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Document 52015DC0508

RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL REFIT Ajuster le cap: bilan de qualité de la législation de l'UE relative à la sécurité des navires à passagers

COM/2015/0508 final

Bruxelles, le 16.10.2015

COM(2015) 508 final

RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

REFIT
Ajuster le cap: bilan de qualité de la législation de l'UE relative à la sécurité des navires à passagers

{SWD(2015) 197 final}


1.Introduction

1.1.Pourquoi un bilan de qualité de la législation relative à la sécurité des navires à passagers?

Sur 28 États membres que compte l'Union, 23 sont des États côtiers, dont quatre sont des États insulaires, ce qui explique que les navires à passagers jouent un rôle important dans la mobilité des citoyens de l’Union. On estime que plus de 400 millions de personnes en moyenne transitent chaque année par les ports de l’UE. 120 millions de passagers sont transportés par des navires à passagers effectuant des services intérieurs, c’est-à-dire des navires qui effectuent des liaisons entre des ports d’un même État membre.

La législation de l’UE relative à la sécurité des navires à passagers a été mise en place sur une période de 15 ans, principalement en réponse à des accidents. Elle consiste en un ensemble de directives dont le contenu a été dicté par les circonstances dans lesquelles elles ont été élaborées. Si elles obéissent au même objectif général, à savoir assurer un niveau commun et élevé de sécurité des navires à passagers, elles ne forment pas un cadre pleinement cohérent. Leurs champs d’application, notamment, diffèrent et visent des types de navires et de voyages divers. Qui plus est, la dernière décennie a amené des évolutions techniques qui ont rendu certaines des dispositions en vigueur obsolètes et inutilement contraignantes.

Des évaluations et consultations antérieures n’ont pas permis de recueillir suffisamment d’informations pour nous éclairer sur la mise en œuvre de ces dispositions et ont fait apparaître le manque de données disponibles, en particulier en ce qui concerne la flotte de navires à passagers effectuant des services intérieurs et les résultats en matière de sécurité. La Commission, en collaboration avec l’Agence européenne pour la sécurité maritime (AESM), les administrations nationales et un contractant externe, a donc procédé à un bilan de qualité plus méthodique et exhaustif du cadre législatif en place. Tandis que la quantité de données disponibles s'est accrue au fil du temps, ce bilan de qualité a également été l’occasion de recueillir des informations supplémentaires et de procéder à de nouvelles consultations, analyses documentaires et études de cas.

Pour la première fois, des données quantitatives ont été recueillies en abondance, selon une méthode sûre et en limitant autant que possible les coûts. Bien que les données disponibles n'aient pas permis de procéder à une analyse complète des coûts et des avantages de chaque exigence réglementaire, on estime qu'elles fournissent des informations à l'appui du bilan de qualité et une base suffisante pour la suite du processus de réexamen et de suivi que la Commission propose d'engager.

1.2.Champ d’application du bilan de qualité

Il existe trois niveaux de réglementation relative à la sécurité des navires à passagers dans l’UE: international, européen et national. La législation de l’UE relative à la sécurité des navires à passagers a été mise en place pour faire face aux risques qu'est susceptible d’engendrer, pour la sécurité, le fait que les normes internationales ne s’appliquent pas aux voyages nationaux ou bien qu’elles sont insuffisantes. Elle vise à remédier aux difficultés rencontrées dans les opérations de recherche et de sauvetage des passagers des navires en détresse, a pour objectif de parvenir à un niveau de sécurité commun et garantit que les normes de sécurité sont correctement appliquées.

En ce qui concerne les navires effectuant des liaisons internationales (c’est-à-dire entre deux États membres de l’UE) et qui sont, par conséquent, soumis au contrôle par l’État du port 1 , certaines conventions internationales et règles de l’UE s’appliquent. En ce qui concerne les navires effectuant des voyages nationaux (c’est-à-dire entre des ports d’un même État membre), ce sont les réglementations nationales et de l’Union qui s’appliquent.

