EUR-Lex Access to European Union law

Back to EUR-Lex homepage

This document is an excerpt from the EUR-Lex website

Document 52010DC0549

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS La taxation du secteur financier

/* COM/2010/0549 final */

52010DC0549

/* COM/2010/0549 final */ COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS La taxation du secteur financier


[pic] | COMMISSION EUROPÉENNE |

Bruxelles, le 7.10.2010

COM(2010) 549 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

La taxation du secteur financier

{SEC(2010) 1166}

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

La taxation du secteur financier

CONTEXTE

La récente crise financière a fait apparaître la nécessité de consolider le secteur financier, étant donné le coût de l’instabilité financière pour l’économie réelle. Par ailleurs, nous sommes confrontés à plusieurs grands défis dans les domaines du développement, de l’efficacité des ressources et de la lutte contre le changement climatique, lesquels ont des incidences budgétaires considérables. Dans ce contexte, une taxation supplémentaire du secteur financier pourrait-elle constituer un moyen envisageable d’augmenter les recettes?

Dans la perspective du sommet du G-20 de Toronto, le Conseil européen a conclu, le 17 juin 2010, que l’«UE devrait jouer un rôle de premier plan dans les efforts consentis pour définir une stratégie à l’échelle de la planète visant à l’instauration de systèmes de prélèvements et de taxes sur les établissements financiers, en vue de maintenir des conditions égales pour tous au niveau mondial, et elle défendra vigoureusement cette position vis-à-vis de ses partenaires du G-20. Il conviendrait de réfléchir à l’introduction d’une taxe mondiale sur les transactions financières et de faire avancer les travaux dans ce domaine.»

Le Parlement européen a également débattu des questions liées au secteur financier et à la taxation de celui-ci. Il a notamment, dans sa résolution du 10 mars 2010, demandé à la Commission et au Conseil d’étudier la manière dont une taxe sur les transactions financières pourrait servir à financer la coopération au développement et à aider les pays en développement dans la lutte contre le changement climatique, ainsi que contribuer au budget de l’Union européenne (UE). Certains États membres ont déjà pris des mesures en matière de taxation des banques.

Ces débats ne se limitent pas au niveau de l’Union européenne. Il s’agit en effet de questions qui témoignent de la nature mondiale et systémique de la crise financière et de ses conséquences. Des discussions ont eu lieu au G-20 à propos de nouvelles formes de taxation. Toutefois, il n’y a pas de consensus mondial sur de nouveaux instruments fiscaux[1]. Tout récemment, la question de la taxation des transactions financières a fait l’objet de discussions très médiatisées au cours de la réunion plénière de haut niveau sur les objectifs du millénaire pour le développement, organisée par les Nations unies. De plus, le groupe consultatif de haut niveau sur le financement de la lutte contre le changement climatique, mis en place par le secrétaire général de l’ONU, s’est également penché sur la mesure dans laquelle de grands secteurs actifs à l’échelle planétaire, dont le secteur financier mais aussi celui des transports aériens et maritimes internationaux, permettraient de générer des recettes nouvelles.

La présente communication contribue au débat en cours et couvre deux instruments, la taxe sur les transactions financières (TTF) et la taxe sur les activités financières (TAF).

OBJECTIFS ET JUSTIFICATION DE NOUVELLES TAXES SUR LE SECTEUR FINANCIER

Indépendamment de l’instrument fiscal considéré, est-il justifié d’adapter le régime fiscal pour faire contribuer le secteur financier de manière équitable et substantielle aux budgets publics? La Commission voit trois arguments plaidant dans ce sens.

