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Document 52010DC0127

Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen - Un cadre stratégique de l’UE pour aider les pays en développement à relever les défis liés à la sécurité alimentaire SEC(2010)379

/* COM/2010/0127 final */

52010DC0127




[pic] | COMMISSION EUROPÉENNE |

Bruxelles, le 31.3.2010

COM(2010)127 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU CONSEIL ET AU PARLEMENT EUROPÉEN

Un cadre stratégique de l’UE pour aider les pays en développement à relever les défis liés à la sécurité alimentaire

SEC(2010)379

JUSTIFICATION

La faim et la malnutrition ont progressé ces dernières années; en 2010, on considère que plus d’un milliard d’individus sont en situation d’insécurité alimentaire. L’insécurité alimentaire nuit au développement humain, à la stabilité sociale et politique et aux progrès dans la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement (OMD). Les États fragiles, notamment, ont de gros problèmes pour atteindre l’OMD 1 – réduire l’extrême pauvreté et la faim.

La flambée du prix des denrées alimentaires sur les marchés mondiaux en 2007-2008 a obligé à repenser la sécurité alimentaire mondiale. L’équipe spéciale de haut niveau sur la crise de la sécurité alimentaire mondiale des Nations unies a été créée pour renforcer la coordination au sein des Nations unies; le Partenariat mondial sur l’agriculture, la sécurité alimentaire et l’alimentation a été lancé et les chefs d’État du G8 ont adopté un programme mondial pour la sécurité alimentaire lors du sommet de L’Aquila en 2009.

L’Union européenne (UE) a réagi aux défis croissants en matière de sécurité alimentaire en créant une «facilité alimentaire[1]» d’un milliard d’euros en tant que mesure temporaire de soutien aux pays en développement les plus durement touchés. L’UE et ses États membres sont, et ont été depuis des années, les acteurs les plus importants et les plus fiables dans le domaine de la sécurité alimentaire, sur les plans tant financier que politique.

Les évolutions récentes et les défis futurs nécessitent une nouvelle politique commune de la sécurité alimentaire, un renforcement de la prééminence de l’UE dans le programme mondial pour la sécurité alimentaire et l’amélioration de l’efficacité de l’assistance de l’UE conformément au traité de Lisbonne[2], à l’initiative EUROPE 2020[3] et au consensus européen pour le développement[4]. Les défis futurs en matière de sécurité alimentaire incluent la croissance de la population, les pressions sur les ressources naturelles et les services écosystémiques ainsi que les effets néfastes du changement climatique sur l’agriculture, qui affectent les conditions végétatives et obligent à prendre des mesures d’adaptation. En outre, des aspects essentiels du programme de sécurité alimentaire, tels que la nutrition, la volatilité des prix, la protection sociale et les filets de sécurité, les biocarburants, la sécurité alimentaire, la recherche et l’innovation, l’acquisition de terres à grande échelle et le concept de «droit à l’alimentation»[5] doivent être intégrés dans un cadre politique mondial.

L’objectif de la présente communication est de fournir un cadre politique à la lutte contre la faim et la malnutrition dans le monde pour l’UE et ses États membres, ce qui contribuera à la réalisation de l’OMD 1. Il est en cohérence avec d’autres documents thématiques (sur l’éducation, la santé, l’égalité des sexes et la gouvernance fiscale) et le paquet de mesures du printemps 2010, qui définissent conjointement la position de l’UE au sujet de la réunion de haut niveau qui sera organisée par les Nations unies en septembre 2010. La présente communication est complétée par une communication sur l’aide humanitaire alimentaire[6], axée sur les contextes de situation d’urgence et de sortie de situation d’urgence.

UNE APPROCHE GLOBALE DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

Le cadre politique proposé relève les défis en matière de sécurité alimentaire dans les pays en développement dans des contextes tant ruraux qu’urbains dans les quatre piliers internationalement reconnus[7], en améliorant: 1) la disponibilité alimentaire; 2) l’accès à l’alimentation; 3) l’adéquation nutritionnelle de l’apport alimentaire et 4) la prévention et la gestion des crises. Il est fondé sur les principes de la Déclaration de Rome sur la sécurité alimentaire mondiale[8]. En particulier, il reconnaît que les stratégies en matière de sécurité alimentaire doivent être propres à chaque pays et adoptées par chaque pays et assurer un équilibre approprié entre le soutien à la production nationale et une couverture des besoins alimentaires par le commerce.