L’instrument législatif de l’UE le plus ambitieux est la directive 2009/45/CE 2 , qui couvre les navires à passagers construits en acier ou en matériau équivalent et les engins à grande vitesse. Le cas échéant et dans la mesure du possible, elle se fonde sur des normes acceptées au niveau international, à savoir la convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer (SOLAS) 3 . En outre, les directives 2003/25/CE, 1999/35/CE et 98/41/CE prévoient des règles spécifiques de l’UE applicables aux navires rouliers à passagers (navires «ro-pax») 4 , aux engins à grande vitesse (HSC) 5 et à l’enregistrement des personnes à bord.

Il s’agit d’un système réglementaire complexe qui requiert des instruments modernes, complets et plus efficaces, tels que les bilans de qualité. Le tableau suivant donne une vue d’ensemble des quatre directives de l’UE qui ont été retenues aux fins de ce bilan de qualité; elles contiennent un ensemble de normes et d’exigences de sécurité essentielles pour les navires à passagers exploités dans les eaux de l’Union.

Tableau 1: Cadre juridique de l’UE en matière de sécurité des navires à passagers: directives prises en compte dans le bilan de qualité

Contenu

Champ d'application

Voyages

Navires

Application

Directive

2009/45/CE

Normes de sécurité

Visites

(général)

Nationaux

a) Navires à passagers en acier ou matériau équivalent 6 ;

(b) HSC

Tous les navires, quelle que soit leur taille (flexibilité pour les navires de moins de 24 m de longueur)

Classes A, B, C, D 7

Directive

2003/25/CE 8

Normes de sécurité

(spécifiques: exigences relatives à la stabilité des navires ro-pax)

Nationaux et internationaux

Navires rouliers à passagers

Voyages internationaux: Liaisons régulières

Voyages nationaux: Classes A, B et C.

Directive

1999/35/CE 9

Visites

(spécifiques: ro-pax et HSC en service régulier)

Nationaux et internationaux

a) Navires rouliers à passagers

b) HSC

Liaisons régulières uniquement

Voyages nationaux: Classe A

Directive

98/41/CE 10

Normes de sécurité

Visites

(spécifiques: enregistrement des personnes à bord)

Nationaux et internationaux

Tous les navires rouliers à passagers

Longueur du trajet (en dessous du seuil de 20 milles marins, les personnes à bord sont simplement comptées)

Source: Commission, 2015

1.3.Que disent les parties prenantes?

Les parties prenantes conviennent que le cadre législatif en matière de sécurité des navires à passagers joue un rôle important dans l’amélioration de la sécurité tout en favorisant des conditions de concurrence équitables. Au cours de la dernière consultation publique sur la stratégie maritime, 59 % des parties prenantes ont indiqué que le cadre législatif en vigueur aux niveaux international et de l'UE concernant la sécurité maritime était suffisant (26 % n'ont pas exprimé d’avis).

Toutefois, les parties prenantes ont pointé une série de problèmes liés aux divergences dans la mise en œuvre du cadre juridique en matière de sécurité des navires à passagers, mettant en exergue la complexité et le manque de clarté de plusieurs définitions et exigences, des chevauchements et l’obsolescence des formalités déclaratives.

Elles ont également émis des doutes quant à la proportionnalité et à l’adéquation des exigences de sécurité pour les navires en acier de petite taille et ont fait part de leurs interrogations quant aux conséquences imprévues en ce qui concerne les navires qui n’entrent pas dans le champ d’application du cadre juridique actuel. Elles ont conclu par un appel à améliorer la législation existante en simplifiant les règles, ce qui permettrait d’alléger les tâches liées à l’administration et au contrôle de l’application et de supprimer les coûts inutiles.

2.Points essentiels à évaluer

2.1.Le cadre juridique de l’UE relatif à la sécurité des navires à passagers est-il adéquat?

Le cadre juridique de l’UE relatif à la sécurité des navires à passagers est tout à fait adapté à l'objectif poursuivi. Il a permis d’améliorer la sécurité des personnes à bord des navires à passagers naviguant dans les eaux de l’UE et contribué à la mise en place du marché intérieur dans le domaine du transport maritime. Le niveau de sécurité, cependant, peut encore être renforcé, ainsi que l’efficacité et le caractère proportionné de certaines des exigences réglementaires.

