CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO MENGOZZI

présentées le 28 juin 2011 ( 1 )

Affaire C-380/09 P

Melli Bank plc

contre

Conseil de l’Union européenne

«Pourvoi — Mesures restrictives prises à l’encontre de la République islamique d’Iran dans le but d’empêcher la prolifération nucléaire — Extension des mesures restrictives aux entités ‘détenues ou contrôlées’ par des personnes ou des entités reconnues comme participant, étant directement associées ou apportant un appui aux activités nucléaires de l’Iran — Filiale détenue intégralement — Pouvoir d’appréciation du Conseil pour l’inscription sur les listes — Motifs de l’inscription — Proportionnalité — Obligation de motivation»

Table des matières

 

I – Les antécédents du litige et l’arrêt attaqué

 

II – La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

 

III – Analyse

 

А – Sur le troisième moyen tiré d’une erreur de droit quant à l’interprétation du critère visant à déterminer si la requérante est «détenue ou contrôlée» au sens de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007

 

1. Argumentation des parties

 

2. Appréciation

 

B – Sur le premier moyen tiré d’une erreur de droit dans l’interprétation de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 et sur le deuxième moyen tiré d’une violation du principe de proportionnalité

 

1. Argumentation des parties

 

2. Appréciation

 

а) Sur la première branche du premier moyen

 

b) Sur la seconde branche du premier moyen et le deuxième moyen

 

C – Sur le quatrième moyen tiré d’une erreur d’appréciation quant à l’obligation de motivation de la décision litigieuse

 

1. Argumentation des parties

 

2. Appréciation

 

IV – Sur les dépens

 

V – Conclusion

1. 

Le présent pourvoi, introduit par la Melli Bank plc (ci-après la «Melli Bank» ou la «requérante»), tend à l’annulation de l’arrêt Melli Bank/Conseil ( 2 ) (ci-après l’«arrêt attaqué»), que le Tribunal de première instance des Communautés européennes a adopté dans les affaires jointes T-246/08 et T-332/08. Par cet arrêt, le Tribunal a rejeté, dans l’affaire T-246/08, le recours en annulation de la requérante introduit à l’encontre du point 4 du tableau B de l’annexe de la décision 2008/475/CE du Conseil, du 23 juin 2008, mettant en œuvre l’article 7, paragraphe 2, du règlement (CE) no 423/2007 concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran ( 3 ) (ci-après la «décision litigieuse»), décision par laquelle le Conseil de l’Union européenne (ci-après le «Conseil») a procédé à l’inscription de la requérante sur la liste des entités dont les avoirs doivent être gelés et, dans l’affaire T-332/08, en sus de la demande d’annulation du point 4 du tableau B susmentionné, la demande de déclaration d’inapplicabilité à son égard de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement (CE) no 423/2007 du Conseil, du 19 avril 2007, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran ( 4 ).

I – Les antécédents du litige et l’arrêt attaqué

2.

Il résulte des points 1 et suivants de l’arrêt attaqué que la requérante est une société anonyme immatriculée et ayant son siège social au Royaume-Uni. Elle a commencé ses activités en 2002, à la suite de la transformation de la succursale britannique de la Bank Melli Iran (ci-après la «Bank Melli»). Cette dernière, qui détient intégralement la requérante, est une banque iranienne appartenant à l’État iranien. Melli Bank est, pour sa part, agréée et réglementée par la Financial Services Authority (autorité des services financiers au Royaume-Uni, ci-après la «FSA»).

3.

L’affaire introduite devant le Tribunal est liée à l’application du régime de mesures restrictives instauré en vue de faire pression sur la République islamique d’Iran pour qu’elle mette fin aux activités nucléaires présentant un risque de prolifération et à la mise au point de vecteur d’armes nucléaires (ci-après la «prolifération nucléaire»). Ledit régime trouve son origine dans la résolution 1737 (2006) ( 5 ), du 23 décembre 2006, du Conseil de sécurité des Nations unies (ci-après le «Conseil de sécurité»), dont l’annexe listait des personnes et des entités qui, selon le Conseil de sécurité, étaient impliquées dans la prolifération nucléaire en Iran et dont les fonds et ressources économiques (ci-après les «fonds») doivent être gelés. La liste a été actualisée par la résolution 1747 (2007), du 24 mars 2007, du Conseil de sécurité ( 6 ). Il est à noter que ni la Bank Melli ni la Melli Bank n’étaient inscrites sur cette liste, même après son actualisation.

4.

La résolution 1737 (2006) a été mise en œuvre, pour ce qui concerne l’Union européenne, par la position commune 2007/140/PESC du Conseil, du 27 février 2007, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran ( 7 ). L’article 5, paragraphe 1, sous a), de cette position commune prévoyait le gel des fonds que possédaient, détenaient ou contrôlaient, directement ou indirectement, les entités et personnes désignées par la résolution. L’article 5, paragraphe 1, sous b), de ce même acte étendait cette mesure aux personnes et aux entités reconnues par le Conseil comme participant, étant directement associées ou apportant un appui à la prolifération nucléaire.

5.

Dans la mesure où des compétences de la Communauté européenne étaient aussi concernées, la position commune 2007/140 a été suivie par l’adoption, sur le fondement des articles 60 CE et 301 CE, du règlement no 423/2007. D’un contenu très comparable à celui de la position commune, l’article 7, paragraphe 1, dudit règlement prévoit le gel des fonds appartenant aux personnes, aux entités et aux organismes désignés par la résolution 1737 (2006), ainsi que de tous les fonds que ces personnes, entités ou organismes possèdent, détiennent ou contrôlent. L’article 7, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement no 423/2007 étend cette possibilité de gel des fonds aux personnes, aux entités ou aux organismes désignés par le Conseil et reconnus, conformément à l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la position commune 2007/140, comme participant, étant directement associés ou apportant un appui à la prolifération nucléaire. Les personnes, entités et organismes désignés par le Conseil au titre de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 423/2007 sont listés à l’annexe V dudit règlement.

6.

En vertu de l’article 7, paragraphe 2, sous d), dudit règlement, l’annexe V comprend également les «personnes physiques et morales, entités et organismes […] reconnus […] comme une personne morale, une entité ou un organisme détenu ou contrôlé par une personne, une entité ou un organisme visé aux points a) ou b), y compris par des moyens illicites» et dont les fonds se trouvent, par voie de conséquence, gelés.

7.

L’article 15, paragraphe 2, dudit règlement prévoit, en outre, que «[l]e Conseil, statuant à la majorité qualifiée, établit, révise et modifie [l’annexe V] en pleine conformité avec les décisions du Conseil [adoptées en vertu de l’article 5, paragraphe 1, sous b)] de la position commune 2007/140 […]». Toujours aux termes de cette même disposition, le Conseil doit examiner ladite liste à intervalles réguliers, et au moins tous les douze mois.

8.

L’article 15, paragraphe 3, du règlement no 423/2007 énonce que «[l]e Conseil donne les raisons individuelles et spécifiques pour les décisions prises en vertu du paragraphe 2 et les porte à la connaissance des personnes, des entités et des organismes concernés».

9.

Quelque temps après l’adoption du règlement no 423/2007, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 1803 (2008), du 3 mars 2008 ( 8 ), par laquelle il demande «à tous les États de faire preuve de vigilance s’agissant des activités menées par les institutions financières sises sur leur territoire avec toutes les banques domiciliées en Iran, en particulier la [Bank Melli], ainsi qu’avec leurs succursales et leurs agences à l’étranger, afin d’éviter que ces activités concourent à des activités posant un risque de prolifération» ( 9 ).

10.

Le 23 juin 2008, le Conseil a adopté la position commune 2008/479/PESC ( 10 ), qui a modifié la position commune 2007/140. En vertu de l’annexe de la nouvelle position commune, la Bank Melli ainsi que ses succursales et filiales ont été incluses parmi les entités visées par le gel des fonds conformément à l’article 5, paragraphe 1, sous b), de la position commune 2007/140. Le gel a été maintenu à l’égard de la Bank Melli et de la requérante par la position commune 2008/652/PESC ( 11 ) qui, à nouveau, a modifié la position commune 2007/140.

11.

Le même jour, le Conseil a adopté la décision litigieuse. Aux termes du point 4 du tableau B de l’annexe de ladite décision, le Conseil a inscrit la Bank Melli et ses filiales, en ce y compris la Melli Bank, sur la liste figurant à l’annexe V dudit règlement ( 12 ). Cette inscription a eu pour conséquence le gel des fonds de la requérante.

12.

Ainsi le point 4 du tableau B de l’annexe de la décision litigieuse mentionne-t-il le nom de la requérante, son adresse postale à Londres et la date de son inscription (à savoir le 26 juin 2008). Le Conseil a rédigé comme suit un paragraphe unique contenant les motifs l’ayant poussé à inscrire la Bank Melli ainsi que ses filiales et succursales sur la liste: la Bank Melli «[a]pporte ou tente d’apporter un soutien financier à des sociétés participant aux programmes nucléaire et de missiles de l’Iran ou achetant des biens destinés à ces programmes […]. La Bank Melli sert de facilitateur pour les activités sensibles de l’Iran. Elle a facilité de nombreux achats de matériels sensibles pour les programmes nucléaire et de missiles iraniens. Elle a fourni une série de services financiers pour le compte d’entités liées aux industries nucléaires et de missiles de l’Iran, y compris l’ouverture de lettres de crédit et la gestion de comptes. La plupart des sociétés précitées sont visées dans les résolutions 1737 et 1747 du [Conseil de sécurité]».

