32002R1829

Règlement (CE) n° 1829/2002 de la Commission du 14 octobre 2002 modifiant l'annexe du règlement (CE) n° 1107/96 en ce qui concerne la dénomination Feta (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

Journal officiel n° L 277 du 15/10/2002 p. 0010 - 0014


Règlement (CE) no 1829/2002 de la Commission

du 14 octobre 2002

modifiant l'annexe du règlement (CE) n° 1107/96 en ce qui concerne la dénomination Feta

(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté européenne,

vu le règlement (CEE) n° 2081/92 du Conseil du 14 juillet 1992 relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d'origine des produits agricoles et des denrées alimentaires(1), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 2796/2000 de la Commission(2), et notamment son article 17,

considérant ce qui suit:

(1) Conformément à l'article 17, paragraphe 1, du règlement (CEE) n° 2081/92, les autorités helléniques ont transmis à la Commission, le 21 janvier 1994, une demande d'enregistrement de la dénomination Feta relativement à un fromage.

(2) Par le règlement (CE) n° 1107/96 de la Commission du 12 juin 1996 relatif à l'enregistrement des indications géographiques et des appellations d'origine au titre de la procédure prévue à l'article 17 du règlement (CEE) n° 2081/92 du Conseil(3), modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 564/2002(4), la dénomination Feta a été enregistrée en tant qu'appellation d'origine protégée.

(3) Le Royaume de Danemark, la République fédérale d'Allemagne et la République française ont subséquemment formé un recours en annulation de cet enregistrement au titre de l'article 230 du traité.

(4) Dans son arrêt du 16 mars 1999, dans les affaires jointes C-289/96, C-293/96 et C-299/96, la Cour de justice a prononcé l'annulation partielle du règlement (CE) n° 1107/96 pour autant qu'il procède à l'enregistrement de la dénomination Feta en tant qu'appellation d'origine protégée. La Cour a considéré que la Commission n'avait pas "dûment tenu compte de l'ensemble des facteurs que l'article 3, paragraphe 1, du règlement de base l'obligeait à prendre en considération", en soulignant notamment que la Commission avait minimisé l'importance à attribuer à la situation existant dans les États membres.

(5) Le règlement (CE) n° 1070/1999 de la Commission(5) modifiant l'annexe du règlement (CE) n° 1107/96 a supprimé en conséquence la dénomination Feta de ladite annexe et du registre des appellations d'origine protégées et des indications géographiques protégées.

(6) La Commission a adressé par la suite à l'ensemble des États membres, en date du 15 octobre 1999, un questionnaire détaillé destiné à l'évaluation exhaustive et actualisée de la situation prévalant au sein de chaque État membre eu égard à la production, la consommation et, de manière générale, la connaissance avérée par le consommateur communautaire de la dénomination Feta.

(7) En ce qui concerne la production de fromage Feta, les États membres ont été invités à faire état des éléments suivants: l'existence d'une réglementation nationale ou d'usages codifiés spécifiques; les conditions de la mise en place d'une telle production, en particulier les objectifs sous-jacents, la nature privée ou publique d'une telle initiative, les marchés et le profil des consommateurs visés; la ventilation par année des quantités produites; la destination finale de la production; les dénominations exactes des marques utilisées.

(8) En ce qui concerne la consommation de fromage Feta, les États membres ont été invités à faire état des éléments suivants: l'existence d'une réglementation régissant la mise sur le marché de ce fromage; la ventilation par année des quantités consommées; la provenance géographique du fromage consommé; les étiquettes concrètes présentes sur le marché.

(9) En ce qui concerne la connaissance de la dénomination Feta, les États membres ont été invités à faire état des éléments suivants: les définitions de ce terme, notamment dans les ouvrages à caractère général tels que dictionnaires ou encyclopédies; les études ou enquêtes démoscopiques pertinentes ou de tout autre élément subsidiaire.

(10) Les éléments d'information reçus ont fait l'objet d'une synthèse globale et par État membre de la part de la Commission, synthèse à laquelle les États membres ont ultérieurement apporté certaines corrections ou modifications.