Les navires à passagers effectuant des services intérieurs soumis aux normes de sécurité de l’UE 11 représentent environ 30 % de la flotte des navires affectés au trafic national dans les eaux de l’UE, mais plus de 60 % de la capacité totale en nombre de passagers. La majorité des personnes voyage ainsi à bord de navires qui répondent aux normes de sécurité communes, ce qui garantit un niveau de sécurité commun. Un tiers des passagers voyage sur des navires certifiés conformément aux normes nationales, principalement des navires de plus petite taille, construits sur mesure, en matériaux composites ou en bois (environ 12 % et 18 % respectivement).

Sur les 408 accidents impliquant des navires à passagers effectuant des services intérieurs au cours des 4 dernières années, un seul a entraîné le décès d’un passager 12 . Le risque correspondant par passager et par heure est inférieur à celui mesuré pour les navires à passagers effectuant des services internationaux. Si les conséquences des accidents impliquant les flottes nationales dans l’UE sont moins graves que ceux touchant les navires à passagers internationaux, la fréquence des accidents est cependant plus élevée dans le premier cas. Ce n’est pas surprenant, étant donné que le trafic est plus intense dans les zones côtières, où la profondeur des eaux est plus souvent faible et donc propice aux échouages.

La législation de l’UE relative à la sécurité des navires à passagers a également contribué à la libre circulation des navires entre États membres de l’UE. Les informations disponibles montrent que les changements de pavillon ont augmenté de 400 % depuis 1998 13 . Bien qu'il ne fasse pas de doute que d’autres raisons ont joué un rôle dans cette augmentation (comme par exemple l’accroissement de la demande et de la disponibilité des navires sur le marché de l’occasion), la législation de l’UE a certainement contribué à cette évolution.

Bien que certaines administrations nationales aient prétendu que la législation de l’UE avait entraîné une augmentation du nombre de navires construits en matériaux autres que l'acier au motif qu'ils seraient soumis à des normes de sécurité nationales moins strictes, aucun élément de preuve n’est venu soutenir cette supposition 14 . D’autres parties prenantes ont suggéré le contraire et appelé à l’élaboration de normes de sécurité harmonisées à l’échelon de l’UE, applicables aux navires qui ne sont pas, à ce jour, soumis à la législation de l’UE (c’est-à-dire les navires construits en matériaux autres que l'acier ou équivalent, tels que les matériaux composites).

2.2.Quels sont les facteurs qui favorisent ou qui compromettent l’efficacité de la législation de l’UE relative à la sécurité des navires à passagers?

Les normes de sécurité des navires étant constamment renforcées, l’efficacité de la législation de l’UE en matière de sécurité des navires à passagers repose sur des mises à jour régulières qui tiennent compte de l’expérience acquise et des progrès scientifiques. Un réexamen régulier permet également de garantir que les normes de sécurité sont appliquées de manière harmonisée et restent proportionnées au niveau de risque.

La complexité et l’ambiguïté de son champ d'application (concernant les types de navires soumis à la législation), l’obsolescence des formalités déclaratives (qui n’exploitent pas les possibilités offertes par les systèmes numériques actuels de suivi et d’information), le manque de clarté dans la présentation des normes techniques de sécurité et, enfin, la lenteur et la complexité des procédures de mise à jour et d’exemption sont autant de facteurs qui ont nui à l’efficacité de la législation de l’UE en matière de sécurité des navires à passagers. Du fait de ces faiblesses, le suivi, la mise en œuvre et le contrôle de l’application des normes de sécurité sont inutilement compliqués et loin d’être optimaux.

En outre, les passagers sont moins informés qu'on ne le pensait sur la législation relative à la sécurité des navires de passagers de l’UE et ses avantages. Cela peut être dû au niveau d’organisation relativement faible des passagers dans le transport maritime.

2.3.Les risques ont-ils été pris en compte de manière efficace et proportionnée?