13.

Par requêtes déposées au greffe du Tribunal les 25 juin et 15 août 2008, les recours dans les affaires T-246/08 et T-332/08 ont été introduits. Dans l’affaire T-246/08, la requérante concluait à ce qu’il plaise au Tribunal annuler le point 4 du tableau B de l’annexe de la décision litigieuse et condamner le Conseil aux dépens. Dans l’affaire T-332/08, la requérante concluait à ce qu’il plaise au Tribunal annuler le point 4 du tableau B de l’annexe de la décision litigieuse et, si le Tribunal estimait que l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 est d’application obligatoire, déclarer son inapplicabilité en vertu de l’article 241 CE. La requérante concluait également à la condamnation du Conseil aux dépens. Les deux affaires ont été jointes aux fins de la procédure orale et de l’arrêt par ordonnance en date du 15 décembre 2008.

14.

Dans l’affaire T-246/08, la requérante soulevait deux moyens, l’un tiré d’une violation du principe de proportionnalité, l’autre tiré de la violation du principe de non-discrimination. Dans l’affaire T-332/08, elle soutenait que l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 423/2007 ne saurait être considéré comme d’application obligatoire, mais que, si tel était le cas, il serait alors contraire au principe de proportionnalité et donc inapplicable en vertu de l’article 241 CE; par ailleurs, la requérante invoquait une violation, par le Conseil, de son obligation de motivation.

15.

Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté l’ensemble des moyens soulevés dans les deux affaires et condamné la requérante à supporter les dépens exposés par le Conseil, y compris ceux afférents aux procédures de référé ( 13 ).

II – La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

16.

Le 25 septembre 2009, la Melli Bank a introduit un pourvoi contre l’arrêt attaqué.

17.

Les conclusions de la requérante tendent à ce qu’il plaise à la Cour annuler l’arrêt attaqué, accueillir les recours formés dans les affaires T-246/08 et T-332/08, annuler le point 4 du tableau B de l’annexe de la décision litigieuse, déclarer l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 inapplicable si la Cour constate qu’il a un effet obligatoire et condamner le Conseil aux dépens du pourvoi et de la procédure devant le Tribunal.

18.

Dans leur mémoire en réponse, le Conseil, partie défenderesse en première instance, la République française, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, ainsi que la Commission européenne, parties intervenantes en première instance au soutien du Conseil, concluent à ce qu’il plaise à la Cour rejeter le pourvoi et condamner la Melli Bank aux dépens.

19.

Le dépôt d’un mémoire en réplique a été autorisé dans le cadre de la présente procédure devant la Cour. Toutes les autres parties, à l’exception du Royaume-Uni, ont déposé un mémoire en duplique.

20.

À l’exception du Royaume-Uni, toutes les parties ont été entendues lors de l’audience qui s’est tenue devant la Cour le 29 mars 2011.

III – Analyse

21.

Dans le cadre du présent pourvoi, la requérante soulève quatre moyens. Le premier moyen est tiré d’une erreur de droit dans l’interprétation de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007. Le deuxième moyen est tiré d’une violation du principe de proportionnalité. Le troisième moyen est tiré d’une erreur de droit dans la formulation et l’application du critère visant à déterminer si la requérante est bien détenue ou contrôlée par sa société mère au sens dudit article. Le quatrième moyen est tiré d’une erreur de droit quant à l’appréciation, par le Tribunal, de l’obligation, à la charge du Conseil, de motiver la décision portant inscription de la requérante sur la liste des entités dont les fonds doivent être gelés. Pour une meilleure compréhension de l’articulation générale du pourvoi, je commencerai par examiner le troisième moyen.

A – Sur le troisième moyen tiré d’une erreur de droit quant à l’interprétation du critère visant à déterminer si la requérante est «détenue ou contrôlée» au sens de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007

1. Argumentation des parties

22.

Par ce moyen, la requérante conteste l’interprétation, à laquelle le Tribunal s’est livré aux points 119 et suivants de l’arrêt attaqué, du critère mentionné à l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 et sur le fondement duquel le gel de ses fonds a été décidé par le Conseil. En substance, elle soutient que le Tribunal a jugé à bon droit que la question exacte était celle de savoir si elle peut être amenée avec une probabilité non négligeable à contourner l’effet des mesures adoptées à l’encontre de la société mère, mais qu’il n’a pas fait une application correcte de ce critère, en donnant notamment une importance inconsidérée à la capacité de la Bank Melli de nommer les directeurs de la requérante, car cela ne constitue pas un facteur déterminant pour établir si elle est détenue ou contrôlée par la Bank Melli. Pour ce faire, la requérante réitère un certain nombre d’arguments d’ordre factuel, déjà avancés en première instance, et qui ont notamment pour objectif de contester le rejet par le Tribunal de l’efficacité des mesures alternatives, pour la plupart ex post, suggérées par la requérante. En n’appliquant pas correctement le critère susmentionné, le Tribunal a commis une erreur de droit qui a pour effet d’empêcher toute analyse au cas par cas, contrairement à ce que préconisait pourtant le Tribunal au point 69 du même arrêt. En outre, la requérante considère l’invocation, par le Tribunal, de la jurisprudence consacrée aux conditions de l’imputation à une société mère du comportement anticoncurrentiel de sa filiale comme inappropriée, car, contrairement à la situation de ces dernières, appliquer à l’encontre de la requérante une présomption selon laquelle, du fait qu’elle la détient à 100 %, sa société mère exerce sur elle une influence déterminante irait à l’encontre de ses droits de la défense. Cela violerait lesdits droits, car la Melli Bank n’a pas eu la possibilité de présenter des observations au Conseil ni de répondre aux allégations formulées à son encontre. Considérer que la filiale risque de contourner des mesures restrictives adoptées à l’encontre de la société mère serait, par ailleurs, contraire au principe de la présomption d’innocence tel que consacré par l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après la «CEDH») et par l’article 48 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. En tout état de cause, la requérante conclut que le Conseil a commis une erreur de droit en n’appliquant pas correctement le bon critère lorsqu’il a décidé de geler ses fonds au titre de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007.

23.

Le Conseil et les autres parties à la procédure concluent au rejet du présent moyen. La Commission avance que la requérante sollicite une nouvelle appréciation factuelle du litige sans avoir pour autant établi une inexactitude matérielle ou une dénaturation des faits qui ressortirait de l’analyse du Tribunal. La République française et la Commission considèrent que la requérante, lorsqu’elle a articulé le présent moyen, n’a pas démontré d’erreur de droit imputable au Tribunal. Si la République française, le Royaume-Uni et la Commission partagent, en substance, l’approche du Tribunal et jugent qu’il a fait une application mesurée de la jurisprudence pertinente en matière de droit de la concurrence, ils suggèrent néanmoins que, étant donné que le critère présente les caractéristiques d’une alternative — «contrôlé ou détenu» –, et étant donné qu’il apparaît clairement que l’entité en question est détenue par une entité déjà inscrite au titre de l’article 7, paragraphe 2, sous a) ou b), du règlement no 423/2007, il n’est pas nécessaire, pour le Conseil, de procéder à un examen complémentaire et de prouver qu’elle est également contrôlée ni de prouver que la filiale risque de contourner les mesures visant la société mère. Lesdites parties n’ont toutefois pas tiré de cet argument de conséquences juridiques particulières pour le présent pourvoi. Le Conseil, pour sa part, rappelle que les mesures restrictives ne revêtent pas, aux termes de la jurisprudence du juge communautaire, un caractère pénal et que l’argument tiré de la violation de la présomption d’innocence de la requérante est dès lors inopérant.

2. Appréciation

24.

La Cour est ici invitée à préciser le critère susceptible de motiver l’inscription d’une entité au titre de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 ( 14 ). Je relève immédiatement que, ainsi qu’il a été jugé par le Tribunal ( 15 ), il ressort clairement du libellé de ce littera que l’inscription de ces entités n’est pas motivée par leur participation ou leur soutien à la politique de prolifération nucléaire menée par la République islamique d’Iran, mais seulement par le fait que ces entités sont «détenues ou contrôlées» par des entités qui ont été, elles-mêmes et elles seules, reconnues comme participant, étant directement associées ou apportant un appui à ladite politique. De plus, le critère est formulé de manière clairement alternative. Dans le cadre de la présente affaire, c’est le critère de la détention au sens dudit littera qui doit être interprété.

25.

