CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES BOT

présentées le 19 janvier 2012 ( 1 )

Affaire C-508/10

Commission européenne

contre

Royaume des Pays-Bas

«Manquement d’État — Directive 2003/109/CE — Statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée — Montants des droits réclamés pour l’acquisition du statut ou l’octroi d’un permis de séjour dans un autre État membre — Caractère excessif ou inéquitable — Entrave à l’exercice du droit de résidence»

1. 

Le présent recours en manquement a trait à l’application de la directive 2003/109/CE du Conseil, du 25 novembre 2003, relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée ( 2 ).

2. 

La Commission européenne demande à la Cour de constater que, en exigeant des ressortissants de pays tiers et des membres de leur famille qui sollicitent le statut de résident de longue durée le versement de droits qu’elle tient pour «élevés» et «non équitables», le Royaume des Pays-Bas a manqué aux obligations lui incombant en vertu de la directive.

3. 

Dans les présentes conclusions, nous inviterons, d’abord, la Cour à dire que le recours est recevable dès lors qu’il est reproché au Royaume des Pays-Bas d’avoir porté atteinte, par sa réglementation nationale, à l’objectif de la directive, tel qu’interprété à la lumière de ses considérants, ainsi qu’à son effet utile, et que le grief était identifié avec un degré de précision suffisant dans la requête introduite par la Commission.

4. 

Nous exposerons, ensuite, les motifs pour lesquels, selon nous, les États membres ne peuvent appliquer aux ressortissants de pays tiers qui sollicitent la délivrance de documents de séjour en application de la directive des droits qui seraient soit excessifs par eux-mêmes, soit disproportionnés par rapport à ceux que les ressortissants nationaux et les citoyens de l’Union européenne qui exercent leur droit à la libre circulation doivent acquitter pour l’obtention de documents similaires.

5. 

Nous soutiendrons, enfin, que le Royaume des Pays-Bas a effectivement manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 258 TFUE en exigeant des ressortissants de pays tiers des droits excessifs et disproportionnés.

I – Le cadre juridique

A – Le droit de l’Union

6.

La directive a été adoptée sur le fondement de l’article 63, premier alinéa, points 3 et 4, CE, dans le but de préciser le statut juridique des ressortissants de pays tiers installés durablement dans les États membres, dont l’intégration est considérée, selon le quatrième considérant de la directive, comme un «élément clé pour promouvoir la cohésion économique et sociale, objectif fondamental de la Communauté».

7.

La directive a un double objet. Aux termes de son article 1er:

«La présente directive établit:

a)

les conditions d’octroi et de retrait du statut de résident de longue durée accordé par un État membre aux ressortissants de pays tiers qui séjournent légalement sur son territoire, ainsi que les droits y afférents, et

b)

les conditions de séjour dans des États membres autres que celui qui a octroyé le statut de longue durée pour les ressortissants de pays tiers qui bénéficient de ce statut.»

8.

Les deuxième, troisième, sixième, neuvième, dixième et dix-huitième considérants de la directive sont libellés comme suit:

«(2)

Lors de sa réunion extraordinaire de Tampere des 15 et 16 octobre 1999, le Conseil européen a proclamé que le statut juridique des ressortissants de pays tiers devrait être rapproché de celui des ressortissants des États membres et qu’une personne résidant légalement dans un État membre, pendant une période à déterminer, et titulaire d’un permis de séjour de longue durée devrait se voir octroyer dans cet État membre un ensemble de droits uniformes aussi proches que possible de ceux dont jouissent les citoyens de l’Union européenne.

(3)

La présente directive respecte les droits fondamentaux et observe les principes, qui sont reconnus notamment par la convention européenne pour la protection des droits humains et des libertés fondamentales et par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

[…]

(6)

Le critère principal pour l’acquisition du statut de résident de longue durée devrait être la durée de résidence sur le territoire d’un État membre. […]

(9)

Les considérations économiques ne devraient pas être un motif de refus d’octroyer le statut de résident de longue durée et ne doivent pas être considérées comme interférant avec les conditions pertinentes.

(10)

Il importe d’établir un système de règles de procédure régissant l’examen de la demande d’acquisition du statut de résident de longue durée. Ces procédures devraient être efficaces et gérables par rapport à la charge normale de travail des administrations des États membres, ainsi que transparentes et équitables afin d’offrir un niveau adéquat de sécurité juridique aux personnes concernées. Elles ne devraient pas constituer un moyen pour empêcher l’exercice du droit de résidence.

[…]

(18)

L’établissement des conditions auxquelles est soumis le droit de séjour dans un autre État membre des ressortissants de pays tiers qui sont résidents de longue durée devrait contribuer à la réalisation effective du marché intérieur en tant qu’espace où la libre circulation de toutes les personnes est assurée. Il pourrait aussi constituer un facteur de mobilité important, notamment sur le marché du travail de l’Union.»

9.

Le chapitre II de la directive porte sur le statut de résident de longue durée dans un premier État membre, tandis que le chapitre III de celle-ci fixe les conditions de séjour d’un résident de longue durée ou des membres de sa famille dans un autre État membre.

10.

Les articles 4 à 6 de la directive définissent les conditions de fond pour l’octroi du statut de résident de longue durée ainsi que les cas dans lesquels ce statut peut être refusé. Le demandeur doit, notamment, avoir résidé de manière légale et ininterrompue sur le territoire d’un État membre pendant les cinq années qui ont immédiatement précédé l’introduction de sa demande ( 3 ). Il doit, en outre, fournir la preuve qu’il dispose pour lui et pour les membres de sa famille qui sont à sa charge de ressources stables, régulières et suffisantes et d’une assurance maladie ( 4 ). Il peut, enfin, être tenu de satisfaire à des conditions d’intégration fixées par les États membres conformément à leur droit national ( 5 ). Dès lors que le demandeur remplit ces conditions, le statut de résident de longue durée ne peut lui être refusé que pour des motifs d’ordre public ou de sécurité publique ( 6 ).

11.

Les articles 11 et 12 de la directive précisent les effets de la reconnaissance de ce statut en prévoyant le principe d’une égalité de traitement avec les nationaux dans certains domaines ainsi qu’une protection contre l’éloignement.

12.

Les articles 14 à 16 de la directive fixent les conditions dans lesquelles le résident de longue durée et les membres de sa famille peuvent exercer un droit de séjour de plus de trois mois dans un autre État membre. Ce droit est subordonné au dépôt d’une nouvelle demande de titre de séjour, dont l’octroi peut être soumis par les États membres à certaines des conditions exigées pour l’accès initial au statut de résident de longue durée.

13.

La directive ne comporte aucune disposition relative aux droits pouvant être exigés par les États membres lors du dépôt d’une demande.

B – Le droit national

14.

