31993D0003

93/3/CEE: Décision de la Commission, du 4 décembre 1992, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CEE (IV/32.797 et 32.798 - Lloyd's Underwriters'Association and The Institute of London Underwriters) (Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi)

Journal officiel n° L 004 du 08/01/1993 p. 0026 - 0031


DÉCISION DE LA COMMISSION du 4 décembre 1992 relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CEE (IV/32.797 et 32.798 - Lloyd's Underwriters' Association and The Institute of London Underwriters) (Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi.) (93/3/CEE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté économique européenne,

vu le règlement no 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (1), modifié en dernier lieu par l'acte d'adhésion de l'Espagne et du Portugal, et notamment son article 2,

vu la notification et la demande d'exemption et/ou d'attestation négative soumises à la Commission le 7 juin 1989 par l'association des souscripteurs du Lloyd's et l'Institut des souscripteurs de Londres pour deux accords, à savoir « arrangements en matière d'assurance sur corps » (Joint Hull Understandings - JHU) et « respect de l'accord d'apérition » (Respect of Lead Agreement - RLA),

vu la décision de la Commission, du 1er octobre 1990, d'engager la procédure dans cette affaire,

vu le résumé de la demande et de la notification (2) publié conformément à l'article 19 paragraphe 3 du règlement no 17,

vu l'avis du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes,

considérant ce qui suit:

I. LES FAITS

A. La notification

(1) Le 7 juin 1989, l'Institut des souscripteurs de Londres (Institute of London Underwriters - ILU) et l'Association des souscripteurs du Lloyd's (Lloyds Underwriters Association - LUA) ont formellement notifié à la Commission, en vue d'une attestation négative ou d'une exemption, deux accords dénommés respectivement « Arrangements en matière d'assurance sur corps » (« Joint Hull Understandings » - JHU) et « Respect de l'accord d'apérition » (« Respect of Lead Agreement » - RLA). Cette notification formelle avait été précédée d'une notification informelle et d'une série d'observations portant sur les deux accords présentées par lettres du 7 juillet 1988. Les accords notifiés portent sur l'assurance maritime sur corps et machines.

B. Les associations d'entreprises

(2) L'ILU est une association d'assureurs (souscripteurs) fondée en 1884 spécialisée dans l'assurance maritime et aviation, à Londres. Elle exerce les fonctions habituelles d'une association commerciale, et fournit notamment différents services administratifs à ses membres. Ceux-ci sont environ au nombre de cent douze, dont 50 % sont des sociétés britanniques. L'autre moitié consiste en filiales ou succursales de sociétés réparties dans l'ensemble du monde développé.

(3) La Lloyd's de Londres est une société de souscripteurs privés, dotée de la personnalité juridique, qui constitue un véritable marché international pour presque n'importe quel type d'assurance. L'encaissement de primes s'élève à quelque 6 milliards de livres sterling par an. Les trois quarts de ce chiffre d'affaires sont réalisés à l'extérieur du Royaume-Uni. Les polices sont souscrites par des particuliers dont la responsabilité est illimitée. Le Lloyd's compte actuellement quelque trente et un mille membres, regroupés dans quatre cents consortiums environ. Les souscripteurs acceptent les affaires au nom des consortiums qu'ils représentent. Les membres peuvent adhérer à plusieurs consortiums.

(4) La LUA a été fondée en 1909; elle représente l'ensemble des consortiums du Lloyd's pratiquant l'assurance maritime, qui sont au nombre de deux cent trente environ.

(5) Les deux associations ont un certain nombre de commissions communes qui ont pour mission de suivre des questions d'intérêt commun dans certains secteurs et qui réunissent des spécialistes de chacun de ceux-ci. L'une de ces commissions est le Joint Hull Committee (JHC) dont il est question ci-après. Le JHC comprend seize personnes provenant en nombre égal de la LUA et de l'ILU. Le JHC a pour objet de surveiller les questions d'intérêt pour le marché et de gérer les deux accords notifiés, le JHU et le RLA.

(6) L'ILU et la LUA regroupent la très grande majorité des souscripteurs pratiquant l'assurance maritime à Londres. Ensemble, elles représentent environ 90 % de la totalité des contrats d'assurance maritime au Royaume-Uni, le reste étant traité par quelques sociétés ne faisant pas partie de ces deux associations.