Il ressort de l’arrêt attaqué que le Tribunal a jugé nécessaire de procéder à une lecture enrichie du critère de la détention. Après avoir rappelé la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle une disposition de droit de l’Union doit être interprétée non seulement à la lumière de son libellé, mais également de son contexte et des objectifs qu’elle poursuit ( 16 ), il a considéré que, pour ce qui concerne le fait d’être détenu par une entité dont les fonds sont gelés au titre de l’article 7, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement, la seule détention formelle pouvait ne pas suffire. Une telle approche me semble raisonnable, compte tenu du fait que les hypothèses de détention ne se résument pas toutes, comme dans le cas d’espèce, à une participation à hauteur de 100 % de la société mère dans le capital de sa filiale. Dans un tel cas, en effet, il existe une présomption selon laquelle la détention intégrale va de pair avec la capacité de la société mère d’influer sur la politique décisionnaire de sa filiale, alors que, dans des cas de participation au capital d’un niveau inférieur, cette capacité pourrait paraître moins évidente.

26.

Le Tribunal a ainsi affirmé qu’«il convient de rechercher si, du fait qu’elle est détenue par la [Bank Melli], la requérante peut être amenée, avec une probabilité non négligeable, à contourner l’effet des mesures adoptées à l’encontre de son entité mère» ( 17 ). À une interprétation strictement littérale de la disposition en question, aux termes de laquelle le seul constat de la détention pourrait suffire à motiver l’inscription d’une entité, le Tribunal a préféré une interprétation téléologique, tenant compte de l’objectif poursuivi par le règlement. C’est dans ce contexte précis que le Tribunal, tout en soulignant la spécificité du domaine dans lequel la mesure restrictive frappant la requérante est intervenue, s’est inspiré de la jurisprudence de la Cour relative à l’imputabilité du comportement anticoncurrentiel d’une filiale à sa société mère. Comme j’ai eu l’occasion de le rappeler récemment dans un autre contexte ( 18 ), il ressort de cette jurisprudence que, dans le cas particulier où une société mère détient 100 % du capital de sa filiale ayant commis une infraction aux règles du droit de la concurrence de l’Union, d’une part, cette société mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale ( 19 ) et, d’autre part, il existe une présomption réfragable selon laquelle ladite société mère exerce effectivement une telle influence ( 20 ).

27.

L’attitude du Tribunal m’apparaît empreinte de prudence, et ce à double titre. En premier lieu, par l’interprétation qu’il en a fournie, il permet d’aller au-delà d’une application automatique du critère de la détention et va chercher à en analyser l’incidence sur le fonctionnement et le processus décisionnel de la filiale. En second lieu, il n’a pas fait une transposition de la jurisprudence de la Cour relative au droit de la concurrence mais, conscient au contraire des différences fondamentales entre les deux domaines, s’en est simplement inspiré. Selon un constat établi par le Tribunal et qui n’a été contesté ni devant lui ni à l’occasion du pourvoi, la requérante est détenue à 100 % par la Bank Melli — dont il est constant qu’elle a été inscrite sur la liste des entités dont les avoirs doivent être gelés en vertu de l’article 7, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement no 423/2007 — et cette dernière peut, à ce titre, nommer son personnel dirigeant ( 21 ). Dans ces conditions, il est exact de considérer que la requérante représente un risque non négligeable, naturellement induit par le fait qu’elle est détenue intégralement et confirmé par l’argument tiré du détenteur du pouvoir de nomination du personnel dirigeant, de contourner des mesures adoptées à l’encontre de sa société mère.

28.

Dans la continuité de sa volonté de dépasser une approche strictement formelle du critère de la détention, le Tribunal a poursuivi son analyse en recherchant s’il ressortait du dossier, et plus largement des rapports entre la requérante et sa société mère, des circonstances exceptionnelles susceptibles de contrebalancer l’influence qu’exerce la Bank Melli sur sa filiale par le biais de la nomination de son personnel dirigeant. À cet égard, chacun des arguments de la requérante a été examiné devant le Tribunal, mais aucun n’a paru présenter le niveau de garantie suffisant. À supposer même que la Cour soit compétente, au stade du pourvoi, pour se prononcer à nouveau sur ces arguments qui me paraissent relever davantage d’une appréciation factuelle que d’une qualification juridique des faits, elle devrait alors confirmer la position du Tribunal dans la mesure où il ressort des points 125 à 128 de l’arrêt attaqué que la requérante a soit invoqué des éléments existants, mais insuffisants pour écarter tout risque de contournement, soit proposé des mesures dont le caractère purement prospectif — pour ne pas dire hypothétique — empêche la Cour de porter un jugement éclairé quant à leur faisabilité et à leur efficacité.

29.

À la lumière de ce qui vient d’être exposé, j’ai donc du mal à saisir l’argument de la requérante selon lequel le raisonnement du Tribunal privilégierait une application automatique du critère de la détention au détriment d’une analyse au cas par cas, car, s’il est vrai que le fait que la requérante soit détenue à 100 % est de nature à suggérer que sa société mère exerce nécessairement sur elle une influence qui peut s’avérer déterminante, le Tribunal a recherché précisément les éléments qui lui permettaient de conclure en ce sens — en l’espèce, la nomination du personnel dirigeant de la requérante par l’entité mère et l’existence concomitante d’un risque réel de contournement des mesures adoptées contre la Bank Melli –, en même temps qu’il a analysé les autres circonstances qui auraient été susceptibles de nuancer ce constat et, selon les propres termes du Tribunal, de contrebalancer l’influence décisive de la société mère. La solution qui en découle me paraît ainsi adaptée à la fois au contexte particulier dans lequel les mesures restrictives sont intervenues en l’espèce et à la situation particulière de la requérante quant à la nature, à l’étendue et à l’intensité de ses rapports avec sa société mère.

30.

Le critère appliqué par le Tribunal dans l’arrêt attaqué n’entre pas en contradiction avec la formulation alternative de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007, car, en effet, ce qu’il s’agit d’établir au travers du critère de la détention, c’est le risque d’une influence exercée par la société mère sur sa filiale. Cette notion d’influence me paraît donc être sensiblement différente de celle de contrôle.

31.

La spécificité de la situation de la requérante, dont les avoirs sont gelés non pas parce qu’elle participe ou appuie la prolifération nucléaire en Iran, mais seulement parce qu’elle est une filiale détenue par une telle entité, exige du Conseil en premier lieu, puis du juge communautaire, qu’ils procèdent à une analyse circonstanciée de son cas comme de celui de toutes les entités inscrites au titre de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007. On peut néanmoins envisager que la décision du Conseil de geler les fonds de la requérante a reposé sur une sorte de présomption selon laquelle une filiale détenue à 100 % par une entité participant ou soutenant la prolifération nucléaire et active, de surcroît, dans le domaine bancaire et financier présente des risques réels de subir des pressions de la part de la société mère l’incitant à contourner les mesures restrictives adoptées à son égard. Une telle présomption, je le rappelle, ne peut jouer que dans des cas de détention intégrale et est, comme l’a rappelé le Tribunal, réfragable. Mais, en tout état de cause, la requérante soutient que, si tel est le cas, ses droits de la défense ont été bafoués, car elle n’a jamais été mise en mesure de contester cette présomption, notamment avant l’adoption de la décision litigieuse.

32.

À cet égard, je relève qu’il est de jurisprudence constante que, à l’occasion de l’adoption d’une première décision de gel des fonds, le Conseil satisfait à son obligation de motivation s’il porte à la connaissance des intéressés les motifs ayant poussé à l’adoption de ladite décision à leur encontre de manière concomitante à l’adoption de la mesure ou aussitôt que possible ( 22 ). Plus largement, la Cour a admis que les droits de la défense tels qu’ils doivent être garantis au stade de la procédure préalable ne sont pas absolus et que, en présence de mesures restrictives, une communication des motifs préalable à l’inclusion d’une entité sur une liste «serait de nature à compromettre l’efficacité des mesures de gel de fonds» et que «de telles mesures doivent, par leur nature même, bénéficier d’un effet de surprise» ( 23 ). Si, par l’invocation très générique d’une violation de ses droits de la défense, la requérante entend contester l’absence d’audition préalable, force est de constater qu’une telle audition n’est pas requise de la part du Conseil dans le présent cas de figure pour des raisons tenant à la spécificité des mesures restrictives ainsi qu’à la préservation de leur efficacité. Pour le reste, il suffit de considérer l’avis publié au Journal officiel de l’Union européenne le lendemain de l’adoption de la décision litigieuse pour constater qu’un réexamen pouvait être demandé par la requérante au Conseil ( 24 ). En outre, la requérante a articulé devant le Tribunal une série d’arguments visant à contester l’affirmation selon laquelle, du fait des liens qui l’unissent à la Bank Melli, elle était susceptible de contourner les mesures restrictives adoptées contre cette dernière, arguments que le Tribunal a examinés un par un, s’estimant ainsi suffisamment éclairé pour le faire. Pour l’ensemble de ces considérations, le grief tiré d’une violation des droits de la défense de la requérante ne saurait être accueilli.

33.