L’article 24, paragraphe 2, de la loi procédant à une révision générale de la loi sur les étrangers (Wet tot algehele herziening van de Vreemdelingenwet), du 23 novembre 2000 ( 7 ), prévoit:

«Dans les cas déterminés par [le] ministre et suivant les règles qu’il arrête, l’étranger est redevable de droits fiscaux à raison du traitement de la demande. À cet effet, [le] ministre peut, par ailleurs, prévoir que l’étranger est redevable de droits fiscaux afférents à la délivrance d’un document attestant son séjour régulier. À défaut de paiement, la demande n’est pas prise en considération ou le document n’est pas délivré.»

15.

Les articles 3.34 à 3.34i du règlement sur les étrangers de 2000 (Voorschrift Vreemdelingen 2000) ( 8 ) fixent les droits fiscaux que doivent acquitter les ressortissants de pays tiers, à l’exception des ressortissants turcs lorsqu’ils demandent un titre de séjour, selon les montants suivants:

Type de demande

Montant en euros

Article du règlement sur les étrangers de 2000

Statut de résident de longue durée

201

Article 3.34g, paragraphe 1

Permis de séjour pour, notamment, exercer ou étudier

433

Article 3.34, paragraphe 2, sous a)

Permis de séjour pour d’autres motifs

331

Article 3.34, paragraphe 2

Permis de séjour pour les membres de la famille accompagnants

188

Article 3.34, paragraphe 2, sous c)

Permis de séjour pour les membres de la famille non accompagnants

830 (premier membre de la famille)

188 (autres membres de la famille)

Article 3.34, paragraphe 2, sous b)

II – La procédure précontentieuse

16.

Estimant que le Royaume des Pays-Bas avait manqué aux obligations qui lui incombent, la Commission lui a adressé une lettre de mise en demeure le 27 juin 2008, puis un avis motivé le 23 mars 2009, auxquels les autorités néerlandaises ont répondu respectivement les 25 août 2008 et 25 mai 2009, en contestant l’existence d’un manquement.

17.

Jugeant ces réponses insatisfaisantes, la Commission a décidé de saisir la Cour sur le fondement de l’article 258 TFUE.

III – Le recours

18.

La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

constater que, en exigeant le versement de droits élevés et non équitables des ressortissants de pays tiers et des membres de leur famille qui sollicitent le statut de résident de longue durée, le Royaume des Pays-Bas n’a pas respecté les obligations fixées par la directive, manquant ainsi aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 258 TFUE, et

condamner le Royaume des Pays-Bas aux dépens de l’instance.

IV – Les arguments des parties

A – Sur la recevabilité du recours

19.

Le Royaume des Pays-Bas soulève, dans son mémoire en défense, l’irrecevabilité du recours pour un double motif.

20.

Il soutient, en premier lieu, que la Commission ne vise, dans sa requête, aucune disposition contraignante de la directive, mais se réfère seulement à un considérant, qui n’a pas de valeur juridique contraignante, ainsi qu’à l’article 4, paragraphe 3, TUE, mais en s’y référant de façon générale sans expliquer dans quelle mesure ses griefs se fondent sur cette disposition.

21.

Il fait valoir, en second lieu, que la Commission a limité le dispositif de sa requête aux droits fiscaux exigés des ressortissants de pays tiers pour l’obtention du statut de résident de longue durée prévu au chapitre II de la directive, de sorte que la procédure ne peut pas porter sur les droits réclamés des résidents de longue durée qui, depuis un État membre, introduisent une demande de séjour en application du chapitre III de cette directive.

22.

Dans son mémoire en duplique, le Royaume des Pays-Bas conteste la possibilité pour la Commission d’invoquer la jurisprudence de la Cour selon laquelle une requête ne peut être qualifiée d’irrecevable du seul fait que la Commission soutient qu’une réglementation est contraire au système, à l’économie ou à l’esprit d’une directive ( 9 ). Selon lui, en invoquant cette jurisprudence, la Commission articule pour la première fois en réplique un nouveau grief, dont la Cour ne peut pas tenir compte.

B – Sur le bien-fondé du recours

23.

Sans contester le principe de la perception de droits pour la délivrance du permis de séjour de résident de longue durée ni la marge de manœuvre dont, en l’absence de disposition spécifique dans la directive, disposent les États membres pour déterminer leur montant, la Commission estime, à la lumière du dixième considérant de cette directive, que ces droits doivent être «équitables» et qu’ils ne doivent pas empêcher ou dissuader les ressortissants de pays tiers satisfaisant aux conditions énoncées dans celle-ci de demander un permis de séjour. Elle fait valoir que le montant élevé des droits en vigueur aux Pays-Bas, qui entrave l’exercice des droits consacrés par la réglementation de l’Union, porte atteinte à l’effet utile de celle-ci.

24.

La Commission soutient également, en se fondant sur le deuxième considérant de la directive, que les droits fiscaux doivent être d’un montant «comparable» à celui des droits que les citoyens de l’Union qui exercent leur droit à la libre circulation doivent acquitter pour obtenir des documents similaires. Elle estime que les sommes exigées par le Royaume des Pays-Bas, qui sont environ 7 à 27 fois supérieures à celles prévues pour les citoyens de l’Union, sont disproportionnées et peuvent décourager les intéressés de faire valoir leurs droits.

25.

Exposant que la finalité de la directive est semblable à celle de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004 ( 10 ), la Commission fait valoir que les ressortissants de pays tiers se trouvent dans une situation comparable à celle des citoyens de l’Union dans le contexte de la directive 2004/38. Se référant à l’arrêt du 29 avril 2010, Commission/Pays-Bas ( 11 ), par lequel la Cour a condamné le Royaume des Pays-Bas pour avoir institué et maintenu un régime prévoyant des droits disproportionnés pour la délivrance de permis de séjour aux ressortissants turcs, elle estime que, dans la présente affaire, le montant des droits doit, a fortiori, être également tenu pour disproportionné.

26.

Le Royaume des Pays-Bas répond, dans son mémoire en défense, que la directive 2004/38 n’est pas pertinente pour définir la portée de la notion de procédure équitable figurant au dixième considérant de la directive, puisque la première de ces directives est plus récente que la seconde et que le statut juridique des ressortissants de pays tiers diffère de celui des citoyens de l’Union, auxquels est reconnu le droit fondamental de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres. En outre, alors que la proposition de directive du Conseil relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée ( 12 ) contenait une disposition relative à la perception des droits pour la délivrance du permis de séjour, la directive ne comporte pas de disposition comparable. Selon le Royaume des Pays-Bas, le législateur de l’Union a donc choisi d’abandonner aux États membres le pouvoir de déterminer le montant des droits fiscaux, ce dont il déduit que le contrôle administratif et juridictionnel doit se limiter à la question de savoir si la réglementation nationale est ou non manifestement déraisonnable.

27.

Le Royaume des Pays-Bas ajoute que la solution dégagée dans l’arrêt Commission/Pays-Bas, précité, en faveur des ressortissants turcs qui bénéficient des droits que leur confèrent, d’une part, l’article 13 de la décision no 1/80 du conseil d’association ( 13 ), du 19 septembre 1980, relative au développement de l’association ( 14 ), et, d’autre part, l’article 59 du protocole additionnel, signé le 23 novembre 1970 à Bruxelles et conclu, approuvé et confirmé au nom de la Communauté par le règlement (CEE) no 2760/72 du Conseil, du 19 décembre 1972 ( 15 ), n’est pas transposable dans la présente affaire, puisque la directive ne comporte ni règle de «standstill», qui s’opposerait à l’introduction de nouvelles restrictions, ni de disposition qui imposerait une comparaison entre le montant des droits fiscaux exigés des ressortissants de pays tiers et celui des droits fiscaux demandés aux citoyens de l’Union.