C. Le marché

(7) L'assurance sur corps de navires est principalement souscrite aux États-Unis d'Amérique, en France, en Norvège et au Royaume-Uni. Ce dernier détient une part significative du volume mondial total de l'assurance sur corps non soumise à des conditions impératives de localisation. Les parties estiment que près de 25 % de l'assurance sur corps dans la Communauté sont assurés à Londres et que ce pourcentage est encore plus élevé pour les navires immatriculés à l'extérieur de la Communauté. Toujours selon les parties, la réputation du marché de Londres en matière d'assurance maritime est telle qu'un grand nombre de risques sont « apérités » (c'est-à-dire placés initialement mais partiellement) à Londres, les marchés étrangers s'alignant sur Londres pour les cotations et l'indemnisation des sinistres, de sorte que, dans une certaine mesure, « l'influence du marché de Londres est légèrement supérieure à sa véritable part du marché. »

(8) L'encaissement total de primes des deux associations dans le secteur de l'assurance maritime est estimé à quelque 4 milliards de livres sterling par an, dont 3 milliards proviennent de l'assurance sur corps et machines.

(9) Généralement, les armateurs font appel aux courtiers d'assurances qu'ils chargent de traiter en leur nom afin que leur flotte soit placée aux meilleures conditions offertes sur le marché mondial. Selon les parties notifiantes, « la concurrence en matière d'assurance sur corps existe davantage entre les marchés qu'à l'intérieur de ceux-ci. » En conséquence, le marché de Londres en tant qu'unité est en concurrence directe avec les autres marchés, les risques passant de l'un à l'autre en fonction des conditions que les courtiers peuvent obtenir, mais il existe peu de concurrence sur le marché de Londres proprement dit, où les engagements sont pris par les souscripteurs. Le marché s'en remet aux courtiers pour faire jouer la concurrence.

(10) L'assurance maritime se caractérise par le fait qu'elle est normalement pratiquée sur une base de coassurance; en effet, l'importance des montants en jeu incite presque toujours les souscripteurs à partager la couverture d'un risque donné, en limitant leur participation à une fraction du risque total. Il arrive qu'un risque particulier soit placé sur plusieurs marchés (c'est-à-dire à la fois à Londres et, par exemple, en France). Il est habituel, même pour les coassureurs, de se réassurer pour une partie du risque, et lorsque celui-ci est couvert partiellement sur un autre marché, les souscripteurs sur cet autre marché peuvent se réassurer à Londres.

(11) Une autre caractéristique de ce marché réside dans le fait que seul un petit nombre de souscripteurs (les « apériteurs ») étudient chaque risque en détail, c'est-à-dire l'évaluent et fixent les conditions et les primes. Les autres coassureurs (the followers) se fondent dans une large mesure sur le jugement des apériteurs pour décider de participer ou non à la couverture du risque; dès lors, la réputation de l'apériteur a une certaine importance pour le courtier à la recherche d'autres coassureurs sur le marché. Le placement d'un risque est effectué à l'aide d'une proposition ou contrat qui donne une description détaillée du risque et de la couverture proposée. Habituellement, un risque « corps de navire » est couvert par une vingtaine de souscripteurs, voire par une cinquantaine lorsque les sommes en jeu sont très importantes.

(12) De même, en cas de demande d'indemnisation, bien que chaque souscripteur ait théoriquement le droit de décider lui-même, en pratique, ce sont les apériteurs qui prennent la décision, les suiveurs se contentant de l'entériner. Les paiements sont centralisés, comme les primes.

(13) Une autre caractéristique de l'assurance sur corps est qu'une période assez longue peut s'écouler entre le paiement de la prime, d'une part, et la déclaration et l'indemnisation, d'autre part. La plupart des indemnisations surviennent bien après l'année d'assurance au cours de laquelle le sinistre est survenu, habituellement dans la troisième ou la quatrième année, et très peu de sinistres, en dehors des accidents majeurs, sont même déclarés avant la deuxième année. C'est la raison pour laquelle, lors du renouvellement, l'assureur tient compte des résultats non seulement de l'exercice en cours, mais de plusieurs années, jusqu'à huit si c'est possible. Ce délai est considéré comme adéquat pour disposer d'un aperçu complet des indemnisations et se faire une idée du laps de temps qui s'écoule entre le moment où le sinistre survient et le moment où la demande d'indemnisation est faite.