Enfin, la requérante soutient que le raisonnement du Tribunal porte atteinte à sa présomption d’innocence, puisqu’il part du postulat qu’elle adoptera nécessairement une attitude contraire aux indications contenues dans le règlement no 423/2007. Sur ce point, je me bornerai à rappeler deux éléments. D’une part, le Tribunal s’est toujours exprimé avec une extrême prudence, affirmant notamment que «la requérante peut être amenée, avec une probabilité non négligeable, à contourner l’effet des mesures adoptées à l’encontre de son entité mère» ( 25 ) et parlant de «risque non négligeable que la [Bank Melli] soit en mesure d’amener la requérante à effectuer des transactions interdites» ( 26 ). Dès lors, la responsabilité du contournement pèserait davantage sur la société mère que sur la requérante, qui est plutôt considérée comme n’ayant pas les moyens de résister à la pression exercée sur elle. D’autre part, la Cour n’a jamais considéré que des mesures restrictives telles que celles en cause dans notre affaire étaient constitutives de sanctions pénales, mais seulement de mesures conservatoires ( 27 ) à l’égard desquelles la présomption d’innocence ne saurait jouer, la requérante n’étant formellement pas accusée ( 28 ).

34.

Pour l’ensemble des raisons qui précèdent, le troisième moyen doit être rejeté comme non fondé.

B – Sur le premier moyen tiré d’une erreur de droit dans l’interprétation de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 et sur le deuxième moyen tiré d’une violation du principe de proportionnalité

1. Argumentation des parties

35.

Par la première branche du premier moyen, la requérante entend contester la conclusion du Tribunal selon laquelle l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 oblige le Conseil à geler les fonds de toutes les entités qui sont détenues ou contrôlées par des entités reconnues comme participant ou apportant un appui à la prolifération nucléaire en Iran. Elle avance, en substance, que le Tribunal s’est contredit en reconnaissant le caractère obligatoire de ladite disposition ( 29 ) tout en affirmant l’existence d’un pouvoir d’appréciation de la part du Conseil des circonstances de l’espèce pour déterminer quelles entités ont la qualité d’entités «détenues ou contrôlées» au sens dudit article ( 30 ). Le règlement envisage, en effet, une approche personnalisée de l’inscription qui n’exige pas de manière automatique et obligatoire le gel des fonds de toutes les entités détenues ou contrôlées, comme le prouve l’article 15, paragraphe 3, du règlement no 423/2007, aux termes duquel le Conseil doit indiquer à l’entité visée au titre de l’article 7, paragraphe 2, sous d), les raisons de son inscription sur la liste des entités dont les fonds doivent être gelés. Le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant ledit article comme ayant un effet obligatoire pour le Conseil, alors que ce dernier a un pouvoir d’appréciation pour déterminer si une filiale, même intégralement détenue, remplit les critères énoncés par cette disposition. La pratique non uniforme du Conseil, qui l’a notamment conduit à n’inscrire que deux des vingt filiales de la Bank Melli, illustre parfaitement que le Conseil n’a pas automatiquement inscrit toutes les entités détenues par cette dernière. Le Conseil dispose donc bien d’une marge d’appréciation pour décider d’inscrire les entités et l’application de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 n’est donc pas obligatoire, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal. La requérante clôt son argumentaire sur ce point en affirmant que le Conseil a commis une erreur de droit en inscrivant la requérante sur la liste, dans la mesure où il a considéré, à tort, être tenu de le faire au titre d’une disposition impérative.

36.

En second lieu, la requérante soutient que l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 étant contraire au principe de proportionnalité, il ne peut être interprété comme une disposition obligatoire (seconde branche du premier moyen) et subsidiairement, si la Cour devait confirmer son caractère obligatoire, il serait contraire au principe de proportionnalité (deuxième moyen), contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal. En tout état de cause, c’est la question de la conformité dudit article au principe de proportionnalité qui est soulevée ici, la requérante ayant, dans le cadre du deuxième moyen, renvoyé aux arguments développés dans le cadre du premier moyen sur le même thème. D’une part, et contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal, le caractère proportionné dudit article doit être apprécié à l’aune des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, dont la résolution 1803 (2008) ( 31 ). Par le biais de cette résolution, le Conseil de sécurité n’a pas considéré que la requérante devait voir ses fonds gelés, mais s’est contenté d’exiger une surveillance quant aux activités financières menées par sa société mère, ce qui tendrait à prouver que des mesures moins contraignantes que celles décidées par le Conseil peuvent être adoptées sans pour autant menacer la réalisation de l’objectif poursuivi. D’autre part, le règlement no 423/2007 contient lui-même des dispositions prévoyant des mesures autres que le gel de fonds ( 32 ), mesures alternatives qui, bien que ex post, auraient parfaitement pu lui être appliquées, le Conseil n’ayant pas prouvé que ces mesures seraient, à l’égard de la requérante, moins efficaces qu’une mesure de gel des fonds. La requérante fait remarquer qu’elle a elle-même, dans le cadre du recours devant le Tribunal, suggéré des mesures alternatives que le Tribunal n’a pas jugé bon de retenir, considérant qu’elle n’avait pas prouvé leur caractère efficace, eu égard à l’objectif légitime poursuivi, et alors même qu’il revenait au Conseil de prouver leur absence d’efficacité ( 33 ). Le Tribunal n’a pas non plus donné suffisamment d’importance à la pratique du Conseil, selon laquelle le gel des fonds des entités appartenant à des entités participant ou apportant un appui à la prolifération nucléaire n’est pas automatique, la requérante rappelant que toutes les filiales de la Bank Melli ne font pas l’objet d’une telle mesure restrictive.

37.

Le Conseil, la République française, le Royaume-Uni et la Commission considèrent que l’interprétation fournie par le Tribunal de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 est correcte. Il ressort tant du libellé de ladite disposition que de l’économie générale de l’article 7, paragraphe 2, que les fonds des entités reconnues comme «détenues ou contrôlées» doivent être gelés. Le pouvoir d’appréciation du Conseil s’exerce donc à l’occasion du contrôle que les critères d’application du littera d) sont remplis. Le Tribunal a d’ailleurs, à titre indicatif, mentionné un certain nombre de critères pertinents pouvant être pris en considération par le Conseil dans ce cadre. La pratique non uniforme de ce dernier n’est pas susceptible de remettre en cause une telle interprétation, le Conseil pouvant ne pas être en mesure d’identifier toutes les entités détenues ou contrôlées par une entité désignée comme participant ou apportant un appui à la prolifération nucléaire. En tout état de cause, la Commission souligne qu’une attitude du Conseil éventuellement contraire au règlement no 423/2007 n’est pas de nature à fonder une quelconque confiance légitime de la requérante. La République française ajoute que le gel s’appliquant automatiquement aux entités détenues ou contrôlées, leur désignation nominative dans l’annexe n’est pas nécessaire. Par ailleurs, lesdites parties à la procédure soutiennent que le Tribunal a fait une correcte application du principe de proportionnalité et a jugé à bon droit, d’une part, que la résolution 1803 (2008) n’est pas un critère à l’aune duquel le caractère proportionné de la décision litigieuse doit être apprécié et, d’autre part, que le gel des fonds d’entités détenues par des entités reconnues comme participant ou appuyant la prolifération nucléaire est proportionné au but légitime poursuivi. Ils concluent unanimement au rejet des premier et deuxième moyens, le Conseil allant jusqu’à considérer que la requérante sollicite, de manière inopportune dans le cadre d’un pourvoi, une nouvelle appréciation des faits.

2. Appréciation

a) Sur la première branche du premier moyen

38.

De manière liminaire, je rappelle que l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 énonce que «[l]’annexe V comprend les personnes physiques et morales, entités et organismes non cités à l’annexe IV qui ont été reconnus […] comme une personne morale, une entité ou un organisme détenu ou contrôlé par une personne, une entité ou un organisme [participant, étant directement associé ou apportant un appui à la prolifération nucléaire] y compris par des moyens illicites».

39.

Je remarque que l’interprétation fournie par le Tribunal de la disposition en cause a été guidée par la jurisprudence de la Cour aux termes de laquelle il convient de tenir compte non seulement de son libellé, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie ( 34 ).

40.

Il découle du libellé même dudit article qu’il faille distinguer deux éléments. Le gel des fonds est certes obligatoire, comme le prévoit l’article 7, paragraphe 2 ab initio, avec l’emploi de l’expression «sont gelés», mais seulement après que le Conseil a identifié des entités reconnues comme étant «détenues ou contrôlées», cette reconnaissance ouvrant ainsi la voie à une appréciation, par le Conseil, de la situation individuelle de chacune des entités susceptibles d’être visées au titre du littera d) de l’article 7, paragraphe 2. Je ne peux donc que partager l’affirmation du Tribunal selon laquelle ledit littera «impose au Conseil de geler les fonds d’une entité ‘détenue ou contrôlée’ par une entité reconnue comme participant à la prolifération nucléaire au sens de l’article 7, paragraphe [2], sous a) ou b), du même règlement, le Conseil appréciant au cas par cas la qualité d’entité ‘détenue ou contrôlée’ des entités concernées» ( 35 ).

41.

L’argumentation de la requérante tendant à contester l’interprétation de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 est quelque peu confuse et me paraît reposer, pour l’essentiel, sur une lecture incomplète ou erronée de l’arrêt attaqué. Elle considère notamment que, en affirmant, au point 63, que «l’extension de la mesure de gel des fonds aux entités détenues ou contrôlées est obligatoire», le Tribunal a consacré le caractère obligatoire de ladite disposition. Or, comme je viens de le démontrer, le point 63 n’est qu’une étape dans le raisonnement du Tribunal qui fixe l’interprétation définitive dudit article au point 67 que je viens de mentionner, lequel consacre une appréciation au cas par cas de la part du Conseil.