Premièrement, les taxes pourraient contribuer, en complément des profondes réformes du secteur financier en cours, à renforcer l’efficience et la stabilité des marchés financiers et à réduire leur volatilité ainsi que les effets néfastes d’une prise de risque excessive. Le secteur financier pourrait notamment prendre des risques excessifs en raison d’une série de facteurs, allant de la perspective d’un soutien public effectif ou escompté (qui entraîne des problèmes d’aléa moral) et des asymétries informationnelles aux structures des rémunérations, qui, combinés à l’évolution macroéconomique, ont contribué à la crise actuelle. Ainsi, le comportement du secteur financier entraîne des externalités négatives pour le reste de l’économie. Une taxe corrective destinée à internaliser ces externalités peut donc se justifier, pour autant que tel soit son objectif affiché.

La crise financière et économique a mis en évidence un certain nombre d’incitations biaisées dans le secteur financier ainsi que de faiblesses du cadre de régulation et de supervision du système financier. En conséquence, d’importantes réformes réglementaires ont été adoptées ou sont en cours d’élaboration[2]. Il existe un large consensus quant au fait que les réformes du cadre de régulation et de supervision sont essentielles au renforcement de la résilience et de la stabilité du système financier.

La Commission a proposé de nouveaux mécanismes de gestion des crises destinés à améliorer la capacité des autorités publiques à gérer les défaillances survenant dans le secteur bancaire[3]. Il s’agirait notamment de mettre en place un réseau de fonds de résolution nationaux financés par un prélèvement auprès du secteur bancaire. La Commission a exposé sa position sur la question dans une récente communication [COM(2010) 254 final] et précisera ses propositions dans un avenir proche.

De nouvelles taxes pourraient, tout en constituant une source de recettes, contribuer indirectement, et en complément de la régulation, à la réalisation de l’objectif de renforcement de la stabilité du système financier en dissuadant les opérateurs de se livrer à certaines activités à risque.

Deuxièmement, on considère que le secteur financier porte une lourde part de responsabilité dans la survenue et l’ampleur de la crise et de ses effets négatifs sur le niveau d’endettement des États à travers le monde. On pourrait également justifier la création de nouvelles taxes par le fait que le secteur a bénéficié d’un soutien public massif au cours de la crise et qu’il devrait donc apporter une contribution équitable en retour. En participant à l’assainissement budgétaire, à l’apport de ressources auxiliaires et à l’efficience économique, de nouvelles taxes sur le secteur financier pourraient contribuer à la mise en place de conditions propices à une croissance plus durable, comme cela est envisagé dans la stratégie «Europe 2020».

Troisièmement, la plupart des services financiers sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée dans l’UE. Cette situation s’explique par le fait que la majeure partie des revenus des services financiers est fondée sur les marges et donc difficilement imposable au titre des règles actuelles de la TVA.

Certains arguments plaident, comme on le voit, en faveur d’une contribution plus juste et plus importante du secteur financier aux finances publiques. Ce débat se déroule dans un contexte général d’assainissement budgétaire dans l’Union et ailleurs et à l’heure où le monde est confronté à au moins deux problèmes stratégiques urgents aux incidences budgétaires considérables. L’UE a en effet pris des engagements substantiels en faveur du développement et de la lutte contre le changement climatique[4]. Pour qu’elle puisse les respecter, il est nécessaire d’envisager de nouvelles sources de recettes de manière plus approfondie[5].

Les États membres de l’UE commencent à mettre en place des instruments fiscaux nationaux pour répondre aux défis évoqués plus haut. Il importe que ces évolutions se fassent dans un cadre coordonné, faute de quoi les différences entre des systèmes nationaux fondés sur des bases imposables divergentes pourraient encourager le recours à l’arbitrage fiscal et se traduire par des distorsions dans la répartition entre les marchés financiers de l’UE. L’émergence de solutions nationales non coordonnées risque également d’entraîner des cas de double imposition et la fragmentation du secteur financier, ce qui entraverait le bon fonctionnement du marché unique.