Les progrès en matière de sécurité alimentaire et de réalisation de l’OMD 1 se répartissent de façon inégale sur le plan géographique et celui des groupes de population. Bien qu’il se pose des problèmes de sécurité alimentaire dans le monde entier, c’est en Afrique et dans les pays en situation fragile qu’il reste le plus de progrès à accomplir. Conformément au rapport sur les OMD de 2009[9], la proportion de la population sous-alimentée est passée en Afrique subsaharienne de 32 % (1990-1992) à 29 % en 2008 et de 24 % à 21 % en Asie du Sud, qui se situe au deuxième rang pour le taux de malnutrition[10]. De plus, selon les dernières données, le taux de malnutrition est de 31,4 % dans les pays fragiles, contre 14,5 % dans les pays non fragiles. Alors que la malnutrition demeure largement un phénomène rural, il est probable que l’insécurité alimentaire s’aggrave à plus long terme dans les villes en raison de l’urbanisation.

L’action de l’UE doit accorder la priorité aux pays en situation d’insécurité alimentaire qui ont pris le plus de retard dans la réalisation de l’OMD 1, notamment en Afrique, mais aussi en Asie du Sud et ailleurs (par exemple au Bangladesh, au Cambodge, en Haïti, au Népal et au Timor-Oriental)[11]. Étant donné la nature des OMD associés qui sont loin d'être atteints, il faudra investir plus particulièrement dans les femmes[12].

Par ailleurs, il est prouvé[13] que les investissements dans le secteur des petites exploitations obtiennent les meilleurs résultats en matière de réduction de la pauvreté et de croissance. Ce nouveau cadre de l’UE met donc l’accent sur l’accroissement des revenus des petits exploitants et la capacité de résistance des communautés vulnérables, en soutenant la volonté des pays qui accordent la priorité à l’agriculture et à la sécurité alimentaire dans leurs efforts de développement.

Améliorer la disponibilité alimentaire

La population mondiale devrait atteindre les neuf milliards d’individus d’ici 2050 et, en raison de l’évolution des régimes alimentaires et de l’augmentation des revenus, la demande alimentaire devrait s’accroître de 70 %[14]. Il y a donc lieu d’accélérer l’accroissement de la production agricole, y compris dans les pays dont la population augmente le plus vite. Dans un grand nombre de ces pays, la limitation des ressources naturelles, exacerbée par le changement climatique, oblige de plus en plus à utiliser efficacement ces ressources.

Au niveau mondial, la plupart des populations démunies et souffrant de la faim vivent dans des zones rurales, où l’agriculture – y compris les cultures végétales, l’élevage, la pêche et la sylviculture - représente l’activité économique principale. Les petites exploitations prédominent: quelque 85 % des agriculteurs des pays en développement exploitent moins de deux hectares de terre. Les systèmes de petites exploitations mixtes agriculture/élevage assurent environ la moitié de la production alimentaire mondiale[15]. L’aide de l’UE devrait donc se concentrer sur la production alimentaire durable à petite échelle, afin d’accroître la disponibilité alimentaire dans les pays en développement. Ce type de production a des effets multiples: il améliore les revenus et la capacité de résistance des producteurs ruraux, il met des aliments à la disposition des consommateurs et il préserve ou améliore la qualité de l’environnement. Dans son soutien à l’agriculture à petite échelle, l’aide de l’UE devrait donner la priorité à des approches de l’intensification durables et écologiquement efficaces, respectant les diverses fonctions de l’agriculture. Cela implique entre autres l’optimisation des moyens de production agricole, la lutte intégrée contre les organismes nuisibles, une meilleure gestion des sols et de l’eau et l’introduction d’espèces végétales résistantes au stress[16]. Pour que cette approche réussisse, la production doit être envisagée dans le contexte d’une chaîne de valeur assurant un accès approprié au financement, à la transformation et aux marchés et dans laquelle les petites et moyennes entreprises et la microfinance rurale peuvent jouer un rôle clé. Dans de bonnes conditions, les partenariats public-privé peuvent jouer un rôle important en stimulant la productivité agricole. L’UE et ses États membres devraient aussi soutenir des initiatives visant à réduire les pertes après récolte, à accroître la capacité de stockage et à traiter les problèmes de sécurité alimentaire et de santé animale.