42.

Selon la requérante, puisque le Tribunal a également fait mention de critères pertinents pouvant être pris en compte par le Conseil à l’occasion de l’appréciation du fait de savoir si une entité est «détenue ou contrôlée» ( 36 ), cela veut dire qu’il n’a pas jugé suffisant pour être inclus automatiquement dans l’annexe V le fait pour une filiale d’être détenue ou contrôlée par une entité réputée apporter un appui à la prolifération nucléaire. Or, d’une part, le passage pertinent de l’arrêt attaqué fait référence aux critères pouvant être pris en considération pour apprécier la qualité d’entité «détenue ou contrôlée», qui est une notion bien plus large que la seule notion de filiale; et, d’autre part, la mention de ces critères d’appréciation n’entre de toute façon pas en contradiction avec le postulat initial, qui est celui du gel des fonds obligatoire, mais seulement à l’encontre d’entités qui ont été reconnues comme «détenues ou contrôlées», autrement dit qui remplissent les critères d’application de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007. Ces critères, donnés à titre indicatif par le Tribunal et auxquels je serais tenté d’ajouter le secteur d’activité de l’entité en question ( 37 ), sont ceux qui peuvent guider le Conseil lorsqu’il procède à la reconnaissance de ladite entité comme étant «détenue ou contrôlée» au sens de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 et sont tout à fait compatibles avec l’idée d’une appréciation au cas par cas des situations individuelles.

43.

L’extension de la mesure de gel des fonds aux entités visées par ledit article n’est donc obligatoire que dans la mesure où le Conseil estime être en présence d’une entité «détenue ou contrôlée» au sens de cette disposition. Une telle interprétation est par ailleurs en ligne avec le pouvoir d’appréciation traditionnellement reconnu au Conseil en la matière. D’après moi, la confusion chez la requérante naît du fait qu’elle a une lecture seulement littérale dudit article. Elle s’appuie sur la pratique non uniforme du Conseil pour démontrer que toutes les entités détenues par la Bank Melli n’ont pas été inscrites et que cela signifie donc que le Conseil n’est pas tenu de geler les fonds de toutes les entités remplissant les conditions de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007.

44.

Une telle argumentation ne saurait être accueillie.

45.

D’une part, le Conseil doit, aux termes de cet article, geler les fonds d’entités «détenues ou contrôlées» à condition qu’il les ait reconnues comme telles. L’obligation du Conseil d’étendre les mesures de gel à ces entités «détenues ou contrôlées» est intrinsèquement liée à la capacité de l’institution de les identifier. Le Conseil a d’ailleurs rappelé lors de l’audience que, dès 2010, des mesures restrictives ont été étendues à près de quinze nouvelles entités «détenues ou contrôlées» par la Bank Melli ( 38 ).

46.

D’autre part, le critère de la détention ou du contrôle ne peut être, comme je l’ai démontré plus haut, interprété comme un strict critère formel. La référence, dans le texte de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 à l’idée d’une reconnaissance me semble d’autant plus pertinente que nous avons affaire ici à ce qui est traditionnellement présenté comme un système de «sanctions intelligentes» qui ne doit en principe viser que les personnes et entités qui le justifient strictement. Autrement dit, ne doivent être gelés obligatoirement que les fonds des entités reconnues par le Conseil comme «détenues ou contrôlées» au sens de l’article 7, paragraphe 2, sous d), dudit règlement. Dans la lignée de ce que j’ai suggéré dans le cadre de l’analyse du troisième moyen, le fait pour une entité d’être «détenue ou contrôlée» doit s’interpréter à la lumière de l’objectif poursuivi par le règlement no 423/2007. La détention et le contrôle auxquels ledit article fait référence doivent donc être envisagés de manière autonome par rapport au sens ordinaire ou courant de ces deux notions. Des entités peuvent être considérées comme «détenues ou contrôlées» au sens du règlement no 423/2007 quand elles sont naturellement destinées à apporter un appui à la prolifération nucléaire menée par l’État iranien du fait de leur détention totale (100 %) par une société mère, mais ne pourront pas l’être si la participation de la société mère au capital, tout en restant majoritaire, suggère que l’influence exercée est d’une importance bien moins significative. C’est donc en suivant un tel raisonnement que l’on peut comprendre et admettre l’affirmation du Tribunal selon laquelle «le Conseil peut légitimement […] ne pas appliquer l’article 7, paragraphe 2, sous d), [du règlement no 423/2007] à des entités qui, à son avis, ne remplissent pas les critères d’application de cette disposition, et ce en dépit du fait qu’elles sont des filiales des entités reconnues comme participant à la prolifération nucléaire» ( 39 ).

47.

L’interprétation fournie par le Tribunal aux termes de laquelle le Conseil est tenu de geler les fonds des entités qu’il a reconnues comme étant détenues ou contrôlées au sens de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 ne revêt pas le caractère contradictoire que la requérante prétend qu’elle a. L’analyse du Tribunal sur ce point est exempte de toute erreur de droit. La première branche du premier moyen doit donc être rejetée comme non fondée.

b) Sur la seconde branche du premier moyen et le deuxième moyen

48.

La requérante conteste, en premier lieu, le rejet par le Tribunal de la pertinence de la résolution 1803 (2008), dans laquelle le Conseil de sécurité s’est contenté d’exiger de la part des États qu’ils fassent preuve de vigilance à l’égard de la Bank Melli ainsi que de ses agences et succursales ( 40 ). La décision de geler les fonds de la Bank Melli et de ses filiales aurait donc été adoptée sur le fondement d’une disposition disproportionnée eu égard à ce qu’exige le Conseil de sécurité.

49.

Quant au contexte normatif dans lequel est intervenue la décision litigieuse, je me permets de renvoyer aux points 106 et suivants des conclusions présentées ce jour dans l’affaire Bank Melli Iran/Conseil (C-548/09 P). Je me bornerai à rappeler deux éléments. D’une part, le pouvoir reconnu au Conseil sur le fondement de l’article 7, paragraphe 2, trouve son origine dans la position commune 2007/140, qui a mis en œuvre, dans l’ordre juridique de l’Union, la résolution 1737 (2006); cette mise en œuvre repose toutefois sur la seule volonté de l’Union d’inscrire son action dans la perspective de contribuer à la satisfaction des objectifs poursuivis par les Nations unies et de ne pas faire échec à la réalisation des obligations internationales de ses États membres, mais non sur l’existence d’une obligation positive et directe, à la charge de l’Union, de mettre en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité, puisqu’elle n’est pas partie à la Charte des Nations unies. Il ressort d’ailleurs clairement de ladite position commune que l’Union a souhaité aller au-delà de ce que la résolution prescrivait en prévoyant un pouvoir autonome du Conseil en matière d’identification et d’inscription ( 41 ). D’autre part, et par conséquent, une distinction nette doit être établie entre l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 423/2007, qui autorise le Conseil à geler les fonds des personnes, des entités et des organismes identifiés par le Conseil de sécurité, et l’article 7, paragraphe 2, dudit règlement, qui consacre un pouvoir autonome du Conseil de décider du gel des fonds de personnes, d’entités et d’organismes qu’il a lui-même identifiés comme participant, étant directement associés ou apportant un appui à la prolifération nucléaire en Iran et des entités qu’ils détiennent ou contrôlent. Il est, dès lors, exact d’affirmer, comme l’a fait le Tribunal au point 99 de l’arrêt attaqué, que le caractère proportionné des inscriptions d’entités auxquelles le Conseil procède sur le fondement de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 423/2007 ne saurait être apprécié à l’aune de la résolution 1803 (2008) que ledit article n’a jamais eu vocation à mettre en œuvre, mais, au contraire, et comme je le démontrerai ci-après, à la lumière de l’objectif poursuivi par le règlement no 423/2007.

50.

Quant à l’allégation d’une erreur de droit commise par le Tribunal lors de l’appréciation du caractère proportionné de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007, il faut rappeler que, aux termes d’une jurisprudence constante rappelée par le Tribunal au point 100 de l’arrêt attaqué, le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit de l’Union, exige que les actes des institutions ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés ( 42 ).

51.