(11) Il en découle que, dans douze États membres, la production de fromage Feta n'est pas régie par une réglementation spécifique définissant les caractéristiques qualitatives, les modalités d'élaboration et le cas échéant l'aire géographique délimitée de production. En Grèce, les usages en matière d'élaboration de fromage Feta ont été progressivement affinés et codifiés depuis 1935, et la délimitation de l'aire géographique de production, traditionnellement fondée sur des usages loyaux et constants, a été consacrée en 1988. Le Danemark dispose, depuis 1963, et les Pays-Bas ont disposé, de 1981 à 1998, d'une législation concernant les spécifications qualitatives devant être respectées lors de la production de fromage Feta. Il convient de signaler par ailleurs que le terme Feta apparaît dans des réglementations communautaires sur les restitutions à l'exportation pour le lait et les produits laitiers ou sur la nomenclature combinée douanière. Ces réglementations répondent à des préoccupations d'ordre exclusivement douanier et ne cherchent aucunement à traduire la perception du consommateur ou à régir des droits de propriété industrielle, pas plus qu'elles ne préjugent de la dénomination retenue lors de la commercialisation effective dudit fromage, celle-ci dépendant exclusivement de considérations liées aux attentes des consommateurs des différents pays de destination concernés.

(12) Il apparaît que la production de fromage Feta au sens de la nomenclature combinée douanière est inexistante au Luxembourg et au Portugal. Elle est ou a été statistiquement et économiquement marginale ou ponctuelle dans neuf États membres: l'Italie, la Belgique, la Finlande, l'Autriche, l'Irlande, la Suède, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et l'Espagne.

(13) Il apparaît que quatre États membres ont en revanche une production de fromage Feta substantielle. La Grèce produit ce fromage depuis l'Antiquité, presque exclusivement pour le marché hellénique. Les statistiques officielles remontent à 1931 et font état pour cette date de 25000 tonnes produites, la production atteignant désormais annuellement 115000 tonnes environ. Le fromage portant la dénomination Feta en Grèce est exclusivement élaboré à partir de lait de brebis ou d'un mélange de lait de brebis et de chèvre.

(14) Le Danemark produit ce fromage depuis les années 30, essentiellement en vue de son exportation. Des statistiques ne sont disponibles que depuis 1967 et font état pour cette date de 133 tonnes produites. La production a dépassé 1000 tonnes en 1971, puis, à la suite de l'octroi par la Communauté, à partir de 1975, de restitutions à l'exportation de fromage Feta, la production a connu une croissance exponentielle, puisqu'elle s'élevait à 9868 tonnes en 1975 et qu'elle a culminé à 110932 tonnes en 1989. La production a marqué depuis 1995 une courbe descendante pour atteindre 27640 tonnes en 1998 en raison principalement de la demande moindre de pays tiers et de la diminution progressive des restitutions à l'exportation de ce fromage. La production danoise est presque exclusivement fondée sur l'utilisation de lait de vache.

(15) La France a commencé à produire ce fromage en 1931. Les statistiques, qui ne sont disponibles que depuis 1980, font état pour cette date de 875 tonnes produites. De 1988 à 1998, la production a oscillé entre 7960 tonnes et 19964 tonnes. Destinée au départ à satisfaire la demande des communautés arménienne et hellénique de France, la production est aujourd'hui destinée à l'exportation tant vers les autres États membres que vers les pays tiers à concurrence de 77,5 % en moyenne. La production française est fondée sur l'utilisation essentiellement de lait de brebis et dans une moindre mesure de lait de vache.

(16) L'Allemagne produit ce fromage depuis 1972 (78 tonnes enregistrées). La production a dépassé les 5000 tonnes en 1977, franchi la barre des 15000 tonnes en 1980 et atteint 24000 tonnes en 1985. Depuis, elle oscille entre 19757 et 39201 tonnes. La production, initialement destinée aux seules communautés immigrées installées en Allemagne et originaires des Balkans, s'est progressivement dirigée également vers les pays du Moyen-Orient et des Balkans, en raison notamment de l'octroi de restitutions à l'exportation, ainsi que vers les autres États membres. La production allemande est fondée sur l'utilisation quasi exclusive de lait de vache.