La sécurité de l’accès à la terre, des droits fonciers et des droits d’utilisation du sol sont des conditions préalables à une amélioration de la productivité des petites exploitations agricoles. Il est essentiel qu’il existe des politiques foncières nationales efficaces, obligeant les gouvernements à agir en priorité dans ce domaine. Lorsque les États élaborent des politiques concernant la terre, l’agriculture et les biocarburants, l’UE et ses États membres devraient préconiser que ces politiques traitent les problèmes de disponibilité alimentaire et d’accès aux aliments et encouragent l’intégration des petits exploitants dans les chaînes de production.

De plus, il faudrait inciter les investisseurs, les pays hôtes et les autres parties prenantes, au moyen de principes internationalement reconnus, à faire en sorte que leurs investissements dans l’agriculture respectent les droits de l’homme, les moyens de subsistance et les ressources. L’UE et ses États membres devraient soutenir l’élaboration de principes internationalement reconnus pour la réalisation d’investissements responsables dans les terres agricoles, sur la base des orientations existant en matière de politique foncière[17]. En Afrique, la mise en œuvre des lignes directrices pour les politiques foncières de 2009[18] sera soutenue. Les gouvernements des pays partenaires, les organisations d’agriculteurs et les autres parties prenantes seront encouragés à faire des choix informés garantissant la durabilité des investissements étrangers pour maximiser les avantages sociaux, économiques et environnementaux pour le pays.

L’accroissement de la disponibilité de produits alimentaires implique que la recherche et l’innovation soient davantage fondées sur la demande dans le domaine public, en accordant une attention suffisante aux connaissances traditionnelles et à la diversification des cultures vivrières (y compris les variétés locales) et en s’assurant que les innovations sont accessibles aux exploitants et adaptées à leurs besoins. L’UE et ses États membres devraient soutenir une recherche et une innovation présentant des avantages clairs pour les petits exploitants, notamment par une amélioration de l’adaptation au changement climatique et de la résistance au stress, à la sécheresse et aux inondations, tout en maintenant une large biodiversité de cultures et d’espèces et en garantissant l’accès à celles-ci. Ce soutien devrait prendre en considération les besoins exprimés et les préoccupations des pays bénéficiaires et tenir compte de la disponibilité pour ceux-ci d’informations impartiales sur les avantages et les risques de toute nouvelle technologie ainsi que de l’existence de cadres réglementaires solides et de la capacité de les appliquer. Il convient aussi de soutenir des régimes de propriété intellectuelle qui maximisent l’accès des agriculteurs pauvres aux technologies et aux moyens de production. De plus, il convient d’explorer les synergies entre l’adaptation au changement climatique et l’atténuation de ses effets conjointement avec l’élaboration de structures d’incitation, en associant par exemple l’agriculture aux marchés du carbone.

Le commerce international peut contribuer de manière importante à la disponibilité alimentaire en augmentant les quantités et en élargissant la variété des produits alimentaires sur le marché. La disponibilité alimentaire peut aussi être améliorée par l’intégration régionale des marchés agricoles et alimentaires, en facilitant les flux commerciaux des régions excédentaires vers les régions déficitaires. L’UE et ses États membres devraient soutenir la normalisation et l’harmonisation des politiques, règles et règlements, pour aboutir à des politiques agricoles intégrées au niveau régional. En outre, l’UE et ses États membres reconnaissent que compte tenu des problèmes de sécurité alimentaire, aux niveaux tant national que régional, les pays en développement peuvent utiliser les moyens offerts par la politique commerciale existante, y compris les mesures à la frontière. L’objectif devrait être de rechercher une chaîne agroalimentaire durable.

Améliorer l’accès à l’alimentation

L’accès à l’alimentation devrait être renforcé en premier lieu par l’amélioration des opportunités d’emploi et de revenus dans les zones tant rurales qu’urbaines, y compris par la diversification et le commerce, ce qui rendrait l’alimentation plus abordable à un plus grand nombre de personnes. Cela devrait être complété par des mécanismes de transfert social. L’UE et ses États membres devraient aider les pays partenaires à instaurer et gérer des mécanismes sociaux de soutien aux groupes de population vulnérables, en particulier les femmes. Les expériences de mécanismes réussis seront partagées et des systèmes opérationnels seront soutenus. L’attention nécessaire sera accordée aux stratégies de sortie des filets de sécurité. Les mécanismes devront être efficaces, abordables et flexibles et leur expansion rapide en période de crise devrait être possible. Ils devraient normalement comporter une dimension nutritionnelle importante et accorder une assistance particulière aux personnes pour lesquelles une alimentation appropriée aura des effets positifs sur l’atteinte des OMD 4 (Réduire la mortalité infantile) et 5 (Améliorer la santé maternelle).