28.

Le Royaume des Pays-Bas estime, enfin, que la Commission n’a pas présenté correctement le champ d’application des droits fiscaux exigés, pour l’obtention d’un droit de séjour aux Pays-Bas, des ressortissants de pays tiers qui sont résidents de longue durée dans un autre État membre et qu’elle n’a pas démontré en quoi le montant de 201 euros exigé pour l’acquisition du statut de résident de longue durée empêcherait l’exercice des droits conférés par la directive. Indiquant que les demandes d’octroi du statut de résident de longue durée ont rapidement progressé entre l’année 2006 et l’année 2009, il fait observer que ce montant, fixé conformément à la politique générale consistant à imputer aux demandeurs les frais que l’autorité compétente expose pour la délivrance d’une autorisation, n’entrave nullement l’exercice des droits conférés par la directive.

29.

La Commission, dans son mémoire en réplique, considère que, si, contrairement à ce qu’elle avait initialement envisagé dans la proposition de directive, le législateur de l’Union n’a prévu aucune limitation explicite des éventuels droits à acquitter, la marge de manœuvre que conservent les États membres en la matière n’est pas illimitée. Selon elle, la norme relative à la fixation de droits pour les citoyens de l’Union peut être considérée comme un indicateur raisonnable de ce qui peut être exigé des ressortissants de pays tiers. Or, elle voit dans la perception de droits fiscaux qui, dans la présente affaire, sont 7 à 27 fois supérieurs aux montants dont doivent s’acquitter les citoyens de l’Union pour obtenir des documents comparables une mesure qui pourrait amener les ressortissants de pays tiers à renoncer à l’obtention des documents administratifs indispensables à l’exercice des droits conférés par la directive.

30.

La Commission soutient, en outre, que le caractère disproportionné des droits perçus justifie à lui seul la condamnation prononcée par la Cour dans l’arrêt Commission/Pays-Bas, précité, indépendamment de la violation des dispositions particulières applicables aux seuls ressortissants turcs.

31.

Le Royaume des Pays-Bas, dans son mémoire en duplique, soutient qu’il convient de déduire du dixième considérant de la directive, qui prévoit que les règles de procédure ne peuvent pas être utilisées comme un «moyen» d’entraver l’exercice du droit de séjour, que ces règles peuvent effectivement créer une entrave, du moment qu’elles ne sont pas utilisées comme un instrument visant à empêcher l’exercice du droit de séjour.

32.

Il considère, en définitive, que la situation des ressortissants de pays tiers qui souhaitent obtenir le statut de résident de longue durée peut être comparée avec celle des citoyens de l’Union qui demandent l’obtention d’un droit de séjour permanent au sens de l’article 16 de la directive 2004/38, tout en soulignant, d’une part, que les enquêtes à effectuer sont considérablement plus approfondies pour les ressortissants de pays tiers et, d’autre part, que le document délivré aux citoyens de l’Union a un effet simplement déclaratif, tandis que l’autorisation de séjour conférée à un résident de longue durée a un effet constitutif.

33.

La République hellénique, dans son mémoire en intervention, conteste la pertinence du critère de proportionnalité proposé par la Commission et estime que, pour fixer les droits perçus pour la délivrance d’un permis de séjour aux résidents de longue durée, il faut nécessairement tenir compte du coût des services administratifs fournis non seulement pour le contrôle et la certification du droit de séjour, mais aussi pour l’intégration des personnes, telle la formation des migrants en langue, histoire et culture du pays d’accueil.

34.

S’appuyant sur la jurisprudence de la Cour relative au remboursement des frais médicaux exposés dans un autre État membre ( 16 ), elle considère qu’il convient de rechercher si les droits perçus constituent une mesure nécessaire et raisonnable pour maintenir l’équilibre financier du système national de gestion de l’immigration dans son ensemble.

V – Notre avis

A – Sur la recevabilité du recours

35.

Selon la jurisprudence, l’objectif de la procédure précontentieuse dans un recours en manquement est de donner à l’État membre concerné la double occasion, d’une part, de se conformer à ses obligations découlant du droit de l’Union et, d’autre part, de faire utilement valoir ses moyens de défense à l’encontre des griefs formulés par la Commission ( 17 ).

36.

La régularité de cette procédure constituant une garantie essentielle non seulement pour assurer la protection des droits de l’État membre en cause, mais également pour garantir que la procédure contentieuse éventuelle aura pour objet un litige clairement défini, il importe que l’objet du grief sur lequel la Cour est appelée à se prononcer soit précisément déterminé.

37.

Il résulte, par ailleurs, de l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 38, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure de celle-ci, que la Commission est tenue, dans toute requête déposée au titre de l’article 258 TFUE, d’exposer sommairement les griefs précis sur lesquels la Cour est appelée à se prononcer ainsi que les éléments de droit et de fait sur lesquels ces griefs sont fondés.

38.

Néanmoins, la Cour a jugé, dans son arrêt du 29 novembre 2001, Commission/Italie, précité, que, lorsque la Commission soutient qu’une réglementation nationale est contraire au système, à l’économie ou à l’esprit d’une directive d’harmonisation, sans que la violation du droit de l’Union qui en découle puisse être rattachée à des dispositions spécifiques de cette directive, sa requête ne peut de ce seul fait être qualifiée d’irrecevable ( 18 ). Nous estimons que l’invocation de cette jurisprudence par la Commission, dans son mémoire en réplique, constitue seulement un argument en défense répondant au moyen d’irrecevabilité soulevé par le Royaume des Pays-Bas dans son mémoire en défense et ne saurait en aucune manière être considérée comme un nouveau grief dont la Cour ne pourrait pas tenir compte. Il ne peut, dès lors, être reproché à la Commission d’avoir modifié en cours de procédure l’objet du manquement allégué.

39.

Il ressort également de la jurisprudence de la Cour que le manquement peut être constitué par la violation de l’obligation de coopération loyale entre l’Union et les États membres, qui est consacrée par l’article 4, paragraphe 3, TUE ( 19 ).

40.

Le recours de l’article 258 TFUE peut donc être fondé sur la violation non seulement d’une disposition particulière de la législation de l’Union, mais aussi de l’obligation générale de coopération qui emporte celle de se conformer à l’objectif de cette législation et de s’abstenir de toute action de nature à remettre en cause son effet utile.

41.