(17) Il convient de signaler que les statistiques susvisées, reprenant les données transmises par chaque État membre à l'égard de sa propre production, ne sauraient avoir qu'une valeur indicative car l'absence de cadre réglementaire spécifique dans la quasi-totalité des États membres, ainsi que la définition fort générale du terme Feta apparaissant dans la nomenclature combinée douanière, conduisent à des estimations approximatives et à des données statistiquement fort divergentes lors de l'analyse croisée des réponses transmises. Il s'avère par ailleurs difficile, dans de nombreux États membres, d'effectuer une distinction entre production intérieure et réexportation, ce qui engendre, le cas échéant, des statistiques erronées.

(18) En ce qui concerne les législations des États membres en matière de consommation de fromage Feta, seules sont applicables, en règle générale, les dispositions communautaires et nationales en matière de commercialisation, présentation, ou étiquetage relatives aux fromages en général. La Grèce et le Danemark sont les seuls États membres à posséder une législation détaillée spécifique en la matière, l'Autriche réservant quant à elle la mention Feta aux seuls produits helléniques en application d'une convention bilatérale gréco-autrichienne de 1971.

(19) En ce qui concerne l'ampleur de la consommation de fromage Feta dans la Communauté, l'analyse des réponses des États membres a permis de constater, d'une part, que l'évaluation brute fondée sur le total des quantités de fromage Feta produites et importées, diminué des quantités exportées, s'est révélée inadéquate dans certains cas et que, dans d'autres cas, elle a même produit des résultats aberrants, l'impossibilité de prendre en compte les stocks existants, les quantités réexportées ou d'autres éléments aboutissant à une consommation théoriquement négative dans certains États membres. D'autre part, la mise sur le marché de fromage Feta au sens de la nomenclature combinée douanière n'est pas systématiquement effectuée sous une telle dénomination, soit en raison de restrictions d'ordre juridique limitant l'utilisation de ce terme aux produits répondant à certaines exigences plus spécifiques, soit en raison de considérations d'ordre commercial conduisant à privilégier des dénominations distinctes appréciées par les consommateurs auxquels ce fromage s'adresse. Sous réserve de l'incertitude relative qui en découle, les réponses transmises par les États membres ont permis de constater à titre indicatif que lors de l'adhésion de la Grèce à la Communauté, environ 92 % de la Feta consommée sur le territoire communautaire l'étaient en Grèce. Une augmentation graduelle de la consommation dans les autres États membres a postérieurement été enregistrée, environ 73 % de la consommation communautaire de Feta s'effectuant désormais sur le territoire hellénique. En ventilant la consommation dans chaque État membre par personne et par an, l'on constate que, en Espagne, au Luxembourg, au Portugal, en Italie et aux Pays-Bas, la consommation par personne et par an de fromage Feta est inférieure ou égale à 0,010 kg, soit 0,08 % de la consommation communautaire; en Irlande, au Royaume-Uni, en Autriche, en France, en Suède, en Belgique et en Finlande, la consommation par personne et par an de fromage Feta oscille entre 0,040 kg et 0,150 kg, soit entre 0,32 % et 1,22 % de la consommation communautaire; en Allemagne, la consommation par personne et par an est de 0,290 kg, soit 2,36 % de la consommation communautaire; au Danemark, elle est de 0,700 kg par personne et par an soit 5,0 % de la consommation communautaire; enfin en Grèce, elle est de 10500 kg par personne et par an, soit 85,64 % de la consommation communautaire.