Dans les zones rurales, la transformation agroalimentaire pourrait créer des emplois, surtout dans les petites et moyennes entreprises et cette création d’emploi pourrait être facilitée par un meilleur accès aux services financiers. De plus, des filets de sécurité ruraux[19] pourraient être élaborés pour les ménages vulnérables susceptibles de fournir de la main-d’œuvre. Les filets de sécurité productifs auront le double avantage d’améliorer les conditions de production rurales et l’accès direct à l’alimentation.

En général, l’accès à l’alimentation peut être amélioré en appliquant l’approche du «droit à l’alimentation», tel qu’il est défini dans les directives volontaires à l’ appui de la concrétisation progressive du droit à une alimentation adéquate dans le contexte de la sécurité alimentaire[20] . L’UE et ses États membres devraient soutenir la poursuite de son application dans les pays en développement , comportant des cadres politiques et juridiques fondés sur le «droit à l’alimentation». Cela implique de soutenir des stratégies qui s’attaquent aux causes profondes de la faim et d’habiliter des groupes marginalisés à concevoir, appliquer et contrôler des programmes nationaux ainsi que d’instaurer et de renforcer des mécanismes de recours.

Améliorer l’adéquation nutritionnelle de l’apport alimentaire

On estime que la malnutrition cause le décès de 3,5 millions de mères et d’enfants par an[21] et un tiers des décès d’enfants de moins de cinq ans. Les carences en vitamines et en minéraux[22] affectent jusqu’à deux milliards de personnes au niveau mondial. Les effets les plus nuisibles de la malnutrition interviennent pendant la grossesse et les deux premières années de la vie; les répercussions sur le développement physique et cognitif sont souvent irréversibles. Il convient d’accorder la priorité aux interventions ciblées sur les femmes enceintes et allaitantes ainsi que sur les enfants de moins de cinq ans (en mettant plus particulièrement l’accent sur les enfants de moins de deux ans)[23].

L'UE et ses États membres devraient soutenir la formulation de politiques et stratégies en matière d'alimentation, la formation en nutrition, l'éducation et l'instauration de mécanismes de coordination entre les secteurs de l'agriculture, de la santé, de l'éducation et de la protection sociale. Les futurs programmes agricoles devraient comporter une dimension nutritionnelle, ce qui pourrait impliquer la diversification des petites exploitations agricoles, la promotion de la production de produits alimentaires riches en micronutriments, et notamment de variétés et espèces locales, le suivi des résultats en matière de nutrition et/ou le soutien à la recherche agricole menée dans une perspective nutritionnelle.

Il est essentiel qu'il existe une direction politique et une coordination multisectorielle au niveau des pays, aboutissant à une action multisectorielle intégrée pour insérer la nutrition dans la stratégie et les programmes nationaux en matière de sécurité alimentaire. L'UE et ses États membres devraient promouvoir la liaison avec des stratégies en matière de santé incluant les services de base liés à l'alimentation et le suivi de la situation nutritionnelle de la population.

2.4 Améliorer la prévention et la gestion des crises

Les communautés et les producteurs doivent être capables de résister aux effets des crises alimentaires. Alors que la réaction à court terme aux crises oblige souvent à mobiliser des instruments humanitaires ad hoc, il convient d'établir et d'entretenir d'autres mécanismes et capacités pour réduire les risques de crise et gérer leurs effets. Un lien étroit entre les acteurs et les instruments de l'aide humanitaire et du développement est essentiel et devrait être promu en appliquant les principes de liens entre l'aide d'urgence, la réhabilitation et le développement (LRRD).

L'UE et ses États membres devraient intensifier leurs efforts de soutien à l'intégration régionale dans les pays en développement, puisque le renforcement de l'intégration régionale représente un autre moyen d'empêcher les crises économiques, politiques et alimentaires et d'atténuer leurs effets.

