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Document 52002DC0205

Cinquieme Rapport de la Commission au Conseil sur la situation de la construction navale dans le monde

/* COM/2002/0205 final */

52002DC0205

Cinquieme Rapport de la Commission au Conseil sur la situation de la construction navale dans le monde /* COM/2002/0205 final */


CINQUIEME RAPPORT DE LA COMMISSION AU CONSEIL SUR LA SITUATION DE LA CONSTRUCTION NAVALE DANS LE MONDE

TABLE DES MATIÈRES

Résumé.

1. Introduction

2. Analyse du marché

2.1. Évolution du marché et parts de marché

2.2. Évolution des prix

2.3. Analyse détaillée des prix

3. Analyses détaillées des coûts

3.1. Mise à jour des études précédentes

3.2. Nouvelles études

4. Conclusions

5. Bibliographie

Résumé

Conformément à l'article 12 du règlement (CE) n° 1540/98 du Conseil du 29 juin 1998 concernant les aides à la construction navale [1], la Commission est tenue de présenter périodiquement au Conseil un rapport sur la situation du marché et d'examiner si les chantiers navals européens font les frais de pratiques anticoncurrentielles. Dans ce cadre, la Commission a déjà communiqué au Conseil quatre rapports sur la situation de la construction navale dans le monde [2] qui présentent les graves difficultés que connaît le secteur de la construction navale et qui détaillent les pratiques commerciales déloyales des concurrents d'Extrême-Orient. Le cinquième rapport s'inscrit dans le prolongement de la démarche et des conclusions des quatre premiers.

[1] JO L 202 du 18.7.1998, p. 1.

[2] COM(1999) 474 final du 13.10.1999, COM(2000) 263 final du 3.5.2000, COM(2000) 730 final du 15.11.2000 et COM(2001) 219 final du 2.5.2001. Ces rapports sont disponibles sur Internet (uniquement en anglais) à l'adresse suivante: http://europa.eu.int/comm/enterprise/maritime/shipbuilding_market/index.htm.

Le marché de la construction navale dans le monde demeure confronté à de graves difficultés dues à un déséquilibre important entre l'offre et la demande. L'expansion qu'ont connue les chantiers navals, principalement en Corée, mais aujourd'hui de plus en plus en Chine [3], a provoqué une chute des prix. Grâce au nombre record de commandes en 2000, les prix se sont quelque peu redressés mais le recul considérable des commandes en 2001 a entraîné une nouvelle baisse des prix.

[3] Afin d'augmenter leur production, la plupart des grands chantiers chinois développent actuellement des projets d'investissement considérables visant à créer ou à agrandir des cales et à accroître la puissance de levage (voir la Lloyd's List des 5 et 14 février 2002).

L'année 2001 a été semée d'écueils pour les industries maritimes dans le monde: la récession qui a frappé les États-Unis et les attaques terroristes du 11 septembre ont provoqué un recul de la demande dans les segments du commerce maritime et des croisières, respectivement. La diminution des commandes a surtout touché les secteurs des porte-conteneurs et des navires de croisière, ce qui a entraîné une chute des parts de marché globales de la Corée et de l'UE, des régions qui sont particulièrement actives dans ces segments.

Seul le segment des transporteurs de gaz naturel liquéfié (GNL) a enregistré une augmentation du volume absolu de commandes. Toutefois, il s'agit encore d'un marché étroit. Les chantiers coréens ont décroché la plupart des commandes de transporteurs de GNL. Ils détiennent 65 % du carnet de commandes mondial dans ce secteur et 79 % des nouvelles commandes passées en 2001 ont bénéficié à des chantiers coréens et ce, malgré le fait que ce pays est encore relativement inexpérimenté dans ce domaine et que ses chantiers navals ne possèdent pas de brevets dans les technologies clés. L'analyse du marché suggère que les chantiers coréens ont pu s'implanter dans ce segment grâce au très bas niveau de leurs offres. Leur aptitude à fournir un grand nombre de navires avec des courts délais de livraison peut également avoir été déterminante pour l'obtention d'un grand nombre de commandes.

Les analyses détaillées des coûts effectuées par la Commission indiquent que certains chantiers coréens continuent à fixer le prix des navires en dessous de leur coût alors que d'autres tentent d'améliorer leurs résultats financiers. La plupart des grands chantiers coréens ont pu afficher des bénéfices en 2001 grâce aux volumes de ventes élevés et aux avances perçues qui s'y rapportent; toutefois, dans quelques cas, certaines mesures isolées destinées à améliorer la situation financière des chantiers ont également joué un rôle.

Malgré plusieurs cycles de négociations avec la Corée, la Commission n'a pu convaincre les autorités et les chantiers de ce pays de mettre totalement en oeuvre les principes du marché et de permettre la suppression des entreprises non rentables. Aucune amélioration de la situation du marché n'est donc à prévoir et en conséquence la Commission a proposé des mesures au Conseil, notamment la préparation d'une requête à l'OMC pour le règlement dispute et un Règlement pour un mécanisme de défense temporaire de la construction navale.

Le présent rapport confirme les conclusions des quatre rapports précédents de la Commission, à savoir que le marché mondial de la construction navale se caractérise par un déséquilibre considérable entre l'offre et la demande, que l'essor massif de la capacité de construction navale en Corée a entraîné une diminution considérable du niveau des offres dans la plupart des segments et que les pertes qui en résultent pour les chantiers coréens ont, dans certains cas, été compensées par une restructuration financière qui, selon la Commission, n'est pas conforme aux règles de l'OMC applicables. La Commission poursuivra son exercice de surveillance du marché et d'analyses des coûts et elle présentera ses conclusions au Conseil, comme le prévoit l'article 12 du règlement (CE) n° 1540/98.