(20) En vertu des informations transmises par les États membres, les fromages revêtant la dénomination Feta sur le territoire communautaire font généralement explicitement ou implicitement référence sur leur étiquette, nonobstant leur production dans d'autres États membres que la Grèce, au territoire, aux traditions culturelles ou à la civilisation helléniques, par le biais de mentions ou de dessins présentant une connotation hellénique marquée. Il en découle que le lien entre la dénomination Feta et le terroir hellénique est volontairement suggéré et recherché car constitutif d'un argument de vente inhérent à la réputation du produit d'origine, engendrant ainsi des risques effectifs de confusion du consommateur. Les étiquettes de fromage Feta non originaire de Grèce, commercialisé effectivement sur le territoire communautaire sous une telle dénomination sans faire allusion directement ou indirectement à la Grèce, minoritaires arithmétiquement, constituent de surcroît une proportion extrêmement réduite du marché communautaire de la Feta eu égard aux quantités de fromage effectivement commercialisées par leur biais.

(21) Il découle des ouvrages à caractère général, tels que dictionnaires ou encyclopédies, ou à caractère spécialisé transmis par les États membres, que le terme Feta n'apparaît pas dans les ouvrages de langue italienne et portugaise. Il est exclusivement fait référence à un fromage grec à base de lait de brebis et de chèvre dans l'ensemble des ouvrages de langue grecque, espagnole et néerlandaise. En langue suédoise, il est fait référence à un fromage d'origine grecque à base de lait de brebis et de chèvre, également produit désormais dans d'autres pays à base de lait de vache, le Danemark et la Suède étant nommément cités. En langue danoise, il est fait essentiellement référence à un fromage grec à partir de lait de brebis et de chèvre, mais également à un fromage élaboré au Danemark et dans les Balkans, voire sans aucune référence géographique particulière. En langue finnoise, il est exclusivement fait référence à un fromage grec ou d'origine grecque à base de lait de brebis ou de lait de brebis et de chèvre, à l'exception d'un ouvrage ne se référant à aucune provenance géographique. En langue allemande, il est fait référence à un produit élaboré en Grèce et dans la plupart des pays du sud-est de l'Europe, ainsi que dans des pays d'outre-mer. En langue française, quatorze des dix-sept ouvrages transmis se réfèrent à un fromage grec au lait de brebis et/ou de chèvre, un ouvrage se référant à un fromage produit en Grèce et dans les Balkans, un ouvrage se référant à un fromage d'origine grecque dont il existe beaucoup d'imitations en Europe, et un ouvrage se référant à un fromage grec à base de lait de brebis et de chèvre dont la fabrication s'est élargie à d'autres pays de la région d'origine et plus récemment en Europe et en Amérique du Nord en utilisant du lait de vache. En langue anglaise, quatre ouvrages font référence à un fromage à base de lait de brebis élaboré en particulier en Grèce, quatre ouvrages font référence à un fromage grec à base de lait de brebis ou de chèvre, un ouvrage fait référence à un fromage originaire de Grèce et du Moyen-Orient, traditionnellement élaboré à partir de lait de brebis ou de chèvre et désormais parfois avec du lait de vache; deux ouvrages font référence à un fromage originaire de Grèce à base de lait de brebis ou de chèvre, produit également dans d'autres pays, généralement en tant qu'ingrédient de mets grecs; un ouvrage fait état de l'existence d'une production de Feta en Nouvelle-Zélande, en Bulgarie, en Yougoslavie, à Chypre, au Danemark et en Grèce, pays d'origine; un ouvrage se réfère à un fromage élaboré en Grèce et dans les Balkans; un ouvrage se réfère à un fromage grec à base de lait de brebis ou de chèvre, élaboré aux États-Unis à base de lait de vache; quatre ouvrages suggèrent une filiation étroite entre le fromage élaboré dans la Grèce antique et le fromage Feta grec actuel. L'évolution chronologique des définitions du terme Feta ne montre pas une diminution de la corrélation et de l'identification entre la Grèce et le fromage en cause, toutes langues confondues.

(22) L'ensemble des éléments d'information transmis par les États membres ont été transmis au comité scientifique, ci-après dénommé "le comité", qui a rendu à l'unanimité un avis y afférent en date du 24 avril 2001.