(14) Selon les parties notifiantes, « les prix constituent le principal élément sur lequel joue la concurrence, mais les règlements des sinistres antérieurs, la sécurité et la réputation des assureurs ont également une importance considérable. »

(15) Parmi les autres caractéristiques de ce marché, on peut citer la fréquence élevée des sinistres et le rôle que jouent l'armateur, le pavillon, l'équipage et d'autres variables dans l'évaluation du risque. L'importance de ces facteurs supplémentaires et en particulier l'identité de l'armateur est telle « qu'en matière d'assurance sur corps, la prime d'un navire donné pourrait être dix fois supérieure à celle d'un navire identique appartenant à un armateur ayant une bonne réputation. »

D. Les accords notifiés

i) Arrangements en matière d'assurance sur corps (Joint Hull Understandings - JHU)

(16) Le JHU comporte trois clauses (clauses 3, 2B et 11) qui limitent la liberté des membres de l'ILU et de la LUA de fixer leurs propres taux, particulièrement pour les renouvellements. À la suite de la communication de griefs qui leur a été adressée, la LUA et l'ILU ont cessé d'appliquer ces clauses depuis le 25 avril 1991. Ces clauses sont exposées ci-après.

(17) La clause 3 faisait référence à un graphique annexé au JHU. Dans ce graphique figuraient les majorations minimales de primes recommandées pour un rapport des sinistres aux primes donné. Le taux de majoration augmentait au fur et à mesure que le rapport des sinistres aux primes se détériorait. Ainsi, pour un navire unique présentant un solde (rapport des sinistres aux primes) créditeur de 17 % (c'est-à-dire lorsque les primes payées dépassaient les sinistres de 17 %), la majoration s'élevait à 53 %. Si le solde devenait débiteur, par exemple de 25 %, elle passait à 90 %. Pour des flottes plus importantes, les taux pouvaient varier dans certaines marges et les taux compris dans ces marges étaient inférieurs à ceux applicables à un navire unique. Pour les rapports des sinistres aux primes (c'est-à-dire les soldes débiteurs) dépassant 25 %, les apériteurs étaient libres d'appliquer les majorations supplémentaires qu'ils voulaient. Si les conditions de renouvellement étaient inférieures aux minima prévus dans le graphique, « il est fortement recommandé que les quatre apériteurs se consultent avant de donner une cotation et qu'ils communiquent le résultat de leurs délibérations au Joint Hull Committee. » Cette possibilité de s'écarter des données du graphique a été introduite le 9 février 1989. Avant cette date, les souscripteurs n'avaient pas le droit de s'en écarter sans le consentement du JHC. Aucune sanction n'était prévue à l'encontre des souscripteurs qui décidaient de manière unilatérale de s'écarter du graphique, si ce n'est que, selon les demandeurs, « ils s'exposaient à de sérieuses critiques de la part des apériteurs concernés ou que, lorsque l'affaire était suffisamment grave, le président du Joint Hull Committee ou son adjoint pouvait avoir un entretien privé avec le ou les souscripteurs considérés comme fautifs. »

(18) Les parties n'ont pas été en mesure d'expliquer de manière précise comment le graphique avait été établi initialement, car il existait depuis « si longtemps qu'aucun souscripteur en activité ne pouvait s'en souvenir. » Elles ont toutefois expliqué qu'il reflétait « une expérience générale » du marché et que les modifications y étaient apportées sur la base d'une évaluation générale de facteurs tels que les « fluctuations des taux de change. . ., l'inflation et l'évolution des coûts dans le secteur de la construction et de la réparation navales. »

(19) La clause 2B prévoyait que, lorsque les résultats nécessitaient une majoration, la franchise (en anglais, le deductible) devait être augmentée de 50 % « de la majoration en pourcentage, avec un minimum de 10 % ».

(20) La clause 11 prévoyait que, lorsqu'un paiement n'était pas effectué immédiatement au comptant, mais qu'il était différé, le rabais normalement applicable aux paiements comptants sur-le-champ devait être ramené de 15 à 10 %.