1. Introduction

Conformément à l'article 12 du règlement (CE) n° 1540/98 du Conseil du 29 juin 1998 concernant les aides à la construction navale [4], la Commission est tenue de présenter périodiquement au Conseil un rapport sur la situation du marché et d'examiner si les chantiers navals européens font les frais de pratiques anticoncurrentielles. Dans ce cadre, la Commission a déjà communiqué au Conseil quatre rapports sur la situation de la construction navale dans le monde [5] qui présentent les graves difficultés que connaît le secteur de la construction navale et qui détaillent les pratiques commerciales déloyales des concurrents d'Extrême-Orient. Ce cinquième rapport s'inscrit dans le prolongement de la démarche des quatre premiers. C'est la raison pour laquelle il convient de l'examiner à la lumière de certains éléments essentiels des rapports antérieurs, en particulier en ce qui concerne:

[4] JO L 202 du 18.7.1998, p. 1.

[5] COM(1999) 474 final du 13.10.1999, COM(2000) 263 final du 3.5.2000, COM(2000) 730 final du 15.11.2000 et COM(2001) 219 final du 2.5.2001.

- l'analyse de l'offre et de la demande à long terme pour les navires marchands;

- les observations générales sur la nature des contrats dans le secteur de la construction navale et sur les études réalisées;

- l'analyse du secteur financier de la Corée du Sud;

- les précisions relatives à certains chantiers navals examinés;

- la description de la méthodologie utilisée;

- l'analyse du secteur de la construction navale en République populaire de Chine; et

- l'historique des aides accordées aux chantiers navals de l'UE.

Néanmoins, les informations contenues dans les quatre premiers rapports ont été dûment actualisées dans le présent document et leurs éléments essentiels sont rappelés quand cela est jugé nécessaire. C'est notamment le cas des études de coût détaillées qui ont été effectuées pour les commandes de navires attribuées à des chantiers asiatiques, puisque le modèle de calcul des coûts sur lequel reposent ces études est réappliqué à chaque fois que des informations nouvelles ou plus précises sont recueillies. Les études de coût mises à jour sont indiquées dans le tableau de référence.

Ce cinquième rapport suit la structure utilisée dans le quatrième rapport et contient des informations actualisées sur les parts de marché et l'évolution des prix. En outre, six nouvelles analyses de coût relatives à certaines commandes passées à des chantiers navals sud-coréens ont été réalisées depuis le dernier rapport, et leurs résultats sont décrits dans le présent document.

Les rapports de la Commission sur la construction navale ont été utilisés au service d'initiatives politiques destinées à trouver des solutions aux problèmes persistants dans le secteur. Bien que le déséquilibre entre l'offre et la demande dans la construction navale au niveau mondial constitue un problème depuis de nombreuses années, il est difficile de fournir des preuves tangibles de pratiques commerciales déloyales étant donné la nature des contrats de construction navale (voir le chapitre y afférent dans le premier rapport COM(1999) 474 final) et la mondialisation économique qui caractérise les industries maritimes. Les instruments traditionnels de politique commerciale comme les droits de douane et les quotas ne peuvent être appliqués, ce qui ne laisse que très peu de possibilités aux décideurs politiques. Les aides d'État directes ou indirectes ont donc été pendant longtemps le principal instrument choisi. Étant donné que la Commission est convaincue que les aides publiques faussent, par principe, la concurrence et ne permettent pas nécessairement au secteur d'améliorer sa compétitivité, elle a appliqué une politique visant à réduire les aides d'État dans le secteur. L'industrie européenne de la construction navale s'accorde largement à reconnaître que cette approche lui sera bénéfique à long terme.

Toutefois, ces efforts ont été gravement compromis en 1997/1998 lorsque la crise asiatique a permis aux chantiers navals de Corée du Sud de baisser radicalement leurs prix et de gagner des parts de marché significatives dans des segments importants au détriment de leurs concurrents de l'UE. S'il convenait de reconnaître, en général, les avantages compétitifs liés à la dévaluation du won qui a suivi, les prix beaucoup plus bas proposés pour des navires neufs ne se sont pas redressés lorsque le won a été réévalué. De plus, il s'est avéré que les coûts liés au niveau élevé de la dette libellée en monnaies étrangères des constructeurs coréens (qui était nécessaire pour financer l'essor massif des chantiers coréens au début des années 1990) n'étaient pas inclus dans le calcul des coûts. Les pertes qui en ont résulté ont été à l'origine de graves problèmes sur les chantiers sud-coréens. Toutefois, tous ces chantiers (y compris ceux qui ont dû faire l'objet d'un plan de protection judiciaire) ont continué à construire des navires et à les proposer sur les marchés mondiaux à des prix très bas.

Les distorsions du marché qui en ont résulté sont devenues si manifestes que la Commission a décidé de procéder à une étude pour déterminer certaines données fondamentales comme les éléments du coût réel en Corée et les répercussions des politiques du gouvernement coréen sur la construction navale. L'étude de suivi du marché de la construction navale, qui en est à présent à sa troisième année, a fourni de nombreuses données sur l'évolution du marché et sur les politiques industrielles sous-jacentes. L'étude concerne la construction navale en Extrême-Orient en général, mais compte tenu de l'évolution du marché, la plupart des travaux ont porté sur la Corée. L'étude de suivi du marché de la construction navale fournit la base du présent rapport et des quatre précédents.