Toute mesure fiscale doit également s’envisager dans le cadre plus large des efforts actuels en matière de réforme de la réglementation du secteur financier, compte tenu notamment du renforcement probable des exigences relatives au ratio de fonds propres et des discussions sur l’introduction éventuelle de prélèvements bancaires. Il ne faut pas perdre de vue l’effet cumulatif de ces mesures (en particulier si elles ne sont pas soigneusement coordonnées et introduites progressivement), de façon à ne pas compromettre l’existence d’un secteur financier viable, apte à financer correctement et efficacement l’économie au sens large.

TAXE SUR LES TRANSACTIONS FINANCIÈRES (TTF)

La TTF est conçue comme une taxe sur la valeur de chaque transaction. Pour qu’elle ait une large portée, il convient qu’elle s’applique à une vaste gamme d’instruments financiers (c’est-à-dire les actions, les obligations, les devises et les produits dérivés), même si certaines des propositions actuelles envisagent d’en restreindre le champ d’application à un sous-ensemble de produits (par exemple un prélèvement sur les transactions en devises)[6].

Aspects liés aux recettes

Les recettes qu’une TTF est susceptible de générer et l’ampleur de ses effets économiques varient considérablement selon sa couverture (mondiale, UE ou nationale), les produits concernés et l’importance des activités de négociation dans une juridiction donnée. En l’absence de consensus international sur l’application d’une taxe de ce type, les recettes dépendraient du degré de délocalisation des activités de négociation mobiles. Les possibilités de contournement du fait de la réorganisation des produits financiers et le taux de taxation choisi ont également une influence.

À l’échelle mondiale, on estime que les recettes fiscales se seraient élevées à environ 60 milliards EUR en 2006 dans le cas d’une taxe de 0,1 % sur les transactions en actions et en obligations. Certaines études arrivent à des chiffres dix fois plus importants si l’on inclut les produits dérivés. Toutefois, ces produits dérivés posent certains problèmes techniques, comme la détermination de la base imposable[7], et la précision des estimations de recettes est sujette à caution. L’expérience a montré qu’il y a un écart considérable entre les recettes attendues et les recettes réelles. Les transactions en devises posent également un certain nombre de problèmes si la taxe est prélevée uniquement au niveau national[8]. Si seules les actions et les obligations échangées sur les marchés boursiers étaient incluses dans la base imposable, la taxe permettrait de lever environ 20 milliards EUR dans l’UE-27[9]. Si l’on inclut les produits dérivés, les estimations de recettes sont bien plus importantes, jusqu’à 150 milliards EUR selon certains calculs. Sur la base des données de 2007, un prélèvement limité de 0,005 % sur les transactions en devises concernant les monnaies les plus échangées au monde permettrait de lever 24 milliards EUR chaque année.

Les recettes générées seraient essentiellement collectées dans un nombre limité de pays où se concentrent les activités de négociation. Cette répartition inégale serait encore plus marquée si les produits dérivés étaient inclus. D’une part, cette situation pourrait rendre plus difficile un accord sur une taxe, car tous les pays seraient tenus de la mettre en œuvre, mais seul un nombre limité d’entre eux en recueillerait les bénéfices. D’autre part, on peut affirmer que les investisseurs du monde entier utilisent les marchés centraux. Tous les utilisateurs contribuent donc aux recettes de la taxe, ce qui lui donne une dimension mondiale. Pour cette raison, la TTF est susceptible de constituer une bonne source de recettes à l’échelle planétaire.

Il importe toutefois de tenir compte de la charge économique que représente la taxe. En général, les taxes frappant le secteur financier sont susceptibles d’entraîner une certaine redistribution de revenus des actionnaires des banques, gestionnaires et acteurs de marché vers le grand public. On peut s’attendre à ce que le fardeau de la taxe soit en partie répercuté sur les acheteurs et les clients moyens, mais tout dépend de la capacité des contribuables à éviter la taxe. Indirectement, la taxe augmenterait également le coût du capital pour les gouvernements et les entreprises. Il n’existe pas de preuve empirique de l’incidence réelle d’une telle taxe.