Les systèmes nationaux ou régionaux d'alerte précoce permettant de prévoir des catastrophes imminentes, doivent être renforcés, ou créés là où ils n'existent pas, et mieux connectés aux organisations qui prennent les décisions et réagissent. Les systèmes doivent extraire leurs données à tous les niveaux, y compris le niveau communautaire, en associant les données météorologiques aux informations sur la nutrition, les cultures, les épizooties et les prix de marché. L'UE et ses États membres devraient favoriser les systèmes de contrôle et d'information liés aux décisions, y compris avec la participation la Commission[24].

Les politiques visant à relever le défi de la volatilité des prix peuvent s'attaquer soit à la volatilité elle-même, soit à ses effets. Pour atténuer la volatilité, le ratio stock-utilisation des produits alimentaires doit être amélioré en créant les conditions favorables à une augmentation de la production et à un maintien des stocks à un niveau approprié, principalement par des commerçants privés. De plus, les restrictions aux exportations de produits alimentaires de base devraient être découragées. L'UE et ses États membres devraient contribuer à améliorer le fonctionnement des marchés de l'alimentation aux niveaux mondial, régional et national, ce qui signifie qu’il faut répondre par la transparence des marchés (information sur la production, les réserves, les prix, etc.), promouvoir le stockage et créer des réserves alimentaires locales/nationales, selon le cas. Les effets de la volatilité des prix peuvent être atténués au moyen d'un ensemble de mesures, parmi lesquelles la création de filets de sécurité à échelle variable et de systèmes d'information sur la sécurité alimentaire, l'utilisation d'une assurance (conditions météorologiques, indice) et le renforcement de la capacité d'utiliser des instruments de gestion du risque de prix.

MAXIMISER L'EFFICACITÉ DES INVESTISSEMENTS DANS LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE

L'UE et ses États membres doivent se concentrer sur trois ensembles de conditions pour maximiser l'efficacité des investissements dans la sécurité alimentaire.

Politiques et stratégies nationales et régionales en matière d'agriculture et de sécurité alimentaire

Afin de parvenir à des résultats tangibles, les programmes d'assistance doivent soutenir les politiques et les réformes nationales et régionales concernant l'agriculture et la sécurité alimentaire et les domaines associés, tels que la terre, l'eau et les biocarburants, en prenant pleinement en considération les défis du changement climatique. Ces politiques et réformes elles-mêmes doivent faire partie intégrante des stratégies mondiales de réduction de la pauvreté. Les objectifs et les cibles en matière de sécurité alimentaire devraient aussi être mieux intégrés aux autres politiques sectorielles des pays partenaires, dans des domaines tels que les transports, les infrastructures, la pêche, la santé et l'éducation. Il est essentiel que les organisations d'agriculteurs, la société civile, le secteur privé, les groupes vulnérables et d'autres parties prenantes soient impliquées dans l'élaboration et l'examen de ces politiques. À cet égard, l'aide au développement de l'UE devrait servir à soutenir la capacité d'élaboration politique et les mécanismes de coordination intersectorielle.

En Afrique, les principes précités ont été insérés dans le Programme détaillé de développement de l'agriculture africaine (PDDAA), soutenu par l'UE et ses États membres depuis 2007[25]. Le soutien de l'UE au PDDAA devrait être intensifié. En Asie, les initiatives de coopération régionale en matière d'alimentation devraient être renforcées.

Harmoniser les interventions de l'UE

L'approche qu'a l'UE de la sécurité alimentaire dans les pays en développement doit être ancrée dans les principes de la Déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide, du Plan d'action d'Accra ainsi que dans le Code de conduite sur la division du travail de l'UE. L'UE et ses États membres devraient identifier les régions et pays dans lesquels les tâches seront réparties sur la base des avantages comparatifs et coordonner les actions sous l'égide d'un donateur principal.

L'UE comme ses États membres disposent de plusieurs cadres politiques et instruments de financement pour aider les pays partenaires à lutter contre l'insécurité alimentaire. Une harmonisation plus grande des politiques et une meilleure complémentarité des instruments ainsi qu'une coordination avec les investisseurs privés devraient permettre de rendre l'action plus efficace.

La Cohérence des politiques pour le développement[26] (CPD) en matière de sécurité alimentaire sera encouragée par un ensemble d'instruments politiques dans les domaines de l'agriculture, du commerce, de la pêche, du changement climatique, de l'environnement et de la recherche. La réforme de la politique agricole commune a renforcé la cohérence et les futures réformes continueront à prendre en considération les objectifs de sécurité alimentaire mondiale. La future réforme de la politique commune de la pêche renforcera encore la cohérence entre les politiques et pratiques européennes de la pêche et les objectifs de développement. Enfin, une conclusion équilibrée, globale et ambitieuse du programme de Doha pour le développement renforcerait le système commercial international, ce qui aurait des effets positifs sur la sécurité alimentaire.