(23) Le comité précise tout d'abord qu'"(...) une appellation d'origine ou une indication géographique ne peut être considérée comme étant devenue une dénomination commune d'un type de produit que si, sur le territoire concerné, une partie significative du public intéressé n'estime plus que l'indication reste une indication géographique (...); en ce qui concerne le territoire sur lequel la transformation doit s'être produite, il faut prendre en considération la situation de l'ensemble de la Communauté européenne, étant donné la portée communautaire du règlement et le fait que la Communauté européenne se compare à un marché unique. De ce fait, il n'est pas possible de considérer exclusivement ou principalement la situation dans un seul État membre pris isolément. L'article 3 du règlement stipule qu'il faut tenir compte de la situation existant dans l'État membre où le nom a son origine et dans les États membres de consommation ainsi que dans les autres États membres en incluant la législation communautaire et nationale pertinente. (...) En ce qui concerne le fait de savoir quel est le public intéressé, cela dépend du type de produit et du public auquel le produit s'adresse. Dans le cas présent, s'agissant d'un fromage à consommer principalement par le consommateur final (mais aussi par des acheteurs commerciaux tels que les restaurants, les industries alimentaires, etc.), la cible en question est le grand public. Par conséquent, c'est aux yeux du grand public que l'appellation ou indication en cause doit avoir perdu sa signification géographique d'origine. Pour évaluer la perception du grand public, on peut procéder à des constatations 'directes', telles que des sondages d'opinion ou autres enquêtes, aussi bien qu''indirectes', telles que le niveau de la production et de la consommation, le type et la nature d'étiquetage utilisé, le type et la nature de publicité adoptée à l'égard de ces produits, la mention dans les dictionnaires, etc".

(24) En ce qui concerne la production de fromage Feta, le comité constate que la production en Grèce représente 60 % de la production communautaire totale de ce fromage, et 90 % de la production communautaire à base de lait de brebis et de chèvre. Le fromage Feta à base de lait de vache, représentant 34 % de la production totale communautaire, est quant à lui largement destiné aux pays tiers.

(25) En ce qui concerne la consommation, le Comité souligne que 73 % de la consommation de fromage Feta a actuellement lieu en Grèce, soit 10,5 kg par an et par habitant, contre 1,76 kg par an et par habitant pour l'ensemble des autres citoyens de l'Union européenne. Au Danemark et en Allemagne, la consommation de Feta est, selon le comité, certes plus élevée mais néanmoins respectivement 15 et 36 fois inférieure à celle de la Grèce. Selon le comité, la consommation de Feta rapportée à la consommation totale de fromage par habitant est également significative: en particulier, en Grèce sont consommés 10,5 kg de Feta par an et par habitant pour une consommation annuelle de 14 kg de fromage par an; au Danemark 0,7 kg par an et par habitant pour une consommation annuelle de 15 kg de fromage; en France 0,13 kg de Feta par an et par habitant pour une consommation annuelle de 20 kg de fromage; en Allemagne, 0,29 kg de Feta par an et par habitant pour une consommation annuelle de 19 kg de fromage.

(26) Le comité constate incidemment qu'une "fraction significative de la production hors de la Grèce est exportée vers des pays tiers, sans influence sur la situation de la dénomination Feta dans le marché unique" et que "l'absence de production et de consommation dans de nombreux États membres n'a pas d'effet sur le caractère générique ou non générique de la dénomination."

(27) En ce qui concerne l'analyse des législations nationales ou communautaires pertinentes, le comité considère que douze États membres ne disposent d'aucune réglementation spécifique et appliquent à la Feta les règles générales, communautaires et nationales relatives aux fromages. Le Comité constate que la Grèce dispose d'une réglementation visant le fromage Feta depuis 1935, le Danemark depuis 1963, et que l'Autriche réserve la dénomination Feta aux seuls produits originaires de Grèce en vertu d'un accord bilatéral de 1971.

(28) En ce qui concerne les modalités de commercialisation de fromage Feta au sein de la Communauté, le comité constate que l'on propose au consommateur "deux produits dont la composition est différente, comme les propriétés organoleptiques, sous la même dénomination". Le comité souligne que les étiquettes de fromage Feta non originaire de Grèce font apparaître des références directes ou indirectes à la Grèce, ce qui implique que la dénomination Feta n'est pas utilisée en tant que "nom commun, sans aucune connotation géographique, synonyme de fromage blanc de brebis ou de vache, en saumure (...)". Selon le comité, il s'agit d'un "produit généralement présenté comme d'origine grecque (...)".