(21) La clause 1(a) du JHU notifiée prévoyait que « les contrats de réassurance sur corps "quote-part et excédent obligatoire" étaient limités aux affaires FOM (Flag and Ownership/Management) du pays concerné, sauf dispositions particulières expressément acceptées par la totalité des souscripteurs. » En d'autres termes, sauf convention contraire, les contrats de réassurance étaient ainsi limités aux navires dont le pays d'immatriculation, de l'armateur et de la gestion était le même que celui du navire réassuré. Cette clause a été modifiée à la demande de la Commission et recommande maintenant que les réassureurs s'informent de la nationalité des armateurs, étant donné que cette information est considérée comme pertinente pour l'évaluation du risque.

(22) Les autres clauses du JHU contiennent des lignes directrices et des critères uniformes relatifs aux modalités techniques du renouvellement des polices. Essentiellement, ces clauses identifient des standards de prudence et fournissent des méthodes pour réduire la confusion à propos de la véritable réputation de l'assuré ou à propos de l'étendue de la police sur corps et machines. Les souscripteurs sont libres d'ignorer ces lignes directrices et peuvent, s'ils le veulent, en utiliser d'autres. Ces lignes directrices concernent notamment:

a) la méthode de classification des navires;

b) la nécessité de présenter des informations sur l'armateur et sa réputation de manière uniformisée (pour faciliter les comparaisons et éviter les erreurs d'interprétation);

c) le traitement des changements de valeur des navires et, en particulier, la nécessité de distinguer les augmentations simplement réalisées pour garder la valeur réelle constante et celles qui accroissent la propension du navire à des pertes partielles;

d) l'estimation des navires en cas de perte partielle et de perte totale, et en particulier, la nécessité de s'assurer que l'estimation des navires en cas de perte partielle et de perte totale ne diverge pas sans raison;

e) la centralisation et l'octroi de ristournes pour les périodes au cours desquelles les navires restent au port - quand un navire reste à quai, il fait l'objet d'un risque plus faible que s'il était pleinement opérationnel. Dans de tels cas, une ristourne est généralement faite à l'assuré. Le montant et la période de référence sont négociés librement au moment de la conclusion de chaque contrat d'assurance. La demande de ristourne est adressée à un bureau central géré par la LUA et l'ILU. Le personnel de ceux-ci a une connaissance approfondie des ports et des conditions portuaires dans le monde entier, et il vérifie que le navire a effectivement été immobilisé pendant la période revendiquée. La clause fait référence à des ristournes pour des périodes de trente jours accomplis, ce qui est la période de référence normale. Cependant, chaque souscripteur ou groupe de souscripteurs est libre d'octroyer des ristournes pour des périodes de moins de trente jours;

f) la nécessité de ne pas porter préjudice au droit des assureurs de mettre en cause la clause de navigabilité;

g) la nécessité pour le créancier hypothécaire d'obtenir une couverture séparée étant donné que la police sur corps et machines ne le protège pas contre toute négligence de l'armateur;

h) la définition des risques couverts par la police d'assurance sur corps et sur machines.

ii) Respect de l'accord d'apérition (Respect of Lead Agreement - RLA)

(23) Cet accord prévoyait essentiellement que les apériteurs ayant souscrit les premiers à la police sur corps devaient être autorisés à continuer à jouer le rôle d'apériteurs lorsque la police devait être renouvelée. Il était interdit aux autres coassureurs ou à d'autres apériteurs potentiels de chercher à jouer le rôle d'apériteur lors du renouvellement. En d'autres termes, les autres souscripteurs étaient privés de la possibilité de faire une offre ou d'entrer en concurrence pour les contrats de renouvellement, et les armateurs étaient privés de la possibilité de choisir leur assureur et, le cas échéant, de bénéficier de prix inférieurs qui auraient résulté d'une concurrence entre apériteurs.

(24) En outre, conformément à la clause 1 du RLA, les membres des deux associations convenaient de ne souscrire à une proposition qu'à condition que deux apériteurs de chaque association fussent signataires (sauf si un non-signataire était apériteur avant la signature du RLA). Il en résultait qu'en principe toute concurrence entre l'ILU et la LUA était interdite.