Étant donné les résultats contenus dans ses quatre premiers rapports, la Commission a tenté, jusqu'en mai 2001, d'entamer des négociations avec la Corée du Sud afin de stabiliser le marché mondial de la construction navale au moyen d'instruments du marché. Ces efforts ont été menés au niveau bilatéral et au sein de l'OCDE. Toutefois, et malgré plusieurs cycles de négociations, aucun progrès n'a été réalisé parce que le gouvernement coréen a prétendu n'avoir aucune influence sur les chantiers navals et les institutions financières qui les soutiennent et parce qu'il est convaincu que les activités commerciales sont conformes aux principes du libre échange.

Sur la base d'une plainte déposée par l'industrie communautaire de la construction navale conformément au règlement sur les obstacles au commerce (ROC) [6], la Commission a procédé à une enquête minutieuse des pratiques commerciales coréennes en matière de construction navale. L'enquête a conclu que "d'importantes subventions ont été octroyées aux chantiers navals coréens dans le cadre de régimes d'aide aux exportations et d'aide internes, contraires aux dispositions de l'accord de l'OMC sur les subventions, conclu en 1994" [7]. Elle a également conclu qu'il "a été établi que ces subventions ont des effets défavorables sur l'industrie de l'UE au sens de l'accord de l'OMC sur les subventions et qu'elles sont dès lors attaquables" [8].

[6] Règlement (CE) n° 3286/94 du Conseil, du 22 décembre 1994, arrêtant des procédures communautaires en matière de politique commerciale commune en vue d'assurer l'exercice par la Communauté des droits qui lui sont conférés par les règles du commerce international, en particulier celles instituées sous l'égide de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), Journal officiel L 349 du 31.12.1994, p. 0071-0078

[7] Communiqué de presse IP/01/656 du 8.5.2001.

[8] Memo 00/176 du 8.5.2001.

En conséquence, la Commission a décidé d'adopter une double approche pour s'attaquer au problème [9]. D'une part, elle poursuivrait l'examen de la question avec les autorités coréennes afin d'obtenir la suppression immédiate des subventions ou des effets néfastes. Si une solution amiable n'était pas trouvée pour le 30 juin 2001, la Commission porterait l'affaire devant l'OMC (ce qu'elle n'a pas encore fait). Dans un même temps, elle proposerait un mécanisme de soutien temporaire qui serait introduit parallèlement à l'engagement de la procédure devant l'OMC. Étant donné que plusieurs cycles de négociations avec le gouvernement coréen n'ont donné aucun résultat tangible, la proposition de mécanisme de soutien temporaire a été présentée au Conseil [10].

[9] Communiqué de presse IP/01/656 du 8.5.2001.

[10] COM(2001) 401 final du 25.7.2001, voir également le communiqué de presse IP/01/1078 du 25.7.2001. La proposition de la Commission prévoit d'autoriser une aide maximale de 14 % de la valeur contractuelle avant aide aux types de navires pour lesquels il a été démontré que l'industrie de la construction navale de l'Union européenne a subi un préjudice considérable du fait des pratiques commerciales déloyales de la Corée.

Le Conseil Industrie du 5 décembre 2001 n'a pris aucune décision au sujet de la proposition de la Commission et il a été décidé de poursuivre les discussions durant la présidence espagnole, laquelle a fait savoir qu'elle souhaitait régler cette question durant son mandat. Dans l'intervalle, l'industrie de la construction navale de l'Union européenne a demandé que soit prolongée la période d'enquête ROC afin de couvrir également l'évolution du marché au cours de la période décembre 2000/décembre 2001. L'analyse est en cours.

Le cinquième rapport sur la construction navale décrit l'évolution récente du marché de la construction navale dans le monde conformément à l'article 12 du règlement (CE) n° 1540/98.

2. Analyse du marché

2.1. Évolution du marché et parts de marché

L'année 2001 a été particulièrement difficile pour l'industrie mondiale de la construction navale. La forte augmentation des nouvelles commandes enregistrée en 2000 s'est avérée intenable; cette poussée était due aux prix très bas et a fait de 2000 une année record dans l'histoire de la construction navale, les nouvelles commandes dépassant la barre des 29 millions tbc (tonnes brutes compensées). Le total des commandes a diminué de 21 % entre 2000 et 2001 (en tbc) en raison de la saturation des segments du marché et du fait que même les offres plus basses n'ont pu déboucher sur de nouvelles commandes spéculatives.

Cette évolution s'est encore accélérée après la suppression des aides au fonctionnement dans l'UE à compter du 1er janvier 2001, qui a permis aux chantiers de l'UE de réceptionner des commandes à terme, la récession économique mondiale, qui a ralenti la demande de services de transport, réduisant ainsi les taux de fret et, partant, la demande de nouveaux navires, et les répercussions des attaques terroristes du 11 septembre 2001.

Alors que le déclin des principales économies mondiales a surtout touché les segments du vrac liquide et des porte-conteneurs, les événements du 11 septembre ont eu un impact considérable sur le secteur des croisières, qui a enregistré trois faillites et une chute importante des réservations. À contrecoeur, les opérateurs de croisières ont alors décidé de consolider leurs activités (en procédant à des fusions ou en abandonnant certaines zones de croisière) plutôt que d'essayer de poursuivre leur expansion. Par conséquent, presque aucune commande de navires de croisière n'a été enregistrée en 2001 (les seules commandes ont concerné quelques navires spécialisés et plus petits destinés aux croisières en Antarctique, région où le risque de menaces terroristes est faible et où les clients ont généralement moins tendance à annuler). Au contraire, certaines commandes de nouveaux navires de croisière ont été reportées et des options en vue de navires supplémentaires n'ont pas été exercées.