Effets sur l’efficience des marchés et la stabilité économique

L’un des arguments avancés en faveur de la TTF est que celle-ci permettrait de mettre en œuvre le principe du «pollueur-payeur» et contribuerait donc également à internaliser les externalités négatives potentielles des activités du secteur financier. D’aucuns affirment qu’une TTF à large champ d’application aiderait à stabiliser les marchés financiers en réduisant les opérations spéculatives à court terme du fait de la pénalisation des transactions indésirables sur les marchés financiers, essentiellement les transactions de haute fréquence ( high frequency trading ).

Plusieurs aspects doivent être pris en compte. Premièrement, les gains d’efficience sont incertains, car la taxe pourrait accroître la volatilité des prix en diminuant la liquidité du marché, par exemple sur les marchés utilisés pour la couverture de risque. Deuxièmement, si l’intérêt des transactions à grande vitesse ( high speed trading ) pour l’économie est discutable, la mesure dans laquelle cette activité a constitué l’un des principaux facteurs d’externalités négatives dans cette crise doit encore être étudiée. Troisièmement, la TTF porte sur la valeur brute des transactions. Dès lors qu’elle est prélevée sur la transaction plutôt que sur la valeur ajoutée, elle est cumulative. Les produits les plus fréquemment échangés seront soumis à une charge fiscale plus lourde.

Idéalement, pour améliorer l’efficience du système, la TTF devrait être prélevée sur les transactions «nuisibles» ou hautement spéculatives. Dans la pratique, il n’est cependant pas possible de distinguer ces transactions des transactions «normales». Par conséquent, pour qu’elle atteigne son objectif en matière d’efficience, il faudrait que la TTF soit prélevée sur une assiette aussi vaste que possible. Une TTF à champ d’application restreint pourrait réduire le risque de délocalisation si elle est bien conçue[10]. Toutefois, si seules certaines transactions sont taxées, la TTF perturberait l’intermédiation financière en favorisant certaines activités qui n’y seraient pas soumises. De plus, en fonction de la manière dont elle est conçue, la TTF pourrait créer des possibilités d’évasion, par un phénomène de réorganisation et de substitution.

Pour limiter effectivement les activités ayant des effets externes négatifs potentiels au niveau mondial et pour éviter la délocalisation des activités de négociation, il convient que la taxe soit appliquée dans l’ensemble des centres financiers. Ces centres internationaux sont largement interconnectés et les sociétés peuvent sans grands frais transférer leurs échanges de l’un à l’autre. De plus, beaucoup de sociétés financières fonctionnent avec des filiales mondiales. Par conséquent, le fait que la TTF doive reposer sur une large base pour pouvoir atteindre ses objectifs en matière d’efficience et de recettes signifie également qu’elle devra faire l’objet d’une forte coordination au niveau mondial pour réduire le risque de délocalisation et d’évasion.

Appréciation

Au niveau mondial, une TTF pourrait constituer un moyen approprié de lever des recettes en vue notamment du financement d’objectifs stratégiques planétaires. Pour qu’elle fonctionne de manière efficace et équitable, il convient que les pays participants essaient de trouver un accord sur des outils de financement mondiaux acceptables pour tous. La Commission est résolue à poursuivre le travail avec ses partenaires internationaux en vue de parvenir à cet accord, notamment dans le cadre du G-20.

Une taxe sur les transactions financières pourrait être envisagée au seul niveau de l’UE. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que le secteur financier est un secteur mondial dont les acteurs sont interconnectés. Les activités financières se concentrent dans un petit nombre de centres financiers au sein et en dehors de l’Union européenne, lesquels se font concurrence sur la scène internationale. La finance est également un domaine complexe et changeant, et les principaux acteurs ont développé une capacité à trouver des manières nouvelles et innovantes de faire leurs affaires et de structurer les transactions financières.