(25) La presque totalité des membres de l'ILU et de la LUA ont adhéré au RLA. Si l'un des membres violait l'accord, son association (soit l'ILU, soit la LUA) pouvait annoncer qu'il était considéré comme n'y adhérant plus. De ce fait, aucun autre souscripteur ne pouvait jouer le rôle de coassureur avec lui comme apériteur. Cela s'est produit à une occasion au moins, et, bien que les parties affirment que le souscripteur concerné « n'a de ce fait perdu aucune affaire », l'annonce a toutefois été ressentie comme « une sérieuse sanction ».

(26) À la demande de la Commission, la LUA et l'ILU ont renoncé à cet accord le 25 avril 1991. Il a été remplacé par un nouveau texte qui dispose:

1) Lorsqu'un risque dont la couverture est à renouveler est coté par un ou plusieurs groupes concurrents de souscripteurs, le ou les apériteurs du ou des groupes concurrents peuvent consulter le ou les apériteurs actuels. Dans ce cas, le ou les apériteurs actuels permettent la consultation de leurs archives sur les statistiques relatives à la flotte.

2) Le groupe de souscripteurs actuel et le groupe de souscripteurs concurrent ne discutent pas les conditions de renouvellement proposées.

3) Les souscripteurs de la proposition actuelle avertissent leur apériteur, au moins deux mois avant la date de renouvellement du premier navire, de leur intention de se retirer du groupe de souscripteurs actuel pour se joindre à un groupe de souscripteurs potentiellement concurrent.

La disposition relative au préavis n'est pas applicable si la proposition concurrente est couverte à 100 %.

E. Observations des tiers

(27) La Commission n'a pas reçu d'observations de tiers à la suite de la publication de la communication requise par l'article 19 paragraphe 3 du règlement no 17.

II. APPRÉCIATION JURIDIQUE

ARTICLE 85 PARAGRAPHE 1

A. Les décisions d'associations d'entreprises

(28) L'ILU et la LUA sont deux associations d'entreprises au sens de l'article 85 paragraphe 1. Le JHU et le RLA constituent chacun des décisions d'associations d'entreprises au sens de l'article 85 paragraphe 1.

B. Les effets sur le commerce

(29) Un accord portant sur l'assurance maritime comprenant le transport est précisément, par sa nature, susceptible d'affecter le commerce entre États membres. Le commerce est en outre affecté du fait que les membres de l'ILU et de la LUA fournissent ce service aux armateurs ou par l'intermédiaire de courtiers établis dans d'autres États membres. De plus, eu égard à la part du marché britannique détenue par les membres des deux associations (près de 100 %), cet effet peut être considéré comme appréciable.

C. Les restrictions de la concurrence

i) Arrangements en matière d'assurance sur corps (le Joint Hull Understandings - JHU)

Le JHU contenait trois clauses qui restreignaient la concurrence en violation de l'article 85 paragraphe 1.

a) La clause 3 - Le graphique

(30) Le graphique équivalait à un accord de fixation des prix. Il avait pour objet d'empêcher la conclusion des renouvellements à des tarifs inférieurs aux minima qui y étaient indiqués. Il limitait la possibilité des apériteurs de négocier lors de ces renouvellements des taux différents de ces derniers, que les membres des deux associations étaient obligés de respecter jusqu'au 9 février 1989. Dans le cas contraire, bien qu'il n'y eût pas de sanction, ces souscripteurs s'exposaient à des « critiques » des autres souscripteurs. L'absence de sanction ne signifiait toutefois pas qu'il n'y avait pas d'accord de fixation des prix au sens de l'article 85 paragraphe 1, puisqu'un tel accord, par sa nature même, restreint la concurrence et est explicitement interdit par l'article 85 paragraphe 1.

(31) En ce qui concerne l'effet, les demandeurs n'ont pas été en mesure de déterminer exactement le nombre de fois où le graphique a pu être enfreint. Ils ont toutefois déclaré que, à leur connaissance, « un certain nombre de renouvellements » chaque année n'auraient pas respecté le graphique alors que les infractions à celui-ci étaient considérées comme plutôt exceptionnelles. En d'autres termes, la grande majorité des renouvellements respectaient les minima fixés par le graphique tandis que les violations de ce graphique étaient considérées comme plutôt exceptionnelles.