De ce fait, les industries maritimes en général affichent une certaine morosité. Bien que de nombreux chantiers soient toujours très actifs grâce aux commandes passées en 2000 (et plus tôt), le malaise ne fait que croître en ce qui concerne la situation après 2003, c'est-à-dire lorsque la plupart des commandes antérieures auront été honorées. Les entreprises concernées sont notamment celles confrontées à des contraintes techniques (taille des docks, capacités de conception), et qui présentent donc un éventail réduit de produits, celles déjà hautement spécialisées dans la construction de certains types de navires, celles qui ne peuvent compter sur la création d'une nouvelle demande, par exemple via des commandes nationales, ou celles qui ne sont pas en mesure de développer un portefeuille de navires militaires pour compenser la construction de navires marchands. Malheureusement, ces caractéristiques concernent la majorité des chantiers de l'UE et de l'EEE.

Compte tenu des retards dans la publication des statistiques sur les commandes, il n'est pas encore possible de donner une analyse finale pour l'année 2001, mais la Commission a entrepris des efforts considérables pour consolider les informations disponibles et les développer dans une série chronologique plus étendue. Le résultat est présenté dans le graphique ci-dessous.

Figure 1 - Parts de marché en termes de nouvelles commandes, exprimées en pourcentage des volumes en tbc, 1992-2001

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

>EMPLACEMENT TABLE>

Le graphique montre que, en 2001, la Corée du Sud et l'UE ont vu leurs parts de marché diminuer alors que le Japon et la Chine (RPC) ont pu consolider leur position. Ces chiffres peuvent s'expliquer par les évolutions décrites ci-dessus: les chantiers coréens avaient privilégié le marché des pétroliers et des porte-conteneurs alors que ceux de l'UE sont spécialisés dans la construction des navires de croisière. Tous ces segments ont été frappés de plein fouet par les effets mentionnés précédemment et il n'a pas suffi d'axer la construction sur d'autres produits (les chantiers sud-coréens se sont tournés vers la construction de transporteurs GNL et les chantiers de l'UE ont développé leurs portefeuilles de transbordeurs et de rouliers) pour compenser la diminution générale des commandes. La part de marché de la Corée du Sud demeure toutefois largement supérieure à celle de l'année précédant la crise asiatique. Par ailleurs, le Japon a connu une percée des commandes nationales et a profité de la faiblesse du yen par rapport au dollar américain; quant à la Chine, elle est aujourd'hui un constructeur important de transporteurs de produits pétroliers grâce au bas niveau de ses offres et à une qualité accrue. Toutefois, dans toutes les grandes régions de construction navale, la situation est jugée problématique car les prix des navires neufs continuent de descendre et il est très difficile de réaliser des bénéfices (voir chapitre suivant). Le principal objectif de nombreux chantiers est donc la survie et la limitation des pertes.

Pour donner une image générale du marché de la construction navale, le graphique ci-dessous propose une ventilation des nouvelles commandes durant les cinq dernières années par type de navire.

Figure 2 - Variation de la répartition des commandes en tbc, 1997-2001

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

Source: Lloyd's Register/Fairplay - Commission européenne

Quatre grands types de navires dominent le marché: les vraquiers, les transporteurs de produits chimiques/pétroliers, les pétroliers et les porte-conteneurs. Au total, ces types de navires représentent 73 % de l'ensemble des commandes réceptionnées en 2001 (en tbc). Les autres secteurs constituent en effet des marchés étroits, les principaux étant les secteurs des croisières et du GNL. Le graphique ci-dessus illustre parfaitement le recul du secteur des croisières et l'essor du secteur du GNL.

Le secteur des transporteurs de GNL est le seul ayant enregistré une augmentation absolue des commandes de nouveaux navires en 2001. Bien que les transporteurs de GNL constituent un marché étroit en termes de volume (ils représentent moins de 2 % des navires commandés et leur part en termes de tbc équivaut à environ 8 % du volume de commandes existant), les navires sont hautement sophistiqués et relativement onéreux, chaque unité coûtant environ 170 millions d'USD. Les brevets clés relatifs aux systèmes de stockage de la cargaison sont détenus par des sociétés européennes.

Cinquante transporteurs de GNL sont actuellement en commande dans le monde et 28 autres sont en option. Les commandes confirmées représentent près de 36 % de la flotte actuelle de transporteurs de GNL (en nombre de navires). La Corée détient 65 % de ces commandes (en tbc), le Japon environ 25 % et l'UE, 10 %. Sur les 30 nouvelles commandes passées en 2001 (seules quatre commandes de navires ont été enregistrées dans le monde en 1998), la part de la Corée était encore supérieure (en tbc): 79 % contre 14 % pour le Japon et 7 % pour l'UE. Cela signifie que ce segment, qui était dominé par les chantiers japonais et européens (principalement la France et la Finlande) avant la crise asiatique, est aujourd'hui principalement contrôlé par la Corée. Ce secteur a connu une croissance exceptionnelle en 2001, mais les prix unitaires des transporteurs de GNL sont passés de 190 millions d'USD en 1998 à moins de 170 millions d'USD en 2001 et il est difficile de n'attribuer cette diminution qu'à des gains de productivité ou à des progrès techniques. Certaines commandes passées en Corée à la fin de l'année 2000, soit au début de l'expansion du marché, auraient même été facturées à moins de 145 millions d'USD. Il s'avère que les constructeurs coréens considèrent le transport de GNL comme un secteur très prometteur dans lequel ils essaient de gagner des parts de marché. La société Daewoo a notamment été très active dans ce segment et s'est adjugé la plupart des commandes passées en Corée. Il convient de faire remarquer que Daewoo a subi une restructuration totale en 2000 et que durant cette période, la majeure partie de ses créances ont été annulées ou converties en capital par le principal créancier, la banque publique Korean Development Bank (KDB).