TAXE SUR LES ACTIVITÉS FINANCIÈRES

La taxe sur les activités financières (TAF) telle qu’elle est proposée par le FMI constitue un autre instrument susceptible d’améliorer la taxation du secteur financier et de réduire les externalités négatives potentielles. Dans sa forme la plus large (fondée sur la méthode par addition, ci-après «TAF additive»), la TAF porte sur la totalité des bénéfices et des rémunérations. Elle peut également être conçue de façon à ne frapper que le risque et/ou les rentes économiques[11]. Contrairement à la TTF, qui touche chaque acteur du marché financier selon les transactions qu’il effectue, la TAF frappe les sociétés. La présente communication se concentre sur la TAF additive.

Aspects liés aux recettes

Pour les vingt-deux économies développées couvertes par le rapport du FMI au G-20, une TAF additive de 5 % générerait des recettes correspondant en moyenne à 0,28 % du PIB[12]. Si l’on se fonde sur les estimations par pays pour la part du PIB afin de calculer les valeurs absolues, on arrive à un total de recettes pour les vingt-deux pays d’environ 75 milliards EUR. Pour l’UE-27, la TAF additive permettrait de récolter jusqu’à 25 milliards EUR.

La distribution géographique des revenus refléterait en grande partie la répartition réelle du secteur financier dans l’UE. Toutefois, les recettes ne sont pas aussi concentrées que dans le cas de la TTF, car la TAF ne se fonde pas sur les activités de négociation, qui ont essentiellement lieu dans quelques centres financiers, mais sur les rémunérations et les bénéfices, qui sont plus uniformément répartis. À cet égard, la TAF serait mieux adaptée que la TTF pour lever des recettes en vue de l’assainissement des budgets nationaux, qui, dans de nombreux États membres, est une tâche urgente.

En ce qui concerne la charge économique, les effets dépendent des modalités concrètes de la taxe. En pratique, il n’existe pas de preuve empirique de l’incidence réelle d’une TAF. Si la taxe devait être répercutée sur le client, et étant donné qu’il n’y a pas de déduction pour les clients professionnels, le fardeau de la taxe pourrait également peser en partie sur les épaules des utilisateurs des services financiers.

Effets sur l’efficience des marchés et la stabilité économique

Les effets de la taxe sur les activités financières dépendront des modalités retenues. Une TAF additive ne modifiera pas directement les structures des marchés où opèrent les établissements financiers, dès lors qu’elle frappe les revenus indépendamment de la manière dont ils sont générés. En ce sens, elle n’opère pas de discrimination entre les différents produits, pas plus qu’elle ne dépend du niveau du chiffre d’affaires. Il s’agit d’un concept intéressant au niveau de l’UE, car cette taxe permet de lever des recettes et de résoudre certaines questions en suspens concernant la taxation des services financiers.

La TAF porte sur la totalité des profits découlant des activités commerciales des établissements financiers. Elle est donc perçue sur toutes les activités, pas uniquement sur les activités de négociation. Elle ne modifie pas le prix des instruments financiers, et n’influence donc pas la structure du marché en tant que telle. Ce qui précède signifie également qu’elle n’a pas d’incidence directe sur l’existence du high-speed trading .

La TAF pourrait renforcer les incitations actuelles au transfert de bénéfices par une délocalisation des revenus et des rémunérations en dehors de l’UE. Néanmoins, compte tenu de la nature de la base imposable et de la nécessité pour les établissements financiers de réaliser, en règle générale, leurs activités de base là où se trouvent leurs clients, ces incitations à la délocalisation pourraient être limitées. Cet élément doit être mis en balance avec le fait que l’évolution technologique est susceptible d’accroître la mobilité du secteur financier. Enfin, l’introduction de la TAF par certains États membres seulement pourrait créer sur le marché intérieur des distorsions éventuellement incompatibles avec la nécessité d’assurer des conditions de concurrence égales entre tous les États membres.