Améliorer la cohérence du système de gouvernance international

L'UE et ses États membres devraient renforcer la cohérence de la gouvernance internationale de la sécurité alimentaire et soutenir la réforme rapide du Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) en tant qu'organisme central en matière de sécurité alimentaire. Le CSA réformé devrait chercher à obtenir un rôle de supervision d'autres domaines spécifiques ayant des implications sur la sécurité alimentaire, y compris l'assistance alimentaire et la nutrition.

Il est nécessaire de mieux rationaliser les priorités des trois agences des Nations unies installées à Rome (FAO, PAM Programme alimentaire mondial et FIDA Fonds international de développement agricole) et de renforcer leur coopération pour créer des synergies. La réforme du système des Nations unies et le réexamen en cours du rôle et des priorités de la FAO donnent l'occasion d'améliorer la qualité et l'efficacité. L'UE devrait poursuivre sa collaboration étroite avec le Secrétaire général des Nations unies sur les problèmes de sécurité alimentaire et intensifier son dialogue avec les agences des Nations unies installées à Rome, en encourageant une coordination plus étroite entre elles et, si nécessaire, en réorientant leurs mandats et leurs activités sur leurs avantages comparatifs: la FAO principalement sur la connaissance et le conseil politique, le PAM sur les investissements durables à long terme et le FIDA sur les situations d'urgence et la fragilité.

LES PRIORITÉS

Dix ans après l'adoption des OMD, l'UE a besoin de renforcer sa coopération en matière de sécurité alimentaire. Dans ce cadre politique, la priorité de l'UE devrait être de soutenir la sécurité alimentaire dans les pays fragiles et plus particulièrement en Afrique, où près de 80 % des personnes sous-alimentées vivent dans des pays fragiles, et dans certaines parties de l'Asie du sud. Pour être efficace, l'assistance doit être adaptée au contexte du pays et combiner le développement politique et stratégique avec la responsabilisation des plus vulnérables. Alors que les quatre piliers devraient être traités, l'UE devrait accorder la priorité à quatre grandes dimensions associées: développement agricole des petites exploitations, gouvernance, intégration régionale et mécanismes d'aide aux populations vulnérables. Dans ces domaines, l'UE et ses États membres devraient:

Améliorer la capacité de résistance des petites exploitations et les moyens de subsistance dans les zones rurales

- Mettre l'accent sur une intensification de l'agriculture écologiquement efficace en faveur des petits exploitants agricoles et plus particulièrement des femmes, en fournissant un soutien à des politiques, stratégies et cadres juridiques nationaux efficaces et durables et un accès équitable et durable aux ressources, y compris la terre, l'eau, le (micro)crédit et d'autres intrants agricoles.

- Accroître de manière substantielle l’aide à la recherche, à la vulgarisation et à l’innovation agricoles fondées sur la demande, avec pour objectif d'atteindre 50 % d’ici 2015. la recherche dans le domaine public devrait reposer sur les connaissances traditionnelles et les nouvelles technologies. Elle ne devrait pas promouvoir les technologies qui ne sont pas durables ou qui sont incompatibles avec les capacités nationales de réguler et de gérer les risques.

- Soutenir activement une plus grande participation de la société civile et des organisations d'agriculteurs à l'élaboration des politiques et aux programmes de recherche et accroître leur implication dans l'évaluation des programmes gouvernementaux. Dans ce contexte, les liens entre les organisations d'agriculteurs de l'UE et celles des pays en développement devraient être encouragés.

- Conjointement avec des partenaires, améliorer les conditions réglementaires institutionnelles pour les investisseurs privés responsables à toutes les étapes de la chaîne de valeur agricole et encourager les investissements public-privé. Les progrès seront suivis et discutés dans le cadre de plans d’action en matière de gouvernance.

Soutenir une gouvernance efficace

- Accroître considérablement d'ici 2015 le soutien au PDDAA en appliquant une division du travail efficace dans tous les pays africains subsahariens dépendant largement de l'agriculture.

- Lancer, avec l'Union africaine, une initiative conjointe pour accélérer la mise en œuvre des lignes directrices pour les politiques foncières en Afrique, comportant une feuille de route pour l'application de principes et meilleures pratiques en matière d'investissements durables à grande échelle dans les terres agricoles.