Dans la présente affaire, il est constant que la Commission a clairement indiqué, dans sa lettre de mise en demeure, dans le dispositif de l’avis motivé et dans les conclusions contenues dans la requête introductive d’instance, qu’elle reprochait au Royaume des Pays-Bas de n’avoir pas respecté les obligations fixées par la directive. Contrairement à ce que soutient cet État membre, elle lui a fait grief d’avoir violé non pas les considérants de la directive, mais une disposition qu’elle a puisée dans la directive elle-même, telle qu’interprétée à la lumière de ses considérants, en la privant de son effet utile par l’entrave apportée aux droits qu’elle consacre au profit des ressortissants de pays tiers. La Commission a, ab initio, reproché au Royaume des Pays-Bas d’avoir violé l’économie générale de la directive ainsi que l’esprit et l’objectif de celle-ci. La circonstance que la requête se réfère accessoirement à l’article 4, paragraphe 3, TUE ne saurait rendre celle-ci irrecevable.

42.

Par ailleurs, la Commission a expressément visé, dans sa lettre de mise en demeure, dans l’avis motivé et dans la requête introductive d’instance, non seulement la situation des ressortissants de pays tiers qui sollicitent l’octroi du statut de résident de longue durée, mais aussi celle des résidents de longue durée dans un autre État membre sollicitant pour eux-mêmes ou pour les membres de leur famille le droit de séjourner aux Pays-Bas. Elle s’est référée non seulement au droit de 201 euros exigé des premiers, mais aussi à ceux de 331, de 433 et de 830 euros demandés aux seconds ainsi qu’aux membres de leur famille.

43.

S’il est exact que le dispositif de la requête ne vise que les droits exigés des «ressortissants de pays tiers et des membres de leur famille qui sollicitent le statut de résident de longue durée», sans faire référence à l’obtention d’un titre de séjour pour le ressortissant qui bénéficie déjà du statut de résident de longue durée dans un premier État membre, ce serait faire preuve d’un formalisme exagéré que de sanctionner cette imprécision rédactionnelle par l’irrecevabilité partielle du recours, alors que, d’une part, les «membres de la famille», expressément mentionnés dans le dispositif, ne sont concernés que par le chapitre III de la directive et, d’autre part, les conclusions de la requête introduite par la Commission ont permis au Royaume des Pays-Bas d’identifier clairement les obligations auxquelles la Commission lui reprochait d’avoir manqué et, par voie de conséquence, de présenter ses observations en défense afin de réfuter les griefs soulevés.

44.

En conséquence, nous proposons le rejet de l’exception d’irrecevabilité.

45.

Nous en venons, à présent, à l’examen du bien-fondé du recours.

B – Sur le bien-fondé du recours

46.

L’examen du bien-fondé du recours suppose, dans un premier temps, de déterminer s’il existe une obligation pour les États membres de limiter le montant des droits exigés des ressortissants de pays tiers pour la délivrance de documents de séjour. Si l’existence d’une telle obligation devait être reconnue, nous serions amené, dans un second temps, à rechercher si le Royaume des Pays-Bas a violé cette obligation en appliquant aux ressortissants de pays tiers les droits fiscaux énumérés dans le tableau figurant au point 15 des présentes conclusions.

1. Sur l’obligation pour les États membres de limiter le montant des droits exigés des ressortissants de pays tiers pour la délivrance de documents de séjour

47.

La proposition de directive mentionnait que les permis de séjour devaient être délivrés à titre gratuit ou contre le versement d’une somme ne dépassant pas les droits et les taxes exigés des nationaux pour la délivrance des cartes d’identité ( 20 ).

48.

Cette précision n’a pas été reprise dans la directive qui ne comporte pas de disposition limitant la faculté pour les États membres de demander aux ressortissants de pays tiers ou aux membres de leur famille le paiement de droits ( 21 ). Cette suppression reflète le souhait de certains États membres de limiter la portée de l’égalité de traitement entre les ressortissants de pays tiers, résidents de longue durée, et les citoyens de l’Union ( 22 ).

49.

En l’absence de disposition particulière dans la directive, il est acquis que les États membres disposent d’une marge de manœuvre pour subordonner la délivrance des documents de séjour à la perception de droits et pour fixer le montant de ceux-ci. Ainsi, la directive n’interdit aux États membres ni de délivrer ces documents gratuitement ni, à l’inverse, de demander le paiement de droits. Il reste à déterminer si cette marge de manœuvre est illimitée ou, au contraire, encadrée.

50.

La citoyenneté de l’Union étant liée à la possession de la nationalité d’un État membre, le statut juridique qui en découle ne peut être appliqué aux ressortissants de pays tiers. Il nous paraît donc établi que le régime issu de la directive 2004/38, qui prévoit la gratuité des droits ou leur équivalence avec les droits exigés des nationaux, ne leur est pas applicable ( 23 ).

51.

Il est clair, également, qu’il n’est pas possible d’appliquer aux ressortissants de l’ensemble des pays tiers le régime de protection spécifique applicable aux ressortissants dont les pays sont liés à l’Union par un accord d’association leur conférant un statut privilégié. Il ne peut, en particulier, être déduit de la jurisprudence de la Cour censurant, sur le fondement de dispositions particulières, la différence de traitement pratiquée, pour la tarification des documents de séjour, entre les ressortissants turcs et les citoyens de l’Union un principe général d’égalité de traitement dont pourrait bénéficier tout ressortissant d’un pays tiers, résident de longue durée. C’est, en effet, sur le fondement de la règle spécifique de «standstill» prévue à l’article 13 de la décision no 1/80, qui interdit l’introduction de nouvelles restrictions concernant les conditions d’accès à l’emploi des travailleurs et des membres de leur famille, que la Cour, dans son arrêt du 17 septembre 2009, Sahin ( 24 ), a énoncé que les ressortissants turcs ne pouvaient se voir imposer des obligations nouvelles disproportionnées par rapport à celles prévues pour les citoyens de l’Union ( 25 ). L’arrêt Commission/Pays-Bas, précité, est également fondé sur l’application de cette condition de proportionnalité, combinée avec la règle de non-discrimination figurant à l’article 9 de l’accord d’association et à l’article 10, paragraphe 1, de la décision no 1/80.

52.

Pour autant, nous ne pensons pas qu’il faille déduire de ces différences de statut qu’aucune assimilation ne pourrait être effectuée entre les droits des ressortissants de pays tiers et ceux des citoyens de l’Union et que, tandis qu’elle limite le montant des droits pouvant être demandés aux seconds lorsqu’ils demandent la délivrance d’un document de séjour, la législation de l’Union abandonnerait au pouvoir discrétionnaire des États membres le soin de fixer le montant des droits exigés des premiers lorsqu’ils sollicitent l’obtention de documents similaires.

53.

Nous estimons, au contraire, que deux séries de limites encadrent la marge de manœuvre des États membres.

54.

En premier lieu, la marge de manœuvre reconnue aux États membres ne doit pas être utilisée par ceux-ci d’une manière qui porterait atteinte à l’objectif de la directive et à son effet utile.

55.

Or, la directive, adoptée sur le fondement de l’article 63, premier alinéa, points 3 et 4, CE, crée un processus d’intégration graduelle, dans l’État membre d’accueil, des ressortissants de pays tiers qui y sont régulièrement et durablement installés. Nous rappelons que le quatrième considérant de la directive qualifie l’intégration de ces ressortissants d’«élément clé pour promouvoir la cohésion économique et sociale, objectif fondamental de la Communauté, énoncé dans le traité».