Dans la droite ligne de cette jurisprudence, je note que la requérante n’a pas contesté la légitimité du but poursuivi, à savoir la lutte contre la prolifération nucléaire en Iran en vue du maintien de la paix et de la sécurité internationale ( 43 ). Elle conteste, en revanche, l’appréciation selon laquelle le gel de ses fonds est une mesure nécessaire et appropriée en vue de l’atteindre, alors qu’elle a invoqué des mesures alternatives ainsi que des mesures de surveillance. Elle considère notamment que les mesures de coopération avec la FSA, la proposition d’une approbation préalable des transactions ou la mise en place d’une politique d’interdiction totale de transaction avec l’Iran ont fait l’objet d’un rejet inapproprié de la part du Tribunal. Ce que la requérante omet de préciser, c’est que ce n’est pas l’efficacité des mesures qui a été ainsi écartée à titre principal, mais la recevabilité de leur invocation. Il ressort, en effet, du point 109 de l’arrêt attaqué que lesdites mesures n’ont été invoquées que lors de l’audience sans que la requérante ait pu apporter une quelconque justification à cette tardiveté. La requérante n’ayant pas contesté, dans le cadre du pourvoi, le constat du caractère tardif de l’invocation desdites mesures, la Cour n’a, à mon sens, pas à se prononcer sur l’appréciation, qui apparaît tout à fait subsidiaire, que le Tribunal a malgré tout fournie quant à la faisabilité ou l’efficacité desdites mesures. Je note, malgré tout, à cet égard qu’exiger de la part de la requérante, comme l’a fait le Tribunal, la démonstration de la faisabilité des mesures alternatives qu’elle-même suggère n’est pas faire peser sur elle une charge de la preuve déraisonnable, mais relève, au contraire, de la mise à l’épreuve ordinaire et de la vérification du bien-fondé des arguments avancés par toute partie à un litige. La requérante ne peut donc pas davantage soutenir qu’il appartenait au Conseil de prouver le caractère infaisable des mesures alternatives hypothétiques qu’elle a invoquées, et plus particulièrement du système de l’approbation préalable et de la surveillance par un mandataire indépendant, le Tribunal ayant par ailleurs lui-même pris position sur le caractère inefficace de la proposition concernant l’interdiction totale de transaction avec l’Iran ( 44 ).

52.

Pour le reste, force est de constater que l’appréciation par le Tribunal du caractère nécessaire et approprié d’une mesure de gel des fonds adoptée à l’encontre d’une entité «détenue ou contrôlée» par une entité participant ou apportant un appui à la prolifération nucléaire est correcte. En effet, l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 vise de manière spécifique une catégorie de personnes, d’entités ou d’organismes qui, du fait de leur détention ou de leur contrôle par une entité visée au titre de l’article 7, paragraphe 2, sous a), ou b), présentent, en relation avec cette dernière, un lien particulièrement étroit. Le constat du Tribunal selon lequel il existe un «risque non négligeable que [l’entité reconnue comme participant à la prolifération nucléaire] exerce une pression sur les entités qu’elle détient ou contrôle» me paraît saisir pleinement la ratio legis du littera d) de l’article 7, paragraphe 2. C’est ce risque de porter atteinte à l’efficacité du système tout entier en le contournant qui justifie l’accent mis sur les mesures préventives et que, par conséquent, les mesures que le Tribunal a pu qualifier d’ex post, bien que nécessairement moins contraignantes, n’offrent pas les garanties suffisantes pour être considérées comme aussi efficaces. C’est donc ce risque qui justifie le traitement particulier auquel sont soumises les entités visées par l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007. Les mesures de gel de fonds adoptées à leur égard n’apparaissent dès lors pas manifestement inappropriées ( 45 ).

53.

Quant au caractère démesuré, il est certes exact d’affirmer que la mesure de gel de fonds a été adoptée à l’encontre de la requérante en raison du fait que cette dernière est, selon le Conseil, détenue intégralement par une entité qui apporte un appui à ladite prolifération et que cette même mesure revêt des conséquences considérables à son égard ( 46 ). La Cour a néanmoins déjà admis, comme le Tribunal l’a rappelé au point 111 de l’arrêt attaqué, que «l’importance des objectifs poursuivis par un acte communautaire [tel qu’un règlement portant adoption de mesures restrictives] est de nature à justifier des conséquences négatives, même considérables, pour certains opérateurs, y compris ceux qui n’ont aucune responsabilité quant à la situation ayant conduit à l’adoption des mesures concernées, mais qui se trouvent affectés notamment dans leurs droits de propriété» ( 47 ). Au regard de l’objectif fondamental et légitime mentionné plus haut et de la nécessité de préserver, dans ce but, l’efficacité des mesures restrictives décidées sur le fondement de l’article 7, paragraphe 2, sous a) et b), du règlement no 423/2007, il y a lieu de considérer que l’appréciation du caractère démesuré des effets du gel des fonds à l’égard de la requérante a donc été menée en faisant une correcte application des principes dégagés par la Cour en la matière et que c’est à bon droit que le Tribunal a conclu que l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007, qui a permis l’extension aux entités détenues ou contrôlées par la Bank Melli et, partant, à la requérante des mesures de gel de fonds, ne viole pas le principe de proportionnalité.

54.

Ainsi, la seconde branche du premier moyen et le deuxième moyen doivent être rejetés comme non fondés.

C – Sur le quatrième moyen tiré d’une erreur d’appréciation quant à l’obligation de motivation de la décision litigieuse

1. Argumentation des parties

55.

Invoquant tant l’article 15, paragraphe 3, du règlement no 423/2007 ( 48 ) que la jurisprudence en la matière, la requérante reproche au Tribunal d’avoir considéré que le Conseil avait satisfait à son obligation de motivation de la décision litigieuse, alors qu’elle ne mentionne, dans son libellé, que l’article 7, paragraphe 2, dudit règlement sans préciser au titre de quelle branche la requérante a été inscrite dans l’annexe. Par ailleurs, ladite annexe ne contient les raisons spécifiques et individuelles qu’à l’égard de la Bank Melli, mais pas de la Melli Bank, le Conseil n’ayant pas davantage indiqué dans la décision litigieuse les raisons qui l’ont porté à croire que la Melli Bank présentait un risque non négligeable de contournement des mesures décidées à l’encontre de sa société mère. Le Tribunal a affirmé à tort, car de manière hâtive, que le Conseil a implicitement estimé que la requérante était détenue au sens de l’article 7, paragraphe 2, sous d), et que c’est donc sur ce fondement qu’elle avait été inscrite sur la liste des entités dont les fonds doivent être gelés. Toutes les filiales de la Bank Melli n’ayant pas été inscrites sur ladite liste, la requérante pouvait légitimement douter que c’est sa seule qualité de filiale qui a motivé son inscription. Le Tribunal ne peut pas non plus affirmer que le Conseil s’est basé sur une présomption réfragable sans entrer en contradiction avec la prescription contenue dans le règlement de donner les raisons spécifiques et individuelles de l’inscription. Le fait que le recours en annulation ait été principalement articulé sur des moyens tirés de l’absence de contrôle de la Bank Melli sur la requérante est sans incidence quant à l’appréciation de l’obligation du Conseil de motiver la décision litigieuse. Enfin, la requérante indique dans le pourvoi qu’elle a entamé une correspondance avec le Conseil auquel elle a demandé communication de son dossier; cette communication lui ayant été refusée, elle considère que c’est la preuve qu’il n’y a jamais eu de motivation détaillée relative à son inscription. Contrairement à ce qu’a conclu le Tribunal, l’obligation pesant sur le Conseil de motiver la décision d’inscription et d’en donner les raisons individuelles et spécifiques n’a pas été respectée.

56.

Le Conseil ainsi que les autres parties à la procédure concluent au rejet du moyen, la décision litigieuse mentionnant dans son libellé l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 423/2007 et le point 4 du tableau B faisant référence aux filiales et aux succursales de la Bank Melli. Or, détenue à 100 % par cette dernière, la requérante ne pouvait ignorer qu’elle était inscrite en sa qualité d’entité détenue ou contrôlée par la Bank Melli. Le Conseil n’est pas tenu de fournir, dans la décision litigieuse, l’ensemble des éléments qui ont motivé sa décision. La requérante a, par ailleurs, compris lesdites raisons, dans la mesure où elle a pu introduire un recours en annulation devant le Tribunal et qu’elle a, dans ce cadre, défendu une position qui consistait essentiellement à contester ses liens juridiques et opérationnels avec la Bank Melli. Partant, la motivation est suffisante et le Tribunal a porté une appréciation juridiquement exempte de tout reproche en faisant application des principes essentiels dégagés par la jurisprudence communautaire en la matière.

57.

La Commission est la seule partie à la procédure qui a considéré, dès le premier tour d’échange des mémoires, que la requérante visait également à contester l’absence de notification individuelle de la décision litigieuse par le Conseil. La Commission considère, à titre principal, qu’il s’agit d’un moyen nouveau qui devrait être jugé par la Cour comme irrecevable. Subsidiairement, la Commission conteste l’existence d’une obligation pesant sur le Conseil de notifier individuellement la décision à la requérante. À l’occasion de la réplique, la requérante soutient que la question de la notification est une des facettes de l’argumentation qu’elle a développée en lien avec la motivation de la décision et qu’elle doit, dès lors, et comme l’a fait le Tribunal dans l’arrêt Bank Melli Iran/Conseil ( 49 ), être examinée par la Cour qui devrait conclure à une violation de l’obligation de notification dans la présente affaire. Cette dernière affirmation est contestée par le Conseil et la République française dans le cadre de leur mémoire en duplique.

2. Appréciation

58.

La requérante conteste, en premier lieu, l’appréciation portée par le Tribunal sur la motivation fournie par le Conseil à l’appui de la décision litigieuse et soutient qu’elle ne contient pas les raisons ayant conduit ladite institution à adopter l’acte en question.

59.

Comme le Tribunal l’a rappelé ( 50 ), l’obligation de motivation est une exigence posée par le droit primaire ( 51 ) et réitérée par l’article 15, paragraphe 3, du règlement no 423/2007 ( 52 ). Afin d’apprécier si l’obligation de motiver une décision adoptée par une institution de l’Union a été respectée, il faut vérifier que la motivation a permis à l’entité qu’elle vise de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. Il n’est cependant pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte est suffisante doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais également de son contexte et de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière ( 53 ). Je constate que ces principes de base ont été réaffirmés par le Tribunal aux points 143 et 145 de l’arrêt attaqué.