Même s'il y a lieu de croire que le transport du gaz naturel s'intensifiera à l'avenir en raison des préoccupations environnementales et des besoins des économies émergentes telles que la Chine, il convient également de noter que certaines commandes de transporteurs de GNL étaient liées à la crise énergétique qui a frappé les États-Unis au début de 2001 et qui s'est finalement révélée passagère. En outre, certaines commandes concernaient Enron Corp. et devront probablement être aujourd'hui reconsidérées.

2.2. Évolution des prix

La question des prix des contrats pour de nouveaux navires est l'un des aspects les plus opaques de l'industrie de la construction navale. Les armateurs et les chantiers navals sont peu bavards lorsqu'il s'agit de communiquer leurs prix. Cette discrétion est due principalement au fait que la construction navale concerne des commandes individuelles importantes qui favorisent une relation étroite entre le chantier et le client. Alors que le chantier peut chercher à attirer certains clients grâce à des prix compétitifs (et/ou une spécification particulièrement élevée), l'armateur préfère généralement ne pas révéler un achat intéressant car ses clients pourraient alors exiger des conditions tout aussi favorables concernant les modalités d'affrètement ou les taux de fret. Il est donc difficile d'obtenir des informations fiables sur les prix.

La principale source utilisée est H. Clarkson Ltd. [11] et ses diverses filiales (notamment Clarkson Research). Bien que Clarkson soit une société reconnue dans le secteur et que ses données soient également utilisées par des organismes internationaux tels que l'OCDE, la Commission relève certains problèmes liés aux informations fournies. Les renseignements de Clarkson concernent certains types de navires standard (alors que d'autres types importants de navires tels que les porte-conteneurs Post-Panamax ou les navires pour passagers sont absents) et non les contrats réellement signés. La complexité des navires commandés en termes de spécifications techniques, de production en série et de conditions de financement ne transparaît pas dans le chiffre unique indiqué pour chaque sous-type. Enfin, Clarkson travaille également comme courtier, ce qui peut l'amener à donner une image trop optimiste du marché.

[11] http://www.clarksons.net/.

De fait, les analyses détaillées des prix de certains contrats effectuées par la Commission ont montré que, dans presque tous les cas, les prix communiqués par Clarkson pour un navire donné étaient supérieurs à ceux observés lors d'analyses directes. Les pétroliers Suezmax en sont un exemple: pour un pétrolier standard Suezmax de 150 000 tpl, Clarkson donne le prix de 46,5 millions d'USD (fin 2001) et Fearnleys mentionne le prix de 48,0 millions d'USD, alors que l'analyse des marchés de la Commission a relevé plusieurs commandes au prix de 43,0 millions d'USD, soit 7 à 10 % de moins que les montants indiqués par ces sociétés. Toutefois, le présent rapport considère toujours les informations de Clarkson comme la source principale, mais il se réserve le droit de les compléter par ses propres conclusions.

>EMPLACEMENT TABLE>

>EMPLACEMENT TABLE>

Les informations transmises par Clarkson Research confirment la tendance générale à la baisse des prix des navires. Cette tendance concerne tous les types de navires standard et reflète la morosité générale du marché et ce, malgré l'augmentation des coûts due à l'inflation, la hausse des salaires et l'accroissement des prix des matières premières en USD dans toutes les grandes régions de construction navale. Cette tendance est également confirmée par les informations fournies par la société norvégienne Fearnleys [12] et publiées par sa filiale Fearnresearch. Fearnleys présente une ventilation quelque peu différente des types de navires et utilisent d'autres tailles et spécifications. Le tableau ci-dessous donne des prix légèrement plus élevés pour la plupart des principaux types de navires.

[12] http://www.fearnleys.com/.

>EMPLACEMENT TABLE>

2.3. Analyse détaillée des prix

Les prix pratiqués par les chantiers navals sud-coréens, qui sont considérés comme les numéros un des prix pour la plupart des types de navires [13], sont analysés par la Commission contrat par contrat afin d'obtenir un tableau plus exact de l'évolution du marché. Ces informations servent à évaluer les politiques de prix de chaque chantier coréen et les types de navire de leurs portefeuilles. Une présentation exhaustive de cette analyse serait trop longue et ne rentre pas dans le cadre du présent rapport.

[13] Les chantiers chinois peuvent être considérés comme les numéros un des prix pour les cargos en général (navires à entrepont) et les pétroliers présentant peu de spécifications; le Japon est redevenu compétitif sur le marché des vraquiers standard (pour lesquels il dispose de chantiers spécialisés bénéficiant d'une production en série) après la dévaluation récente du yen par rapport à l'USD. Toutefois, pour tous les types de navires commerciaux que pourraient construire les chantiers de l'UE, les prix sont déterminés par la Corée.

Des informations sur les prix ont été rassemblées et l'évolution de ces derniers est présentée ci-dessous sous la forme d'un indice, le niveau de prix de 1987 étant égal à l'indice 100. L'indice est basé sur les informations publiées par des courtiers et d'autres sources et il indique la tendance des prix à long terme qui ressort des analyses du consultant de la Commission. L'indice est constamment actualisé grâce aux informations contenues dans les rapports mensuels de contrôle.