56.

Pour l’accomplissement de cet objectif, la directive procède par voie de rapprochement de la situation du résident de longue durée avec celle du citoyen de l’Union, en reconnaissant au premier certains droits équivalents à ceux du second. Cette logique d’assimilation ressort clairement du deuxième considérant de la directive, qui fait référence à la réunion extraordinaire de Tampere des 15 et 16 octobre 1999, à l’issue de laquelle le Conseil européen a proclamé que le statut juridique des ressortissants de pays tiers devrait être rapproché de celui des ressortissants des États membres et qu’une personne résidant légalement dans un État membre, pendant une période à déterminer, et titulaire d’un permis de séjour de longue durée, devrait se voir octroyer dans cet État membre un ensemble de droits uniformes «aussi proches que possible de ceux dont jouissent les citoyens de l’Union». Par ailleurs, le douzième considérant de la directive prévoit que, «[a]fin de constituer un véritable instrument d’intégration dans la société dans laquelle le résident de longue s’est établi, [celui-ci] devrait jouir de l’égalité de traitement avec les citoyens de l’État membre dans un large éventail de domaines économiques et sociaux, selon les conditions pertinentes définies par [cette] directive» ( 26 ).

57.

La directive facilite, en outre, la libre circulation des ressortissants des pays tiers, résidents de longue durée, au sein de l’Union. Dans cette optique, le dix-huitième considérant de la directive précise que «[l]’établissement des conditions auxquelles est soumis le droit de séjour dans un autre État membre des ressortissants de pays tiers qui sont résidents de longue durée devrait contribuer à la réalisation effective du marché intérieur en tant qu’espace où la libre circulation de toutes les personnes est assurée. Il pourrait aussi constituer un facteur de mobilité important, notamment sur le marché du travail de l’Union».

58.

Traduisant cet objectif d’assimilation, la directive prévoit l’égalité de traitement entre les résidents de longue durée et les nationaux dans différents domaines, qui sont énumérés à son article 11, paragraphe 1, sous a) à h), et met en place une protection contre l’expulsion, selon des modalités définies à son article 12. Elle reconnaît aux ressortissants de pays tiers jouissant du statut de résident de longue durée dans un État membre le droit de séjourner dans un autre État membre, en étant accompagnés ou rejoints par les membres de leur famille.

59.

Ces droits sont conférés sous certaines conditions de fond et de procédure qui sont précisées par la directive. Les articles 4, paragraphe 1, et 5, paragraphe 1, de la directive, relatifs aux conditions d’acquisition du statut de résident de longue durée, prévoient que ce statut est accordé au ressortissant d’un pays tiers qui a résidé dans l’État membre d’accueil, de manière légale et ininterrompue, pendant les cinq années antérieures à l’introduction de la demande et qui dispose de ressources stables, régulières et suffisantes ainsi que d’une assurance maladie. L’article 5, paragraphe 2, de la directive permet, en outre, aux États membres d’exiger le respect de «conditions [ ( 27 )] d’intégration conformément à leur droit national». L’article 7, paragraphe 1, de la directive dispose que la demande doit être introduite auprès de l’autorité compétente, accompagnée des pièces justificatives, «à déterminer par le droit national», prouvant que le demandeur remplit les conditions énumérées aux articles 4 et 5 de la directive ou attestant de conditions de logement appropriées, ainsi que, si nécessaire, d’un document de voyage valide ou d’une copie certifiée conforme de celui-ci. Les articles 14 et 15 de la directive fixent les conditions d’acquisition, par le ressortissant d’un pays tiers jouissant du statut de résident de longue durée dans un État membre, du droit de séjourner dans un autre État membre, en prévoyant, notamment, que les États membres peuvent exiger du demandeur qu’il fournisse la preuve qu’il dispose de ressources stables, régulières et suffisantes ainsi que d’une assurance maladie et qu’il satisfasse à des «mesures [ ( 28 )] d’intégration conformément à leur droit national».

60.

Cette énumération est limitative. Le dix-septième considérant de la directive, qui précise que «[l]’harmonisation des conditions d’acquisition du statut de résident de longue durée favorise la confiance mutuelle entre États membres [et que] [l]a possibilité d’appliquer des dispositions nationales plus favorables n’est pas exclue par le traité», exclut, a contrario, toute faculté pour les États membres de prévoir des réglementations plus restrictives. Nous rappelons que le dixième considérant de la directive prévoit, en outre, que les procédures régissant l’examen de la demande d’acquisition du statut de résident de longue durée «ne devraient pas constituer un moyen pour empêcher l’exercice du droit de résidence». Dès lors qu’ils remplissent les conditions prévues, les ressortissants de pays tiers ont le droit d’obtenir le statut de résident de longue durée ( 29 ).

61.

Le droit à la reconnaissance du statut étant la règle générale, dès lors qu’est remplie la condition tenant à la durée de résidence prévue à l’article 4 de la directive, nous estimons, en outre, par analogie avec la solution dégagée par la Cour dans l’arrêt du 4 mars 2010, Chakroun ( 30 ), au sujet de la directive 2003/86/CE du Conseil, du 22 septembre 2003, relative au droit au regroupement familial ( 31 ), que les conditions auxquelles les États membres peuvent subordonner l’acquisition du statut de résident de longue durée doivent faire l’objet d’une interprétation stricte ( 32 ).

62.

Nous considérons, dans ces conditions, que, pour être conforme aux dispositions de la directive, la tarification des frais exigés des ressortissants de pays tiers ne doit avoir ni pour objet ni pour effet d’ajouter une condition supplémentaire pour l’obtention du statut de résident de longue durée.

63.

Nous en déduisons qu’il n’est pas possible d’exiger, lors de la demande d’obtention du statut de résident de longue durée, des droits à ce point élevés que les ressortissants ne disposant pas des capacités financières suffisantes ne pourraient pas s’en acquitter. Une telle exigence constituerait un moyen indirect pour limiter l’exercice des droits conférés par la directive ou le réserver aux ressortissants de pays tiers les plus aisés, alors que la directive ne prévoit pas de condition financière autre que celle de disposer de ressources stables, régulières et suffisantes pour subvenir à ses propres besoins ou à ceux des membres de sa famille sans recourir au système d’aide sociale de l’État membre concerné.

64.

Pour les mêmes raisons, le droit de séjour dans un second État membre des ressortissants de pays tiers jouissant du statut de résident de longue durée dans un premier État membre ne nous paraît pas pouvoir être limité par des droits excessifs.

65.