60.

Le Tribunal a également rappelé que l’obligation de motivation est un principe essentiel du droit de l’Union auquel il ne peut être dérogé qu’en raison de considérations impérieuses ( 54 ) et que le Conseil est tenu de porter à la connaissance de l’entité visée les raisons «spécifiques et concrètes» lors de l’adoption d’une décision de gel des fonds ( 55 ). Prenant également note du contexte particulier dans lequel s’est inscrite l’adoption de la décision litigieuse, le Tribunal a transposé, par analogie, le raisonnement tenu par la Cour en présence de mesures restrictives adoptées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme en relevant que l’obligation de motiver était d’autant plus importante que les entités visées pour la première fois par une mesure de gel des fonds ne disposent pas d’un droit à une audition préalable ( 56 ). Il ressort également de cette jurisprudence que le Conseil satisfait à son obligation de motiver s’il porte à la connaissance de l’entité visée les motifs ayant poussé à l’adoption d’une décision de gel des fonds à son encontre de manière concomitante à l’adoption de la mesure, ou aussitôt que possible ( 57 ).

61.

Pour répondre à l’argument reproduit devant la Cour par la République française selon lequel il n’est pas nécessaire que les entités détenues ou contrôlées soient mentionnées dans la liste des personnes, des entités et des organismes dont les fonds doivent être gelés, je rappelle qu’il ressort, au contraire, clairement de l’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 que «[l]’annexe V comprend les personnes physiques et morales, entités et organismes […] qui ont été reconnus […] comme […] détenu[s] ou contrôlé[s]». Autrement dit, ledit règlement prévoit bien une inscription formelle des entités visées au titre de l’article 7, paragraphe 2, sous d), sur ladite annexe. L’appréciation du Tribunal sur ce point ( 58 ) est donc correcte.

62.

Ensuite, c’est en application des principes rappelés ci-dessus que le Tribunal est parvenu à la conclusion selon laquelle la motivation de la décision litigieuse, bien que «particulièrement succincte», est suffisante ( 59 ). Son appréciation a été guidée par le fait de savoir si la motivation contenue dans la décision litigieuse avait permis à la requérante de comprendre les raisons pour lesquelles ses fonds ont été gelés. À cet égard, un certain nombre d’éléments plaident en faveur de l’analyse circonstanciée du Tribunal.

63.

Il est vrai que, dans la décision litigieuse, le Conseil a rédigé un paragraphe unique contenant les motifs l’ayant poussé à inscrire la Bank Melli ainsi que ses filiales et succursales sur la liste et que les raisons invoquées dans la colonne «Motifs» concernent en premier lieu la Bank Melli, et non la requérante. Cela étant, si, comme je le crois, l’obligation de motivation doit être appréciée en considérant le fait de savoir si la personne visée a compris les raisons de son inscription et été mise en mesure d’en apprécier — et le cas échéant d’en contester — le bien-fondé, force est alors de constater que le libellé de la décision fait mention de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 423/2007. De plus, sous l’entrée «Nom» du point 4 du tableau B de l’annexe de la décision litigieuse, figure la mention suivante: «Bank Melli, Melli Bank Iran et toutes ses succursales et filiales» ( 60 ). On ne peut pas admettre l’argumentation de la requérante consistant à dire qu’elle a dû «deviner» sur quel littera dudit article 7, paragraphe 2, reposait la décision de gel de ses fonds, puisqu’elle pouvait difficilement ignorer être détenue à 100 % par la Bank Melli. L’article 7, paragraphe 2, sous d), du règlement no 423/2007 énonçant que les fonds des entités reconnues comme «détenues ou contrôlées» seront gelés, la mention des filiales et des succursales contenue au point 4 du tableau B de l’annexe, en sus de la mention spécifique de la requérante et de son adresse postale, constitue, à mon sens, une indication suffisante des motifs de l’inscription. Tirer cette conclusion n’est toutefois pas préjuger de la possibilité, pour la requérante, de demander, postérieurement à l’adoption de la décision, des éléments d’information complémentaires au Conseil sur les raisons qui l’ont conduit à considérer qu’elle présentait un risque non négligeable de subir une pression de la part de sa société mère risquant de l’amener à contourner les mesures restrictives adoptées à l’encontre de cette dernière, dans toute la mesure où celui-ci peut les lui communiquer. J’ajouterai enfin que le fait que la requérante est détenue à 100 % par sa société mère n’est pas indifférent dans l’appréciation que la Cour doit porter sur la suffisance de la motivation. Autrement dit, si le caractère succinct de ladite motivation ne devrait pas constituer, dans notre affaire, un obstacle à sa suffisance, le Conseil devrait probablement fournir un effort un peu plus important dans les cas où la détention ou le contrôle apparaîtrait de manière moins flagrante.

64.

Par ailleurs, la requérante a fait mention, dans le pourvoi, d’une correspondance entamée avec le Conseil relative à la communication de son dossier. Cette invocation est sans incidence pour l’examen du présent moyen. En effet, si tant est que ce grief soit recevable — ce dont je ne suis pas convaincu ( 61 ) –, il ne concerne pas, en tout état de cause, la question de la suffisance de la motivation contenue dans la décision elle-même, mais plutôt celle, distincte, de l’accès au dossier qui n’a toutefois pas été évoquée devant le Tribunal.

65.

Dans ces conditions, le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en considérant que, pour succincte qu’elle soit à l’égard de la requérante, la motivation de la décision litigieuse n’en demeure pas moins adéquate au regard du contexte et suffisante pour permettre, d’une part, à la requérante de comprendre et d’apprécier les raisons ayant poussé le Conseil à adopter ladite décision à son encontre et, d’autre part, au Tribunal d’exercer son contrôle.

66.

Quant à la question de savoir si la décision litigieuse aurait dû être notifiée à la requérante, je dois avouer nourrir de sérieux doutes sur la recevabilité de ce que la requérante a présenté dans son mémoire en réplique comme une ampliation du présent moyen. En effet, aucun moyen soulevé devant le Tribunal ne visait à contester l’absence de notification individuelle de la décision litigieuse par le Conseil. Par conséquent, et à la différence notable de l’arrêt Bank Melli Iran/Conseil ( 62 ) invoqué par la requérante, le Tribunal n’a, dans l’arrêt attaqué, porté aucune appréciation sur ce moyen en raison — précisément — de son inexistence. Dès lors, à supposer même que la requérante ait eu l’intention, au stade du pourvoi, d’aborder cette question, son argumentation n’est, en tout état de cause, pas dirigée contre l’arrêt attaqué.

67.

Nous avons donc manifestement affaire ici à un moyen nouveau, soulevé par la requérante au stade de la réplique en réaction à une interprétation de la Commission du point 116 du pourvoi, point dans lequel la Commission a cru voir une mise en cause de la façon dont la décision avait été portée à la connaissance de la requérante et sur laquelle elle s’est donc longuement exprimée dans le cadre de son mémoire en réponse.

68.

Je n’ai pas la même lecture dudit point. Dans sa version originale, le point 116 énonce, certes, que la jurisprudence du Tribunal «makes it clear that a person must be notified of the reasons for a decision against him at the time at which the decision is made» ( 63 ). Mais en tout état de cause, dans le reste du pourvoi, la requérante n’a jamais articulé d’argumentation tendant à démontrer qu’une obligation de notification individuelle reposait sur le Conseil. Il serait manifestement exagéré de considérer que le seul emploi du terme «notified» dans le mémoire initial vaut articulation d’un moyen relatif à l’obligation de notification individuelle de la décision litigieuse. La requérante ne pouvait de toute façon pas articuler un tel moyen, puisque, comme je l’ai souligné plus haut, elle ne l’a pas invoqué dans le cadre de la procédure devant le Tribunal. Le débat engagé entre les parties à la procédure à l’occasion de la réplique et de la duplique, puis de l’audience, ne devraient pas donc leurrer la Cour quant à la recevabilité des arguments en lien avec la notification, lesquels constituent un nouveau moyen tiré de la violation de l’obligation de notification de la part du Conseil, à ce titre irrecevable, la compétence de la Cour étant limitée à l’appréciation de la solution légale qui a été donnée aux moyens débattus devant les premiers juges ( 64 ).

69.

Le quatrième moyen devrait donc être rejeté, en partie comme étant non fondé et en partie comme étant irrecevable.

IV – Sur les dépens

70.

Aux termes de l’article 122, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Selon l’article 69, paragraphe 2, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Conseil ayant conclu à la condamnation de la requérante aux dépens et cette dernière devant, selon moi, succomber en ses moyens, il y aurait lieu de la condamner aux dépens afférents au pourvoi. La République française, le Royaume-Uni et la Commission ayant pris part à la procédure devant la Cour sur le fondement de l’article 115 du règlement de procédure, ils supporteront leurs propres dépens en vertu de l’article 69, paragraphe 4, dudit règlement.

V – Conclusion

71.

Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de déclarer et d’arrêter ce qui suit:

«1)

Le pourvoi est rejeté.

2)

La Melli Bank plc est condamnée aux dépens exposés par le Conseil de l’Union européenne.»


( 1 ) Langue originale: le français.

( 2 ) Arrêt du 9 juillet 2009 (Rec. p. II-2629).

( 3 ) JO L 163, p. 29.

( 4 ) JO L 103, p. 1.

( 5 ) S/RES/1737 (2006)*.

( 6 ) S/RES/1747 (2007).

( 7 ) JO L 61, p. 49.

( 8 ) S/RES/1803 (2008).

( 9 ) Ibidem, point 10. Je relève que la version anglaise de ladite résolution fait mention des «branches and subsidiaries», que l’on peut traduire par «succursales et filiales», distinction qui me paraît plus éclairante que celle contenue dans sa version française.

( 10 ) JO L 163, p. 43.

( 11 ) Position commune du Conseil, du 7 août 2008 (JO L 213, p. 58).

( 12 ) La Bank Melli, société mère de la requérante, a, pour ce qui la concerne, introduit un recours en annulation contre la décision litigieuse devant le Tribunal (arrêt du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, T-390/08, Rec. p. II-3967). Elle a formé un pourvoi à l’encontre de l’arrêt du Tribunal, enregistré par le greffe de la Cour sous le numéro C-548/09 P, qui fait l’objet d’un traitement distinct de celui de la présente affaire. Des conclusions sont présentées ce même jour dans l’affaire C-548/09 P, Bank Melli Iran/Conseil.

( 13 ) La requérante a, en effet, introduit devant le Tribunal deux demandes de référé, l’une dans le cadre de l’affaire T-246/08, l’autre dans le cadre de l’affaire T-332/08 visant à ce que l’application du point 4 du tableau B de l’annexe de la décision litigieuse soit suspendue à son égard. Ces deux demandes ont été rejetées par ordonnance du président en date des 27 août et 17 septembre 2008, les dépens ayant été réservés.

( 14 ) Article cité au point 6 des présentes conclusions.

( 15 ) Voir point 69 de l’arrêt attaqué.

( 16 ) Voir points 61 et 120 de l’arrêt attaqué.

( 17 ) Point 121 de l’arrêt attaqué.

( 18 ) Voir point 10 de mes conclusions rendues dans l’affaire Arkema/Commission (C-520/09 P, pendante devant la Cour).

( 19 ) Arrêts du 14 juillet 1972, ICI/Commission (48/69, Rec. p. 619, points 136 et 137), et du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission (C-97/08 P, Rec. p. I-8237, point 60).

( 20 ) Voir arrêts Akzo Nobel e.a./Commission (précité, point 60) et du 20 janvier 2011, General Química e.a./Commission (C-90/09 P, Rec. p. I-1, point 39).

( 21 ) Voir point 124 de l’arrêt attaqué.

( 22 ) Arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C-402/05 P et C-415/05 P, Rec. p. I-6351, point 336). La violation de l’obligation de motivation, à proprement parler, fait l’objet d’un moyen distinct, en l’occurrence le quatrième (voir points 55 et suiv. des présentes conclusions).

( 23 ) Arrêt Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (précité, points 339 et 340).

( 24 ) Avis du 24 juin 2008 à l’attention des personnes, entités et organismes qui ont été inclus par le Conseil dans la liste des personnes, entités et organismes auxquels l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 423/2007 s’applique (annexe V) (JO C 159, p. 1).

( 25 ) Point 121 de l’arrêt attaqué.

( 26 ) Point 124 de l’arrêt attaqué.

( 27 ) Arrêt Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (précité, point 358).

( 28 ) À la différence de l’article 48, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui n’était pas en vigueur au moment où l’arrêt attaqué a été rendu, l’article 6, paragraphe 2, de la CEDH prévoit que la présomption d’innocence doit être garantie à «toute personne accusée d’une infraction» (italique ajouté par mes soins).

( 29 ) Point 63 de l’arrêt attaqué.

( 30 ) Points 64 et 65 de l’arrêt attaqué.

( 31 ) Voir point 9 des présentes conclusions.

( 32 ) La requérante cite, à cet égard, les articles 5, 7, paragraphes 3 et 4, 13 et 16 du règlement no 423/2007.

( 33 ) Lesdites mesures alternatives suggérées par la requérante sont présentées au point 87 de l’arrêt attaqué et rejetées au point 107 dudit arrêt.

( 34 ) Voir point 61 de l’arrêt attaqué.

( 35 ) Point 67 de l’arrêt attaqué.

( 36 ) Parmi lesquels le niveau d’indépendance opérationnelle de l’entité en question ou l’impact de la surveillance menée par une autorité publique (voir point 69 de l’arrêt attaqué).

( 37 ) Au point 69 de l’arrêt attaqué, le Tribunal exclut des critères pertinents la nature de l’activité de l’entité concernée. Même si je ne crois pas qu’il faille en faire un critère exclusif, je suis toutefois convaincu que l’activité de l’entité est un critère pertinent, comme l’atteste manifestement la situation de la requérante et comme l’a confirmé le Conseil lors de l’audience.

( 38 ) Voir point 3 du tableau B du règlement d’exécution (UE) no 668/2010 du Conseil, du 26 juillet 2010, mettant en œuvre l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 423/2007 (JO L 195, p. 25), qui liste quinze entités considérées comme «détenues ou contrôlées» par la Bank Melli.

( 39 ) Point 73 de l’arrêt attaqué.

( 40 ) Voir point 10 de la résolution 1803 (2008), cité au point 9 des présentes conclusions.

( 41 ) Voir dixième considérant ainsi qu’article 5, paragraphe 1, de la position commune 2007/140.

( 42 ) Parmi une jurisprudence abondante, voir arrêts du 18 novembre 1987, Maizena e.a. (137/85, Rec. p. 4587, point 15); du 13 novembre 1990, Fedesa e.a. (C-331/88, Rec. p. I-4023, point 13); du 7 décembre 1993, ADM Ölmühlen (C-339/92, Rec. p. I-6473, point 15), ainsi que du 7 juillet 2009, S.P.C.M. e.a. (C-558/07, Rec. p. I-5783, point 41 et jurisprudence citée).

( 43 ) Voir point 75 du pourvoi.

( 44 ) Voir point 109 de l’arrêt attaqué.

( 45 ) Sur le fait que seul le caractère manifestement inapproprié d’une mesure est susceptible d’en affecter la légalité, voir arrêts du 12 décembre 2006, Allemagne/Parlement et Conseil (C-380/03, Rec. p. I-11573, point 145 et jurisprudence citée), ainsi que S.P.C.M. e.a. (précité, point 42).

( 46 ) Voir, par analogie, arrêt Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (précité, point 358).

( 47 ) Ibidem (point 361 et jurisprudence citée).

( 48 ) Article cité au point 8 des présentes conclusions.

( 49 ) Arrêt précité, points 86 à 88.

( 50 ) Voir point 143 de l’arrêt attaqué.

( 51 ) Article 253 CE.

( 52 ) Voir point 8 des présentes conclusions.

( 53 ) Voir, inter alia, arrêt du 1er février 2007, Sison/Conseil (C-266/05 P, Rec. p. I-1233, point 80).

( 54 ) Voir points 143 et 144 de l’arrêt attaqué.

( 55 ) Voir point 144 de l’arrêt attaqué.

( 56 ) Voir point 143 de l’arrêt attaqué.

( 57 ) Voir point 144 de l’arrêt attaqué.

( 58 ) Voir point 146 de l’arrêt attaqué.

( 59 ) Voir point 148 de l’arrêt attaqué.

( 60 ) Italique ajouté par mes soins.

( 61 ) Je rappelle, en effet, que, aux termes d’une jurisprudence constante, «permettre à une partie de soulever pour la première fois devant la Cour un moyen et des arguments qu’elle n’a pas soulevés devant le Tribunal reviendrait à l’autoriser à saisir la Cour, dont la compétence en matière de pourvoi est limitée, d’un litige plus étendu que celui dont a eu à connaître le Tribunal. Dans le cadre d’un pourvoi, la compétence de la Cour est donc limitée à l’appréciation de la solution légale qui a été donnée aux moyens et aux arguments débattus devant les premiers juges» (arrêt du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission, C-514/07 P, C-528/07 P et C-532/07 P, Rec. p. I-8533, point 126 et jurisprudence citée).

( 62 ) Précité à la note 12.

( 63 ) Italique ajouté par mes soins.

( 64 ) Voir, parmi une jurisprudence abondante, arrêts précités Sison/Conseil (point 95 et jurisprudence citée) et Suède e.a./API et Commission (point 126 et jurisprudence citée). Si la Cour devait en juger autrement, je me permets de renvoyer aux points 32 et suiv. des conclusions présentées ce jour dans l’affaire Bank Melli Iran/Conseil (C-548/09 P), aux termes desquels j’ai suggéré à la Cour de considérer qu’une obligation de notification individuelle de la décision litigieuse repose sur le Conseil, tout en admettant que la violation de cette obligation ne peut être sanctionnée sur le terrain de la légalité, mais, au contraire, devrait l’être seulement sur celui de l’opposabilité de ladite décision.