Comme en attestent les statistiques sur les accidents, la législation en vigueur a permis d’atteindre un niveau élevé de sécurité des passagers. Il n'a pas été démontré que le coût lié au respect des normes de sécurité de l’UE était important par rapport à celui qu'auraient engendré les normes nationales qui auraient été nécessaires autrement. Les écarts estimés en termes de coûts liés à la réglementation ne représentent qu’une proportion minime de l’ensemble des coûts de construction, d’exploitation et d’entretien.

Par exemple, la somme des coûts supplémentaires pour la partie quantifiable des mesures de lutte contre l’incendie, les engins de sauvetage et les visites initiales ne dépasse pas 100 000 euros pour un navire de grande taille, tandis que le coût de construction se chiffre en dizaines, voire en centaines de millions d'euros. Toutes proportions gardées, il en va de même pour les petits navires.

La différence de coût pour la mise à jour des normes de sécurité à l’échelon national et de l’UE est également notable. Une mise à jour de la législation nationale, effectuée séparément par chaque État membre concerné, engendrerait un coût cumulé compris entre 150 000 et 200 000 euros correspondant à l’évaluation, par les administrations nationales, de l’opportunité et des modalités d’une telle mise à jour. C'est environ dix fois plus que le coût actuel de la mise à jour des normes au niveau de l’UE.

Par ailleurs, les chevauchements et les incohérences entre les différents régimes d’inspection applicables aux navires rouliers à passagers dans l’UE (qui englobent les inspections des «ro-pax», les visites par l’État du pavillon et les contrôles par l’État du port) empêchent les administrations nationales d’optimiser leurs efforts de contrôle. Ils sont aussi un frein à l’optimisation de la durée d’exploitation commerciale d’un navire. Si l’on combinait autant que possible les différents types d’inspection, on pourrait s'épargner chaque année les inspections indépendantes de 770 «ro-pax» dans l’ensemble de l’Union européenne (en supposant une situation inchangée en ce qui concerne les lignes desservies et les navires en service).

L’agrément des systèmes d’enregistrement des passagers peut générer une charge de travail très lourde pour certaines administrations nationales (par exemple, 4 250 heures de travail en Grèce contre 100 en Italie). Cette charge de travail et les coûts correspondants ont été jugés excessifs.

Enfin, la complexité du régime et les chevauchements entre les exigences que l'on retrouve dans différents textes législatifs constituent un facteur de coût et une cause d'irritation importants pour tous les intervenants.

2.4.Le principe de subsidiarité a-t-il été respecté, c’est-à-dire: les États membres sont-ils en mesure d'agir seuls lorsque cela permet de mieux atteindre les objectifs?

D’une manière générale, la législation de l’UE relative à la sécurité des navires à passagers est conforme au principe de subsidiarité. Il est cependant avéré que les normes de sécurité existantes pour les petits navires en acier de moins de 24 m de longueur doivent être encore évaluées à l’aune des objectifs établis sur le plan de la sécurité et du marché intérieur. Étant donné que les petits navires sont pour l'essentiel construits dans des matériaux autres que l’acier, la grande majorité de cette flotte (96 %) n'est pas, en l'état actuel des choses, couverte par les normes de sécurité harmonisées de l’UE. Cela signifie que la plupart des navires de moins de 24 m sont déjà homologués conformément à la législation nationale.

Les données relatives aux accidents impliquant des navires de petites dimensions auxquels ne s'appliquent pas les normes de l’UE ne révèlent pas de problème de sécurité spécifique (cinq décès au cours des quatre dernières années, qui résultent tous d'un accident du travail). Par ailleurs, même en ce qui concerne ces navires soumis aux normes de l’UE, les changements de pavillon entre États membres sont rares.