Il en va de même du droit de séjour des membres de la famille. L’article 16, paragraphe 1, de la directive prévoit que le résident de longue durée qui exerce son droit de séjour dans un autre État membre pour une période supérieure à trois mois peut être accompagné ou rejoint par les membres de sa famille qui résidaient avec lui dans le premier État membre d’accueil. L’article 16, paragraphe 5, de cette directive précise que, à défaut de constitution initiale de la famille, la directive 2003/86 s’appliquera. Avant la délivrance du nouveau titre de séjour, les autorités du second État membre sont en droit de vérifier que le membre de la famille dispose d’un titre de séjour de longue durée ou d’un document de voyage valide, qu’il a résidé en tant que membre de la famille d’un résident de longue durée dans le premier État membre et qu’il dispose de ressources stables, régulières et suffisantes ainsi que d’une assurance maladie. Dans la mesure où les conditions limitativement énumérées par la directive sont respectées, le second État membre ne peut plus refuser le séjour que pour des motifs d’ordre public, de sécurité publique ou de santé publique. Il s’ensuit que le droit pour les membres de la famille du résident de longue durée d’accompagner celui-ci ou de le rejoindre ne saurait, à notre sens, être assorti d’une condition supplémentaire tenant au paiement de droits excessifs, sans méconnaître le droit au regroupement familial.

66.

Nous pensons, de surcroît, que l’objectif poursuivi par la directive, visant à faciliter l’intégration des résidents de longue durée par leur assimilation, fût-elle partielle, avec les citoyens de l’Union, doit conduire à traiter les premiers dans des conditions comparables à celles appliquées aux seconds lorsque, en vertu de cette directive, ils demandent, dans des conditions semblables, la délivrance de documents similaires. Même en l’absence de disposition relative à la perception des droits, cet objectif nous paraît rendre illégitime une différence de traitement qui n’est justifiée par aucune raison objective.

67.

La marge de manœuvre reconnue aux États membres nous semble, par ailleurs, être encadrée par une seconde série de limites, tirée du respect des droits fondamentaux.

68.

Il résulte, en effet, d’une jurisprudence constante de la Cour que les exigences découlant de la protection des principes généraux reconnus dans l’ordre juridique de l’Union, au nombre desquels figurent les droits fondamentaux, lient également les États membres lorsqu’ils mettent en œuvre des réglementations de l’Union et que, par suite, ceux-ci sont tenus, dans toute la mesure du possible, d’appliquer ces réglementations dans des conditions qui ne méconnaissent pas lesdites exigences ( 33 ). Le troisième considérant de la directive précise, d’ailleurs, que celle-ci respecte les droits fondamentaux et observe les principes, qui sont reconnus notamment par la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, ainsi que par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Il s’ensuit que les dispositions qui mettent en œuvre la directive doivent être appréciées à la lumière des droits fondamentaux et, plus particulièrement, du principe de non-discrimination.

69.

Rappelé au cinquième considérant de la directive, qui précise que «[l]es États membres devraient mettre en œuvre les dispositions de [celle-ci] sans faire de discrimination fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle», le principe de non-discrimination nous semble s’opposer à l’instauration de droits dont les montants seraient dissuasifs pour les ressortissants de pays tiers ne disposant pas de capacités financières suffisamment importantes.

70.

À la lumière de ces considérations, nous estimons que la marge de manœuvre dont disposent les États membres pour fixer le montant des droits pouvant être exigés des ressortissants des pays tiers est nécessairement limitée par l’obligation de ne pas prévoir de droits qui seraient soit, par eux-mêmes, excessifs, soit disproportionnés par rapport aux droits exigés des citoyens de l’Union pour la délivrance de documents similaires.

71.

Le Royaume des Pays-Bas et la République hellénique opposent à cette conclusion deux séries d’objections. Ils font valoir, d’une part, que la délivrance d’un document de séjour a, pour les ressortissants de pays tiers, un effet constitutif, impliquant un pouvoir d’appréciation des autorités nationales, alors qu’elle n’a qu’un effet déclaratif pour les citoyens de l’Union. Ils soutiennent, d’autre part, que les États membres doivent pouvoir répercuter, sur les demandeurs, le coût que représente la délivrance du titre de séjour. Ces deux objections nous paraissent devoir être écartées pour les raisons suivantes.

72.

La première objection repose sur une distinction théorique qui nous paraît contestable, tant dans son principe que dans les effets qui s’y attacheraient.

73.

D’abord, nous pensons que, en son principe, la distinction entre l’effet simplement constitutif de la délivrance d’un titre de séjour à la «généralité des étrangers» ( 34 ) et l’effet déclaratif de la délivrance d’un document similaire à un citoyen de l’Union n’est plus véritablement conforme aux évolutions du droit de l’Union. La Cour a effectivement énoncé, dans son arrêt Sagulo e.a., précité, d’une part, que la délivrance d’un titre de séjour à un citoyen de l’Union, qui dispose d’un droit de circulation et de séjour dans les États membres directement conféré par le droit de l’Union, n’a qu’un effet déclaratif et, d’autre part, qu’un document de cette nature ne saurait être assimilé à une autorisation de séjour impliquant un pouvoir d’appréciation des autorités nationales telle qu’elle est prévue pour la généralité des étrangers ( 35 ). Toutefois, selon nous, si la première proposition demeure exacte, la seconde n’est plus pleinement conforme à l’état actuel du droit.

74.

Il convient, en effet, de tenir compte de ce que diverses dispositions sont venues conférer directement à certains ressortissants de pays tiers un droit de séjour, indépendamment de la délivrance du titre correspondant par les autorités de l’État membre d’accueil. Prenant appui sur ces dispositions, la Cour a, par analogie, transposé à ces ressortissants la solution qu’elle avait dégagée pour les citoyens de l’Union. Ainsi a-t-elle jugé, par une première série d’arrêts, que, en application de la décision no 1/80, le titre de séjour délivré aux ressortissants turcs ne saurait avoir qu’une valeur déclarative et probante ( 36 ). Elle a, par une seconde série d’arrêts, étendu l’effet simplement déclaratif du titre de séjour aux ressortissants de pays tiers qui sont membres de la famille de citoyens de l’Union. De l’énonciation selon laquelle «le droit d’entrer sur le territoire d’un État membre accordé au ressortissant d’un pays tiers, conjoint d’un ressortissant d’un État membre, découle du seul lien familial», la Cour a, en effet, déduit que la délivrance d’un titre de séjour doit être considérée non comme un acte constitutif de droits, mais comme un acte destiné à constater la situation individuelle d’un ressortissant d’un pays tiers au regard du droit communautaire ( 37 ).

75.