Figure 3 - Indice des prix des nouveaux navires (1987=100)

>REFERENCE A UN GRAPHIQUE>

Source: Commission européenne

L'indice montre clairement la chute brutale des prix consécutive à la crise asiatique de 1997/98 et les efforts qui ont suivi pour augmenter les prix parallèlement à l'essor des commandes en 2000. Le mouvement (peu prononcé) vers une amélioration des prix s'est interrompu fin 2000 et s'est inversé en 2001 comme pouvait le laisser prévoir la diminution des commandes réceptionnées. Il est intéressant de constater que les niveaux de prix de 2001 ne dépassent que d'environ 20 % les niveaux de 1987, ce qui signifie que les prix n'ont pas évolué au même rythme que, par exemple, l'inflation.

Étant donné que les prévisions de commandes sont très limitées pour 2002, le redressement des prix sera difficile, même si les chantiers seront tentés d'obtenir des commandes dans les segments les moins touchés par l'érosion des prix. Le passé nous a toutefois enseigné que ce comportement n'améliore pas les résultats financiers des chantiers, mais accentue plutôt l'érosion des prix dans les secteurs visés, tant que le marché se caractérise par une offre excessive.

La Commission continuera de contrôler les prix et, conformément à l'évolution du marché, elle sera de plus en plus attentive à la production en Chine. Les constructeurs navals chinois ont fait savoir qu'ils souhaitaient procéder à un développement à grande échelle de leurs équipements, en suivant l'exemple de la Corée du Sud. Une telle mesure conduira certainement à une nouvelle diminution des prix si la Chine ne génère pas elle-même une demande supplémentaire importante. Étant donné que la Chine est aujourd'hui membre à part entière de l'OMC, cette question devrait être abordée avant qu'une capacité de construction navale accrue soit disponible sur le marché.

3. Analyses détaillées des coûts

3.1. Mise à jour des études précédentes

Afin de se procurer les données dont elle a besoin, la Commission a recours à des consultants, dont les travaux réguliers ont permis de définir un modèle de ventilation des coûts, comprenant tous les éléments qui, tant au niveau de la construction des navires proprement dite qu'au niveau du chantier naval en général, ont une incidence sur le coût. Les éléments du coût qui servent à construire le modèle englobent les coûts directs (matériaux, main-d'oeuvre, équipements, etc.) et les coûts indirects (financement du navire et des installations de production, frais généraux, assurances, etc.). Le calcul du prix de construction comprend également une marge bénéficiaire de 5 %. Le modèle est détaillé à l'annexe I du premier rapport.

À mesure que l'étude progresse, des informations supplémentaires sont recueillies et utilisées pour valider les analyses de coûts antérieures. Les 32 commandes passées à la Corée et étudiées dans les quatre premiers rapports ont ainsi été recalculées et les résultats révisés sont présentés ci-dessous. Comme le soulignait déjà le premier rapport, tous les paramètres reposent sur une approche prudente afin que les coûts minimaux calculés pour des projets déterminés ne puissent être aisément contestés. L'analyse actualisée s'accompagne d'hypothèses sur l'inflation. Les commandes passées maintenant étant exécutées sur une période de deux à trois ans, il est de pratique courante d'évaluer les coûts futurs au moment de la livraison.

Depuis le 4e rapport sur la construction navale, l'approche analytique a été examinée pour comparer les résultats des études basées sur la méthode initiale, à savoir le calcul de la contribution au service de la dette (en USD par tbc) que doit fournir chaque projet de construction navale, aux résultats basés sur les "coûts" entraînés par la dépréciation des équipements. Il n'existe aucune approche homogène de la dépréciation en Corée, chaque chantier naval utilise des périodes de dépréciation et des méthodes de calcul différentes et il est donc très difficile d'affecter ces coûts à des projets précis de construction navale.

Ces méthodes différentes de calcul ont néanmoins permis de dresser un tableau clair de la situation: les chantiers tels que Hyundai (HHI), Hanjin (HHIC) et Samsung (SHI), qui n'ont pas bénéficié d'un rééchelonnement de la dette de grande envergure et qui utilisent des équipements relativement "anciens", enregistrent des coûts de production (légèrement) plus élevés en prenant la méthodologie basée sur la dette, alors que les chantiers comme Daewoo (DSME) et Daedong, qui ont profité de réductions de la dette et de moratoires mais qui utilisent des équipements relativement "neufs" enregistrent des coûts de production légèrement plus élevés dans le cadre de la méthodologie basée sur la dépréciation. Les deux approches donnent des résultats très similaires pour les deux autres grands chantiers coréens, Hyundai Mipo et Samho. Bien entendu, les résultats dépendent également des conditions de financement des projets analysés. Des paiements d'avance importants (up-front) permettent au chantier de percevoir des intérêts tandis que des conditions de paiement à long terme (tail-heavy) augmentent les charges financières. Par ailleurs, ces conditions de paiement n'ont aucun effet sur la dépréciation. Les dates de livraison des commandes peuvent également jouer un rôle si, par exemple, les délais de remboursement sont venus à échéance et si le navire doit contribuer au service obligatoire de la dette. En résumé, les différences entre les deux approches sont peu significatives et ne modifient pas les conclusions des analyses des coûts.