Appréciation

La TAF additive peut se concevoir comme une taxe sur une valeur de substitution pour la valeur ajoutée totale générée par les sociétés du secteur financier[13]. Toutefois, si cette taxe est censée compléter la TVA actuelle, un certain nombre d’aspects techniques doivent encore être réglés pour aligner les deux taxes. La Commission estime que la possibilité d’une TAF mérite d’être examinée dans le contexte de l’UE. Il faut notamment à cet effet évaluer les implications possibles de cette taxe en termes de concurrence et analyser si celles-ci peuvent être compensées par d’éventuels éléments de nature à dissuader les sociétés de délocaliser leurs activités.

CONCLUSIONS GÉNÉRALES ET LIGNES D’ACTION POUR L’AVENIR

Le monde doit relever des défis de taille à l’heure où, de plus en plus, les finances publiques sont mises à rude épreuve à travers l’UE. Ces défis sont nombreux et variés. Il est notamment nécessaire d’améliorer la stabilité et le fonctionnement du secteur financier pour atténuer les externalités négatives pour le reste de l’économie, d’assainir des finances publiques malmenées par la crise financière tout en respectant les engagements pris envers les pays en développement ainsi que de lutter contre le changement climatique et la raréfaction des ressources mondiales.

Face à ces défis, certains arguments plaident en faveur d’une modification du régime de taxation des activités du secteur financier. Ce secteur doit contribuer de manière équitable et substantielle aux budgets publics et l’on peut soutenir que cette contribution doit être plus importante qu’à l’heure actuelle, compte tenu de la position spéciale qu’il occupe dans l’économie, qui est apparue plus que clairement lors de la crise financière, et du fait que certains de ses services sont exonérés de la TVA.

Dans toute action future en matière de taxation du secteur financier, la Commission tiendra compte de la nécessité de créer les conditions d’une taxation juste et équilibrée de ce secteur en contribuant à instaurer des conditions de concurrence plus équitables pour celui-ci au sein du marché intérieur, tant vis-à-vis des autres secteurs qu’en interne, de contribuer à réduire au minimum les distorsions actuelles liées à l’exonération de la TVA applicable aux services financiers et d’éviter les cas éventuels de double imposition transfrontalière. La Commission encouragera également l’adoption des principes du «mieux légiférer» et œuvrera en faveur d’un régime de taxation des services financiers plus rationnel et simplifié, sur la base d’une analyse globale des cadres fiscaux nationaux actuels et projetés et de leurs conséquences sur le fonctionnement du marché intérieur. Elle prendra par ailleurs en considération l’incidence cumulative de la réforme globale de la régulation en cours dans ce secteur.

Les instruments de financement innovants en général, et les nouvelles taxes sur le secteur financier en particulier, peuvent constituer un élément important de la réponse à apporter aux défis mondiaux et européens auxquels nous sommes actuellement confrontés. Comme on l’a conclu plus haut, la TTF est un instrument qui se prête mieux à la levée de recettes au niveau mondial. La difficulté consiste à mettre au point un système de taxe mondiale sur les transactions financières qui génère des recettes suffisantes tout en réduisant au minimum les effets négatifs sur l’économie. La Commission soutiendra une analyse plus approfondie et la mise au point de la TTF et de ses variantes dans le cadre du G-20, et œuvrera à la promotion d’un accord avec les principaux partenaires internationaux. Il ressort des analyses effectuées à ce jour que la TTF se prête moins à une introduction unilatérale à l’échelle de l’Union, car les risques de délocalisation sont importants et compromettraient le potentiel de recettes de la taxe.

À ce stade, la Commission considère qu’une taxe sur les activités financières serait plus opportune au niveau de l’Union européenne. Cette taxe permettrait de régler le problème actuel de l’exonération de la TVA dont bénéficie le secteur financier et de lever des recettes considérables. Étant donné la nature nouvelle d’une telle taxe, il est nécessaire de réaliser d’autres travaux techniques sur la manière dont elle pourrait être mise en œuvre.