(29) Le comité «conclut à l'unanimité au caractère non générique de la dénomination Feta, notamment pour les motifs suivants:

(30) La production et la consommation de Feta sont massivement concentrées en République hellénique. Les produits élaborés dans d'autres États membres (Allemagne, Danemark, France), éventuellement dénommés Feta, sont essentiellement produits à base de lait de vache, selon une technologie différente et largement exportés vers des pays tiers. Il ne peut donc être conclu au caractère générique de la dénomination Feta puisque sur le marché unique le produit grec original est dominant. Il faut également noter que dans les États membres non producteurs et non consommateurs significatifs, la dénomination Feta n'a pu devenir générique en raison de l'absence d'usage à titre de nom commun. Dans la perception du consommateur le nom Feta évoque toujours une origine grecque et de ce fait il ne s'agit pas d'un nom devenu commun et donc générique sur le territoire communautaire.

(31) S'agissant des législations nationales ou communautaires pertinentes, le comité scientifique note que dans la plupart des États membres il n'existe aucune législation ou réglementation spécifique pour le produit concerné. Seuls la Grèce et le Danemark disposent d'une réglementation particulière. La réglementation danoise qui autorise l'élaboration d'un produit dénommé "Danish feta" se distingue fortement de la réglementation grecque au plan technique (utilisation de lait de vache ultrafiltré et non de lait de brebis et de chèvre, avec additifs jusqu'en 1994). Par ailleurs, le Danemark ne rapporte pas la preuve que la dénomination Feta était devenue un nom commun utilisable avec adjonction du nom du pays producteur (Danish Feta) au moment où l'État membre considéré en a autorisé l'usage (1963), de même la preuve du caractère générique n'a pas été rapportée pour la période postérieure.

(32) Le fait que la dénomination Feta soit utilisée dans la nomenclature douanière commune ou dans la réglementation communautaire relative aux restitutions à l'exportation n'a aucune influence sur la perception, la connaissance et la protection dans le marché unique de la dénomination considérée, s'agissant d'une législation communautaire non pertinente dans ce contexte.»

(33) La Commission a pris acte de l'avis, consultatif, du comité scientifique. Elle considère que l'analyse globale exhaustive de l'ensemble des éléments d'ordre juridique, historique, culturel, politique, social, économique, scientifique et technique communiqués par les États membres ou résultant des investigations que la Commission a entreprises ou commanditées, permet de considérer qu'il ne satisfait notamment à aucun des critères requis par l'article 3 du règlement (CEE) n° 2081/92 en vue de retenir le caractère générique d'une dénomination, et que, en conséquence, la dénomination Feta n'est pas devenue le "nom d'un produit agricole ou d'une denrée alimentaire qui, bien que se rapportant au lieu ou à la région où ce produit agricole ou cette denrée alimentaire a été initialement produit ou commercialisé, est devenu le nom commun d'un produit agricole ou d'une denrée alimentaire".

(34) Le caractère générique de la dénomination Feta n'ayant pas été établi, la Commission a vérifié, conformément à l'article 17, paragraphe 2, du règlement (CEE) n° 2081/92, que la demande des autorités helléniques visant à l'enregistrement de la dénomination Feta en tant qu'appellation d'origine protégée est conforme aux articles 2 et 4 dudit règlement.