Ces navires sont construits pour assurer un vaste éventail de services (par exemple, liaisons de jour ou de nuit, croisières à la journée, escale dans des ports imposant des contraintes particulières ou équipés d'infrastructures spécifiques), qui conduisent à une très large gamme de types de navires et de solutions techniques. Cela rend particulièrement ardue l'élaboration d’un socle commun de règles détaillées applicables aux navires de plus petite taille utilisés pour une telle panoplie de services. Les États membres seraient dès lors les mieux placés pour évaluer la sensibilité de ces navires aux conditions locales d’exploitation, qui varient considérablement d'une région de l’UE à l'autre. D’autre part, certains chantiers navals 15 ont fait valoir que des normes harmonisées au niveau de l'UE pour tous les navires de petite taille (c’est-à-dire indépendamment du matériau dans lequel ils sont construits) leur permettraient de vendre leurs navires de façon aisée et rapide dans tous les États membres de l’UE.

2.5.Des normes de sécurité internationales auraient-elles été plus efficaces ou rationnelles sur le plan économique que les normes actuelles de l’UE?

En ce qui concerne les voyages nationaux, il est peu probable que des normes internationales seraient plus efficaces ou rationnelles du point de vue économique que les normes de l’Union européenne en vigueur. Les normes internationales de l’OMI ne s’appliquent pas. En l’absence de normes de l’UE, les États membres n'auraient d'autre choix que de définir des dispositions nationales ou bien d'adopter des règles internationales, qui ne sont toutefois pas pleinement satisfaisantes pour les liaisons domestiques et devraient être adaptées en conséquence. Il leur faudrait également effectuer des mises à jour régulières afin d'adapter leurs dispositions à l’évolution de la technologie dans le domaine de la construction navale 16 . En tout état de cause, cela ne permettrait pas d'atteindre un niveau de sécurité commun, ni de faciliter le fonctionnement du marché intérieur. Les normes de l’UE prévoient, en outre, l’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite, ce qui est une recommandation, mais non une obligation en vertu des normes internationales.

La situation est différente pour les voyages internationaux: dans ce cas, il serait plus efficace de pouvoir s'appuyer totalement sur les normes internationales pertinentes, à condition qu’elles garantissent un niveau de sécurité suffisant, ce qui ne se vérifie pas toujours. Ainsi vaut-il mieux, par exemple, que des normes plus strictes en matière de stabilité après avarie s'appliquent aux navires rouliers à passagers voyageant à destination ou au départ de ports de l’Union européenne 17 , ce qui assure, à l'heure actuelle, le niveau de sécurité adéquat pour ce type de navires, courant dans l’UE.

Enfin, en l’absence de mécanisme d’application au niveau international, les régimes d’inspection de l’UE en vigueur, applicables aux navires à passagers aussi bien pour les voyages nationaux qu’internationaux, restent indispensables pour maintenir un niveau élevé de sécurité de la vie humaine à bord des navires à passagers et éliminer les navires qui ne satisfont pas aux normes.    

 

3.Conclusions du bilan de qualité

Le bilan de qualité a montré que les objectifs fondamentaux, liés à la sécurité des passagers et au marché intérieur, de la législation de l’UE sur la sécurité des navires à passagers conservent toute leur pertinence. Toutefois, il a également montré que ces objectifs peuvent, dans certains cas, être atteints de manière plus simple et grâce à une clarification des textes.

Un certain nombre de dispositions qui sont ambiguës, obsolètes ou qui se chevauchent et qu'il est possible de simplifier, de clarifier ou d'abroger, ont été recensées dans plusieurs domaines:

Complexité et charge administrative: il est apparu que les inspections obligatoires pour l’exploitation en toute sécurité de transbordeurs rouliers en services réguliers faisaient en grande partie double emploi avec d’autres types de contrôles et d’inspections (à savoir les visites par l’État du pavillon et les inspections menées dans le cadre du contrôle par l’État du port). Les États membres ont mis en œuvre ces dispositions de manière pragmatique, ce qui signifie que le cadre juridique actuel ne reflète plus l’état de la situation. La complexité de la législation de l’UE relative à la sécurité des navires à passagers est amplifiée par le fait que les normes de sécurité pour les navires à passagers effectuant des services intérieurs 18 sont présentées sous une forme obsolète; elles sont ainsi devenues au fil du temps très difficiles à comparer aux normes internationales existantes.