Au vu des droits désormais conférés aux ressortissants de l’ensemble des pays tiers par la directive, il est permis, surtout, de se demander si la délivrance d’un titre de séjour à ces ressortissants continue à produire un effet constitutif, en ce qu’elle serait créatrice de droits, ou présente dorénavant un caractère seulement déclaratif, en ce qu’elle se bornerait à reconnaître une situation préexistante. Il convient de relever que l’article 9, paragraphe 6, de la directive dispose que l’expiration du permis de séjour de résident de longue durée n’entraîne en aucune façon le retrait ou la perte du statut de résident de longue durée et que l’article 7, paragraphe 3, de cette directive prévoit que, lorsque les conditions prévues à ses articles 4 et 5 sont remplies et si la personne ne représente pas une menace au sens de son article 6, l’État membre «accorde» le statut de résident de longue durée au ressortissant concerné. Sans méconnaître la marge de manœuvre laissée aux États membres tant pour la définition des conditions d’acquisition du statut que pour la détermination des droits conférés aux ressortissants de pays tiers et la définition des motifs d’ordre public ou de sécurité publique justifiant le refus du statut, nous estimons que l’emploi du présent de l’indicatif à cet article 6, qui, au regard de la technique rédactionnelle habituellement suivie par le législateur de l’Union, a la valeur d’un impératif, implique l’existence d’une obligation, exclusive de liberté d’appréciation, d’accorder le statut une fois les conditions remplies, de sorte qu’il ne nous paraît pas possible de qualifier de discrétionnaire le pouvoir reconnu aux autorités nationales pour la délivrance des titres de séjour en application de la directive ( 38 ).

76.

À supposer même que l’on considère, néanmoins, que la délivrance d’un titre de séjour de résident de longue durée emporte un effet constitutif, nous ne pensons pas que soit établie l’existence d’un rapport de proportionnalité, voire, seulement, d’une quelconque corrélation entre l’importance des effets juridiques d’un acte et le coût de cet acte. En d’autres termes, il n’est pas démontré que plus un acte délivré par une autorité produit d’effets juridiques, plus il est coûteux pour l’autorité qui le délivre.

77.

La seconde objection prise de ce que la délivrance d’un document de séjour à un résident de longue durée ou à un membre de sa famille devrait tenir compte du coût effectif qu’engendrent les demandes pour les États membres ne nous convainc pas plus.

78.

Il n’est pas inutile de constater, en premier lieu, que, si elle ne reprend pas la disposition relative à la gratuité des droits ou à leur plafonnement, qui figurait dans la proposition de directive, la directive ne comporte pas non plus la reprise des amendements du Parlement qui proportionnaient les droits au montant des coûts administratifs. Nous ne voyons pas, dès lors, sur quel fondement juridique peut reposer ce raisonnement qui ne nous paraît pas pouvoir être déduit d’un principe général. Nous ne cacherons pas, à cet égard, la perplexité que nous inspire le rapprochement, fût-il limité à la question de l’imputation des coûts administratifs, fait par le Royaume des Pays-Bas, entre la situation des ressortissants de pays tiers qui demandent l’obtention d’un document de séjour et celle des bovins et des porcs pour lesquels une certification est nécessaire en vue de leur abattage.

79.

Nous estimons, en second lieu, que le Royaume des Pays-Bas ne démontre pas que les vérifications auxquelles il procède seraient beaucoup plus importantes que dans le cas d’un citoyen de l’Union. Il fonde sa démonstration sur la comparaison avec la situation du citoyen de l’Union qui demande le bénéfice du droit de séjour permanent prévu à l’article 16 de la directive 2004/38 et expose que, lorsque la demande est présentée par un ressortissant d’un pays tiers, il convient de procéder aux vérifications suivantes, à savoir le paiement des droits, le remplissage complet du formulaire, la preuve de ce que le demandeur a séjourné de manière ininterrompue pendant cinq ans sur le territoire du Royaume des Pays-Bas et qu’il y possède toujours sa résidence principale, la vérification que le droit de séjour n’était pas provisoire ou formellement limité, la preuve qu’il dispose de moyens de subsistance permanents, autonomes et suffisants, qu’il est affilié à une caisse de maladie et que son casier judiciaire est vierge. Il peut être objecté à cet argument que plusieurs des vérifications auxquelles le Royaume des Pays-Bas déclare procéder sont identiques à celles auxquelles il peut être procédé, en vertu de la directive 2004/38, lors de la délivrance d’une attestation d’enregistrement au citoyen de l’Union qui entend bénéficier du droit de séjour de plus de trois mois ou de la délivrance d’une carte de séjour aux membres de sa famille ( 39 ). Nous en déduisons qu’il n’existe pas de raisons objectives qui pourraient justifier une différence de traitement entre les citoyens de l’Union et les ressortissants de pays tiers tenant leurs droits de la directive.

80.

Par ailleurs, si la République hellénique soutient que les droits perçus pour la délivrance d’un permis de séjour couvriraient le coût des services administratifs fournis non seulement pour le contrôle et la certification du droit de séjour, mais aussi pour l’intégration des personnes, il y a lieu d’observer que le Royaume des Pays-Bas n’a pas soutenu, dans ses mémoires, que les frais exigés des ressortissants de pays tiers engloberaient le coût des mesures d’intégration. De surcroît, si la directive prévoit la faculté pour les États membres d’exiger que les ressortissants des pays tiers «satisfassent à des conditions [ ( 40 )] d’intégration conformément à leur droit national» et s’il a été soutenu que cette disposition pouvait autoriser ces États membres à exiger des ressortissants des pays tiers qu’ils payent, partiellement ou en totalité, le coût des mesures d’intégration ( 41 ), il nous semble que la marge de manœuvre ainsi laissée auxdits États membres ne peut justifier qu’il soit porté atteinte à l’objectif et à l’effet utile de la directive par l’instauration de droits excessifs ou disproportionnés.

81.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, nous sommes d’avis que les États membres ne peuvent appliquer aux ressortissants de pays tiers qui sollicitent la délivrance de documents de séjour en application de la directive des droits qui seraient soit excessifs par eux-mêmes, soit disproportionnés par rapport à ceux que les ressortissants nationaux et les citoyens de l’Union qui exercent leur droit à la libre circulation doivent acquitter pour l’obtention de documents similaires.

82.

Il reste à déterminer si le Royaume des Pays-Bas a manqué à cette obligation.

2. Sur le caractère excessif ou disproportionné des droits réclamés par le Royaume des Pays-Bas

83.

Dès lors que nous estimons, pour les raisons précédemment exposées, que la directive impose aux États membres une obligation de ne pas appliquer des droits disproportionnés par rapport à ceux exigés des ressortissants des États membres pour la délivrance de documents similaires, nous pouvons utilement nous référer à l’appréciation du rapport de proportionnalité à laquelle a procédé la Cour dans son arrêt Commission/Pays-Bas, précité.

84.

Dans cet arrêt, la Cour a considéré comme disproportionnés des droits qui variaient à l’intérieur d’une fourchette dont la valeur la plus faible était supérieure de plus des deux tiers à celle des droits appliqués aux citoyens de l’Union pour la délivrance de documents similaires.

85.

Les droits exigés des ressortissants de pays tiers et des membres de leur famille, dont le Royaume des Pays-Bas ne conteste pas qu’ils sont de 7 à 27 fois supérieurs aux montants prévus pour les citoyens de l’Union, nous semblent, a fortiori, devoir être considérés comme excessifs et disproportionnés.

86.

Par conséquent, il y a lieu, selon nous, de déclarer le grief fondé.

VI – Conclusion

87.