À la lumière de ces conclusions, la Commission lancera donc très prochainement une analyse d’impact complète, qui examinera en détail chacune des options proposées, afin de pouvoir présenter d’ici l’été 2011 des propositions appropriées quant aux actions envisageables.

[1] Dans les conclusions du sommet du G-20 de Toronto, les dirigeants ont déclaré ce qui suit: «Nous nous sommes entendus sur le fait que le secteur financier devrait contribuer de manière substantielle et équitable à la prise en charge du fardeau lié aux interventions du gouvernement, lorsqu’elles se présentent, visant à remettre en état le système financier ou à financer le règlement, et à réduire les risques découlant du système financier. Nous avons reconnu qu’il existe une série d’approches stratégiques à cet égard. Certains pays ont choisi une taxe financière. D’autres ont adopté une approche différente.»

[2] La Commission a présenté des initiatives dans sa communication COM(2010) 301 final.

[3] COM(2009) 561 final.

[4] Les pays développés sont également convenus, dans l’accord de Copenhague, d’un objectif consistant à mobiliser conjointement 100 milliards USD chaque année d’ici à 2020 pour répondre aux besoins des pays en développement dans la lutte contre le changement climatique. Pour atteindre les objectifs du millénaire pour le développement, l’UE s’est engagée à porter le budget de son aide publique au développement (APD) à 0,7 % de son revenu national brut d’ici 2015, ce qui pourrait se traduire par un doublement de l’APD de l’UE, qui passerait de près de 50 milliards EUR en 2008 à un montant estimé de 100 milliards EUR en 2015.

[5] La Commission a publié un document de travail des services de la Commission, intitulé «Innovative financing at a global level» [SEC(2010) 409 final], dans lequel elle se penche sur le potentiel de sources de financement innovantes au niveau mondial s’agissant de lever des fonds destinés à répondre aux problèmes évoqués plus haut.

[6] La question du prélèvement sur les transactions en devises est brièvement abordée dans le document de travail des services de la Commission. Aux fins de la présente communication, la TTF à large champ d’application couvre les transactions boursières sur obligations et produits dérivés, ainsi que les instruments négociés de gré à gré (over-the-counter, OTC), dont les transactions sur produits dérivés et les opérations de change au comptant.

[7] En cas de TTF généralisée, la perception devrait être relativement simple pour les produits échangés sur les places boursières. Pour les produits négociés de gré à gré, la gestion de la taxe serait plus complexe, mais réalisable compte tenu de la tendance au renforcement des obligations en matière d’enregistrement et de la proposition de la Commission relative à un règlement sur les produits dérivés négociés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux [COM(2010) 484/5].

[8] Les experts participant au Groupe de travail sur les transactions financières internationales pour le développement, mis en place par le Groupe pilote, ont, pour diverses raisons, recommandé qu’un prélèvement sur les transactions en devises soit appliqué au niveau mondial. http://www.leadinggroup.org/article668.html.

[9] On s’attend à une réduction des volumes d’échange de 30 % pour les obligations et de 20 % pour les actions.

[10] Les modalités de la taxe dépendront de la base d’imposition exacte retenue. Il pourrait s’agir, par exemple, des transactions en devises, des actions ou des obligations.

[11] Ces deux options sont examinées en détail dans le document de travail des services de la Commission accompagnant la présente communication.

[12] FMI (2010) Taxation du secteur financier — Rapport du FMI au G-20 et documents connexes.

[13] Étant donné qu’elle frappe les salaires et les rémunérations, qui constituent une valeur de substitution pour la valeur ajoutée, la TAF permettrait d’apporter une solution au problème de l’exonération de la TVA dont bénéficie le secteur financier. Toutefois, plusieurs obstacles doivent encore être levés pour rendre cette taxe compatible avec le système de TVA existant.

Top