Ambiguïté et manque de transparence: le bilan de qualité a montré que plusieurs dispositions, définitions et exigences sont à ce point ambiguës que, dans certains cas, elles peuvent faire obstacle à une mise en œuvre efficace de la législation. Il s'agit notamment des dispositions relatives à la portée et à l’application des normes harmonisées de l’UE, tels que le type de navire visé ou la fréquence des inspections.

Exigences disproportionnées: sont définis comme petits navires les navires de moins de 24 mètres de long. Cette définition est considérée comme la plus appropriée pour l'établissement de normes techniques communes de sécurité. Les conditions locales ayant davantage d'incidence sur l’exploitation des petits navires, les États membres devraient être mieux à même d’évaluer les risques concrets et de définir les normes de sécurité correspondantes. En outre, contrairement à des bâtiments de plus grande taille, les petits navires sont en général utilisés dans le même État membre jusqu’à la fin de leur durée d’exploitation et les changements de registre d'un État membre à un autre sont rares. Les normes contraignantes de l'UE applicables aux petits navires en acier uniquement (soit environ 70 navires de petites dimensions sur un total de 1950) ont été jugées disproportionnées et leur valeur ajoutée pour l’UE n'est pas suffisante pour justifier leur maintien. Toutefois, pour faciliter l’accès des constructeurs des pays membres au marché élargi de l’UE, certaines parties prenantes ont évoqué la possibilité d’élaborer des lignes directrices, ou un code, qui s’appliqueraient à tous les navires de petite taille.

Outre des possibilités de simplification, le bilan de qualité a mis au jour un certain nombre de problèmes qui entravent l’efficacité des opérations de recherche et de sauvetage de manière injustifiée:

Le système qui sous-tend les opérations de recherche et de sauvetage est archaïque: l’expérience a montré que l’efficacité des opérations de recherche et de sauvetage dépend d’un accès immédiat à des données précises en ce qui concerne les personnes à bord, ce qui n’est pas toujours le cas. En vertu des dispositions en vigueur, ces informations doivent être enregistrées dans le système de la compagnie et être accessibles facilement et à tout moment pour être communiquées à l’autorité compétente responsable des opérations de recherche et de sauvetage. Ces dispositions datent de 1998 et ne tiennent pas compte de la mise au point de systèmes tels que SafeSeaNet 19 et le guichet unique national 20 : elles impliquent que l’autorité nationale compétente doit prendre contact avec la compagnie maritime en cas d’urgence. En outre, les données enregistrées (en général le nom, l’âge et le sexe) ne mentionnent pas toujours la nationalité, rendant ainsi l’assistance aux victimes et à leurs proches inutilement compliquée. Les exploitants qui transmettent ces données à SafeSeaNet ou au guichet unique national se voient ainsi contraints de faire une double déclaration.

Enfin, le bilan de qualité a recensé un certain nombre d’autres points importants liés à l’adéquation et à la proportionnalité des normes de sécurité existantes:

Problèmes en matière de sécurité nécessitant une évaluation complémentaire: ces questions devront faire l’objet d’une analyse plus approfondie et de consultations avec les experts. Parmi ces points, citons les disparités entre les exigences de sécurité en fonction des classes de navires et des zones maritimes correspondantes, l’application plus large du régime d’inspection des navires «ro-pax» et l’élaboration éventuelle de normes harmonisées pour les navires construits à partir de matériaux autres que l’acier ou équivalent, qui ne sont pas, à l'heure actuelle, couverts par le cadre réglementaire de l’UE.

Il est important de noter, avant d’envisager de nouvelles mesures au niveau de l’UE, que certains de ces points pourraient être mieux traités au niveau international, en particulier en ce qui concerne le réexamen des exigences relatives à la stabilité après avarie.

4.Suites à donner

4.1.Première étape

La Commission, avec le soutien de l’AESM et en collaboration avec les États membres et les parties prenantes, envisagera de proposer une simplification du cadre réglementaire de l'UE pour la sécurité des navires à passagers et agira en faveur de la modernisation des normes de stabilité après avarie au niveau international.