Sur la base des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de statuer comme suit:

«1)

En appliquant aux ressortissants de pays tiers qui sollicitent l’acquisition du statut de résident de longue durée aux Pays-Bas et aux ressortissants de pays tiers qui, résidents de longue durée dans un autre État membre, demandent à exercer leur droit de séjour aux Pays-Bas ainsi qu’aux membres de leur famille qui demandent à être autorisés à les accompagner ou à les rejoindre, des droits excessifs et disproportionnés par rapport à ceux qui sont exigés des ressortissants des États membres pour la délivrance de documents similaires, le Royaume des Pays-Bas a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de la directive 2003/109/CE du Conseil, du 25 novembre 2003, relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée.

2)

Le Royaume des Pays-Bas est condamné aux dépens.»


( 1 ) Langue originale: le français.

( 2 ) JO 2004, L 16, p. 44, ci-après la «directive».

( 3 ) Article 4, paragraphe 1, de la directive.

( 4 ) Article 5, paragraphe 1, de la directive.

( 5 ) Article 5, paragraphe 2, de la directive.

( 6 ) Article 6, paragraphe 1, de la directive.

( 7 ) Stb. 2000, no 495.

( 8 ) Stcrt. 2001, no 10.

( 9 ) Voir arrêt du 29 novembre 2001, Commission/Italie (C-202/99, Rec. p. I-9319).

( 10 ) Directive relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO L 158, p. 77).

( 11 ) C-92/07, Rec. p. I-3683.

( 12 ) Proposition présentée par la Commission le 13 mars 2001 [COM(2001) 127 final, ci-après la «proposition de directive»].

( 13 ) Le conseil d’association a été institué par l’accord créant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie, qui a été signé le 12 septembre 1963 à Ankara, par la République de Turquie, d’une part, ainsi que par les États membres de la CEE et la Communauté, d’autre part. Cet accord a été conclu, approuvé et confirmé au nom de la Communauté par la décision 64/732/CEE du Conseil, du 23 décembre 1963 (JO 1964, 217, p. 3685).

( 14 ) Ci-après la «décision no 1/80».

( 15 ) JO L 293, p. 1.

( 16 ) Voir, notamment, arrêts du 5 octobre 2010, Commission/France (C-512/08, Rec. p. I-8833), et Elchinov (C-173/09, Rec. p. I-8889).

( 17 ) Voir, notamment, arrêt du 16 juin 2005, Commission/Italie (C-456/03, Rec. p. I-5335, point 36).

( 18 ) Point 23.

( 19 ) Voir arrêts du 24 mars 1988, Commission/Grèce (240/86, Rec. p. 1835, points 27 et 28); du 22 septembre 1988, Commission/Grèce (272/86, Rec. p. 4875, points 30 à 32), et du 18 octobre 2007, Commission/France (C-441/06, Rec. p. I-8887, points 45 à 52).

( 20 ) Articles 9, paragraphe 3, et 2, paragraphe 4, de la proposition de directive. Cette rédaction a été reprise presque mot pour mot à l’article 25, paragraphe 2, de la directive 2004/38 qui dispose que tout document de séjour «est délivré gratuitement ou contre versement d’un droit ne dépassant pas celui exigé des ressortissants pour la délivrance de documents similaires».

( 21 ) Nous notons que le Parlement européen, dans son rapport sur la proposition de directive du Conseil relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée (A5-0436/2001), avait proposé de rédiger l’article 9, paragraphe 3, comme suit:

«Le permis de séjour de résident de longue durée — CE est délivré contre le versement d’une somme n’excédant pas les coûts administratifs. Celle-ci ne dépasse pas les droits et les taxes exigés des nationaux pour la délivrance des cartes d’identité. Les États membres peuvent prévoir que la délivrance est gratuite.»

De même, l’article 21, paragraphe 4, était amendé de la façon suivante:

«Le permis de séjour est délivré contre le versement d’une somme qui ne dépasse pas les frais administratifs, ni les droits et les taxes exigés des nationaux pour la délivrance des cartes d’identité. Les États membres peuvent délivrer gratuitement ce permis.»

( 22 ) Voir, à ce sujet, Peers, S., et Rogers, N., EU Immigration and Asylum Law, Leyde, p. 627.

( 23 ) Voir, en ce sens, point 54 de nos conclusions présentées le 14 avril 2011 dans l’affaire Ziebell (arrêt du 8 décembre 2011, C-371/08, Rec. p. I-12735).

( 24 ) C-242/06, Rec. p. I-8465.

( 25 ) Point 71.

( 26 ) Ainsi que nous l’avons souligné dans la note en bas de page 36 de nos conclusions présentées le 13 décembre 2011 dans l’affaire Kamberaj (C-571/10), pendante devant la Cour, l’objectif d’intégration est affirmé, de façon similaire, aux deuxième, troisième et sixième considérants de la directive 2011/51/UE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2011, modifiant la directive 2003/109 (JO L 132, p. 1).

( 27 ) Souligné par nous.

( 28 ) Idem.

( 29 ) Voir, en ce sens, Groenendijk, K., «The Long-Term Residents Directive, Denizenship and Integration», Whose Freedom, Security and Justice?, Hart Publishing, 2007, p. 429, spécialement p. 440.

( 30 ) C-578/08, Rec. p. I-1839.

( 31 ) JO L 251, p. 12.

( 32 ) Arrêt Chakroun, précité (point 43).

( 33 ) Arrêt du 11 octobre 2007, Möllendorf et Möllendorf-Niehuus (C-117/06, Rec. p. I-8361, point 78).

( 34 ) L’expression est reprise de l’arrêt du 14 juillet 1977, Sagulo e.a. (8/77, Rec. p. 1495, point 8).

( 35 ) Idem.

( 36 ) Voir en ce sens, notamment, arrêt du 16 mars 2000, Ergat (C-329/97, Rec. p. I-1487, point 62 et jurisprudence citée).

( 37 ) Voir, notamment, arrêt du 14 avril 2005, Commission/Espagne (C-157/03, Rec. p. I-2911, point 28 et jurisprudence citée).

( 38 ) Voir, en ce sens, Illamola Dausà, M., «Égalité et intégration», La politique européenne d’immigration et d’asile: bilan critique cinq ans après le traité d’Amsterdam, Bruylant, Bruxelles, 2005, p. 175. Cet auteur qualifie la compétence des États membres de «compétence liée» (p. 187).

( 39 ) Notons, en particulier, que le droit au séjour de plus de trois mois du citoyen de l’Union qui n’est ni travailleur ni étudiant est soumis à deux conditions quasi identiques à celles exigées pour l’obtention du statut de résident de longue durée, puisque, en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de la directive 2004/38, l’étranger doit démontrer qu’il dispose d’une assurance maladie complète dans l’État membre d’accueil ainsi que de ressources suffisantes pour lui-même et pour les membres de sa famille afin de ne pas devenir une charge pour le système d’assistance sociale de l’État membre d’accueil.

( 40 ) Souligné par nous.

( 41 ) Voir, pour la genèse de cette rédaction, Groenendijk, K., «Legal concepts of integration in EU Migration Law», European Journal of Migration and Law, no 2, vol. 6, 2007, p. 111.