Dans le cadre du premier rapport sur la construction navale, neuf commandes passées à des chantiers navals sud-coréens ont été examinées. Outre ces commandes, neuf commandes supplémentaires ont été analysées dans le second rapport et sept autres dans le troisième rapport. Le quatrième rapport a couvert sept commandes supplémentaires. La Commission a veillé à opérer une sélection équilibrée des marchés de construction navale à étudier, en tenant compte de l'objectif général de l'exercice, de l'urgence relative de la question et de la disponibilité de données significatives pour la comparaison. La Commission est convaincue que les informations prises en compte dans l'analyse sont les meilleures et les plus fiables dont on puisse disposer actuellement. Le tableau suivant résume les observations actualisées concernant les 32 commandes passées en Corée. Dans un souci de cohérence avec les rapports précédents et étant donné que les différences entre les méthodologies d'analyse sont généralement peu significatives, tous les résultats présentés reposent sur l'approche basée sur le service de la dette.

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3.2. Nouvelles études

Depuis le dernier rapport sur la construction navale, six nouvelles commandes (toutes passées en Corée du Sud) ont été analysées en détail afin d'établir les coûts de construction réels. Les commandes analysées sont les suivantes:

- VLCC, 48 120 tbc, à construire par Samho Heavy Industries;

- transporteur de GNL (5 unités), 71 850 tbc, à construire par Daewoo Shipbuilding and Marine Engineering Co. Ltd. (DSME);

- transporteur GNL, 69 675 tbc, à construire par Samsung Heavy Industries (SHI);

- transporteur GNL (2 unités), 88 500 tbc, à construire par Hyundai Heavy Industries (HHI);

- pétrolier Suezmax (4 unités), 30 800 tbc, à construire par Samho Heavy Industries (SHI);

- porte-conteneurs de 5 762 EVP (2 unités), 42 835 tbc, à construire par Samsung Heavy Industries (SHI);

Les résultats des nouvelles analyses sont résumés dans le tableau 5.

Tableau 5 - Comparaison des montants des commandes communiqués et des coûts de construction calculés pour les navires neufs sélectionnés (nouvelles analyses)

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Alors que le niveau des sous-cotations semble diminuer, principalement en raison des gains sur le change en 2001 qui devraient être érodés par les augmentations de salaire et l'inflation prévues [14], les analyses confirment certaines tendances commerciales connues propres aux chantiers coréens. Comme indiqué précédemment, les analyses des coûts et les hypothèses sous-jacentes sont examinées en permanence afin de tenir compte de l'évolution la plus récente des chantiers et de l'économie coréenne. Par conséquent, les efforts de rééchelonnement de la dette et de refinancement ainsi que les conditions plus favorables, dues par exemple à l'augmentation de la marge brute d'autofinancement, sont pris en compte et les résultats peuvent donc sembler plus positifs. La Commission a toutefois conclu dans son rapport ROC que la plupart de ces efforts ne peuvent être jugés compatibles avec les règles de l'OMC et que les chantiers coréens, même s'ils arrivent presque à couvrir leurs coûts d'exploitation, nuisent gravement aux constructeurs navals de l'UE. Si les diverses mesures adoptées par la Corée pour améliorer la situation financière des chantiers n'étaient pas prises en compte, les résultats des analyses des coûts indiqueraient un écart considérable entre les coûts totaux et les offres. Samho, comme son prédécesseur Halla, continue de proposer ses navires à des prix bien inférieurs aux coûts de construction, même si des pertes atteignant 40 % des coûts réels de construction, comme ce fut le cas par le passé, ne sont plus tolérées depuis que Hyundai a repris la direction du chantier. Sous la nouvelle direction, Samho a également accru sa production, celle-ci a presque doublé et est surtout axée sur les pétroliers, ce qui permet de réaliser de plus grandes économies d'échelle. Les prix fixés par Samho semblent aujourd'hui refléter au moins les coûts d'exploitation, même si aucune mesure n'a encore été prise pour assurer le service de la dette ou réduire cette dernière.

[14] Le won s'est considérablement affaibli par rapport au dollar américain durant le premier semestre 2001, passant d'un niveau en vigueur d'environ 1 130 won par rapport au dollar à un niveau avoisinant les 1 300. Les augmentations annuelles des salaires devraient se situer aux alentours de 10 % alors que l'inflation est encore relativement élevée à environ 8 % par an.

DSME est devenu le premier constructeur de transporteurs de GNL du monde grâce à la commande de seize navires, ce qui permet au chantier de réaliser des économies d'échelle sans précédent. L'analyse détaillée révèle toutefois que la construction de transporteurs de GNL impose des limites à la rentabilité car certains équipements doivent être dédoublés, ce qui engendrent des coûts élevés d'investissement de départ. En outre, DSME a pu commencer ses activités en tant que nouvelle société à la fin de l'année 2000, en s'étant débarrassé de la plupart des créances de son prédécesseur. DSME peut donc exploiter un très vaste chantier naval ultramoderne sans que les coûts considérables d'investissement de départ se répercutent sur les prix de ses produits. Toutefois, DSME présente encore un ratio d'endettement de 279 % (estimation pour 2001), et malgré la possession de liquidités importantes dues à la réception de nombreuses commandes en 2001, ces liquidités disparaîtront probablement lorsque la phase de production commencera et que les premiers coûts réels de construction seront supportés.

SHI demeure handicapé par un niveau d'endettement relativement élevé (le ratio d'endettement pour 2001 est estimé à plus de 200 %), et cette charge apparaît dans les éléments constitutifs du coût. SHI souffre également d'une productivité inférieure à celle de ses concurrents coréens, ce qui entraîne des coûts salariaux plus élevés. De plus, SHI n'a pas réussi à décrocher des commandes multiples comme l'ont fait Daewoo et Hyundai et cette différence doit se refléter dans les coûts unitaires.