Simplifier le cadre réglementaire de l’UE en matière de sécurité des navires à passagers: la Commission ne modifiera pas ses objectifs politiques ni les principaux mécanismes en place pour les atteindre, mais elle examinera des propositions visant à supprimer les dispositions obsolètes, ambiguës ou faisant double emploi, présentées dans le bilan de qualité, notamment:

en supprimant les chevauchements entre les visites prévues par la directive 1999/35/CE, les inspections détaillées dans le cadre du contrôle par l’État du port et les inspections annuelles par l'État du pavillon;

en énonçant clairement que, aux fins de la directive 2009/45/CE: a) l'aluminium est un matériau équivalent à l'acier (en vertu d'exigences clarifiées en matière d'isolation au feu applicables à l'aluminium); et b) les navires de service en mer et les bateaux traditionnels ne relèvent pas du champ d’application de la directive;

en explicitant les définitions relatives à l’enregistrement des passagers figurant dans la directive 98/41/CE, comme celle de «durée du voyage»;

en simplifiant la définition des zones maritimes figurant dans la directive 2009/45/CE;

en simplifiant l’annexe de la directive 2009/45/CE afin de la rendre plus compréhensible.

La Commission examinera également des propositions visant à supprimer les exigences disproportionnées, notamment:

en excluant les navires à passagers de moins de 24 m de longueur construits en acier ou en un matériau équivalent du champ d’application de la directive 2009/45/CE;

en supprimant l’obligation d’approbation formelle du système d’enregistrement des passagers qui figure actuellement dans la directive 98/41/CE, tout en mettant l’accent sur son bon fonctionnement.

Afin de supprimer les exigences de double déclaration et d’améliorer l’efficacité des opérations de recherche et de sauvetage, la Commission envisagera d'introduire les dispositions suivantes:

l’enregistrement des informations relatives aux personnes à bord dans un système électronique existant qui permet une transmission immédiate des données à l’autorité compétente en cas d’urgence ou d’accident;

l’enregistrement et la communication à l’autorité compétente de la nationalité des passagers, en utilisant les mêmes moyens et critères que ceux en place pour l’enregistrement et la transmission des informations déjà requises sur les personnes à bord.

Faciliter la modernisation des normes internationales: au niveau international, la Commission, avec le soutien de l’AESM et en collaboration avec les États membres et les parties prenantes, agira en faveur de la modernisation des normes de stabilité après avarie applicables aux navires à passagers et envisagera de soumettre à l’Organisation maritime internationale:

un exposé technique, lors de la réunion du groupe d’experts sur l’évaluation formelle de la sécurité, en novembre 2015;

une proposition de l’UE concernant une nouvelle norme de stabilité après avarie (appelée «l’indice R») au sous-comité chargé des questions de conception et de construction des navires, lors de sa réunion de janvier 2016, en vue d’un accord sur une norme plus stricte au sein du comité de la sécurité maritime en 2016.

4.2.Deuxième étape

La Commission examinera de manière plus approfondie plusieurs autres questions relatives à la sécurité et au marché intérieur. En particulier, elle envisage:

de réexaminer la pertinence des différences concernant les exigences de sécurité entre les navires de classe C et ceux de classe D en vertu de la directive 2009/45/CE et des zones maritimes correspondantes;

de promouvoir l’application des inspections spécifiques prévues par la directive 1999/35/CE aux navires de type «ro-pax» de catégories B, C et D qui assurent des services réguliers;

d’évaluer l’opportunité d'une proposition visant à modifier ou à abroger les exigences en matière de stabilité après avarie des navires rouliers à passagers qui sont spécifiques à l’UE 21 , en les alignant sur les normes internationales, lorsque celles-ci auront été modernisées de manière satisfaisante pour l’UE;

d’envisager d’élaborer des lignes directrices ou un code applicables aux petits navires et aux navires construits en matériaux autres que l’acier ou équivalent, sur la base d'exigences fonctionnelles.

Une assistance, l’échange de bonnes pratiques et un suivi continu de la législation existante seront nécessaires à cette fin. La Commission, en collaboration avec l’AESM, prévoit donc:

de mettre en place un cadre approprié pour l’échange de points de vue avec les administrations nationales, les industriels et les associations de voyageurs de l’UE dans le domaine de la sécurité des navires à passagers dans l’UE.