(32) De plus, le fait que, du 9 février 1989 au 25 avril 1991, les parties étaient libres de s'écarter du graphique ne signifie pas qu'il n'y ait pas eu d'infraction à l'article 85 paragraphe 1 pendant cette période. Les hausses de prix recommandées tombent également sous le coup de l'interdiction de l'article 85 paragraphe 1 (3). Le maintien de l'obligation pour les parties de déclarer les cas où elles s'écartaient du graphique aurait également eu un effet dissuasif et aurait donc renforcé la nature restrictive du graphique.

b) La clause 2 B

(33) Cette clause limitait la liberté des souscripteurs de fixer leurs propres niveaux de majoration des franchises (en anglais deductibles) et restreignait la concurrence au sens de l'article 85 paragraphe 1.

c) La clause 11

(34) Il est de jurisprudence constante (4) qu'un accord sur le montant des rabais à accorder tombe sous le coup de l'interdiction de la fixation des prix de l'article 85 paragraphe 1. De toute évidence, cette clause impliquait un accord sous-jacent prévoyant l'octroi d'un rabais de 15 % en cas de paiement immédiat au comptant. Lorsque le paiement était différé, ce rabais devait être ramené à 10 %.

(35) Les clauses susmentionnées ont été supprimées par l'ILU et la LUA le 25 avril 1991.

(36) Les autres clauses du JHU sont de nature technique et ne contiennent pas de dispositions qui empêchent, restreignent ou faussent le jeu de la concurrence d'une manière appréciable à l'intérieur du marché commun.

ii) Le respect de l'accord d'apérition (Respect of Lead Agreement - RLA)

(37) Le RLA restreignait la concurrence sur le marché londonien en garantissant que les apériteurs qui avaient les premiers assuré le risque continuaient à le souscrire au moment du renouvellement. Ces apériteurs étaient donc protégés contre la concurrence d'apériteurs potentiels qui auraient pu souhaiter offrir des conditions ou des prix plus avantageux. Cet accord a été abandonné par l'ILU et la LUA le 25 avril 1991 et remplacé par un nouvel accord.

(38) Le RLA restreignait également la concurrence entre l'ILU et la LUA en prévoyant que deux apériteurs de chaque association devaient être signataires d'une proposition. Les courtiers n'étaient donc pas libres de concentrer leur attention sur une association lorsqu'ils le souhaitaient ou lorsque cette formule aurait produit des économies de coût et des prix plus avantageux.

(39) Le nouveau RLA permet à un ou plusieurs groupes concurrents de souscripteurs de remettre en cause la position du groupe de souscripteurs en place. Le nouveau RLA oblige en outre ce dernier à permettre la consultation de ses archives sur les statistiques relatives à la flotte de façon à faciliter au groupe concurrent l'évaluation du risque. Le nouveau RLA interdit en outre toute discussion des conditions de renouvellement entre le groupe existant et le groupe concurrent de souscripteurs. Pour ces motifs, on peut conclure que le nouveau RLA ne contient pas de clause qui empêche, restreint ou fausse le jeu de la concurrence dans une mesure appréciable à l'intérieur du marché commun,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Sur la base des informations dont elle dispose, la Commission n'a pas de motif d'intervenir au titre de l'article 85 paragraphe 1 du traité CEE à l'égard des accords notifiés tels qu'ils ont été modifiés, à savoir les nouveaux arrangements en matière d'assurance sur corps (New Joint Hull Understanding) et le respect de l'accord d'apérition (Respect of Lead Agreement).

Article 2

Les associations d'entreprises suivantes sont destinataires de la présente décision:

- Lloyd's Underwriters' Association,

Lloyd's,

1, Lime Street,

UK-London EC3M 7HA,

- The Institute of London Underwriters,

49, Leadenhall Street,

UK-London EC3A 2BE. Fait à Bruxelles, le 4 décembre 1992. Par la Commission

Leon BRITTAN

Vice-président

(1) JO no 13 du 21. 2. 1962, p. 204/62. (2) JO no C 87 du 8. 4. 1992, p. 4. (3) Décision 85/75/CEE de la Commission (JO no L 35 du 7. 2. 1985, p. 20) et arrêt de la Cour dans l'affaire 45/85 Verband der Sachversicherer c/Commission (Recueil 1987, p. 405). (4) Affaires jointes 209 à 215 et 218/78 Van Landewijck c/Commission (Recueil 1980, p. 3125); affaires jointes 240 à 242, 261, 262, 268 et 269/84 Stichting Sigarettenindustrie c/Commission (Recueil 1985, p. 3831).