- Soutenir des initiatives nationales et internationales en vue de la définition de principes et codes de conduite régissant les investissements nationaux et étrangers dans les terres agricoles, axées sur la protection des droits fonciers, la garantie de l'accès à la propriété foncière et aux autres ressources naturelles pour les petits exploitants et les communautés pastorales et la gestion durable de ces ressources.

- Au niveau mondial, soutenir la réforme du Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) pour qu'il devienne l'institution pivot de la coordination des initiatives en matière de sécurité alimentaire au niveau mondial.

- Soutenir une coordination plus étroite entre les agences des Nations unies installées à Rome.

Soutenir les politiques régionales dans les domaines de l'agriculture et de la sécurité alimentaire

- Soutenir l'élaboration et la mise en œuvre de politiques et stratégies agricoles au niveau régional, notamment en matière de gestion du cheptel et de sécurité alimentaire, afin d'accélérer l'intégration des marchés alimentaires et agricoles régionaux. Renforcer le dialogue politique avec les organisations régionales sur l'agriculture, la sécurité alimentaire et la nutrition.

- Renforcer les systèmes d'information régionaux et nationaux visant à soutenir les politiques relatives à l'agriculture, à la sécurité alimentaire et à la nutrition et les systèmes d'alerte précoce.

Renforcer les mécanismes d'aide aux groupes de population vulnérables

- Soutenir les pays pour qu'ils instaurent et gèrent une politique de transfert ciblée et souple, adaptée aux contextes locaux. Si possible, l'assistance sociale devrait donner l'occasion aux bénéficiaires de parvenir à une situation qui leur assure un accès durable à l'alimentation.

- Promouvoir une meilleure intégration de la nutrition dans les politiques de développement, notamment dans les domaines de l’éducation et de la santé et du renforcement des capacités en la matière.

- Fournir un soutien spécifique aux pays en transition fragiles en appliquant les principes des LRRD.

[1] COM (2010) 81 final pour le rapport d’étape.

[2] Article 210.

[3] COM (2010) 2020.

[4] 2006/C 46/01.

[5] Article 11 du pacte international des Nations unies relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (1966-1976).

[6] COM (2010) 126.

[7] Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). 1996. Déclaration de Rome sur la sécurité alimentaire mondiale et Plan d’action du Sommet mondial de l’alimentation.

[8] Déclaration du Sommet mondial sur la sécurité alimentaire, 2009.

[9] Rapport de 2009 des Nations unies sur les Objectifs du Millénaire pour le Développement.

[10] En chiffres absolus, plus de la moitié des personnes sous-alimentées (642 millions en 2009) vivent en Asie et dans la région Pacifique; proportionnellement, les chiffres sont considérablement plus élevés en Afrique, où les progrès ont aussi été moins importants pendant la dernière décennie.

[11] Statistiques des Nations unies sur l'évaluation des progrès vers la réalisation des OMD, voir www.devinfo.info/mdginfo2009/

[12] Voir aussi SEC (2010) 265.

[13] Banque mondiale – Rapport sur le développement dans le monde 2008.

[14] FAO, 2009. Comment nourrir le monde en 2050.

[15] Science, 12 février 2010: pp. 822-825.

[16] Évaluation internationale des sciences et technologies agricoles au service du développement, 2009.

[17] Y compris les «Orientations de l'UE pour le soutien à l'élaboration de la politique foncière et aux processus de réforme de la politique foncière dans les pays en développement» de 2004.

[18] UA/BAD/CEA, Cadre et lignes directrices pour les politiques foncières en Afrique, soutenu par le sommet de l'UA de juillet 2009.

[19] Y compris les «productifs» qui utilisent la main d'œuvre pour des travaux de construction ou d'entretien d'infrastructures rurales.

[20] Adoptées en 2004 par le Conseil de la FAO.

[21] Lancet 2008; 371: pp 243 – 60.

[22] iodine, fer, zinc, vitamines A, B et autres, etc.

[23] COM (2010) xxx «Le rôle de l'UE dans la santé mondiale».

[24] Voir les travaux communs sur l'IPC (Cadre Intégré de Classification de la Sécurité Alimentaire), voir http://www.ipcinfo.org/.

[25] COM (2007) 440

[26] Programme de travail en matière de CPD 2010-2013, avril 2010.

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