Traité CE, à supposer qu'il n'y ait pas une évidente pratique concertée ou exclusivité. Ainsi, les accords de représentation réciproques apparaissent comme économiquement justifiés dans le contexte où la gestion analogique du droit d'auteur est requise. La récente décision "Simulcasting" [24] adapte les principes existants à l'environnement numérique et apporte une nouvelle application des règles communautaires de concurrence aux activités de gestion des droits. L'absence de frontières territoriales au sein de l'environnement numérique induite par internet et les formats digitaux des produits permet aux utilisateurs de choisir, pour l'octroi de la licence, n'importe quelle société de gestion au sein de l'EEE, membre de l'accord de guichet unique. De plus, les parties se sont engagées à améliorer la transparence en ce qui concerne les frais en séparant les tarifs couvrant les droits proprement dits et les frais de gestion. Ainsi, les utilisateurs commerciaux seront en position d'identifier les sociétés de gestion collective les plus efficaces au sein de l'EEE et d'obtenir des licences de la part des sociétés de gestion offrant leurs services au moindre coût.

[23] Voir supra.

[24] Affaire COMP/C2/38.104 IFPI Simulcasting, Décision du 8 octobre 2002, JOCE L107 du 30.04.2003, p. 58.

3.5. Questions qui requièrent une approche législative

Alors que les règles de concurrence restent un instrument efficace pour réguler le marché et le comportement des sociétés de gestion collective, un marché intérieur de la gestion collective des droits peut être davantage établit si la surveillance des sociétés de gestion via les règles de concurrence est complétée par la mise en place d'un cadre législatif sur leur bonne gouvernance.

Le résultat de la consultation invite à telle approche législative basée sur les règles et principes du marché intérieur dans le cadre du droit d'auteur, qui peuvent permettre la sauvegarde du marché intérieur et les intérêts de tous les acteurs concernés par la gestion collective. Afin de parvenir à une base communautaire de la gestion collective des droits au sein du marché intérieur, des dispositions communes relatives à certaines caractéristiques des sociétés de gestion sont nécessaires.

3.5.1. Établissement et statut des sociétés de gestion collective

Différentes conditions et plusieurs modèles existent pour l'établissement d'une société de gestion collective. En termes de statut, les sociétés de gestion collective peuvent être des entreprises, des oeuvres de bienfaisance, des organismes à but lucratif ou non lucratif. Le processus de consultation a démontré que l'efficacité d'une société de gestion collective n'est apparemment pas liée à sa forme juridique. Une société de gestion collective peut être dûment constituée dans la forme qu'elle choisit ou qui est exigée par le droit national, pour autant qu'elle se conforme à la législation nationale applicable et que celle-ci n'ait pas d'effets discriminatoires. Les règles des articles 82 et 86 du Traité CE doivent aussi être respectés et appliqués lorsqu'une société de gestion collective est constituée sous forme de monopole légal ou lorsqu'elle bénéficie de droits spéciaux en vertu de la loi nationale.

Cependant, comme les sociétés de gestion collective ont, en tant que mandataires des titulaires de droits, des responsabilités particulières découlant des fonctions économique, culturelle et sociale qu'elles assument, leur établissement devrait être soumis à des conditions similaires dans tous les États membres. Afin de promouvoir la bonne gouvernance, il semble nécessaire d'aboutir à un consensus au niveau communautaire sur les personnes qui peuvent établir ce type de société, les statuts de cette dernière, sur les preuves requises pour ce qui est de l'efficacité, de l'opérabilité et du respect des obligations comptables ainsi que sur un nombre suffisant de titulaires de droits représentés.

3.5.2. Relations des sociétés de gestion collective avec les utilisateurs

Les sociétés de gestion collective représentent généralement un répertoire vaste, voire mondial, et ont un mandat exclusif pour l'administration des droits liés à leur domaine d'activité. Elles se trouvent, de ce fait, dans une position exclusive et privilégiée vis-à-vis des utilisateurs. Cette situation est appréciée par la plupart d'entre eux, dans la mesure où elle permet aux sociétés de gestion collective de fonctionner comme des guichets uniques pour l'octroi des licences. Toutefois, les utilisateurs expriment certaines préoccupations concernant la gestion collective et portant généralement sur les tarifs qu'ils doivent payer et les conditions d'octroi de licences. Les sociétés devraient être obligées de publier leurs tarifs et d'octroyer les licences à des conditions raisonnables. De plus, il est essentiel pour les utilisateurs d'être en position de contester les tarifs, que ce soit par un accès aux cours, aux tribunaux spécialisés ou avec l'assistance des autorités publiques qui supervisent l'activité des sociétés de gestion collective.