Enfin, en tenant dûment compte du potentiel de simplification, la Commission envisage de renforcer le contrôle de l’application des exigences en vigueur avec l’aide de l’AESM et invite les administrations nationales à s’associer à ces efforts.

(1)  Directive 2009/16/CE du Parlement européen et du Conseil relative au contrôle par l’État du port (JO L 131 du 28.5.2009, p. 57).
(2)  Directive 2009/45/CE du Parlement européen et du Conseil établissant des règles et normes de sécurité pour les navires à passagers (JO L 163 du 25.6.2009, p. 1).
(3)  Cette convention a été adoptée par l’Organisation maritime internationale (OMI) et ratifiée par tous les États membres de l’UE.
(4)  Les navires rouliers sont conçus pour le transport de véhicules roulants, tels que camions, remorques et voitures, qui sont embarqués et débarqués du navire sur leurs propres roues ou à l’aide d’un véhicule à plateforme. S’ils transportent plus de 12 passagers en plus des véhicules, ils sont appelés navires «ro-pax».
(5)  Tels que définis dans la convention SOLAS, chapitre X, Règ. 1.3
(6)  Par souci de simplicité, ils sont dénommés ci-après «navires en acier»
(7)  Les navires à passagers sont répartis en différentes classes en fonction des zones maritimes dans lesquelles ils naviguent, suivant des paramètres tels que la distance par rapport à la côte. Si les navires de la classe A ne sont pas soumis à des restrictions en ce qui concerne la distance par rapport à la côte à laquelle ils peuvent naviguer, pour ceux de la classe D cette distance est limitée à 3 milles marins (environ 5,6 kilomètres).
(8)  Directive 2003/25/CE du Parlement européen et du Conseil établissant des règles et normes de sécurité pour les navires à passagers (JO L 123 du 17.5.2003, p. 22).
(9)  Directive 1999/35/CE du Conseil relative à un système de visites obligatoires pour l'exploitation en toute sécurité de services réguliers de transbordeurs rouliers et d'engins à passagers à grande vitesse (JO L 138 du 1.6.1999, p. 1)
(10)  Directive 98/41/CE du Conseil relative à l'enregistrement des personnes voyageant à bord de navires à passagers opérant à destination ou au départ de ports d'États membres de la Communauté (JO L 188 du 2.7.1998, p. 35)
(11)  C'est-à-dire par la directive 2009/45/CE
(12)  Il convient de noter que ces statistiques ne reprennent pas certains accidents très médiatisés, tels que ceux du Costa Concordia (2012) ou du Norman Atlantic (2014), étant donné qu’ils impliquent des navires effectuant des traversées internationales (et ne relevant donc pas des exigences de sécurité harmonisées par la directive 2009/45/CE, applicable aux voyages nationaux uniquement).
(13)  C’est-à-dire la date d’entrée en vigueur de la directive 98/18/CE, qui a précédé la directive 2009/45/CE.
(14)  Il faut entendre par là que le choix de l'acier ou d'autres matériaux pour la construction d'un navire obéit principalement aux critères du prix et des caractéristiques des matériaux choisis.
(15)  Au Danemark et au Portugal. Des experts nationaux croates et suédois ont exprimé un avis similaire.
(16)  À noter: la législation nationale applicable dans certains États membres repose sur des normes internationales qui ne sont plus en vigueur.
(17)  Telles que définies dans la directive 2003/25/CE au lendemain de l’accident de l’Estonia, en septembre 1994.
(18)  Voir par exemple l’annexe de la directive 2009/45/CE.
(19)  Directive 2002/59/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la mise en place d’un système communautaire de suivi du trafic des navires et d’information (JO L 208 du 5.8.2002, p. 10).
(20)  Directive 2010/65/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 concernant les formalités déclaratives applicables aux navires à l’entrée et/ou à la sortie des ports des États membres (JO L 283 du 29.10.2010, p. 1).
(21)  C’est-à-dire celles prévues par la directive 2003/25/CE.
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