Après avoir pu disposer de certains actifs non performants liés à des engagements antérieurs de HHI avec d'autres filiales de Hyundai, HHI semble aujourd'hui lancé sur la voie de la rentabilité. Le ratio d'endettement HHI serait de 183 % en 2001, mais comme pour tous les chantiers coréens, il est difficile d'évaluer la situation financière du chantier. Très peu de chiffres significatifs sont disponibles et les comptes publiés ne sont pas très récents et présentent peu ou pas d'annotations.

4. Conclusions

Le marché de la construction navale dans le monde demeure confronté à de graves difficultés dues à un déséquilibre important entre l'offre et la demande. L'expansion qu'ont connue les chantiers navals, principalement en Corée, mais aujourd'hui de plus en plus en Chine, a provoqué une chute des prix qui s'est particulièrement accentuée après la crise asiatique de 1997/98. Bien que plusieurs chantiers coréens aient été déclarés en faillite, la capacité n'a pas été réduite et les entreprises ont été autorisées à poursuivre leurs activités. Grâce au nombre record de commandes en 2000, les prix se sont quelque peu redressés mais le recul considérable des commandes en 2001 a entraîné une nouvelle baisse des prix.

L'année 2001 a été semée d'écueils pour les industries maritimes dans le monde: la récession qui a frappé les États-Unis et les attaques terroristes du 11 septembre ont provoqué un recul de la demande dans les segments du commerce maritime et des croisières, respectivement. Par conséquent, les armateurs ont beaucoup hésité avant d'investir dans de nouveaux tonnages et les chantiers vivent principalement des commandes passées avant 2001. La diminution des commandes a surtout touché les secteurs des porte-conteneurs et des navires de croisière, ce qui a entraîné une chute des parts de marché globales de la Corée et de l'UE, des régions qui sont particulièrement actives dans ces segments.

Seul le segment des transporteurs de gaz naturel liquéfié (GNL) a enregistré une augmentation du volume absolu de commandes. Toutefois, il s'agit encore d'un marché étroit qui ne représente qu'environ 8 % des commandes mondiales en tbc. Les chantiers coréens ont décroché la plupart des commandes de transporteurs de GNL. Ils détiennent 65 % du carnet de commandes mondial dans ce secteur et 79 % des nouvelles commandes passées en 2001 ont bénéficié à des chantiers coréens et ce, malgré le fait que ce pays est encore relativement inexpérimenté dans ce domaine et que ses chantiers navals ne possèdent pas de brevets dans les technologies clés. L'analyse du marché suggère que les chantiers coréens ont pu s'implanter dans ce segment grâce au très bas niveau de leurs offres, comme ce fut le cas précédemment pour certaines segments des pétroliers et pour les porte-conteneurs. Leur aptitude à fournir un grand nombre de navires avec des courts délais de livraison peut également avoir été déterminante pour l'obtention d'un grand nombre de commandes.

Les analyses détaillées des coûts effectuées par la Commission indiquent que certains chantiers coréens continuent à fixer le prix des navires en dessous de leur coût alors que d'autres tentent d'améliorer leurs résultats financiers. La plupart des grands chantiers coréens ont pu afficher des bénéfices en 2001 grâce aux volumes de ventes élevés et aux avances perçues qui s'y rapportent; toutefois, dans quelques cas, certaines mesures isolées destinées à améliorer la situation financière des chantiers ont également joué un rôle.

Malgré plusieurs cycles de négociations avec la Corée, la Commission n'a pu convaincre les autorités et les chantiers de ce pays de mettre totalement en oeuvre les principes du marché et de permettre la suppression des entreprises non rentables. Aucune amélioration de la situation du marché n'est donc à prévoir et la Commission a proposé des contre-mesures au Conseil.

Le présent rapport confirme en substance les conclusions des quatre rapports précédents de la Commission concernant la situation générale du marché, l'évolution des prix et les analyses détaillées des coûts. La Commission poursuivra son exercice de surveillance du marché comme le prévoit l'article 12 du règlement (CE) n° 1540/98.

5. Bibliographie

Règlement (CE) nº 1540/98 du Conseil du 29 juin 1998 concernant les aides à la construction navale, Journal officiel L 202 du 18.7.1998, p. 0001-0010

Rapport de la Commission au Conseil sur la situation de la construction navale dans le monde, COM(1999) 474 final du 13.10.1999

Deuxième rapport de la Commission au Conseil sur la situation de la construction navale dans le monde, COM(2000) 263 final du 3.5.2000

Troisième rapport de la Commission au Conseil sur la situation de la construction navale dans le monde, COM(2000) 730 final du 15.11.2000

Quatrième rapport de la Commission au Conseil sur la situation de la construction navale dans le monde, COM(2001) 219 final du 2.5.2001

Règlement (CE) n° 3286/94 du Conseil, du 22 décembre 1994, arrêtant des procédures communautaires en matière de politique commerciale commune en vue d'assurer l'exercice par la Communauté des droits qui lui sont conférés par les règles du commerce international, en particulier celles instituées sous l'égide de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), Journal officiel L 349 du 31.12.1994, p. 0071-0078

«Accord sur les conditions normales de concurrence dans l'industrie de la construction et de la réparation navales marchandes» de l'OCDE, acte final signé en décembre 1994 par la Commission des Communautés européennes et les gouvernements de la Finlande, du Japon, de la République de Corée, de la Norvège, de la Suède et des États-Unis.

«Accord sur les crédits à l'exportation de navires» de l'OCDE, 1994.

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