(35) La dénomination Feta constitue une dénomination traditionnelle non géographique au sens de l'article 2, paragraphe 3, du règlement (CEE) n° 2081/92. Les termes "région" et "lieu" visés audit paragraphe ne peuvent être interprétés que dans une optique géomorphologique et non administrative, dans la mesure où les facteurs naturels et humains inhérents à un produit donné sont susceptibles de transcender les frontières administratives. Il est toutefois exclu, en vertu dudit paragraphe, que l'aire géographique inhérente à une dénomination puisse couvrir un pays dans son intégralité. Dans le cas de la dénomination Feta, il a dès lors été constaté que l'aire géographique délimitée visée à l'article 2, paragraphe 2, point a), deuxième tiret, dudit règlement couvre exclusivement le territoire de la Grèce continentale ainsi que le département de Lesbos. L'ensemble des autres îles et archipels en sont exclus, car ils ne satisfont pas aux facteurs naturels et/ou humains requis. La délimitation administrative de l'aire géographique est en outre affinée et précisée du fait que le cahier des charges présenté par les autorités helléniques mentionne des exigences impératives et cumulatives: en particulier, l'aire d'origine de la matière première est substantiellement restreinte du fait que le lait servant à l'élaboration de fromage Feta doit provenir de brebis et chèvres de races locales élevées traditionnellement et dont l'alimentation doit se fonder impérativement sur la flore présente dans les aires de pâturage des régions éligibles.

(36) Il a été constaté que l'aire géographique découlant de la délimitation administrative ainsi que les exigences du cahier des charges présentent une homogénéité adéquate permettant de satisfaire aux exigences de l'article 2, paragraphe 2, point a), et de l'article 4, paragraphe 2, point f), du règlement (CEE) n° 2081/92. Le pâturage extensif et la transhumance, pierres angulaires de l'élevage des brebis et des chèvres appelées à fournir la matière première du fromage Feta, sont le fruit d'une tradition ancestrale permettant de s'adapter aux variations climatiques et à leurs conséquences sur la végétation disponible. Cela a conduit au développement de races ovines et caprines autochtones de petite taille, très sobres et résistantes, aptes à survivre dans un environnement peu généreux d'un point de vue quantitatif mais qualitativement doté d'une flore spécifique extrêmement diversifiée, conférant au produit fini une saveur et un arôme particuliers. L'osmose entre les facteurs naturels et les facteurs humains spécifiques, en particulier la méthode traditionnelle d'élaboration requérant impérativement un égouttage sans pression, a ainsi conféré au fromage Feta une réputation internationale insigne.

(37) Le cahier des charges présenté par les autorités helléniques incluant l'ensemble des éléments requis par l'article 4 du règlement (CEE) n° 2081/92 et l'analyse formelle dudit cahier des charges n'ayant pas révélé d'erreur manifeste d'appréciation, il convient d'enregistrer la dénomination Feta en tant qu'appellation d'origine protégée.

(38) Il convient de modifier en conséquence le règlement (CE) n° 1107/96.

(39) Le comité institué au titre de l'article 15 du règlement (CEE) n° 2081/92 n'a pas émis d'avis dans le délai fixé par son président. Conformément à l'article 15, paragraphe 4, du règlement (CEE) n° 2081/92, la Commission a transmis la proposition au Conseil. Le Conseil n'ayant pas agi dans le délai de trois mois prévu à l'article 15, paragraphe 5, dudit règlement, il convient que la Commission arrête les mesures proposées,

A ARRÊTÉ LE PRÉSENT RÈGLEMENT:

Article premier

1. La dénomination "Φέτα" (Feta) est inscrite dans le registre des appellations d'origine protégées et des indications géographiques protégées, prévu à l'article 6, paragraphe 3, du règlement (CEE) n° 2081/92, en tant qu'appellation d'origine protégée (AOP).

2. À l'annexe du règlement (CE) n° 1107/96, dans la rubrique "fromages" et "Grèce" de la partie A, la dénomination "Φέτα" (Feta) est ajoutée.

Article 2

Le présent règlement entre en vigueur le jour de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes.

Le présent règlement est obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre.

Fait à Bruxelles, le 14 octobre 2002.

Par la Commission

Franz Fischler

Membre de la Commission

(1) JO L 208 du 24.7.1992, p. 1.

(2) JO L 324 du 21.12.2000, p. 26.

(3) JO L 148 du 21.6.1996, p. 1.

(4) JO L 86 du 3.4.2002, p. 7.

(5) JO L 130 du 26.5.1999, p. 18.