En ce qui concerne l'octroi de licences, il convient de relever que dans certains Etats membres, l'obligation pour les sociétés de gestion d'octroyer une licence est combinée avec la règle que ces licences soient octroyées à des conditions appropriées et raisonnables. En retour, une utilisation sans paiement préalable ne devrait pas être permise. Certains Etats membres prévoient que les utilisateurs potentiels, qui contestent les tarifs, ne peuvent procéder à l'exploitation des droits que s'ils ont préalablement déposé une certaine somme d'argent auprès de la société. Une application communautaire de ces principes devrait être établie afin de promouvoir ou de sauvegarder l'accès dans des termes appropriés aux oeuvres et autres objets protégés.

3.5.3. Relations des sociétés de gestion collective avec les titulaires de droits

Habituellement, une seule société agit en tant que mandataire pour chaque groupe de titulaires de droits sur un territoire donné et constitue le seul gardien de l'accès à leur marché pour ce qui est de la gestion collective de leurs droits. Les principes de bonne gouvernance, de non-discrimination de transparence et de responsabilité de la société de gestion collective dans ses relations avec les titulaires de droits revêtent, donc, une importance particulière. Ces principes devraient s'appliquer à l'acquisition des droits (le mandat), aux conditions encadrant la qualité de membre (y compris celles encadrant la fin de cette relation contractuelle) de représentation et à la position des titulaires de droits au sein de la société (accès des ayants droit aux documents internes et comptables, liés à la distribution des droits et aux déductions faites ; véritable influence des ayants droit sur le processus de décision ainsi que sur la politique sociale et culturelle de la société). Concernant le mandat de gestion, il devrait offrir aux ayant droit un degré raisonnable de flexibilité relative à sa durée et à son étendue. De plus, en raison du déploiement des Digital Rights Management Systems (DRMs), les ayants droit devraient en principe - à moins que la loi n'en dispose autrement - avoir la possibilité de gérer individuellement certains de leurs droits, s'ils le désirent.

3.5.4. Contrôle externe des sociétés de gestion collective

Dans nombre d'Etats membres, les sociétés de gestion collective sont soumises au contrôle par les autorités publiques ou des entités spécifiques. Ce contrôle connaît toutefois un degré et une efficacité très divergents. Le contrôle externe comprend le comportement des sociétés, leur fonctionnement, le contrôle des tarifs et des conditions de licences ainsi que le système de résolution des conflits. Du point de vue du Marché intérieur, les différences existantes en ce qui concerne le contrôle externe est significatif et ne peut pas être ignoré. Des règles divergentes d'un Etat membre l'autre constituent des obstacles aux intérêts des ayants droit et des utilisateurs, étant donné la position d'exclusivité de la plupart des sociétés de gestion et leurs accords de représentation réciproques. En conséquence, dans tous les Etats membres, un contrôle externe adéquat devrait être mis en place.

Du point de vue du marché intérieur, il pourrait être utile d'établir un cadre commun portant sur certains paramètres du contrôle externe et ériger certaines entités spécifiques dans tous les Etats membres (par exemple, des tribunaux spécialisés, des autorités administratives et des commissions d'arbitrage) et de prévoir des règles communes sur leur compétences, leur composition, la nature obligatoire ou non de leur décisions.

3.6. Conclusions

Afin de parvenir à un véritable marché intérieur à la fois pour l'exploitation analogique et en ligne de la propriété intellectuelle, davantage de règles communes sur plusieurs aspects de la gestion collective sont requises. Cela sauvegarderait son fonctionnement au sein de la Communauté et lui permettrait de demeurer une option valable pour la gestion des droits, au bénéfice des ayants droit et utilisateurs. Les principes du droit d'auteur et les besoins du Marché intérieur devraient être les principes conducteurs pour parvenir à davantage de règles communes sur la gestion collective. Il devrait en résulter plus d'efficacité et de transparence ainsi qu'un cadre commun sur certains aspects de la gestion collective. S'abstenir de toute action législative ne paraît plus être une option appropriée. S'en tenir aux normes douces, tels que les codes de conduite, n'apparaît pas être une option appropriée. Les conclusions du processus de consultation ont confirmé le besoin d'une action complémentaire sur les aspects de la gestion collective, qui affectent le commerce transfrontière et qui ont été identifiés comme empêchant l'exercice du plein potentiel du Marché intérieur. Une telle option respecterait les principes de subsidiarité et de proportionnalité et harmoniserait certains aspects de la gestion collective et de la bonne gouvernance des sociétés de gestion. Afin de parvenir aux objectifs soulignés dans la présente communication, la Commission à l'intention de proposer un instrument législatif sur certains aspects de la gestion collective et de la bonne gouvernance des sociétés de gestion. Cette initiative, qui fera l'objet d'une consultation des cercles intéressés, prendra en compte les récents développements du marché et des législations des Etats membres présents et nouveaux.

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